M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car l’article 3 est essentiel en ce qu’il vise à rééquilibrer les relations entre les opérateurs et les collectivités.
Le Gouvernement n’en veut pas, car il est très content – je ne sais pas pourquoi ! – d’une situation dans laquelle les opérateurs sont aujourd’hui tout puissants. Ils peuvent annoncer un déploiement sans être liés en aucune façon par cette déclaration. Or, et on a eu l’occasion de le dire tout à l’heure, les annonces de déploiement ont des conséquences sur les collectivités, puisqu’elles ne peuvent plus déployer de réseaux là où les opérateurs ont dit qu’ils le feraient. Et ils peuvent dire des tas de choses ! On en reparlera sans doute dans la suite de la discussion.
Qu’en est-il des déclarations faites par les opérateurs en janvier 2011 pour les 3 600 communes où ils ont annoncé qu’ils allaient déployer des réseaux ? Pour l’instant, je crois qu’il n’y a pas eu un seul commencement d’exécution !
Cette situation convient au Gouvernement ; c’est naturellement son droit. Mais, en ce qui nous concerne, et c’est un point essentiel de la proposition de loi, nous voulons rééquilibrer la relation et non, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, imposer quoi que ce soit aux opérateurs, ni être contraignants à leur égard.
Oui, nous voulons une relation équilibrée, c’est-à-dire réunir autour de la table l’État – car c’est lui qui est éventuellement amené à financer et qui, à notre sens, même si ce n’est plus tout à fait exact dans les faits, a une vocation en matière d’aménagement du territoire –, les collectivités et les opérateurs, pour ensuite négocier, discuter de ce qui est bon pour le territoire.
Ici, on va considérer qu’il faut en priorité du très haut débit ; là, on va dire que le très haut débit peut attendre et ne déployer que du haut débit ; ailleurs encore, on va demander surtout un effort sur la téléphonie mobile. Enfin, lorsque tout le monde est tombé d’accord, on contractualise. C’est cela une négociation dans une relation équilibrée, monsieur le ministre.
Disant cela, je rejoins un certain nombre d’orateurs qui ne sont pas forcément favorables à la proposition de loi mais qui veulent, comme nous, une bonne coopération entre les opérateurs et les collectivités.
Cet article me paraissant tout à fait essentiel, vous comprendrez, monsieur le ministre, que je ne puisse pas donner un avis favorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. L’article 3 est bien évidemment essentiel.
Nous avons des schémas directeurs et une complémentarité entre acteurs privés et publics. Les engagements pris seront mis en œuvre sur la durée. Dialogue, contractualisation, points d’étape et éventuelles sanctions constituent alors autant de dispositions absolument indispensables.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, pour explication de vote.
M. Philippe Leroy. L’article 3 nous situe au cœur du problème. Nous en rediscuterons, puisque nous n’en sommes ce soir qu’à la première lecture de cette proposition de loi, sans savoir du reste ce que sera la suite de son parcours dans les mois qui viennent, une fois qu’elle aura été adoptée dans la rédaction issue des amendements du Sénat.
L’essentiel, c’est que ce débat ait lieu et que nous puissions rééquilibrer les relations entre les opérateurs privés et les réseaux d’initiative publique.
Si nous souhaitons soutenir le modèle choisi par l’État, l’adoption de l’article 3 est tout simplement fondamentale, mes chers collègues. En la matière, nous ne pouvons pas céder aux craintes et aux peurs qui se font entendre.
On nous a dit que des dispositions de ce type bloqueraient ou freineraient les décisions d’investissement des opérateurs privés.
M. Yves Rome. C’est faux !
M. Philippe Leroy. Mais faisons l’expérience ! Pour le moment, on ne peut pas dire que la situation soit satisfaisante, en dépit des bons résultats de nos politiques d’aménagement numérique.
Aujourd’hui, nous devons absolument rééquilibrer les relations entre les deux catégories d’opérateurs, publics et privés. Le schéma que nous avons peu à peu choisi, au cours des dix dernières années, privilégie un équilibre que nous souhaitons maintenir, notamment au moment de déployer les réseaux de fibre optique.
N’ayons pas peur de l’avenir ! Rien n’est pire que l’immobilisme : si nous ne remettons pas en cause la situation actuelle, nous nous plaçons totalement entre les mains des opérateurs privés. Je conçois que ces derniers doivent avoir toute liberté dans leurs initiatives, mais pourquoi ne pas prévoir de contrepoids en faveur de l’initiative publique ?
Je suivrai donc l’avis de M. le rapporteur, qui est favorable au maintien de l’article 3. (MM. Joël Labbé et Claude Jeannerot applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Il faut dire les choses telles qu’elles sont, comme l’a d’ailleurs fait notre collègue de gauche Bernadette Bourzai, en contestant le modèle de déploiement mis en place depuis quatre ans.
J’observe que M. le rapporteur et d’autres sont pris en otages. Ils nous disent en effet que cette proposition de loi ne vise à modifier que de façon marginale le cadre fixé. Pourtant, sur les travées de gauche, on entend un tout autre point de vue ! Le modèle auquel vous avez rêvé, chers collègues, une sorte de « RFF de la fibre » (Protestations sur les travées du groupe socialiste.), un monopole imposé par le haut, vous voulez le réintroduire par le bas !
Si je suis tout à fait favorable à une coopération, je suis en revanche hostile à une confrontation. Or c’est bien ce que ce texte organise, comme si la vertu, c’était le public, et le vice, le privé.
M. Yves Rome. On n’a jamais dit cela !
M. Bruno Retailleau. Je pourrais vous donner un certain nombre d’exemples de réseaux d’initiative publique dans des départements,…
M. Yves Rome. Chez vous !
M. Bruno Retailleau. … là où 76 000 prises ont été financées par l’argent du contribuable, mais aucun opérateur n’a souhaité s’investir !
M. Yves Rome. Oui, chez vous !
M. Bruno Retailleau. De grâce, cessons de prétendre que le public fait forcément bien les choses, alors que le privé se contenterait de le prendre en otage.
Relisez l’article 3, mes chers collègues ! J’y vois tout d’abord un problème de rédaction, puisqu’on peut lire, s’agissant des opérateurs privés, qu’ils « s’engagent sur le volume de lignes construites jusqu’au point de mutualisation situé en pied d’immeuble ». Or, nous devrions au moins nous entendre sur ce point, dans le cadre actuel, le point de mutualisation en zone dense n’est pas du tout le même qu’ailleurs, puisqu’il remonte progressivement au fur et à mesure que l’habitat est plus dispersé.
Par ailleurs, cet article, beaucoup trop intrusif, n’est pas raisonnable. Selon moi, l’adoption de l’amendement que je m’apprête à soutenir permettrait justement d’obtenir une coopération et d’établir un vrai rapport de force entre les opérateurs et les collectivités, sans déséquilibrer le cadre actuel.
Quoi qu’il en soit, chacun doit assumer ses positions. Soit on veut casser le cadre actuel pour en changer ; c’est la position de la gauche, et on peut la comprendre. Soit, comme moi, on veut protéger le cadre actuel, parce que, après quatre années de gros investissements, il a acquis une stabilité certaine et qu’il ne faut pas tuer la dynamique qui émerge sur le terrain.
Ayons donc le courage de dire les choses et d’accepter chacun nos propres positions !
M. Jacques Chiron. On le fait !
M. le président. La parole est à M. Yves Rome, pour explication de vote.
M. Yves Rome. Vos propos, monsieur Retailleau, sont particulièrement excessifs et caricaturaux. Vous avez cité l’exemple fâcheux de certaines collectivités territoriales. Pour ma part, je vous renverrais bien, si j’osais, au cas de la Vendée, qui s’est empressée de satisfaire à des obligations que France Télécom a remplies quelques semaines plus tard dans d’autres départements, ce qui n’est pas nécessairement un gage de bonne gestion de l’argent public. (M. Bruno Retailleau proteste.) Mais passons !...
L’article tel qu’il est proposé vise non pas à opposer public et privé, mais à reconnaître l’action majeure de bon nombre de collectivités émérites, notre collègue Philippe Leroy l’a rappelé, dans le cadre du déploiement du haut débit.
Or, aujourd’hui, nous sommes bien dans l’obligation de constater que le modèle proposé par le Gouvernement ne fonctionne pas.
Devant le déploiement limité du réseau FTTH par le privé, il devient de plus en plus évident que nos collectivités territoriales seront appelées à la rescousse. Tout à l’heure, on a beaucoup cité l’Auvergne, mais le taux de déploiement y est de 27 % ; il est de 25 % en Bretagne, de 26 % en Eure-et-Loir et de 17 % dans le Jura. Bref, on le voit bien, nous sommes au bout d’un système !
Il convient donc, ne vous en déplaise, monsieur Retailleau, d’instaurer une relation équilibrée, qui n’oppose pas le public au privé, mais s’efforce de fédérer les uns et les autres, pour atteindre l’objectif fixé par cet article.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Hervé Maurey, rapporteur. J’aimerais bien qu’on ne tombe pas dans la caricature ! Déjà, tout à l’heure, en écoutant M. Lefebvre, avec qui j’entretiens par ailleurs d’excellentes relations, j’avais le sentiment qu’il nous dépeignait un paysage numérique version « Bisounours » (Sourires.) Il nous a en effet expliqué que tout allait très bien, sans préciser naturellement que, en matière de très haut débit, la France était vingt-deuxième sur vingt-six. Le refrain, c’était « tout va très bien, madame la marquise » !
Face à ce tableau idyllique, notre proposition de loi serait, en revanche, l’apocalypse ! Le texte est, pour reprendre le communiqué de presse des opérateurs, « mauvais pour la France ». (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) Voici donc une proposition de loi dangereuse pour notre pays…. Rendez-vous compte, mes chers collègues !
De grâce, ramenons les choses à leur juste mesure.
Il s’agit, je le répète, non pas de susciter une « confrontation », comme l’a dit Bruno Retailleau, mais bien une contractualisation.
M. Yves Rome. Eh oui !
M. Hervé Maurey, rapporteur. Depuis quand ces deux termes sont-ils équivalents ? Depuis quand des rapports équilibrés entre les parties, c'est-à-dire ici entre collectivités et opérateurs, seraient-ils dangereux, mauvais, et refléteraient une volonté de tout nationaliser ?
Nous souhaitons simplement, je le dis et je serai sans doute obligé de le redire encore, sortir d’une situation où les collectivités sont dominées par les opérateurs, qui décident seuls de déployer le réseau, mais uniquement dans les zones rentables. (Très bien ! sur des travées du groupe socialiste.)
Qui, dans cette assemblée, trouve normal que les collectivités soient totalement soumises au bon vouloir des opérateurs, pieds et poings liés face à leurs diktats ? Qui peut dire ici que cette situation est normale ? (M. le ministre lève la main.) M. le ministre ? Je n’en suis pas étonné ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.) Mais, parmi les élus, je ne vois aucune main se lever.
Je le répète, cette proposition de loi vise simplement à créer les conditions d’un équilibre. Elle n’a rien d’autoritaire et n’est pas plus susceptible de créer une quelconque confrontation.
La négociation, la contractualisation, ce n’est pas la confrontation !
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le rapporteur, je me contentais de lever le doigt pour demander la parole à M. le président. Je croyais qu’il fallait procéder ainsi, mais peut-être existe-t-il des moyens électroniques dont je ne dispose pas ou que je ne connais pas… (Protestations amusées sur les travées du groupe socialiste.)
« Caricature », le mot a été lancé. Mais personne ne caricature quoi que ce soit !
Je souscris aux propos tenus par M. Retailleau. Nous avons mis quatre ans pour définir, en liaison avec la Commission européenne, un cadre politique, financier et réglementaire.
Permettez-moi de rappeler les dates données tout à l’heure par Frédéric Lefebvre. Ce cadre a été validé par l’ARCEP le 18 février 2010, par l’Autorité de la concurrence le 17 mars 2010 et par la Commission européenne le 19 octobre 2011. Si personne ne prétend que tout va bien, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à souligner pour ma part qu’il s’agit du premier programme public de soutien au très haut débit en Europe.
M’étant déjà exprimé plusieurs fois en commission sur cette question, avec une capacité de conviction moyenne, il faut le reconnaître, je ne m’acharnerai pas toute la soirée à vous expliquer le problème fondamental soulevé par ce texte ; je dirai simplement qu’il va tout bloquer. Vous devrez alors reprendre une à une toutes les étapes. Les opérateurs affirment que ce texte est mauvais pour la France ? Pardonnez-moi, mais je pense comme eux.
Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte est mauvais pour la France, parce qu’il va retarder le programme mis en œuvre, qui a permis d’ouvrir, le 27 juillet 2011, un guichet de 900 millions d’euros.
Vous savez par ailleurs, puisque vous êtes soucieux, et à juste titre, de voir respectés les engagements de déploiement des opérateurs, que nous leur demanderons chaque année d’en établir le bilan. Pour 2011, ils devront le faire à la fin du mois de février, et j’ai déjà pris des engagements devant vous à cet égard : tous ceux qui ne respecteront pas les obligations de déploiement qu’ils ont contractuellement souscrites se verront « rebasculés » dans le domaine public.
Normalement, vous devriez être satisfaits de ces dispositions.
Dans votre texte, ce n’est pas la contractualisation qui pose problème, c’est la contrainte, car elle va à rebours des objectifs que vous prétendez servir et incitera les opérateurs à se désengager, là où vous voulez leur demander de presser le pas.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 14, présenté par MM. Retailleau et Hérisson, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le schéma recense les projets d’investissement des opérateurs privés ou publics dans les infrastructures et réseaux à très haut débit dont la réalisation doit effectivement démarrer dans un délai de trois années à compter de la date de son adoption.
« Dans le cadre de ce recensement, les opérateurs privés et publics précisent leurs calendriers de déploiement, année par année, le nombre de lignes correspondant à ces déploiements et les zones couvertes par ces derniers.
« Les engagements de déploiement des opérateurs privés donnent lieu à une convention avec la personne publique chargée du schéma. Cette convention précise le calendrier de déploiement ainsi que la cartographie des zones à couvrir.
« Chaque année, à la date anniversaire de l’adoption du schéma, les opérateurs rendent compte de l’avancement des déploiements effectifs au regard de ceux inscrits dans ce schéma. Ils confirment leurs projets de déploiement. S’ils y renoncent, le territoire concerné par le projet abandonné est réputé n’avoir fait l’objet d’aucun projet de déploiement depuis l’origine. » ;
La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Monsieur Rome, je vous invite à venir en Vendée, au mois de novembre, au moment du départ du Vendée Globe. Vous pourrez voir de beaux bateaux, et même jouer à un jeu virtuel, Virtual Regatta. (Sourires.)
Mais restons en Vendée, chers collègues : dès 2009-2010, seules quelques centaines de lignes vendéennes, sur 350 000 lignes, n’étaient pas éligibles au haut débit, pour 13 millions d’euros. La Vendée peut donc se comparer à de très nombreux départements, sur ce plan comme sur d’autres.
Pour en revenir à mon amendement, je ne dis pas que rien ne peut être amélioré. La preuve en est que je propose tout d’abord de parfaire la rédaction de cet article.
Le SDTAN, le schéma directeur territorial d’aménagement numérique, recense l’ensemble des projets d’investissement, publics comme privés. Il demande aux opérateurs privés des engagements, notamment en termes de calendrier et de zones de couverture.
Plutôt que de prévoir une sanction en cas de non-respect par les opérateurs privés de leurs engagements de déploiement, il me paraît préférable de prononcer la nullité du projet de déploiement, ce qui a pour effet de faire revenir la zone concernée dans le périmètre de l’initiative publique.
Non seulement ma proposition est plus claire, beaucoup moins intrusive, mais encore elle fait du SDTAN le lieu de la contractualisation entre les opérateurs et les collectivités territoriales, dans le respect des uns et des autres.
Si les opérateurs ont déclaré des intentions d’investissement pour les 3 600 communes en sus des 148 communes situées en zones très denses, ce n’est pas pour gêner les collectivités, c’est aussi parce qu’ils y ont été poussés.
Dans ma région, l’Ouest, nous avons été heureux d’apprendre qu’un certain nombre de communes et d’agglomérations seront concernées par cette initiative privée.
Comme je l’ai dit dans la discussion générale, il serait tout de même paradoxal d’inciter les opérateurs privés à réaliser des investissements tout en les menaçant de sanctions. Vous faites peser sur les opérateurs, sans doute parce qu’ils sont privés (Oh ! sur les travées du groupe socialiste.), une présomption de culpabilité.
Mon amendement vise simplement à améliorer le cadre juridique actuel, construit laborieusement depuis quatre ans, sans toutefois remettre en cause l’équilibre sur lequel il repose.
M. le président. L'amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Rome, Camani, Teston, Guillaume et Cornano, Mme Bourzai, M. Fichet, Mme Durrieu, MM. Krattinger, Marc, Patient, Bérit-Débat et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 5, troisième phrase
Remplacer les mots :
jusqu’au point de mutualisation situé en pied d’immeuble
par les mots :
jusqu’à proximité immédiate des logements et locaux professionnels
La parole est à M. Yves Rome.
M. Yves Rome. Cet amendement vise à corriger une légère inexactitude dans la rédaction de l’article 3.
Dans la mesure où le point de mutualisation n’est situé en pied d’immeuble qu’en zone très dense, il convient de préciser que les opérateurs s’engagent sur le volume de lignes construites « jusqu’à proximité immédiate des logements et locaux professionnels ». Cette rédaction, plus générale, permet de couvrir une majorité de situations sur le territoire national.
Par cet amendement, qui est loin d’être anecdotique, nous mettons en évidence la situation absurde qui prévaut dans certaines zones. Notre objectif est notamment de régler certains cas problématiques, fort nombreux. Ainsi, des zones pavillonnaires situées à proximité immédiate d’ensembles d’immeubles sont délaissées, car les opérateurs considèrent qu’il est trop coûteux d’y tirer la fibre, alors même qu’ils le font, en vertical, pour les immeubles !
Même dans les zones AMII, pourtant situées en milieu urbain, de nombreux élus locaux déplorent qu’il subsiste des « poches » délaissées, formant des territoires « en peau de léopard ».
Cette situation, monsieur le ministre, témoigne des limites évidentes du modèle sur lequel se fonde le Programme national très haut débit. Il convient donc, au moyen de cette proposition de loi, de le corriger significativement en renforçant notamment la nécessaire contractualisation avec les opérateurs privés afin que le déploiement soit le plus complet et le plus homogène possible.
Pour conclure, je rappellerai à notre collègue Bruno Retailleau, avec lequel s’est établi un face-à-face productif, que tous les opérateurs ne se plaignent pas du système. À de nombreuses reprises, j’ai rencontré l’ensemble des acteurs du très haut débit et je puis vous dire que les opérateurs alternatifs ainsi que de nombreux industriels de la filière ne se satisfont pas, contrairement à ce que vous dites, du programme tel qu’il a été fixé et qu’ils rêvent d’un autre modèle. Je pense notamment à Alcatel, qui est l’un des principaux acteurs intéressés par le déploiement effectif du très haut débit.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. Hervé Maurey, rapporteur. C’est vrai !
M. le président. L'amendement n° 33 rectifié, présenté par MM. Camani, Teston, Guillaume et Cornano, Mme Bourzai, M. Fichet, Mme Durrieu, MM. Rome, Krattinger, Marc, Patient, Bérit-Débat et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5, sixième phrase
Supprimer les mots :
afin qu'elle se prononce sur son exécution
II. – Alinéa 7
Supprimer les mots :
qu’elle rend publics
La parole est à M. Pierre Camani.
M. Pierre Camani. Dans sa rédaction issue des travaux de la commission, le cinquième alinéa de l’article 3 laisse planer des incertitudes. Avec cet amendement, le groupe socialiste entend clarifier le dispositif envisagé.
Dans un premier temps, il nous paraît souhaitable de supprimer ce qui pourrait être interprété comme un pouvoir donné à l’ARCEP de se prononcer sur l’exécution des conventions. Dans sa rédaction actuelle, le texte laisse à penser que l’Autorité pourrait avoir un pouvoir de validation des conventions, ce qui ne doit pas être le cas.
Ces conventions sont conclues entre les opérateurs, les collectivités ou groupement de collectivités. Rien ne justifie un tel contrôle ex post.
En outre, si cette rédaction a pour but de permettre à l’ARCEP de régler d’éventuels différends entre les parties, elle est redondante. En effet, l’article 12 de la proposition de loi permet à l’ARCEP de prononcer des sanctions contre les opérateurs ou les collectivités qui ne respecteraient pas leurs engagements.
Compte tenu de ces éléments, il nous paraît utile de préciser qu’il s’agit simplement d’une transmission ne donnant lieu à aucune validation.
Par ailleurs, au vu de la rédaction actuelle de la proposition de loi, il reviendrait à l’ARCEP de rendre publics les schémas.
Cette disposition est inutile, voire juridiquement problématique.
En effet, au titre des articles L. 2131–1 et L. 2131–3 du code général des collectivités territoriales, les actes pris par les autorités territoriales sont exécutoires dès qu’il est procédé à leur publication.
Les schémas étant des actes des collectivités, leur publication est une obligation légale pour ces dernières. C’est donc à la collectivité de publier le schéma et de le transmettre à l’Autorité. Libre à celle-ci, ensuite, de le diffuser.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 14, dont l’adoption aurait pour conséquence de réduire considérablement la portée de l’article 3, notamment en supprimant tout contrôle et tout pouvoir de sanction de l’ARCEP en cas de non-respect des engagements contractuels librement pris par les opérateurs.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 32 rectifié, qui reprend utilement une terminologie employée par l’ARCEP, ainsi que sur l’amendement n° 33 rectifié, qui améliore sensiblement la rédaction de l’article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Besson, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 14 et un avis défavorable sur l’amendement n° 32 rectifié. Il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 33 rectifié, qui va plutôt dans le bon sens, même s’il ne suffit pas à corriger les défauts de cet article.