M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Il l’accepte avec plaisir !
Cet amendement vise en effet à réparer un oubli, et je remercie la commission de l’économie d’avoir l’élégance de le faire pour Mme Procaccia. J’avais d'ailleurs moi-même envie de demander une seconde délibération, mais il y avait tellement de dispositions sur lesquelles je voulais revenir que j’y ai renoncé ! (Rires.) Mon cabinet avait dressé une liste, mais je me suis ravisé en me disant que la discussion se poursuivrait et qu’elle nous permettrait, sur un certain nombre de points, d’apporter les correctifs nécessaires.
Je reviendrai tout à l'heure, sans doute comme vous-même, monsieur le président de la commission, sur l’appréciation que je porte quant au débat qui va bientôt s’achever, mais vous aurez compris que je vous ai donné, sous le couvert de l’humour, un aperçu de cette appréciation.
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, étant entendu qu’aucune explication de vote n’est admise.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Le renvoi à la commission pour une seconde délibération est ordonné.
La commission est-elle prête à rapporter ?
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Oui, monsieur le président.
M. le président. Nous allons donc procéder immédiatement à la seconde délibération.
Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement :
« Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »
Article 3 ter (nouveau)
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 3 ter dans cette rédaction :
Au premier alinéa de l'article L. 136-1 du code de la consommation, après les mots : « par écrit », sont insérés les mots : « , par lettre nominative ».
L'amendement n° A-1, présenté par M. Fauconnier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
par lettre nominative
insérer les mots :
ou courrier électronique dédiés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement a été défendu, monsieur le président.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'État, je crois avoir compris que le Gouvernement était favorable à cet amendement…
M. le président. Je mets aux voix l'article 3 ter, modifié.
(L'article 3 ter est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Je remercie tous ceux qui ont participé à ce débat jusqu’à cette heure tardive et presque à la veille des fêtes de fin d’année. J’espère en tout cas que nous n’aurons pas tardé au point d’empêcher M. le secrétaire d’État de satisfaire son désir de goûter les produits de Marennes Oléron ! (Sourires.)
Je pense que, dans l’ensemble, nos discussions se sont déroulées dans un climat relativement constructif, même si notre collègue Gérard Cornu, égal à lui-même, ne nous a pas épargné ses petites piques ! Le côtoyant en commission depuis plus de dix ans, elles ne me choquent plus, et nous n’hésitons pas à lui appliquer quelques mesures de représailles quand c’est nécessaire. (Sourires.)
Je dois le dire, je souhaite que l’ambiance qui règne dans la commission de l’économie perdure. Vous avez pu vous-même apprécier, monsieur le secrétaire d’État, durant votre longue audition, tout au long de l’examen des deux cent et quelques amendements déposés, l’esprit qui présidait à nos discussions.
Je tiens à remercier les deux rapporteurs pour le travail considérable qu’ils ont accompli. C’était, pour Alain Fauconnier comme pour Nicole Bonnefoy, un baptême du feu, presque un bizutage ! Ce texte, auquel se sont ajoutés un grand nombre d’articles issus de l’Assemblée nationale, n’était pas un « cadeau » et, si votre projet de loi, monsieur le secrétaire d’État, était au départ bien plus court, il a fait des petits en route !
En tout cas, je les remercie tous deux de s’être penchés sur ce sujet, avec l’appui logistique et tout à fait pertinent des administrateurs tant de la commission des lois que de la commission de l’économie.
Je remercie bien sûr tous mes collègues qui ont été présents ces derniers jours et ces dernières nuits de l’intérêt qu’ils ont manifesté pour la défense des consommateurs.
Merci, enfin, monsieur le secrétaire d’État, de votre attitude durant tout ce débat.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, peut-être avons-nous travaillé un peu vite, mais le texte était touffu et nous avons eu peu de temps pour l’examiner.
Une partie des sujets étaient nouveaux pour moi puisque je succédais à mon ancienne collègue Odette Terrade. Il était également difficile pour un groupe restreint de travailler sur tous les aspects du texte, mais je dois reconnaître que cela s’est fait dans un bon esprit.
Je dois dire également – c’est une réponse à notre collègue Gérard Cornu – que c’est la première fois depuis longtemps que je vois autant d’amendements de notre groupe être acceptés. Je vous assure que c’est agréable ! Mais c’est aussi la première fois que je vois autant d’amendements de l’opposition acceptés par la majorité. Je me félicite d’ailleurs de l’attitude extrêmement ouverte – c’est à méditer ! – qu’ont eue les rapporteurs envers l’opposition. J’ai entendu plusieurs orateurs se plaindre d’avoir été maltraités : honnêtement, ces critiques me paraissent tout à fait excessives.
Je me félicite de l’adoption d’un certain nombre de nos amendements concernant, notamment, l’interdiction des coupures d’énergie pendant la trêve hivernale, la création d’une commission pluraliste pour fixer les tarifs réglementés du gaz, le rééquilibrage des relations entre les bailleurs et les locataires ; ils sont nombreux et je ne les citerai pas tous.
Je regrette évidemment que n’ait pas été adopté notre amendement sur l’interdiction d’expulsion des personnes prioritaires au regard du DALO, qui me semblait pourtant relever de l’évidence. Je déplore également qu’ait été rejetée notre proposition de réécriture à propos de l’encadrement des loyers, mais je sais que nous sommes les seuls à défendre cette position.
En tout cas, nous avons bien travaillé. Il était grand temps d’inscrire le mot « fin » sur ce travail !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je salue le travail des rapporteurs. Le texte du Gouvernement était bon. Il visait à des améliorations de la protection du consommateur plutôt judicieuses et très pragmatiques, cela a été dit plusieurs fois, mais il manquait parfois un peu d’audace. L’Assemblée nationale a utilement comblé certaines lacunes.
En revanche, le Sénat a volontiers fait de la surenchère, emmené par une majorité déjà en campagne, qui s’est distinguée par des positions parfois peu rationnelles, surprotectrices du consommateur et inutilement contraignantes pour les acteurs économiques.
Je pense en particulier au logement. Certains bailleurs peu scrupuleux ont certes recours à des pratiques abusives. Mais si l’on répond à cela en imposant à tous les bailleurs un arsenal réglementaire trop contraignant, on les décourage tout simplement de mettre leur bien en location et on assèche encore davantage l’offre locative, déjà restreinte dans de nombreuses zones. J’ai regretté, à ce titre, l’adoption de plusieurs amendements qui me paraissent relever de l’affichage.
C’est le cas aussi de la progressivité des tarifs de l’électricité à laquelle je reste totalement opposé. On ne va évidemment pas refaire le débat sur la loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, mais nous devons avoir conscience que l’électricité est particulièrement peu chère en France pour le consommateur final. Les tarifs sont inférieurs de 40 % à ceux qui sont pratiqués en Allemagne. Les tarifs réglementés sont déjà tellement bas qu’une concurrence sur le marché des particuliers ne peut pas s’exercer !
Avec des prix pour l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique déjà inférieurs au coût réel de la production d’électricité et l’existence de tarifs sociaux pour les ménages les moins aisés, la progressivité des tarifs est, en termes financiers, j’y insiste, une mauvaise réponse au problème des personnes en difficulté. En effet, on sait très bien qu’il n’y a pas obligatoirement de relation entre le revenu du ménage et sa consommation d’énergie. Par exemple, quid des familles nombreuses aux revenus limités qui sont contraintes à une plus grande consommation de gaz et d’électricité ?
J’ai donc relevé beaucoup de fausses bonnes idées parmi les quelques réelles avancées que je concède aux rapporteurs et à mes collègues, tous groupes confondus.
Au titre des avancées, je pense en particulier aux amendements de l’UCR sur l’assurance qui ont été adoptés grâce au soutien de la majorité sénatoriale.
La véritable avancée en matière de protection du consommateur, et qui fait au fond l’unanimité dans notre assemblée, concernait le risque de surendettement.
L’amendement du groupe de l’Union centriste et républicaine sur ce sujet a fait l’objet de toutes les attentions afin qu’il respecte le cadre recommandé par la CNIL. Il n’y a pas d’argument satisfaisant contre notre proposition, ni de la part du Gouvernement ni de celle de la majorité. Je regrette donc que, à l’exception des membres du groupe du RDSE, la grande majorité des élus des groupes UMP, CRC et socialiste-EELV aient une nouvelle fois repoussé cette avancée que nous proposions en suggérant la création d’une énième commission de travail. On sait ce que deviennent généralement les conclusions de ces commissions de travail…
Il fallait, à notre sens, faire bouger les lignes, d’autant que Mme Lagarde, voilà un an, s’était engagée à faire évoluer cette législation, qui aurait pu éviter à des familles dans la difficulté de se retrouver dans des situations financières insoutenables.
Pour ces différentes raisons, le groupe Union centriste et républicaine s’abstiendra sur ce texte.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Je dirai à mon tour que nous sommes satisfaits du déroulement des débats.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, nous pensions que le texte était imparfait et nous avons, d’une certaine façon, su lui donner, sinon de la cohérence, au moins un peu plus de profondeur.
Vous l’aurez bien compris, le groupe socialiste et moi-même sommes particulièrement satisfaits des avancées qui ont été introduites ici, notamment en matière de logement.
Sur de nombreux points, parmi lesquels je citerai seulement la prévention des expulsions ainsi que les relations entre le propriétaire et le locataire, nous avons marqué toute l’attention que nous portons au problème des dépenses contraintes, notamment en matière de loyers.
Nous sommes aussi particulièrement satisfaits de ce que nous avons pu faire en matière de téléphonie.
En ce qui concerne les actions de groupe, je note une réelle avancée et je me félicite que la proposition de loi de M. Yung se retrouve dans ce texte sur la consommation et la protection des consommateurs.
J’ai entendu les regrets de notre collègue Daniel Dubois sur la question du surendettement, mais je pense que la solution proposée par notre rapporteur est celle que dicte la sagesse.
Nous sommes, nous aussi, au sein de notre groupe, partagés sur la question de savoir s’il est nécessaire ou non de mettre en place un fichier positif. Comme bien d’autres, je suis convaincu, pour avoir connu de près ce type de situation, qu’il faut avancer. Mais il faut le faire d’une façon plus consensuelle, et surtout pas au détour d’un projet de loi voté la veille de Noël, lors d’un débat auquel tout le monde n’a pas pu participer.
Ce projet de loi tel qu’il nous a été soumis exigeait un certain travail et nous pensons que nous l’avons amélioré. Il demeure insatisfaisant sur certains points, mais nous le voterons eu égard aux avancées que nos travaux ont rendues possibles.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu.
M. Gérard Cornu. La protection des consommateurs doit, à nos yeux, rester un sujet de consensus pragmatique, ce qui suppose de la maintenir à l’écart des querelles partisanes.
Le texte d’équilibre issu des travaux de l’Assemblée nationale pouvait trouver un large consensus au Sénat, sous réserve de quelques améliorations et ajouts.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, mes collègues du groupe UMP et moi-même déplorons l’introduction dans le texte d’un certain nombre d’amendements à connotation politique. Ces mesures visent un effet d’annonce bien compréhensible, en raison de la proximité des échéances électorales. Il reste que le large consensus trouvé à l’Assemblée nationale, grâce à l’attitude constructive des uns et des autres, n’a pu avoir lieu dans notre assemblée. C’est dommage, surtout pour le consommateur.
Quelles sont ces dispositions, introduites dans le texte du Sénat, auxquelles nous sommes opposés ?
Il s’agit de l’encadrement renforcé des loyers, de l’encadrement des tarifs du gaz et de l’électricité, de la suppression regrettable du dispositif Pacitel et, enfin, de l’introduction de l’action de groupe dans notre droit.
En ce qui concerne l’encadrement des loyers, nous estimons que, avec une telle disposition, la pénurie de logements ne pourra que s’accroître : les investissements diminueront et les logements vides ne seront plus remis sur le marché. Elle est donc, à nos yeux, inefficace et aura, à l’évidence, un impact extrêmement néfaste sur le marché du locatif privé puisqu’elle porte atteinte à la libre gestion de sa propriété par le bailleur.
Pour ce qui est de l’amendement de la commission prévoyant une tarification progressive du gaz et de l’électricité, non seulement il est d’une rare complexité, mais il est, de plus, incompatible avec le droit de la concurrence, ainsi qu’avec le droit communautaire européen, puisqu’il vise à instituer des subventions croisées entre consommateurs. Il s’agit là d’un affichage simpliste et démagogique. C’est pourquoi nous y sommes opposés.
Nous sommes également opposés à l’introduction dans le projet de loi de l’action de groupe pour gérer les litiges de masse. Nous estimons en effet que, dans le contexte économique actuel, il ne faut pas faire en outre supporter à l’ensemble des entreprises françaises une inquiétude juridique qui, du fait d’un manque de lisibilité ou d’une définition insuffisamment claire, risquerait de les fragiliser.
Le projet de loi tend à privilégier des solutions plus adaptées pour réparer les préjudices subis par les consommateurs. Ces solutions reposent, d’une part, sur le développement et la généralisation de la médiation, d’autre part, sur la modernisation et le renforcement des pouvoirs de la DGCCRF, et, enfin, sur l’introduction d’un dispositif efficace, le dispositif de « clause abusive », qui constitue à l’évidence une avancée majeure puisque l’objectif est de prévenir les préjudices ou de les faire cesser le plus rapidement possible. Ce dispositif rend, de fait, l’action de groupe totalement inopportune.
Nous estimons, de plus, que la position française sur ce sujet doit dépendre de celle de la Commission européenne, qui y travaille actuellement.
Certains des amendements adoptés en séance publique vont à l’encontre du but recherché par le projet de loi initial en ce qu’ils restreignent la liberté, l’information ou la protection des consommateurs. Je prendrai seulement deux exemples significatifs : la diminution de cinq jours à trois jours du délai du préavis de résiliation des contrats de services de communications électroniques ; la réduction de vingt-quatre à douze mois de la durée maximale d’engagement proposée par les opérateurs, qui va immanquablement augmenter le prix des forfaits de mobile.
Nous avions proposé des amendements de bon sens, mais le rapporteur et la majorité s’y sont opposés, sans doute par dogmatisme. Nous avons bien compris que nous avions juridiquement tort puisque nous sommes politiquement minoritaires ! Nous le regrettons vivement.
En refusant notre amendement de réintroduction, à l’article 8 ter, du dispositif Pacitel, vous vous êtes arc-boutés sur une attitude que je qualifierai d’irresponsable, dont vous ne mesurez pas les conséquences, et surtout que, par obstination, vous refusez de voir. Ce dispositif a pourtant été mis en place par le Gouvernement pour faciliter le droit, dont dispose chaque citoyen, de s’opposer au démarchage téléphonique qui, trop fréquemment intempestif, peut porter atteinte à la tranquillité.
Nous avions accepté de rectifier notre amendement pour simplifier l’inscription sur cette liste d’opposition au démarchage téléphonique que constitue le dispositif Pacitel, notamment à l’intention des personnes âgées. Vous avez préféré le repousser, rejetant par là même le dispositif Pacitel, ce qui aura pour conséquence inévitable la suppression de près de 270 000 emplois dans les nombreux départements où existent des centres d’appel, selon les estimations de l’Observatoire des métiers et des compétences.
Il faut donc déplorer la nouvelle connotation politique de ce texte, que vous avez voulue, vous situant à l’opposé d’une attitude constructive.
Si nous déplorons certaines mesures fortement idéologiques, et surtout démagogiques, nous avons eu la satisfaction de faire adopter quelques amendements, soit en commission, soit en séance publique.
Il en est ainsi du rétablissement légitime de la clause d’exclusivité pour les agents immobiliers ou de l’amélioration de la prévention des expulsions locatives, à l’article 2.
Il en est ainsi, également, du renforcement de la portée de l’article 3 s’agissant de l’information des consommateurs sur les contrats de services de communications électroniques, notamment pour prévenir certaines pratiques abusives des opérateurs.
Il en est ainsi, encore, des dispositions relatives à la profession d’opticien-lunetier visant, dans le respect du droit communautaire, aux articles 5 bis et 6, à une meilleure protection de la santé publique et à une meilleure prise en compte des problèmes de démographie médicale, que l’on constate notamment dans les territoires ruraux.
M. le président. Je vous prie de conclure, mon cher collègue.
M. Gérard Cornu. Il en est ainsi, enfin, à l’article 9, du renforcement de l’information du consommateur sur les possibilités de recourir à une procédure de médiation en cas de litige.
C’est peu, mais c’est important.
Je tiens, par ailleurs à préciser que, si la grande majorité de notre groupe a voté contre la mise en place d’un fichier positif, c’est tout simplement parce que, en l’état actuel du projet, réaliser un fichier de 25 millions de Français constituerait, à nos yeux, un vrai risque pour les libertés publiques.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que le groupe UMP ne peut voter contre ce texte et qu’il préfère s’abstenir, en renouvelant, bien sûr, son entier soutien au Gouvernement, dont la démarche vertueuse en faveur des droits, de l’information et de la protection des consommateurs mérite d’être soutenue.
Je parlerai une minute encore, mais à titre personnel.
M. le président. Vous avez déjà dépassé de trois minutes votre temps de parole, mon cher collègue.
M. Gérard Cornu. Oui, mais je ne voudrais pas terminer sans m’adresser personnellement au rapporteur dont c’était le premier rapport.
Même s’il nous arrive de nous affronter – mais quoi de plus normal dans la vie politique ? –, je voulais saluer son attitude très constructive. J’ai beaucoup de respect pour tout le travail qu’il a accompli.
Je salue aussi le travail réalisé, de surcroît dans des conditions difficiles, par les services de la commission de l’économie.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Alors que s’achèvent nos débats, je voudrais d’abord dire que j’ai eu évidemment un certain nombre de regrets, mais en même temps un certain nombre de satisfactions dans ce débat qui nous a amenés, les uns et les autres, pendant de longues heures, à examiner des dispositions en faveur de la protection des consommateurs.
Je commencerai par les regrets et je terminerai par les satisfactions.
Malheureusement, nous ne nous sommes visiblement pas compris sur un certain nombre de sujets et, je l’ai dit tout à l’heure sur le ton de la plaisanterie quand vous avez appelé l’amendement faisant l’objet de la seconde délibération, il est vrai que j’étais assez tenté d’ajouter moi-même toute une série d’amendements pour revenir sur des dispositifs qui sont malheureusement autant de reculs pour les consommateurs.
Je pense à la limitation à douze mois de la durée maximale d’engagement en téléphonie mobile puisque cela aura pour conséquence de restreindre le choix des consommateurs et d’augmenter le prix d’achat des terminaux.
M. Claude Bérit-Débat. Cela les fera baisser !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Je pense au conseil personnalisé au moins une fois par an, qui permet à l’abonné de migrer vers une offre plus adaptée à son profil de consommation, et donc de reprendre le dessus sur les dépenses contraintes. Ce sont évidemment des sujets très importants pour les consommateurs.
Je pense à la suppression du dispositif Pacitel, qui a pourtant trouvé l’adhésion de 500 000 de nos compatriotes, qui ont déclaré 1 million de numéros de téléphone. Cette suppression mettra en péril environ 100 000 emplois dans notre pays.
Je pense à l’extension des pouvoirs de la DGCCRF en matière de contrôle et de sanction des règlements communautaires relatifs aux droits des voyageurs que vous n’avez pas voulu voter, ce qui affaiblit la protection des consommateurs.
Je pense à la question des clauses abusives. La DGCCRF et le ministre ne pourront plus intervenir auprès des juridictions pour obtenir la suppression des clauses illicites et, plus généralement, pour défendre les droits des consommateurs dans leur ensemble, notamment pour ce qui concerne les grandes entreprises.
Je pense aux agriculteurs en situation de crise, notamment aux producteurs de fruits et légumes, qui vont se retrouver dans des situations extrêmement complexes.
Je pense aussi à l’action de groupe, que Gérard Cornu a évoquée, ou à l’encadrement des loyers, un dispositif qui avait été, à l’époque, abandonné par le gouvernement de Lionel Jospin.
Je pense, enfin, au dispositif que vous avez adopté quant à l’Observatoire des prix et des marges, qui impose, y compris aux toutes petites entreprises, alors que nous avions voulu réserver ce dispositif à la grande distribution, des charges administratives pénalisantes.
Voilà autant de regrets, car ces mesures vont peser soit sur les consommateurs soit sur les entreprises, donc, globalement, sur notre économie.
Mais je tiens à souligner également les motifs de satisfaction que je tire de ce débat. Vous avez souhaité travailler dans un climat constructif – et tel a aussi été mon souhait depuis le début de l’examen de ce projet de loi à l'Assemblée nationale –, ce qui nous a permis, je crois pouvoir le dire, de progresser sur un certain nombre de points.
Une vingtaine d’amendements, défendus par le groupe socialiste-EELV, le groupe CRC, le groupe UMP ou encore le groupe de l’UCR, ont été adoptés dans un consensus.
Je pense notamment à l’attestation d’emploi pour les candidats à la location avec l’exigence des seuls trois derniers bulletins de salaire, résultant d’une proposition de Joël Labbé ; à la consultation de la Commission nationale de concertation en matière locative sur l’arrêté qui définit les informations sur l’état des lieux ; à la prévention des expulsions locatives, un amendement proposé par Gérard Cornu ; à l’obligation pour le professionnel de récupérer la citerne GPL sous trois mois, une proposition émanant d’Évelyne Didier ; à la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance vie non réclamés, demandée par Hervé Maurey ; au fichier positif, sur lequel il est nécessaire que nous continuions à travailler pour trouver une solution adaptée ; au mandat exclusif, qui a suscité tant de débats, mais pour lequel le travail réalisé en commission a permis d’aboutir à une position consensuelle, que le Gouvernement a jugée équilibrée.
Vous le voyez, ce sont autant de sujets qui montrent l’esprit d’ouverture du Gouvernement, d’autant que j’avais déjà accepté en commission une quarantaine d’amendements, venant de tous les groupes politiques.
Je me félicite également de ce que notre débat a permis d’enrichir ce texte important pour les consommateurs.
Permettez-moi, enfin, de remercier tous ceux d’entre vous qui ont participé à ce débat.
Le groupe UMP a soutenu des positions courageuses, et ce n’est jamais simple quand on est minoritaire dans une assemblée. M. Dubois, quant à lui, a défendu avec beaucoup de fougue son point de vue sur tous les sujets. Mme Didier n’a jamais transigé sur ses idées. Certes, nous avons parfois été en désaccord – même assez souvent ! –, mais il nous est arrivé de nous retrouver sur certains sujets, ce qui a permis quelques avancées. Quant aux membres du groupe socialiste-EELV, ils ont fait de nombreuses propositions ; sur nombre d’entre elles, nous n’étions pas d’accord, mais nous avons aussi, sur quelques-unes, su nous rejoindre.
Permettez-moi, enfin, de remercier le président de la commission de l’économie. Nous nous connaissions mal. Lorsque nous nous sommes rencontrés pour préparer la discussion de ce texte, vous m’avez dit, monsieur le président, que vous étiez décidé à faire en sorte qu’il n’y ait pas de blocage, afin que des propositions importantes pour les consommateurs puissent être adoptées. Je crois pouvoir dire que vous avez tenu parole.
Bien sûr, je ne vous l’ai pas caché, je demanderai à l'Assemblée nationale de revenir au texte qu’elle a proposé sur certains sujets, mais nous avons fait œuvre utile ensemble. La manière dont se sont déroulés ces travaux nous a permis d’avancer. Vous n’avez pas joué la carte de l’évitement du débat – c’eût été rendre un mauvais service aux consommateurs ! – ni celle du blocage, ce qui aurait été assez simple puisqu’il aurait suffi de multiplier les amendements sur des sujets qui ont déjà été évoqués dans le passé.
Je tiens à vous en remercier personnellement, monsieur le président.
De la même façon, je veux vous dire, monsieur le rapporteur que, à l’instar de Gérard Cornu, j’ai pu mesurer votre engagement et la volonté qui a été la vôtre d’écouter les uns et les autres. Vous avez beaucoup travaillé sur ce texte – c’est votre premier rapport –, mais, avec mes services, nous avons constaté que vous vous étiez beaucoup impliqué et que vous aviez fait preuve d’une grande technicité.
Nous n’avons pas toujours été d’accord, mais, sur le plan humain, je retiendrai de bons souvenirs de nos discussions.
L’opposition sénatoriale, qui représente la majorité au niveau national, a décidé de s’abstenir sur le texte issu des travaux du Sénat. Le fait qu’elle ne vote pas contre alors que ce texte contient des dispositions qui sont, du point de vue de la majorité et du Gouvernement, extrêmement contestables – et je pèse mes mots ! – est, me semble-t-il, un hommage rendu à la volonté qui a été la nôtre, de part et d’autre, d’être constructifs, ainsi que l’a souligné Gérard Cornu à la fin de son intervention.
Pour toutes ces raisons, je tiens à vous remercier et vous souhaiter à tous, en mon nom personnel et au nom du Gouvernement, de joyeuses fêtes de fin d’année. Je veux aussi remercier la présidence et le service de la séance, ainsi que tous les fonctionnaires qui ont travaillé sur ce texte et qui ont eu à vivre – ce qui est évidemment une nouveauté au Sénat ! – un changement de majorité.
Nous avons montré que, tout en étant en désaccord sur un certain nombre de points, nous pouvions parfaitement faire vivre la démocratie, et c’est ce qui importe aujourd'hui.