M. Roland Courteau. Ah !
M. Gérard Cornu. … de même que vous avez accepté d’intégrer dans le texte de la commission mes propositions relatives à l’optique-lunetterie,…
Mme Évelyne Didier. Un beau cadeau !
M. Gérard Cornu. … ce dont je vous remercie, vous soyez d'accord pour adopter ceux de nos amendements qui auront reçu un avis favorable du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Bizet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le nombre des articles du projet de loi que nous allons examiner a subi une forte inflation.
En effet, le projet initial comportait 11 articles issus des doléances des consommateurs recueillies par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L’Assemblée nationale l’a complété de quelque 45 articles supplémentaires et la commission des affaires économiques et du développement durable l’a encore profondément remanié, puisque 129 amendements ont été adoptés, dont une petite dizaine ont été présentés par le groupe de l’Union centriste et républicaine.
Entre le logement, la téléphonie mobile, Internet, les ventes à distance, les actions de groupe et, je l’espère, monsieur le secrétaire d'État, la protection des consommateurs contre le risque de surendettement – nous aurons un débat sur ce point – les sujets sont variés. Toutefois, ils ont un dénominateur commun : l’amélioration de la transparence de l’information et de la protection des consommateurs.
Thème cher du droit communautaire, la protection du consommateur s’allie parfaitement à un autre objectif visé par le Gouvernement : la défense du pouvoir d’achat des Français. À cet égard, le texte cible à juste titre les dépenses contraintes des ménages, celles sur lesquelles il est difficile de rogner. Parmi elles, on peut retenir la protection du locataire face à des charges parfois non justifiées et des frais d’agence éventuellement exorbitants.
En matière de téléphonie mobile, le projet de loi présente quelques mesures permettant d’améliorer l’information du consommateur sur ses factures. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite rappeler que, en termes de prix des télécommunications, la vraie protection tient d’abord à l’ouverture à la concurrence de ce secteur, car la définition d’un cadre clair constitue la condition sine qua non de l’exercice de la concurrence. On n’a pas nécessairement besoin de lois pour faire baisser les prix : un cadre concurrentiel réel et lisible peut suffire.
Rappelons-nous que les trois opérateurs principaux de téléphonie mobile se sont entendus pendant des années pour maintenir artificiellement des prix élevés, parmi les plus hauts d’Europe. Puis, la quatrième licence 3G a été attribuée à Free. Cet opérateur, comme il l’a fait pour Internet, promet une baisse radicale du prix des forfaits. Les offres à bas coûts et sans engagement se sont d’ailleurs multipliées ces derniers mois, anticipant l’arrivée de ce nouvel acteur.
N’en déplaise aux opposants au libéralisme, le marché concurrentiel joue donc son rôle en matière de baisse des prix. Il faut l’encourager et l’approfondir.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Daniel Dubois. Je me félicite de l’adoption en commission des amendements centristes visant à opérer une distinction entre vente de terminaux et forfaits.
Mme Nathalie Goulet. Excellent !
M. Daniel Dubois. De même, j’espère que l’interdiction du simlockage, inefficace contre le vol, sera adoptée par notre assemblée.
L’État n’est pas en reste et doit créer un cadre pour protéger les plus faibles contre les risques que comportent certaines pratiques commerciales déviantes. À ce titre, la plupart des dispositions qui améliorent la transparence de l’information au consommateur sont, selon moi, nécessaires.
Bien entendu, il faut veiller à ne pas vouloir « tout border », au risque de déresponsabiliser les consommateurs ! En ce sens, le rôle de la loi est subtil, car il consiste à protéger les plus faibles sans assister tout le monde, ni, bien évidemment, museler les acteurs économiques. Un tel équilibre est difficile à trouver ! Toutefois, l’examen en commission a permis certaines avancées non négligeables pour y parvenir.
Ainsi, en matière de téléphonie mobile, plusieurs amendements vont dans ce sens. Je pense à l’obligation de transparence entre le coût du forfait et celui du terminal ou à la nécessaire transparence pour permettre de comparer les offres mobiles, demandée par notre collègue Jean-Jacques Lasserre.
Dans le secteur bancaire, les amendements de notre collègue Henri Tandonnet sur le détail entre capital et intérêts lors du solde d’une créance vont aussi dans le sens d’une meilleure transparence de l’information délivrée au consommateur. Du reste, il n’y a pas que les centristes qui ont œuvré à l’amélioration en commission du texte, loin de là ! Je tenais à le dire.
Je salue un certain nombre d’avancées proposées par notre rapporteur sur le thème de la transparence, notamment s'agissant des marges dans le secteur agroalimentaire. C’est une idée que nous avions énergiquement défendue l’année dernière, lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
Il en va de même pour la transparence en matière immobilière et la protection du locataire vis-à-vis de pratiques abusives qui ont proliféré grâce à un marché de l’immobilier très tendu.
D’autres avancées sur la protection des consommateurs peuvent, en outre, être mentionnées à ce stade de l’examen du projet de loi, notamment en direction des plus fragiles.
Les amendements de ma collègue Valérie Létard, par exemple, visent à prendre en compte les enfants majeurs dans les surcharges de loyers, pour adapter utilement notre législation à la réalité du chômage des jeunes et du logement cher.
En revanche, certaines propositions adoptées en commission me semblent inopportunes.
Pensant protéger le locataire par rapport au bailleur, plusieurs membres du groupe UCR estiment que les mesures d’encadrement des loyers, comme l’encadrement des frais d’agence immobilière, ne sont pas opportunes. Il en est de même pour l’article additionnel relatif à la progressivité des tarifs de l’électricité et du gaz. C’est une fausse bonne idée !
M. Gérard Cornu. Eh oui !
M. Roland Courteau. Ce n’est pas vrai !
M. Daniel Dubois. De plus, elle est superfétatoire, en raison de l’existence du tarif social du gaz et de l’électricité, et à l’heure où les tarifs règlementés sont anormalement bas par rapport au coût réel de production. J’ai donc déposé un amendement pour supprimer cette disposition.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, lorsque l’on parle de la protection du consommateur, je regrette que l’on devienne frileux sur l’une des questions essentielles et urgentes en la matière : la protection du consommateur face au risque de surendettement.
Je n’entrerai pas dans le détail de mon argumentaire en la matière ; je soulignerai seulement que cette mesure est urgente face à la progression du surendettement en France : plus de 700 000 personnes sont concernées, et l’encours des dettes qui ne peuvent pas être remboursées atteint 6 milliards d’euros. La création d’un fichier positif assainit les conditions d’octroi du crédit à la consommation, sans l’assécher.
Monsieur le secrétaire d'État, j’espère que le Sénat pourra se vanter de transmettre à l’Assemblée nationale un texte comprenant notre proposition juste et équilibrée dans ce domaine. Je regrette que la discussion des trois amendements de notre collègue Valérie Létard relatifs au surendettement n’ait pas eu lieu en commission. Nous l’aurons donc dans l’hémicycle !
Voilà, mes chers collègues, les quelques points que je souhaitais exposer devant vous à titre liminaire, avant d’entrer dans le détail des différentes dispositions du projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, on dit que le diable se niche dans les détails, et le texte dont nous allons débattre à partir d’aujourd’hui en est la preuve dans bien des cas.
En effet, en déposant ce projet de loi, Gouvernement semblait viser un objectif frappé au coin du bon sens. Il s’agissait, comme l’indique le titre de ce texte, de renforcer les droits, la protection et l’information du consommateur, volonté louable dont on voit mal comment on pourrait ne pas la partager.
Cependant, si l’objectif affiché est évident, il apparaît très rapidement que les moyens proposés pour l’atteindre ne sont pas tous à la hauteur de ce que l’on pourrait espérer. C’est donc plus en fonction des moyens proposés dans ce texte que par rapport à la fin visée qu’il faut nous prononcer.
À cet égard, je le dis d’emblée, il était nécessaire de renforcer la protection du consommateur dans un certain nombre de domaines. C’est pourquoi le groupe socialiste a choisi, dès l’examen en commission, de travailler à enrichir le texte ; la tâche n’était pourtant pas aisée.
En effet, à bien y regarder, ce projet de loi est d’abord et avant tout un catalogue de dispositions et de mesures d’inégale importance. Ainsi, on passe de la grande distribution à l’immobilier, puis aux télécommunications – Internet et téléphonie –, à l’énergie, à l’optique, à l’origine géographique des produits, à la restauration, à la vente à distance, au crédit, et j’en passe !
Cet inventaire que Prévert n’aurait pas renié n’est pas satisfaisant. En effet, monsieur le secrétaire d’État, les dispositions proposées soit ne vont pas assez loin, soit sont orientées par une logique dont on peut contester le bien-fondé.
Trop souvent, le texte part du postulat selon lequel c’est encore et toujours la concurrence qui devra améliorer le pouvoir d’achat. Or il n’est plus à démontrer que la libéralisation d’un marché n’est pas, en tant que telle, un gage pour le consommateur. La grande distribution est un exemple caricatural de ce point de vue. En effet, on a créé un Observatoire des prix et des marges chargé de surveiller, en travaillant maintenant sur les marges brutes et nettes, l’évolution des prix dans les grandes surfaces.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Claude Bérit-Débat. L’énergie est un autre exemple marquant. Qu’il s’agisse de l’électricité ou du gaz, on sait bien que les factures des usagers vont exploser dans les années à venir. Ce projet de loi est donc un texte en trompe-l’œil. Le logement, par exemple, mériterait un texte qui soit entièrement consacré à cette question – nous nous y emploierons demain ! – et qui traiterait des conditions d’accession à la propriété et, plus globalement, de la garantie d’accès au logement.
Cependant, je l’affirme au nom du groupe politique que je représente, monsieur le secrétaire d’État : j’admets que votre texte comporte quelques avancées.
Certes, tant sur le fond que sur la forme, on ne peut se satisfaire de ce projet de loi : tout d’abord, le calendrier retenu est insatisfaisant. Ensuite, et surtout, le Gouvernement rejette encore et toujours les dispositions centrales de la protection des consommateurs.
Néanmoins, si ce texte n’est pas parfait, loin s’en faut, il a au moins un mérite : celui d’exister. Nous nous en sommes donc servis comme d’un point de départ pour protéger plus largement les Français et leur pouvoir d’achat.
Nous estimons que, aujourd’hui, certains biens, comme le logement, ou certains services, comme l’accès à internet ou à la téléphonie mobile, doivent pouvoir être garantis à tous.
Nous considérons également que l’État doit assumer plus largement son rôle de prescripteur dans un certain nombre de domaines : il en va ainsi de la téléphonie mobile. Bien entendu, nous devons veiller à ce que les opérateurs n’usent pas de leur position dominante pour rendre les clients captifs. Cependant, il nous faut également tenir compte des impératifs de santé publique liés aux ondes magnétiques.
Enfin, nous estimons que, dans plusieurs domaines, la législation doit aller plus loin. Dans ce cadre, je souligne que les travaux en commission ont permis d’opérer des avancées substantielles, et je remercie à ce titre nos deux rapporteurs, Alain Fauconnier et Nicole Bonnefoy : je songe, notamment, aux dispositions relatives au recours collectif.
Monsieur le secrétaire d’État, il me semble important que, par votre intermédiaire, le Gouvernement accepte enfin le principe de cette procédure, comme vous le souteniez vous-même par le passé.
Toutefois, si les travaux en commission ont permis d’accomplir quelques progrès, ces avancées me semblent encore insuffisantes. C’est pourquoi nous présentons plusieurs amendements sur ce texte.
Certains d’entre eux sont, sous un certain angle, aussi symboliques que nécessaires, notamment concernant la prévention des expulsions locatives. D’autres tendent à tenir compte de phénomènes nouveaux face auxquels il convient d’agir au plus vite, notamment via la réglementation pour ce qui concerne la publicité pour la vente d’or par correspondance.
Dans un autre registre, il est également indispensable de clarifier les offres en matière de téléphonie mobile et d’internet. Il s’agit, en effet, de garantir le pouvoir d’achat des Français en leur donnant les moyens de mieux s’orienter dans le maquis des offres et des engagements. Toutefois, il faut surtout leur garantir, pour un coût raisonnable, un accès à des services que l’évolution de la société rend aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, totalement indispensables.
Par ailleurs, il faut absolument y voir plus clair sur certaines pratiques, telle que la vente de pièces détachées automobiles. Nous sommes tous soucieux de préserver notre industrie. Toutefois, comment admettre que le prix des mêmes pièces détachées soit jusqu’à 30 % moins élevé en Belgique qu’en France ?
Nous proposerons donc que le Gouvernement remette un rapport sur ce thème et crée – pourquoi pas ? – un observatoire des prix et des marges consacré aux pièces de rechange. Dès lors, nous pourrons nous prononcer en toute connaissance de cause sur cette question.
Enfin, il est primordial d’encadrer beaucoup plus strictement l’accès aux crédits à la consommation.
Renforcer les droits des consommateurs, ce n’est pas seulement leur donner les moyens d’être mieux informés a priori ou de pouvoir contester plus efficacement a posteriori : c’est également considérer que certaines pratiques ne sont tout simplement pas acceptables.
Nous savons tous aujourd’hui que, face aux difficultés quotidiennes, une solution consiste à faciliter l’accès aux crédits à la consommation.
Toutefois, je rejette cette idée selon laquelle il faudrait consommer toujours plus et s’endetter chaque jour davantage pour rembourser ses dettes. En effet, une telle logique conduit à des situations préoccupantes et souvent dramatiques. Les précédents orateurs l’ont déjà souligné : aujourd’hui, le surendettement frappe des centaines de milliers de Français.
Nous proposerons donc de lutter contre ce phénomène à travers plusieurs amendements, tendant tout d’abord à abaisser le plafond du taux d’usure et ensuite à créer un crédit social inférieur à 3 000 euros.
Ces considérations me conduisent à évoquer un dernier sujet avant de conclure : la prévention du surendettement.
Afin d’endiguer ce fléau, nous sommes nombreux sur ces travées à considérer qu’il est nécessaire de créer un répertoire national des crédits aux consommateurs. Je suis conscient que cette solution soulève d’importantes questions en termes de collecte des données et qu’aucun consensus ne se dégage à ce sujet actuellement. Nous en avons longuement débattu en commission.
Néanmoins, comment accepter qu’une personne puisse aujourd’hui souscrire dix, quinze ou vingt crédits, souvent à des taux usuraires, et doive ainsi rembourser des sommes colossales sans qu’aucun garde-fou existe, mettant en danger l’équilibre d’une famille et conduisant parfois à des gestes irrémédiables ?
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Très bien !
M. Claude Bérit-Débat. Mes chers collègues, nous devons agir. Aussi, afin d’harmoniser les positions de chacun, nous vous proposerons de créer un groupe de travail ouvert à tous, afin que nous puissions nous appuyer sur les données existantes pour formuler des solutions consensuelles sur un sujet aussi grave.
Je tiens à conclure cette intervention sur ce point, afin de vous montrer, monsieur le secrétaire d’État, que nous avons fait le choix de nous emparer de votre texte pour aller au-delà des propositions que vous avez énoncées. J’espère à présent que le Gouvernement fera lui aussi un effort d’ouverture pour renforcer plus encore la protection des consommateurs. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
Mme Élisabeth Lamure. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en premier lieu, je tiens à aborder un sujet lié à l’un des volets importants de la loi de modernisation de l’économie, la LME, datée de 2008 : la question des délais de paiement, sur laquelle je me permets d’insister en raison de la date butoir du 31 décembre prochain.
Nous savons aujourd’hui que le bilan de l’application des dispositions de la LME en la matière est particulièrement positif, puisque, en plafonnant les délais de paiement, cette loi a permis aux entreprises – tout particulièrement aux plus fragiles d’entre-elles – d’assurer une meilleure gestion de leur « poste client » et de dégager un surcroît de trésorerie pour investir. Cependant, certains secteurs particulièrement fragilisés par la crise économique et financière qui sévit depuis trois ans ont encore besoin, aujourd’hui, d’un accompagnement spécifique.
Les accords dérogatoires ont permis de ménager une transition en douceur pour certains secteurs dans lesquels les délais sont traditionnellement longs, à l’exemple du BTP. Or ces accords dérogatoires expirent dans quelques jours, c’est-à-dire le 31 décembre prochain.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez consenti une prolongation des accords dérogatoires dans certains secteurs très circonscrits, caractérisés par une saisonnalité marquée, comme celui des jouets. Nous vous remercions de cette ouverture.
Toutefois, aujourd’hui, je tiens à appeler votre attention sur la situation du secteur du bâtiment et des travaux publics, le BTP, en difficulté en raison du caractère unique de chaque commande et des délais non comptabilisés dans le règlement des factures de travaux.
Selon les rapports remis par l’Observatoire des délais de paiement en 2009 et 2010, les entreprises du bâtiment, du fait de la structure particulière de ce secteur, n’ont pu obtenir une diminution des délais de paiement de leurs clients non professionnels. Ces sociétés subissent donc un déséquilibre croissant entre, d’une part, des délais fournisseurs plus courts, et, de l’autre, des délais clients qui demeurent inchangés, voire qui s’allongent.
Le contexte économique a évolué depuis l’adoption de la LME et le secteur du BTP nécessite, partant, un traitement spécifique. Un ajustement législatif se révèle donc nécessaire.
Ainsi, il m’a paru souhaitable de compléter l’article 1er bis A afin de prendre en compte ces difficultés d’adaptation, particulièrement en cette période de crise. Or cet article a été supprimé par la commission au profit d’un autre véhicule législatif.
Cette disposition ouvrait la possibilité de conclure de nouveaux accords dérogatoires pour une durée limitée, et uniquement pour des secteurs très spécifiques présentant un caractère saisonnier particulièrement marqué. Elle prévoyait également des évolutions législatives nécessaires à la transposition de la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les relations commerciales.
Si, à mes yeux, le sujet traité trouve toute sa place dans le projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l’information des consommateurs – en effet, ce texte s’inscrit dans la droite ligne de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs et de la LME –, notre rapporteur a estimé qu’il s’inscrirait mieux dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit et des démarches administratives. Je me permettrai, en conséquence, de présenter un amendement lors de l’examen de la proposition de loi Warsmann, afin de compléter l’article 90 bis dans le sens que je viens d’évoquer.
Néanmoins, ce sujet devant être traité de toute urgence, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2011 – il me semble que, sur ce point, nous sommes tous d’accord dans cet hémicycle – et la proposition de loi ne devant être examinée par le Sénat qu’au mois de janvier prochain, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir nous apporter une réponse rassurante au problème des délais de paiement des secteurs en difficulté, en particulier du BTP.
J’aborderai en second lieu, à mon tour, la question de l’introduction de l’action de groupe dans le projet de loi par le rapporteur pour avis de la commission des lois.
Pourquoi vouloir introduire une telle procédure de règlement des litiges de consommation, lourde, coûteuse et longue, alors qu’existent des méthodes alternatives beaucoup moins contraignantes et bien plus efficaces, comme les dispositifs de médiation existants ou la procédure de « clause abusive » proposée par le Gouvernement dans le cadre de ce projet de loi ?
Je rappelle que la loi du 1er juillet 2010, présentée par M. Novelli, a créé, auprès de l’Institut national de la consommation, une commission de la médiation de la consommation chargée de rédiger une charte des bonnes pratiques de la médiation. Ce document vient d’ailleurs d’être élaboré et vise à garantir l’efficacité des procédures de médiation, parmi lesquelles la gratuité du recours à la médiation pour les consommateurs ou encore l’impartialité des médiateurs.
Les consommateurs français ont de plus en plus souvent recours à la médiation pour régler leurs différends en matière de consommation, et les dispositifs de médiation ont déjà fait la preuve de leur efficacité, notamment dans les domaines des banques, des assurances, du transport et des communications électroniques.
À la demande du Gouvernement, le MEDEF et les fédérations professionnelles se sont engagés à mettre en place de nouveaux dispositifs de médiation dans plusieurs secteurs qui n’en disposent pas encore.
Une médiation sectorielle a été instituée dans le domaine de l’eau en octobre 2009, le champ de la médiation des communications électroniques a été élargi en janvier 2010, tandis que des médiations de branche sont opérationnelles depuis janvier 2011 dans les secteurs de la franchise et de la construction de maisons individuelles. Enfin, des travaux se poursuivent également dans les domaines de l’automobile et du tourisme.
Le Gouvernement a fixé pour objectif que tous les consommateurs qui le souhaitent, quel que soit le secteur considéré, puissent accéder à un médiateur d’ici au 1er juillet 2012.
En matière de consommation, les Français renoncent généralement à se présenter devant un juge pour un litige de consommation résultant d’une mauvaise exécution des obligations d’un professionnel et portant sur un faible montant. Ce type de litige exige des moyens de résolution proportionnés, efficaces et surtout rapides, qui n’obligent pas le consommateur à se rendre systématiquement devant la justice.
C’est la raison pour laquelle les consommateurs français ont recours à la médiation de manière croissante pour régler leurs différends en matière de consommation.
Le renforcement de la médiation, que nous soutenons avec nos collègues UMP de la commission de l’économie, ne peut s’opérer sans le développement de l’information fournie aux consommateurs sur l’existence et le fonctionnement des procédures de médiation. Tel est l’objet, à l’article 9, d’un amendement de mes collègues Pierre Hérisson et Gérard César, adopté par la commission, sauf erreur de ma part, à l’unanimité. (M. Gérard César acquiesce.)
La médiation est donc à mes yeux la meilleure des solutions pour compenser les préjudices subis par le consommateur, d’autant plus que – le Gouvernement s’y est engagé – des dispositifs de médiation seront étendus à tous les secteurs de la consommation dans quelques mois.
Dans ce cadre, pourquoi vouloir introduire l’action de groupe dans notre droit ? Il s’agit d’une procédure extrêmement coûteuse pour la société comme pour les entreprises. En outre, dans un contexte de sortie de crise, elle paraît aujourd’hui inopportune.
De plus, il s’agit d’une procédure très longue, je le répète : le déroulement d’un procès dure en moyenne plus de deux ans, et certaines class actions s’étendent même sur plus de dix ans, contre seulement trois mois pour les procédures de médiation.
Mme Élisabeth Lamure. Les gains de ces longues procédures collectives sont relativement faibles pour les consommateurs plaignants et, en réalité, celles-ci profitent surtout aux cabinets d’avocats.
Mme Nathalie Goulet. Et alors ?
Mme Élisabeth Lamure. Le consommateur a donc tout intérêt à s’appuyer sur la médiation.
M. Charles Revet. Eh oui !
Mme Élisabeth Lamure. Par ailleurs, le projet de loi qui nous est présenté tend à moderniser et à renforcer les moyens d’action des agents de la répression des fraudes, ce que nous approuvons sans réserve.
Enfin, le texte prévoit qu’une clause abusive supprimée dans un contrat doit également l’être dans tous les contrats identiques conclus par des consommateurs avec le professionnel concerné. Il s’agit là d’une avancée majeure pour la mise en œuvre effective des droits des consommateurs. C’est pour l’ensemble de ces raisons qu’introduire l’action de groupe dans le droit français ne semble absolument pas justifié ; je ne pourrai, pour ma part, que m’y opposer.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. C’est dommage !
Mme Élisabeth Lamure. En conclusion, si nous nous sommes réjouis que les travaux de l’Assemblée nationale en première lecture aient débouché sur l’adoption d’un texte consensuel, nous ne pouvons que regretter que la commission de l’économie et la commission des lois du Sénat aient politisé celui-ci par l’introduction de mesures à effet d’annonce. C’est franchement dommage, et mes collègues du groupe UMP et moi-même déplorons que M. le rapporteur ait choisi de donner à ce projet de loi une orientation partisane, alors que nous aurions pu adopter l’attitude constructive qui a prévalu à l’Assemblée nationale tout au long des travaux de la première lecture, ainsi d’ailleurs que lors des auditions menées par le groupe de travail au Sénat. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
(M. Charles Guené remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.)