compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Patrick Courtois
vice-président
Secrétaires :
Mme Marie-Noëlle Lienemann,
Mme Catherine Procaccia.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Dépôt d'un document
M. le président. M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 8 de la loi n° 2010–237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, l’avenant à la convention entre l’État et l’Agence nationale de la recherche relative au programme d’investissements d’avenir, action « Recherche dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ».
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des finances, à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication et à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Il est disponible au bureau de la distribution.
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Modification de l'ordre du jour
M. le président. Par lettre en date du 1er décembre 2011, M. Jacques Mézard, président du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, a souhaité inverser l’ordre d’examen des deux propositions de loi inscrites à l’ordre du jour de l’espace réservé de son groupe le mercredi 7 décembre.
Acte est donné de cette demande.
L’ordre du jour de la séance du mercredi 7 décembre s’établit donc comme suit :
Mercredi 7 décembre
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe RDSE :
1°) Proposition de loi visant à punir d’une peine d’amende tout premier usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants ;
2°) Proposition de loi visant à étendre l’obligation de neutralité aux structures privées en charge de la petite enfance et à assurer le respect du principe de laïcité ;
À 18 heures 30 et le soir, sans changement :
3°) Débat préalable au Conseil européen du 9 décembre 2011.
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Loi de finances pour 2012
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 106, rapport n° 107).
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Articles non rattachés (suite)
M. le président. Nous poursuivons, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, l’examen des articles non rattachés aux crédits.
TITTRE IV (SUITE)
DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES ET BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES (suite)
M. le président. Nous en sommes parvenus aux amendements portant article additionnel après l’article 47.
Articles additionnels après l'article 47
M. le président. L’amendement n° II–120 rectifié, présenté par MM. Nègre, Vial, Bernard-Reymond et Deneux, est ainsi libellé :
Après l’article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 1010 A du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 1010 A. – Les véhicules fonctionnant exclusivement ou non au moyen de l’énergie électrique, du gaz naturel véhicules, du gaz de pétrole liquéfié ou du superéthanol E85 mentionné au 1 du tableau B du 1 de l’article 265 du code des douanes sont exonérés de la taxe prévue à l’article 1010.
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, les véhicules qui fonctionnent alternativement au moyen de supercarburants et de gaz de pétrole liquéfié sont exonérés de la moitié du montant de la taxe prévue à l’article 1010.
« Les exonérations prévues aux premier et deuxième alinéas s’appliquent pendant une période de huit trimestres décomptée à partir du premier jour du trimestre en cours à la date de première mise en circulation du véhicule. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
L’amendement n° II–227 rectifié bis, présenté par M. Guené, est ainsi libellé :
Après l’article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa du III de l’article 1586 octies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le contribuable est une société mère, membre d’un groupe au sens de l’article 223 A, le produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due par cette société mère est réparti entre les collectivités locales en fonction de l’implantation de la société mère et de l’ensemble des entreprises membres du groupe, au prorata des valeurs locatives et des effectifs de ces structures. »
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet amendement, que j’avais déjà déposé l’an dernier, n’avait pas alors recueilli le succès qu’il méritait. J’ai cru utile de le redéposer cette année. Je pensais que nous serions dans une situation qui permettrait de l’examiner dans de meilleures conditions.
Or, à l’heure actuelle, nous n’avons pas encore connaissance de la répartition au plan national de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE. J’ai néanmoins de bonnes raisons de penser qu’elle est concentrée dans une région précise de l’Hexagone.
Le régime qui s’applique aux groupes fait quelque peu échec à la répartition, car il a pour effet de concentrer la distribution de CVAE là où les sociétés mères ont leur siège et déclarent leur cotisation.
Cet amendement tend à permettre une répartition là où se trouve l’activité, au niveau des filiales. Même s’il est peu probable que cet amendement soit accepté, je pense qu’il pose une vraie question. À défaut de le retenir cette année, je demande qu’on le considère comme un amendement d’appel et qu’on y réfléchisse.
M. le président. L’amendement n° II–367 rectifié, présenté par MM. Jarlier, Vanlerenberghe, Deneux et Détraigne, est ainsi libellé :
Après l’article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa du III de l’article 1586 octies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le contribuable est une société membre d’un groupe au sens de l’article 223 A, les dispositions du présent III sont appliquées à la somme des valeurs ajoutées de l’ensemble des sociétés membres du groupe qui est répartie au regard de la somme des valeurs locatives et des effectifs de l’ensemble des sociétés membres du groupe. »
La parole est à M. Pierre Jarlier.
M. Pierre Jarlier. Cet amendement est dans la droite ligne de celui que vient de présenter Charles Guené. Il vise en effet à corriger une imperfection issue de la réforme de la taxe professionnelle, qui provoque une évasion de la CVAE, et une perte de recettes et, surtout, de dynamique de base au titre de la contribution économique territoriale, la CET, pour de nombreuses communes.
En l’état du droit, la valeur ajoutée est répartie entreprise par entreprise, y compris lorsque les entreprises appartiennent à un groupe redevable unique de l’impôt sur les sociétés.
Au titre des exercices clos en 2006, les 73 000 entreprises environ, sur près de 2,9 millions, appartenant à un groupe fiscal au sens de l’impôt sur les sociétés ont réalisé plus de la moitié de la valeur ajoutée nationale. Sur les mêmes exercices, 43 % de la valeur ajoutée était produite par des entreprises présentes dans une seule commune. Les groupes représentent donc une part déterminante de la valeur ajoutée, dont la répartition entre communes est nécessaire.
Or, si les critères de répartition ne s’appliquent, comme c’est le cas en l’état du droit, que redevable par redevable, la stabilité de l’assiette et du produit risque de ne pas être assurée puisque les décisions d’organisation juridique des groupes détermineront, de fait, la répartition d’une part déterminante de la valeur ajoutée nationale, comme l’a indiqué Charles Guené.
Cette imperfection dans la rédaction de la loi a déjà provoqué une perte importante de base d’imposition au titre de la CET pour de nombreuses communes. Ainsi, même si nous ne disposons pas des chiffres exacts, certaines communes ont vu cette année leur base diminuer, en dépit d’une évolution positive de l’activité sur leur territoire.
Cet amendement tend donc à garantir que la CVAE sera bien collectée dans les communes de production. Il évite ainsi les jeux fiscaux par le biais de filiales, souvent utilisées pour éviter la localisation de cet impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Nous avons déjà eu ce débat, qui pose le problème de l’application du principe de la territorialisation adopté lors de la réforme de la taxe professionnelle, surtout en ce qui concerne les groupes.
Ces deux amendements, qui correspondent sans doute à des cas particuliers, rouvrent le débat sur la taxe professionnelle, dont la réforme n’a pas été suffisamment pensée, et qui posera des difficultés durant quelques années encore.
L’amendement n° II–227 rectifié bis prévoit que, dans le cas d’une société mère d’un groupe fiscal, le produit de la CVAE soit réparti en fonction des implantations de la société mère et des sociétés membres, selon les deux clefs de localisation-répartition de la valeur ajoutée appliquées à l’ensemble de ces structures. L’amendement n° II–367 rectifié a le même objet.
Ces deux amendements engendreraient des transferts très importants entre collectivités et aggraveraient l’instabilité du dispositif que nous avons maintes fois dénoncée.
On peut débattre longuement des mérites de la territorialisation et des contraintes qu’elle impose.
Lors de nos débats sur la difficulté que nous éprouvions à sortir du problème de la péréquation horizontale au niveau du bloc communal, qui ont eu lieu mercredi dernier et samedi après-midi, les uns et les autres se sont plaints de l’absence de simulation – je n’y reviens pas. Nous parlions alors de 250 millions d’euros pour la première année, et d’un objectif de 1 milliard d’euros en 2015.
En l’occurrence, nous ne connaissons pas le produit total de cette disposition fiscale, puisque nous ne disposons d’aucune simulation. On peut toutefois l’évaluer, une fois ôtés les dégrèvements, à 11 milliards d’euros. (M. François Marc opine.) Le problème que nous dénoncions la semaine dernière, à savoir l’absence de simulations, se pose avec plus d’acuité encore s’agissant d’une disposition portant sur une masse aussi énorme et qui entraînera des transferts dont on ne mesure pas la pertinence. Cela étant dit, je conviens qu’il faudra régler les cas particuliers qui viennent d’être évoqués.
Le principe de la territorialisation a ses contraintes, mais j’avais cru comprendre que le Sénat y était attaché.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Messieurs les sénateurs, vous souhaitez que, en présence d’une entreprise intégrée fiscalement, on puisse répartir sa CVAE entre l’ensemble des entreprises membres du groupe, et ainsi entre les collectivités territoriales et les EPCI où sont situées ces entreprises. Je ne peux vous suivre dans cette voie, pour trois raisons.
Tout d’abord, les modalités de répartition de la valeur ajoutée ont pour objectif de permettre aux collectivités de percevoir un produit de cotisation qui reflète au plus près l’activité économique réalisée sur leur territoire. On ne peut donc faire une clef de répartition arbitraire, théorique ou systématique entre la société mère et les filiales.
Ensuite, nous ne disposons aujourd’hui d’aucun élément nous permettant d’affirmer que la structure économique d’un groupe intégré favoriserait certains territoires ou en pénaliserait d’autres. Vous recevrez toutes les informations sur les montants de CVAE collectés, les déclarations des groupes et la répartition entre collectivités, de manière agrégée. Cela permettra aux commissions du Sénat et de l’Assemblée nationale ainsi qu’au Comité des finances locales de vérifier, à l’occasion de leur analyse de leur contribution à la valeur ajoutée, si les grands groupes ont bien tenu compte de la création de valeur ajoutée dans les régions.
Il sera en effet intéressant de savoir si ces groupes n’ont pas rapatrié au siège de la maison mère, le plus souvent situé en Île-de-France ou dans une grande métropole, l’essentiel de la valeur ajoutée créée dans d’autres territoires.
Il apparaît à l’heure actuelle à l’administration fiscale que la plupart des opérations intragroupes n’ont pas d’effet sur la détermination de la valeur ajoutée. Il en est ainsi de la mise à disposition de personnels : les effectifs employés plus de trois mois restent bien déclarés par l’employeur juridique, et ils le sont à l’adresse où ils sont effectivement employés. Cette opération n’a donc aucun effet sur la répartition de la valeur ajoutée. Elle n’a pas non plus d’effet sur la valeur ajoutée elle-même, dans la mesure où celle-ci comprend, par exemple, les refacturations de frais.
Il en est de même des facturations intragroupes, qui, lorsqu’elles sont anormales, peuvent être corrigées par l’administration. Nous avons déjà eu ce débat samedi dernier, à propos des prix de transfert entre filiales. Cela vaut pour les filiales installées à l’étranger, cela vaut évidemment pour celles qui sont situées en région.
Il en est de même, aussi, de la location des locaux : si elle est supérieure à six mois, la valeur ajoutée de la structure qui exploite n’est pas minorée.
Enfin, vous estimez que votre proposition permettrait une juste répartition des produits entre les collectivités.
Je tiens à vous le rappeler, dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, le maintien du montant de la ressource a été garanti. Cela signifie que, si des collectivités ont constaté une perte de ressources à la suite de la réforme, cette perte a été prise en compte et intégralement compensée.
Par conséquent, je vous demande, messieurs les sénateurs, de bien vouloir retirer vos amendements, jusqu’à l’obtention de plus amples informations, et notamment des tableaux de répartition de la collecte de la CVAE qui seront transmis au Parlement. À défaut de retrait, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Guené, l’amendement n° II–227 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Charles Guené. Je vais bien sûr retirer mon amendement. Comme je l’avais annoncé d’emblée, il s’agit d’un amendement d’appel, mais d’appel pressant. Je le retire dans la mesure où nous ne disposons effectivement pas des éléments d’information nécessaires. C’est un excellent argument pour justifier une demande de retrait.
Pour répondre à Mme la rapporteure générale, je tiens à souligner qu’à réalité égale sur le terrain, c’est l’organisation sous forme de groupe qui modifie l’affectation de la CVAE.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. C’est vrai !
M. Charles Guené. C’est donc un échec à la territorialisation. Voilà pourquoi il faut modifier le système existant. Lorsque nous disposerons d’éléments d’appréciation plus substantiels, je suis tout à fait d’accord pour que nous étudiions de nouveau ce sujet. Et j’en conviens, la solution que je propose n’est pas forcément la meilleure. En tout état de cause, la discussion que nous venons d’avoir vous permettra sans doute d’émettre un avis favorable sur l’amendement que je proposerai par la suite.
M. le président. L’amendement n° II–227 rectifié bis est retiré.
Monsieur Jarlier, l'amendement n° II–367 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre Jarlier. Non, monsieur le président, je le retire, en raison des arguments qui viennent d’être exposés par Mme la ministre et Mme la rapporteure générale et bien que les premières informations dont nous disposons montrent que des transferts de CVAE ont lieu par le biais des filiales.
Comme vous l’avez dit, madame la ministre, je pense qu’il faudra, au début de l’année prochaine, que nous regardions quelle est la réelle répartition de la CVAE sur le terrain et de quelle façon le jeu des filiales a été utilisé pour délocaliser une partie de la CVAE. (M. François Marc opine.)
Quelques informations indiquent que le système actuel peut être catastrophique pour certaines collectivités, notamment pour celles qui accueillent des entreprises de production et sur le territoire desquelles ne se trouvent ni le siège ni les services de direction de ces sociétés, ce qui est le cas de nombreux groupes.
Madame la ministre, j’ai bien pris note que vous étiez attentive à ce problème. Peut-être en 2012 pourrions-nous voir avec la commission des finances comment corriger l’imperfection rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° II–367 rectifié est retiré.
L'amendement n° II–445, présenté par MM. Doligé, de Legge, Doublet, Karoutchi, Laurent, P. Leroy, Revet et du Luart, est ainsi libellé :
Après l'article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la dernière phrase du dernier alinéa du 2° du 1 du II de l'article 1600 du code général des impôts, le mot : « est » est remplacé par les mots : « peut être ».
La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Cet amendement vise à introduire un peu plus de souplesse à la suite de la réforme relative aux chambres de commerce et d’industrie qui est intervenue et à donner la possibilité à ces dernières de passer des contrats d’objectifs et de moyens avec les représentants de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. La commission des finances émet un avis défavorable.
Nous avons longuement débattu de la réforme des chambres de commerce et d’industrie. M. Doligé, alors rapporteur de la commission des finances, avait conclu que ces dernières devaient signer avec l’État – d’ailleurs, c’est prévu dans la loi – une convention d’objectifs et de moyens. Or, aujourd’hui, il est le premier signataire d’un amendement qui tend, à l’inverse, à prévoir une simple faculté. Il me semble difficile de revenir sur la toute récente loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services.
Sur le fond, on pourrait soutenir que les chambres de commerce et d’industrie ne sont pas des opérateurs de l’État et pourraient ne pas signer un contrat d’objectifs et de moyens. Elles ont néanmoins des missions de service public. Du reste, les contrats de cette nature prévus par la loi portent précisément sur les missions confiées par l’État à ces organismes.
Lorsqu’on met dans la balance les arguments favorables et défavorables à la mesure proposée, ce sont les seconds qui l’emportent.
Le contrat d’objectifs et de moyens porte sur les missions de service public mais l’objectif n’est pas du tout de restreindre la liberté d’action des gestionnaires, comme pourraient le craindre les chambres de commerce et d’industrie. La taxe affectée à celles-ci, d’un montant de 1,2 milliard d’euros, ne représente qu’un quart du budget global du réseau. Par conséquent, je le répète, la commission des finances émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. L’avis du Gouvernement est plutôt favorable. En effet, nous pensons préférable, comme vous le suggérez, monsieur de Legge, de laisser la faculté aux chambres de commerce et d’industrie de conclure des conventions d’objectifs et de moyens avec l’État à compter de 2013. Il ne nous semble pas nécessaire de les y obliger.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Je souhaite intervenir à la suite de la présentation des deux derniers amendements, le premier concernant la CVAE, le second les chambres de commerce et d’industrie. Je n’en conteste pas le bien-fondé, bien au contraire, car l’argumentation développée présente une certaine légitimité.
Pour émettre un avis défavorable sur ces deux amendements, la commission des finances s’est fondée sur une carence totale d’information justifiant que l’on prenne le temps d’étudier ce qui va se passer.
Madame la ministre, lors de l’examen de la réforme de la taxe professionnelle et de celle des chambres de commerce et d’industrie, nous avons, les uns et les autres, attiré l’attention sur la nécessité de percevoir avec exactitude les conséquences que ces textes pourraient avoir sur les territoires.
Bien que la commission des finances du Sénat ait veillé à ce que la territorialisation soit prise en compte, il semble que des perspectives de délocalisation de la recette existent aujourd’hui, car, inévitablement, les groupes vont essayer d’optimiser le système mis à leur disposition. Par conséquent, en province et dans les départements ruraux, en particulier, des territoires ne percevront pas ce qui devrait leur revenir.
Madame la ministre, selon vous, toute perte de recettes sera compensée. Malheureusement, les progressions ultérieures d’activité génératrices de recettes, lesquelles auraient normalement dû bénéficier aux territoires, profiteront au lieu où se situe le siège de l’entreprise. Par conséquent, si vos propos sont justes à l’instant T, un risque de perte de recettes assez important est à craindre dans une perspective de deux à cinq ans.
Nous avons du mal à comprendre que le Gouvernement s’engage dans cette direction sans donner les informations utiles. De surcroît, nous ne savons toujours pas à quelle date nous disposerons des informations relatives à l’affectation territoriale de la CVAE. Nous n’avons d’ailleurs aucune indication sur les répartitions opérées cette année.
Pour ce qui concerne les chambres de commerce et d’industrie, nous nous sommes également beaucoup interrogés. Aujourd’hui, dans nos départements, le mécontentement monte à l’égard de la réforme qui va s’appliquer. Cette situation résulte de l’impréparation du texte en cause. En tout cas, le Sénat, qui avait pourtant tiré la sonnette d’alarme, n’a pas été assez écouté.
Cela étant, je ne peux que vous faire part de notre insatisfaction, car les textes ne sont pas suffisamment préparés en amont ; il en résulte des effets pervers.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je souhaite intervenir sur le financement des chambres de commerce et d’industrie.
L’an dernier, nous avions consacré quelques heures de délibération à ce sujet fort intéressant.
À l’époque, j’étais de ceux qui souhaitaient une clarification des missions et du financement de ces organismes, de manière à pouvoir séparer, autant que possible, des missions de service public, à définir, et des missions, plus diverses, correspondant aux besoins des différents territoires. En liaison avec les représentants des réseaux consulaires, nous nous étions efforcés d’aboutir à une clarification, laquelle, cependant, n’a été que partielle.
Pour ma part, j’ai regretté que les chambres départementales soient excessivement encadrées et qu’elles se voient imposer ce que je considère comme étant un carcan.
Mme la rapporteure générale l’a rappelé, notre collègue Doligé avait alors plaidé plutôt en faveur de contrats d’objectifs et de moyens. Aujourd’hui, l’amendement qu’il a déposé avec plusieurs de ses collègues tend à plus de souplesse. Après tout, si les cotisants à une compagnie consulaire souhaitent faire un effort supplémentaire pour se doter d’outils supplémentaires, pourquoi les en empêcherait-on ? C’est en vertu de ce principe que je suis, pour ma part, plutôt favorable à cet amendement, que je voterai.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 47.
L'amendement n° II–66 rectifié quater, présenté par MM. J. Gautier, Couderc, Cambon et Houel, Mme Mélot, MM. B. Fournier et Doligé, Mme Deroche, MM. Bourdin, Cointat et G. Bailly, Mme Jouanno, M. Cléach, Mme Bouchart et MM. del Picchia et Ferrand, est ainsi libellé :
Après l’article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 1615–6 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les investissements relatifs aux installations de traitement de déchets ménagers et assimilés réalisés par les communes et leurs groupements, bénéficient d’une attribution du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de la fraction des investissements pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée n’a pas été déduite fiscalement, et ce, quelle que soit la part de l’installation consacrée à l’activité de valorisation imposable à la taxe sur la valeur ajoutée. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous sommes tous des élus locaux et nous connaissons tous les énormes efforts d’investissement que nous réalisons pour permettre une meilleure valorisation, notamment énergétique, des déchets ménagers.
Or vous savez que les règles d’accès au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, ou FCTVA, dans leur forme actuelle, incitent, au contraire, à limiter la part de la valorisation matière, et ce en opposition avec le Grenelle de l’environnement. Je ne reviendrai pas sur le mécanisme en cours.
Je vous propose simplement de généraliser le régime mixte pour les collectivités qui font l’effort de développer des équipements de valorisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Au départ, la commission avait émis un avis favorable, sous réserve d’une rectification, qui depuis a été effectuée.
Vous avez raison, mon cher collègue, à l’heure actuelle, un régime mixte s’applique en la matière. La TVA est déduite pour les investissements liés à la valorisation et remboursée via le FCTVA pour les investissements liés au traitement des déchets. Ce régime est réservé aux installations pour lesquelles la valorisation ne représente qu’une partie accessoire de leur activité, soit moins de 20 %. Au-delà de ce seuil, les investissements liés au traitement des déchets ne sont plus éligibles au FCTVA.
Vous voulez remédier aux effets pervers d’un dispositif qui incite les collectivités à ne pas trop accroître la part de leurs installations consacrée à la valorisation. Je rappelle que, voilà un certain temps déjà, la France a pris des engagements communautaires en matière de valorisation des déchets.
Pour toutes ces raisons, la commission est favorable à cet amendement.
Madame la ministre, par honnêteté intellectuelle, je ne peux que reconnaître que cette mesure aura un coût, non encore évalué, pour l’État. Il faut cependant être cohérent : puisque nous sommes favorables à l’augmentation de la part de valorisation, nous devons encourager les collectivités à atteindre cet objectif.