M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis de vous présenter cette mission du budget 2012 du ministère de l’agriculture.
J’entrerai d’emblée dans le vif du sujet pour dire qu’il m’arrive parfois de penser que nous ne vivons pas tous dans le même monde.
Mme Bernadette Bourzai. Ça, c’est sûr !
M. Bruno Le Maire, ministre. En effet, à écouter Mme Renée Nicoux, on a le sentiment que l’agriculture va mal, que la loi ne porte pas ses effets, que les prix ne se relèvent pas et que tous les agriculteurs sont plongés dans une dépression profonde. Pardonnez-moi, mais je ne partage pas ce misérabilisme sur le monde agricole. (Mme Bernadette Bourzai s’exclame.) Je connais les difficultés du monde agricole, je vais dans les exploitations deux fois par semaine. Je rencontre des paysans qui souffrent, en particulier, ceux qui touchent des retraites encore trop faibles. Dans le Massif central, par exemple, je vois bien les difficultés soulignées par Alain Bertrand. Je sais que beaucoup d’éleveurs n’ont pas des revenus suffisants, mais, enfin tout de même, un peu d’optimisme, un peu de réalisme ! (Mme Michèle André s’exclame.)
Quelle filière a repris aujourd’hui la première place en matière de viticulture mondiale ? C’est la viticulture française ! Quelle est la seule filière économique aujourd’hui productrice de richesses en matière d’exportations, celle dont les excédents commerciaux extérieurs ont augmenté de 20 % ? C’est la filière agricole ! Quels sont les seuls prix qui ont réellement remonté dans les filières animales ? Ce sont ceux de la filière bovine, qui vient d’enregistrer plus de 30 centimes d’augmentation du kilogramme de viande ! C’est la plus forte augmentation depuis huit ans ! Regardez la réalité en face, regardez les résultats que nous avons obtenus ! (M. Jean-Claude Lenoir applaudit.)
Je refuse catégoriquement qu’on cède au misérabilisme sur le monde paysan français. Il a fait des réformes, il a su changer, il a su s’adapter et il réussit mieux que beaucoup d’autres filières économiques ! Vous ne convaincrez pas les paysans français en leur mettant la tête sous l’eau, en leur expliquant que tout va mal, alors que, grâce à leurs efforts et à leur détermination, ils ont relevé la tête et sont aujourd’hui à la tête de l’agriculture européenne !
Ce budget est à l’image de ce que nous voulons faire pour les paysans français. Nous l’avons maintenu à 5,5 milliards d’euros. Nous avons voulu, comme Yannick Botrel l’a d’ailleurs rappelé, faire en sorte que l’agriculture française puisse disposer des moyens dont elle a besoin. Et, là encore, quand on regarde, filière par filière, on s’aperçoit que les choses progressent.
Depuis trois ans, l’agriculture française a relevé la tête. Et on ne peut pas, chaque année, servir le même discours, qui consiste à dire : tout va mal, les prix s’effondrent, la crise frappe partout et les paysans français n’arrivent pas à réussir aussi bien qu’ils le devraient. Car ce n’est pas rendre justice aux efforts qu’ils ont faits. S’il est une filière économique qui a su se moderniser, un secteur de l’économie qui a su prendre à bras-le-corps la mondialisation et les réformes européennes, s’il est un secteur qui a compris la nécessité de s’adapter à la demande mondiale, de changer et de faire preuve, en matière de respect de l’environnement, de plus d’attention et de changement, c’est le secteur agricole !
Défendre les paysans français, ce n’est pas leur dire : tout va mal ! Défendre les paysans français, c’est leur dire : vous réussissez, vous y arriverez et vous réussirez encore mieux demain ! (Mme Renée Nicoux s’exclame.) C’est ma conviction profonde.
Examinons les filières les unes après les autres. Dans l’élevage, la stratégie que nous avons suivie est la seule qui donne des résultats. L’élu du Massif central qu’est Alain Bertrand ne me contredira pas sur ce sujet. Les éleveurs français ont terriblement souffert au cours des dernières années.
Mme Bernadette Bourzai. C’est sûr !
M. Bruno Le Maire, ministre. Pour la première fois, ils ont le sentiment que leur ministre a compris quelle est la bonne stratégie à adopter : assez de subventions, assez d’allocations, assez de prix soutenus artificiellement, assez de promesses que l’État ne peut plus tenir, assez d’argent public qu’on n’a plus les moyens de donner ! En revanche, de l’organisation des filières, la création d’un groupement à l’exportation – qu’ils attendaient depuis des années et qu’aucun de mes prédécesseurs n’avait eu le courage de faire –, l’ouverture des marchés – qu’ils demandaient depuis des années et qu’aucun de mes prédécesseurs n’avait réussi à obtenir, qu’il s’agisse du marché turc, du marché russe ou des marchés d’Afrique du Nord. Ces marchés, aujourd’hui, sont ouverts parce qu’on a fait les démarches nécessaires ! Et les prix remontent !
Vous savez tous que les éleveurs veulent vivre décemment de leur travail. Ils veulent des prix, et non des primes. Et ce relèvement des prix, vous le savez aussi, ne sera pas le résultat d’une augmentation de la consommation en France. Les prix évolueront au rythme de notre capacité à prendre des parts de marché en Russie, au Kazakhstan, en Afrique du Nord, en Turquie, au Japon, dans tous ces pays qui consomment de plus en plus de viande bovine.
Voilà la réalité et voilà pourquoi je continuerai à me battre. Une augmentation de trente centimes d’euro au kilogramme pour la viande bovine, c’est le meilleur résultat depuis huit ans, qu’on le veuille ou non !
J’en viens à la filière laitière. Bien sûr, des difficultés demeurent, et je ne les nie pas, notamment sur la signature des contrats. Mais nous sommes en passe de les surmonter. Les producteurs de lait vont saisir le Médiateur, qui est là pour éviter que, comme Jean-Claude Lenoir le signalait, un certain nombre d’industriels n’abusent d’eux et ne leur fixent des ultimatums. Aucun ultimatum n’est acceptable !
J’ai tout fait pour renforcer le pouvoir des producteurs de lait. Nous sommes en train d’y arriver. Le 15 décembre prochain, pour la première fois depuis douze ans, l’Union européenne va modifier son droit de la concurrence grâce au « paquet lait » que nous avons fait adopter, grâce aux mesures prises sous notre impulsion, grâce à l’appel de Paris lancé en 2009 dans lequel nous réclamions une meilleure organisation des producteurs de lait pour une négociation équitable avec les industriels. Voilà la réalité !
Le 15 décembre prochain, nous adopterons, au Conseil des ministres de l’agriculture, une modification du droit de la concurrence européen qui permettra aux producteurs de lait de se regrouper non plus à 300 ou 400 comme ils le font aujourd’hui, mais à 3 000 ou 4 000. Et, permettez-moi de vous le dire, à 3 000 ou 4 000, ils seront tout de même un peu plus puissants qu’auparavant pour négocier leurs contrats, un peu plus puissants pour négocier leurs prix (M. Jean-Claude Lenoir opine.) et, donc, un peu plus puissants pour négocier leurs revenus. Voilà la réalité des changements agricoles !
Le contrat fonctionnera parce que les producteurs seront plus nombreux pour négocier un prix équitable avec les industriels. Et si dans l’intervalle, un certain nombre d’industriels abusent, je le dis une fois encore, le Médiateur est là pour rétablir l’équilibre entre les parties.
S’agissant des crises traversées par un certain nombre de secteurs, il reste en effet des difficultés. Je vois bien que, dans la filière des fruits et légumes, l’organisation fait encore défaut. Je vois bien que les prix sont encore trop bas. Je vois bien que les mesures que nous avons prises, même si elles restent indispensables, ne suffiront pas à relever suffisamment les revenus des producteurs de fruits et légumes, des arboriculteurs, des maraîchers, de tous ceux qui font un travail formidable, mais qui se heurtent à de vraies difficultés structurelles. Nous avons fait un certain nombre de choix qui me paraissent nécessaires.
J’ai entendu les critiques de Mme Renée Nicoux, les remarques plus positives de M. Henri Tandonnet et les observations de M. Aymeri de Montesquiou sur le coût du travail. Qu’on le veuille ou non, il faut réduire le coût du travail pour l’agriculture française, en particulier pour les producteurs de fruits et légumes, les maraîchers, les arboriculteurs. Nous n’avons pas le choix ! Je vous le dis sans aucune agressivité, avec simplement une volonté de conviction.
Vous ne pouvez pas, quand vous êtes producteur d’asperges en Alsace, à deux ou trois kilomètres de la frontière avec l’Allemagne, produire des asperges à 12 ou 13 euros de l’heure, alors que vos voisins allemands produisent exactement les mêmes asperges, de la même variété, sur le même sol, avec un coût du travail à 6 ou 7 euros de l’heure ! (Mme Odette Herviaux s’exclame.)
Oui, il est indispensable de réduire le coût du travail en France pour l’agriculture, quand il représente 60 % du coût final de la production.
Là aussi, je veux me faire bien comprendre. Nous avons eu l’occasion d’en discuter souvent ensemble. Il ne s’agit absolument pas de céder à un dumping social en Europe. Je suis le premier à dire que des coûts du travail à 5 ou 6 euros de l’heure, ce n’est pas acceptable. Je suis le premier à dire qu’il faut refuser que, dans les abattoirs allemands, 90 % des salariés, venus des pays de l’Est, en particulier de Pologne, soient rémunérés à 6 euros de l’heure pour un travail dont chacun sait, s’il est allé dans un abattoir, qu’il est probablement l’un des plus difficiles et pénibles qu’on puisse imaginer aujourd’hui dans l’industrie agroalimentaire !
Et je ne me contente pas de discours ! Voilà des mois que je suis allé en Allemagne discuter de ces questions de salaire horaire avec les représentants de la CDU. (Mme Bernadette Bourzai s’exclame.) Et pour la première fois dans son histoire, cette dernière a inscrit dans son programme pour 2013 la création d’un salaire minimum dans un certain nombre de branches, notamment les branches de l’industrie agroalimentaire. (Mme Bernadette Bourzai s’exclame de nouveau.)
J’essaie juste d’être cohérent par rapport à mes convictions.
Mes convictions, c’est que la France doit gagner en compétitivité. Mes convictions, c’est que l’agriculture française et les paysans français ne peuvent pas supporter un coût du travail durablement plus élevé que celui de ses grands voisins européens que sont l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie. Mais mes convictions, c’est aussi que gagner en compétitivité ne peut pas signifier dumping social. Gagner en compétitivité ne veut pas dire s’aligner sur les plus mauvaises pratiques en Europe. Gagner en compétitivité veut dire améliorer nos produits, réduire nos coûts de production et faire en sorte que tous les autres pays européens partagent une volonté d’harmonisation en matière de coût du travail.
Je veux maintenant répondre aux remarques de Joël Labbé, d’Yvon Collin et d’un certain nombre d’entre vous sur les questions environnementales. Nous voulons une agriculture durable, et nous avons maintenu un certain nombre de crédits pour cette agriculture ; je le dis d’ailleurs à l’intention de Joël Labbé, qui critique le crédit impôt bio. Je rappelle qu’il a été relevé de 2 000 euros à 2 500 euros et que son coût atteint plusieurs millions d’euros. Nous sommes donc respectueux de l’agriculture biologique. Nous sommes les premiers à avoir posé des règles imposant d’introduire 20 % de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective. C’est dire que nous croyons à ce développement de l’agriculture biologique.
Mais sur l’environnement, soyons très clairs. Nous devons faire en sorte que les règles environnementales respectent un certain nombre de principes que j’ai fixés en 2009, auxquels je suis attaché et que je continuerai à défendre. J’ai en effet la conviction que les paysans français ont besoin qu’on respecte ces règles et ces principes afin de faire de l’environnement non pas un handicap, mais un atout pour l’agriculture française.
Première de ces règles, il faut que les choix environnementaux soient compatibles avec la situation économique des exploitations.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Vous ne pouvez pas demander à des paysans français de payer trop cher des règles environnementales qui n’auraient pas été étudiées en fonction de ce qui est supportable sur le plan économique.
Dans une situation de crise, comme celle de 2009, où certains des paysans français perdent 54 % de leur revenu, vous ne pouvez pas leur dire : les règles environnementales, les obligations sur les parcelles et la diversité, on n’y touche pas, tant pis pour vous, vous payez nonobstant votre baisse de revenu. C’est tout simplement intenable !
M. Gérard Bailly. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Il faut savoir faire preuve de souplesse et de compréhension par rapport à la situation économique des paysans.
M. Aymeri de Montesquiou. Enfin !
M. Bruno Le Maire, ministre. Deuxième principe tout simple et de bon sens, les règles environnementales doivent être des règles européennes. On ne peut pas laisser subsister des règles différentes selon les États de l’Union,…
M. Gérard Bailly. Exact !
M. Jean-Claude Lenoir. Il faut les mêmes règles !
M. Bruno Le Maire, ministre. … car ceux qui en souffrent le plus sont ceux qui ont les règles les plus dures à respecter. L’harmonisation européenne est une condition d’acceptabilité de la règle environnementale.
Enfin, j’en viens au troisième élément et troisième principe que je défends. À l’évidence, vous ne pouvez pas dire au producteur de porcs de Normandie ou du Nord – Pas-de-Calais qu’il va devoir reconstruire totalement son exploitation car au nom du bien-être animal, chacune de ses truies allaitantes doit disposer de 2,5 mètres carrés pour s’épanouir à son aise, qu’il doit donc retirer les cages en fer, détruire son exploitation et la reconstruire de A à Z, qu’il devra au passage réduire les antibiotiques – je crois profondément à la nécessité de réduire les antibiotiques dans l’élevage porcin français ; c’est l’intérêt des éleveurs comme des consommateurs – et qu’il devra respecter encore d’autres règles environnementales – tout cela est très bien – si, dans le même temps, vous signez l’accord entre l’Union européenne et le MERCOSUR et vous faites entrer libres de droits des tonnes et des tonnes de viande porcine en Europe.
Mme Odette Herviaux. Tout à fait d’accord !
M. Bruno Le Maire, ministre. Les règles environnementales doivent être fondées sur un principe de réciprocité commerciale internationale.
M. Gérard Bailly. Oui !
M. Jean-Claude Lenoir. Très très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Je dirai maintenant quelques mots sur la pêche et la PAC. Odette Herviaux, je pourrais vous embaucher à mes côtés pour défendre la politique commune de la pêche telle que nous la concevons,…
M. Michel Delebarre. C’est une excellente idée !
M. Jean-Pierre Sueur. Non ! Nous voulons la garder avec nous !
M. Bruno Le Maire, ministre. … dans la mesure où je partage entièrement ce qui a été dit. D’ailleurs, lors de la discussion de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, nous l’avons vu, en matière d’agriculture, beaucoup de sujets dépassaient les clivages partisans. Et s’il y a bien un sujet qui peut, à mon sens, nous rassembler, c’est le fait que les propositions de réforme de la politique commune de la pêche avancées par Mme Maria Damanaki sont tout simplement inacceptables !
M. Michel Delebarre. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Elles se solderaient par la mort des 15 000 pêcheurs restants en France. Je le dis aussi simplement et aussi crûment que cela. Vous ne pouvez pas demander aux pêcheurs français de mettre en place des quotas individuels transférables et, en même temps, leur dire avec des trémolos dans la voix que vous êtes favorable au maintien de la pêche artisanale sur toutes les côtes françaises, du Nord jusqu’au Sud-ouest et à l’Aquitaine en passant par la Bretagne.
Je ne me vois pas dire aux pêcheurs de Saint-Jean-de-Luz, que je connais bien, ou aux pêcheurs de Fécamp, que je connais bien également, que nous allons maintenir une pêche artisanale et, dans le même temps, accepter des quotas individuels transférables en Europe. Si nous acceptons à Bruxelles des quotas individuels transférables, cela veut dire la mort de la pêche artisanale française au profit de la seule pêche industrielle. Jamais je ne m’y résoudrai !
De la même façon, vous ne pouvez pas leur dire zéro rejet. Il faut n’être jamais monté sur un bateau de pêche pour dire zéro rejet ! Il faut n’avoir jamais participé à une campagne de pêche pour penser que zéro rejet, c’est possible immédiatement sans donner le temps aux pêcheurs. Or c’est ce que propose Mme Damanaki et sur ce point, comme sur les autres, elle a tort.
Enfin, vous ne pouvez pas dire aux pêcheurs français que nous respectons et suivons les avis émis par les scientifiques lors des conférences internationales mais en essayant de trouver un bon équilibre entre les positions des uns et des autres, et, alors que ces scientifiques préconisent d’atteindre le rendement maximum durable en 2020, imposer la date de 2015 par une décision autoritaire, strictement politique et strictement idéologique. Allez donc dire aux pêcheurs que nous, les Européens, nous qui lavons toujours plus blanc que blanc, nous avançons l’échéance à 2015, comme cela, ils mourront cinq ans plus tôt !
Ce n’est pas acceptable !
S’agissant de la politique agricole commune, vous m’avez interrogé sur plusieurs points, que je vais reprendre.
Premièrement, il nous faut sauver le budget, sans quoi vous ne pourrez rien faire. Je rappelle que la proposition de la Commission était de baisser le budget de la PAC de 30 % en 2009, et que, à l’issue de deux ans de négociations, nous en avons obtenu le maintien, à l’euro près.
Deuxièmement, je suis favorable au « verdissement » de la PAC, mais encore faut-il qu’il soit plus simple, plus lisible, et surtout positif pour les paysans français et européens. Il ne s’agit pas de verdir la PAC pour les stigmatiser, mais il faut les encourager à adopter ces bonnes pratiques, notamment celles qui touchent aux prairies permanentes et au retournement de prairies, et en faisant preuve du minimum de pragmatisme dont a parlé Aymeri de Montesquiou.
Troisièmement, enfin, la PAC à laquelle je crois doit certes avoir un budget fort et prévoir un verdissement qui soit simple, mais elle doit aussi défendre une vraie régulation des marchés. Je me suis opposé, depuis le début, à la libéralisation des marchés agricoles. Quelles que soient les filières, nous avons besoin d’instruments de régulation et d’intervention sur les marchés. Dans le secteur viticole, par exemple, le jour où l’on aura supprimé les droits de plantation en Europe et que l’on verra pousser n’importe quel type de vignoble sur n’importe quel type de territoire, on aura mis fin à l’identité agricole européenne ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, rapporteure pour avis, pour un rappel au règlement.
Mme Odette Herviaux, rapporteure pour avis. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 32 bis relatif à la tenue des séances.
Nous avons appris hier que l’amendement n° II-188 que nous avions proposé, avec Mme Renée Nicoux, en tant que rapporteures pour avis de la commission de l’économie, ne serait pas examiné aujourd’hui en même temps que les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».
Nous sommes tout à fait conscientes du calendrier strict que nous devons respecter pour l’examen du projet de loi de finances, mais nous tenons à souligner, tout d’abord, que notre proposition de renforcement de la taxe sur les plus-values financières lors de la vente d’un terrain agricole a été guidée par la volonté d’en faire un outil vraiment dissuasif permettant de protéger le foncier agricole, ensuite, que cette proposition est tout à fait liée aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », car elle répond aux difficultés d’installation des agriculteurs en permettant d’abonder financièrement la politique d’installation, enfin, que cette proposition a été adoptée à la quasi-unanimité de la commission de l’économie et n’aurait pris que quelques instants dans notre discussion.
Renvoyer l’examen de nos propositions à la discussion des articles non rattachés du projet de loi de finances, c’est risquer de faire perdre à nos débats de leur cohérence et de leur pertinence, ce qui est regrettable. C’est surtout difficile à comprendre pour les acteurs concernés, qui attendaient cette mesure.
M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
La parole est à M. Yannick Botrel, rapporteur spécial.
M. Yannick Botrel, rapporteur spécial. Madame Herviaux, l’explication de ce report est d’ordre réglementaire. Il s’agit en effet d’une disposition fiscale, qui relève de la compétence de la rapporteure générale du budget. Nous ne pouvons donc en débattre dans le cadre de l’examen des crédits de la présente mission.
Je ne doute pas que vous défendrez cet amendement, au début de la semaine prochaine, avec la conviction et la compétence que le ministre a soulignées tout à l’heure. (Très bien ! sur plusieurs travées.)
agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales |
3 740 723 722 |
3 772 657 845 |
Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires |
2 139 643 606 |
2 170 383 692 |
Forêt |
349 687 967 |
358 447 263 |
Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation |
491 716 831 |
491 894 831 |
Dont titre 2 |
270 723 483 |
270 723 483 |
Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture |
759 675 318 |
751 932 059 |
Dont titre 2 |
648 886 196 |
648 886 196 |
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, rapporteur spécial.
M. Yannick Botrel, rapporteur spécial. J’ai déjà indiqué l’avis de la commission des finances dans mon intervention liminaire.
M. le ministre m’ayant fait l’honneur de me citer, je précise que je me réjouis, comme chacun ici, de l’amélioration intervenue dans un certain nombre de filières agricoles.
Il est vrai qu’il y a deux ans, et l’année dernière encore, les filières laitière, bovine et porcine traversaient une crise extrêmement grave ; la situation est meilleure aujourd’hui.
On peut dire, sans mésestimer l’action des uns et des autres, que cette amélioration – exportations de porcs vers le Japon et de viande bovine vers d’autres pays, reprise de la consommation de viandes blanches en France ... – tient aussi à la conjoncture ; je me réjouis qu’il en soit ainsi.
Cela étant dit, votre budget, monsieur le ministre, comporte manifestement des lacunes. Ainsi les crédits de cette mission sont-ils en diminution, et ce malgré la « rallonge » de 144 millions d’euros introduite à l’Assemblée nationale, au titre d’une mesure de dégrèvement partiel des cotisations patronales dans l’agriculture.
Force est de constater que, à périmètre égal, les crédits de la mission sont en baisse par rapport à l’an dernier.
Nous constatons également qu’un certain nombre de moyens, en particulier humains, sont en diminution. Ainsi, dans le domaine stratégique de la qualité sanitaire et de la sécurité de l’alimentation, le compte n’y est pas.
C’est pourquoi la commission des finances a décidé de proposer au Sénat de rejeter ces crédits.
Mais permettez-moi de revenir, en conclusion, sur un problème qui, comme d’autres ici, m’a interpellé, je veux parler de la situation de la contractualisation laitière, que vous aviez présentée comme l’un des points forts de la loi de modernisation de l’agriculture. Si tout se passe bien avec la plupart des entreprises, l’une d’entre elles, que je n’hésite pas à citer ici, Lactalis, exerce des pressions inacceptables sur les agriculteurs. Il est de votre devoir, monsieur le ministre, et du devoir des pouvoirs publics de se saisir de ce dossier et de s’impliquer fortement.
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)