M. Ronan Kerdraon. Mensonge !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons refusé d’augmenter le ticket modérateur ou les déremboursements de médicaments.
L’effort supplémentaire, ce n’est donc pas aux patients que nous le demandons. (Et les mutuelles ? sur les travées du groupe socialiste-EELV.) Les mutuelles bénéficiaient d’une exonération fiscale qui avait perdu sa justification.
M. Jean-Pierre Caffet. Ce n’est pas ce que dit le rapport du comité Guillaume !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Elles ont les moyens de ne pas répercuter sur les prix la suppression de cette niche ; vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs ! Nous en avons déjà débattu.
L’effort supplémentaire, je le répète, ce n’est pas aux patients que nous le demandons, mais au système de santé, aux industriels et aux professionnels de santé. Nous ferons porter cet effort sur l’organisation de notre système de soins, que nous améliorerons.
M. Ronan Kerdraon. Personne ne vous croit !
Mme Valérie Pécresse, ministre. En effet, notre sécurité sociale, c’est notre bien commun, un bien dont nous sommes tous coresponsables. Chacun d’entre nous, à la place qui est la sienne, a les moyens d’agir pour le préserver. (Mme Gisèle Printz s’exclame.)
Pour nous permettre de continuer à maîtriser l’ONDAM à 2,5 % dans la durée, nous allons, avec Xavier Bertrand, charger l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales de faire le bilan des actions que nous avons entreprises, mais aussi de tracer de nouvelles pistes.
Nous devons explorer de nouveaux gisements d’efficience…
M. Ronan Kerdraon. Belle formule !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … et réfléchir à la manière d’améliorer encore la coordination des soins entre la ville et l’hôpital afin de réduire les hospitalisations inutiles, combat que mène Marie-Anne Montchamp, notamment en ce qui concerne l’accueil des personnes âgées.
C’est en effet en évitant les hospitalisations inutiles que nous garantirons le futur de notre système de santé, en cherchant de nouvelles pistes d’économies et de meilleure organisation avec une vraie stratégie, globale et cohérente, et non pas en additionnant des dépenses supplémentaires sans aucune vision de l’avenir. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe socialiste-EELV.)
La troisième mesure adoptée par l’Assemblée nationale est l’augmentation au même rythme que la croissance des prestations familiales en 2012.
M. Ronan Kerdraon. Lesquelles ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Là aussi, je veux être très claire : depuis le premier jour de la crise, nous nous sommes refusés, par principe, à toute baisse des prestations sociales. Mieux, nous avons même renforcé tous nos filets de protection, un par un, avec, par exemple, la création du RSA. (M. Jacky Le Menn s’exclame.)
Ce choix est intangible et, malgré les incertitudes économiques, nos dépenses sociales vont continuer à augmenter, mais il est logique qu’elles progressent au même rythme que la création de richesse dans notre pays. C’est pourquoi les prestations familiales, tout comme les aides au logement, évolueront au même rythme que la croissance, avec une revalorisation forfaitaire de 1 %.
La grande leçon de la crise que nous traversons, mesdames, messieurs les sénateurs, est en effet qu’un pays ne peut dépenser plus de richesse qu’il n’en crée. (Mme Catherine Génisson s’exclame.)
Mme Gisèle Printz. Ça !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Bien sûr, il est facile de céder à la démagogie et, de part et d’autre, il nous est arrivé à tous de le faire.
C’est encore plus vrai à quelques mois d’une élection présidentielle, et il aurait été facile pour cette majorité d’ouvrir, comme tant d’autres avant elle,…
M. Ronan Kerdraon. Dont la vôtre !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … les vannes de la dépense publique par calcul électoraliste, quitte à vider les caisses de l’État. Nous ne l’avons pas fait, parce que nous avons fait le choix de la responsabilité.
La France mène aujourd’hui une bataille cruciale, celle de sa crédibilité, et cette bataille…
M. Ronan Kerdraon. Vous l’avez déjà perdue !
M. Ronan Kerdraon. Vous l’avez déjà dit !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons le devoir d’être à la hauteur. C’est pourquoi, à la différence de tous ceux qui gardent les yeux rivés sur 2012,…
M. Ronan Kerdraon. Comme vous !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … ce gouvernement construit l’avenir du pays en traçant le chemin qui nous ramènera à « zéro déficit ».
C’est aussi pourquoi, une fois encore, nous disons la vérité aux Français (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) : oui, le redressement de nos finances publiques est un effort d’intérêt national, un effort dont chacun est appelé à prendre sa juste part.
M. Ronan Kerdraon. Bon courage à chacun !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Oui, sa juste part !
C’est pourquoi nous demandons aujourd’hui plus à ceux qui ont plus (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.) avec la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ou bien encore avec la majoration de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises, la hausse de la taxation des revenus du patrimoine, la hausse de la taxation sur les plus-values immobilières.
Et c’est pourquoi nous avons exclu du champ de cette indexation forfaitaire à 1 % tous les bénéficiaires des minima sociaux, soit plus de 6 millions de personnes (Mmes Gisèle Printz et Christiane Demontès s’exclament.),…
M. Jean Desessard. Six millions…
Mme Valérie Pécresse, ministre. … notre souci étant de protéger les Français les plus fragiles, particulièrement vulnérables en cette période de crise.
La hausse de 25 % sur cinq ans du minimum vieillesse et de l’allocation aux adultes handicapés se poursuivra donc en 2012, conformément aux engagements du Président de la République. (M. Ronan Kerdraon s’exclame.)
De même, cette indexation sur la croissance ne touchera aucun revenu de remplacement et n’aura donc d’effets ni sur les victimes d’accidents du travail,…
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous fiscalisez leurs indemnités journalières !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … ni sur les personnes invalides, ni sur les retraités, l’accélération de la réforme des retraites que nous avons décidée permettant en effet de sauver, et même de sanctuariser les retraites.
Cette revalorisation forfaitaire ne concernera donc, je le répète, que les aides au logement et les prestations familiales, soit 400 millions d’euros d’économie en 2012 et 2,5 milliards d’euros de dette évitée d’ici à 2016.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, ces trois mesures devaient dans un premier temps figurer dans un projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale. Le Gouvernement a finalement fait le choix de les déposer par voie d’amendements. Je voudrais m’en expliquer un instant devant vous.
Ce choix est celui, vous le savez, de la réactivité et de la sincérité…
M. Ronan Kerdraon. Et du courage ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Valérie Pécresse, ministre. La réactivité est aujourd’hui la clé de la crédibilité financière du pays. En donnant une traduction législative la plus rapide possible au plan de retour à l’équilibre,…
M. Jacky Le Menn. Le Gouvernement tire plus vite que son ombre !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … nous démontrons que la France tiendra ses engagements quoi qu’il arrive.
Moins d’un mois après la présentation du plan de redressement des finances publiques par le Premier ministre, le premier volet des mesures a été adopté par le Parlement. C’est un signe très fort de la détermination qui est la nôtre dans la lutte contre les déficits.
Le dépôt d’un texte rectificatif aurait inévitablement abouti à un alourdissement du calendrier parlementaire et à un allongement des délais d’examen. (M. Jacky Le Menn s’exclame.)
Mme Christiane Demontès. C’est ce que nous avions dit !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons donc choisi de déposer des amendements en nouvelle lecture, comme nous y autorise la jurisprudence constitutionnelle, qui reconnaît cette faculté au Gouvernement dès lors qu’il s’agit d’assurer le respect d’un principe consacré par la Constitution – en l’occurrence, celui de la sincérité budgétaire –…
M. Ronan Kerdraon. Et du courage ! (Nouveaux sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Valérie Pécresse, ministre. … ou de procéder à des coordinations.
Or vous avez choisi, mesdames, messieurs les sénateurs, de rejeter les différents tableaux d’équilibre prévus par ce texte. Le Gouvernement était par conséquent tenu d’assurer lui-même leur coordination avec les amendements adoptés par l’Assemblée nationale en première lecture, mais aussi de traduire, par souci de sincérité, les conséquences de la révision de la croissance que nous vous avions présentée dès la première lecture de ce texte.
Nous sommes allés au bout de cette démarche, afin de garantir la sincérité et donc la qualité de vos travaux et de ce texte. Aujourd’hui, vous pouvez ainsi envisager globalement les effets de la nouvelle prévision de croissance et des mesures nouvelles prises sur l’initiative du Gouvernement.
Vous pouvez le constater, les mesures proposées par le Gouvernement nous permettront de tenir nos objectifs initiaux de réduction des déficits sociaux.
En vous présentant ce budget, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous annonçais que nous ramènerions bel et bien à 13,9 milliards d’euros le déficit du régime général et à 5,9 milliards d’euros le solde de l’assurance maladie. Eh bien, grâce aux mesures adoptées par l’Assemblée nationale, non seulement nous atteindrons ces objectifs, mais nous ferons même un peu mieux, avec un déficit du régime général réduit de 100 millions d’euros supplémentaires par rapport à nos prévisions initiales.
Nous garderons donc les deux ans d’avance que nous avons pris sur notre calendrier de réduction des déficits sociaux (Mme Gisèle Printz s’exclame.) et, parce que notre effort est structurel, nous améliorons même notre trajectoire pluriannuelle : le déficit du régime général ne sera plus que de 6,5 milliards d’euros en 2015, au lieu des 8,5 milliards d’euros initialement prévus.
Retour à l’équilibre, protection d’une croissance affaiblie, garantie durable de notre modèle social, voilà les trois objectifs que poursuit le Gouvernement. Face à des turbulences économiques qui n’épargnent aucun pays d’Europe, ces objectifs devraient tous nous réunir, je l’ai dit, parce qu’ils sont d’intérêt national.
Je le répète devant la Haute Assemblée, il n’est pas trop tard : cette nouvelle lecture vous offre une occasion supplémentaire de nous rejoindre, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
La France serait plus forte si vous reconnaissiez, comme le Gouvernement, que la réduction des déficits est une obligation absolue à laquelle aucun d’entre nous ne peut se soustraire. (M. Ronan Kerdraon s’exclame.) Le temps de la facilité budgétaire est révolu et, aujourd’hui, il n’y a qu’une stratégie crédible : dépenser moins, dépenser mieux pour désendetter le pays.
Mme Christiane Demontès. De combien avez-vous augmenté la dette, madame la ministre ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est cette stratégie qui protège notre modèle social, et ce budget du rétablissement en marche que le Gouvernement vous présente en offre une nouvelle preuve. (MM. Pierre Bordier et Claude Léonard applaudissent.)
M. Ronan Kerdraon. Mère courage…
Mme la présidente. La parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, comme l’a annoncé le Premier ministre le 7 novembre dernier, – et nous avons déjà eu l’occasion d’en débattre au sein de votre Haute Assemblée – compte tenu de la révision de notre hypothèse de croissance, le Gouvernement a décidé de prendre des mesures supplémentaires pour garantir l’atteinte de nos objectifs en matière de finances publiques.
En prenant ces décisions, nous sommes au rendez-vous de la responsabilité. Le plan proposé par le Gouvernement représente 17,4 milliards d’euros de moindres dépenses et de recettes supplémentaires à l’horizon 2016, dont 7 milliards d’euros dès 2012. Ce plan permet d’éviter près de 65 milliards d’euros de dette d’ici à 2016.
Le texte qui a été discuté en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale…
M. Ronan Kerdraon. Il n’a pas été discuté, il a été imposé !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. … apporte donc les modifications législatives nécessaires pour engager ces nouvelles mesures.
S’agissant de la sécurité sociale, 700 millions d’euros supplémentaires seront économisés en 2012 au titre de la maîtrise des dépenses.
La progression de l’ONDAM, initialement fixée à 2,8 % dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, est ramenée à 2,5%, ce qui représente 500 millions d’euros d’économies en plus. Cet effort sera poursuivi jusqu’en 2016.
Par ailleurs, un effort d’économies de 120 millions d’euros sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale et de 100 millions d’euros sur les fonds de la protection sociale sera réalisé en 2012.
Plus précisément, les économies sur le champ de l’ONDAM se répartissent de la manière suivante.
Un effort de 290 millions d’euros sera accompli sur le médicament. Il s’agit de faire davantage de baisses de prix sur le générique et dans le répertoire. Ces économies seront, bien entendu, négociées par le Comité économique des produits de santé.
Par ailleurs, les tarifs des spécialités médicales dont les revenus sont les plus élevés seront également mis à contribution : il y aura donc 90 millions d’euros de baisses de tarifs supplémentaires, portant essentiellement sur les actes de biologie et de radiologie. (Mme Christiane Demontès s’exclame.)
Une marge de 100 millions d’euros sera dégagée sur le Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés. Le texte a été amendé en ce sens à l’Assemblée nationale.
Comme l’a dit le Premier ministre lundi dernier à Toulon, le contexte actuel de nos finances publiques nous oblige à redéfinir nos priorités, et notamment à concentrer les financements disponibles sur les investissements hospitaliers déjà engagés afin de nous assurer que les projets concernés puissent être menés à bien et être opérationnels dans les meilleurs délais. Je précise que les projets de mise aux normes ne seront pas remis en cause.
Avec un ONDAM à 2,5 %, nous avons fait le choix de privilégier les assurés et l’accès aux soins. Cela confirme la politique que nous avons toujours défendue : maîtriser les dépenses tout en maintenant un haut niveau de prise en charge.
Concernant les retraites, vous le savez, nous avons décidé d’avancer d’un an la phase transitoire de la réforme des retraites et, en conséquence, d’atteindre la cible de soixante-deux ans en 2017 au lieu de 2018. Le texte a été amendé en ce sens lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale.
Concrètement, la mesure que nous vous proposons permet de gagner un an sur la montée en charge de la réforme (Mme Christiane Demontès s’exclame de nouveau.) afin que l’âge légal de départ à soixante-deux ans soit atteint dès 2017 – pour la génération de 1955 – au lieu de 2018, comme cela était initialement prévu.
Cette mesure ne revient pas sur les paramètres arrêtés dans la réforme des retraites de 2010 ; elle ne fait que raccourcir la phase transitoire de montée en charge. En particulier, l’âge légal de départ à soixante-deux ans et l’âge du taux plein à soixante-sept ans, après phase transitoire, ainsi que le départ anticipé à soixante ans, pour les bénéficiaires des dispositifs « carrières longues » et « pénibilité », demeurent inchangés.
La réforme de 2010 a déjà commencé à porter ses fruits : en 2011, elle aura permis de réduire de 100 000 le nombre de départs à la retraite et, en 2012, ce sont près de 200 000 départs de moins qui sont attendus sous l’effet de la réforme.
M. Ronan Kerdraon. Et combien de chômeurs en plus ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je parle des départs à la retraite.
En 2012, la réforme apportera 5,4 milliards d’euros d’économies et de recettes supplémentaires pour la branche vieillesse du régime général. Grâce à elle, le retour à l’équilibre de notre système d’assurance vieillesse est assuré.
M. Jean-Marc Todeschini. Vous y croyez ?
M. Ronan Kerdraon. Encore des promesses !
M. Jean-Marc Todeschini. Non, ce sont des illusions !
M. Ronan Kerdraon. Comme pour la dépendance !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Dans le contexte actuel de crise des dettes souveraines, l’accélération de la phase transitoire permettra de réduire plus rapidement le déficit des régimes d’assurance vieillesse et se traduira par une diminution des déficits cumulés des régimes de retraite à hauteur de 4,4 milliards d’euros entre 2012 et 2016 et de 7,1 milliards d’euros entre 2012 et 2018, soit autant d’endettement et de frais financiers correspondants en moins pour les organismes gestionnaires de ces régimes.
La mesure s’appliquera à l’âge légal de départ à la retraite et, mécaniquement et selon le même calendrier, à l’âge de départ sans décote puisque le code de la sécurité sociale le définit comme l’âge légal plus cinq ans.
L’accélération de la phase transitoire que nous vous proposons ne concernerait que les quatre générations d’assurés nés entre 1952 et 1955. Selon les cas, les assurés de ces générations devront reculer leur date de départ à la retraite de un à quatre mois.
M. Ronan Kerdraon. Ils vous remercient !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Les premiers assurés concernés seront ceux qui sont nés le 1er janvier 1952. Selon le calendrier de montée en charge actuel, ils pourront partir à la retraite à 60 ans et 8 mois, soit à partir du 1er septembre 2012. Avec l’accélération, ils ne pourraient partir qu’à compter du 1er octobre 2012.
M. Jacky Le Menn. Ils ne partiront pas !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Enfin, je souhaite revenir sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale issu de l’examen en première lecture par la Haute Assemblée.
M. Ronan Kerdraon. Il est temps !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Il était fondé non seulement sur plus de recettes, mais aussi, ce qui est très alarmant, sur un relâchement inquiétant des dépenses.
Ainsi, avec un ONDAM à 3,8 %, c’était 1,5 milliard d'euros de dépenses en plus que vous aviez votées par rapport à la proposition du Gouvernement. Votre proposition était en décalage total par rapport à la réalité économique du pays...
M. Ronan Kerdraon. Vous êtes en décalage par rapport à l’opinion !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. … et n’est évidemment pas acceptable, à moins de vouloir faire peser sur les générations à venir tout le poids des efforts. C’est pourquoi l’Assemblée nationale a rétabli un texte bien plus responsable.
Par exemple, la Haute Assemblée a refusé un certain nombre de propositions qui allaient dans le sens de la crédibilité et de la responsabilité.
Je commencerai par évoquer l’efficience hospitalière. Étant donné la nécessaire complexité de leur organisation, les établissements de santé ont besoin d’un pilotage clair et lisible. Or le texte issu de votre chambre ne prévoit rien de moins que de couper tous les efforts progressivement engagés par le Gouvernement et les établissements de santé eux-mêmes. Il s’agit de supprimer la convergence ciblée entre établissements de santé publics et privés. Il s’agit de ne pas introduire des indicateurs d’efficience dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, alors que l’article rétabli par l’Assemblée nationale propose un mécanisme incitatif pour atteindre les objectifs. Refuser de poursuivre les efforts pour améliorer l’efficience de nos établissements de santé, c’est un manque de responsabilité.
M. Jean-Marc Todeschini. Là, vous êtes en campagne présidentielle !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Il en est de même pour l’accès aux soins. Si rien n’est fait sur les dépassements d’honoraires, l’accès aux soins pourrait être menacé dans les trois spécialités de chirurgie, de gynécologie-obstétrique et d’anesthésie-réanimation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Catherine Génisson. Parlons-en !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. J’ai donc proposé d’instaurer le secteur optionnel, en ne l’ouvrant qu’au secteur 2. D’ailleurs, je n’ai toujours pas compris pourquoi vous n’étiez pas d’accord avec cette disposition. (M. Jean-Pierre Godefroy s’exclame.)
Mme Christiane Demontès. Expliquez-la !
M. Jean-Marc Todeschini. Vous ne comprenez pas grand-chose, madame la secrétaire d’État !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Vous avez supprimé cette mesure sans faire aucune autre proposition constructive.
M. Ronan Kerdraon. Vous n’avez pas lu le texte !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Là encore, ce n’est pas dans l’intérêt des Français. L’Assemblée nationale a donc rétabli cet article.
M. Jean-Marc Todeschini. Bien sûr !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, nos concitoyens sont conscients des risques que les déficits et le ralentissement de la croissance mondiale font peser sur l’avenir de notre protection sociale.
M. Jean-Marc Todeschini. Déficits que vous avez créés !
M. Ronan Kerdraon. Et dont vous êtes responsables !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale et ces mesures complémentaires, le Gouvernement apporte des réponses à la hauteur de l’enjeu (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) : nous tenons compte des conséquences de la crise sur l’équilibre financier de la sécurité sociale, pour préserver l’avenir de notre système solidaire.
M. Jean-Marc Todeschini. Elle a bon dos, la crise !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je souhaite que chacun d’entre vous, au sein de cet hémicycle, ait à cœur d’examiner ce texte dans le même esprit de responsabilité. (M. Alain Milon applaudit.)
M. Jean-Marc Todeschini. Applaudissez, chers collègues de droite !
M. Ronan Kerdraon. Vous avez oublié de nous souhaiter bon courage !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, adopté la nuit dernière en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale et soumis ce soir à notre examen, ne ressemble en rien à celui que le Sénat a voté en première lecture.
Avec le Gouvernement, l’Assemblée nationale s’est en effet appliquée à détricoter systématiquement l’ensemble des mesures que nous avions adoptées, parfois même sur l’initiative de nos collègues UMP.
C’est, je l’avoue, pour nous comme pour nombre d’observateurs, incompréhensible. Pourquoi, dans le contexte de crise actuel, avez-vous, par principe, opposé une fin de non-recevoir à tous nos ajouts et modifications, alors que ceux-ci apportaient de vraies solutions ?
M. Ronan Kerdraon. Par sectarisme !
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous nous répétez sans cesse, madame la ministre du budget et des comptes publics, la nécessité d’être crédible, l’impératif de la responsabilité. Mais, dans ses propositions, le Sénat n’est-il pas infiniment plus sérieux et responsable que le Gouvernement ? (Mmes les ministres rient.)
M. Ronan Kerdraon. Si !
M. Alain Milon. En créant dix-sept taxes de plus ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Car, oui, mesdames les ministres, aucune d’entre vous ne l’a rappelé, notre projet réduit le déficit de la sécurité sociale pour 2012 de près de 4 milliards d’euros. Vous, vous le dites dans vos discours, nous, nous l’avons fait et nous vous disons : chiche ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Ronan Kerdraon. Nous, on applaudit ! (Sourires sur les mêmes travées.)
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mesdames les ministres, nous aimerions que vous vous livriez à une analyse réellement objective de ce que le Sénat a construit, en évitant les a priori systématiques et idéologiques. C’est trop facile de caricaturer, comme vous l’avez souvent fait, en utilisant de faux arguments et des raisonnements simplistes.
Je vais donc rappeler, pour que cela soit bien clair, la philosophie qui a animé la commission des affaires sociales pour l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et ce que nous avons concrètement mis en place.
J’en profite d’ailleurs pour remercier ici chacun des rapporteurs de la commission des affaires sociales – Christiane Demontès pour l’assurance vieillesse, Isabelle Pasquet pour la famille, Ronan Kerdraon pour le secteur médico-social et Jean-Pierre Godefroy pour les accidents du travail et maladies professionnelles – de l’excellent travail qu’ils ont accompli, en un temps particulièrement bref. J’y associe Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances.
Tous ensemble, et grâce à la contribution de chacun, nous sommes parvenus à présenter au Sénat ce que pourrait être un autre budget de la sécurité sociale et la majorité du Sénat nous a suivis dans cette voie. Nous avons voulu à la fois marquer notre opposition à la politique menée par le Gouvernement et montrer que des solutions alternatives sont possibles.
Plus précisément, qu’avons-nous fait ?
Le Sénat s’est d’abord opposé à la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale sur les comptes de l’année 2010, ce qui a suscité de nombreux commentaires.
Nous voulions ainsi dénoncer le déficit historique de 2010, soit 28 milliards d’euros pour le régime général et le FSV, le Fonds de solidarité vieillesse. La Cour des comptes l’a dit, la crise n’explique qu’une partie de ce déficit. Plus des deux tiers ont une origine structurelle, liée aux 10 milliards d'euros de déficits annuels constatés, année après année, depuis 2004. Mesdames les ministres, c’est la majorité présidentielle actuelle qui en porte l’entière responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’insiste une nouvelle fois : il va de soi que notre vote ne remet nullement en cause l’excellent travail de certification des comptes réalisé par la Cour des comptes, mais il marque notre opposition résolue à la politique portée par ces comptes.
Le Sénat s’est ensuite opposé à la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, celle qui concerne les comptes de l’exercice en cours, c’est-à-dire 2011.
Là encore, le niveau des déficits – plus de 20 milliards d'euros pour le régime général et le FSV –, la décision de transférer 130 milliards d'euros de dettes à la CADES et, contrairement à ce que vous nous dites, mesdames les ministres, l’absence totale de mesures de redressement des comptes à caractère structurant nous ont conduits à rejeter les comptes rectifiés.
Le Sénat s’est également opposé à l’équilibre présenté pour 2012, et ce pour plusieurs raisons.
Tous les observateurs le disent, le cadrage économique, même revu à la marge pour 2012, est irréaliste : une croissance du PIB de 1 % et de la masse salariale de 3 % en 2012 reste, selon toutes les prévisions rendues publiques ces derniers jours, excessivement optimiste. Nos partenaires européens n’hésitent plus à nous le reprocher : pourquoi sommes-nous les seuls à construire nos budgets sur des hypothèses surestimées ?
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 maintient par ailleurs un niveau de déficit bien trop élevé : près de 18 milliards d'euros pour le régime général et le FSV. Il n’apporte pas une seule des solutions nécessaires à la sauvegarde de notre système de protection sociale. Il ne résout ni la question des déficits, ni celle du manque structurel de recettes des branches maladie et famille ou du FSV, ni le problème, pourtant fondamental, de l’accès aux soins, ni la douloureuse question du reste à charge, ni les problèmes financiers des hôpitaux, bref aucun des sujets qui appellent des réponses urgentes.
Enfin, le Sénat s’est opposé à l’accumulation irresponsable des déficits sociaux.