M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, auteur de la question n° 1434, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
M. Philippe Dallier. Ma question s’adresse à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Depuis plusieurs mois, on déplore, sur les communes de Seine-Saint-Denis limitrophes de la capitale, une explosion du phénomène des « marchés sauvages », véritables supermarchés de la misère à ciel ouvert.
Sur le secteur des portes de Montreuil et de Bagnolet en particulier, proche du marché aux puces de la porte de Montreuil, ce sont, chaque week-end, des centaines de vendeurs à la sauvette qui investissent les trottoirs, sans aucune autorisation, pour vendre à même le sol tout et n’importe quoi, y compris des objets de contrefaçon, des produits de récupération ou des produits issus de la contrebande, voire du recel de vols ; la presse s’en est fait l’écho à plusieurs reprises.
Les habitants, les associations de riverains et les commerçants de ces secteurs s’alarment de la réelle dégradation de la situation et de l’ampleur de ce phénomène nouveau, encore inconnu voilà quelques années. Les nuisances de voisinage occasionnées par ces pratiques sont bien réelles et le préjudice pour les commerçants qui sont régulièrement installés et qui, eux, paient un loyer et leurs impôts, est évident et parfois même considérable, avec des pertes de chiffres d’affaires approchant les 40 % le week-end.
Madame la ministre, cet été, le ministère de l’intérieur et la préfecture de police de Paris ont engagé une action déterminée pour lutter contre des pratiques similaires dans les zones touristiques de Paris. L’urgence de la situation en Seine-Saint-Denis, département aux portes de Paris, impose également aujourd’hui une réponse rapide et très ferme.
Par conséquent, je souhaite savoir quelles mesures vont être prises rapidement pour garantir la salubrité et la tranquillité publiques sur ces secteurs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
Vous avez appelé son attention sur le projet de mise en œuvre d’une police d’agglomération sur les marchés clandestins aux portes de Paris.
Pour lutter contre la recrudescence des marchés aux puces et des vendeurs à la sauvette, la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne de la préfecture de Police multiplie les actions de sécurisation, entre autres à Saint-Ouen, à Aubervilliers, à Pantin, à Bagnolet et à Montreuil-sous-Bois.
Les moyens opérationnels de lutte contre cette forme de délinquance ont été renforcés, sur le plan juridique, avec l’entrée en vigueur, le 14 mars 2011, de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2.
Les effectifs de police ont été confortés dans leur action par ce nouvel arsenal répressif, l’article 51 de la LOPPSI 2 correctionnalisant la pratique des ventes à la sauvette, passibles désormais de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende.
Ainsi, au cours des dix premiers mois de l’année 2011, 216 opérations ont été réalisées à Aubervilliers. Plus de 800 personnes ont été contrôlées, 66 ont été interpellées et placées en garde à vue, 81 infractions ont été relevées et 41 contraventions ont été dressées.
À Saint-Ouen, 31 opérations de contrôles ont été menées permettant l’interpellation de 81 personnes, dont 55 pour vente de contrefaçons. Parmi elles, 31 personnes ont été placées en garde à vue.
À Pantin, 52 opérations de contrôles ont été réalisées. Ces actions ont permis de relever 47 infractions et d’interpeller 53 personnes, dont 19 ont été placées en garde à vue.
À Bagnolet, des opérations de contrôles sont menées chaque week-end ; 13 personnes ont été interpellées, dont 4 ont été placées en garde à vue et 9 ont fait l’objet d’une verbalisation.
À Montreuil-sous-Bois, 42 opérations de contrôles ont été réalisées, aboutissant à l’interpellation de 37 personnes, dont 31 ont fait l’objet d’une contravention, 2 de procédures judiciaires pour contrefaçon et 4 pour faits délictueux.
Au total, 6 972 procédures pour des ventes à la sauvette ont été réalisées sur l’ensemble de l’agglomération.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions. Je ne doute pas de la volonté du Gouvernement d’essayer d’enrayer ce phénomène ; vous avez d’ailleurs rappelé que les dispositifs législatifs avaient été renforcés.
Cela dit, nous connaissons une situation tout à fait particulière en raison du développement dans des proportions incroyables de ce phénomène de marchés clandestins qui pose bien des problèmes, non seulement aux habitants, mais aussi aux commerçants de ces quartiers.
En effet, lorsque les trottoirs sont totalement envahis par les vendeurs à la sauvette – car telle est bien la réalité ! –, les clients potentiels des commerçants concernés s’en retournent. Je n’ai jamais connu une situation aussi étonnante, alors même que j’ai toujours habité en Seine-Saint-Denis ! Il faut donc mettre un terme le plus rapidement possible à de telles pratiques.
J’ai pris bonne note des informations qui viennent de m’être transmises. Je serai bien évidemment très attentif à l’évolution de la situation et ne manquerai pas de vous ressaisir le cas échéant, madame la ministre.
statut de la fonction publique territoriale de wallis-et-futuna
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu, auteur de la question n° 1429, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.
M. Robert Laufoaulu. Madame la ministre, ma question porte sur la situation des fonctionnaires territoriaux à Wallis-et-Futuna.
Actuellement, les agents permanents de ce territoire sont régis par un arrêté préfectoral de 1976, qui a donc été pris voilà trente-cinq ans et est devenu de ce fait largement obsolète.
Un projet de statut est en préparation, en vertu d’une loi ayant habilité le Gouvernement à préparer une ordonnance. Je souhaite donc connaître, madame la ministre, l’état d’avancement de ce projet, ainsi que le calendrier actuellement prévu par le Gouvernement.
J’en profite pour attirer votre attention sur l’utilité qu’il pourrait y avoir, notamment en terme de gain de temps, à ce que le projet de décret d’application puisse être prêt et transmis pour avis en même temps que le projet d’ordonnance. Pensez-vous, madame la ministre, que cela soit possible ?
Par ailleurs, je profite de cette question orale pour vous dire de nouveau combien il me paraît important qu’une attention particulière soit portée aux agents exerçant des missions de sécurité, à savoir les gardes territoriaux et les pompiers.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Vous avez raison, monsieur le sénateur, le statut des agents permanents du territoire de Wallis-et-Futuna relève malheureusement toujours de l’arrêté préfectoral du 23 septembre 1976, dont les dispositions ne sont plus en conformité avec les évolutions statutaires nationales en matière de fonction publique.
Une modernisation des règles statutaires s’imposait donc, et je me suis engagée à porter cette réforme, notamment à la suite de vos démarches, dont je vous remercie, monsieur le sénateur.
Cette réforme tend à créer, grâce à de meilleures conditions de recrutement et de déroulement de carrière, une fonction publique de qualité, adaptée au contexte des îles Wallis et Futuna.
Comme nous en avions parlé et ainsi que je l’avais annoncé lors de ma visite à Wallis-et-Futuna à la fin du mois de juillet dernier, une habilitation législative a été accordée par le Parlement aux fins de permettre cette évolution statutaire : la loi du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique autorise en effet le Gouvernement à prendre par ordonnance « les mesures relevant du domaine de la loi et de la compétence de l’État tendant à la définition des règles statutaires applicables aux agents permanents du territoire de Wallis-et-Futuna ».
Soyez-en assuré, mes services ont d’ores et déjà élaboré un projet d’ordonnance, qui fait actuellement l’objet d’une consultation interministérielle. Celui-ci définit les droits et obligations des fonctionnaires dont les corps seront déterminés par arrêtés de l’administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna. Les agents qui remplissent les conditions posées par l’ordonnance ont vocation à être intégrés et titularisés dans les corps ainsi créés, en fonction, d’une part, des emplois qu’ils occupent et des fonctions qu’ils exercent réellement et, d’autre part, des titres ou diplômes requis pour l’accès à ces emplois ou de l’expérience professionnelle acquise.
Ce projet d’ordonnance nécessite l’intervention d’un décret d’application, qui est également en cours d’élaboration.
Toutefois, sans attendre la rédaction des textes fondateurs d’un nouveau statut, j’ai demandé au représentant de l’État d’entreprendre une négociation sur les statuts particuliers des agents, corps par corps : ce travail est très avancé et pourra être finalisé dès la publication de l’ordonnance et du décret.
Pour ce qui concerne le calendrier, sur lequel vous m’avez interrogée, le projet d’ordonnance devrait pouvoir être adressé pour avis à l’assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna au début de l’année 2012. Dans le même temps, le Conseil d’État sera saisi.
En outre, puisque vous me le demandez, monsieur le sénateur, c’est très volontiers que j’accède à votre demande relative à la concomitance de transmission des projets d’ordonnance et de décret. Le calendrier s’en trouvera ainsi accéléré.
Enfin, s’agissant des agents concernés par les missions de sécurité – je pense notamment aux pompiers et à la garde territoriale –, dont je sais les contraintes et les services qu’ils rendent, soyez assuré de mon attention à leur égard, qui rejoint du reste la vôtre.
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.
M. Robert Laufoaulu. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui, compte tenu de l’engagement que vous avez pris, me satisfait complètement. Le personnel vous sera reconnaissant de votre écoute et de votre réactivité. Grâce à la transmission simultanée des projets d’ordonnance et de décret, la situation devrait à mon avis s’accélérer, à la satisfaction des fonctionnaires concernés.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons pris un peu d’avance. Dans l’attente de l’arrivée de Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinq, est reprise à dix heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
mise en œuvre du programme national de lutte contre la tuberculose
M. le président. La parole est à M. Claude Dilain, auteur de la question n° 1439, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.
M. Claude Dilain. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la recrudescence significative des cas de tuberculose observée ces dernières semaines sur certains territoires français.
L’incidence de la tuberculose en France est d’environ 9 cas pour 100 000 habitants. Mais, en Seine-Saint-Denis, elle est estimée à 30 cas pour 100 000 habitants. Et, dans certains quartiers de ce département que je connais bien, elle atteint pour l’instant jusqu’à 300 cas pour 100 000 habitants ! je dis « pour l’instant », car les premiers résultats de la campagne de dépistage paraissent déjà extrêmement inquiétants…
Ces statistiques mettent en évidence le problème des inégalités territoriales : tous les experts, en effet, s’accordent à dire que la tuberculose est un marqueur précis de la pauvreté.
Cette recrudescence pose également le problème de la stratégie sur laquelle repose la politique nationale de santé publique de lutte contre la tuberculose, adoptée en 2007.
En Seine-Saint-Denis, la fréquence de la tuberculose est élevée alors qu’une grande majorité de la population est vaccinée par le BCG – je crois même que ce département présente le meilleur taux de vaccination en France ! C’est la preuve que le BCG joue un rôle très faible dans la protection contre la tuberculose ; du reste, il s’agit d’une donnée médicale connue.
D’ailleurs, l’esprit du programme national de lutte contre la tuberculose de 2007 consistait à mettre fin à l’obligation vaccinale et à prendre pour priorités le dépistage, le diagnostic précoce et le traitement des tuberculoses latentes : il s’agit des axes 1 et 2 de ce programme.
D’autres pays, comme la Belgique ou l’Allemagne, ont adopté depuis plusieurs années cette stratégie – pas d’obligation vaccinale par le BCG –, qui s’est révélée efficace. En France, malheureusement, le BCG reste privilégié sur le terrain, au risque de négliger les actions de dépistage, et donc le traitement précoce.
Ainsi, madame la secrétaire d’État, comment accepter que les enseignants ne bénéficient jamais de visites médicales professionnelles – c’est d’ailleurs illégal –, donc d’un dépistage annuel de la tuberculose, même dans les territoires à haut risque ?
Madame la secrétaire d’État, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour que l’axe 1 du programme national de lutte contre la tuberculose devienne une réalité sur le terrain ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser l’absence de mon collègue Xavier Bertrand, qui m’a demandé de vous répondre.
Comme vous l’avez précisé, la tendance à la baisse de la fréquence de la tuberculose en France est certaine sur le long terme : elle se manifeste par la diminution tant des taux de prévalence que du nombre des cas.
De 60 cas pour 100 000 habitants en 1972, le taux de prévalence de la tuberculose est tombé à 32 cas en 1980, puis à 8,3 cas en 2009. En nombre de cas, la décroissance est similaire : 5 276 cas ont été déclarés en 2009, contre plus de 9 000 il y a quinze ans.
Certes, cette diminution se poursuit aujourd’hui plus lentement. Mais nous restons bien dans un mouvement de diminution de l’incidence de cette maladie dans notre pays. C’est donc à tort que vous avez parlé de « recrudescence ».
Il est connu depuis longtemps que la répartition de cette maladie sur le territoire est très inégale. La tuberculose frappe les plus fragiles, soit pour des raisons sociales, comme la proximité, la provenance de pays de forte endémie ou les séjours réguliers dans ces mêmes pays, soit pour des raisons médicales, comme les déficits immunitaires ou des traitements médicamenteux particuliers.
C’est ainsi que, aujourd’hui, des départements dans lesquels la proportion de personnes défavorisées est significative, comme la Seine-Saint-Denis, Paris ou la Guyane, présentent des taux supérieurs à la moyenne nationale.
C’est la raison pour laquelle nous continuons à concentrer les efforts de dépistage et de suivi des cas sur les populations les plus fragiles.
Le BCG, il est vrai, ne protège pas totalement contre la tuberculose pulmonaire ; mais il serait dangereux de considérer qu’il est inutile. Si l’obligation vaccinale a été suspendue pour la population générale, ce vaccin reste vivement recommandé au sein, précisément, des populations les plus exposées aux risques, qu’il s’agisse des risques géographiques – en région parisienne, en Guyane ou en cas de provenance de pays à forte endémie –, professionnels ou sociaux.
En l’absence de vaccin totalement efficace, il est préférable, plutôt que de laisser les populations à risque élevé démunies face à la maladie, de déployer ce moyen de prévention reconnu sur le plan international comme efficace contre les formes graves de tuberculose. Le BCG est d’ailleurs largement utilisé par l’Organisation mondiale de la santé dans les pays d’endémie élevée, dans le cadre du programme élargi de vaccination.
En sus de cette prévention, les efforts d’interruption de la chaîne infectieuse par le traitement rigoureux et le dépistage actif de la tuberculose, notamment autour des cas identifiés, constituent le quotidien des services de lutte contre la tuberculose présents sur tout le territoire national.
Il existe en effet au minimum un centre de lutte antituberculeux dans chaque département. Le maillage est bien entendu plus serré dans les départements de forte incidence, comme la Seine-Saint-Denis ou Paris. C’est grâce à l’action incessante de ces services de lutte contre la tuberculose que la maladie recule.
Concernant enfin votre interrogation sur l’axe 1 du « plan tuberculose », je vous précise que ce plan est terminé depuis 2009. En revanche, les actions de prévention, de dépistage et de prise en charge se poursuivent, conformément aux recommandations du Haut Conseil de la santé publique.
Monsieur le sénateur, le ministère de la santé ne considère pas la tuberculose comme une pathologie d’un autre temps ; il adapte sa réponse à la nouvelle situation épidémiologique de cette pathologie, qui apparaît aujourd’hui comme un marqueur social absolument inacceptable.
M. le président. La parole est à M. Claude Dilain.
M. Claude Dilain. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, même si celle-ci me laisse quelque peu sur ma faim.
Vous dites qu’il serait dangereux d’arrêter la vaccination par le BCG ; je n’en suis pas certain, car, si cela était vrai, les cas de tuberculose en Belgique ou en Allemagne seraient alors bien plus nombreux qu’ils ne le sont chez nous. Or tel n’est pas le cas, bien au contraire.
Il est tout aussi dangereux de faire croire à la population que la vaccination par le BCG assure une protection totale contre la tuberculose.
En tant que médecin, je suis bien placé pour savoir que, sur le terrain, les actions de dépistage et de prévention sont peu nombreuses. En particulier – et vous n’avez pas répondu à ma question sur ce point, madame la secrétaire d'État –, les enseignants ne sont soumis à aucune visite médicale professionnelle, ce qui est illégal. À cet égard, je rappelle que les premiers cas de tuberculose découverts à Clichy-sous-Bois l’ont été parmi des enseignants en collège à qui n’avait jamais été administrée la moindre injection intradermique ou qui n’avaient jamais passé de radiographie pulmonaire.
avenir du régime minier
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1441, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
M. Daniel Reiner. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer l’attention de M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé sur les risques de démantèlement que fait peser un récent décret pris par le Gouvernement sur le régime minier de sécurité sociale.
Chacun sait le rôle joué en France, dans certaines régions, plus particulièrement en Lorraine, par les mineurs depuis la révolution industrielle et plus encore après la Seconde Guerre mondiale.
La dureté de leur métier et l’importance de leur activité pour l’économie du pays ont justifié la création, en novembre 1946, d’un statut des mineurs et la mise en place d’un régime spécial de sécurité sociale dans les mines.
La spécificité du régime de sécurité sociale, défini par le décret du 27 novembre 1946, tient à deux éléments : d’une part, la gestion d’un réseau de soins médicaux de proximité et de qualité dispensés par des médecins et des praticiens salariés du régime ; d’autre part, une fonction assurantielle garantissant aux affiliés l’accès à la gratuité réelle.
Ce régime, depuis qu’il existe, a toujours été accepté, soutenu et conforté comme signe de reconnaissance de la Nation à l’égard des mineurs.
Or, sans la moindre concertation avec les organisations professionnelles ni le moindre débat au Parlement, a été pris le décret du 30 août 2011, qui menace l’existence de ce régime. En effet, entre autres mesures, il est prévu, pour la fin de l’année 2013, le transfert du régime de sécurité sociale des mineurs vers le régime général.
Aujourd’hui, en Lorraine, de 60 000 à 70 000 personnes, dont la moyenne d’âge est de plus de soixante-dix ans, bénéficient de ce régime – elles sont, paraît-il, 176 000 pour la France entière – et plus de 1 800 personnes en sont salariées.
Cette remise en cause est non seulement une atteinte forte à une corporation qui mérite notre respect, mais également une nouvelle atteinte à l’emploi. Elle ne serait par ailleurs pas sans poser de véritables problèmes de santé publique.
J’ai bien noté que le projet de loi de financement de la sécurité sociale a permis d’inscrire des sommes qui avaient été supprimées par le décret du 31 décembre 2009, qui mettait lui-même un terme aux dispositions visées au b) du 2° de l’article 2 du décret du 24 décembre 1992 relatif à la prise en charge de certains frais d’ambulance, de transport et d’hébergement en cure thermale ainsi que de produits pharmaceutiques.
Ce retour sur un décret néfaste est une bonne chose, mais cela n’engage guère au-delà de 2012. De surcroît, cela ne répond en rien aux conséquences dramatiques du décret du 30 août 2011.
C’est pourquoi, madame la secrétaire d'État, avec les parlementaires de ces régions minières, qui se sont tous exprimés sur ce sujet, et avec les organisations syndicales, je vous demande d’abroger ce décret, qui pénalise des personnes dont le revenu moyen est inférieur de près de 30 % à celui des salariés retraités du régime général et qui ont largement participé au développement économique de notre pays.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Xavier Bertrand, qui ne peut être présent ce matin au Sénat.
Le Gouvernement a entrepris une réforme ambitieuse du régime de sécurité sociale minier afin de garantir la pérennité de son offre de soins et de conforter les droits des affiliés et des salariés du régime.
Xavier Bertrand a transmis un courrier, en date du 30 juin dernier, aux fédérations minières ainsi qu’aux parlementaires du bassin minier afin de les informer de l’augmentation des crédits d’action sociale – 2,5 millions d’euros en 2011 et 3,5 millions d’euros en 2012 – en vue de compenser les effets de la suppression du b) du 2° de l’article 2 du décret de décembre 1992, afin qu’aucun affilié au régime minier n’ait à renoncer aux soins.
Le décret du 31 août dernier relatif au régime spécial de sécurité sociale dans les mines est entré en vigueur le 1er septembre 2011.
Afin d’assurer la pérennité de l’offre de soins du régime ainsi que la préservation de son réseau de proximité, le Gouvernement a décidé d’adosser le régime à un partenaire capable de financer les investissements nécessaires à sa modernisation, à savoir le régime général d’assurance maladie, au travers des unions pour la gestion des établissements des caisses d’assurance maladie, les UGECAM.
En vue de conforter le financement du risque maladie, celui-ci fera l’objet d’une intégration financière au sein du régime général d’assurance maladie. Cette intégration, monsieur le sénateur, s’effectuera sans remise en cause des garanties spécifiques offertes par le régime minier.
Le Gouvernement proposera que le remboursement à 100 % des dépenses de soins, prévu depuis 1946 et justifié par la situation et les besoins spécifiques des mineurs, fasse l’objet d’une inscription législative.
À ce titre, je vous rappelle que le régime minier est le seul régime spécial à ne pas appliquer les dispositifs de participation forfaitaire et de franchises médicales, respectivement instaurés par la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Par ailleurs, l’action sanitaire et sociale sera transférée à l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, l’ANGDM, très proche des mineurs et de leurs familles.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République, et afin de remédier aux injustices créées par le dispositif mis en place en 2001, les pensions de retraite minières seront revalorisées à compter de la fin de 2011. Une première revalorisation de 3 % des pensions liquidées avant 1987 a été mise en œuvre dès le 1er novembre 2011. Cet effort sera progressivement porté à 5 % d’ici à 2015.
Enfin, monsieur le sénateur, Xavier Bertrand tient à réaffirmer que la garantie d’emploi sera assurée à tous les salariés des caisses régionales de sécurité sociale dans les mines, les CARMI, et qu’ils bénéficieront de la liberté dans le choix de leur convention collective avant le transfert des activités entre la convention minière et la convention de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale, l’UCANSS. Aucune mobilité géographique ne leur sera imposée.
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Madame la secrétaire d'État, si je vous comprends bien, au fond, rien n’a changé et tout va bien !
Assez étrangement, les mineurs, les affiliés aux assurances des mines, ne sont pas rassurés par les propos de Xavier Bertrand et continuent de penser que le plus simple serait de ne pas mettre en œuvre ce fameux décret et donc, tout simplement, de conserver ce régime minier.
Tout le monde sait que, en raison du très faible nombre d’actifs et du grand nombre d’ayants droit, ce régime est naturellement déficitaire. Actuellement, son déficit est couvert par le régime général.
M. Daniel Reiner. Quel intérêt sa suppression présenterait-elle ? L’équilibre financier du régime sera de toute façon assuré par la solidarité nationale.
Le sentiment prévaut vraiment qu’on s’est attaqué à ce régime de manière un peu mesquine, à la suite de la publication du rapport de M. Yves Bur. Je transmettrai néanmoins les informations que vous m’avez communiquées.
Je note avec satisfaction que le tollé suscité par le décret du 31 décembre 2009 a conduit le Gouvernement à rétablir les moyens nécessaires, à travers le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, pour le financement d’un certain nombre de frais, notamment les frais de transport en ambulance.
Nous ne doutons pas que notre mobilisation vous amènera, en fin de compte, à abroger le décret de 2011, solution de loin la plus raisonnable.