Article 34 nonies (nouveau)
I. – À défaut de conclusion, un mois après l’entrée en vigueur de la présente loi, d’un avenant conventionnel visant les médecins exerçant à titre libéral une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d’anesthésie-réanimation autorisés à pratiquer des honoraires différents des tarifs fixés par la convention médicale prévue à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale et les autorisant à pratiquer de manière encadrée des dépassements d’honoraires pour une partie de leur activité, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale disposent, à cet effet et pendant une durée de deux mois, de la faculté de modifier par arrêté la convention nationale des médecins généralistes et spécialistes conclue le 26 juillet 2011, en portant notamment à 50 % le taux d’encadrement des dépassements d’honoraires mentionné au troisième alinéa de l’article 36 de la convention signée le 26 juillet 2011 en application de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.
II. – L’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles prévoient également la prise en charge des dépassements d’honoraires sur le tarif des actes et consultations des médecins autorisés à pratiquer des dépassements d’honoraires encadrés en application du I de l’article 34 nonies de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2012 à hauteur du taux maximal de dépassements d’honoraires autorisé par lesdites dispositions conventionnelles. »
III. – Le II entre en vigueur concomitamment aux dispositions prévues en application du I pour les contrats et règlements relatifs à des garanties portant sur le remboursement ou l’indemnisation de frais des soins de santé occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, conclus ou renouvelés après cette entrée en vigueur.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 18 est présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 121 rectifié est présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 183 est présenté par M. Houpert.
L'amendement n° 297 rectifié est présenté par Mme Escoffier, MM. Collombat, Mézard, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Vendasi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Plancade, Requier, Tropeano et Vall.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 18.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous abordons maintenant un sujet extrêmement important, attendu par les professionnels de santé, l’assurance maladie et les organismes complémentaires.
Madame la secrétaire d'État, en dernière minute à l’Assemblée nationale, le Gouvernement auquel vous appartenez a proposé un amendement dont la rédaction est particulièrement complexe, et qui vise, grosso modo, à forcer la main des organismes complémentaires au sujet du secteur optionnel.
Dans mon rapport, j’ai évoqué la situation sur les dépassements d’honoraires : 2,5 milliards d’euros en 2010. Leur montant a doublé en vingt ans. Ils représentent une part importante de la rémunération des médecins : 21 000 euros par an en moyenne. Mais, en l’occurrence, la moyenne n’est pas très significative, car les écarts sont gigantesques selon les spécialités.
Le secteur optionnel a pour objectif, sur une base facultative, d’encadrer les dépassements d’honoraires des chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens, qui devraient réaliser au moins 30 % de leurs actes au tarif opposable et pratiquer sur les autres des « compléments » d’honoraires limités à 50 %. Les contreparties, en termes de prise en charge de cotisations par l’assurance maladie, sont substantielles et équivalentes à celles des médecins de secteur 1, ce qui ne manque pas de surprendre en termes d’équité.
Au total, cette formule paraît particulièrement bancale : du point de vue des médecins de secteur 1, qui sont contraints dans leurs tarifs, rien ne change ; du point de vue des spécialistes qui peuvent adhérer à cette option, certains verront un effet d’aubaine s’ils en respectent déjà les termes, d’autres manifesteront un éventuel intérêt s’ils sont un peu au-dessus des niveaux fixés, en raison de l’attrait de la prise en charge des cotisations, et les derniers s’en désintéresseront parce qu’ils pratiquent des dépassements nettement supérieurs. On peut même craindre que ceux qui pratiquent des dépassements inférieurs n’augmentent progressivement leurs tarifs pour se rapprocher des plafonds.
Par ailleurs, dans l’espoir de « solvabiliser » les patients, ce secteur reposerait en fait sur la prise en charge des dépassements par les – désormais fameux – contrats « responsables et solidaires ».
Madame la secrétaire d'État, permettez-moi de vous interroger sur ce point précis : à partir du moment où la taxation entre ces contrats est presque égale à celle des autres – dans l’esprit du Gouvernement tout du moins, car nous avons voté le contraire –, comment croire que les contrats « responsables » continueront d’être proposés par les complémentaires ? En effet, ils seront taxés à peu près comme les autres alors qu’ils auront des charges nettement plus lourdes et que, en outre, – c’est pourtant un aspect essentiel de ces contrats – ils n’autorisent pas de discrimination selon l’état de santé de l’affilié.
La prise en charge obligatoire des dépassements d’honoraires du secteur optionnel ne fera – vous ne pouvez le nier – que surenchérir le coût des contrats complémentaires et entraînera, là aussi, les cotisations à la hausse.
Fondamentalement, on le voit bien, le secteur optionnel ne règle rien. On le présente parfois comme la seule solution sur la table. Pourtant, rien ne serait pire que de le mettre en œuvre sans l’accompagner d’autres mesures fortes de limitation des dépassements d’honoraires. Cela reviendrait à prendre acte du problème, avec le risque de susciter le glissement des médecins du secteur 1, notamment des généralistes, vers cette nouvelle formule plus favorable.
Diverses études concordantes constatent l’ampleur des renoncements aux soins, et pas seulement les soins optiques ou dentaires. Certes, les raisons en sont multiples, mais les dépassements d’honoraires en font indéniablement partie.
Au fil des années, le problème s’est cristallisé. Depuis dix ans, les dépassements ont explosé sans réponse politique, rendant sa résolution de plus en plus difficile. Il nécessite une approche globale ; or c’est exactement le contraire de ce que propose aujourd’hui le Gouvernement.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales vous propose, mes chers collègues, de supprimer cet article.
M. le président. La parole à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l’amendement n° 121 rectifié.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 34 nonies, que nous proposons de supprimer, est, pour le groupe CRC, symptomatique de la conception que le Gouvernement se fait du dialogue social.
Alors que les organismes d’assurance maladie complémentaire se sont prononcés contre la création immédiate du secteur optionnel, considérant que les conditions n’étaient pas encore réunies, vous avez imposé cet article. En revanche, dès lors qu’il a été question de satisfaire les médecins, vous avez renoncé à deux mesures contraignantes plutôt modestes. Nos concitoyens apprécieront...
Depuis que la création du secteur optionnel est en débat, le groupe CRC s’y est toujours opposé. Nous considérons que la création d’un tel secteur aurait pour seule et unique conséquence de faire basculer l’ensemble des professionnels du secteur 1 vers ce secteur optionnel, c’est-à-dire un secteur dans lequel les dépassements d’honoraires sont permis.
Cet article, s’il devait être maintenu, ne constituerait en rien une réponse aux dépassements d’honoraires scandaleux qui sont actuellement imposés aux patients. Pis, vous transférez la responsabilité sur les médecins qui ne respectent ni tact et mesure, et pratiquent une véritable discrimination financière vers les mutuelles.
Les patients n’auraient alors plus que deux choix : soit opter pour des contrats mutualistes complémentaires intégrant les dépassements organisés dans ce secteur optionnel, et donc nécessairement plus chers ; soit conserver leur contrat actuel et subir des tarifs supérieurs aux tarifs opposables lors de chaque consultation.
En effet, ne nous y trompons pas, avec la création d’un tel secteur, plus aucun médecin n’aura intérêt à continuer à appliquer les tarifs correspondant au secteur 1.
Avec cette décision autoritaire, dont on pourrait penser par ailleurs qu’elle est destinée à sanctionner les mutuelles qui ont osé s’organiser avec leurs adhérents contre la taxe que vous leur avez imposée voilà quelques mois, vous amputez une nouvelle fois le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 183.
M. Alain Houpert. Un tel dispositif revient indirectement à exclure du parcours de soins tous les patients qui se rendraient chez des praticiens du secteur 2 pratiquant des dépassements d’honoraires de plus de 50 %.
De fait, suivant l’article 36 de la convention de coordination, l’option de coordination ne concerne que les praticiens du secteur 2.
M. le président. L’amendement n° 297 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 18, 121 rectifié et 183 ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Honnêtement, mesdames et messieurs les sénateurs, je suis étonnée de vous voir opposés à cette alternative aux secteurs 1 et 2 qu’est le secteur optionnel, car, finalement, on répond à l’une de vos préoccupations !
Maintes fois, que ce soit à l’Assemblée nationale ou ici, vous nous avez demandé ce qu’on pouvait faire pour limiter les dépassements d’honoraires. Aujourd’hui, on vous propose de voter un amendement relatif au secteur optionnel, lequel vise, je le rappelle, à limiter à 150 % du tarif opposable la rémunération dans trois types d’exercice : les chirurgiens, les gynécologues obstétriciens et les anesthésistes-réanimateurs, qui ont des dépassements assez courants en termes d’honoraires.
On vous propose un dispositif qui s’adresse uniquement au secteur 2, contrairement au secteur optionnel qui était initialement prévu dans le cadre de la convention médicale avec l’assurance maladie. Il existe bien une volonté de limiter les dépassements d’honoraires, puisque le secteur 1 est exclu de ce dispositif.
Il comporte une mesure incitative destinée à motiver les médecins exerçant en secteur 2 à opter pour le secteur optionnel, qui est la prise en charge d’une part des cotisations sociales, qui est d’aboutir à des contrats responsables avec les mutuelles pour les patients et qui conduit aussi à la solvabilité des patients.
Ce matin, alors que nous débattions sur le secteur 2 dans les déserts médicaux, vous me disiez qu’il ne faudrait pas rémunérer les médecins agissant dans la permanence des soins de la même manière qu’en secteur 1. On vous propose justement un dispositif destiné à limiter ces dépassements d’honoraires.
Ce matin, nous parlions du renoncement aux soins. Ce dispositif permet justement de rendre les patients solvables et limite donc le renoncement aux soins.
Alors j’avoue que je ne comprends pas votre opposition à cette proposition. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à votre amendement, monsieur Daudigny, ainsi qu’aux amendements identiques nos 121 rectifié et 183.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Hormis notre collègue Alain Houpert, les membres du groupe UMP voteront contre ces amendements identiques.
L’accès aux soins est, pour ce gouvernement – il l’a démontré –, comme pour les gouvernements précédents, un enjeu fondamental et ne doit pas, pour certaines spécialités, être entravé par le niveau des dépassements d’honoraires ; tout le monde le dit.
Les signataires de la convention médicale du 26 juillet dernier ont réaffirmé leur volonté d’avancer sur le secteur optionnel. Tous les acteurs concernés – médecins, assurance maladie, organismes complémentaires – ont intérêt à construire ensemble un nouveau partenariat cohérent pour garantir aux assurés une prise en charge satisfaisante de la rémunération des professionnels de santé.
À défaut d’un accord à ce jour, le Gouvernement a décidé de prendre ses responsabilités et propose d’ouvrir, faute d’accord, la possibilité de modifier la convention pour renforcer l’option de coordination, en limitant à 50 % les dépassements pour les trois spécialités de chirurgie, de gynécologie obstétrique et d’anesthésie-réanimation, et pour les seuls médecins du secteur 2.
Par ailleurs, la présente disposition prévoit une prise en charge obligatoire des dépassements de l’option de coordination renforcée pour les trois spécialités dans les contrats responsables, à hauteur de 150 % du tarif remboursable. Les contrats responsables représentant 90 % des contrats de complémentaire santé, la lutte contre les dépassements sera efficacement garantie par cette obligation.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Le groupe socialiste s’oppose au dispositif adopté sur le secteur optionnel par l’Assemblée nationale à l’article 34 nonies, sur proposition du Gouvernement.
En effet, au-delà de sa rédaction hermétique, cet ajout n’apporte aucune réponse à la croissance exponentielle des dépassements d’honoraires, qui remettent en cause l’accès aux soins.
Pourtant, la question du traitement des dépassements d’honoraires est un enjeu majeur pour la pérennité de notre système de santé solidaire.
Le médecin de secteur 1 appartient à une catégorie en voie de disparition. Dans certaines spécialités et zones géographiques, les professionnels de secteur 2 pratiquant la liberté tarifaire sont très majoritaires, du fait des départs massifs à la retraite de la génération des cinquante-soixante ans, et du nombre de plus en plus important de médecins qui ont le titre de « chef de clinique » et peuvent donc exercer en secteur 2.
En conséquence, les patients sont trop souvent contraints de s’acquitter de dépassements d’honoraires toujours plus élevés pour accéder aux soins dont ils ont besoin, car ils n’ont pas d’autres choix.
Théoriquement fixés « avec tact et mesure », ces dépassements d’honoraires sont en fait incontrôlés. Ils s’imposent à des personnes qui, confrontées à la maladie, constituent une patientèle captive et obligée d’accepter, en raison d’une absence de solution alternative, les conditions financières qui leur sont proposées afin de pouvoir se soigner. Ils augmentent donc sans que quiconque intervienne pour les réguler.
Le Gouvernement se propose de promouvoir un secteur optionnel, au sein duquel les dépassements d’honoraires seraient plafonnés, ce qui ne suffit pas à satisfaire notre exigence. Nous soutenons donc l’amendement déposé par M. le rapporteur général visant à supprimer l’article 34 nonies.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 18, 121 rectifié et 183.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste-EELV.
Mme Isabelle Debré. Vous êtes minoritaires ?
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Pas du tout ! C’est un problème politique !
M. le président. Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 314 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 158 |
Pour l’adoption | 175 |
Contre | 139 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 34 nonies est supprimé.
L'amendement n° 184, présenté par M. Houpert, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le taux :
50 %
par le taux :
300 %
L’article 34 nonies ayant été supprimé, cet amendement n’a plus d’objet.
Article 35
Après le deuxième alinéa de l’article L. 6114-3 du code de la santé publique, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Ils fixent, dans le respect de la déontologie des professions de santé, des objectifs établis à partir d’indicateurs de performance relatifs aux conditions de gestion des établissements de santé, de prise en charge des patients et d’adaptation aux évolutions du système de santé, dont la liste et les caractéristiques sont fixées par décret, après consultation de la Haute Autorité de santé, de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux et des fédérations hospitalières représentatives des établissements publics et privés. Les résultats obtenus au regard de ces indicateurs sont publiés chaque année par les établissements de santé. En cas d’absence de publicité des résultats des indicateurs ou lorsque les objectifs fixés n’ont pas été atteints, le directeur général de l’agence régionale de santé peut faire application du dernier alinéa de l’article L. 6114-1.
« À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter de la publication de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2012, il peut décider d’une modulation à la hausse ou à la baisse des dotations de financement mentionnées à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale. Lorsque les objectifs fixés ont été atteints ou dépassés, le directeur général de l’agence régionale de santé peut décider du versement d’une contrepartie financière, selon des modalités et dans des conditions fixées par décret. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 19 est présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 80 rectifié est présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 186 est présenté par M. Houpert.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 19.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article 35 vise à modifier le contenu des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, les CPOM, conclus entre les ARS et les établissements de santé, pour y intégrer des indicateurs de performance assortis de sanctions. Celles-ci ont même été démultipliées par l’Assemblée nationale, puisque les ARS pourront en outre moduler les dotations aux MIGAC, les missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation.
Les ARS vont ainsi devoir discuter de nouveau avec l’ensemble des établissements de santé de leur ressort, pour fixer des objectifs de performance à chacun d’entre eux. Ne sont-elles pas déjà suffisamment occupées ?
En outre, le code de la sécurité sociale prévoit d’ores et déjà que chaque établissement élabore un programme d’actions assorti d’indicateurs de suivi relatif à l’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, ainsi qu’aux conditions d’accueil et de prise en charge des usagers.
Les établissements doivent mettre à la disposition du public les résultats de ces indicateurs. Or ces derniers coïncident largement avec les nouveaux indicateurs de performance prévus par le Gouvernement et inclus dans les CPOM. Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’il convient de prononcer « cépomme », pour montrer que l’on sait de quoi on parle ! (Sourires.)
Peut-on faire moins technocratique ? Madame la secrétaire d’État, les sanctions et autres « modulations » prévues par les nouveaux indicateurs de performance et par les actuels indicateurs de suivi se cumuleront-elles ?
Autant il est pertinent d’approfondir les relations entre les établissements de santé et l’ANAP dans un processus vertueux et contractuel d’amélioration de la gestion et des modes de prise en charge des patients, autant attribuer une nouvelle tâche aux ARS et aux établissements, qui plus est redondante avec un dispositif existant, représente au mieux une perte de temps, au pire une stigmatisation.
Souhaitant éviter toute complexification inutile des procédures, déjà suffisamment lourdes à gérer pour tous les acteurs, à savoir les ARS et les établissements, la commission vous propose, mes chers collègues, de supprimer cet article.
M. Alain Gournac. Vous pourriez vous adresser à tout le monde !
M. Gérard Dériot. C’est dur de se tourner vers la droite ! (Sourires.)
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous faisiez pareil ! On n’existait pas !
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si je ne me suis pas tourné vers vous, veuillez m’en excuser, mes chers collègues. Il n’y a là aucune volonté délibérée de vous ignorer.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 80 rectifié.
M. Dominique Watrin. L’amendement n° 80 rectifié vise aussi à supprimer l’article 35 de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, lequel prévoit d’intégrer dans les CPOM des établissements de santé des objectifs de performance au regard des résultats de l’établissement, établis à partir d’une série d’indicateurs de performance. Logiquement, le non-respect des critères entraînerait des sanctions.
Tel est l’enjeu, selon nous, de cette proposition gouvernementale : il s’agit de disposer d’un nouvel outil législatif pour faire pression sur les établissements publics de santé et leur faire encourir des amendes.
Or des sanctions de ce type, très lourdes, existent déjà dans le cadre de la tarification à l’activité en cas d’erreur de codage, ce qui est malheureusement fréquent. La Cour des comptes le souligne, le mode de financement des hôpitaux, la T2A, est « un dispositif opaque pour les gestionnaires. […] Cela conduit à s’interroger sur les modalités d’évolution de la T2A pour que celle-ci apporte une contribution accrue à une meilleure gestion hospitalière. »
Et l’on voudrait nous faire croire ici qu’en intégrant dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens des objectifs de performance, on corrigera les défauts de la T2A ! Nous ne le savons que trop, la performance, pour le Gouvernement, n’est jamais établie en référence à la qualité des soins ou la satisfaction des populations, mais à partir de stricts critères d’économies.
Pour le Gouvernement, l’établissement performant n’est pas celui qui accompagne convenablement ses patients ; c’est l’hôpital qui favorise les soins en ambulatoire. Ce n’est pas l’établissement qui fait le choix d’appréhender de manière globale le patient ; c’est celui qui fournit le soin nécessaire au meilleur coût. Et si nous sommes convaincus que ces critères nouveaux fragiliseront les établissements de santé, c’est que vous refusez obstinément de renoncer à la convergence tarifaire avec le secteur privé lucratif.
Par ailleurs, ces critères de performance seront, cela a été souligné, définis par décret, ce qui nous inquiète particulièrement, d’autant qu’aucune consultation n’est prévue.
Je regrette donc que le Gouvernement n’ait pas souhaité nous rassurer soit en précisant à notre assemblée leur nature, soit en lui communiquant un projet de décret. Je me contente de souligner que les critères dont il est question sont des critères de performance, terme utilisé dans les entreprises et non dans les hôpitaux, ce qui confirme le virage pris avec la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST ».
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Nous sommes unanimes concernant l’impérieuse nécessité d’améliorer la performance des établissements de santé. Comment imaginer en effet que la recherche de la performance pourrait pénaliser un hôpital ? C’est tout le contraire ! La performance d’un établissement, ne l’oublions pas, c’est la recherche de son efficience, de sa bonne santé. Dans une telle conception, le premier bénéficiaire est le patient.
Permettez-moi de donner un exemple. Le taux d’occupation des salles d’IRM ou de scanner, qui sera l’un des indicateurs figurant dans les CPOM, nous renseignera sur les marges de progression en matière, notamment, de réduction du temps d’attente, ce qui, bien entendu, bénéficiera aux patients.
Évitons d’avoir une vision purement technocratique et quelque peu virtuelle de ces questions. Au contraire, attachons-nous à rechercher ce qui peut bénéficier aux malades, comme la réduction des temps d’attente ou une meilleure fluidité du parcours de soins.
Je précise que les dispositions de l’article 35 s’inscrivent dans la continuité naturelle des indicateurs de qualité introduits par la loi HPST et des premiers efforts réalisés pour améliorer l’efficience des établissements.
Vous dites vouloir privilégier une approche contractuelle : mais qu’est-ce qu’un CPOM, si ce n’est un contrat conclu entre l’ARS et l’établissement signataire ? La démarche que vous préconisez est donc bien celle qui est proposée.
J’ajoute que la liste et les caractéristiques des indicateurs de performance ne sont pas imposées par le ministère aux acteurs de terrain. Les indicateurs sont choisis de manière concertée avec les fédérations hospitalières représentatives, l’ANAP et la Haute Autorité de santé.
Cette méthode est pragmatique et pertinente, au service du patient.
L’avis est donc défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. L’article 35 prévoit l’intégration systématique d’objectifs de performance dans les CPOM conclus entre les ARS et les établissements de santé.
La mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, dans son rapport du 26 mai 2010 relatif au fonctionnement de l’hôpital, a souligné l’impérieuse nécessité d’améliorer la performance des établissements de santé.
L’auteur de ce rapport, le député socialiste Jean Mallot, demandait au Gouvernement de renforcer le pilotage stratégique national de la performance hospitalière et proposait d’améliorer l’information des usagers dans ce domaine.
Voici ses propos : « les agences régionales de santé devront inciter les établissements à réaliser des audits de performance et à s’approprier les guides de bonnes pratiques et les référentiels établis par la Haute Autorité de santé, l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux et l’Agence des systèmes d’information partagés de santé. »
Il est paradoxal, monsieur le rapporteur général, que vous demandiez la suppression de l’article 35, dont les dispositions visent à mettre en œuvre ces recommandations !
Je rappelle qu’il s’agit d’intégrer dans les CPOM conclus entre les ARS et les établissements de santé « des objectifs établis à partir d’indicateurs de performance relatifs aux conditions de gestion des établissements de santé, de prise en charge des patients et d’adaptation aux évolutions du système de santé ».