Mme la présidente. L’amendement n° 60 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section 5 du chapitre VI du titre III du Livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« De la contribution sociale sur les revenus financiers
« Art. L. 136-9. – L’ensemble des revenus financiers des personnes physiques et des personnes morales provenant des titres émis en France est assujetti à une contribution sociale dont le taux est égal à l’addition du taux défini à l’article L. 136-8 applicable à la contribution sociale mentionnée à l’article L. 136-1, des taux des cotisations à la charge de l’employeur et du salarié, prévues au premier alinéa de l’article L. 241-2 et aux deuxième et quatrième alinéas de l’article L. 241-3, et du taux de la cotisation à la charge de l’employeur et du salarié sous le plafond du régime complémentaire conventionnel rendu obligatoire par la loi.
« Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d’épargne populaire, les livrets A, livrets bleus, livrets et comptes d’épargne logement. Les plans épargne populaire en vigueur, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l’usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même contribution que les revenus financiers.
« La contribution est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement mentionné à l’article 125 A du code général des impôts. Le produit de cette contribution est versé à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d’une retenue pour frais d’assiette et de perception. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
« Les ressources des assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, décès et vieillesse) sont abondées par le produit de cette contribution. Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes assurances sociales de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement a pour objet ambitieux de réformer en profondeur la fiscalité sociale des entreprises puisque nous proposons d’assujettir les revenus financiers détenus par les entreprises à une contribution sociale, dans des conditions similaires à celles qui s’appliquent actuellement aux revenus financiers détenus par les personnes physiques.
Comme vous le savez, on entend par actifs financiers détenus par les entreprises la partie du stock de capitaux investie en placements financiers – titres négociables –, figurant à l’actif du bilan comptable et que l’on retrouve sous l’intitulé « immobilisations financières » ou « valeurs mobilières de placement ».
Or ces actifs, sans doute parce qu’ils ne sont soumis ni à imposition ni à taxation sociale, n’ont eu de cesse de croître, et ce dans des proportions inquiétantes. Ainsi, en dix ans, de 1993 à 2002, le stock de placements financiers a plus que doublé, augmentant de 107 % et atteignant, selon l’INSEE, 3 560 milliards d’euros, soit tout de même deux fois le PIB.
Entre-temps, la modernisation liée aux machines et aux équipements nouveaux a crû deux fois moins vite que la valeur ajoutée produite par ces entreprises, puisqu’elle enregistre une augmentation de 52 %.
Nous sommes en plein dans ce que l’on appelle « l’économie irréelle » ou « la financiarisation de l’économie », c’est-à-dire la logique qui veut que l’économie ne produise des richesses que pour être réinvesties dans la spéculation. Tout cela se fait naturellement au détriment de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’investissement dans les outils de production, pourtant indispensables puisqu’ils créent des richesses réelles et disponibles.
La financiarisation de l’économie, que nous entendons combattre au travers de cet amendement, a transformé le profit en une fin en soi, et la masse salariale en une variable d’ajustement.
En soumettant ces actifs à une contribution sociale importante, de l’ordre de 50 %, nous entendons clairement contraindre les entreprises à sortir de cette logique spéculative pour réinvestir la richesse produite au sein de l’entreprise, précisément dans le développement de celle-ci.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de créer une contribution sociale sur les produits de placement applicable aux entreprises comme aux particuliers, dont le taux serait égal à l’addition du taux de la CSG et du taux des cotisations patronales et salariales.
Remettre à plat la taxation des revenus du capital est aujourd’hui une nécessité, nous en sommes tous conscients. Le Premier ministre lui-même l’a indiqué dans le cadre de la présentation du nouveau plan de rigueur.
Si la proposition qui nous est faite offre un intérêt certain, elle paraît brutale à la fois dans sa formulation et dans son application. Cela conduit la commission à demander aux auteurs de l’amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Madame la présidente, compte tenu de l’heure tardive, je me permettrai de faire une réponse commune aux seize amendements et sous-amendements qui se suivent dans le dérouleur, c’est-à-dire depuis l’amendement n° 60 rectifié bis jusqu’au sous-amendement n° 336, car tous répondent en réalité à la même logique : augmenter les taux de prélèvements, que ce soit sur les stock-options, les actions gratuites, les retraites chapeaux, les parachutes dorés ou les revenus du capital.
Mesdames, messieurs les sénateurs de la gauche, comme tous les ans, vous continuez de faire semblant d’ignorer les mesures qui ont été adoptées, ici même, au cours des dernières années, sur proposition de l’exécutif.
C’est nous qui avons soumis ces différents types de rémunérations à des prélèvements sociaux, à un niveau de taxation que nous avons rapproché de celui qui est appliqué aux salaires ordinaires.
Mais il est vrai que vous souhaitez tous, de ce côté-ci de l’hémicycle (Mme la ministre désigne les travées situées sur la gauche.), occulter tout ce que nous avons fait, sans doute pour faire oublier une cruelle réalité : sous une précédente mandature, la gauche n’avait taxé ni les stock-options, ni les parachutes dorés, ni les retraites chapeaux ; bref, à l’époque où elle gouvernait, tout cela était exonéré ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Aujourd'hui, le Gouvernement ne souhaite pas taxer davantage ces rémunérations. Il émet donc un avis défavorable sur ces seize amendements et sous-amendements.
Mme Christiane Demontès. À l’époque, les comptes sociaux n’étaient pas en déficit !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste-EELV. Mais oui !
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. C’est faux !
Mme la présidente. Madame Pasquet, l’amendement n° 60 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. J’entends bien les arguments avancés par M. le rapporteur général. Cela étant, nous souhaitons rester dans la logique que nous défendons depuis le début des débats, comme nous l’avons fait d’ailleurs dans le cadre des PLFSS précédents. Nous maintenons donc cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
Mme la présidente. L’amendement n° 52 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10,
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 1°, le taux : « 16 % » est remplacé par le taux : « 35 % » ;
2° Au dernier alinéa, les taux : « 12 % » et « 24 % » sont remplacés respectivement par les taux : « 20 % » et « 50 % ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les retraites chapeaux, sur lesquelles porte cet amendement, constituent des mécanismes très particuliers, puisqu’il s’agit de pensions « surcomplémentaires », généralement très généreuses, dont bénéficient, à vie, des dirigeants de grandes entreprises.
Dans les faits, les retraites chapeaux sont très peu utilisées puisque, si l’on en croit un grand quotidien économique, elles ne concerneraient que deux cent cinquante entreprises attributaires et moins de cinq cents retraités allocataires. C’est dire que ces retraites sont limitées à une élite financière.
À l’heure où les comptes sociaux se portent mal et où nos concitoyennes et nos concitoyens, y compris les plus modestes, sont appelés à faire des efforts financiers particulièrement importants, rien ne justifierait que les privilégiés bénéficiant de ces retraites chapeaux ne soient pas appelés à contribution.
Certes, le PLFSS pour 2011 et la loi portant réforme des retraites ont apporté des évolutions à leur régime social et fiscal, notamment une taxation accrue de 30 % sur les rentes supérieures à huit fois le plafond de la sécurité sociale et la mise en place d’une contribution de 14 % à la charge des pensionnés.
Pour autant, ces dispositifs demeurent très intéressants pour ceux qui en profitent, même s’ils coûtent cher aux entreprises qui les délivrent.
Disons-le clairement, les sommes distribuées dans le cadre de ces retraites particulières sont autant d’argent qui manque pour l’investissement et les salaires. Quant aux mécanismes financiers dont je viens de parler, ils ne jouent aucun rôle de régulation et seraient même, toujours selon la presse économique, indolores pour les anciens salariés.
Selon un cabinet spécialisé dans le conseil aux investisseurs, les rémunérations des dirigeants de grands groupes ne semblent pas aujourd’hui guettées par l’érosion.
Ainsi, selon cette étude, Henri de Castries, le patron d’AXA, et Denis Duverne, son numéro 2, auraient accumulé, en 2010, 26 millions d’euros. Le P-DG de BNP-Paribas, lui, touche une rémunération évaluée à 2,9 millions d’euros, à laquelle il faut ajouter 700 000 euros au titre de la retraite chapeau. Quant à Jean-François Dehecq, l’ancien P-DG de Sanofi, il aurait perçu 3,79 millions d’euros lors de son départ à la retraite, tout en bénéficiant d’une rente annuelle supplémentaire de 778 900 euros.
Ces exemples montrent combien les retraites chapeaux demeurent très intéressantes.
Notre amendement propose donc de porter de 16 % à 35 % la contribution versée par l’entreprise sur les rentes liquidées à compter du 1er janvier 2001, et de 24 % à 50 % celle sur les primes à verser.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 333, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 52 rectifié.
1° Alinéa 4
Remplacer le taux :
35 %
par le taux :
19 %
2° Alinéa 5
Remplacer les taux :
20 % et 50 %
par les taux :
15 % et 27 %
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les auteurs de l’amendement n° 52 rectifié proposent un relèvement très significatif des taux des contributions employeurs sur les retraites chapeaux.
Si la commission partage leur préoccupation, elle a majoritairement souhaité procéder par étapes. Elle a donc déposé un sous-amendement pour ajuster les taux figurant dans cet amendement, en prévoyant de relever de 3 points chacun des trois taux en vigueur pour les contributions employeurs sur les retraites chapeaux, afin d’atteindre respectivement 19 %, contre 35 % dans l’amendement, 15 % et 27 %.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l’amendement n° 52 rectifié.
Mme Isabelle Pasquet. Nous prenons acte du fait que notre amendement a été sous-amendé et qu’une augmentation moins importante est prévue. Si elle ne correspond pas à ce que nous souhaitions initialement, cette proposition va tout de même dans le bon sens. C’est la raison pour laquelle nous voterons pour l’amendement ainsi modifié.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 52 rectifié, modifié.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L'amendement n° 57 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II bis de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, le mot : « huit » est remplacé par le mot : « trois ».
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Si nos amendements précédents sur les retraites chapeaux visaient à augmenter considérablement la contribution sociale qui pèse sur elles en majorant le taux, l’amendement n° 57 rectifié emprunte une autre voie : la baisse du seuil à partir duquel les taux actuellement en vigueur s’appliquent.
L’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale prévoit que les employeurs qui servent des retraites chapeaux s’acquittent d’une contribution sociale patronale dont le taux est compris entre 12 % et 24 % en fonction de l’option qu’ils ont choisie et à la condition que le montant des rentes ainsi servies n’excède pas huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale.
La loi prévoit également qu’une taxe additionnelle de 30 % s’applique à certaines retraites chapeaux, celles qui excèdent de huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale, c’est-à-dire des retraites de 282 816 euros annuels.
Ce régime dérogatoire et la mise en place d’une contribution additionnelle de 30 % dissimulent mal une vérité devenue insupportable pour nos concitoyens. Je veux parler du fait que ces retraites, dont on mesure combien elles sont exceptionnellement privilégiées, participent moins au financement de la sécurité sociale que les rémunérations des salariés qui sont, quant à eux, exclus de ces mécanismes. Nous sommes en présence d’une nouvelle illustration de l’adage selon lequel « l’argent va à l’argent » et que, plus on gagne, moins on contribue !
Notre amendement tend donc à apporter une plus grande équité dans ce système en prévoyant de ramener de huit fois à trois fois le plafond de la sécurité sociale à partir duquel la contribution additionnelle est due. Cette mesure aurait pour conséquence, si notre amendement était adopté, de majorer le prélèvement de 30 % dès lors que la pension correspond à 106 056 euros annuels, ce qui demeure une allocation plus que confortable.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 334, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 57 rectifié
Alinéa 3
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
cinq
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 57 rectifié fixe à trois plafonds annuels de la sécurité sociale – au lieu de huit actuellement – le seuil à partir duquel les retraites chapeaux seraient soumises à une contribution additionnelle de 30 % à la charge des employeurs.
Les auteurs de cet amendement expriment une préoccupation qui est partagée par les membres de la commission. Néanmoins, encore une fois, celle-ci estime préférable de procéder par étapes. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé un sous-amendement visant à fixer un seuil intermédiaire entre la situation actuelle et la proposition faite par le groupe CRC.
La commission prévoit de fixer le seuil à partir duquel s’applique la contribution additionnelle de 30 % à la charge des employeurs sur les rentes servies en matière de retraites chapeaux à cinq plafonds annuels de la sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 334.
Mme Isabelle Pasquet. Nous voterons le sous-amendement n° 334. Bien qu’il tende à réduire la portée de notre amendement, la mesure reste significative.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 55 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du deuxième alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :
« Pour les rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre 1 000 € par mois et deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 14 %. Pour les rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale et trois fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 30 %. Pour les rentes dont la valeur mensuelle excède trois fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 50 %. » ;
2° Les deuxième et dernière phrases du troisième alinéa sont remplacées par quatre phrases ainsi rédigées :
« Le taux de cette contribution est fixé à 7 % pour les rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre 400 et 600 € par mois. Pour les rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre 600 € par mois et deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 14 %. Pour les rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale et trois fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 30 %. Pour les rentes dont la valeur mensuelle excède trois fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, ce taux est fixé à 50 %. » ;
3° La première phrase du dernier alinéa est supprimée.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Avec cet amendement, nous poursuivons dans la voie que nous avons commencé à tracer concernant la taxation des retraites chapeaux.
Si l’amendement précédent avait pour vocation d’augmenter la contribution versée par les employeurs qui octroient à quelques hauts cadres et dirigeants des retraites « surcomplémentaires » exorbitantes, cet amendement prévoit, pour sa part, de relever de manière significative la contribution des bénéficiaires eux-mêmes.
Cela fait deux ans que nous déposons cet amendement et deux ans qu’il reçoit de la part du Gouvernement et du rapporteur général un avis défavorable, au prétexte que les retraites chapeaux pourraient bénéficier à des salariés moins fortunés que les cadres dirigeants dont la presse se fait l’écho.
Nous avons tenu compte de ces remarques dans cette nouvelle rédaction afin que les salariés concernés ne soient pas lourdement sanctionnés.
Nous proposons donc un mécanisme progressif, gage de justice sociale. Ainsi, pour les rentes versées au titre des retraites liquidées avant le 1er janvier 2011, nous proposons qu’il n’y ait pas de contribution pour celles qui sont égales ou inférieures à 1 000 euros par mois.
Nous proposons aussi d’appliquer aux rentes dont la valeur mensuelle est comprise entre 500 et 1 000 euros une contribution correspondant à 7 % de leur montant et de porter la contribution à hauteur de 14 % pour les rentes dont le niveau mensuel est compris entre 1 000 euros et deux fois le plafond de la sécurité sociale, soit environ 6 000 euros par mois en 2012.
Nous proposons enfin de porter le taux à 50 % pour les rentes dont le montant mensuel est supérieur à trois fois celui de la sécurité sociale.
Ce mécanisme progressif répond à deux impératifs majeurs, celui du financement du système de protection sociale et celui de l’équité entre les bénéficiaires de telles rentes. Bien que la taxation de 50 % puisse paraître importante, elle demeure mesurée compte tenu des rentes qu’elle concerne.
Nous sommes toujours loin de la proposition que formulait François Fillon en 2009. Une fois n’est pas coutume, je le cite : « je vous annonce que je vais proposer qu’on taxe de façon confiscatoire les retraites chapeaux ». Il poursuivait en ces termes : « je vais proposer qu’un texte soit voté sur le sujet à l’occasion de la prochaine discussion du budget ». Nous n’avons malheureusement rien vu venir !
Bien que cet amendement ne vise pas à instaurer de taxation confiscatoire, par ailleurs considérée comme inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel – je vous renvoie à la décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 –, il tend à créer une taxation progressive et solidaire, que nous vous proposons d’adopter.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 335, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 55 rectifié
Alinéas 5 et 7
Remplacer les taux :
30 % et 50 %
par les taux :
20 % et 25 %
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 55 rectifié vise à prévoir un relèvement très significatif des taux de contribution des bénéficiaires des retraites chapeaux les plus élevées.
La commission est d’accord sur le fond, mais persiste dans son souci de procéder de façon progressive. Elle a donc rédigé ce sous-amendement, qui a pour objet de substituer aux taux de 30 % et de 50 % proposés par l’amendement n° 55 rectifié les taux de 20 % et de 25 %.
Mme la présidente. L'amendement n° 162 rectifié, présenté par M. Fouché, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la dernière phrase du deuxième alinéa et à la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Cet amendement vise, afin de limiter les mécanismes dits de « retraites chapeaux » du CAC 40, de porter le taux de la contribution sociale de 14 % à 20 %.
Nous revenons, là encore, à un débat qui ne date pas d’aujourd’hui et qui aurait dû être réglé lors des dernières lois de finances. Le repousser, c’est accepter année après année un manque à gagner pour l’État !
Le Premier ministre, qui propose de geler les salaires des membres du Gouvernement et du Président de la République jusqu’au retour à l’équilibre des finances publiques, invite les dirigeants des grandes entreprises, notamment celles du CAC 40, à faire de même. Donc, n’attendons plus et légiférons !
L’enrichissement incroyable, maintes fois évoqué, de certains dirigeants d’entreprise apparaît de plus en plus à un bon nombre de nos concitoyens comme un accaparement pur et simple de la richesse créée par l’entreprise au profit d’une infime minorité de ses acteurs.
M. Roland Courteau. C’est scandaleux !
M. Alain Fouché. En effet, il y va de l’équité de l’effort contributif en cette période de rigueur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 162 rectifié vise à relever à 20 % la contribution des bénéficiaires des retraites chapeaux dépassant 1 000 euros ou 600 euros, selon leur date de liquidation.
Je vous propose, monsieur Fouché, de retirer votre amendement au bénéfice de l’amendement n° 55 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 335 qui répond à cette préoccupation. Les deux propositions sont, en fait, assez proches l’une de l’autre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Fouché, l’amendement n° 162 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Fouché. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 162 rectifié est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 335.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 55 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 56 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au II de l’article L. 137-13 du même code, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 40 % » et le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
II. - Au premier alinéa de l’article L. 137-14 du code de la sécurité sociale, les taux : « 8 % » et : « 2,5 % » sont remplacés respectivement par les taux : « 30 % » et : « 10 % ».
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement concerne les stock-options et vise à augmenter la contribution sociale versée à la fois par l’employeur et par les bénéficiaires.
Si la France ne connaît pas de scandales aussi importants qu’aux États-Unis, il n’en demeure pas moins que des cas de stock-options outrageusement importants ont défrayé la chronique. Il faut dire que, malgré ou peut-être sans doute grâce au régime fiscal et social qui leur est appliqué, la France est championne dans la distribution des stock-options.
On apprend même, en lisant un article du journal Les Echos daté du 17 mai 2011, que ces éléments annexes à la rémunération sont très concentrés sur une minorité de bénéficiaires. La France serait, en la matière, plus avancée que les pays anglo-saxons !
En outre, ces rémunérations sont profondément discriminatoires et amplifient les inégalités salariales dans l’entreprise, pour des résultats pour le moins contestables ! Sur ce sujet, le journaliste Pascal Ordonneau écrit ceci : « sur le plan de l’efficacité entrepreneuriale, de nombreuses études ont mis en doute l’efficacité des stock-options sur la qualité de la conduite des entreprises. Les unes ont critiqué le fait que les stock-options pouvaient inciter les dirigeants à ne rechercher que l’augmentation des cours des actions au détriment des dépenses permettant d’inscrire leur entreprise dans le long terme. Les autres ont tout simplement montré que les stock-options distribuées n’étaient pas strictement corrélées avec les scores des entreprises intéressées ». Nous partageons pleinement son analyse.
Chacun se souviendra d’ailleurs qu’en plein cœur de la crise de la Société Générale son P-DG, bien qu’incapable de détecter une fraude de plus de 4 milliards d’euros, avait tout de même conservé le droit à ses stock-options ! Citons encore l’exemple flagrant de l’ancien P-DG de France Télécom, Didier Lombard, qui a démissionné à la suite des problèmes graves de souffrance au travail qui régnaient dans son entreprise. Ce privilégié a tout de même conservé le bénéfice de 700 000 actions cotées à 21,61 euros. Un beau cadeau de sortie !
L’an dernier, sous la pression, le Gouvernement avait fait passer de 10 % à 14 % le taux de la contribution patronale et de 2,5 % à 8 % le taux de la contribution salariale sur les stock-options. Il avait également conditionné leur attribution soit aux résultats, soit au versement de primes d’intéressement pour l’ensemble des salariés.
Il ne vous aura pas échappé que les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation ne sont pas soumises à cotisations. Elles n’ouvrent donc pas de droits et ne répondent pas à l’exigence des salariés : l’augmentation des salaires.
Avec cet amendement, nous proposons d’apporter de la justice sociale en faisant en sorte que les stock-options soient soumises à une contribution au moins égale à celle qui est assise sur les salaires.