M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Je voudrais, à mon tour, dire que je soutiendrai l’amendement n° 2, mesure de justice qui, de plus, permettra aux nombreux Français croyant à l’esprit mutualiste de contribuer dans la même proportion qu’avant.
Par ailleurs, je m’étonne vraiment des propos qui ont été tenus par Mme la ministre et qui ont été relayés par M. Milon et Mme Dini. Nous avons assisté à un véritable procès du monde mutualiste !
Vous demandez aux mutuelles de limiter leurs réserves ; vous affirmez, vous référant à leur chiffre d’affaires ou à leur marge, qu’elles peuvent absorber un doublement de la taxe sur les contrats solidaires et responsables. Toutefois, compte tenu du nombre de citoyens adhérant à des mutuelles, que M. le rapporteur général vient de rappeler, et de l’importance du rôle de celles-ci dans la santé des Français, je n’arrive à pas à comprendre les raisons qui vous conduisent à mener une telle charge contre l’esprit mutualiste.
Pourquoi ne tenez-vous pas le même raisonnement à propos de différentes mesures qui ont été prises par le Gouvernement ? Je pense, entre autres, à celle, particulièrement emblématique, qui a consisté à abaisser le taux de TVA applicable aux restaurateurs. On est fondé à se demander quels ont été ses effets en regard de son coût budgétaire.
Pour conclure, je considère que ces amendements identiques visent à introduire une mesure de justice, qui permettra de moins pénaliser les Français d’origine modeste. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Plusieurs d’entre vous accusent le Gouvernement de ne pas aimer les mutuelles. Savent-ils qu’il a émis un avis défavorable sur un amendement déposé à l’Assemblée nationale et visant à donner le monopole des complémentaires santé à l’assurance maladie d’ici à 2015 ?
Quelle était la motivation de cette proposition ? Il s’agissait de souligner, en s’appuyant sur les chiffres cités tout à l’heure par Mme Dini, que le coût de gestion de l’assurance maladie n’est que de 3 % ou 4 %, alors que celui des mutuelles se situe entre 15 % et 20 %. Les députés auteurs de cet amendement estimaient ainsi que la gestion des cotisations des complémentaires santé par l’assurance maladie relevait de l’intérêt général.
Le Gouvernement s’étant opposé à cet amendement, vous ne pouvez pas dire, monsieur Mirassou, monsieur Kerdraon, monsieur Bérit-Débat, que nous n’aimons pas les mutuelles !
Ce que j’ai dit, sans chercher à polémiquer inutilement, c’est simplement que nous avions parfois l’impression que les mutuelles refusaient a priori de soutenir toute mesure proposée par le Gouvernement et, surtout, qu’elles n’avaient pas envie de faire baisser les dépenses de santé des assurés, ce qui n’est guère conforme à l’esprit mutualiste (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.), un esprit que, précisément, nous voulons faire vivre.
L’esprit mutualiste, c’est avoir un souci de bonne gestion et d’économie, au service de tous les sociétaires et de tous les assurés. Avoir l’esprit mutualiste, c’est cela : bien gérer l’argent des assurés, dépenser moins et, surtout, reverser les éventuels bénéfices à l’ensemble des assurés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 et 113.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 26 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 172 |
Pour l’adoption | 179 |
Contre | 164 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 10 A, et les amendements nos 238 rectifié, 313 rectifié et 290 rectifié n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 281, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Aïchi, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Avant l’article 10 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 995 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 18° Les contrats d’assurance maladie complémentaire couvrant les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale, si ces garanties respectent les conditions définies à l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – La perte des recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence, pour moitié, par la hausse de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale et, pour moitié, par la hausse du taux mentionné à l’article L. 245-16 du même code.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Dans une enquête sur la santé des étudiants menée en 2011 par La Mutuelle des étudiants et l’IFOP, on découvre que 34 % d’entre eux renoncent aujourd’hui à se soigner. Si ce phénomène n’est pas nouveau, la situation sociale et sanitaire de cette catégorie de la population s’est encore dégradée ces dernières années, dans un contexte de crise qui a vu le chômage et la précarité exploser, particulièrement chez les jeunes.
Le Secours catholique vient de publier, aujourd’hui même, son rapport annuel. Il en ressort que, dans notre pays, les jeunes de 18 à 25 ans constituent, loin devant les personnes âgées, la catégorie d’âge la plus touchée par la pauvreté.
Les trois facteurs qui permettaient l’autonomisation progressive des jeunes et leur entrée dans l’âge adulte – la famille, l’emploi et le logement – sont aujourd’hui terriblement fragilisés par le contexte économique et social.
Mais ce rapport nous fournit un autre enseignement : parmi les personnes ayant eu recours au Secours catholique l’année passée, la proportion de celles qui ont fait des études supérieures est, pour la première fois, plus importante que la proportion de celles qui n’ont pas dépassé l’école primaire. Autrement dit, même un diplôme d’études supérieures ne met plus, aujourd’hui, à l’abri de la pauvreté.
Lorsqu’ils doivent choisir entre se nourrir, se loger et se soigner, les étudiants abandonnent généralement les soins, les reportant à plus tard, avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer, non seulement pour leur santé, mais aussi pour la sécurité sociale puisque des affections bénignes non traitées peuvent dégénérer en pathologies plus lourdes. C’est tout le modèle de prévention qui se trouve là remis en cause.
Les mesures instaurées par le Gouvernement ces dernières années – franchises médicales et participations forfaitaires, hausse du forfait hospitalier, déremboursements, etc. – sont autant de barrières financières à l’accès aux soins.
Le transfert croissant de charges de l’assurance maladie vers les patients rend aujourd’hui indispensable la souscription d’une complémentaire santé, pour se soigner dans de bonnes conditions, et sans se ruiner. Or les étudiants n’ont pas les moyens de souscrire un tel contrat ! Ils sont 19 % – un taux en hausse de 6 points par rapport à 2008 – à déclarer ne pas avoir de complémentaire santé, contre 10 % dans l’ensemble de la population.
Afin de faciliter l’accès aux mutuelles des étudiants, nous proposons donc, par le présent amendement, d’exonérer de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance les complémentaires santé des étudiants. Le coût d’une telle mesure est évalué à moins de 8 millions d’euros.
Dans un contexte de précarité accrue de la jeunesse, la situation sanitaire et sociale des étudiants nous semble en effet mériter une attention et des mesures particulières. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. L'amendement n° 289 rectifié bis, présenté par Mmes Lienemann, Génisson, Demontès, Alquier et Campion, MM. Carvounas et Cazeau, Mmes Claireaux, Duriez et Ghali, MM. Godefroy, Jeannerot, Kerdraon, Labazée, Le Menn et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz et Schillinger, MM. Teulade, Vergoz et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Avant l’article 10 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 995 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les contrats d’assurance maladie complémentaire couvrant les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale, si ces garanties respectent les conditions définies à l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la hausse de la contribution mentionnée à l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. Cet amendement devrait nous permettre de retrouver une certaine sérénité. Il concerne en effet la santé des étudiants, lesquels représentent l’avenir de notre nation. J’espère que l’amendement n° 281, défendu par mon collègue Jean Desessard, et l’amendement n° 289 rectifié bis, présenté par l’ensemble de mon groupe politique, notamment Mme Lienemann et moi-même, nous permettront de tomber d’accord.
Cet amendement vise, lui aussi, à exonérer les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance prévue à l’article 1001 du code général des impôts. Il se justifie, ainsi que mon collègue Jean Desessard l’a expliqué très clairement, par la situation sanitaire et sociale particulièrement préoccupante des étudiants.
Dans l’enquête menée par l’IFOP, on relève que 19 % des étudiants déclarent ne pas avoir de complémentaire santé, contre 10 % pour le reste de la population. Plus alarmant encore, 3,4 % de ces étudiants affirment qu’ils renoncent à se soigner.
Si la situation sanitaire des étudiants se dégrade, c’est que leur situation sociale s’est fortement précarisée ces dernières années. Il devient pour eux de plus en plus difficile, alors qu’ils sont nombreux à travailler pour payer leurs études, de concilier les frais relatifs à leur vie d’étudiant et ceux qui concernent leur santé.
Il n’est pas étonnant de voir nombre d’étudiants, y compris des boursiers, travailler à temps plein pour payer leurs études. Ces derniers, cela a été souligné, font le choix, très lourd pour leur avenir, de se loger et de se nourrir plutôt que de s’occuper de leur santé.
L’instauration de la TSCA au 1er janvier 2011, conjuguée à la taxe CMU de 6,27 %, pèse sur les adhérents des mutuelles étudiantes et impose aux étudiants un choix indigne, celui que je viens d’évoquer.
C’est pourquoi il est proposé d’exonérer de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale, créé par la loi du 23 janvier 1948, comme le prévoit l’article 995 du code général des impôts pour les ressortissants du régime agricole, notamment. Je précise que cette exonération concerne d’ores et déjà 5 millions de personnes.
Le coût de cette exonération est estimé à moins de 8 millions d’euros puisque le régime étudiant de sécurité sociale compte seulement 1,6 million d’affiliés. Les 600 000 autres étudiants relèvent d’un régime spécial dérogatoire, comme celui de la SNCF, ou du régime général des salariés.
Cette mesure destinée à prendre en compte la situation d’urgence sociale et sanitaire dans laquelle se trouvent les étudiants sera compensée par l’augmentation de la contribution, prévue à l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale, des entreprises assurant l’exploitation en France d’une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques donnant lieu à un remboursement par les caisses d’assurance maladie ou des spécialités inscrites sur la liste des médicaments agréés à l’usage des collectivités.
Je rappelle que les entreprises de l’industrie pharmaceutique ont réalisé en 2010 un chiffre d’affaires de 27,3 milliards d’euros, selon une estimation du LEEM, l’organisation professionnelle représentant les entreprises du médicament. Relever de 0,1 % le taux de la contribution à laquelle elles sont assujetties rapporterait 25 millions d’euros.
Madame la ministre, vous ne pouvez pas rester insensible à cette proposition qui s’intègre parfaitement dans le plan d’austérité prévu par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements visent un objectif identique, mais prévoient des gages différents.
Tous deux tendent à exonérer de taxe spéciale sur les conventions d’assurance les contrats de complémentaire santé dits « responsables » souscrits par les étudiants. À la différence de l’amendement n° 290 rectifié, l’exonération prévue ici est complète.
Il s’agit d’une bonne mesure, que j’ai moi-même songé à proposer. Je me rallie donc bien volontiers à l’amendement n° 289 rectifié bis, signé par l’ensemble des membres du groupe socialiste-EELV, et je demande le retrait de l’amendement n° 281, qui lui est identique dans son principe.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Je comprends l’inspiration généreuse qui sous-tend le dépôt de ces amendements. Néanmoins, ils ne me semblent pas adaptés à la situation actuelle.
Nous avons déjà consenti un effort considérable en direction des étudiants. Nous avons d’abord augmenté de 20 % le nombre d’étudiants boursiers, puis nous avons accru en cinq ans de 20 % le montant des bourses. Nous avons également mis en place une aide à la complémentaire santé de 200 euros pour les étudiants boursiers les plus défavorisés.
Madame Génisson, ce n’est pas seulement pour des raisons de précarité financière que certains étudiants ne souscrivent pas une complémentaire santé. D’autres raisons peuvent expliquer ce phénomène. Vous n’ignorez sans doute pas qu’assurer sa santé n’est pas toujours une priorité pour les étudiants. De multiples aides aux complémentaires pourraient exister qu’ils ne s’assureraient pas forcément davantage…
J’en veux pour preuve la sous-consommation des aides aux complémentaires santé que nous avons mises en place pour les étudiants boursiers des échelons 5 et 6, soit les échelons les plus bas. Ces aides n’ont pas été intégralement utilisées par ces étudiants pourtant les plus déshérités.
La même sous-consommation est observée pour les plans additionnels d’aide à la complémentaire santé mis en place par certaines régions et certains départements. La région Île-de-France, par exemple, a mis en place une aide de 100 euros, soit une aide deux fois moins élevée que celle de l’État, pour les étudiants boursiers un petit peu plus favorisés, relevant des échelons 4 et 5. Ces aides n’ont pas non plus été complètement consommées.
Pour qu’un plus grand nombre d’étudiants souscrivent une complémentaire santé, nous avons donc surtout besoin de campagnes d’information montrant l’intérêt d’une couverture même lorsqu’on a dix-huit ou vingt ans, même lorsqu’on est en bonne santé et qu’on se croit immortel…
Plutôt que d’exonérer les mutuelles d’une taxe demandée à toutes les complémentaires santé, il vaudrait mieux les inciter à effectuer un travail d’information pour convaincre les étudiants de souscrire ce type de contrat.
J’ajoute, madame Génisson, que les services universitaires de médecine préventive, les assistantes sociales des universités et des CROUS, ainsi que les recteurs disposent de fonds d’aide d’urgence pouvant être sollicités, et ils le sont, lorsqu’un étudiant sans complémentaire est victime d’un grave accident de santé. Le Gouvernement a même accru leurs moyens ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un sujet important, ce que prouvent d’ailleurs les interventions qui viennent d’avoir lieu.
Comme le rapporteur, je suis favorable à la mesure proposée par les auteurs de ces amendements.
Pour répondre à l’ensemble des inquiétudes, y compris aux vôtres, madame la ministre, la commission des affaires sociales, qui se préoccupe de l’état sanitaire et de la santé des étudiants, a décidé de mettre en place un groupe de travail qui proposera soit de maintenir, si sa nécessité est reconnue, la disposition que nous allons adopter dans quelques instants, soit de la reconsidérer dans le cadre du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale si elle ne répond finalement pas aux besoins.
Nous souhaitons que le groupe de travail soit formé le plus rapidement possible à l’issue de l’examen de ce texte. J’ai déjà évoqué sa constitution lors de la dernière réunion du bureau de la commission des affaires sociales.
Les conclusions de ce groupe de travail nous aideront à discerner de quelle manière la santé des étudiants peut être le mieux protégée.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, vous proposez une exonération de taxe pour les mutuelles étudiantes, mais exigez-vous qu’elle se traduise par une baisse immédiate des tarifs des complémentaires santé pour les étudiants ? Ce n’est pas ce que prévoient ces amendements. Vous faites donc un cadeau aux mutuelles étudiantes ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ce sont les mutuelles qui en décideront !
M. le président. Monsieur Desessard, l'amendement n° 281 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Si, sur ces travées, la différence entre les socialistes et les écologistes tient simplement à un gage, je retire très volontiers mon amendement pour me rallier à celui que Mme Génisson a défendu.
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Décidément, qu’il s’agisse des mutuelles en général ou des mutuelles étudiantes, je peine à comprendre le raisonnement totalement asymétrique du Gouvernement…
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Pour Mme la ministre, nous voudrions faire un cadeau aux mutuelles étudiantes.
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Elle nous expliquait pourtant tout à l’heure que la répercussion de la taxe sur les tarifs proposés aux assurés était un problème qui ne se posait pas !
Il s’agit d’un raisonnement parfaitement asymétrique, dont la logique m’échappe : le Gouvernement dit une chose puis affirme exactement le contraire quelques minutes plus tard ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Un autre aspect m’échappe dans le raisonnement du Gouvernement.
Mme la ministre a reconnu que les contrats responsables et solidaires étaient particulièrement vertueux, contrairement aux autres qui ne sont ni responsables ni solidaires.
Or j’avoue ne pas comprendre la logique du Gouvernement. Les premiers seront frappés à hauteur de 1 milliard d’euros par une taxe qui sera répercutée – contrairement à ce que vous affirmez – au moins en grande partie sur les assurés, tandis qu’un malus est maintenu pour les seconds, dont Mme la ministre a oublié de préciser le rendement. Elle est pourtant beaucoup trop compétente et avertie pour l’ignorer !
Ce malus, qui correspond à la hausse de 7 % à 9 % du taux de la taxe pour les contrats non vertueux, représente 26 millions d’euros. D’un côté, il est prévu de prélever 1 milliard d’euros sur les contrats vertueux et, de l’autre, seulement 26 millions d’euros sur ceux qui ne le sont pas… J’ai du mal à comprendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. L’explication est très simple, monsieur Caffet : vous vous intéressez aux mutuelles, nous nous intéressons aux assurés ; vous vous intéressez à ce qu’auront les mutuelles, nous nous intéressons aux baisses de prix pour les assurés ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Marc Daunis. C’est une explication, ça ?
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. C’est le monde à l’envers !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote sur l'amendement n° 289 rectifié bis.
M. Jean-Jacques Mirassou. Les griefs que vous avez formulés contre les mutuelles, madame la ministre, ne s’appliquent pas aux mutuelles étudiantes, car elles n’ont pas, chacun le sait, de trésor caché…
M. Desessard a rappelé la réalité des chiffres : 19 % des étudiants déclarent ne pas avoir de complémentaire santé et 34 % d’entre eux renoncent à se soigner.
Il est vrai qu’il faut tenir compte de l’âge : lorsqu’à vingt ans on est en bonne santé, on ne pense pas qu’il pourrait un jour en être autrement.
Mais tous les étudiants ne sont pas égaux ! Dans une autre vie, quand je soignais au Mirail, je me suis aperçu que ceux qui avaient des problèmes sanitaires à dix ans ou à quinze ans étaient aussi ceux qui en avaient à l’université.
Autrement dit, ceux qui à vingt ans arborent un magnifique sourire parce qu’ils se pensent à l’abri des problèmes de santé n’appartiennent pas aux mêmes classes sociales que ceux que j’ai soignés il y a quelques années. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Le problème reste donc entier, madame la ministre, car même si votre argumentation est recevable, il n’en est pas moins vrai que dans notre pays certains étudiants subissent une double, voire une triple peine. Ce sont les mêmes qui sont obligés de travailler pour payer leurs études, qui peinent à se loger et qui ont des difficultés en matière de santé !
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Jean-Jacques Mirassou. Les dispositifs que vous avez évoqués sont difficilement accessibles. Peut-être manquent-ils d’attractivité ? Faites passer le message à celui qui vous a remplacée au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Il est urgent de faire en sorte que la condition des étudiants français soit digne d’une grande puissance mondiale !
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Je suis élu d’un département qui compte une ville universitaire importante : Poitiers. Dans cette ville de 25 000 à 30 000 habitants, on entend parler tous les jours des problèmes dont nous débattons.
Que cela plaise ou non, je voterai donc cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.
Mme Claire-Lise Campion. Au cours de cet après-midi, nous avons dit et répété que l’effort demandé aux mutuelles, par conséquent à leurs adhérents, était considérable.
Contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre, les mutuelles n’auront pas d’autre choix que de répercuter sur les assurés le coût de la hausse de taxe.
Vous les avez invitées à mener une réflexion sur leur gestion et à en diminuer le coût. Certes, toute recherche d’économies ne peut être que positive.
Qu’il me soit permis de rappeler les règles prudentielles instaurées par la réforme dite « solvabilité II », qui impose l’existence des réserves que vous venez d’évoquer, réserves qui peuvent être mobilisées pour augmenter un fonds de garantie de l’ensemble du secteur, comme l’a justement rappelé l’Autorité de contrôle prudentiel. Nous pouvons retrouver trace de tout cela dans le compte rendu des débats qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale.
Effectivement, les mutuelles elles-mêmes peuvent être confrontées à des sinistres. En témoignent certains exemples plus ou moins récents que nous avons tous en mémoire.
La taxation des contrats solidaires va inévitablement entraîner une nouvelle augmentation qui, je le répète, pèsera sur les assurés. Nous pouvons donc craindre qu’une partie de la population ne soit encore obligée de renoncer à souscrire ce type de contrats. En effet, si le reste à charge pour les malades augmente, le renoncement aux soins concerne un nombre de plus en plus élevé de nos concitoyens : 14 % des chômeurs et 8,5 % des ouvriers non qualifiés n’ont pas de couverture complémentaire. Je répète à mon tour les chiffres que mes collègues ont cités : 19 % des étudiants ne bénéficient pas d’une telle couverture et 34 % d’entre eux renoncent à se faire soigner, mais pas pour les raisons que vous avez invoquées, madame la ministre. Nous ne pouvons par conséquent pas souscrire à vos arguments.
La mesure que nous vous proposons est juste. Elle vise à exonérer de TSCA les contrats d’assurance maladie complémentaire qui couvrent les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale.
Certes, vous l’avez d’ailleurs rappelé, vous avez mis en place une aide à la souscription d’une mutuelle complémentaire d’un montant de 200 euros par bénéficiaire. Mais si les crédits qui lui sont affectés ne sont pas totalement consommés, c’est non seulement probablement par manque d’information ou d’attention des jeunes étudiants, mais aussi en raison des critères imposés pour l’obtention de cette aide.
Enfin, je veux préciser de nouveau que les mutuelles des étudiants n’ont, elles, pas de réserves. Se pose donc la question, bien réelle, de leur capacité à supporter cette charge nouvelle.
Je le répète, la mesure que nous proposons est juste. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. La répétition à de nombreuses reprises de chiffres faux ne rendra pas ceux-ci exacts ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
La couverture santé des jeunes est une question qui devrait mobiliser aussi largement, sur l’ensemble de ces travées, que celle de la complémentaire santé des étudiants car, vous le savez bien, ce sont les jeunes les moins qualifiés qui rencontrent les problèmes de santé les plus nombreux dans notre pays.