M. le président. La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Dernier orateur à m’exprimer dans cette discussion générale, je salue votre constance, mes chers collègues, et sollicite votre attention pour quelques minutes supplémentaires…
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année, bien entendu, nos débats auront un caractère particulier. Car si nos collègues de l’Assemblée nationale ont adopté le PLFSS mercredi dernier, la nouvelle majorité de gauche de la Haute Assemblée, notamment ses élus qui siègent à la commission des affaires sociales, a clairement annoncé son intention de le rejeter, le jugeant « indigent, irresponsable et irréaliste ».
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous avez bien retenu !
M. Alain Milon. Une cinquantaine d’amendements ont d’ailleurs été déposés dans le but de transformer complètement ce PLFSS, dont vous estimez, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, qu’il n’apporte pas « les solutions nécessaires à la sauvegarde du système de protection sociale ».
La majorité des membres de la commission des affaires sociales a adopté plusieurs mesures visant, selon elle, à ramener le déficit du régime général aux environs de 10 milliards d’euros en 2012, au lieu des 13,9 milliards d’euros prévus.
Vous préconisez de supprimer les exonérations de charges sur les heures supplémentaires et de réformer les niches sociales. Vous voulez également relever à 15 % le taux du forfait social, aujourd’hui fixé à 6 %. Vous prévoyez encore d’annuler l’augmentation de 3,5 % à 7 % de la taxation des contrats responsables des mutuelles, de supprimer les franchises sur les médicaments et de maintenir les indemnités journalières à leur niveau actuel, etc.
La commission des affaires sociales a souhaité marquer les esprits, « envoyer un signe fort qu’il existe une politique différente de celle menée par le Gouvernement ».
Bien entendu, notre point de vue est tout différent, surtout dans le contexte actuel qui a conduit le Gouvernement à réviser ses hypothèses de croissance. Certes, cette révision a des incidences sur la manière dont nous travaillons. Mais nous ne pouvons pas ignorer la situation exceptionnellement difficile dans laquelle se trouve notre pays ; le Gouvernement a su s’y adapter avec un volontarisme que je salue.
La France est le pays qui consacre le plus de moyens à son système de santé. Nous avons la chance de bénéficier d’un régime d’assurance maladie qui garantit un haut niveau de prise en charge, qui offre une qualité de soins enviée à travers le monde et qui, de surcroît, le fait pour toutes les personnes se trouvant sur son territoire. Ce système si protecteur, il nous faut impérativement le préserver. Cela passe par la lutte contre les déficits, par l’incitation à la performance, par une attention sans cesse renouvelée portée à la qualité et à la sécurité des soins.
Le PLFSS pour 2012 traduit des engagements forts dans ces trois directions.
S’agissant de la question déterminante de la lutte contre les déficits, et même si la crise que nous avons traversée n’a pas arrangé la situation financière de la sécurité sociale, notre pays résiste mieux que beaucoup d’autres aux errements de l’économie. À cet égard, je veux simplement rappeler quelques chiffres.
L’ONDAM est respecté en 2011, pour la deuxième année consécutive, et je m’en félicite. Pour 2012, la croissance de l’ONDAM est fixée à 2,8 %. Ce sont 4,8 milliards d’euros supplémentaires investis dans notre système de santé ! Après la révision de cet objectif à 2,5 % par le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative, c’est encore 4,3 milliards d’euros supplémentaires qui seront consacrés à la santé en 2012.
Grâce à une persévérance dans l’effort, les dépenses de santé sont sous contrôle. Cette maîtrise, n’en déplaise à certains, repose sur des choix et des actes.
Parallèlement, l’évolution des dépenses sera inférieure de 2,2 milliards d’euros au solde tendanciel, et même de 2,7 milliards d’euros après le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative. Le déficit de la branche maladie du régime général sera, en 2012, inférieur de moitié au solde tendanciel.
Plusieurs mesures rendent ce résultat possible : la poursuite de la convergence tarifaire, le renforcement de la contribution des industries pharmaceutiques ou encore la politique du générique.
Je tiens maintenant à aborder l’importante question du reste à charge, qui doit peser le moins possible sur les assurés. Nous devons garantir l’accès aux soins des Français.
Je rappelle, comme Mme Pécresse, que le reste à charge est en France l’un des plus bas au monde et qu’il continue de baisser. Le Président de la République et le Gouvernement proposent la mise en place d’un secteur optionnel ; c’est en effet une solution.
Ce secteur optionnel à principalement deux avantages : donner une visibilité aux assurés sur l’ensemble du territoire et leur permettre de bénéficier d’une vraie prise en charge dans les secteurs concernés par la convention, à savoir l’anesthésie, la gynécologie obstétrique et la chirurgie.
M. le ministre a rappelé que la convention était en cours de signature. Il tient toutefois à aborder la question du secteur optionnel dans le PLFSS. C’est une sage précaution, que nous soutiendrons avec conviction.
Garantir l’accès de tous aux soins, c’est aussi assurer le maillage territorial du système de santé et lutter contre la désertification médicale. Les efforts seront dirigés sur l’incitation, et non la coercition, et sur le développement de pôles et de maisons de santé. Il faut espérer que cette opération ramènera des médecins dans nos territoires ruraux et périurbains, là où une part importante de nos concitoyens a besoin d’eux. Les enquêtes récentes du Conseil national de l’ordre des médecins semblent confirmer la tendance d’un renouveau à ce sujet.
S’agissant de l’amélioration de la performance des établissements de santé, le PLFSS s’inscrit dans la continuité de la poursuite des objectifs de réduction des déficits hospitaliers et d’évolution des pratiques. Il instaure notamment le mécanisme de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Ces efforts permettront d’économiser 450 millions d’euros, le retour à l’équilibre financier des hôpitaux étant prévu en 2012.
À ce titre, je souhaiterais particulièrement saluer, comme l’a fait le Président de la République lors de sa visite du chantier du futur hôpital à Carcassonne, le 26 octobre dernier, l’engagement des professionnels de santé pour l’amélioration de la situation des hôpitaux et l’évolution des pratiques. Madame la secrétaire d'État, je tiens à dire combien les inquiétudes exprimées par notre collègue Chantal Jouanno sur l’AP-HP me semblent justifiées.
Les efforts d’efficience concernent également les professionnels hors système hospitalier avec, par exemple, le prolongement de l’expérimentation des nouveaux modes de rémunération dans les maisons, les pôles et les centres de santé pour lutter contre la désertification médicale ou l’amorce d’une réforme du mode de financement des pharmaciens.
Par ailleurs, le PLFSS pour 2012 conduit à la mise en place du fonds d’intervention régional, qui réunira les crédits et dotations déjà existants au titre des actions des ARS. La mutualisation des crédits ainsi réalisée devrait permettre d’optimiser les dépenses et l’offre de soins. Je salue la création de cet outil, qui répond à la fois à un souci de simplification, d’efficience et de performance de la gestion des ARS.
À titre personnel, je tiens en outre à rappeler que le PLFSS pour 2012 traduit un engagement pris par le Gouvernement en mai dernier auprès des fédérations syndicales minières. Il s’agit du maintien de la prise en charge intégrale des soins de santé des personnes relevant du régime minier et de leurs ayants droit. Madame la secrétaire d'État, le fils et petit-fils de mineur que je suis se réjouit de cette initiative qui rend hommage à des hommes et à des femmes ayant sacrifié leur santé pour redresser l’économie de notre pays.
J’évoquerai très brièvement, simplement pour le souligner, que le chemin du retour à une situation pérenne de notre système passe aussi par la lutte contre les fraudes sociales. Nous nous réjouissons que le PLFSS contienne plusieurs mesures visant à renforcer cette lutte. Je crois que, sur ce point, un consensus de l’ensemble de la représentation nationale s’impose.
J’aborderai enfin l’importante question de l’accès de tous les Français à une complémentaire santé.
Le Gouvernement présente dans le PLFSS une mesure visant à étendre l’aide à la complémentaire santé. À cette fin, il envisage d’augmenter le plafond de ressources ouvrant droit à l’ACS à 30 % du plafond de la CMU-C au 1er janvier 2012. Nos collègues députés ont légèrement relevé ce plafond, en le portant à 35 %. Nous suivons sans aucune réserve leur position : la protection santé complémentaire est un sujet réellement important pour l’accès aux soins des Français, et nous devons permettre que le plus grand nombre d’entre eux puisse en bénéficier.
Par ailleurs, dans un contexte économique hésitant, marqué par la grave crise mondiale, qui a fortement amputé les recettes de la sécurité sociale et creusé les déficits, le PLFSS pour 2012 traduit la détermination de la majorité présidentielle à maîtriser les dépenses de santé, tout en préservant un haut niveau de protection pour nos concitoyens.
Pour 2012, il nous est proposé de nous prononcer sur une prévision de recettes pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, toutes branches confondues, de 441,5 milliards d’euros et sur une prévision de dépenses, toutes branches confondues, de 457,1 milliards d’euros. Je tiens à souligner que 6 milliards d’euros de recettes nouvelles sont apportés à la sécurité sociale, plus particulièrement à l’assurance maladie.
Je le redis avec plaisir, notre pays est celui au monde qui consacre le plus de moyens à son système de santé. Le reste à charge est parmi les plus bas, et il diminue encore. Ce modèle français unique et envié, nous devons impérativement le préserver. Cela nous engage au courage, à l’effort, à la détermination et à la responsabilité.
La dette de la sécurité sociale fait évidemment peur aux assurés. Pourront-ils encore se faire soigner demain ? Et à quel prix ? Ce PLFSS s’inscrit dans le processus qui doit permettre de ramener le régime d’assurance maladie à l’équilibre à l’horizon de 2015.
Pour pérenniser notre système de protection sociale, la maîtrise des dépenses est une nécessité absolue. En la matière, le Gouvernement fait preuve de responsabilité.
En effet, nous devons être résolument engagés dans la politique de lutte contre les déficits. Cet effort, nous devons le fournir pour les générations futures et nous devons le faire tout simplement dans l’intérêt national. Le fonctionnement de notre système de soins doit impérativement être guidé par un souci d’efficience.
Sur le volet maladie, l’ONDAM, je le disais précédemment, sera fixé à 2,8 % et à 2,5 % dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2012. Alors que l’Espagne, et la Catalogne en particulier, réduit ses dépenses de santé de 10 % en raison de la crise, la France s’est donné les moyens de maintenir leur progression : ce sont 4 milliards à 5 milliards d’euros supplémentaires qui seront ainsi affectés au service des patients.
Mes chers collègues, ce PLFSS nous montre que les réformes portent leurs fruits, celle de l’assurance maladie comme celle des retraites. Elles se traduisent, dès 2012, par 5,5 milliards d’euros d’économies.
D’une manière plus générale, le PLFSS s’articule autour de plusieurs principes qui sont le fruit de choix du Gouvernement et des parlementaires de la majorité, guidés par le sens de la responsabilité.
Le premier principe est la priorité donnée à la réduction des niches fiscales et sociales injustifiées. Cette politique permettra de faire rentrer 4 milliards d’euros dans les caisses de la sécurité sociale.
Le PLFSS prévoit aussi d’élargir la base de la CSG en revoyant le régime de l’abattement pour frais professionnels. L’abattement pour frais professionnels sur les revenus supportant la CSG est réduit de 3 % à 2 %. Seuls le salaire et les allocations chômage garderont cet abattement.
Le deuxième principe est celui du recours à des prélèvements ciblés qui répondent à une exigence de justice sociale. Il s’est traduit dans les engagements qu’a pris le Gouvernement le 24 août dernier : augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et refonte des plus-values immobilières.
Le troisième principe est notre engagement dans une nouvelle démarche qui consiste à développer l’usage d’une fiscalité comportementale, un point déjà évoqué par certains des intervenants.
Le PLFSS pour 2012 est conforme à la volonté du Président de la République, qu’il a rappelée le 25 octobre dernier et que nous partageons, d’assurer un équilibre absolu entre le souci des patients d’être soignés et pris en charge et la maîtrise des cotisations des travailleurs.
Mes chers collègues, nous devons faire preuve de responsabilité et de créativité pour préserver l’héritage d’un système de sécurité sociale exceptionnel en termes de prestations et d’accès aux soins. Nous avons tous conscience de la gravité de la crise de confiance provoquée par un endettement qui effraie, et cela doit nous rappeler à notre sens de la responsabilité.
Avec quelques efforts supplémentaires, les progrès restent possibles. Le PLFSS pour 2012 marque une nouvelle étape dans cette direction, alors soyons au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 8 novembre 2011, à quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2012 (n° 73, 2011-2012).
Rapport de MM. Yves Daudigny, Ronan Kerdraon, Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès, M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 74, 2011-2012).
Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n° 78, 2011-2012).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 8 novembre 2011, à zéro heure cinquante-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART