Mme Marie-Christine Blandin. … et le pâton qui gonfle sous l’effet de la levure exiger que cette bonne action soit inscrite dans la loi ?

Mme Marie-Christine Blandin. C’est ridicule ! Vous aurez beau prétendre que vous n’y parlerez que de nature, pour les enfants, le chasseur, c’est un homme armé, et rapprocher de l’école l’imaginaire des armes n’est pas une bonne chose. Il en est de même de l’emploi du terme « nuisibles », à l’heure ou la biodiversité bien comprise identifie comme une mosaïque de rôles complémentaires les actes de chaque espèce et les effets de chaque variété de plante, quand bien même certains d’entre eux nous dérangent.

Eh oui, dans la biodiversité, il y a aussi la fouine, le renard,…

MM. Jean-Louis Carrère et Robert del Picchia. Et la belette !

Mme Marie-Christine Blandin. … même s’il apporte l’échinococcose, le lynx, le loup, l’ours… Je ne crois pas pourtant que vous allez dans les écoles en vanter les mérites.

Au-delà de la volonté des chasseurs de montrer régulièrement qu’ils existent, que la loi leur donne des droits et même qu’ils s’occupent, à leur façon, de la nature, il y a tout de même tentative et récidive de priver les autres de leur liberté : convoitise sur les terrains non chassés, injonction de payer à destination des propriétaires qui ne se prêtent pas aux activités cynégétiques, et même, mais ceci a heureusement disparu grâce à la commission, essai d’intimidation… Je veux parler du dernier article du texte initial de la proposition de loi.

Je connais et je partage le plaisir de partir au petit matin en campagne ou en forêt. J’apprécie la sensation des bottes qui se mouillent, le soleil qui commence lentement à chauffer, la brume qui monte, l’odeur de feuilles mortes et de champignon, le silence, la patience, l’aguet et, soudain, un vol de perdrix ou le saut vertical du renard au-dessus d’un petit rongeur. (Sourires sur les travées de lUMP. – M. Yvon Collin s’exclame.)

M. Alain Gournac. Magnifique ! Bravo !

Mme Marie-Christine Blandin. Mais je ne tue pas ! Et j’entends que soient respectés ceux qui ne veulent pas tuer et qui ne veulent pas que l’on tue sur leur terrain.

À l’heure des fermetures de postes d’enseignants, alors que le Gouvernement a supprimé l’année de formation pédagogique des maîtres, il ne me semble vraiment pas opportun de conforter la légitimité des chasseurs à venir parler à l’école de biodiversité. (Mme Évelyne Didier sourit et applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, avant de passer à l’examen des articles, permettez-moi, sans reprendre mon propos introductif, de faire écho à quelques-unes de vos interventions.

Monsieur Pointereau, vous avez défendu l’introduction d’une validation du permis de chasser pour une journée. Le code de l’environnement instaure le principe de la validation annuelle du permis de chasser, en contrepartie du versement d’une redevance. Un article du même code prévoit que le permis de chasser peut également être validé pour une durée de neufs jours ou de trois jours, moyennant l’acquittement d’une redevance.

Compte tenu de ces éléments, je ne pense pas que l’introduction d’une validation pour une durée d’un jour soit intéressante, car elle entraînerait en fait des coûts fixes de gestion supérieurs au coût de la validation pour une durée de trois jours,…

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. … soit un peu plus de quinze euros. Cette dépense serait mise à la charge de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, des fédérations départementales de chasseurs ; elle me semble disproportionnée par rapport au gain en termes d’attractivité. Je le répète, le coût de quelque 16 euros ne représente pas un frein pour les jeunes chasseurs et je pense que l’origine du problème doit être cherchée ailleurs, mais je reconnais bien évidemment que les problèmes de la perte d’attractivité de la chasse et de la baisse du nombre de chasseurs se posent réellement.

Monsieur Kergueris, à propos de l’exonération de la taxe sur le foncier non bâti pour les zones humides, vous suggérez de passer, grâce à l’article 2, à une fiscalité non discriminatoire des installations de chasse. Je tiens à rappeler qu’il n’était pas dans l’esprit de la loi de 2005 de discriminer ces territoires de chasse. Les chasseurs participent, par exemple, par le faucardage, le curage, le maintien en eau aux périodes de présence des oiseaux, au bon entretien de ces milieux. Puisque les dispositions actuelles ne semblent pas suffisamment claires, je défendrai un amendement en ce sens à l’article 2.

Vous avez aussi parlé de l’indemnisation des dégâts de gibier. L’amendement que vous présenterez tout à l’heure tendra à compléter la responsabilité déjà inscrite dans la loi. Cette démarche me semble positive.

M. Collin a rappelé l’importance des schémas départementaux de gestion cynégétique : je tiens à vous dire, monsieur le sénateur, que j’ai appelé par circulaire l’attention des préfets sur ces schémas et sur leur révision. Ce sujet est fondamental et j’ai besoin de la mobilisation de tous les préfets.

MM. Le Cam et Carrère se sont inquiétés, avec d’autres, de la diminution du nombre des chasseurs et se sont réjouis de la simplification du droit des associations communales de chasse agréées. Je crois en effet que cette simplification est une bonne mesure. Nous pouvons avoir des appréciations différentes sur ce point, mais il faut reconnaître que la régulation des populations d’ongulés qui provoquent des dégâts importants, que nous sommes amenés à qualifier de véritables « points noirs », nécessite la présence de chasseurs en nombre suffisant sur les territoires ruraux. Sinon, il faudra trouver une autre solution,…

M. Jean-Louis Carrère. On les nommera ! (Sourires.)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. … ce qui ne sera pas forcément simple !

En revanche, je ne partage pas du tout le point de vue exprimé par M. Carrère sur la table ronde. Cette belle initiative a permis d’avancer dans la compréhension mutuelle, même si elle n’a pas permis de faire converger tous les points de vue. En janvier 2010, la table ronde a insisté sur le fait que la chasse devait être pratiquée dans le respect de la législation en vigueur, y compris en ce qui concerne les ortolans. Je crois qu’aucun parlementaire ne doit pouvoir dire le contraire : la chasse doit être pratiquée dans le respect de la réglementation ! Quel parlementaire pourrait s’y opposer ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Monsieur le sénateur, reconnaissez que cela pose tout de même un problème !

M. Roland du Luart. Un peu d’indulgence pour M. Carrère, madame la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Si la fédération départementale souhaite procéder à une étude sur les ortolans, elle peut le faire.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Qu’elle associe sa fédération de chasse ou les associations de protection de la nature, soit ! Mais, je le répète, les ortolans sont classés « espèce protégée » depuis le 5 mars 1999 : leur chasse est interdite, elle le reste à ce jour et je crois bien qu’elle le restera !

M. Yvon Collin. À bon entendeur…

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. C’est très clair ! (Sourires.)

Monsieur Patriat, vous avez souligné l’importante production législative en matière de chasse de ces dernières années. Vous y avez contribué, en d’autres temps, même si vous mettez en doute l’importance de l’évolution qui intervient aujourd’hui. Cependant, je comprends votre point de vue.

Vous évoquez aussi des problèmes sanitaires, notamment le rapport entre la tuberculose bovine et la tuberculose des blaireaux. Je crois que votre département est particulièrement touché : sachez que mes services travaillent avec les services du ministère de l’agriculture pour limiter les conséquences économiques importantes de cette zoonose. Nous sommes très sensibles à ce problème.

Madame Marie-Christine Blandin, vous ne souhaitez pas que le rôle de la chasse et des fédérations départementales de chasseurs dans la gestion des écosystèmes soit inscrit dans la loi. Je salue, comme vous-même, votre participation à la biodiversité de cette assemblée, par ailleurs extrêmement virile, dans laquelle les femmes se sont peu exprimées aujourd’hui !

M. Roland du Luart. On ne va tout de même pas instaurer des quotas !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Néanmoins, je crois que nous pouvons tous tomber d’accord sur le fait que les chasseurs participent, à leur manière, à l’entretien des écosystèmes, notamment des milieux humides, grâce aux réserves de chasse et de faune sauvage. Tel a été le cas, par exemple, avec la création, en 1981, de la Fondation pour la protection des habitats de la faune sauvage ou, depuis 2006, avec le programme Agrifaune qui réunit l’ONCFS, la Fédération nationale des chasseurs, la FNC, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’APCA, et la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, la FNSEA. Les chasseurs montrent leur implication ; il est vrai qu’elle est inégale selon les départements et que j’aimerais parfois moi-même qu’elle aille un peu plus loin. Mais ce mouvement existe bien et cette proposition de loi nous donne l’occasion de le saluer ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Yvon Collin. Très bien !

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte élaboré par la commission.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à moderniser le droit de la chasse
Article 2

Article 1er

Le deuxième alinéa de l’article L. 421–5 et le premier alinéa de l’article L. 421–13 du code de l’environnement sont complétés par une phrase ainsi rédigée :

« Elles mènent des actions d’information et d’éducation au développement durable en matière de connaissance et de préservation de la faune sauvage et de ses habitats ainsi qu’en matière de gestion de la biodiversité. »

M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, les chasseurs disposent déjà d’une convention qui les autorise à participer à des actions d’information. Cette convention ne comporte d’ailleurs pas assez de précautions et, en particulier, elle n’encadre pas suffisamment les messages.

Le gradient de l’impossible au possible – je commence par l’impossible – va du fusil, du treillis, du gibier mort et des animaux empaillés, en passant par la notion contestable de « nuisibles », à la connaissance de la faune locale ou à une simple initiation à l’environnement. Ce gradient n’est pas suffisamment balisé.

C’est ainsi que, dans un petit collège du Ternois, dans le Pas-de-Calais, une classe de sixième a bénéficié, il y a quelques années, d’une action éducative intitulée « Initiation au piégeage des petits puants ». Après la description apocalyptique des monstres sanguinaires que sont ces carnivores et la pose des pièges par les élèves, ces enfants de sixième et de cinquième ont découvert, une semaine plus tard, les petites fourrures sanguinolentes. Heureusement, des parents s’en sont émus et cette initiative a pris fin. Heureusement aussi, si j’en crois vos propos, telles ne sont plus vos méthodes ni vos intentions…

Beaucoup ici plaident en faveur de cette sensibilisation pour remédier à la baisse du nombre des chasseurs. Il me semble utile de placer les chiffres en perspective : si la France compte 1 300 000 chasseurs, l’Espagne en compte 980 000, le Royaume-Uni 880 000 et l’Italie 750 000. Vous n’êtes donc pas les plus mal lotis !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a rendu un avis défavorable, mais j’aimerais vous informer de ce qui se passe vraiment sur le terrain, madame Blandin !

Comme nos autres collègues, j’ai appris, en vous écoutant, ce qui s’était passé dans ce collège du Pas-de-Calais. Mais cet exemple ne correspond pas à la réalité !

En matière d’éducation et d’information, les fédérations de chasse réalisent un travail extraordinaire. Plus de quatre-vingts d’entre elles – autrement dit, les huit dixièmes des départements – invitent des publics scolaires à visiter leurs réserves de chasse. Dans mon département, une réserve a été créée dans le marais Vernier, avec un observatoire. Les enfants des écoles primaires viennent à tour de rôle observer aussi bien le gibier d’eau que les oiseaux protégés ; ils repartent avec des images, de l’information et sont assez enthousiastes ! Même des enseignants au départ un peu réticents n’hésitent pas à revenir dans cette réserve. Voilà pour le travail d’information réalisé à l’intention des écoles primaires !

Le travail de formation va beaucoup plus loin. Dans de nombreux lycées agricoles, les formations qui ont un lien avec la gestion des territoires bénéficient de l’intervention des fédérations. Il ne faut pas tomber dans la caricature des chasseurs en treillis avec leur fusil : je n’ai entendu parler d’aucune formation, dans aucun collège, aucune école, aucun lycée, où l’on apprendrait à des jeunes à manier les armes ! Ce maniement s’apprend plus tard et ailleurs, lors du passage du permis de chasser et ne concerne que ceux qui veulent entrer dans cette démarche.

En revanche, dans les lycées agricoles, grâce à ce que montrent les fédérations de chasse, les élèves apprennent énormément sur la biodiversité, sur les espèces, sur la flore, sur la faune... Ce travail est assez extraordinaire ! Mme la ministre va peut-être vous le rappeler, la convention passée le 4 mars 2010 avec le ministère de l’éducation nationale a pris acte de ces interventions de manière très positive.

Je souhaite donc, premièrement, que nous évitions de tomber dans la caricature et, deuxièmement, que cet article 1er soit préservé. Aussi, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

L’exemple que vous citez, madame Blandin, est absolument scandaleux, mais ce n’est pas parce qu’une telle pratique déviante a pu être observée que le système lui-même est mauvais. Le droit de participer à cette sensibilisation à l’environnement est reconnu aux fédérations de pêcheurs ; il est assez naturel qu’il soit également reconnu aux fédérations de chasseurs.

Cela dit, je partage votre insatisfaction quant à l’emploi du terme « nuisibles ». Je serais preneuse d’une meilleure formulation, sous réserve que l’on ne s’oriente pas vers une appellation comme celle de « petits puants » (Mme Marie-Christine Blandin sourit.), qui me semble en effet très peu adaptée !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Carrère. Je regrette également que l’on puisse rencontrer, dans certains départements, des caricatures du type de celle qui a été évoquée par Mme Blandin.

Le département des Landes abrite deux réserves naturelles, l’une à Pontonx-sur-l’Adour, où je l’invite, et l’autre sur le marais d’Orx. Je puis attester que ces réserves sont extrêmement bien entretenues par la fédération des chasseurs, avec l’appui des collectivités locales. Les enfants des écoles s’y rendent aussi pour observer la faune au moment des migrations et cette activité, très formatrice, s’avère extrêmement intéressante.

L’effort pédagogique des fédérations de chasseurs en direction des enfants de nos zones sera bénéfique pour l’image de la chasse et pour des pratiques encore améliorées, qui réduiront à néant ce que nous décrivait Mme Blandin.

M. Roland du Luart. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 13, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elles mènent des actions d’information en matière de connaissance de la faune sauvage et de ses habitats. »

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Il s’agit d’un amendement de repli visant à supprimer simplement la fin de la dernière phrase de l’article, soit les termes « ainsi qu’en matière de gestion de la biodiversité ».

Vous le savez, mes chers collègues, les déséquilibres causant la prolifération de certaines espèces, que vous avez tous évoqués, sont souvent d’origine humaine : apport d’espèces invasives ou éradication d’un prédateur dont on mesure a posteriori l’action régulatrice, agrainage, ou encore pratique qui consiste à enduire d’asphalte les troncs d’arbre pour inciter les sangliers à venir s’y gratter et pour qu’ils soient plus nombreux sur un territoire. Puis, lorsque les dégâts dont ils sont à l’origine commencent à gêner, on regrette leur présence !

Au demeurant, la biodiversité, globalement, n’a pas besoin d’être gérée : elle se porte nettement mieux quand on la laisse tranquille ! Mais la place de l’homme et de ses activités provoque des perturbations, qui ne sont pas « naturelles ». Cependant, il s’agit de notre vie, de notre raison d’être. Il convient simplement d’agir avec précaution, ce que ne font pas forcément les chasseurs.

Ainsi, la pédagogie que vous mettez aujourd’hui en avant n’a pas toujours bénéficié de connaissances justes.

À cet égard, permettez-moi de vous rappeler qu’un numéro du Chasseur français proposait la description du croisement de la belette et de l’hermine. L’« herminette », phénomène inédit, était censée regrouper toutes les férocités de ses géniteurs. Le seul problème, c’est que ces deux espèces ne sont pas interfécondes ! Pourtant, un joli dessin illustrait l’article en question…

Aujourd’hui encore, l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales relève dans sa rubrique « atteinte à la protection de la faune et de la flore » 9 000 infractions concernant la chasse et seulement 2 000 relatives à la pêche. Par conséquent, comme vous pouvez le constater, il existe un décalage entre vos affirmations et la réalité. Comme en matière de gestion, il faut beaucoup de temps pour faire cesser les transgressions.

Je pense notamment à la réserve naturelle du Platier d’Oye, classée en 1987, mitée de huttes illégales déplacées sur fonds publics, puis réinstallées clandestinement. Ces abris furent ensuite condamnés à l’enlèvement par le tribunal correctionnel de Saint-Omer, puis par la cour d’appel de Douai, enfin, en 2004, par le Cour de cassation. Toutefois, l’enlèvement ne fut mis en œuvre qu’en 2007 ! Il aura donc fallu vingt ans pour appliquer la loi et épargner, outre le site, des migrateurs protégés, qui payaient là un très lourd tribut aux chasseurs.

Il serait bon que ces acteurs-là ne deviennent pas pédagogues de la biodiversité. Aussi convient-il de supprimer, par modestie, la fin de la phrase proposée à l’article 1er.

M. le président. L'amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Carrère et Patriat, Mme Herviaux, M. Mirassou et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

Elles

par les mots :

Les Fédérations départementales des chasseurs agréées associations de protection de l’environnement au titre de l’article L. 141–1

La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Au travers de cet amendement, nous cherchons justement à encadrer quelque peu le texte, afin que les choses soient plus claires, ce qui permettra d’ailleurs de répondre pour partie aux préoccupations de Mme Blandin.

J’ai pu en être le témoin, les fédérations départementales de chasseurs participent à la mise en valeur du patrimoine, notamment cynégétique. Elles assurent, dans les écoles, la promotion et la défense de la chasse, même s’il ne s’agit pas là de leur mission essentielle. Elles conduisent également des actions d’information, d’éducation et d’appui technique à l’intention des gestionnaires des territoires et des chasseurs et, le cas échéant, des gardes-chasse particuliers.

Dans cette proposition de loi, il est proposé de reconnaître que ces fédérations départementales peuvent mener des « actions d’information et d’éducation au développement durable en matière de connaissance et de préservation de la faune sauvage et de ses habitats ainsi qu’en matière de gestion de la biodiversité ».

Il s’agit d’une avancée, sur laquelle nous n’avons pas d’opposition notoire. Nous souhaitons par conséquent prévoir certains encadrements en la matière.

Dans la pratique, il faut le reconnaître, de nombreuses fédérations mènent d’ores et déjà de telles actions, notamment auprès des élèves à la demande des chefs d’établissement. Or leurs interventions ne se limitent pas au domaine de la faune sauvage, elles abordent aussi, M. le rapporteur l’a dit tout à l’heure, la problématique de la préservation de l’habitat des espèces et de leur milieu naturel. Elles relèvent donc, de manière plus générale, du champ du développement durable.

Cette pratique a d’ailleurs déjà été formalisée, cela vient d’être rappelé, le 4 mars 2010, dans une convention de partenariat pour l’éducation au développement durable conclue entre la Fédération nationale des chasseurs, le ministre de l’éducation nationale et le ministre de l’écologie.

Permettez-moi de citer l’article 7 de cette convention, laquelle précise que la fédération nationale et les fédérations départementales « tiennent à la disposition des écoles et des établissements scolaires qui en font la demande les structures, territoires et personnels dédiés à l’éducation et au développement durable, à la biodiversité et au respect de la nature ».

Vous le savez aussi, mes chers collègues, nous reconnaissons explicitement, depuis plusieurs années, le rôle pédagogique des associations agréées de pêche.

Notre groupe pourrait donc soutenir la disposition qui nous est proposée, à condition qu’une précision, à laquelle nous tenons, soit introduite à l’article 1er.

Vous vous en souvenez certainement, lors de l’examen, en 2008, de la proposition de loi pour l’amélioration et la simplification du droit de la chasse de M. Poniatowski, nous avions eu une longue discussion relative à l’agrément des associations de protection de l’environnement.

Nous nous étions mis d’accord sur le fait que la Fédération nationale des chasseurs et les fédérations départementales des chasseurs étaient éligibles à l’agrément « association de protection de l’environnement ».

Il était important pour notre groupe que cette reconnaissance ne soit pas automatique, pour les raisons évoquées à l’instant par Mme Blandin. Vous aviez bien voulu soutenir notre amendement, qui fait désormais l’objet de l’article L. 141–1 du code de l’environnement.

Il ne suffit pas qu’une association ait pour objectif la gestion de la faune sauvage pour recevoir l’agrément. Il faut remplir d’autres conditions, notamment mener des activités de protection de la nature, de l’eau, des sites et des paysages.

Nous estimons en effet que les fédérations de chasseurs peuvent tout à fait prétendre à cet agrément, dans la mesure où est entreprise la démarche nécessaire pour l’obtenir. Nous vous proposons donc de préciser dans cet article que seules les fédérations ayant reçu l’agrément « association de protection de l’environnement » peuvent mener des actions d’information et d’éducation au développement durable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L’amendement n° 13 est un amendement de repli, comme vient de le dire Mme Blandin elle-même, sur lequel la commission a émis un avis défavorable. Son objet, en effet, est loin d’être innocent !

Madame Blandin, je vous invite à découvrir des choses plus intéressantes que celles que vous rapportez, des endroits où les activités des fédérations sont extraordinaires, qu’il s’agisse de la gestion des espèces ou des espaces. Vous seriez bluffée !

Votre vision me fait penser à celle que présente à loisir la presse, laquelle n’évoque que trains en retard et catastrophes diverses. Ce qui fonctionne bien, en revanche, ne fait jamais l’objet d’un article.

Or, je vous l’assure, de très nombreuses fédérations mènent une action tout à fait satisfaisante. Mon invitation n’est pas un effet de manche : j’aimerais vraiment vous montrer le travail de certaines fédérations.

Quant à l’amendement n° 9 rectifié, je souhaiterais convaincre ses auteurs de le retirer.

Tout d’abord, je tiens à rappeler que 80 fédérations sur 94 mènent des actions d’information et d’éducation. Beaucoup s’impliquent, d’une manière intelligente, dans ce domaine, pour montrer des choses susceptibles d’intéresser un public.

Monsieur Patriat, vous proposez d’encadrer le dispositif et d’interdire aux fédérations qui ne sont pas agréées de mener ces actions d’information et d’éducation. Or, aujourd’hui, en France, seules deux fédérations – la fédération départementale de Seine-et-Marne et la FICEVY, fédération interdépartementale – n’ont pas encore reçu cet agrément ! Mes chers collègues, en tant que législateur, aussi bien en 2005 qu’en 2008, nous avions souhaité que les fédérations de chasse soient agréées. Je pense donc qu’il ne serait pas très adroit de montrer du doigt les deux dernières fédérations dont les demandes d’agrément sont en cours d’instruction.

Par ailleurs, nous en avons parlé en commission, certaines associations écologistes s’emploient à faire en sorte que cet agrément soit retiré aux fédérations. Une telle tentative a été menée contre la fédération départementale de la Manche, en raison d’une incompréhension relative aux motifs pour lesquels le Parlement avait créé cette possibilité d’agrément. À la surprise générale, un premier jugement avait retiré l’agrément à cette fédération départementale. Fort heureusement, cette décision a été annulée en appel.

Selon moi, il convient de ne pas affaiblir les fédérations de chasse, notamment les deux dont la demande d’agrément est en cours d’instruction. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, je me verrais obligé de confirmer les propos que j’ai tenus en commission et d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement de Mme Blandin, pour les raisons qui ont déjà été évoquées.

Sur l’amendement n° 9 rectifié de MM. Carrère, Patriat and Co, je partage complètement l’argumentaire de M. le rapporteur, ce qui me conduit à m’en remettre à la sagesse du Sénat.