M. Jacques Mézard. Effectivement, le problème de la typologie me paraît extrêmement préoccupant.
Je partage les objectifs de M. le rapporteur. Je pense même que nous sommes fondamentalement d’accord sur le but à atteindre. En revanche, les moyens me paraissent relever de la recherche du mouton à cinq pattes !
En effet, l’alinéa 11 de l’article 1er de la proposition de loi tend à distinguer quatre types d’équipements et – je rejoindrai sur ce point notre collègue Philippe Dominati – il y a là une mine de contentieux.
J’ai certainement moins de compétences que M. le rapporteur, comme celui-ci nous le rappelle souvent, mais je rencontre tout comme lui, depuis de longues années, des difficultés sur mon territoire en matière d’urbanisme commercial. Il n’empêche que, si nous nous lançons dans une telle typologie – commerces d’équipement de la personne, commerces de loisirs et culture, etc. –, nous allons inéluctablement faire naître une série de contentieux systématiques, et ce dès l’amont du processus, à savoir dès la définition des typologies.
Par ailleurs, un certain nombre de problèmes resteront non résolus. M. le secrétaire d’État a évoqué ceux qui ont trait au droit européen, mais je pense également aux questions relatives au statut des baux commerciaux, à la spécialisation ou, au contraire, à l’élargissement de l’activité, à la revente.
Donc, nous partageons l’objectif, mais pas les moyens, qui nous apparaissent comme une abondante mine de contentieux.
Je vais avouer, avec encore plus d’humilité – cela conviendra au rapporteur –, que mon amendement de repli me paraît simplement un peu moins pire…
M. Dominique Braye, rapporteur. Bonjour les contentieux dans ce cas !
M. Jacques Mézard. Si nous devons considérer qu’il s’agit d’un concours entre nous, monsieur le rapporteur, je le dis très simplement : je ne suis pas certain que vous n’en serez pas le gagnant !
Tel est en tout cas le sujet de notre préoccupation. Si, à travers cette proposition de loi, nous multiplions encore les contentieux alors que nous souhaitons les diminuer en nombre et les limiter en durée, je pense que nous n’aurons pas atteint notre objectif. Ce n’est pas le bon moyen pour redonner du pouvoir aux collectivités locales.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État, pour présenter l’amendement n° 107.
M. le président. L'amendement n° 94 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Detcheverry, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. - Il peut également exclure certaines activités commerciales dans des zones ou des secteurs délimités.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Je viens d’évoquer le sujet et j’interviendrai éventuellement à nouveau, au moment des explications de vote. Veuillez donc considérer, monsieur le président, que cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par Mmes Terrade et Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Schurch et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Remplacer le nombre :
1000
par le nombre :
300
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement vise à revenir au seuil de 300 mètres carrés, au lieu du seuil de 1 000 mètres carrés introduit par la LME.
Il s’agit, à l’alinéa 4, d’abaisser le seuil pour lequel les autorisations d’implantations commerciales pourront être subordonnées aux conditions fixées par le DAC dans les périphéries. En d’autres termes, seules les implantations d’une surface hors œuvre nette inférieure à 300 mètres carrés ne seraient pas soumises aux conditions figurant dans le DAC du SCOT.
À l’alinéa 5, nous proposons d’interdire dans les zones « résiduelles » – c’est-à-dire en dehors des centralités urbaines et des périphéries sur lesquelles porte le présent texte – les commerces au-delà de 300 mètres carrés de surface hors œuvre nette. En effet, si l’on s’en tient à la rédaction actuelle, les commerces dont la surface hors œuvre nette irait jusqu’à 999 mètres carrés bénéficieraient d’un vide juridique complet dans ces zones résiduelles, qui, du reste, présentent une très grande diversité.
Ne pas modifier le seuil de 1 000 mètres carrés dans ces zones reviendrait à maintenir une brèche dans laquelle certains ne manqueront pas de s’engouffrer.
Par ailleurs, il convient de noter que dans les zones non couvertes par des documents d’aménagement, que ce soit un SCOT comportant un DAC, un PLU comprenant les dispositions de l’article 1er ou encore un DAC communautaire, les permis de construire seront examinés par la CRAC – la commission d’aménagement commercial –, à la demande du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent.
Dès lors, pourquoi ne pas également imposer des contraintes, d’une manière ou d’une autre, aux surfaces implantées dans les zones périphériques ou « résiduelles » couvertes par de tels documents ?
Il ne s’agit même pas d’imposer un quelconque contrôle, mais simplement de faire intégrer aux commerces d’une taille supérieure à 300 mètres carrés des contraintes en termes d’aménagement, de développement durable, de prise en compte des infrastructures de transport, en résumé, le bon sens le plus élémentaire.
Cette question des seuils est d’une acuité toute particulière à Paris puisque la plupart des commerces qui s’y implantent ne dépassent pas les 1 000 mètres carrés, ce qui rend ces dispositions simplement inopérantes, alors même que Paris est sans doute la ville où il convient plus qu’ailleurs de garantir la prise en compte des paramètres que j’ai évoqués, notamment en matière d’infrastructures de transport et de livraison.
Je sais bien que l’on m’opposera les réticences de l’Union européenne à l’idée de revenir au seuil de 300 mètres carrés, mais, au fond, je ne crois pas que l’Union européenne puisse vouloir que nous laissions se développer plus longtemps un urbanisme commercial non encadré au nom de la libre concurrence et, si c’était le cas, il serait de notre devoir, en tant que représentants des territoires, de ne pas accepter une telle chose et d’aller – s’il le faut – devant la Cour de justice de l’Union européenne !
Établir un véritable bilan sur la LME en vue de corriger ses effets pervers en matière d’urbanisme commercial devrait à nos yeux principalement correspondre à une remise en cause de ce seuil des 1 000 mètres carrés en dessous duquel la puissance publique n’a pas son mot à dire sur l’implantation de commerces.
M. le président. L'amendement n° 74 rectifié bis, présenté par M. Merceron, Mmes Gourault et Létard, MM. Deneux et Soulage, Mme Férat, M. Jarlier, Mme Morin-Desailly et M. Amoudry, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
1000 mètres carrés ne sont pas autorisées
par les mots :
300 mètres carrés et inférieures à 1000 mètres carrés ne sont autorisées que dans le cadre de la réhabilitation d'une friche industrielle ou commerciale, dans le respect des prescriptions fixées au III du présent article
La parole est à M. Jean-Claude Merceron.
M. Jean-Claude Merceron. L’article 1er autorise, dans les zones autres que périurbaines, les implantations commerciales jusqu’à 1 000 mètres carrés, qui échappent de surcroît aux prescriptions des DAC. C’est donc la porte ouverte à l’implantation anarchique de boîtes à chaussures de 990 mètres carrés dans les zones interstitielles ou rurales, soit exactement l’inverse de l’objet visé par la loi !
C’est pourquoi, pour limiter les contournements des seuils, il est proposé de n’autoriser les implantations commerciales de plus de 300 mètres carrés et jusqu’à 1 000 mètres carrés dans ces zones que si elles permettent la réhabilitation d’une friche industrielle ou commerciale existante, et à condition que ces implantations respectent les prescriptions du DAC.
M. le président. Les amendements nos 9 et 40 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 9 est présenté par MM. Patriat, Bérit-Débat, Bourquin, Courteau et Daunis, Mme Nicoux, MM. Raoul, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 40 rectifié est présenté par MM. Fouché, Houel, Grignon, B. Fournier, Vasselle, Doublet et Laurent, Mme G. Gautier, M. Revet, Mme Sittler, M. Couderc, Mme Malovry et M. Lefèvre.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 4, 5 et 10, première phrase
Remplacer le nombre :
1 000
par le nombre :
500
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l'amendement n° 9.
M. Claude Bérit-Débat. Vous l’aurez compris, nous ne sommes pas favorables au maintien du seuil de 1 000 mètres carrés. Nous ne souhaitons pas non plus autoriser la mise en place d’une typologie qui pourrait, si le seuil est maintenu, avoir des effets très pervers.
En effet, quel sens aurait un texte qui soumettrait certains équipements à des prescriptions environnementales alors que d’autres n’y seraient pas soumis ? Quel sens aurait un texte qui imposerait aux hypermarchés des obligations en matière de desserte alors que les Lidl, Leader Price, Aldi et autres y échapperaient ?
Dès l’instant où l’on admet que l’existence de règles d’implantation peut concerner les conditions environnementales, des règles architecturales et paysagères, il paraît évident de les rendre applicables aux équipements à partir de 500 mètres carrés.
Je ne reprendrai pas ici notre développement sur la question européenne. En revanche, je demande au Sénat d’être sage : en adoptant la proposition de loi relative aux entrées de ville dans le cadre du texte de simplification du droit, il y a quelques jours, la majorité a confirmé son attachement à la question de l’aménagement des zones commerciales et de leur image. Les boîtes à chaussures, comme cela vient d'ailleurs d’être indiqué, que représentent les bâtiments des hard discounters vous semblent-elles si jolies qu’elles ne devraient pas répondre à des prescriptions environnementales ?
Le Sénat a souscrit aux arguments de notre collègue il y a tout juste quelques jours. Il ne peut pas, à mon avis, se contredire aujourd’hui. C’est pourquoi nous maintenons notre demande d’abaissement du seuil à 500 mètres carrés.
M. le président. La parole est à M. Michel Houel, pour présenter l'amendement n° 40 rectifié.
M. Michel Houel. Il s’agit effectivement, par cet amendement, d’abaisser le seuil de 1 000 mètres carrés à 500 mètres carrés en jouant sur la SHON, la surface hors œuvre nette.
M. le président. L'amendement n° 77 rectifié, présenté par M. Merceron, Mme Gourault et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Remplacer les mots :
et les seuils supérieurs à 1 000 mètres carrés de surface hors œuvre nette définis
par le mot :
définies
La parole est à M. Jean-Claude Merceron.
M. Jean-Claude Merceron. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. À propos de l’amendement n° 73 rectifié, présenté par Jean-Claude Merceron, et l’amendement n° 52, défendu par Isabelle Pasquet, qui ont le même objet, je souligne, comme je l’ai déjà fait en commission, que je ne suis pas favorable au fait de transformer une faculté pour les élus en une obligation. Nous avons été nombreux en commission à dire qu’il ne fallait pas ajouter des obligations aux élus qui ne le souhaitaient pas. Ceux qui veulent user de cette faculté le peuvent. C’est toute la différence entre « peuvent » et « doivent ».
Je préfère la logique de la boîte à outils : donner les moyens d’agir et laisser chacun libre de décider de l’opportunité d’agir ou non et de décider de l’outil le plus adapté à chaque situation particulière, en fonction de la spécificité de son territoire. C’est là une différence entre la commission et les auteurs de ces deux amendements.
Par ailleurs, l’amendement proposé par M. Merceron soulève un autre problème : il fixe un seuil de 1 000 mètres carrés alors que le texte actuel prévoit que ce seuil est « au moins de 1 000 mètres carrés ». Cet amendement prévoit donc un seuil unique partout, alors que, selon le territoire et le type de commerce considéré, le seuil pertinent peut être plus élevé que 1 000 mètres carrés. Les élus peuvent très bien décider que, par exemple, s’agissant de l’implantation d’une surface de bricolage dans une zone de développement commercial périphérique, les prescriptions d’urbanisme ne s’appliqueront pas en dessous de 1 500 mètres carrés ou de 2 000 mètres carrés.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 73 rectifié et 52.
L’amendement n° 87 rectifié bis est rédactionnel. M. Merceron propose de parler de « prescriptions » plutôt que de « conditions ». Là encore, je préfère la logique de la boîte à outils et proposer aux élus un certain nombre de moyens. J’aurais pu, monsieur Merceron, accepter votre amendement mais vous ne l’avez présenté qu’à un seul endroit du texte, en omettant de faire les coordinations nécessaires dans le reste du projet de loi.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 87 rectifié bis.
J’en viens à l'amendement n° 96 rectifié, présenté par M. Dominati, aux amendements nos 109, 108 et 107 du Gouvernement, ainsi qu’aux amendements nos 93 rectifié bis et 94 rectifié bis, défendus par M. Mézard, qui, tous, s’opposent à la typologie définie au IV de l’article 1er, même si, pour certains d’entre ceux, c’est pour des raisons exactement opposées.
Que notre collègue Philippe Dominati s’oppose à cette typologie ne m’étonne pas, compte tenu de sa position constante en faveur du libéralisme et de la liberté totale des acteurs économiques. Il est donc tout à fait en cohérence avec ce qu’il défend depuis toujours sur ces travées, souvent minoritaire et bien seul. Il a au moins le mérite d’être fidèle à une logique d’action.
Vous nous avez parlé des friches, monsieur le secrétaire d’État. Les 240 enseignes principales du commerce, au nom desquelles je m’exprime, disent que la situation actuelle ne peut plus durer. Les 240 enseignes adhérentes à Procos représentent quand même – il faut le savoir – 37 000 points de vente, 460 000 emplois et plus de 63 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Les surfaces commerciales ne cessent d’augmenter alors même que les dépenses des ménages stagnent. Des enseignes comme Bricorama – dont le chiffre d’affaires depuis dix ans est étale – multiplient pourtant le nombre de leurs unités commerciales pour ne pas se laisser distancer par leurs concurrents, qui sont engagés dans le même mouvement. Dans cette course en avant, certaines unités, monsieur le secrétaire d’État, commencent à ne plus être viables et c’est ainsi qu’apparaissent les friches, qui ne sont pas une menace mais bien une réalité. Les friches apparaissent à cause de ce qui se passe actuellement et c’est pourquoi nous devons modifier cette situation.
Par ailleurs, contrairement à ce que nous a dit M. Berardis, en cas de cession de bail, aucun permis de construire n’est requis. Il ne l’est que si l’on modifie un élément. Une simple déclaration préalable est suffisante, ce qui est tout à fait différent. Un permis d’aménager peut parfois être nécessaire en fonction des situations.
Établir une typologie, ce n’est en aucun cas intégrer des éléments économiques et commerciaux. La typologie repose – et M. le secrétaire d’État l’a démontré lors de son intervention – sur l’idée qu’en fonction de sa destination un commerce a certaines répercussions territoriales. Comme vous l’avez dit très justement tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, un commerce alimentaire ou une surface de loisirs de 1 500 mètres carrés implantés en centre-ville créent, de la même manière, de l’activité. Ce sont bien les conséquences territoriales sur l’aménagement urbain et les flux de clients qui sont pris en compte et qui sont liés – il faut le reconnaître – à l’activité de ces commerces. C’est une vraie dynamique que nous prenons en compte.
La typologie, mes chers collègues, est évidemment l’un des points centraux de nos débats. Je rappelle que cette disposition a été adoptée à l’unanimité par la commission. Il ne sert donc absolument à rien de vouloir commencer à réguler, parce que c’est le seul point de régulation.
M. Mézard, qui est opposé à la typologie, nous propose dans son amendement n° 94 rectifié bis d’exclure « certaines activités commerciales » : c’est, compte tenu de l’imprécision de cette expression, ouvrir la porte et même dérouler le tapis rouge à tous les contentieux ! Vous imaginez, en termes de droit, ce que cela peut entraîner…
M. Collin, qui s’inscrit dans la même logique que M. Mézard, puisqu’il est opposé à la typologie, nous proposera d'ailleurs, un peu plus loin, dans l'amendement n° 91 rectifié bis, d’interdire certaines enseignes, ce qui est totalement illégal. C’est comme si vous disiez : « Je ne veux pas M. Dupond mais je veux M. Durand » ! C’est aller dans un degré de précision qui est totalement contraire au droit.
C’est donc pour répondre aux préoccupations exprimées par nos collègues Jacques Mézard et Yvon Collin que nous mettons en place une typologie.
Monsieur Dominati, soyons très clairs : dans les codes NAF– nomenclature d’activités françaises –, les activités sont bien répertoriées, il n’y aura donc pas de contentieux. Et même si Ikea vend du saumon fumé ou quelques produits nordiques, c’est bien un magasin de meubles, parce que c’est l’activité principale qui est prise en compte. Les choses sont ainsi présentées dans les codes NAF, et elles sont très nettes. Sont ainsi bien définis les commerces d’équipement de la personne, les commerces d’équipement de la maison et les commerces de loisirs et de culture. L’alimentaire était un peu moins bien défini. C’est la raison pour laquelle nous avons ajouté une précision au texte de manière que tout commerce à vocation alimentaire soit bien considéré comme tel.
Cette typologie est-elle contraire à la liberté de commerce comme le prétend le Gouvernement ?
Cette critique me paraît reposer sur une méprise totale. Juridiquement, le seul critère pour décider si une limitation à la liberté d’établissement est licite est celui – monsieur le secrétaire d’État, je le répète une fois de plus – de la proportionnalité.
Or la typologie permet éventuellement d’interdire à un commerce de s’installer à tel endroit précis, en l’occurrence un secteur périphérique, mais non de lui refuser l’installation dans la zone de chalandise.
En effet, l’utilisation de la typologie est purement facultative pour le SCOT, ce n’est nullement une obligation.
La liberté d’implantation des commerces peut être bridée uniquement dans certaines zones géographiques bien circonscrites – les secteurs périphériques délimités par le DAC – et ne peut l’être en aucun cas dans les centralités urbaines.
Les contraintes imposées concernent uniquement les ensembles commerciaux d’au moins 1 000 mètres carrés, la typologie ne s’appliquant pas en deçà de ce seuil.
Enfin, le renforcement de la régulation en périphérie est compensé par une liberté totale d’installation dans les centralités urbaines.
Le Gouvernement s’inquiète aussi des modalités concrètes de la mise en œuvre de cette disposition. C’est une crainte constante de tous les gouvernements quels qu’ils soient, lorsque certaines dispositions sont prises, que les élus ne les détournent de leur objectif initial d’une manière qui ne serait pas souhaitable.
Mais, monsieur le ministre, le texte aura plusieurs garde-fous pour empêcher les détournements ou les erreurs de conception des DAC : les commerçants seront associés à l’élaboration des documents d’urbanisme ; la possibilité de consulter la commission régionale d’aménagement commercial pendant l’élaboration du DAC a été prévue, à la suite de l’intervention de notre collègue Gérard Cornu, qui souhaitait en faire un outil pédagogique à l’intention des élus ; le préfet, avant l’entrée en vigueur du SCOT, pourra demander la modification des prescriptions contraires à la liberté de commerce ; des mécanismes de modification simplifiée des DAC ont été institués pour pouvoir rectifier les choses en cas de besoin ; enfin, bien entendu le juge administratif exercera son contrôle en cas de recours.
Je le répète, notre dispositif est conforme au droit européen. Michel Piron et moi-même nous sommes rendus à Bruxelles, avec le président Jean-Paul Emorine, pour y rencontrer Guido Berardis, de la direction générale Marché intérieur de la Commission européenne. Il nous a confirmé que notre typologie était exemplaire et qu’elle pourrait servir de modèle à d’autres pays européens.
Mes chers collègues, pour ne rien vous cacher, les représentants du Gouvernement avaient manifestement rencontré avant nous les personnes que nous avons auditionnées à Bruxelles. Ils leur avaient exposé leur interprétation du texte, qui est différente de la nôtre puisqu’ils ne veulent pas de la typologie.
Je voudrais vous citer quelques extraits de la lettre que M. Berardis nous a envoyée à la suite de notre visite : « L’indication dans les documents du type de commerces pouvant être implanté dans une zone donnée serait le seul moyen d’éviter les transferts indésirables du point de vue de l’aménagement du territoire ». C’est la position que nous avons défendue. M. Berardis précise : « Il ne s’agirait en aucun cas de déterminer le type d’enseigne ou de format pouvant s’implanter dans une zone ou d’organiser précisément des activités commerciales » : telle est l’interprétation du texte qui leur avait été donnée, mais qui n’est évidemment pas la nôtre. Et il ajoute : « Nous avons accueilli favorablement cette interprétation du texte […] nous avons donc pris note des explications et clarifications apportées qui […] se sont révélées utiles pour comprendre les raisons à l’origine des dispositions projetées. »
Pour conclure, il indique que « les orientations qui semblent avoir été retenues dans le cadre de la réforme sur l’urbanisme commercial, en fondant désormais l’urbanisme commercial sur des considérations d’aménagement du territoire sont positives et pourraient servir d’exemple de bonne pratique dans le cadre d’éventuelles réflexions sur la question de l’urbanisme commercial. »
Je constate que M. le secrétaire d'État se place dans une logique de critères économiques, alors que nous sommes, pour notre part, dans une autre logique, qui repose sur l’aménagement du territoire.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Je lirai d’autres paragraphes de la lettre qui disent exactement l’inverse !
M. Dominique Braye, rapporteur. La Commission européenne a peut-être souhaité faire plaisir au Gouvernement français, qui avait été excessivement actif auprès d’elle, mais, après nous avoir rencontrés, elle s’est rendu compte que notre interprétation était différente.
La typologie est le seul moyen d’encadrer un tant soit peu les choses ! Si nous ne l’adoptons pas, aucune régulation ne sera possible, car les seuils ne le permettent pas. Ils ont été appliqués pendant plus de trente ans, jusqu’en 2008, et n’ont pas empêché l’explosion des surfaces commerciales qui a eu lieu bien avant cette date, comme nous l’a rappelé M. le secrétaire d'État. (M. André Reichardt applaudit.)
Mes chers collègues, je me suis suffisamment penché sur la question pour vous assurer que, très sincèrement, il n’y a pas d’autre moyen que d’adopter la typologie si l’on veut atteindre l’objectif de régulation que vous souhaitez. Sur ce point, je poursuis le même objectif que M. Jacques Mézard.
Résumons : la commission est défavorable aux amendements nos 96 rectifié de M. Philippe Dominati, 109, 108 et 107 du Gouvernement, 93 rectifié bis de M. Mézard.
Quant à l’amendement n° 94 rectifié bis, il prévoit un dispositif moins précis et juridiquement moins sûr que celui qui figure dans le texte. J’invite donc son auteur à le retirer.
M. Jacques Mézard. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 94 rectifié bis est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. L'amendement n° 77 rectifié de M. Jean-Claude Merceron est un amendement de coordination avec l'amendement n° 73 rectifié, que nous avons rejeté. L’avis est donc défavorable.
Enfin, sur les amendements nos 51, 74 rectifié bis, 9, 40 rectifié, relatifs au problème de l’abaissement des seuils, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Tout comme la commission, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 73 rectifié, 52 et 87 rectifié bis.
Je voudrais maintenant ajouter quelques commentaires aux explications données par M. le rapporteur sur les amendements du Gouvernement.
Monsieur Braye, vous venez de nous dire que, en fonction des types de commerces implantés, les flux de clientèle seront différents, ce qui aura des conséquences urbanistiques. Vous avez tout à fait raison, mais alors écrivez-le dans le texte ! Au lieu de définir la typologie des commerces en fonction de leur nature économique, fixez cette typologie en fonction des flux qu’ils engendrent, par exemple de clientèle. Car ce n’est pas du tout la même chose que de faire un choix économique en fonction d’une typologie de commerces ou en fonction de considérations urbanistiques objectives.
Par ailleurs, la typologie pose d’autres problèmes. Quid des commerces qui ne sont pas couverts par les quatre catégories ? Ils ne pourront s’implanter nulle part ! Prenons l’exemple des concessionnaires automobiles, qui sont présents dans toutes les villes : ils ne figurent dans aucune des catégories. Quid des commerces mixtes ? Et je ne parle pas d’Ikea, qui ne vend que très marginalement du saumon fumé, je fais allusion aux commerces véritablement mixtes qui peuvent être classés dans plusieurs catégories. Qu’en faites-vous ? Voilà à quoi conduit la typologie ! Il va y avoir une liste de commerces ne relevant d’aucune des quatre catégories, qui ne pourront être implantés nulle part.
S’agissant des successions, le rapporteur nous dit qu’un permis de construire n’est pas nécessaire, qu’une déclaration préalable est suffisante. Certes, mais un document d’urbanisme sera nécessaire, qui pourra donc recevoir un avis négatif de la collectivité locale. Ce n’est pas la cession en tant que telle du commerce qui implique la demande d’un permis de construire, ce sont les travaux, qui, vous le savez bien, sont la plupart du temps nécessaires après un achat. Il faut donc soit un permis de construire soit une déclaration préalable.
M. Dominique Braye, rapporteur. Ou une autorisation d’aménager.