M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l'article.
M. Richard Yung. L’article 33 traite de l’assignation à résidence, dont il modifie en fait la conception, en l’adaptant.
Première observation, cet article vise, en particulier, à couvrir le cas où une personne ayant fait l’objet d’une OQTF se voit privée du délai de départ volontaire, mesure qui, nous le répéterons au fil des amendements que nous allons présenter, est injuste.
En effet, cette mesure précarise les personnes concernées et elle les place, en termes de temps ou, plus exactement, de manque de temps, dans des circonstances telles qu’il ne leur est pas possible de rédiger leur dossier dans des conditions convenables.
Deuxième observation, les formes alternatives à la rétention ne sont pas prises en considération, ce qui est contraire à l’esprit de la directive.
Nous déposerons un amendement visant à permettre à la personne assignée à résidence d’obtenir une autorisation provisoire de travail, ce qui, à notre avis, ne peut qu’être positif, tant pour elle que pour la société.
Troisième observation enfin, avec ce texte, les mineurs non accompagnés risquent de se trouver, non pas systématiquement peut-être, mais beaucoup plus souvent qu’à l’heure actuelle, placés en assignation à résidence avec leurs parents.
Je comprends la nécessité de ne pas séparer les enfants de leurs parents, mais nous n’avons pas la même approche du problème : nous considérons que les formes alternatives à la rétention valent mieux pour les parents et leurs enfants. Au fond, votre solution revient en effet à mettre les enfants en rétention,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Hélas !
M. Richard Yung. … même si juridiquement ils ne le sont pas.
Par ailleurs, nous aurons l’occasion de dire ce que nous pensons des dispositions relatives au placement sous surveillance électronique mobile, ou PSEM, c’est-à-dire au bracelet électronique, qui ont été introduites, par amendement de M. Marini, dans cet article 33.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 59 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 175 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié.
M. Jacques Mézard. L’article 33 tend à définir un nouveau régime de l’assignation à résidence, laquelle sera prononcée par l’autorité administrative, et non par le juge des libertés et de la détention, à la différence de l’assignation à résidence judiciaire.
Nous ne sommes naturellement pas opposés à tout ce qui peut constituer une mesure alternative à la rétention, et sur ce point l’assignation à résidence peut être une solution intéressante.
Nous sommes en revanche plus que réservés sur l’interprétation adoptée dans cet article qui ne prend pas en compte le report de l’éloignement dans les situations visées par l’article 9 de la directive, alors que ce report garantit précisément la protection des réfugiés et l’efficacité des recours contre les mesures d’éloignement.
La directive, et cela mérite d’être rappelé, n’impose pas d’assigner à résidence les personnes dont l’éloignement est reporté ; elle n’en fait qu’une faculté parmi d’autres mesures qui ne sont pas ici visées.
Parallèlement, le régime défini nous paraît disproportionné : la faculté d’imposer l’assignation à résidence à des demandeurs d’asile ou à des réfugiés statutaires reconnus par d’autres pays ou aux étrangers qui décident d’exercer un recours contre l’obligation de quitter le territoire français peut être interprétée comme une sanction contre l’exercice d’un droit, ce qui n’est pas justifiable.
S’agissant du placement sous surveillance électronique mobile, il faut rappeler – nous reviendrons sur ce point à l’occasion de l’examen d’amendements ultérieurs – que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 8 décembre 2005, fixe, en l’espèce, un cadre très précis imposant notamment une adéquation avec l’objectif visé, surtout, une décision du juge, ainsi que le recueil du consentement de l’intéressé. Autant de points qui sont absents de l’article 33.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est tout de même bizarre !
M. Jacques Mézard. Nous examinerons tout à l’heure un amendement, que nous avons déposé et qui, me semble-t-il, a recueilli l’avis favorable de la commission, relatif au consentement de la personne pour toute mise sous bracelet électronique. Mais demeure la question de l’absence d’autorisation du juge. Au niveau des principes, il s’agit d’une dérive tout à fait inacceptable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 175.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 175, 176 et 177.
Avant tout, je souhaite faire une remarque préliminaire, qui, d’ailleurs, pourrait s’appliquer à la discussion que nous avons eue précédemment.
Une chose est de revenir sur le CESEDA, ce que vous ne voulez pas, contrairement à nous. Pour autant, cela ne signifie pas ne pas avoir de politique d’immigration. Le problème est, en réalité, de définir cette politique, mais il n’est plus l’heure d’aborder ce débat. Une autre chose est de dénier aux étrangers les droits élémentaires dont bénéficie toute personne susceptible d’être privée de liberté. Que la situation soit claire ! Le champ est différent.
Monsieur le ministre, vous évoquez sans cesse le problème des étrangers qui viennent en France, les directives européennes, le CESEDA, votre politique d’immigration, etc. Il existe une autre question sur laquelle on ne peut pas transiger : toute personne humaine a des droits élémentaires qui doivent être respectés.
L’article 33 définit le nouveau régime de l’assignation à résidence et procède à des modifications de l’actuel livre V du CESEDA.
D’une part, il prévoit que la durée de cette nouvelle assignation à résidence, prononcée par l’autorité administrative, peut être de six mois renouvelables, laps de temps que nous trouvons extraordinairement long. Pourraient, en outre, tomber sous le coup de cette mesure les étrangers auxquels un délai de départ volontaire n’a pas été accordé. Ce sont les premiers points sur lesquels nous sommes en désaccord.
D’autre part, ce même article étend la mesure pénale que constitue la surveillance électronique aux personnes qui font l’objet d’une assignation à résidence. Ce dispositif vise normalement et expressément les personnes mises en examen ou condamnées par l’autorité judiciaire et qui peuvent bénéficier d’un aménagement de peine.
Le présent projet de loi prévoit que cette mesure puisse être prise par l’autorité administrative les cinq premiers jours, ôtant ainsi la garantie du juge des libertés et de la détention, alors que dans le cadre de la procédure pénale seule l’autorité judiciaire est compétente pour décider d’une telle mesure.
En effet, le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention est compétent lorsqu’il s’agit d’une mesure alternative à la détention pendant le contrôle judiciaire. Vous connaissez cela par cœur, mes chers collègues.
Ce dispositif reflète donc parfaitement la volonté du Gouvernement de criminaliser la présence étrangère. Les personnes étrangères se trouvant en rétention ne sont pas poursuivies ou condamnées pour un délit ou un crime !
Il nous semble inconcevable que des personnes étrangères, parents d’enfants mineurs, en attente de l’exécution d’une décision administrative de reconduite fassent l’objet de mesures relevant du champ pénal.
Enfin, l’article 33 prévoit que les forces de police ou de gendarmerie aient la charge du suivi et du contrôle du bracelet électronique durant l’assignation à résidence.
Or les forces de police ont déjà pu exprimer leur mécontentement par rapport à la dérive de leurs missions ; elles devront encore remplir une nouvelle tâche bien éloignée de leur fonction première qui est le maintien de l’ordre public et la recherche des infractions.
Par ailleurs, il est aberrant que l’ordre administratif – on comprend que les magistrats administratifs se mettent massivement en grève demain – dispose d’un pouvoir appartenant à l’ordre judiciaire, seul garant des libertés individuelles.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 33.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces amendements tendent à supprimer l’article 33, alors que celui-ci apporte plusieurs modifications importantes au droit positif – cela a été rappelé tout à l’heure –, comme la possibilité pour le préfet de prononcer une assignation à résidence plutôt qu’un placement en rétention.
Il est bien sûr nécessaire de conserver cet article. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 59 rectifié et 175.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Même avis que la commission sur les amendements identiques nos 59 rectifié et 175. Je rappelle que l’article 33 organise un régime nouveau d’assignation à résidence qui est en parfaite conformité avec la directive Retour.
Par le biais de l’amendement n° 176, vous proposez, madame Borvo Cohen-Seat, de supprimer toute référence à l’obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire. La mesure qui vous est soumise correspond également à la transposition de la directive Retour. Je vous rappelle qu’une telle référence a déjà été retenue à l’article 23. Il est donc logique que le Gouvernement émette un avis défavorable sur cet amendement.
Quant à la volonté de supprimer la possibilité de prononcer une assignation à résidence avec placement sous surveillance électronique, vous savez, madame Borvo Cohen-Seat, qu’une telle assignation a en fait pour objet de limiter autant que possible la rétention des familles accompagnées d’enfants mineurs. Je vous rappelle que ces derniers, hormis les cas où l’objectif poursuivi est de ne pas les séparer de leurs parents, ne sont pas placés en rétention. Telle est la réalité.
Pour une famille, l’assignation à résidence peut être préférable à la rétention, j’en suis convaincu. Je précise que le placement sous surveillance électronique ne concernerait bien sûr que les adultes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais pas sans décision du juge et sans consentement de la personne concernée !
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je comprends bien que l’assignation à résidence soit préférable au placement au centre de rétention. Cependant, je suis particulièrement gênée par la mise sous bracelet électronique. En effet, jusqu’à aujourd’hui, le placement sous surveillance électronique est bel et bien une sanction : il résulte d’une condamnation prononcée par un juge. Or, en l’occurrence, la sanction devient, en quelque sorte, une mesure de sûreté imposée sans décision du juge. Une telle disposition va beaucoup trop loin et n’est pas acceptable dans notre droit.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre. Madame Boumediene-Thiery, vous êtes opposée à la rétention, au bracelet électronique, à l’assignation à résidence. Bref, vous êtes contre tout ! Nous avons très bien compris votre position. Par conséquent, ne relancez pas le débat ! Ainsi, nous gagnerons tous du temps !
Mme Alima Boumediene-Thiery. Et le droit de s’exprimer, monsieur le ministre ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous ne pouvez pas nous empêcher de parler !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 59 rectifié et 175.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 11, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Alinéas 11 à 19
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je vais encore énerver M. le ministre…
Mme Alima Boumediene-Thiery. Un parlementaire a le droit de s’exprimer et, pour ma part, j’y recourrai sans cesse. Il faudra vous y faire !
L’amendement n° 11 tend à supprimer les alinéas de l’article 33 relatifs au durcissement du régime de l’assignation à résidence opéré par le présent projet de loi.
L’assignation à résidence prévue à cet article est d’application plus restrictive que celle qui est visée par l’article L. 561-2 du CESEDA.
L’étranger aurait désormais la charge de démontrer qu’il ne peut pas quitter le territoire, ou qu’il ne peut pas retourner dans son pays pendant une durée maximale d’un an – six mois renouvelables une fois. Il s’agit là d’une restriction à la liberté fondamentale d’aller et venir qui est disproportionnée dans le temps.
De plus, la motivation de cet article est critiquable.
La directive Retour impose bien le report de l’éloignement dans les situations considérées à son article 9 paragraphe 1. Le report garantit la protection des réfugiés et l’efficacité des recours contre les mesures d’éloignement. Mais la directive n’impose absolument pas aux États d’assigner à résidence les personnes dont l’éloignement est reporté. Elle ne prévoit qu’une faculté.
Dans la panoplie des mesures que les États peuvent mettre en place afin d’éviter les risques de fuite, la France aurait donc pu choisir une autre disposition. Considérer l’assignation à résidence comme la seule mesure alternative en cas de report de l’éloignement est excessif.
De plus, la faculté d’imposer l’assignation à résidence à des demandeurs d’asile ou à des réfugiés statutaires reconnus par d’autres pays que la France, ou encore aux étrangers qui décident d’exercer un recours contre l’obligation de quitter le territoire français peut être interprétée comme une mesure disproportionnée sanctionnant l’exercice d’un droit et devrait donc être interdite, d’autant qu’elle remet en cause les droits des réfugiés et demandeurs d’asile.
M. le président. L'amendement n° 491, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Supprimer les mots :
, d'interdiction de retour sur le territoire français
II. - Alinéa 15
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Hier soir, nous avons longuement expliqué notre opposition au bannissement. Aussi, par cohérence, nous proposons de supprimer cette référence, puisque l’article 33 vise l’« interdiction de retour sur le territoire français ».
Hier soir encore, M. Richert, présent au banc du Gouvernement, m’a objecté que nous parlions de bannissement alors que ce mot était banni du présent projet de loi. Il a estimé que j’étais de mauvaise foi parce que j’évoquais un terme qui ne figure pas dans le texte en question. Monsieur le ministre, je ne ferai pas un développement sur le mot et la chose, car il est des manières de choisir des formulations plus lyophilisées, euphémistiques mais qui ne changent rien. Lorsque vous payez vos impôts, même si l’on vous dit que ce sont des contributions, vous comprenez bien que ce sont en réalité des impôts. Même si d’aucuns estiment qu’il ne s’agit « que » d’une interdiction de revenir sur le territoire français, nous estimons, pour notre part, qu’il s’agit d’un bannissement, contraire aux traditions de notre République. C’est pourquoi nous avons déposé l’amendement n° 491.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 176 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 385 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Si le délai de départ volontaire accordé à l'étranger est expiré ;
L’amendement n° 176 a déjà été défendu.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 385.
M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit, là encore, d’un amendement de cohérence. Vous savez que nous sommes opposés à la notion même de privation d’un délai de départ volontaire. Nous considérons que les droits les plus élémentaires, ne serait-ce que celui de solliciter une défense, supposent l’absence d’une telle privation. Nous sommes donc pleinement cohérents en vous soumettant le présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 386, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'étranger qui a sollicité le dispositif d'aide au retour après avoir été placé en rétention, peut, dans les conditions fixées par le présent article, être assigné à résidence.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, votre gouvernement, comme les précédents, fait beaucoup de propagande pour l’aide au retour. Si quelqu’un placé en centre de rétention choisit de bénéficier de cette aide, vous pourriez peut-être le dispenser de séjourner dans une telle structure.
Tout comme M. le rapporteur, vous connaissez les statistiques. Je veux tout de même vous rappeler que, en 2008, 75 000 étrangers ont connu en France l’expérience d’un enfermement administratif, c’est-à-dire d’un placement en centre de rétention. Alors que la presse aujourd'hui, à la suite de l’ensemble des médias hier, fait état de certains séjours, il est sûr que ces 75 000 étrangers, qui ont eu l’occasion de se faire une certaine idée de la France, ont trouvé un peu moins de palmiers et de sable chaud dans les centres de rétention que dans les villégiatures qui défraient la chronique. (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme Colette Giudicelli. Parlez aussi des voyages de Mitterrand en Égypte ! (Exclamations sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes un certain nombre à visiter régulièrement des centres de rétention.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Des prisons !
M. Jean-Pierre Sueur. Et, même si les personnels, monsieur le ministre, font du travail et s’efforcent de considérer les êtres humains du mieux qu’ils peuvent, le Mesnil-Amelot, à côté de l’aéroport, dans ces conditions austères, donne une vision peu flatteuse de notre pays à toutes les personnes qui y sont retenues et pour lesquelles la France était le pays des libertés et d’une certaine qualité de vie.
M. Richard Yung. Des barbelés !
M. Jean-Pierre Sueur. Puisque nous pouvons leur épargner cela, nous proposons qu’on le leur épargne.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 64 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 179 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'assignation à résidence est assortie d'une autorisation de travail.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 64 rectifié.
M. Jacques Mézard. En l’occurrence, il est question non pas de villégiatures, mais d’autorisation de travail.
L’étranger qui serait assigné à résidence doit naturellement pouvoir continuer à vivre dans des conditions décentes, dans l’attente de son éloignement. Puisqu’il ne peut pas sortir de chez lui, il ne peut donc pas travailler et subvenir à ses besoins. Il ne peut pas davantage avoir accès aux dispositifs d’aide sociale.
Par cet amendement, nous souhaitons remédier à cette situation en accordant une autorisation de travail, qui revient, de fait, à ouvrir droit aux prestations sociales.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 179.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Sans autorisation de travail, on ne peut subvenir à ses besoins de façon régulière, on n’a accès ni à l’aide sociale, ni aux dispositifs d’accueil, ni au logement. Pourtant, les étrangers qui bénéficient de l’assignation à résidence ont vocation, de fait, à se maintenir sur le territoire français de façon régulière, sur du court, du moyen ou du long terme. En conséquence, ils doivent pouvoir y vivre.
En vertu des articles L. 523–4 et L. 523–5 du CESEDA, les mesures d'assignation à résidence des étrangers faisant l'objet de mesures d'expulsion sont assorties d'une autorisation de travail. Dans un souci de protection et de cohérence par rapport à d'autres étrangers assignés à résidence, les personnes visées à l'article 33 qui feront l'objet de ces mesures d'assignation doivent se voir délivrer une autorisation de travail.
M. le président. L'amendement n° 387, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La décision d'assignation à résidence est assortie d'une autorisation provisoire de travail.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter cet amendement.
M. Jean-Pierre Sueur. J’indique à notre collègue qui a souhaité m’interrompre tout à l’heure que, si elle souhaite développer ses arguments, je ne verrais aucun inconvénient à ce qu’elle m’interrompît (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.), si M. le président l’y autorise.
M. le président. Mon cher collègue, je vous ai donné la parole pour présenter l’amendement n° 387, je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir le faire.
M. Gérard César. Très bien !
M. Jean-Pierre Sueur. Ayant cru comprendre ce que disait notre collègue Colette Giudicelli, je lui précise qu’il n’est pas nécessaire de faire le bilan de l’ensemble des déplacements des autorités de notre pays, dans des conditions que l’on connaît depuis Louis XIV et même avant, pour répondre à ce que j’ai dit.
Il y a tout simplement des questions de décence utiles, et il n’est pas très facile d’être dans un centre de rétention. Ma chère collègue, je pense que vous visitez, comme moi-même, des centres de rétention : ce n’est pas forcément la villégiature la plus agréable.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont des prisons !
M. Jean-Pierre Sueur. Par conséquent, si quelqu’un demande à bénéficier de l’aide au retour, il serait logique, de la part de la République, de le dispenser de séjourner dans ce type de centre.
Cela devrait vous rassurer, chère collègue : ainsi que j’ai cru le comprendre, ce midi, le Président de la République a décidé qu’aucun ministre ne pourrait plus partir à l’étranger – j’ai pensé à vous, monsieur le ministre (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.) – sans solliciter une autorisation de Matignon et de l’Élysée. (Mme Bernadette Dupont et M. Gérard César s’exclament.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. Hortefeux ne part pas à l’étranger, il va en Auvergne !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes rassurés : depuis trois ans, nous attendions la République irréprochable, elle va maintenant arriver !
Mme Bernadette Dupont. Oh là là !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous devrez, monsieur le ministre, aller en vacances dans nos régions. Un Auvergnat comme vous y sera très heureux et nous aussi !
Monsieur le président, je vais répondre à votre attente.
M. Gérard César. Quand même !
M. le président. Il vous reste une minute et dix secondes !
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument, monsieur le président ! Notre amendement se défend de lui-même. (Sourires.) Monsieur le ministre, si vous prenez la décision d’assigner une personne à résidence pendant six mois et davantage et que cette personne n’a pas le droit de travailler, une question toute simple se pose : comment vit-elle ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Eh oui ! C’est absurde !
M. Jean-Pierre Sueur. Dans le cas de l’assignation à résidence, l’autorisation provisoire de travail serait de bon sens.
M. le président. L'amendement n° 390, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Si l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est parent d'au moins un enfant mineur résident en France et qu'il justifie contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, l'autorité administrative autorise l'étranger à se maintenir provisoirement sur le territoire en l'assignant à résidence.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, je fais des efforts de concision mais cet amendement est tellement évident que je me demande s’il est utile de le défendre.
Comme vous le savez, l'article 17 de la directive Retour dispose que « les mineurs non accompagnés et les familles comportant des mineurs ne sont placés en rétention qu’en dernier ressort et pour la période appropriée la plus brève possible ».
Par cet amendement, nous proposons de systématiser l'assignation à résidence pour les parents d'enfants qui se verraient notifier une mesure d'éloignement.
En effet, celles et ceux qui visitent les centres de rétention ne sont pas particulièrement fiers ni satisfaits, en-dehors de toute considération politique, d’y voir de jeunes enfants. L’assignation à résidence est une mesure alternative dans l’intérêt des familles et des jeunes enfants.