M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis tout à fait d’accord pour qu’un rapport soit établi et remis au Parlement le 1er octobre 2011. Un conseiller général des établissements de santé en sera chargé. Ce travail portera sur des établissements cibles, à partir des informations recueillies par les ARS ; d’où l’avantage, d’ailleurs, de disposer de ces structures.
Nous allons fixer un certain nombre de critères relatifs à la fluidité du parcours de soins et à la prise en charge des patients en termes qualitatifs et quantitatifs.
Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 492 rectifié dans la mesure où ce dernier ne vise qu’à l’établissement d’un rapport ponctuel et ne prévoit pas de l’inscrire dans le code de la sécurité sociale. Cela me conduit à demander le retrait de l’amendement n° 333.
M. Jacky Le Menn. Nous le retirons, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 333 est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l’amendement n° 492 rectifié.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je voterai cet amendement parce qu’il faut que nous soyons informés de ce qui se passe sur le terrain.
Cependant, en allant sur le terrain, précisément, ainsi que le recommandait à l’instant le rapporteur général, je constate que les directeurs généraux des ARS sont surchargés. À l’heure actuelle, ils éprouvent des difficultés à prendre contact avec les élus et avec tous les organismes dont ils sont chargés de superviser le fonctionnement. Tous les matins, ils sont assaillis de demandes de renseignements, venant de tous les ministères.
Je crains donc que, en ajoutant de nouveaux rapports portant encore sur d’autres éléments, on ne fasse qu’accabler davantage ces malheureux directeurs des ARS.
Aujourd'hui, ils sont déjà chargés – et c’est à mon avis une tâche essentielle – de préparer les schémas régionaux et de mettre en place les communautés hospitalières de territoire, les CHT, qui commencent à fonctionner dans un certain nombre de régions.
Madame la ministre, je vous en conjure, ne les surchargez pas de tâches : ils en ont déjà de multiples et ils doivent gérer des administrations lourdes. Si nous ajoutons à leurs travaux de nouveaux rapports, ils ne parviendront pas à remplir les responsabilités de base pour lesquelles ils ont été nommés, à savoir organiser et développer de manière convenable les soins de proximité, en surveillant leur qualité.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 37, modifié.
(L'article 37 est adopté.)
Article 38
I. – À la première phrase du premier alinéa du I de l’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 28 décembre 2003), la date : « 1er juillet 2011 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2013 ».
II (nouveau). – Le dernier alinéa du II de l’article 54 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Un bilan de cette expérimentation est transmis pour information au Parlement avant le 15 septembre de chaque année. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 313 rectifié, présenté par MM. Barbier et Detcheverry et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer l'année :
2013
par l'année :
2012
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Il s’agit, là encore, d’un problème récurrent puisque nous le retrouvons chaque année depuis qu’a été adopté, en 2003, le principe de la procédure de facturation individuelle des hôpitaux. Il nous est une fois de plus demandé de repousser l’échéance de la mise en œuvre définitive de cette procédure : au 1er janvier 2013, au lieu du 1er janvier 2011.
Je comprends bien que, pour certains établissements, cela présente des difficultés techniques insurmontables. Je pense néanmoins que l’on pourrait avancer ne serait-ce que d’un an l’entrée en application de la facturation individuelle, c’est-à-dire la porter au 1er janvier 2012.
M. le président. L'amendement n° 73, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la date :
1er janvier 2013
par la date :
1er juillet 2012
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 313 rectifié.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous considérons que le Gouvernement pourrait « booster » la mise en place de la facturation individuelle de manière à ce que celle-ci soit effective non pas au 1er janvier 2013, mais au 1er juillet 2012.
On l’a compris, l’amendement n° 73 relève du même esprit que l’amendement n° 313 rectifié, que je demande donc à notre collègue Gilbert Barbier de bien vouloir retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Bien entendu, je ne suis pas opposée au fait de « booster » la facturation individuelle. La mise en place de cette dernière nous permettra en effet de disposer de données détaillées sur les prestations des établissements concernés, de manière à mieux maîtriser les dépenses de santé et à simplifier les démarches qui s’imposent à tous les acteurs.
Nous avons donc mis en place, avec l’article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, une expérimentation du processus de facturation individuelle entre des établissements de santé volontaires, les caisses d’assurance maladie et le réseau du Trésor public. L’expérimentation est maintenant en cours. Un chef de projet interministériel a été nommé. Un calendrier a été fixé et il est suivi.
L’expérimentation doit évidemment s’étaler sur une période suffisamment longue pour que nous puissions rassembler les éléments permettant d’en apprécier les résultats et il est impossible de mettre en œuvre la généralisation de la facturation individuelle aussitôt l’expérimentation achevée. Nous aurons au moins besoin du premier semestre de l’année 2012 pour en effectuer, dans un premier temps, l’évaluation, car ce n’est pas simple. Dans un second temps, nous devrons en outre définir les modalités d’extension du dispositif au vu des résultats de cette évaluation.
Ces délais sont absolument indispensables pour mener l’expérimentation à bonne fin et faire en sorte que la généralisation du dispositif se fasse dans de bonnes conditions, notamment en ce qui concerne les systèmes d’information des établissements et leur organisation.
Dans ces conditions, fixer la généralisation de la facturation individuelle au 1er janvier 2013 est déjà fort ambitieux.
À vouloir trop forcer le pas, nous risquons d’obtenir des effets contraires à nos attentes et même de déstabiliser un processus qui est aujourd’hui bien engagé, je peux en témoigner. Nous ne pourrons de toute façon pas faire mieux parce que le processus doit se dérouler complètement, et un amendement ne sera en rien susceptible de l’accélérer : il ne nous conduirait qu’à un constat d’échec.
M. le président. Monsieur Barbier, l'amendement n° 313 rectifié est-il maintenu ?
M. Gilbert Barbier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 313 rectifié est retiré.
Monsieur le rapporteur général, l’amendement n° 73 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si la majorité des membres de la commission ne s’y oppose pas, je serai conciliant avec Mme la ministre. D’autant que c’est, paraît-il, la journée de la gentillesse ! (Sourires.)
Cependant, pour d’autres de nos amendements, je serai moins conciliant. J’ai notamment l’intention de rester ferme sur nos positions s’agissant de ceux qui concernent la convergence, quand nous aborderons à nouveau ce thème.
Pour l’heure, j’accepte de retirer l’amendement n° 73, tout en espérant que, pour une fois, les engagements seront tenus, madame la ministre. (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Il est dur !
Mme Christiane Demontès. Tout est dit !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En effet, les fameuses études sur la convergence ont été lancées en 2004. Mme Podeur nous avait promis qu’elles seraient rapidement réalisées. Nous sommes pratiquement en 2011 et seulement trois ou quatre études ont été menées. Toutes les autres sont annoncées pour 2012…
C’est la raison pour laquelle nous avons des raisons d’être suspicieux quant aux engagements donnés.
Cependant, madame la ministre, vous venez de prendre un engagement d’une très grande netteté et je suis persuadé qu’à la fin de l’année 2011 nous disposerons de tous les éléments nécessaires à la mise en œuvre de la facturation individuelle en 2013.
Dans ces conditions, j’accepte de retirer l’amendement de la commission : nous vous faisons crédit !
M. le président. L'amendement n° 73 est retiré.
L'amendement n° 74, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le Gouvernement transmet au Parlement, avant le 15 septembre 2011, un rapport sur les conditions de mise en œuvre de cette expérimentation et sur ses premiers résultats. »
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Afin de tirer les leçons du retrait que nous venons d’effectuer, nous souhaitons rectifier l’amendement en modifiant la date de présentation du bilan de l’expérimentation : au lieu du 15 septembre 2011, il serait transmis au Parlement le 15 septembre de chaque année. (Mme la ministre manifeste son incompréhension.)
Nous souhaitons donc que le Gouvernement transmette « au Parlement, avant le 15 septembre de chaque année, un rapport sur les conditions de mise en œuvre de cette expérimentation et sur ses premiers résultats. »
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. À partir de 2013, puisque le dispositif sera opérationnel au 1er janvier 2013. Ce sera donc à partir du 15 septembre 2013.
M. Guy Fischer. Non !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pardonnez-moi, madame la ministre : nous souhaitons simplement que vous fassiez, au 15 septembre 2011, au 15 septembre 2012 et au 15 septembre 2013, un point sur l’état d’avancement de votre étude sur la facturation individuelle. (Mme la ministre s’exclame.)
Vous m’avez demandé de retirer mon précédent amendement, madame la ministre ! Je suis donc obligé d’en tirer les conséquences !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous avez modifié substantiellement le texte de votre amendement, monsieur le rapporteur général : j’ai donc besoin d’une petite clarification.
Si vous me dites : « À partir du moment où le dispositif est mis en place, le Gouvernement transmet au Parlement, avant le 15 septembre de chaque année, à partir de 2013…
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Non !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ou alors « avant le 15 septembre 2012 » ? Pour être cohérents avec ce que nous venons de décider, je propose le libellé suivant : « Le Gouvernement transmet au Parlement, avant le 15 septembre 2012, un rapport sur les conditions de mise en œuvre de cette expérimentation et sur ses premiers résultats. »
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, sauf erreur de ma part, vous venez de nous indiquer que vous lancez l’expérimentation au 1er janvier 2011. Donc, ce que nous voudrions, c’est que vous nous présentiez un bilan d’évaluation au 15 septembre 2011, au 15 septembre 2012 et les années suivantes. Cela nous permettra de suivre l’avancée de l’expérimentation et ne me paraît pas insurmontable !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Franchement, nous demandons déjà aux services de préparer beaucoup de rapports !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme Podeur va nous faire ça ! Elle a dit qu’elle mettrait tous les moyens humains et financiers à notre service pour réaliser toutes les études que nous souhaitions. Donc il n’y a pas de problème ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ne surchargez pas des agents qui font déjà beaucoup de travail dans ce domaine ! Vous savez que l’administration de la santé n’est tout de même pas pléthorique !
Écoutez, la rédaction que je vous ai proposée me semble convenable.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, j’aimerais que vous me soumettiez un libellé définitif de l’amendement rectifié...
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Eh bien, je vais vous faire une proposition très simple : nous avons perdu suffisamment de temps sur cette question et je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° 74 est retiré.
Je mets aux voix l'article 38.
(L'article 38 est adopté.)
Article additionnel après l'article 38
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 38, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la dernière phrase du II de l’article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004, les mots : « également à la facturation des soins et de l’hébergement des patients non couverts par un régime d’assurance maladie, » sont supprimés.
II. - Le I est applicable à compter du 1er mars 2011.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les hôpitaux facturent les assurés qui ne sont pas couverts par un régime d’assurance maladie au tarif journalier de prestation, ou TJP, qui est plus élevé que celui des GHS, c'est-à-dire les groupes homogènes de séjour, habituellement appliqué.
Cette disposition était transitoire dans le cadre de la mise en place de la tarification à l’activité, la T2A.
Or, depuis quelques années, les établissements ont beaucoup augmenté le TJP, et cela sans justification particulière. Qui plus est, l’accueil des publics précaires est couvert depuis deux ans par une dotation spécifique au sein des MIGAC, les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation. Je signale d’ailleurs que cette dotation a été financée par une baisse des tarifs des GHS.
Dans ces conditions, la commission des affaires sociales a souhaité, à tout le moins, obtenir quelques éclaircissements sur cette situation étrange en déposant un amendement de transparence puisqu’il vise à supprimer une tarification dérogatoire qui n’a plus lieu d’être.
Cette question n’est pas sans lien avec l’aide médicale d’état, l’AME, que nous avons évoquée devant vous en commission, madame la ministre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le rapporteur général a mis cet amendement au cœur de la discussion, qui entre dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, sur l’aide médicale d’État, pour les soins délivrés aux patients non assurés sociaux. En effet, pour les patients assurés sociaux, la facturation des soins est établie sur la base des GHS et des tarifs journaliers de prestations. Par conséquent, on peut se demander, comme ce fut le cas en commission, si le fait de calculer les dépenses d’AME sur la base des TJP constitue le mode le plus pertinent.
Ce débat mérite une analyse approfondie.
Cependant, il serait extrêmement déstabilisant pour le secteur hospitalier de basculer aussi brutalement d’un mode de financement à un autre. Un tel changement du mode de tarification applicable aurait un effet massif sur les comptes des établissements de santé : l’économie réalisée par l’État aurait pour pendant un manque à gagner équivalent pour les établissements de santé, de l’ordre de 180 millions d'euros et de 60 millions d'euros pour l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
La disposition que vous proposez, monsieur le rapporteur général, opère en fait un transfert du budget de l’État vers les déficits hospitaliers. Je doute que ce soit le but visé. Au mieux, les établissements de santé les plus touchés demanderont des aides exceptionnelles pour compenser tout ou partie de cette perte de recettes. Il appartiendra donc à l’assurance maladie de supporter budgétairement une partie des économies réalisées au profit de l’État.
Or ma main droite n’ignore pas ce que fait ma main gauche ! Certes, je suis comptable des dépenses de l’État prévues dans le PLF au titre de l’AME. Pour autant, je ne peux me réjouir de réaliser des économies dans le cadre du PLF et faire fi des conséquences que cela entraîne dans le PLFSS ! C’est pourquoi il est indispensable de mesurer les effets financiers qu’entraînerait un tel changement de calcul pour les établissements de santé et pour l’État.
Avant de modifier le mode de tarification actuel, il faut se placer dans une perspective globale d’amélioration de la gestion des dépenses de l’AME et de l’efficacité de ce dispositif et des soins urgents, en ce qui concerne tant l’accès aux soins que la juste rémunération des établissements. C’est précisément pour cela que François Baroin et moi-même avons confié une mission à l’IGAS et à l’IGF ; ses conclusions devraient rendues à la fin de ce mois.
Le rapport de cette mission nous permettra de déterminer s’il est pertinent de conserver le système actuel et, si nous décidons de basculer dans le système des GHS, d’envisager les mesures de compensation pour les établissements de santé et la façon dont s’opérera le transfert entre les comptes de l’État et ceux de l’assurance maladie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, je partage les préoccupations que vous venez d’exprimer, notamment en ce qui concerne les conséquences financières d’un tel changement pour l’assurance maladie.
Cela étant, lorsque la tarification a été mise en place, voilà trois ans, nous avions annoncé que nous nous acheminerions vers un tarif pour ce qui concerne l’AME. Il faudra y travailler.
Un rapport sera remis au Gouvernement à la fin de ce mois. Le Parlement pourra-t-il également en être le destinataire ? (Mme la ministre acquiesce.)
Sous le bénéfice des engagements que vous avez pris et dans la mesure où mon intention n’est pas de mettre le Gouvernement et les établissements de santé dans une situation inconfortable, je retire cet amendement. Toutefois, je souhaite que nous disposions, dès que possible, des éléments nous permettant de progresser, car cette situation ne saurait perdurer.
M. Guy Fischer. Un sacré débat en perspective !
M. le président. L'amendement n° 75 est retiré.
Article 39
I. – L’article L. 1142-23 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au neuvième alinéa (6°), après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 1221-14, » ;
2° Au douzième alinéa (2°), après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 1221-14, » ;
3° Au treizième alinéa (3°), les mots : « aux mêmes articles » sont remplacés par les références : « aux articles L. 1142-14 et L. 1142-15 » ;
4° Au quatorzième alinéa (4°), après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 1221-14, » ;
5° Le 7° est abrogé.
II. – L’article L. 1221-14 du même code est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Au premier alinéa, après le mot : « indemnisées », sont insérés les mots : « au titre de la solidarité nationale » ;
1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il procède à toute investigation sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. » ;
2° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article, est opposable à l’assureur ou, le cas échéant, au responsable des dommages, sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées. L’office peut en outre obtenir le remboursement des frais d’expertise. Quelle que soit la décision du juge, le montant des indemnités allouées à la victime, ou à ses ayants droit, leur reste acquis. » ;
3° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L’action subrogatoire prévue à l’article L. 3122-4 peut être exercée par l’office, même sans faute lorsqu’elle est réalisée au titre des indemnisations versées en application du présent article. » ;
4° Après l’avant-dernier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’office ou les tiers payeurs fondent leurs recours sur la responsabilité des structures reprise par l’Établissement français du sang en vertu du B de l’article 18 de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme, de l’article 60 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000) et de l’article 14 de l’ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine, leur action subrogatoire ne peut être engagée directement que contre les assureurs de ces structures.
« Ces actions subrogatoires sont portées devant la juridiction administrative. »
III. – L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales se substitue à l’Établissement français du sang dans les contentieux en cours à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, au titre des préjudices mentionnés au premier alinéa de l’article L. 1221-14 du code de la santé publique, dirigés initialement par les tiers payeurs contre l’Établissement français du sang et n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.
L’action subrogatoire de l’office au titre de ces créances s’exerce dans les conditions prévues aux huitième et neuvième alinéas du même article L. 1221-14.
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, sur l'article.
M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 39, modifié à l’Assemblée nationale par quatre amendements d’origine gouvernementale, rectifie le dispositif d’indemnisation des personnes ayant contracté le virus de l’hépatite C, le VHC, à la suite d’une contamination transfusionnelle. En effet, il donne désormais la possibilité à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, l’ONIAM, chargé à la place de l’Établissement français du sang, l’EFS, de l’indemnisation des victimes au titre de la solidarité nationale, d’exercer un recours subrogatoire, même sans faute, contre les assureurs des anciennes structures de transfusion sanguine reprises par l’EFS.
Si cette disposition était définitivement votée, il en résulterait assurément une crise majeure de la responsabilité médicale. En effet, elle entraînerait ipso facto la disparition de la Société hospitalière d’assurances mutuelles, la SHAM, qui assurait un nombre important d’établissements de transfusion sanguine avant 1990 et pour laquelle le contentieux de la transfusion sanguine représenterait aujourd’hui une charge particulièrement importante.
Cette disposition obligerait cette société à constituer des provisions ne lui permettant plus, dès le 1er janvier 2011, de poursuivre ses activités d’assurance. Or la SHAM est aujourd’hui le premier assureur de responsabilité médicale en France. Elle assure plus de 60 % des lits de MCO – médecine, chirurgie, obstétrique –, avec 80 % des établissements publics de santé MCO, 27 % des établissements de santé privés et plusieurs centaines de professionnels de santé libéraux exerçant dans des spécialités à risques.
Cette disposition entraînerait également la désaffection prévisible d’une majorité d’assureurs et de réassureurs intervenant sur le marché de la responsabilité médicale, en raison de l’absence de sécurité juridique du secteur, qui se caractérise par des engagements pris sur le long terme.
Il serait donc totalement inéquitable, aujourd’hui, pour tenir compte des contraintes budgétaires des comptes publics et de l’assurance maladie, de mettre à la charge des assureurs de responsabilité civile des anciens centres de transfusion sanguine les conséquences financières d’un guichet d’indemnisation ouvert au titre de la solidarité nationale et, pour cela, de récrire des règles de droit ayant un effet rétroactif sur les contrats d’assurance conclus à l’époque.
Au-delà du cas des contaminations transfusionnelles, ce dossier est exemplaire en ce qu’il illustre les difficultés que rencontrent plus généralement les assureurs et leurs réassureurs pour couvrir les risques de responsabilité médicale, en raison du changement constant du cadre juridique, qu’il soit le fait de la jurisprudence ou du législateur. Or la stabilité est indispensable pour gérer et porter les engagements concernant des risques pouvant se manifester sur le long terme.
En l’occurrence, l’article 39 du PLFSS remet en cause sur le plan juridique et financier la portée des garanties données par les assureurs voilà plus de vingt ou trente ans pour les activités de soins accomplies à l’époque ! Un tel projet ne peut que confirmer la désaffection de la majorité des assureurs pour l’assurance de la responsabilité civile médicale et provoquer le départ de ceux, déjà si peu nombreux, qui s’intéressent encore à la protection des professionnels et des organisations de santé.
Il convient de rétablir, au niveau de l’action subrogatoire de l’ONIAM, une logique de responsabilité tenant compte des mécanismes indispensables au fonctionnement de l’assurance.
Enfin, les dispositions envisagées encourent la critique sur le plan juridique, tant devant le Conseil Constitutionnel que devant la Cour européenne des droits de l’homme, notamment en raison de l’atteinte au principe de sécurité juridique.
Il faudrait, me semble-t-il, reprendre les dispositions prévues par l’article 67 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 du 17 décembre 2008 et calquer l’action subrogatoire de l’ONIAM et des tiers payeurs en matière d’indemnisation des victimes du VHC sur celle qui est actuellement prévue par l’article L. 3122-4 du code de la santé publique en matière de contamination par le VIH : l’Office ne peut engager d’action au titre de cette subrogation que lorsque le dommage est imputable à une faute.
Cette modification répondrait par ailleurs à la volonté exprimée dans l’exposé des motifs du PLFSS adopté en conseil des ministres : « La rédaction des dispositions en cause est en outre harmonisée avec celle retenue en matière d’indemnisation des victimes de préjudices résultant de contaminations par le virus d’immunodéficience humaine. »
Je souligne de nouveau que, paradoxalement, l'article 39, dans la rédaction résultant des amendements du Gouvernement votés par l’Assemblée nationale, prévoit exactement l’inverse s’agissant de l’action subrogatoire.
Toujours est-il que, dans un souci de sécurité juridique et de stabilisation de l’assurance de responsabilité civile médicale, une modification de cet article me paraît indispensable afin de stabiliser les règles juridiques et de réaffirmer, comme pour les contaminations par le VIH, que l’ONIAM ne peut exercer d’action subrogatoire qu’en cas de preuve d’une faute.