M. Guy Fischer. Cet amendement vise à assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d'assurance vieillesse à un taux égal à la somme des taux de cotisation d'assurance vieillesse à la charge des employeurs du secteur privé.
Il nous paraît d’autant plus utile et pertinent que nous savons, depuis l’examen par le Sénat du projet de loi portant réforme des retraites, que celle-ci n’est pas intégralement financée. Il manque au bas mot 4 milliards d’euros, ce qui devrait encore entraîner prochainement des réductions – et au mieux le gel – de pensions de retraite.
Notre proposition devrait avoir pour conséquence, selon nos estimations et celles des économistes qui ont travaillé sur ce sujet, un surcroît de recettes de l'ordre de 30 milliards d'euros, c’est-à-dire un apport rapide et important de ressources pour la sécurité sociale, plus précisément pour la branche retraite, permettant de renoncer au report de 60 à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite.
Cet amendement constitue également, et c’est là son second intérêt – sur lequel vous ne vous prononcez jamais –, une incitation forte pour les entreprises à privilégier le facteur travail.
Or actuellement, on assiste, et c’est peu dire, à l’inverse. En 2009, les entreprises vedettes du CAC 40 ont réalisé 47 milliards d’euros de profits, ce qui ne les a pas empêchées de réduire considérablement leur masse salariale, notamment en supprimant 60 000 emplois. En 2010, la tendance est la même.
Ce chiffre important n’intègre pas les pertes d’emplois que la politique conduite a entraînées chez les sous-traitants de ces entreprises. Au final, 255 000 emplois ont été « carbonisés » l’an dernier. Ce triste record appauvrit considérablement la sécurité sociale !
Ayant suivi les débats qui se sont déroulés à l’Assemblée nationale, j’ai entendu Mme Bachelot-Narquin affirmer qu’une telle mesure revenait à fiscaliser le financement de notre protection sociale. Nous contestons naturellement cette analyse.
M. Guy Fischer. L’économie financiarisée à outrance conduit, on le voit, à d’importantes suppressions d’emplois.
Dans le même temps, selon la Commission européenne, des sommes considérables qui étaient affectées jusqu’alors aux salaires sont actuellement distribuées aux actionnaires et accroissent les revenus financiers. Ces derniers, qui ne prennent plus la forme de salaire, échappent donc aux cotisations sociales.
Aussi, tirant la conclusion de cet « échappement social », proposons-nous de créer une contribution sur les revenus financiers pour compenser l’impossibilité de les assujettir aux cotisations sociales.
Nous proposons, en réalité, un cercle vertueux, reposant bien sur la solidarité et le financement par des cotisations. Nous voulons privilégier non pas le capital, mais, au contraire, l’intérêt des assurés sociaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 227, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les revenus mentionnés au c et e du I de l'article L. 136-6 du présent code sont assujettis au taux de 12 %. »
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Par le biais du présent amendement ayant pour objet, lui aussi, le financement de notre système de protection sociale, nous proposons de porter de 2 % à 12 % le taux des prélèvements sociaux auquel sont assujettis notamment les capitaux mobiliers, c’est-à-dire les placements financiers destinés à produire des revenus sous forme d’intérêts, tels que les obligations et les actions.
Cette question de la soumission des actions – dont nous savons que le mécanisme nuit considérablement au travail et à sa juste rémunération – fait de plus en plus de chemin, au point que le Président de la République lui-même, s’exprimant devant l’Assemblée générale de l’ONU à l’occasion du Sommet sur les objectifs du millénaire pour le développement, a plaidé pour la création d’une taxe universelle sur les transactions financières.
Le système que nous vous soumettons, mes chers collègues, n’est pas si éloigné de celui auquel faisait référence Nicolas Sarkozy, à ceci près que le prélèvement que nous proposons d’instaurer n’est pas fiscal ; c’est un prélèvement social destiné à alimenter non pas le budget de l’État, mais les caisses de la sécurité sociale.
Chaque jour, dans nos permanences, nous faisons le constat suivant : les pressions exercées par les actionnaires pour profiter d’une rentabilité toujours plus grande jouent au détriment du monde du travail.
L’appétit des financiers – il semble parfois sans limite – a pour effet la destruction de milliers d’emplois et des difficultés croissantes pour un grand nombre de salariés. Ainsi, alors que, par le passé, les entreprises licenciaient en raison du déficit qu’elles connaissaient, aujourd’hui, bien que bénéficiaires, elles prononcent des licenciements parce que les actionnaires entendent non seulement qu’elles le restent, mais aussi que les rémunérations provenant des actions qu’ils détiennent soient encore plus élevées.
C’est pourquoi l’on observe de plus en plus fréquemment des entreprises présentant simultanément un compte d’exploitation bénéficiaire et un plan de licenciement. Il ne s’agit pas là d’une erreur de communication, loin s’en faut. En réalité, c’est en procédant ainsi que les sociétés bénéficient d’une publicité maximale et qu’elles font remonter et exploser le cours de leurs actions, pour la plus grande satisfaction de ceux qui les détiennent.
L’économiste Jacques Nikonoff décrit en ces termes ces mécanismes : « Ces phénomènes relèvent de ce qui est abusivement appelé la “création de valeur”. Cette technique est devenue peu à peu le mode de gestion dominant des entreprises cotées en Bourse. Mais lorsque l’expression “créer de la valeur” est utilisée, il s’agit en réalité de créer de la valeur au bénéfice exclusif de l’actionnaire. S’apparentant à un enrichissement sans cause, cet objectif est en réalité trompeur et dangereux. ».
Dans un tel contexte, il nous paraît socialement juste et économiquement efficace de soumettre les actions à un taux de cotisations sociales majorées de 12 %.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Défavorable.
M. le président. L'amendement n° 229, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Il est institué, au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sont passibles des mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 5 %. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il me semble cette fois que vous aurez quelques difficultés à invoquer le caractère dogmatique de nos propositions pour refuser de nous apporter une réponse, monsieur le rapporteur général. C’est en effet la première année que nous présentons cet amendement (Sourires.), et nous ne faisons en l’occurrence que reprendre un dispositif adopté par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, sur la proposition de Mme Marie-Anne Montchamp, qui, si je ne m’abuse, appartient à la majorité.
Cet amendement visait à tirer les conséquences du constat que nous faisons nous-mêmes, et que nous n’avons de cesse d’exposer : les revenus issus du capital bénéficient actuellement d’une taxation sociale bien inférieure à celle qui s’applique aux revenus du travail, ce qui ne va pas sans entraîner de répercussions sur celui-ci. Nous nous réjouissons que Marie-Anne Montchamp ait défendu une telle position à l'Assemblée nationale. Vous avez toutefois écarté l’amendement de notre collègue député, monsieur le ministre, sans répondre aux deux questions qui nous semblent les plus fondamentales.
Tout d’abord, pour quelles raisons les prélèvements sociaux pesant sur le capital sont-ils aujourd’hui inférieurs de cinq points à ceux qui concernent le travail ? Il faudra bien expliquer à nos concitoyens en quoi il est logique et juste qu’il soit préférable, du point de vue des prélèvements sociaux, d’être rentiers plutôt que salariés. Mais il faudra également leur expliquer, alors que vous leur imposez un véritable plan de rigueur sans précédent – report de l’âge légal de départ à la retraite, déremboursements, accroissement du reste à charge, etc. –, pourquoi vous refusez un amendement qui a fait l’objet d’un consensus au sein de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale et qui permettrait de rapporter à la sécurité sociale pas moins de 5 milliards d’euros – oui, monsieur Vasselle, nous parlons bien ici de milliards d’euros !
C’est d’autant plus vrai que les mesures contenues dans le présent PLFSS, outre qu’elles pèsent essentiellement sur nos concitoyens, ne règlent pas pour l’avenir la question de l’équilibre financier de la sécurité sociale. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à le dire puisque l’auteur de l’amendement auquel je fais référence, Marie-Anne Montchamp, pourtant membre de l’UMP, a répondu en ces termes en séance publique au rapporteur Yves Bur, après qu’il eût émis un avis défavorable : « Yves Bur a raison de souligner qu’il convient de maintenir le cap de la réduction de la dépense, mais il ne faut pas nous cacher que nous n’obtenons cette réduction qu’à grand-peine, avec des mesures qui rapportent quelques dizaines de millions d’euros, là où nous avons besoin de quelques dizaines de milliards d’euros pour parvenir à des équilibres pérennes sur le long terme ». Et d’ajouter, après votre opposition, monsieur le ministre : « J’affirme à nouveau que nous n’échapperons pas à la nécessité d’envisager de façon systématique l’accroissement des ressources afin de préserver notre modèle social. »
La critique est d’autant plus claire qu’elle provient d’un membre de votre camp. Votre refus d’apporter à la sécurité sociale les financements qui lui permettraient de jouer pleinement son rôle conduit en effet à son rétrécissement, à sa circonscription aux risques les plus lourds, laissant à nos concitoyens le soin de financer eux-mêmes les dépenses que vous estimez les moins coûteuses.
L’amendement n° 229, s’il ne permet pas de régler entièrement la question du déficit, y contribue tout de même de manière notable, raison pour laquelle je vous invite, mes chers collègues, à l’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement présenté par Mme David ne peut être adopté en l’état, pour plusieurs raisons.
Premièrement, si un amendement similaire a effectivement été adopté par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale – les conditions de travail au Palais Bourbon n’y sont pas étrangères –, son auteur l’a finalement retiré en séance publique.
Deuxièmement, je rappelle que nous excluons toute augmentation systématique de recettes tant que nous n’aurons pas démontré à nos concitoyens que nous sommes capables d’utiliser de façon optimale les recettes dont nous disposons pour assurer une offre de soins efficiente et de qualité, aussi bien en ville qu’à l’hôpital.
M. François Autain. Combien de temps cette période va-t-elle durer ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je considère qu’il reste encore beaucoup à faire à l’hôpital.
M. Guy Fischer. Encore et toujours l’hôpital, votre tête de turc favorite, monsieur le rapporteur général !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’augmentation des recettes constituerait une solution de facilité, une fuite en avant. On laisserait filer les dépenses, alors qu’il convient d’abord de les maîtriser.
M. François Autain. On laisse aussi filer les déficits !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Une fois atteint l’optimum de dépenses, et si les recettes restent insuffisantes, il sera temps d’envisager une augmentation de celles-ci.
M. François Autain. Dans combien de temps ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce moment n’est pas venu. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Je constate que M. le rapporteur général persiste dans ses attaques contre l’hôpital public.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pas seulement contre l’hôpital public !
M. Guy Fischer. Vous voulez que les hôpitaux publics soient toujours plus efficients, monsieur le rapporteur général, mais nous aurons l’occasion ultérieurement dans le débat, notamment lorsque nous examinerons l’article 40 du présent projet de loi, de démontrer, à partir d’exemples tirés de la situation des hospices civils de Lyon, dans quelles conditions fonctionne l’hôpital public.
Si les hôpitaux de Lyon, Paris et Marseille sont aujourd’hui réputés pour leur offre de soins, on constate d’ores et déjà les conséquences désastreuses de la politique d’optimisation des dépenses que vous menez.
Ainsi à Lyon, les greffes de foie se répartissent actuellement entre l’hôpital de la Croix-Rousse et l’hôpital Édouard-Herriot. Or, afin d’optimiser les dépenses, il a été décidé de concentrer toutes ces interventions sur le site de la Croix-Rousse. Résultat : demain, une place réputée comme celle de Lyon ne sera plus en mesure de réaliser des greffes de foie au bénéfice des enfants !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cela reste à prouver !
M. Guy Fischer. Je vous invite à vérifier ces informations, monsieur Vasselle.
Voilà les résultats de votre politique éminemment condamnable ! Et nous pourrions multiplier les exemples.
À cause de cette politique, des personnes vont mourir, car le nombre de places consacrées à des greffes de foie sera, de fait, limité. (Marques d’indignation sur les travées de l’UMP et au banc des commissions.)
M. Gilbert Barbier. Ce serait plutôt faute de donneurs !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Je me permettrai de faire quelques commentaires sur l’ensemble des amendements présentés par les membres des groupes socialiste et CRC-SPG qui tendent à insérer des articles additionnels après l’article 13.
En la matière, nous ne pouvons souscrire aux arguments de M. le rapporteur général, car il ne faudrait pas oublier une notion, qui me semble cardinale dans ce débat : la justice fiscale.
Or lorsque nous proposons de nouvelles contributions qui touchent les plus hauts revenus, les niches d’activité ou les catégories les plus aisées, on nous demande toujours d’attendre quelques années, le temps d’approfondir la réflexion.
En revanche, dès lors qu’il s’agit de prendre des mesures ayant des conséquences sur les familles les plus humbles, aux revenus les plus modestes – on pense notamment aux franchises, à l’augmentation du forfait hospitalier ou aux déremboursements –, il faut décider immédiatement.
Il y a bien deux poids, deux mesures.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous n’êtes pas objectif ! Vous oubliez l’augmentation du forfait social, de même que d’autres mesures !
M. Yves Daudigny. Je vous invite à prendre connaissance de l’ouvrage des sociologues Willy Pelletier et Laurent Bonelli, L’État démantelé, qui montre combien il existe dans nos sociétés modernes, en Europe, et particulièrement en France, une classe dominante, très puissante, parfaitement organisée à travers des clubs ou autres fondations, totalement décomplexée sur le plan idéologique, très active, très offensive, et dont le seul objectif est de faire sauter tous les repères qui fondent notre système de solidarité depuis une cinquantaine d’années.
En face de cette classe dominante, on trouve une société atomisée, marquée par l’accroissement de la précarité, le chômage, l’incertitude du lendemain, et par le fait que les parents ne savent plus si leurs enfants vivront encore aussi bien qu’eux, sinon mieux.
Loin d’être technique, ce débat est profondément politique, l’enjeu étant de savoir sur quel fondement nous allons construire la société dans laquelle nous vivrons demain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.
M. Jacky Le Menn. Depuis que je siège au Sénat, j’entends M. le rapporteur général dire que l’hôpital serait le mauvais élève en matière de dépenses de santé.
M. François Autain. Il le disait déjà avant !
M. Guy Fischer. Il veut en faire une vache à lait !
M. Jacky Le Menn. C’est toujours la même antienne : sureffectif, argent gaspillé…
À côté, l’hospitalisation privée à but lucratif…
M. Guy Fischer. Vertueuse !
M. Jacky Le Menn. … constituerait le modèle de vertu vers lequel tous les hôpitaux devraient converger.
M. Alain Fouché. Personne n’a dit cela !
M. Jacky Le Menn. Peut-être, mais je constate que ce discours revient régulièrement en commission des affaires sociales ou dans cet hémicycle…
Or ce discours est tout simplement faux !
Certes, on peut toujours mieux gérer – ce n’est pas le vieux gestionnaire que je suis qui prétendra le contraire ! –, mais il me semble qu’il y a derrière ces propos répétitifs une volonté délibérée de saper l’hôpital public, en dépit du travail considérable qu’il accomplit.
J’ai eu l’occasion pendant plus de trente ans de gérer différents hôpitaux publics en France. J’ai également eu l’honneur de travailler comme conseiller technique auprès de l’ancien directeur des hôpitaux, Jean de Kervasdoué. Nous avions alors une vision d’ensemble, ce qui ne nous empêchait pas de sanctionner les abus, le cas échéant.
Mais, dans l’ensemble, les hôpitaux français sont bien gérés, et les gens qui y travaillent sont admirables, qu’il s’agisse des médecins ou des autres catégories de personnels. Il est bon de rappeler de temps en temps cette vérité, pour éviter de jeter systématiquement la suspicion sur l’hospitalisation publique française, ce que je n’admettrai jamais.
Pour ma part, je ne dénigre pas l’hospitalisation privée, mais je suggère, monsieur le rapporteur général, que nous procédions, par exemple dans le cadre de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, à une confrontation objective de la façon dont sont gérés les hôpitaux privés à but lucratif – je n’oublie pas non plus les hôpitaux privés à but non lucratif, qui sont le plus souvent fort bien gérés – et les hôpitaux publics, afin que l’on cesse de désinformer les Français et la représentation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Vous suggérez, monsieur le rapporteur général, de diminuer d’abord les dépenses avant d’envisager de trouver des recettes nouvelles. Mais votre seule manière de réduire les dépenses est d’abaisser le niveau de soins et de faire supporter aux assurés une charge de plus en plus lourde. Comprenez que nous ne puissions suivre cette logique, qui aura pour effet de priver de soins corrects une grande partie des habitants de notre pays.
Je constate pourtant que, l’an dernier, dans le cadre du PLFSS, vous n’avez pas tergiversé pour prélever 150 millions d’euros de recettes nouvelles au détriment des accidentés du travail, en fiscalisant les indemnités qui leur sont versées.
Quand il s’agit d’aller chercher des ressources chez les travailleurs, vous répondez toujours présents !
M. Nicolas About. C’est un raccourci !
Mme Annie David. En revanche, lorsqu’il s’agit de toucher au portefeuille de catégories sociales que vous voulez épargner, vous ne voulez plus entendre parler de recettes nouvelles, alors même que la mesure que nous proposons aurait rapporté un peu plus de 5 milliards d’euros
De deux choses l’une : soit vous renoncez à toute recette nouvelle, et cela doit valoir pour tout le monde, soit vous décidez de dégager des recettes nouvelles, et il ne faut pas toujours prendre chez les mêmes ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. J’ai entendu le plaidoyer pro domo de M. Le Menn, mais il ne faut être excessif ni dans un sens ni dans l’autre. Je ne pense pas que M. le rapporteur général juge tous les hôpitaux mal gérés ni que M. Le Menn les considère tous bien gérés.
La situation est différente selon les régions et les secteurs. Certains hôpitaux sont bien gérés, monsieur le ministre…
M. Guy Fischer. Ah, quand même !
M. Gilbert Barbier. … mais d’autres le sont beaucoup moins. Ainsi, certains d’entre eux respectent les plans de retour à l’équilibre financier qu’ils ont négociés, contrairement à d’autres, et j’en connais qui agissent de cette façon volontairement.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Gilbert Barbier. Et vous savez que le problème de la gestion financière ne règle pas celui de la sécurité dans les établissements.
Actuellement, le projet concernant les plateaux techniques dans une centaine d’hôpitaux de taille petite ou moyenne est en suspens en raison de l’insuffisante sécurité dans ces établissements.
M. François Autain. Le débat sur l’hôpital est lancé !
M. Gilbert Barbier. Il faut voir les choses avec objectivité : tout n’est pas blanc d’un côté et noir de l’autre. Il faut mettre à plat l’ensemble du réseau des hôpitaux publics et privés de notre pays et ne pas porter de jugements péremptoires.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Alain Fouché. C’est la sagesse !
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je veux tout d’abord saluer les paroles mesurées de Gilbert Barbier.
Depuis quelques années – j’ai été élu en 2004, je suis donc un jeune sénateur – je suis les déficits successifs de la sécurité sociale : on nous dit qu’il faut diminuer les dépenses, mais j’ai le sentiment que l’on arrive maintenant au bout du bout de ce que l’on peut faire.
Certes, dans les hôpitaux, à l’échelon de la ville, on peut encore réaliser des économies.
M. Guy Fischer. On est dans le dur maintenant !
M. François Autain. On licencie !
M. Alain Milon. Mais je le répète au sein de la commission des affaires sociales lors de l’examen de chaque PLFSS, il existe un déficit conjoncturel évident, que personne ne nie, et un déficit structurel que l’on ne pourra pas diminuer sans augmenter les recettes.
Mme Christiane Demontès. Eh oui !
M. Alain Milon. Pour une fois – je prie mes collègues qui ne comprendront pas ma prise de position de bien vouloir m’excuser –, je vais voter l’amendement n° 229 déposé par les membres du groupe CRC-SPG.
Mme Christiane Demontès. C’est courageux, monsieur Milon !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 229.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)