La loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014 s’inscrit dans la continuité des règles existantes, tout en préfigurant autant que possible la réforme constitutionnelle en cours de discussion sur la base des conclusions du groupe de travail présidé par M. Michel Camdessus. Cette réforme, qui vise à poser les bases pérennes d’une nouvelle gouvernance de nos finances publiques, instaurerait une loi-cadre de programmation des finances publiques (LCPFP), qui s’imposerait aux LF et LFSS et fixerait une trajectoire d’effort structurel de redressement des finances publiques.
Le rapport du groupe de travail présidé par M. Camdessus préconise que les futures LCPFP fixent, pour chacune des années de la période de programmation, un plafond de niveau de dépenses et un plancher annuel des mesures nouvelles en recettes, c’est-à-dire une trajectoire d’effort structurel de consolidation budgétaire. Ainsi défini, le concept d’effort structurel permet de suivre les mesures discrétionnaires en dépense comme en recettes, indépendamment de la surréaction des recettes à la conjoncture.
La LPFP 2011-2014 préfigure ce que pourraient contenir les futures lois-cadres s’agissant de l’effort structurel. En effet, elle fixe sur la période de programmation les plafonds globaux et par mission de dépense de l’État (articles 5 et 6), l’objectif de dépenses du régime général de la sécurité sociale (article 8.I), le niveau de l’ONDAM (article 8.II) et l’impact cumulé des mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires votées par le Parlement ou prises par voie réglementaire (article 9).
Les règles générales relatives aux recettes sont explicitées dans cette partie du rapport tandis que celles propres à un sous-secteur des administrations publiques le sont dans les parties sectorielles :
Des règles générales de gouvernance en matière de recettes
Le Gouvernement s’engage à réserver aux lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale les dispositions relatives aux recettes fiscales et sociales.
Le rapport remis par le groupe de travail présidé par M. Michel Camdessus préconise de conférer une compétence exclusive aux lois financières en matière de prélèvements obligatoires. Cette proposition suppose une modification de la Constitution. Toutefois, une circulaire du Premier ministre du 4 juin 2010 demande aux membres du Gouvernement de mettre en œuvre dès à présent le monopole des lois de finances et lois de financement pour les mesures relatives aux recettes fiscales et sociales.
Aussi, depuis cette date :
– Le Gouvernement n’insère plus de disposition fiscale ou de disposition affectant les ressources de la sécurité sociale dans les lois ordinaires ;
– Pour les textes déjà déposés et les propositions de loi qui n’ont pas encore été examinés par la commission compétente de la première assemblée saisie, le Gouvernement présentera des amendements tendant à la suppression des dispositions de cette nature et opposera un avis négatif à tout amendement qui tendrait à en introduire.
Le Gouvernement s’engage à respecter strictement ces règles sur la période de programmation.
Le Parlement est par ailleurs invité à se conformer à cette règle de bonne conduite afin de contribuer à l’objectif de réduction des dispositifs fiscaux et sociaux dérogatoires. La bonne application et le respect de cette règle garantissent ainsi la lisibilité et la cohérence de la politique des prélèvements obligatoires, puisque c’est au moment du dépôt des lois financières que l’impact des mesures en recettes sur les finances publiques est présenté.
Une évaluation systématique des niches fiscales et sociales
Dans le prolongement de la démarche engagée à l’occasion de la première loi de programmation des finances publiques et de la révision générale des politiques publiques (RGPP), l’évaluation de l’ensemble des dispositifs d’atténuation de recettes fiscales et sociales permettra d’éclairer le Gouvernement et le Parlement pendant la durée de programmation sur leur coût, leur efficacité et le cas échéant les réformes possibles, voire nécessaires. Une première évaluation globale de ces dispositifs sera remise au Parlement avant le 30 juin 2011, conformément aux dispositions de la LPFP 2009-2012.
Le III de l’article 12 prévoit ainsi, sur le champ fiscal comme sur le champ social, de poursuivre l’évaluation systématique des dispositifs créés à compter de la présentation de la loi de programmation trois ans après leur entrée en vigueur.
Affecter les surplus éventuels constatés par rapport aux évaluations de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année à la réduction du déficit public
La loi de programmation des finances publiques pour la période 2011-2014 étend au champ de la loi de financement de la sécurité sociale l’application du principe selon lequel les éventuels surplus de recettes constatés en cours d’année sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit public.
Pour l’État, ce principe avait été instauré par la LPFP 2009-2012 ; il consiste à programmer de manière pluriannuelle la mise en œuvre du 10° du I de l’article 34 de la LOLF disposant que la loi de finances « arrête les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l’année, des produits des impositions de toute nature établies au profit de l’État ».
Pour le champ de la loi de financement de la sécurité sociale, il s’agit de prévenir les risques d’un pilotage des finances sociales qui se réduirait à un seul pilotage par le solde des différentes branches ; il convient donc de veiller à ce que les éventuels surplus de recettes par rapport aux prévisions de la loi de financement de l’année ne soient pas utilisés pour la mise en œuvre de mesures nouvelles en dépenses (ce qui se traduirait par un dépassement des objectifs de dépense) ou de mesures induisant une baisse des recettes.
II. LA PROGRAMMATION DES DÉPENSES ET RECETTES DE L’ÉTAT
A. La programmation des dépenses de l’État
Pour assurer la contribution de l’État au redressement des finances publiques, le budget triennal a été élaboré sur la base d’une stabilisation en euros courants (« zéro valeur ») des crédits budgétaires et des prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et pensions des fonctionnaires de l’État(3). Par ailleurs, en incluant ces deux postes de dépenses, l’augmentation annuelle des crédits sera toujours au maximum égale à l’inflation (« zéro volume ») sur le périmètre de la norme élargie présenté au III, soit 352,3 Md€ de crédits et prélèvements sur recettes en loi de finances initiales (LFI) pour 2010(4).
.
Cet effort de maîtrise des dépenses publiques est ambitieux puisqu’il permettra de faire mieux sur la période 2011-2013 que le simple respect d’une stabilisation en volume des dépenses. En effet, le montant global des dépenses de l’État sur le périmètre de la norme élargie diminuera en euros constants de 0,2% en 2011.
C’est un effort particulièrement vertueux pour l’avenir puisque la règle « 0 valeur hors charge de la dette et pensions » garantit que les économies dégagées, grâce à la réforme des retraites, sur les dépenses de pensions des fonctionnaires ne seront pas recyclées sur d’autres dépenses. Elles viendront ainsi, en totalité, contribuer à l’effort de consolidation structurelle de nos finances publiques.
La règle garantit, de la même façon, qu’une moindre progression éventuelle de la charge de la dette, par rapport aux estimations prévues sur la période, ne sera pas recyclée dans la construction budgétaire sur d’autres dépenses de l’État.
C’est un effort inédit et un infléchissement marqué par rapport aux budgets précédents.
En effet, pour les lois de finances initiales 2006 à 2010, les crédits du budget général et prélèvements sur recettes désormais soumis au « 0 valeur » ont progressé en moyenne d’environ 2,9 Md€ par an, là où ils seront désormais stabilisés sur 3 ans.
Un tel effort requiert des économies importantes.
La norme « 0 valeur » s’impose à des dépenses qui connaissent une tendance spontanée à la hausse.
Tout d’abord, le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne croîtra en moyenne de 0,5 Md€ par an sur la période ; le respect de la règle « zéro valeur » implique donc d’emblée une diminution en euros courants de l’ensemble des autres dépenses (masse salariale, fonctionnement, subventions aux opérateurs, interventions et investissements des ministères).
Ensuite, sans mesure de maîtrise de la dépense, la plupart des dispositifs sous enveloppe « 0 valeur » croissent spontanément. Cette dynamique tendancielle à la hausse peut avoir plusieurs origines, comme par exemple :
– des mécanismes d’indexation automatique des prix (par exemple pour les loyers) ou des prestations (les allocations logement, certains minima sociaux…) ;
– une augmentation structurelle du nombre de bénéficiaires d’interventions servies par l’État (pour l’allocation adulte handicapé et les exonérations de cotisations sociales…) ;
– l’incidence pluriannuelle de décisions déjà prises (par exemple en matière d’investissements ou du fait des contrats de projet État-régions).
C’est pourquoi des économies sont indispensables pour compenser la dynamique spontanée de la dépense et dégager des moyens nouveaux pour financer des priorités, tout en stabilisant en net les crédits de l’État.
Sur le périmètre « 0 volume », en dépit de la réduction progressive du déficit budgétaire, la charge de la dette, dépense largement héritée du passé, devrait connaître une croissance élevée sur la période 2011-2013. Cette charge augmenterait en moyenne de plus de 4 Md€ par an, par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale pour 2010 (42,5 Md€), ce qui représente une croissance de 9 % par an en valeur, soit cinq fois le rythme de l’inflation.
Le passage du budget à champ constant 2010 au budget à champ courant résulte de la prise en compte des mesures de périmètre et de transfert. Pour 2012 et 2013, les mesures figurant dans le tableau ci-dessus sont celles associées à la loi de programmation des finances publiques ; elles sont susceptibles d’évoluer d’ici le dépôt des projets de loi de finances pour 2012 et 2013, sans impact toutefois sur la trajectoire à « 0 valeur ».
B. L’évolution des recettes
1. Évolution des recettes fiscales
Les recettes fiscales nettes pour 2011 s’établiraient à 254,4 Md€ à périmètre courant, soit un niveau relativement comparable à celui de 2010. Ce niveau s’explique par les éléments suivants :
– Une évolution spontanée des recettes fiscales nettes de +5,6% imputable à un redémarrage de l’activité économique, qui affecte positivement les assiettes des principaux impôts;
– L’impact positif sur le solde de l’État des mesures fiscales mises en œuvre dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 (+1,7 Md€) :
. la suppression du taux réduit de TVA en faveur des services de téléphonie payante (+1,1 Md€) ;
. l’aménagement du crédit d’impôt développement durable (+0,2 Md€) ;
. l’application du droit commun de l’impôt sur les sociétés aux dotations à la réserve de capitalisation des entreprises d’assurance (+0,2 Md€) ;
. la création d’une taxe systémique sur les banques (+0,5 Md€) ;
. ces économies sont en partie compensées par le remboursement immédiat des créances de crédit d’impôt recherche en faveur des PME (-0,3 milliard d’euro) ;
– Le transfert de recettes fiscales en 2011 aux collectivités locales, dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, a un impact négatif de 21 Md€ par rapport à 2010, année toutefois exceptionnelle dans la mesure où les nouvelles taxes créées en remplacement de la taxe professionnelle sont temporairement affectées au budget de l’État et donnent lieu à un versement de compensation aux collectivités depuis le budget de l’État ;
– Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2011 prévoit un ensemble de mesures visant à assurer la pérennité du système de retraite et l’équilibre financier de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES). Le surcroît de recettes fiscales et sociales (4,9 Md€) généré par ces dispositions est transféré dans son intégralité, d’une part aux régimes de sécurité sociale via l’affectation d’une fraction de la TVA brute, et d’autre part à la CADES. Ces recettes, destinées in fine au financement de l’assurance vieillesse et à l’amortissement de la dette sociale, sont donc quasiment neutres sur les recettes de l’État mais ont un impact direct sur le solde public en comptabilité maastrichtienne.
À compter de 2012, les recettes de l’État connaîtraient, à périmètre courant, une évolution moyenne de près de +19 Md€ par an entre 2011 et 2014, due à la fois :
– à une évolution spontanée des recettes traduisant la reprise économique : après une surréaction à la baisse des recettes fiscales affectant les exercices budgétaires 2009 et 2010, les recettes devraient connaître un rattrapage avec une progression spontanée des recettes fiscales nettes comprise entre +15 et +19 Md€ annuels sur 2012-2014 ;
– aux effets de la réduction des niches fiscales, générant conventionnellement environ 2,4 Md€ d’économies annuelles entre 2012 et 2014 pour l’État.
2. Évolution des recettes non fiscales
En 2011, les recettes non fiscales enregistreraient une baisse de 1,7 Md€ par rapport à 2010, à périmètre courant. Cette diminution s’explique principalement par le contrecoup de l’encaissement en 2010 de recettes exceptionnelles, dont notamment le jugement du Tribunal de première instance des communautés européennes relatif à un régime fiscal dérogatoire dont a bénéficié France Télécom (-1 Md€) et l’amende infligée à 11 banques par l’Autorité de la concurrence (-0,4 Md€). Par ailleurs, l’augmentation des prélèvements sur la Caisse des dépôts (+1,0 Md€) serait compensée par une diminution du produit des participations de l’État (-0,9 Md€). Enfin, les prélèvements sur la Coface seraient en diminution de 0,25 Md€.
À partir de 2012, le produit des recettes non fiscales bénéficierait de l’effet de rattrapage économique et connaîtrait une évolution spontanée relativement dynamique, notamment grâce aux revenus des participations de l’État.
3. Évolution du solde des comptes spéciaux
L’évolution du solde des comptes spéciaux est principalement affectée sur l’année 2011 par les opérations de prêts à la Grèce et le remboursement de prêts des constructeurs automobiles. A partir de 2012, le solde des comptes spéciaux reviendrait à une situation proche de l’équilibre.
C. Le solde de l’État
1. En comptabilité budgétaire
L’ensemble des évolutions exposées ci-dessus conduisent à une amélioration continue du solde de l’État sur la période 2011-2014, en euros courants. Le redressement de déficit de l’État serait de près de 20 Md€ par an sur la période 2012-2014. Le déficit budgétaire de l’État atteindrait 44 Md€ en 2014, soit un niveau inférieur à 2008.
*Hors affectations de recettes prises en compte dans les normes de dépense.
** Y compris impact de la réforme de la taxe professionnelle.
2. En comptabilité nationale
Le budget de l’État est établi en comptabilité budgétaire. La présentation de ses comptes selon les règles de la comptabilité nationale est toutefois prévue par l’article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (« le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation joint au PLF explicite chaque année, pour l’année considérée et celle qui précède, le passage du solde budgétaire à la capacité ou au besoin de financement de l’État tel qu’il est mesuré pour permettre la vérification du respect des engagements européens de la France »).
Sur la période, les principaux facteurs d’évolution de la clé de passage permettant de transcrire en comptabilité nationale la programmation établie en comptabilité budgétaire consistent à :
– ramener à l’exercice concerné l’enregistrement de certaines dépenses et recettes du budget général (comptabilité de droits constatés) ; c’est le cas des achats d’équipements militaires, enregistrés en comptabilité nationale uniquement l’année de leur livraison ;
– retraiter des opérations budgétaires en opérations financières ou de patrimoine ;
– intégrer des opérations non budgétaires, principalement des remises de dettes aux États étrangers.
Une fois ces éléments pris en compte, le solde de l’État s’établit comme suit :
Solde de l’État, en comptabilité nationale
|
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
Dépenses en points de PIB |
21,2 |
24,6 |
20,4 |
19,8 |
19,4 |
18,9 |
Recettes en points de PIB |
15,1 |
16,9 |
16,1 |
16,5 |
17,0 |
17,1 |
Solde en points de PIB |
-6,2 |
-7,7 |
-4,3 |
-3,4 |
-2,4 |
-1,8 |
Solde en Md€ |
-117,6 |
-150,0 |
-86,4 |
-70,7 |
-52,3 |
-42,3 |
NB : 0,1 point de PIB représente 1,9 Md€ en 2010, 2,0 Md€ en 2011, 2,1 Md€ en 2012, 2,2 Md€ en 2013 et 2,3 Md€ en 2014
III. PRÉSENTATION DU BUDGET PLURIANNUEL DE L’ÉTAT
A. Périmètre du budget pluriannuel
1. Une discipline appliquée au périmètre de la norme de dépense élargie
Le périmètre du budget triennal doit être suffisamment large pour exercer un réel effet disciplinant sur la dépense de l’État, en évitant les points de fuite, tout en étant circonscrit aux dépenses pour lesquelles l’État dispose d’outils de prévision et de leviers de maîtrise de la dépense en exécution.
Le champ d’application de la norme de dépense de l’État a été élargi lors du projet de loi de finances pour 2008.
C’est sur ce périmètre qu’est construit le budget triennal 2011-2013, comme le précédent budget 2009-2011. Il comprend :
– l’ensemble des crédits du budget général de l’État (y compris la charge de la dette et les pensions des fonctionnaires de l’État) ;
– les prélèvements sur recettes établis au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne, à l’exception des dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle ;
– les créations ou modifications d’affectations de recettes, sauf exceptions explicitées ci-dessous.
Pour assurer la contribution de l’État au redressement des finances publiques, mais également afin d’éviter que les économies issues de la réforme des retraites ne soient recyclées en dépenses pérennes, le budget triennal a été élaboré de manière à respecter une double limite sur chacune des années de la programmation :
– une stabilisation en euros courants (« zéro valeur ») pour les dépenses hors charge de la dette et pensions des fonctionnaires de l’État, c’est-à-dire hors contributions au compte d’affectation spéciale « Pensions » imputées sur le titre 2 ;
– une augmentation au maximum égale à l’inflation (« zéro volume ») sur l’ensemble du périmètre de la norme élargie présenté ci-dessus.
Pour chaque année de la programmation, ces deux règles sont respectées, ce qui conduit en réalité à faire systématiquement application de la plus contraignante.
2. Mesures de périmètre et charte de budgétisation
Le principe du champ constant
Pour apprécier la réalité de la dynamique de la dépense, la norme « 0 volume » et « 0 valeur hors dette et pensions » s’applique et s’apprécie entre deux lois de finances initiales consécutives, à périmètre (ou champ) constant. En effet, le périmètre des dépenses de l’État peut être amené à évoluer d’une année sur l’autre, certaines dépenses ou recettes étant nouvellement inscrites au budget de l’État, d’autres à l’inverse étant débudgétées. Il doit donc être retraité pour apprécier la dynamique réelle de la dépense de l’État sur un périmètre identique (« constant ») entre deux exercices.
Ainsi, seuls sont intégrés au calcul de la norme de dépense les mouvements de dépense et les affectations de recettes ayant pour effet d’accroître ou de diminuer le niveau de la dépense publique. A contrario, les mouvements constituant une simple réimputation au sein du périmètre de la norme élargie (par exemple, entre budget général et prélèvements sur recettes) ou les mouvements équilibrés en recettes et en dépense, entre ce périmètre et une autre entité (par exemple, les collectivités locales), ne doivent pas être comptabilisés dans ce calcul.
Ces mouvements sont appelés mesures de transfert quand ils ont lieu au sein du périmètre de la norme élargie ou mesures de périmètre quand ils ont lieu entre ce même périmètre et une autre entité. Leur prise en compte permet de passer du champ constant au champ courant, sur lequel est effectivement présenté le projet de loi de finances de l’année, mais ils sont sans influence sur l’appréciation de la dynamique du budget.
La charte de budgétisation
L’ensemble des règles qui suivent constituent la charte de budgétisation de l’État, qui permet de déterminer l’évolution de la dépense à champ constant.
Les mesures de périmètre, donnant lieu à des inscriptions ou à l’inverse à des suppressions de crédits qui n’ont pas à être intégrées dans l’évolution des dépenses à champ constant, recouvrent les situations dans lesquelles l’État :
– transfère à une autre entité une dépense qu’il assumait auparavant, en transférant parallèlement les ressources d’un même montant permettant de la financer ;
– inscrit à son budget une dépense nouvelle auparavant financée par un autre acteur, ainsi que les recettes d’un même montant correspondantes ;
– prend en charge une dépense financée auparavant par dotations en capital ou par une entité supprimée.
Les mouvements liés à la décentralisation illustrent le premier cas de figure. Le deuxième correspond à des mesures de rebudgétisation, par exemple la réintégration concomitante au sein du budget général d’une recette affectée à un opérateur et des dépenses qu’elle finance. Le troisième cas de figure, enfin, n’accroît pas la dépense publique ni le déficit public, puisque la dépense existait déjà auparavant et était financée par une recette non prise en compte dans le solde public selon les règles de la comptabilité nationale.
Il convient par ailleurs de préciser les modalités de prise en compte des créations et modifications de recettes affectées dans la norme de dépense.
De manière générale, lorsque l’État affecte une recette à une autre entité sans lui transférer pour le même montant une dépense publique existante, ou au contraire, réintègre au budget général une recette auparavant affectée à un tiers sans inscrire à son budget une dépense publique existante de même montant, le montant déséquilibré de l’affectation ou de la réaffectation est à prendre en compte dans la norme de dépense.
En effet, l’affectation d’une recette supplémentaire induira une dépense publique nouvelle au sein de l’entité qui en bénéficie ; à l’inverse, la reprise d’une recette se traduira par une diminution de ses dépenses. Le cas échéant, si une partie du mouvement est équilibré en recettes et en dépenses, celle-ci est traitée en mesure de périmètre.
Le terme d’affectation recouvre toutefois plusieurs cas de figure : l’État peut en effet décider :
– soit d’affecter tout ou partie d’une recette existante du budget général ;
– soit d’accroître une recette déjà partiellement ou totalement affectée ;
– soit d’affecter une recette nouvellement créée.
Dans le premier cas, le montant déséquilibré de l’affectation de recette dégrade le solde de l’État à due concurrence. Ce montant est dès lors systématiquement pris en compte dans la norme de dépense, sauf lorsque l’affectation contribue à améliorer l’équilibre financier des administrations de sécurité sociale ;
Dans les deux autres cas (neutres sur le solde du budget général), le montant déséquilibré de l’affectation de recettes est par exception considéré comme n’ayant pas d’impact sur la norme de dépense :
– lorsque l’affectation compense une réduction de prélèvements obligatoires affectés à une autre personne morale ; elle n’accroît ainsi pas la dépense publique. C’est le cas de la réforme de la taxe professionnelle ;
– lorsque la recette affectée n’est pas un prélèvement obligatoire, notamment si elle constitue une redevance ;
– lorsque la recette affectée suit une logique de service rendu, les bénéficiaires des missions de service public contribuant directement à leur financement, ou constitue une forme de contrepartie, en application du principe pollueur-payeur ;
– lorsque la recette affectée résulte de la mise en œuvre d’une péréquation interne à un secteur économique et permet ainsi d’éviter le financement d’une dépense publique par l’ensemble des contribuables.
Chaque année, les mouvements de dépense et de recettes considérés comme des mesures de périmètre sont présentés dans l’exposé général des motifs du projet de loi de finances initiale.
B. Nature et portée des autorisations du budget pluriannuel
1. Les plafonds de crédits et les schémas d’emplois fixés dans le budget triennal
a) Les crédits de paiement
Le budget pluriannuel détermine deux niveaux de plafonds de crédits de paiement à respecter en construction de loi de finances initiale chaque année de la période de programmation.
a) Il comporte d’abord, pour chacune des trois années de la programmation, un plafond global de crédits de paiement pour les dépenses soumises à la règle du « 0 valeur hors dette et pensions », conformément à l’article 5 de la présente loi. Ce plafond est indépendant de l’hypothèse d’inflation et correspond, à champ constant, au niveau des crédits fixé en loi de finances initiale pour 2010.
Ce plafond s’inscrit dans le périmètre plus global de la norme élargie (y compris charge de la dette et pensions), qui fixe un plafond global de crédits pour l’ensemble des dépenses de l’État. Ce plafond global n’augmente pas plus vite, entre deux LFI successives, que l’évolution prévisionnelle des prix (article 5 de la présente loi, qui pose le principe de la norme « 0 volume ») associée à la présente loi ou, selon les modalités prévues au III infra, l’évolution prévisionnelle des prix associée au projet de loi de finances de l’année, si celle-ci est différente. Ainsi, ce plafond global peut être revu à la hausse comme à la baisse en cas de révision de l’hypothèse d’inflation.