Mme la présidente. Je rappelle que l’ensemble des amendements tendant à insérer des articles additionnels ont été réservés jusqu’après l’article 33.
Article 32 octies
Le b du 1 du I de l’article 163 quatervicies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« b) À titre individuel et facultatif aux contrats souscrits dans le cadre de régimes de retraite supplémentaire, auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, lorsque ces contrats sont souscrits par un employeur ou un groupement d’employeurs ; ».
Mme la présidente. L'amendement n° 54, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. J’aimerais moi aussi savoir à quelle heure s’achèveront nos débats ce soir. Peut-être en saurons-nous plus sur l’organisation de nos travaux lorsque la commission et le Gouvernement émettront leur avis sur l'amendement n° 54.
Avec cet article 32 octies, nous arrivons au terme de la discussion sur l’ensemble des articles insérés à l'Assemblée nationale par la voie d’amendements déposés par des députés de la majorité. Ceux-ci ont décidé de mettre au cœur de cette réforme le développement des différentes formes de capitalisation, dont le seul objectif est de mettre à bas notre système solidaire.
En créant le titre V bis, relatif à l’épargne retraite, juste avant les dispositions finales de ce projet de loi, c’est donc en forme de bouquet final, destructeur de notre système par péréquation, que les députés ont choisi de terminer ce texte.
Ainsi, au terme de ce projet, ils ont tenu à mettre en place tout un système de possibilités et de contraintes forçant la mise en place de comptes épargne retraite pour créer les conditions d’une individualisation à venir.
Alors que chacun reconnaît que notre système de retraite est confronté à un problème de financement et que les finances publiques sont au plus mal, l’ensemble des mesures ici préconisées vont, une nouvelle fois, contribuer à vider les caisses.
De nouvelles ressources seront défiscalisées et exemptées de cotisations sociales. De ce fait, elles seront aussi soustraites aux cotisations retraite. Plus précisément, cet article 32 octies vise à réécrire l’article 163 quatervicies du code général des impôts, qui prévoit la déductibilité du revenu net global, soumis à l’impôt sur le revenu, des cotisations et des primes versées au profit d’un compte épargne retraite.
Cette mesure vise, plus précisément, à rendre plus attractifs fiscalement les contrats épargnes obligatoires mis en place par les employeurs. Aussi connaissant notre opposition à ce type de contrat d’épargne, vous ne serez pas étonnés que nous vous demandions la suppression de cet article.
Mais ce qui me surprend le plus, c’est que vous ayez accepté de faire figurer dans un texte quelque chose qui aggrave notre situation fiscale au moment où vous nous dites que vous allez faire en sorte de réduire les niches fiscales dans la prochaine loi de finances. Il y a quand même des contradictions qu’il est bon de souligner au moment où l’on débat des questions de retraite ! Nos propositions n’ont, quant à elles, rien à voir avec de la fiscalisation !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l’amendement n °54.
Mme Marie-France Beaufils. J’interviens pour une explication de vote, mais surtout pour une remarque. En soulevant cette question de la fiscalisation, je pensais quand même provoquer une réaction du Gouvernement !
M. Charles Gautier. Il s’en moque !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 32 octies.
(L'article 32 octies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 32 octies (réservés)
Mme la présidente. Je rappelle que l’ensemble des amendements tendant à insérer des articles additionnels ont été réservés jusqu’après l'article 33.
TITRE VI
DISPOSITIONS FINALES
Article 33
I. – L’article 3 entre en vigueur le 1er janvier 2012.
II. – Les articles 5 à 20 bis, 26, 27 quater et 27 quinquies sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011.
III. – L’article 22 entre en vigueur le 1er juillet 2011 et est applicable aux demandes de pension déposées à compter de cette date.
IV. – L’article 25 est applicable aux expositions intervenues à compter d’une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2012.
IV bis. – L’article 29 bis est applicable aux demandes d’allocation de veuvage déposées à compter du 1er janvier 2011.
V. – L’article 30 est applicable aux indemnités journalières d’assurance maternité versées dans le cadre des congés de maternité débutant à compter du 1er janvier 2012.
VI. – (Supprimé)
VII (nouveau). – Le IV de l’article 32 ter est applicable aux droits à participation attribués au titre des exercices clos après la promulgation de la loi n° … du … portant réforme des retraites.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Mauroy, sur l’article.
M. Pierre Mauroy. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens au lendemain de la sixième journée d’action organisée par les syndicats, par les lycéens, par des groupes de différentes natures, dans le cadre d’un conflit qui, manifestement, s’élargit et pose de très gros problèmes à la nation et à la population.
On nous dit que M. Sarkozy veut essayer de trouver la sortie. Ce n’est pas en force qu’il faut essayer de trouver la sortie ! C’est naturellement en faisant des propositions qui puissent aller dans le sens d’une réunion, d’une discussion, d’une négociation. Il est toujours possible d’arriver finalement au but, c’est-à-dire à une retraite qui donne satisfaction aux Françaises et aux Français.
M. Roland Courteau. Oui !
M. Pierre Mauroy. Je suis intervenu vendredi et, monsieur le ministre, à cette occasion, vous avez fait de l’ironie. Vous avez dit que moi-même – et au-delà de ma personne, les sénateurs socialistes – que la gauche, donc, aimait les chiffres ronds. Je ne comprends pas ce que les chiffres ronds ont à voir avec le débat qui est le nôtre !
Moi, je ne suis pas banquier ! Je ne remue pas des liasses d’argent ! Je ne sais pas ce que sont les chiffres ronds par rapport aux autres chiffres ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
J’avoue, d’ailleurs, que les chiffres des victoires de la gauche ne sont pas nécessairement des chiffres ronds. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
En effet, 1848, ce n’est pas un chiffre rond ! 1871, ce n’est pas un chiffre rond ! 1936 – dont on n’a peut-être pas suffisamment parlé– n’est pas davantage un chiffre rond ! Pas plus d’ailleurs que les autres chiffres… Passons sur cela.
J’en viens au véritable problème en discussion, la retraite à 60 ans, que j’ai évoquée la dernière fois. Je ne vais pas y revenir.
Simplement, puisqu’on a parlé des chiffres ronds, de l’amour que je leur porte, voire de ma nostalgie pour une retraite à 60 ans, je dois dire que ces propos ont tout de même eu une résonnance dans le pays. Peut-être en avez-vous trouvé l’écho dans la revue de presse que vos collaborateurs ne sauraient manquer de vous faire.
Moi, j’en ai beaucoup entendu parler ! De retour à Lille, j’ai vu comment tout le monde avait réussi à capter ce message, j’ai vu qu’au fond tout le monde reste attaché à la retraite à 60 ans et qu’il n’est pas possible de jeter cette retraite à 60 ans dans les oubliettes de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Cela, ce n’est pas possible ! Par conséquent, il faut la prendre en considération.
J’en viens ensuite au problème de la réforme. Nous sommes attachés à la réforme. De temps en temps, on nous dit même que nous sommes des réformistes. Sans doute est-ce vrai.
M. Jacques Gautier. Il y a longtemps que c’est fini !
M. Pierre Mauroy. Nous sommes attachés à la réforme. M. Sarkozy s’y dit également attaché. Oui ! Mais il y a de bonnes réformes et il y a de mauvaises, de très mauvaises réformes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Par conséquent, il faut rester dans le registre des bonnes réformes, celles qui plaisent au peuple, à la majorité des Françaises et des Français. Et, manifestement, la réforme que nous proposons – et nous ne sommes pas les seuls – va dans le bon sens. Par conséquent, il ne faut pas l’oublier.
J’ajoute que, chemin faisant, on discute un peu de tous les problèmes. Certes, on en laisse beaucoup sur le côté, mais peut-être aurons-nous l’occasion d’y revenir.
En tout cas, la retraite à 60 ans, ce n’est pas possible qu’elle aggrave la situation des jeunes ! Ce n’est pas possible qu’elle aggrave la situation des seniors !
C’est quand même un comble que ces seniors, les uns les mettent à la porte de plus en plus rapidement et, par conséquent, de plus en plus jeunes, et que les autres fassent une réforme pour, finalement, leur fermer la porte qui accède à la retraite. Cela, c’est vraiment inimaginable !
Et je suis persuadé qu’ils en garderont le souvenir ! En effet, vous pouvez bomber le torse, vous pouvez vous targuer de la majorité que vous avez ici, qui vous permettra de vous en sortir. Oui ! Mais je sais bien qu’en définitive, cette majorité, elle sera relative parce qu’il y aura un autre appel, l’appel devant le peuple. Et cette fois-là, ce sera la grande élection qui tranchera le problème, celui de la retraite en particulier, mais bien d’autres problèmes aussi.
Je suis persuadé que, sur ce plan-là, vous marquez de mauvais points vis-à-vis du peuple par les positions qui sont les vôtres.
Quoi qu’il en soit, tous les sondages – dont je n’abuse pas – le montrent, la grande majorité des Françaises et des Français sont à plus de 50 %, à plus de 60 % – ce matin, c’était à plus de 65 % – contre la réforme que vous envisagez. De cela, vous devez tenir compte.
Finalement, le Gouvernement se positionne, ou plutôt se réfugie, dans une position de faiblesse qui sera jugée par le peuple, au-delà même des péripéties des votes dans cette assemblée.
Mais les votes dans cette assemblée ont leur importance. On connaît la réputation qu’a eue le Sénat sous la Troisième République. On connaît la réputation qu’il a eue sous la Quatrième République, qui en avait fait un Sénat croupion. On connaît la réputation qu’il avait au début de la Cinquième République, une réputation qui lui valait de s’entendre dire qu’il fallait véritablement le réformer !
Méfiez-vous ! Le Sénat ne doit pas redevenir la chambre noire de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
Il doit, au contraire, voter des propositions, des réformes qui sont attendues par le peuple et prendre des dispositions pour qu’il en soit ainsi. Faute de quoi, vous aurez des lendemains difficiles, comme vos prédécesseurs sénateurs ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Pierre Mauroy. Que me dites-vous, madame ? Je commence à peine, comme chacun l’aura sans doute deviné ! (Rires sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Merci de bien vouloir terminer votre intervention !
M. Pierre Mauroy. Madame, combien de temps m’accordez-vous ?
Mme la présidente. Terminez ! Vous avez déjà dépassé votre temps de parole !
M. Charles Gautier. À peine !
M. Pierre Mauroy. Vous pouviez m’avertir, madame !
Je veux quand même apporter une conclusion. Ma conclusion, c’est qu’il y a deux problèmes fondamentaux.
Le premier, c’est naturellement la durée. Combien faudra-t-il d’annuités pour la retraite ?
Cette mesure dépasse le volet social et s’étend à la civilisation. La vie s’allonge. Il faut donc en tirer les conséquences, y compris sur le plan des retraites. (Manifestations d’impatience sur les travées de l’UMP.) La première secrétaire du parti socialiste s’est exprimée sur cette question. (Protestations sur les mêmes travées.)
Laissez-moi terminer, je vous en prie ! (Les protestations redoublent.)
M. Gérard César. C’est terminé !
M. Roland Courteau. Vous ne respectez rien !
M. Jean-Pierre Caffet. Vous êtes minables !
M. Pierre Mauroy. Le chahut, j’en ai l’habitude ! Toutes les mesures sociales que j’ai présentées alors que j’étais Premier ministre, je les ai présentées devant une droite vent debout ! (Les protestations reprennent, couvrant la voix de l’orateur.) Cela, vous avez oublié de le rappeler !
Mais nous, nous le savons et nous pensons que vous devez nous écouter ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Par conséquent, il faut tenir compte de cette donnée de la durée. Mais il faut aussi…
Mme la présidente. Merci, monsieur le Premier ministre !
M. Pierre Mauroy. Non, madame ! Je termine !
Il faut aussi tenir compte de l’assiette. Ce ne sont pas les salariés seuls qui peuvent payer ces retraites. Il faut, par conséquent, élargir l’assiette et l’élargir sans doute au capital.
M. Alain Vasselle. Il faut lui couper la parole !
M. Pierre Mauroy. J’avais des propositions à vous faire sur ce plan. En tout cas, je vous dis que, si vous ne prenez pas une mesure que le peuple attend,…
M. Rémy Pointereau. Coupez-lui le micro !
M. Pierre Mauroy. … il y aura des conséquences qui seront redoutables ! Ne prenons pas ce chemin ! Il y a un chemin qui permettrait d’accorder à chacun une retraite convenable. Ce sont ces propositions que nous faisons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. L’amendement n° 1156, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Lors de la discussion de l’article 3, nous avons indiqué les réticences que nous nourrissions à l’égard des dispositions introduites, mais également les avancées potentielles de ce droit à l’information.
En effet, l’article 3 vise à renforcer l’information dispensée aux assurés en matière de retraite, d’une part, en prévoyant de leur fournir une information générale sur le système de retraite dès leur première acquisition de droits à la retraite, et, d’autre part, en créant un entretien personnalisé à partir de l’âge de 45 ans.
Pourtant, à l’alinéa 1 de l’article 33, l’entrée en vigueur de cette obligation est différée, l’Assemblée nationale l’ayant d’ailleurs repoussée du 1er juillet 2011 au 31 décembre 2012.
Selon nous, toute disposition de nature à améliorer le droit à l’information des assurés sociaux sur les différents régimes de retraite doit entrer immédiatement en vigueur.
Le droit d’information a été institué par la loi de 2003, qui prévoit la fourniture automatique, tous les cinq ans à partir de 35 ans, d’un relevé de situation individuelle et, à partir de 55 ans, d’une estimation indicative globale du montant de la pension. Cette mission est jusqu’à présent assurée par le GIP Info Retraite.
Dans ce cadre, l’article 3 représente, certes, une avancée en permettant aux salariés de disposer de ces informations plus tôt.
Pourtant, sur le fond, nous craignons que ce « point d’étape retraite » soit utilisé non seulement pour informer les assurés, mais aussi pour promouvoir la souscription de produits financiers, et donc la retraite par capitalisation.
Comme nous vous le rappelions lors de l’examen de ce même article 3, selon l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, il est prévu que cet entretien portera notamment « sur les avantages respectifs des différents dispositifs d’incitation à la prolongation d’activité ainsi que sur les dispositifs leur permettant d’améliorer le montant futur de leur retraite ».
Le « point étape retraite » à 45 ans risque malheureusement de se transformer en une information orientée, pour ne pas dire une incitation systématique à recourir aux plans d’épargne retraite.
Bien que nous soyons attachés au droit à l’information, nous demandons cependant la suppression de l’alinéa 1 de l’article 33 qui repousse son entrée en vigueur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 241, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. L’article 33 fixe les conditions d’entrée en vigueur de plusieurs dispositions du projet de loi.
En ce qui concerne l’amélioration du droit à l’information des assurés, nous n’avons pas grand-chose à dire. Là où ça se gâte, c’est sur les conditions d’entrée en vigueur des articles 5 à 20, 22, 25 et 30, autant de mesures que nous avons rejetées en bloc. Je veux parler du relèvement des deux bornes d’âge, de 60 à 62 ans et de 65 à 67 ans.
Il s’agit, globalement, d’une politique barbare.
Nous contestons le bien-fondé de cette réforme d’une manière générale, car celle-ci ne répond pas aux réels enjeux de la question des retraites. Vous vous placez sur le terrain de la démographie quand c’est d’orientation économique qu’il conviendrait de discuter.
Le recul de l’âge pour obtenir une retraite à taux plein lorsque l’on n’atteint pas le nombre d’annuités requises pour y prétendre avant est l’exemple même du caractère idéologique et inhumain de ce texte. Nous ne cesserons de vous le répéter, qui sera dans l’impossibilité de satisfaire à cette exigence, sinon, principalement, les femmes et les personnes ayant eu une carrière mouvementée, hachée ? Nous croyons, pour notre part, qu’il s’agit de personnes fragiles, précaires et ayant connu une vie difficile.
À 65 ans, bien des gens ont effectué une carrière complète ou quasi complète. À court terme, la grande majorité, si ce n’est l’ensemble des Français qui atteindront cet âge auront cotisé le temps requis, à l’exception, je le redis, des femmes qui jonglent avec des périodes de temps partiel le plus souvent subi, de chômage, d’inactivité, et les personnes ayant eu des carrières brisées, heurtées, inhabituelles.
Pour nous, réforme est synonyme de progrès. Quand un texte qui se veut réformateur fragilise encore davantage des catégories précaires, il se pare d’atours qu’il ne mérite pas. Nous sommes résolument opposés au recul de l’âge de départ à la retraite à 62 ans et de l’âge de départ à la retraite à taux plein à 67 ans. Si certains veulent travailler plus, la loi les y autorise, mais que ceux qui veulent s’arrêter parce que la vie ne leur a déjà pas fait beaucoup de cadeaux le puissent, voilà qui me semble une réelle avancée. La solidarité doit continuer à avoir un sens dans notre pays.
Par cohérence avec toutes nos déclarations, nous demandons la suppression de l’alinéa fixant les conditions d’entrée en vigueur des dispositions de ce texte, qui est loin de marquer un progrès de société acceptable par nous. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L’amendement n° 1157, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer les références :
26, 27 quater et 27 quinquies
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Il s’agit d’un amendement de pure forme mais ô combien symbolique.
Nous vous proposons de supprimer, à l’alinéa 2 de cet article 33, les références aux articles 26, 27 quater et 27 quinquies, pour la simple et bonne raison que ces articles ont été supprimés lors du passage du texte en commission.
Cela démontre, alors que le sujet est tout de même sérieux puisqu’il a trait aux conditions d’existence des plus de 60 ans, de leur pouvoir d’achat, ainsi que de leur droit à la retraite, la précipitation dont vous faites preuve sur le sujet.
Cela démontre également la confusion qui a régné lors des travaux de la commission des affaires sociales afin d’élaborer le texte dont nous sommes en train de débattre.
Pour simple rappel, les articles ainsi supprimés concernaient l’abaissement de la condition d’âge pour le départ à la retraite et le bénéfice du taux plein au profit des assurés justifiant d’une incapacité permanente au titre d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle, ainsi que l’extension aux salariés agricoles et non agricoles du dispositif relatif à la pénibilité.
La commission a fait le choix de supprimer ces articles insérés lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale pour en transférer le contenu dans d’autres articles.
Il faut maintenant que l’article 33 en tienne compte. Tel est le sens de cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 1213, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les références :
26, 27 quater et 27 quinquies
par les références :
27 ter AC, 27 ter AF et 27 ter AG
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 241 et 1157.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L’amendement n° 1213 est un simple amendement de coordination.
Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 241 et 1157.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 1213 et défavorable aux amendements nos 241 et 1157.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Sincèrement, l’avis défavorable de la commission et du Gouvernement sur l’amendement n° 1157 me surprend, puisque nous proposons ni plus ni moins de supprimer des références que la commission elle-même entend supprimer dans son propre amendement n° 1213 !
Pour le coup, monsieur le rapporteur, votre avis n’est pas à la hauteur du travail que l’on a pu fournir dans ce débat. Ce n’est pas respectueux ! Dès lors qu’il s’agit d’amendements de notre groupe, vous les traitez quelque peu à la va-vite. Croyez bien que je le regrette. Que nos propositions ne vous conviennent pas, je peux évidemment le comprendre puisque nous défendons une autre réforme pour notre système de retraite par répartition. Mais ayez tout de même un minimum de respect pour notre travail et pour celui de nos collaborateurs, qui ont beaucoup travaillé au cours des trois dernières semaines !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Madame David, je n’admets pas que vous puissiez tenir de tels propos à mon égard. Vous me connaissez, et vous savez que je n’ai pas l’habitude d’agir comme vous le décrivez !
J’étais, c’est vrai, en train d’étudier un amendement à venir, et je n’ai pas vu le vôtre arriver.
Mme Annie David. Vous l’avez donc rejeté !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je vous en prie, un peu de respect, cela ne fera pas de mal ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
Mme Annie David. C’est vous qui devriez être plus respectueux !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Mes chers collègues, nous nous connaissons trop pour savoir qu’il faut relativiser certains propos.
Par son amendement, la commission propose non pas de supprimer les références auxquelles vous avez fait allusion, mais de les remplacer par d’autres. Il y a tout de même un petit distinguo entre votre amendement et le nôtre, que je n’avais effectivement pas souligné, et je vous prie de bien vouloir m’en excuser.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Vous venez, monsieur le rapporteur, de nous parler de respect. (Ah ! sur plusieurs travées de l’UMP.) Permettez-moi de vous rappeler que, ce qui aurait été respectueux, dans le cadre du projet de loi, c’eût été de discuter réellement avec les organisations syndicales. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Cela vous gêne dès que l’on évoque les organisations syndicales, d’autant qu’en ce moment elles sont dans la rue et montrent au peuple de France que ce texte est mauvais. Sans doute aurait-il été plus intelligent, pour « respecter » la démocratie, d’intervenir bien en amont et de faire comme beaucoup d’autres pays.
M. Roland Courteau. La Suède !
M. Jacques Mahéas. En Suède, par exemple, la discussion a duré des mois et des mois.
Les uns et les autres, nous sommes conscients de la nécessité d’engager une réforme des retraites. Mais il doit s’agir d’une bonne réforme, comme disait Pierre Mauroy, acceptable par tous.
C’est tout le contraire avec ce projet de loi, qui brime nombre de nos concitoyens quand il en favorise d’autres. L’article 33 en est la parfaite illustration.
Les dispositions relatives à l’entrée en vigueur de la réforme auraient pu être beaucoup plus étalées dans le temps. Je reprends le cas, que j’ai déjà évoqué, de cette femme ayant commencé à travailler à 14 ans : certes, grâce à une petite adaptation législative, elle peut espérer partir à la retraite à 58 ans ; mais au bout du compte, elle aura cotisé quarante-quatre ans, c’est-à-dire plus que le maximum exigé.
En règle générale, les personnes dans des situations analogues exercent des métiers difficiles, souvent pénibles, qui n’exigent pas une grande qualification ; leur volet études est extrêmement restreint. Vous les pénalisez donc doublement.
Le passage de 65 à 67 ans est tout aussi pénalisant. Il vous a été dit et répété que ce seront souvent les femmes, ayant des carrières plus hachées et confrontées à des difficultés particulières, qui seront les premières visées.
Vous n’avez pas l’habitude, je me dois de le dire, de laisser des laps de temps suffisants pour permettre à nos concitoyens de réfléchir aux conséquences de vos décisions sur leur situation. Vous demandez aux infirmières de décider, si, oui ou non, elles préfèrent passer de la catégorie B à la catégorie A. Mais, pour faire leur choix, elles ne disposent que d’un délai ridicule ! Et actuellement, nombre d’entre elles reçoivent des missives leur intimant de prendre une décision.
Je voudrais terminer sur le problème des fonctionnaires. Lorsque vous entrez dans la fonction publique, c’est un choix, vous en connaissez la grandeur, les difficultés et les avantages. Or vous rognez ces derniers. Il y a donc rupture de contrat entre l’État et le fonctionnaire, à qui il est demandé à la fois de rendre un travail de qualité et d’effectuer un certain nombre d’années de service.
D’ores et déjà, vous ne remplacez pas un poste de fonctionnaire sur deux partant en retraite. Voilà une décision qui, au-delà de déplaire fortement, pénalise fortement les enseignants, puisque les remplacements ne sont plus assurés.
Il y a, disais-je, rupture de contrat. Dès lors que de telles mesures sont prises, tout doit être étalé dans le temps, les discussions préalables comme la mise en œuvre. Ce n’est pas ce que vous faites ici. Votre décision tombe comme un couperet.
C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste défend ces amendements ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)