Mme la présidente. L'amendement n° 1151, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Selon l’expression consacrée, on ne va pas tourner autour du pot : l’article 32 quinquies vise à obliger, par un moyen détourné, l’ensemble des salariés d’une entreprise à souscrire au dispositif d’épargne retraite.
Comme cela a été dit, ce serait une étape supplémentaire dans la mise en place du système de retraite par capitalisation que vous souhaitez voir concurrencer de façon déloyale notre système solidaire de retraite par répartition.
Je dis « déloyale », car la faillite que vous organisez aurait pour conséquence des pensions devenues dérisoires tant elles seraient faibles, ou inatteignables du fait des mesures d’âge que vous instaurez.
Cette faillite programmée s’accompagne d’une véritable campagne de promotion de la capitalisation.
Nous l’avons dit tout au long de ce débat, nous assistons à un lent mouvement de mainmise des intérêts privés sur la manne de capitaux que représentent les pensions de nos concitoyens.
Je rappelle qu’il s’agit d’un marché de 230 milliards à 275 milliards d’euros chaque année, que les banques et les compagnies d’assurances ne sauraient laisser échapper.
C’est la raison pour laquelle subordonner, comme le fait cet article, la mise en place de certains régimes de retraites, destinés aux cadres dirigeants d’entreprises, à l’ouverture obligatoire de dispositifs d’épargne retraite nous semble inacceptable.
Cela contribuerait à programmer inéluctablement la faillite de notre actuel système de retraite.
C’est la raison pour laquelle nous souhaitons, par cet amendement, supprimer la possibilité de mettre en place ces fameux régimes chapeaux sous condition d’ouverture obligatoire d’un contrat d’épargne retraite à prestations ou à cotisations définies.
Mme la présidente. L'amendement n° 1152, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Je voudrais d’abord, très respectueusement, madame la présidente, vous faire une observation.
Alors que mon amendement est inscrit sur le dérouleur en premier, vous l’avez appelé en quatrième position. Je trouve cela tout à fait anormal. (Rires sur les travées de l’UMP.) C’est pourquoi je me permets d’élever une protestation parfaitement légitime, me semble-t-il.
Mme la présidente. Monsieur Autain, permettez-moi, tout aussi respectueusement, de vous en donner les raisons.
L’amendement n° 623 ayant été supprimé, on a remis le vôtre à la place où il devait être, c’est-à-dire avec les trois amendements en discussion commune.
M. François Autain. Je ne vois pas en quoi la suppression de l’amendement n° 623 rétrograde automatiquement mon amendement en fin de liste. Je trouve cela totalement injuste et incompréhensible ! (Nouveaux rires sur les mêmes travées.)
Mme la présidente. Monsieur Autain, continuons !
M. François Autain. Les explications que vous m’avez données ne m’ont pas totalement satisfait, mais je m’en contenterai. (Sourires.)
M. Jean-Patrick Courtois. Quelle bonté !
M. François Autain. En défendant nos amendements précédents sur cet article 32 quinquies, nous avons eu l’occasion de dire et de répéter notre opposition à ce mécanisme qui lie l’ouverture d’un régime de retraite, qu’on a l’habitude d’appeler « chapeau » – ce terme n’est pas vraiment approprié –, à un plan ou à un contrat d’épargne retraite bénéficiant à tous les salariés dans l’entreprise.
Je sais que le temps presse, mes chers collègues, et que nous devons en terminer le plus rapidement possible… (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.) Je ne reviendrai donc pas sur le fond de notre argumentation.
Les deux précédents amendements que nous avons présentés visaient ainsi à supprimer les dispositions énumérées dans le I de cet article, qui tendent à subordonner la mise en place de ces régimes dits chapeaux – l’expression est vraiment impropre –, réservés aux cadres dirigeants d’une entreprise, à l’ouverture, pour l’ensemble des salariés, d’un régime de retraite supplémentaire auquel l’affiliation est obligatoire, les plans d’épargne pour la retraite collectifs, ou contrats d’épargne retraite à prestations ou à cotisations définies.
Un second cas de figure est visé par le II de cet article, celui des entreprises qui disposeraient déjà d’un régime chapeau. Il est prévu de les obliger à se mettre en conformité avec les dispositions précédentes, avant le 31 décembre 2012.
Mes chers collègues, ce n’est pas tant le délai qui nous préoccupe que le principe même d’obliger les entreprises et leurs salariés à développer l’épargne retraite.
Aussi, nous vous demandons, à travers cet amendement n° 1152, de supprimer le II de cet article 32 quinquies. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 1150, 1151 et 1152. Il est en revanche favorable à l’amendement n° 1212.
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Gautier, pour un rappel au règlement.
M. Charles Gautier. Ce rappel se fonde sur l’article de notre règlement relatif à l’organisation des séances.
Nous avons entendu beaucoup de choses dans cet hémicycle cet après-midi. Il nous a été rappelé longuement que nous vivions dans une démocratie parlementaire et, en conséquence, que notre assemblée ne devait pas céder à la pression extérieure.
M. Jean-Pierre Fourcade. Exactement !
M. Charles Gautier. J’ai cru comprendre qu’il était ainsi fait allusion à la pression de la rue.
Il se trouve que j’ai entre les mains la copie d’une dépêche de l’AFP, tombée ce soir à dix-huit heures quatorze.
M. Nicolas About. Il ne faut pas plus céder à la pression de la presse qu’à celle de la rue !
M. Robert del Picchia. L’AFP, ce n’est pas la Bible !
M. Charles Gautier. Cette dépêche fait référence aux déclarations du secrétaire général de l’Élysée, lequel somme le Sénat de presser le pas… (Exclamations indignées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Cela ne risque pas d’arriver !
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
M. Laurent Béteille. C’est vous qui avez fait appel au Président de la République !
M. Charles Gautier. Ce titre de dépêche résume toute mon intervention. (Brouhaha sur toutes les travées.)
Le fait que le Sénat reçoive une telle injonction d’une composante de la République qui n’a aucun mandat pour s’adresser de la sorte aux chambres me semble poser un véritable problème.
C’est pourquoi je souhaiterais que le bureau du Sénat donne son point de vue sur le sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Article 32 quinquies (suite)
Mme la présidente. Nous reprenons l’examen de l’article 32 quinquies.
La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote sur l’amendement n° 1150.
M. Jacques Muller. Cet article 32 quinquies pose le problème du lien entre les retraites chapeaux et le développement des PERCO.
Cette articulation pose un problème éthique majeur, que mes collègues ont déjà abordé, et sur lequel je ne reviendrai pas.
Mais l’essor des PERCO pose aussi un problème macro-économique de première ampleur, qui n’a pas encore été abordé dans cet hémicycle. Il reflète en effet le développement de l’économie financière, ou économie casino, qui suscite l’inquiétude de nombreux experts et chefs d’entreprises.
Cette économie casino repose sur deux piliers : le prélèvement de dividendes extrêmes sur la valeur ajoutée des entreprises, à hauteur de 230 milliards d’euros aujourd’hui, et, plus inquiétant encore, le fait que cette manne financière ne soit pas investie.
Je voudrais en effet attirer votre attention, mes chers collègues, sur la confusion opérée par la presse dite spécialisée entre les « investissements » et les « placements ».
En effet, selon la définition rigoureuse de la comptabilité nationale, l’investissement, ce n’est pas le placement financier, mais la formation brute de capital fixe, c’est-à-dire, concrètement, l’augmentation des moyens de production dans les entreprises, la création d’infrastructures et de logements, y compris de logements sociaux, dont nous aurions grand besoin aujourd’hui. Je rappelle que nous avons célébré, le 17 octobre dernier, la journée mondiale de lutte contre la misère, qui consacre le droit au logement comme un droit humain fondamental.
Ce déficit de formation brute de capital fixe pose un certain nombre de problèmes. On peut tout d’abord estimer que cette multiplication des placements financiers et cet essor de l’économie casino s’apparentent à de la thésaurisation. Autrefois, nos grands-parents plaçaient de l’argent liquide sous leurs matelas. Aujourd’hui, ce sont des sommes considérables qui sortent du circuit économique sans être investies.
Il en résulte une pression inouïe sur les entreprises, mais aussi sur le monde du travail, lorsqu’il s’agit de partager la valeur ajoutée entre salaires et profits, de même qu’une pression considérable sur les normes environnementales. Je rappellerai ici l’abandon de la taxe « Sarkozy-carbone » au nom de la concurrence internationale.
Au final, cette économie financière se traduit par la formation de bulles, dont l’éclatement est tout aussi imprévisible qu’inéluctable, ainsi qu’en témoignent les exemples qui ont jalonné l’histoire.
Il serait aujourd’hui de notre responsabilité de cesser d’alimenter cette bulle financière, notamment en voulant développer des plans d’épargne retraite qui y contribuent largement.
C’est la raison pour laquelle je voterai cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 1151 et 1152 n’ont plus d'objet.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'article 32 quinquies.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste votera contre cet article, pour plusieurs raisons.
Premièrement, M. le ministre répète à l’envi que ce texte est fait pour sauver la retraite par répartition. À l’évidence, l’article 32 quinquies ne participe pas de cet objectif, puisqu’il traite des retraites chapeaux : on est loin de la répartition !
Deuxièmement, comme l’amendement n° 1212 le démontre aisément, nous abordons, au détour d’un texte censé sauver la retraite par répartition, des sujets qui ont trait à l’épargne salariale. Si vous aviez voulu réformer la retraite au moyen de l’épargne salariale, peut-être eût-il mieux valu y consacrer un texte entier, monsieur le ministre.
La comparaison du texte adopté par l’Assemblée nationale et de celui proposé par la commission des affaires sociales du Sénat, à laquelle je me suis livrée, révèle d’ailleurs une divergence d’appréciation quant au champ d’application de cet article 32 quinquies.
Notre collègue Philippe Marini étant de retour parmi nous, il est en mesure d’assurer sa défense. Je vais donc pouvoir le citer !
M. Guy Fischer. C’est lui qui tire les ficelles !
Mme Nicole Bricq. Selon la dépêche invoquée par notre collègue Charles Gautier, nous poursuivrions les manœuvres dilatoires. Je signale tout de même à M. Guéant que nos amendements – c’est aussi le cas de ceux de la majorité, mais pas de ceux du Gouvernement – ont été déposés le 5 octobre. Nous ne prenons donc personne par surprise : nous nous contentons de défendre nos positions, et nous ne nous livrons à aucune manœuvre dilatoire.
Je pense que vos hésitations relatives au champ d’application de cet article tiennent à ce que les retraites chapeaux, qui sont qualifiées de « régimes de retraite supplémentaires à prestations définies » dans le projet de loi, ne concernent qu’une catégorie limitée de personnes situées au sommet de l’échelle sociale, par exemple des mandataires sociaux, qui peuvent en même temps être salariés.
Il n’est pas aisé de débusquer ces retraites chapeaux, nichées au beau milieu de l’épargne salariale.
M. Philippe Marini. Encore des niches !
Mme Nicole Bricq. Dès lors, je comprends vos hésitations, qui ressortent d’ailleurs de la rectification opérée par la commission des affaires sociales.
Dans Le Monde daté du 19 octobre, vous prétendez, monsieur Marini, que la taxation accrue des retraites chapeaux provoque des crispations, que vous expliquez par le fait que les Français sont attachés à leurs intérêts particuliers. Vous précisez également que les dirigeants d’entreprises ne sont pas les seuls concernés, que les cadres le sont également. Je vous rappelle quand même que seule une minorité de Français est concernée.
M. Philippe Marini. C’est gentil de me citer, madame Bricq !
Mme Nicole Bricq. On comprend mieux le débat qui nous a occupés cet après-midi !
C’est une troisième raison pour voter contre cet article, la quatrième étant liée à l’argument avancé par M. Fourcade, sans cesse ressassé depuis le vote en 2007 de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA.
Tout le discours du Gouvernement et de la majorité justifiant l’existence du paquet fiscal reposait sur deux arguments : ce dispositif était censé relancer la croissance – nous avons vu ce qu’il en a été ! – et éviter l’exil de ceux qui contribuent à la richesse du pays.
Je vous rappelle, monsieur Fourcade, que nous avions adopté un amendement, déposé sur mon initiative, visant à demander des comptes au Gouvernement sur les effets du dispositif en termes de retour des exilés fiscaux.
M. Guy Fischer. On attend toujours !
Mme Nicole Bricq. Nous n’avons jamais reçu ce rapport !
De grâce, ne nous resservez pas, encore une fois, ce plat réchauffé : il est indigeste !
Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons contre cet article. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. La majorité de mon groupe votera contre cet article, pour les raisons excellemment soulignées par Mme Bricq.
Je voudrais insister sur un autre point, que j’ai déjà évoqué hier. On arrive, avec les retraites chapeaux, à des écarts de revenus entre retraités encore plus importants que lorsque les gens sont en activité. Nos concitoyens ne l’acceptent pas !
Le Gouvernement aurait dû s’attacher à réduire ces écarts de revenus. Si l’on peut comprendre qu’il existe des écarts de revenus importants lorsque les gens sont en activité, dans la mesure où ceux qui occupent de hauts postes apportent une valeur ajoutée sur le plan économique, ces écarts doivent être réduits – sans viser bien sûr l’égalité ! – lorsque les gens sont à la retraite.
Ce signe fort aurait donné un certain espoir à ceux de nos concitoyens qui perçoivent de faibles retraites.
Vous n’avez pas voulu le faire, car vous voulez protéger ceux qui ont déjà des privilèges, et leur en donner d’autres. Même si ce n’était pas votre objectif de départ, comme vous le dites, le résultat est là !
Surtout, nos concitoyens ne l’acceptent pas, et je ne peux que leur donner raison. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32 quinquies, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement se sont prononcés pour l’adoption de cet article.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 71 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 170 |
Pour l’adoption | 184 |
Contre | 154 |
Le Sénat a adopté.
Articles additionnels après l'article 32 quinquies (réservés)
Mme la présidente. Je rappelle que l’ensemble des amendements tendant à insérer des articles additionnels ont été réservés jusqu’après l’article 33.
Article 32 sexies
Après le onzième alinéa de l’article L. 132-22 du code des assurances, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les contrats liés à la cessation d’activité professionnelle, l’entreprise d’assurance ou de capitalisation fournit, dans cette communication, une estimation du montant de la rente viagère qui serait versée à l’assuré à partir de ses droits personnels. Elle précise, le cas échéant, les conditions dans lesquelles l’assuré peut demander le transfert de son contrat auprès d’une autre entreprise d’assurance, d’une mutuelle ou d’une institution de prévoyance. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 52 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche.
L’amendement n° 476 est présenté par Mme Demontès, MM. Bel, Teulade, Le Menn, Godefroy et Daudigny, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Printz, MM. Cazeau, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Ghali, Alquier, Campion et San Vicente-Baudrin, MM. Gillot, S. Larcher, Domeizel, Assouline et Bérit-Débat, Mmes M. André, Blondin, Bourzai et Khiari, MM. Bourquin, Botrel, Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume, Haut, Mahéas, Mirassou, Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l’amendement n° 52.
M. Bernard Vera. Cet amendement a déjà été défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 476.
Mme Patricia Schillinger. Cet article nous conduit à nous poser une question sémantique : quelle est la différence entre information, communication et publicité ?
L’information a un caractère factuel, neutre. Les données, les faits et les événements sont décrits, et peuvent être accompagnés d’une opinion, celle-ci étant clairement séparée de la relation des faits et indiquée comme telle.
La publicité est la mise à la connaissance du public de l’existence d’un bien ou d’un service, accompagnée d’une description souvent très partielle, en tout cas partiale, clairement destinée à inciter d’éventuels consommateurs à acquérir ce bien ou ce service.
Et puis, à mi-chemin, il y a la communication, dans cette zone grise qui n’est ni de l’information ni de la publicité, mais une présentation orientée d’un bien ou d’un service. La différence est ténue entre la publicité et la communication, celle-ci n’étant souvent que l’habillage sophistiqué de la publicité.
Dans l’article 32 sexies du projet de loi, c’est le mot « communication » qui est utilisé. Sans doute direz-vous qu’il ne faut pas y voir malice, mais ce mot désigne ici une réalité révélatrice. Ce n’est pas une information extérieure et neutre sur les dispositifs d’épargne retraite qui sera donnée aux salariés, mais bien une communication de l’entreprise d’assurance ou de capitalisation qui sera distribuée.
Il est précisé explicitement, dans l’article, que cette communication portera sur les rentes.
Dans son rapport, notre collègue Jean-Jacques Jégou indique qu’il approuve l’ajout de cet article dans le projet de loi, car il constate la préférence des Français pour la sortie en capital plutôt qu’en rente. Il ajoute : « En effet, l’un des problèmes majeurs de la commercialisation des produits de retraite réside dans la difficulté de convaincre l’épargnant d’investir des sommes sans pouvoir indiquer de façon certaine le montant de la rente qu’il percevra ».
Il est rassurant de voir que nos compatriotes ne sont pas les naïfs manipulés que le Gouvernement décrit à longueur d’articles de presse. Les Français, même peu au fait de ces mécanismes complexes, perçoivent bien que le retour du capital qu’ils investissent est compromis. Vous opérez donc toutes ces manipulations pour les obliger à adhérer, y compris par défaut, à des produits collectifs dont la sortie est en rente.
Certes, le travail des actuaires des compagnies d’assurance et des sociétés de gestion n’est pas de calculer le montant le plus profitable et la durée la plus adaptée pour l’épargnant et le retraité. Ce travail consiste à rechercher le moyen de préserver, pour la société d’assurance ou de gestion, une partie du capital déposé. Cela implique une bonne connaissance des tables de mortalité et des probabilités des âges de décès.
Je rappelle ce point pour souligner qu’il ne s’agit pas ici d’un système de répartition, fondé sur la solidarité entre les vivants jeunes et vieux, mais d’un système de capitalisation, dont le fondement est la spéculation sur la mort. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Il existe, d’ores et déjà, un dispositif d’information permettant de connaître globalement le montant de l’épargne. L’article 32 sexies prévoit, en outre, la possibilité d’obtenir des informations sur le versement d’une rente.
Comme vous l’avez souligné, madame la sénatrice, le versement d’une rente a un caractère hypothétique. Pour cette raison même, le dispositif n’a en aucun cas caractère d’engagement. Une rente, surtout en matière de produits à risque, peut faire l’objet de fluctuations : aucune information d’ordre général ne peut donc être donnée.
Ce dispositif vise seulement à fournir davantage d’informations aux salariés, sans pour autant les engager au-delà du raisonnable. J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. Votre offensive à marche forcée pour faire adopter ce texte (M. Nicolas About s’exclame) n’a pas découragé les millions de Français qui ont défilé ces dernières semaines. J’ai même l’impression qu’en les provoquant vous les encouragez à manifester sous les formes les plus diverses !
Cette réforme, qui met en place un système de retraite parmi les plus sévères d’Europe, en activant simultanément deux leviers, la durée de cotisation et l’âge légal de départ, n’est que la chronique de la mort annoncée de notre régime de retraite solidaire.
Nos concitoyens savent que vous créez ici les conditions de la mise en place, à terme, d’un système de retraite par capitalisation, en élargissant encore un peu plus l’espace de l’épargne privée. Le monde de la finance se réjouit évidemment de la disparition de notre système solidaire, puisqu’elle garantira son enrichissement égoïste.
Cette réforme, profondément injuste, répond aux injonctions maintes fois répétées de Mme Parisot. Après avoir été entendue par Nicolas Sarkozy sur le « verrou » de l’âge légal, la patronne des patrons l’est à présent, aussi, sur les mécanismes individuels d’épargne retraite.
Cette casse généralisée de notre système par répartition est le fruit d’une politique ultralibérale qui n’ose pas dire son nom. Le Gouvernement applique béatement les orientations libérales de la Commission européenne et des marchés financiers.
Dans un Livre vert sur les retraites intitulé Vers des systèmes de retraite adéquats, viables et sûrs en Europe, la Commission européenne recommande de traiter de façon coordonnée certains thèmes communs, parmi lesquels figurent le fonctionnement du marché intérieur, les exigences résultant du pacte de stabilité et de croissance, et les réformes des retraites, qui doivent être cohérentes avec la stratégie Europe 2020. C’est l’alignement total ! Il est recommandé, notamment, de consolider le marché des retraites par le développement des régimes complémentaires et d’une offre assurantielle individuelle pour les travailleurs.
Nous savons tous que le développement des plans épargne retraite provient de l’anéantissement de notre système de retraites par répartition. Vous cassez délibérément ce système solidaire pour pouvoir, ensuite, montrer à nos concitoyens que la solidarité ne fonctionne pas. Vous répondez ainsi aux attentes de vos amis les financiers qui n’attendent qu’une chose : faire de l’argent sur le dos des retraités potentiels.
Ce projet de loi est inique à bien des égards. Le développement des plans épargne retraite en est une illustration : c’est un cadeau que vous faites aux lobbies qui vous courtisent.
Malgré vos discours incantatoires, loin de réformer et de sauver notre régime de retraite par répartition, vous le mettez à bas purement et simplement. C’est pourquoi notre groupe propose cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 et 476.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 185 rectifié, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un arrêté précise les conditions d'application du présent alinéa.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances. L’article 32 sexies vise à modifier l’article L. 132-22 du code des assurances relatif à l’obligation d’information annuelle concernant les contrats de retraite afin de prévoir la communication d’une estimation de la rente viagère qui serait versée au titre des contrats liés à la cessation d’activité professionnelle.
Le présent amendement tend à prévoir que les modalités d’application de cette nouvelle obligation seront fixées par arrêté, afin de tenir compte de la spécificité des contrats, qu’ils soient formulés en unités de compte ou non.
En effet, il nous est apparu important, d’une part, que les assurés puissent être informés de manière appropriée, en fonction de l’horizon du départ en retraite et cela même si leur contrat comprend des unités de comptes, et, d’autre part, que cette obligation ne pèse pas indûment sur le traitement des informations par l’assureur.