M. Gérard Longuet. C’est mesquin !
M. Gérard Cornu. Lamentable !
Un sénateur de l’UMP. Il a été là toute la nuit !
M. Yannick Bodin. En réalité, cette absence a un sens ! (Même mouvement.)
M. le président. Veuillez ne pas faire de provocation, monsieur Bodin !
M. Gérard Cornu. Surtout que c’est lamentable !
M. Yannick Bodin. Si la droite était capable de parler sérieusement de l’égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes, ça se saurait ! Car ce n’est pas de ce côté-là de la Haute Assemblée que sont venues les avancées dans l’histoire de la République !
M. Gérard Longuet. Vous plaisantez ?
M. Yannick Bodin. Certes, vous allez me rétorquer que l’article 31 crée la possibilité d’infliger des pénalités. Mais, et cela a déjà été souligné, nous savons parfaitement ce qu’il en est avec les pénalités…
Par exemple, on a institué des pénalités pour faire respecter la parité en matière électorale, favoriser l’embauche des personnes handicapées ou garantir l’application de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU »…
En d’autres termes, si vous créez des pénalités dans cet article, c’est pour permettre à ceux qui veulent se débiner de le faire discrètement et à faible coût !
M. Roland Courteau. Bien sûr !
M. Yannick Bodin. Car de quoi s’agit-il ? Nous parlons surtout des femmes qui travaillent à temps partiel et qui ont des emplois précaires !
J’ai entendu le discours de M. Longuet sur le « temps choisi ».
M. Gérard Longuet. Vous ne l’avez pas entendu, vous n’étiez pas là !
M. Jean-Claude Gaudin. Il était en train de dormir !
M. Yannick Bodin. Je sais très bien ce que vous avez dit, monsieur Longuet !
C’est vrai qu’il y a des femmes qui peuvent, et c’est tant mieux pour elles, choisir leur temps et décider de leurs heures de shopping, de gymnastique, de piscine ou d’équitation !
Mme Colette Giudicelli. Caricature !
M. Yannick Bodin. Mais ce n’est pas de ces femmes-là que nous parlons !
Allez à la sortie des hypermarchés ! Interrogez les caissières, qui travaillent en temps décalé, pour leur demander comment elles font dans la journée, notamment pour s’occuper de leurs enfants ! Demandez aux femmes qui travaillent en milieu hospitalier ! (M. Nicolas About s’exclame.) Vous croyez que ce sont elles qui font les tableaux de service et qui choisissent le moment où elles seront présentes ? Pensez-vous qu’on se préoccupe de la garde de leurs enfants ?
Vous allez-même jusqu’à tenir des discours pour qu’on refuse de plus en plus des enfants de moins de trois ans dans les maternelles. Et vous prétendez aider les femmes ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin applaudit également. – Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Non, véritablement, nous savons très bien que le « temps choisi » n’existe pas ! C’est toujours du temps subi !
Et vous savez ce que c’est, les petits chefs ? Parce que cela existe, les petits chefs ! Et quand on ne les écoute pas, on risque de ne pas avoir les congés payés à la date que l’on voudrait, voire d’être mis à la porte !
M. Gérard Longuet. C’est comme ça chez les socialistes !
M. Yannick Bodin. La voilà la véritable situation de toutes ces femmes qui ont des emplois précaires, avec des horaires décalés, et qui sont victimes du temps subi !
Franchement, on ne peut pas voter pour votre article 31 ! Une pénalité de 1 %, c’est quoi ? C’est « pschitt » ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.
M. Jacques Muller. Je m’adresserai à M. le secrétaire d'État, puisque M. Woerth est parti, probablement pour préparer le repas ! (Vives protestations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Je vous prie de ne pas faire de commentaires à caractère personnel !
M. Jean-Claude Gaudin. D’autant que c’est nul !
M. Nicolas About. C’est honteux !
M. Philippe Richert. C’est du n’importe quoi !
M. François-Noël Buffet. Il n’a pas d’éducation !
M. Jacques Muller. Les femmes salariées sont particulièrement précarisées : inégalités de salaire à travail égal, bas salaires en raison de postes sous-qualifiés, emplois du temps précaires…
Elles connaissent des interruptions de carrière pour des raisons familiales ou culturelles – je n’y reviens pas – et à cause de la précarité de leur poste, souvent sur des contrats à durée déterminée ou de l’intérim.
En allongeant l’âge de liquidation de la retraite à 62 ans et la liquidation sans décote à 67 ans, le projet de loi en fait mécaniquement les premières victimes. Et c’est surtout vrai pour les salariées les moins qualifiées.
Les dispositions de cet article 31 n’y changeront rien. Ce sont des « mesurettes ». En témoignent les contraintes minimalistes qui sont imposées aux entreprises ; ce sont des contraintes que je qualifierais tout simplement de « symboliques ». Autrement dit, cet article 31 est un alibi médiatique.
Il existe une inégalité structurelle entre les hommes et les femmes, et j’estime qu’elle est peu digne d’une société développée. Et le classement de la France par rapport à d’autres pays ne nous fait guère honneur.
Cette inégalité structurelle va être encore accrue avec ce projet de loi, et l’article 31 n’y changera rien ! C’est pourquoi je voterai contre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, pour explication de vote.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je crois que tout a été dit. (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Cornu. Alors ce n’est pas la peine de parler !
M. René-Pierre Signé. Mes amis du groupe socialiste ont parfaitement dénoncé cet article 31.
J’ai un peu honte lorsque j’entends que notre pays se place au quarante-sixième rang du classement mondial pour l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est consternant, surtout dans un pays qui chante avec Aragon : « La femme est l’avenir de l’homme » ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
L’homme s’inquiète peu de son avenir ! Nous pourrions évidemment développer de nouveau la question des retraites et des traitements. Mais je tiens à insister sur le fait que la situation des femmes est héritée de l’histoire. En effet, il existait jadis des sociétés primitives, peut-être plus évoluées qu’on ne le pense, régies par le matriarcat.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. C’est exact !
M. René-Pierre Signé. Les femmes commandaient alors. Mais la chasse a donné à l’homme sa place actuelle. En effet, aussi longtemps que la cueillette a dominé, la femme était l’égal de l’homme. Mais dès lors que la chasse s’est imposée, les femmes, pour des raisons tenant à leur force physique moindre, ont été confinées à des tâches prétendument subalternes. (Exclamations sur les travées de l’UMP.) C’en était alors fini de l’égalité !
L’évolution de la place des femmes dans la société est extrêmement lente. Nous connaissons tous l’histoire de ces jeunes filles du XIXe, promises à des hommes dont elles ignoraient jusqu’aux détails physiques, qui se voyaient durement rembarrées lorsqu’elles osaient poser la moindre question sur leur futur époux. C’est ainsi que cela se passait. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Quand Mme Borvo rappelle que le droit de vote n’a été octroyé qu’en 1945-1946…
M. Gérard Longuet. Par le général de Gaulle !
Mme Nicole Bricq. Il doit se retourner dans sa tombe !
M. René-Pierre Signé. Non, par le Conseil national de la Résistance ! (Il a raison ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Je rappelle également que les premières femmes ministres ont été nommées par Léon Blum (Oui ! et applaudissements sur les mêmes travées. – Mme Marie-France Beaufils applaudit également.), avant même que les femmes n’aient le droit de vote !
M. Gérard Longuet. Il était plus facile de les faire entrer au Gouvernement que de leur donner accès aux urnes !
M. René-Pierre Signé. La loi a présidé à ces évolutions. Je pourrais développer de nouveau le sujet de la parité en politique. Nous avons en effet des progrès à faire dans ce domaine. Je pourrais également insister sur l’égalité salariale, le temps partiel, qui, malheureusement, échoit le plus souvent aux femmes, le taux de chômage supérieur des femmes, ou encore le temps de travail interrompu, dont pâtissent les caissières évoquées par Yannick Bodin, ou encore les femmes de ménage.
Certaines d’entre elles travaillent le matin dès six heures, finissent à huit heures pour reprendre leur activité le soir, et sont toujours absentes de leur domicile au déjeuner. Et on s’étonne que les enfants soient dans la rue, livrés à eux-mêmes ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. René-Pierre Signé. Mais il est un fait plus choquant encore : les femmes qui interrompent leur activité du fait de leur grossesse élèvent des enfants qui, demain, financeront la retraite de ceux qui ont bénéficié des carrières les plus faciles !
Mme Nicole Bricq. Tout à fait !
M. René-Pierre Signé. Ces femmes qui, mal traitées, déconsidérées, endurent beaucoup, sont des victimes. Roland Courteau a d’ailleurs beaucoup travaillé sur le sujet des femmes battues. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Vous pouvez bien vous exclamer, cela découle de la même démarche éthique ! La femme est considérée comme subalterne, soit sur le plan physique, soit sur celui des rémunérations ! C’est pourquoi nous n’acceptons pas cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Presque tout a été dit (Exclamations sur les travées de l’UMP. – M. François-Noël Buffet applaudit.), presque.
M. Marc Daunis. Et l’essentiel va l’être !
M. Roland Courteau. Cher René-Pierre Signé, la question se pose encore et vous avez bien fait d’y revenir : la femme est-elle encore l’avenir de l’homme ?
J’ai rappelé tout à l’heure que la France, sur le problème des inégalités qui frappent les femmes, avait dégringolé de 28 places dans le classement établi par une étude du Forum économique mondial. Cette situation est accablante. J’ai également rappelé que la France occupait l’un des pires niveaux en termes de ressenti d’égalité de salaires à travail égal : la 127e place sur 134. C’est plus accablant encore ! La France, quasiment lanterne rouge ! Incroyable ! Inacceptable ! Intolérable !
Or, ce que vous proposez avec cet article 31 n’est pas à la hauteur de nos attentes et de nos espoirs. Votre texte n’est pas pertinent au regard de la situation que nous connaissons, comme je viens de le démontrer. Votre texte manque de force, de vivacité et d’allant. Il est empreint, si j’ose dire, de mollesse, car les pénalités prévues seront très nettement insuffisantes.
Surtout, cet article 31 est noyé dans un projet de loi particulièrement défavorable au plus grand nombre et principalement aux femmes.
De façon générale, nous avons ici un texte de régression sociale. Et vous voudriez nous faire croire que cet article 31 fera oublier ce coup de frein, ce recul dans la longue marche de l’humanité engagée depuis des décennies ?
Permettez-moi cette courte parenthèse. Je l’ai dit il y a une semaine ici même, nous allons vers une société où le temps libre, le temps libéré, le temps conquis sur le temps de travail, sera de plus en plus important. Oh, je sais bien que vous ferez en sorte, vous, la majorité sénatoriale, de freiner cette évolution dans le but d’en ralentir les progrès. Mais sachez une chose : vous ne pourrez jamais l’arrêter ! (Très bien ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Les femmes sont les grandes perdantes de votre réforme. Et ce n’est pas cet article 31, particulièrement timoré, qui y changera quoi que ce soit. « Mascarade », a dit Raymonde Le Texier ! Elle a cent fois raison. Car en dépit de vos discours et de vos incantations, rien ne changera, en réalité, pour les femmes. Votre article 31 n’a que l’apparence d’une avancée sociale ! Un rendez-vous manqué, vous a-t-on déjà dit. Un rendez-vous manqué de plus, ajouterai-je, et un véritable gâchis. Vous ne serez pas étonnés que nous votions contre cet article 31. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. La teneur du débat qui nous préoccupe depuis maintenant quelques minutes (M. François Trucy s’esclaffe.)…
M. Patrice Gélard. Des heures plutôt !
M. Jean-Jacques Mirassou. … n’est pas sans rappeler la nature du précédent débat sur la pénibilité : au-delà de l’effet d’annonce induit par l’en-tête de votre article, vous passiez très rapidement de la pénibilité à un registre beaucoup plus réducteur, qui avait trait à l’incapacité permanente.
Vous appliquez ici la même stratégie. En dépit d’un titre ronflant, « mesures relatives à l’égalité entre les hommes et les femmes », vous adoptez une logique réductrice qui conduit ce dispositif à bien peu de chose. Faut-il rappeler, comme vient de le faire avec éloquence Roland Courteau, que la France est passée de la 18e à la 46e place en matière d’égalité des sexes ? Ce débat est d’une extrême importance. C’est parce qu’il est de nature sociétale qu’il mobilise tant d’énergie !
Les discriminations subies par les femmes, que mes collègues ont évoquées, doivent être mises en regard du sort de leurs grand-mères et arrière-grand-mères, qui, à l’occasion du conflit de 1914-1918, ont été amenées à prendre la destinée de ce pays en main, dans le domaine industriel, éducatif et intellectuel. L’égalité était alors en quelque sorte inversée. (Mme Gisèle Printz opine.)
Les mêmes qui, à l’époque, ne s’en sont pas offusqués, bien au contraire, sont aujourd’hui ceux qui traînent des pieds pour faire véritablement franchir un palier à notre société. L’examen et l’adoption d’une telle loi nous donnaient pourtant l’opportunité de le faire !
M. Roland Courteau. Oui !
M. Jean-Jacques Mirassou. Mais vous vous y refusez, sous prétexte que les entreprises en seront incapables. Vous prescrivez la lenteur à celles qui seraient en mesure de le faire rapidement. Quant aux entreprises de moins de 50 salariés, n’en parlons pas ! Toutes les mesures que vous préconisez ne seront ni incitatives ni contraignantes ! Pour employer une métaphore empruntée au rugby, vous « faites les bordures ». (M. Yannick Bodin s’esclaffe.) Vous vous refusez à entrer dans le dur.
Mme Nicole Bricq. Vous êtes petits bras !
M. Jean-Jacques Mirassou. C’est là votre stratégie depuis quinze jours, et cela ne nous surprend donc plus. Mais cet article-là, parce qu’il fondamental et revêt une portée sociétale, marque les limites de la duperie dénoncée par un certain nombre de nos collègues et par nous-mêmes. En votant cet article en l’état, vous marquerez votre attachement à ce qu’il est convenu d’appeler l’ordre établi. Nous, nous sommes dans un autre camp et nous ne voterons pas cet article. Nous donnerons encore et toujours les moyens de faire avancer notre société dans le bon sens ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Guy Fischer et Gérard Le Cam applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Gaudin. Ah ! Un peu d’humour !
M. François Fortassin. Nous devisons actuellement d’un sujet très sérieux, mais dans une certaine turbulence ! Au même moment, une grande partie de la France est dans la rue.
Mme Annie David. Une très grande partie, même !
M. Jean-Jacques Mirassou. Et voilà !
M. François Fortassin. La présence de très nombreux jeunes dans la rue exprime avant tout un mécontentement profond et, à l’évidence, le sentiment d’une réforme parfaitement injuste…
M. Jean-Claude Gaudin. Qu’est ce qu’ils en savent ?
M. François Fortassin. … qui, loin de gommer les inégalités sociales, les accentue. Vous pourrez bien entendu prétendre que c’est inexact. Mais ce qui compte, c’est ce que ressentent nos concitoyens.
Un sénateur de l’UMP. Ils peuvent se tromper !
M. François Fortassin. Nous avons sans doute dans ce domaine, les uns et les autres, une action pédagogique à mener. Face à cela, le Gouvernement et la majorité sénatoriale restent campés sur leurs certitudes, voire drapés dans un linceul de convictions ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Attention, le linceul n’est pas toujours synonyme de vigueur et de vivacité.
M. Jean-Claude Gaudin. Le Saint Suaire ! (Plusieurs sénateurs de l’UMP se tournant vers M. Jean-Claude Gaudin applaudissent.)
M. François Fortassin. J’ai parfois même le sentiment, mesdames, messieurs, que vous faites preuve d’un brin d’autisme (Non, non ! sur les travées de l’UMP.) par rapport à nos concitoyens et à leurs aspirations. Votre bonne volonté ne saurait être mise en cause. (Ah, tout de même ! sur les travées de l’UMP.) Cependant, vous persistez à apporter vaille que vaille des réponses techniques, alors même que nos concitoyens attendent des réponses politiques. Ils veulent une politique audacieuse, non un simple replâtrage !
M. Roland Courteau. Très bien !
M. François Fortassin. Vous faites de cet article 31 l’un des noyaux durs de votre réforme.
M. Roland Courteau. Noyau mou, oui !
M. François Fortassin. Mais ne nous y trompons pas. Nos concitoyens ont le sentiment que ces mesures sont molles et timides et qu’elles ont, si vous permettez cette expression facile, l’efficacité d’un sinapisme sur une jambe de bois ! (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)
M. Louis Pinton. D’un cautère !
M. François Fortassin. La pénalité de 1 % est perçue par nos concitoyens, notamment par ceux qui souffrent, comme une duperie !
Mme Annie David. Une provocation, oui !
M. François Fortassin. Vous ne ferez jamais admettre à ceux qui ont des retraites de 700 ou 800 euros par mois…
M. Marc Daunis. Et encore !
M. François Fortassin. … que c’est là une pénalité efficace susceptible de faire rentrer dans le rang un certain nombre de patrons ou chefs d’entreprise. Beaucoup jouent le jeu, mais ceux qui ne le font pas doivent être sanctionnés de façon efficace.
Peu importe, d’ailleurs, que les pénalités soient fortes pour les autres puisque, dès l’instant où ils jouent le jeu, ils ne s’exposeront pas à ces pénalités. Ne donnez pas le sentiment que tous les patrons sont vertueux ! C’est aussi idiot que de dire que tous sont des voyous ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Il existe un très grand nombre de patrons sociaux et honnêtes, mais il en existe aussi qui ne le sont pas…
M. Gérard Bailly. Comme partout !
M. François Fortassin. … et il faut les sanctionner fortement.
M. Roland Courteau. Voilà !
M. François Fortassin. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que nous sommes à la veille de voir le pacte républicain rompu. Or, la rupture du pacte républicain concerne tous les responsables politiques, quelle que soit leur sensibilité !
M. Paul Blanc. Ah !
M. Jean-Claude Gaudin. Eh ben !
M. François Fortassin. Cette rupture vous paraît peut-être exagérée, mais lorsque la rue parle, la situation peut très bien échapper à tout contrôle. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le sénateur, la rupture du pacte républicain, c’est de ne pas défendre le régime par répartition ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) La rupture du pacte républicain, c’est de ne pas respecter les institutions, c’est de ne pas croire que le débat que nous avons se situe au cœur de la démocratie française ! (Applaudissements prolongés sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste. – Protestations et huées sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Marc Daunis. Ça devient pathologique !
M. David Assouline. Et les conflits d’intérêt, c’est quoi ? La rupture du pacte républicain ?
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Je ne veux pas parler dans ce brouhaha, monsieur le président ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Demandez donc à vos collègues de se calmer !
M. Claude Domeizel. Cette explication de vote m’amène à rappeler ce que j’ai dit hier au début de la discussion de l’article 31 : bien sûr que nous adhérons à cet article !
M. Charles Revet. Ah !
M. Claude Domeizel. Bien sûr que nous adhérons à son principe, car il vise à renforcer l’efficacité des dispositifs garantissant l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’entreprise, en prévoyant notamment d’infliger une pénalité financière aux entreprises de plus de 50 salariés qui ne joueraient pas le jeu.
Mais, tel qu’il est rédigé et eu égard aux propos qui sont tenus, cet article sera inefficace !
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Claude Domeizel. Cet article, je serais tenté de le qualifier de placebo, car il donne l’impression d’apporter un remède à une inégalité, la différence de traitement des hommes et des femmes en matière salariale. C’est la raison pour laquelle, – je vous l’avais annoncé hier – si vous aviez accepté les amendements que nous avions déposés pour renforcer l’article 31 et faire prévaloir le principe que nous voulons défendre, nous aurions évidemment voté cet article. Mais, comme il n’a pas été modifié, nous voterons contre !
Par ailleurs, je voudrais revenir, mes chers collègues, sur les propos tenus par M. Longuet. (Ah ! sur les travées de l’UMP.) Monsieur Longuet, je vous ai déjà dit ce que j’en pensais : ces propos sont inadmissibles ! (M. le rapporteur s’exclame.) Oui, il est inadmissible de prétendre que les femmes qui travaillent à temps partiel ou d’une manière discontinue dans la journée le font par choix ! Elles ne l’ont pas choisi, monsieur Longuet, elles l’ont subi !
Le seul problème de fond, c’est que ces propos excessifs…
M. Jean-Claude Gaudin. Ce sont les vôtres qui sont excessifs !
M. Claude Domeizel. … prouvent, monsieur Longuet, que vous vous situez sur la même ligne que le Président de la République, le Premier ministre et le ministre,…
Une sénatrice de l’UMP. Oui !
M. Christian Cointat. Parfait !
M. Claude Domeizel. … c’est-à-dire que vous êtes pour l’affrontement et que vous ne voulez pas en sortir. La balle est dans le camp du Gouvernement pour trouver une issue à cette situation difficile. Or, vous choisissez de tenir des propos excessifs, vous l’avez encore fait hier soir. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Eh bien, monsieur Longuet, vous contribuez au malaise ambiant, vous entretenez les interrogations de nos concitoyens, au lieu de leur répondre ! Bien sûr, nous ne voterons pas cet article 31. Merci de m’avoir écouté ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur quelques travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Gérard Longuet. Je m’étais inscrit pour donner l’explication de vote du groupe de l’UMP. Je remercie MM. les ministres de leur présence.
M. Yannick Bodin. Vous avez de la chance, ils sont là tous les deux !
M. Gérard Longuet. Première observation : mon cher collègue, je ne comprends pas cette polémique. Vous êtes un élu local, nous sommes des élus locaux : j’ai cité un document émis par l’Assemblée des communautés de France rappelant les résultats d’une étude réalisée par l’INSEE et l’INED en 2005 sur la condition des femmes au travail et le recours au temps partiel. Selon cette étude, effectuée par deux organismes publics reconnus, la majorité des femmes interrogées en 2005 sur les raisons pour lesquelles elles ont choisi un temps partiel ont répondu l’avoir fait pour concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle. Rappeler ces faits n’a rien de choquant ! Sauf si vous considérez que les faits ne doivent pas être reconnus, dès lors qu’ils s’opposent à vos propres convictions… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Alain Fouché. Voilà !
M. Gérard Longuet. Cette méthode, par le passé, a fait ses preuves : il suffit de penser aux théories de Mitchourine et Lyssenko, selon lesquelles la science doit suivre l’idéologie ! (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.) Non, pour nous, les réalités sociologiques précèdent l’analyse !
M. Jean-Claude Gaudin. Absolument !
M. Gérard Longuet. Cessez donc de rouvrir cette polémique sur un fait qui est un fait de société exprimé par l’INED et par l’INSEE. (M. Yannick Bodin s’exclame.)
Deuxième observation : je me suis demandé, au nom du groupe UMP, pourquoi vous étiez si nombreux, notamment au sein du groupe socialiste, à intervenir sur cet article 31. La raison en est simple : vous êtes furieux d’avoir raté un rendez-vous, celui de la progression constante de la situation des femmes, dans notre pays, au regard de leur carrière et de la vie professionnelle ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Bricq. Nous vous avons prouvé le contraire !
M. Gérard Longuet. Car cet article 31, monsieur le ministre, donne un contenu à des obligations qui étaient théoriques, mais auxquelles vous apportez, par ce prélèvement, une sanction, laquelle est le début d’une prise de conscience – comme chacun sait, « la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse » – pour celles des entreprises qui y manqueraient. (Mme Nicole Bricq et M. Marc Daunis s’exclament.)
M. Guy Fischer. C’est un leurre !
M. Gérard Longuet. Depuis 1972, sept lois portant sur la condition des femmes au travail ont été adoptées. Chacune d’entre elles a contribué à corriger un fait de société, dont nous partageons en commun la responsabilité, car nous sommes, les uns et les autres, héritiers de l’histoire de notre pays : en effet, les femmes ne se sont pas vu suffisamment reconnaître, dans leur vie professionnelle, le statut d’égale dignité que l’on pouvait espérer.
M. Mirassou a évoqué le rôle joué par les femmes pendant la Première Guerre mondiale. Étant lorrain, je sais exactement de quoi il s’agit, et vous avez eu mille fois raison de le dire, mon cher collègue ! Mais je tiens à rappeler que les hommes ont payé l’impôt du sang, avec un million et demi de morts, ce qui mérite également considération. L’effort a été partagé par les hommes et par les femmes, par les épouses, par les mères, et c’est un pays rassemblé qui a gagné cette guerre.
Ce pays, au lendemain de la Première Guerre mondiale, – c’est là que je voulais en venir – avait la volonté ferme, en tout cas dans la famille politique à laquelle j’appartiens, la droite républicaine, de donner le droit de vote aux femmes dès 1919 ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Pourquoi diable la Troisième République ne l’a-t-elle pas fait ? Parce que le parti radical, à l’époque, ne le souhaitait pas (M. André Lardeux applaudit.), considérant, sans doute, que les femmes étaient dans la main des curés !
C’est en raison de cette triste réalité que le Conseil national de la Résistance, qui était très largement composé de démocrates chrétiens, a proposé au général de Gaulle, chef du Gouvernement qui l’a rendu possible, le droit de vote aux femmes ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.) C’est bien une mesure gaulliste qui a mis en œuvre une aspiration ancienne de notre pays, qui remontait à 1919, mais que le centre gauche, à l’époque, avait toujours combattu.
J’ajoute que nous n’allons pas, avec cet article, réviser la totalité de la condition féminine dans notre pays. Je voudrais simplement vous dire que, sur ces travées du Sénat, nous n’avons strictement aucun complexe, parce que nous appartenons à la majorité qui, en effet, a donné le droit de vote aux femmes,…