Mme Raymonde Le Texier. Cet article constitue le centre de votre dispositif consacré à la pénibilité puisqu’il s’agit de l’autorisation d’un départ anticipé en cas d’invalidité permanente de 10 %.
Cet article est censé être l’illustration de la flexibilité du Gouvernement, la preuve que des concessions ont été faites sur ce projet de réforme afin de l’humaniser. Dans sa grande mansuétude, le président Sarkozy, conscient des affres rencontrées par le peuple qui se lève tôt, a concédé cette mesure. (Sourires ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Grâce à sa bienveillante générosité, les travailleurs cassés par quarante années de labeur, voire plus, pourront partir à 60 ans à la retraite... Où plutôt, ils pourront continuer de partir à 60 ans ! Mais encore faudra-t-il qu’ils fassent la preuve qu’ils sont vraiment cassés.
À la suite d’une communication savamment orchestrée, on voudrait nous faire croire qu’il s’agit là d’une avancée. Mais il n’en est rien. C’est seulement le maintien pour une poignée de nos concitoyens, une fraction des plus abîmés, de ce qui était jusqu’à aujourd’hui la règle pour tous !
On tente de nous faire prendre des vessies pour des lanternes, une régression pour une avancée, une misérable aumône pour un enrichissement. On fait de la règle l’exception, on passe du collectif à l’individuel, et l’on voudrait nous voir applaudir au progrès social : ne comptez pas sur nous !
Monsieur le ministre, en inscrivant dans la loi la notion de pénibilité, vous avez eu le cran qui a fait défaut à vos prédécesseurs. Mais, à peine après l’avoir énoncée, vous sapez la notion de pénibilité, vous l’amalgamez, vous la remplacez par l’invalidité.
Au risque de répéter ce que nous n’avons cessé de vous dire, la pénibilité n’est pas l’invalidité. La pénibilité ne saurait être réduite à l’invalidité, quel que soit le seuil que vous fixez. La pénibilité et ses désastreuses conséquences sur la santé des salariés ne peuvent être mesurées uniquement sur le critère d’invalidité.
Si vous aviez écouté les spécialistes, ces médecins du travail que votre projet de loi vise à affaiblir un peu plus, vous sauriez que nombre des pathologies liées au travail ne se révèlent que des années après la fin de l’activité. Vous sauriez aussi que nombre de ces pathologies ne sont pas quantifiables par des critères d’invalidité.
Enfin, au nom du groupe socialiste, permettez que je vous dise toute notre indignation. Votre texte entretient la logique de la marchandisation des corps et des vies ! (Protestations sur les travées de l’UMP.) Je savais que ça allait vous plaire ! (Rires sur les mêmes travées.)
Ce qu’entérine votre texte, c’est l’achat de la dégradation des corps. Combien pour ne plus être capable d’enfiler sa veste tout seul ? Combien pour cracher ses poumons jusqu’à la fin de ses jours ? Combien pour sept ans d’espérance de vie en moins ?
Et, pour aller au bout de l’humiliation, il faudrait que, pour obtenir ce qui leur est dû, nos concitoyens aillent exposer leurs corps blessés aux yeux d’une commission ; qu’ils aillent se soumettre au verdict ; qu’ils aillent s’abaisser à la pesée ? Certainement pas !
Pour reprendre les mots de Noëlle Lasne, médecin du travail, avec cet article en particulier, vous distribuez « une prime à la casse et non à la prévention ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) En dernière analyse, cet article fixe le prix : le prix à payer pour avoir droit à ce qui est dû. Ce prix ? Dix pour cent. Pour 10% de votre corps, vous aurez droit à la retraite à 60 ans. Cela nous est inacceptable.
Les sénateurs socialistes, Verts et apparentés voteront contre cet article.
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.
Mme Claire-Lise Campion. De nombreuses études scientifiques montrent les effets à long terme de la pénibilité du travail sur la santé et devraient être prises en compte dans le cadre du projet de loi que nous sommes en train de discuter.
C’est en tout cas ce pour quoi militent un certain nombre de chercheurs, de médecins du travail et d’enseignants, regroupés au sein de l’ADERESTE – association pour le développement des études et des recherches épidémiologiques sur la santé et sur le travail.
Sur la question de la pénibilité et de ses conséquences sur la santé, des synthèses ont été élaborées ces dernières années et diffusées par un certain nombre d’organismes tels l’INSERM, institut national de la santé et des recherches médicales ; l’INVS, institut de veille sanitaire ; le centre d’études de l’emploi ; ou encore l’agence nationale de sécurité sanitaire
Comme nous le savons, le rôle néfaste pour l’espérance de vie en bonne santé de l’exposition à des toxiques cancérogènes, du travail de nuit et des efforts physiques importants est parfaitement démontré sur un plan scientifique. Ces effets se manifestent après la fin de la vie professionnelle ; leur évaluation ne peut donc pas relever d’un examen médical au moment de la retraite.
Aussi, mes chers collègues, ne croyez-vous pas qu’il serait légitime et juste que toutes ces connaissances scientifiques, qui sont largement validées, soient, enfin, prises en compte dans les travaux législatifs que nous sommes en train de mener ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Au cours de l’examen de cet article, malgré les multiples amendements que nous avons défendus, vous n’avez pas su apporter des réponses crédibles au problème fondamental que nous soulevions à travers ce texte, qui est emblématique, au sens le plus péjoratif du terme, de votre projet de loi.
Vous n’avez pas cherché, parce que vous ne vouliez pas le faire, à lever l’ambigüité, dénoncée par nombre de mes collègues, entre la pénibilité et une incapacité permanente liée à une pathologie professionnelle, que vous tendez à assimiler l’une à l’autre. Par conséquent, une fois passé le titre de ce chapitre, vous entretenez la confusion.
Or ce projet de loi aurait pu vous permettre, avec une approche de santé publique, avec une rédaction plus ambitieuse, de franchir un palier, de sortir du carcan existant et d’appréhender les nouvelles pathologies du travail, qui sont elles-mêmes liées à de nouvelles pratiques professionnelles.
Vous ne l’avez pas voulu ainsi : au lieu de nous présenter un texte ambitieux pour ce qui concerne les pathologies auxquelles sont exposés les travailleurs salariés, vous vous contentez de favoriser une approche que je qualifierai à la fois d’individuelle et de minimaliste. En effet, la démarche de chaque salarié s’apparentera à un parcours du combattant. Le travailleur sera assujetti en quelque sorte à une double peine, d'une part, parce qu’il sera malade, et, d'autre part, parce qu’il faudra qu’il le prouve ou même qu’il le revendique !
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, cet article est donc une sorte d’acte manqué : vous n’avez pas su, ou pas voulu, vous donner les moyens de franchir une étape importante dans la prise en charge d’un problème qui est très préoccupant et que nous avons évoqué à plusieurs reprises, à savoir l’émergence des nouvelles formes de multiples pathologies. Vous passez à côté de cette réalité, et c’est dommage. En toute logique, nous voterons contre cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Nous voterons bien évidemment cet article, parce que nous considérons que la pénibilité, si elle n’est pas l’invalidité, peut néanmoins engendrer cette dernière, et parce que vous introduisez à cet égard un droit nouveau, monsieur le ministre.
Nous ne sommes nullement indignés de voir la pénibilité enfin prise en compte aujourd’hui. En outre, je le répète, un droit nouveau est institué, y compris à l'échelle individuelle. Or, pour nous, ce niveau permet un meilleur accompagnement de la personne, afin de prendre en compte une altération éventuelle de la santé de celle-ci ou de limiter une future pathologie. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 27 ter AC.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement se sont prononcés pour l’adoption de cet article.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 63 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 182 |
Contre | 152 |
Le Sénat a adopté.
Articles additionnels après l'article 27 ter AC (réservés)
M. le président. Je rappelle que l’ensemble des amendements tendant à insérer des articles additionnels ont été réservés jusqu’après l’article 33.
Article 27 ter AD (nouveau)
I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 135-2, », sont insérés les mots : « par une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l’âge fixé en application de l’article L. 351-1-4, ».
II. – L’article L. 242-5 du même code est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la contribution mentionnée à l’article L. 241-3 couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l’âge fixé en application de l’article L. 351-1-4 est pris en compte dans les éléments de calcul de la cotisation qui peuvent être modulés par secteur d’activité. Un décret détermine les conditions d’application du présent alinéa. » ;
2° À l’avant-dernier alinéa, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième ».
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l’article.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet article fixe les modalités de financement des mesures d’abaissement de l’âge légal d’ouverture des droits à pension et du bénéfice du taux plein pour les assurés justifiant d’une incapacité permanente d’au moins 10 % au titre d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail.
Le financement de cette mesure pèsera non pas sur la branche vieillesse, mais sur la branche accidents du travail-maladies professionnelles. Selon l’étude d’impact, les dépenses de prestations supplémentaires pour la branche vieillesse représenteraient de l’ordre de 40 millions d’euros en 2012 et de 100 millions d’euros en 2015. Après 2018, l’année de fin de montée en charge du dispositif, elles atteindraient 200 millions d’euros par an.
L’étude d’impact précise également que la retraite complémentaire AGIRC-ARCCO suivra cette tendance, moyennant une modification de l’accord de gestion. Qu’en sera-t-il, monsieur le ministre, pour les surcomplémentaires et les assurances privées ?
La nouvelle contribution sera financée par une majoration des cotisations des employeurs de 0,05 %. Elle sera prise en compte dans le calcul de la cotisation, qui peut être modulée selon les secteurs d’activité, dans des conditions déterminées par décret.
Cette disposition est la conséquence de la discussion entre les représentants des branches très génératrices d’accidents du travail et de maladies professionnelles, comme le BTP et la chimie, notamment, et ceux des autres branches telles que le secteur bancaire. Ces échanges ont été un facteur très important de l’échec de la négociation sur la pénibilité.
Monsieur le ministre, lors du débat à l’Assemblée nationale, vous avez indiqué que le taux de contribution de chaque comité technique national, c'est-à-dire de chaque branche, serait calculé en fonction du nombre total de personnes entrées dans le dispositif.
Si l’on se réfère à l’article 25 du projet de loi, il pourrait donc clairement être de l’intérêt des employeurs des branches les plus pathogènes, qui rempliront les fiches d’exposition au risque, de remplir celles-ci a minima, et même – pourquoi pas ? – d’oublier de le faire. Si, dans les grandes entreprises, il y a un CHSCT, un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, il n’en va pas de même dans les nombreuses PME et TPE – nous en avons discuté longuement cet après-midi. Monsieur le ministre, comment seront alors traités les salariés des sous-traitants ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 441 est présenté par M. Godefroy, Mme Demontès, MM. Bel, Teulade, Le Menn, Daudigny et Desessard, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Printz, MM. Cazeau, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Ghali, Alquier, Campion et San Vicente-Baudrin, MM. Gillot, S. Larcher, Domeizel, Assouline et Bérit-Débat, Mmes M. André, Blondin, Bourzai et Khiari, MM. Bourquin, Botrel, Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume, Haut, Mahéas, Mirassou, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 1067 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour présenter l’amendement n° 441.
Mme Maryvonne Blondin. Cet amendement tend à supprimer l’article 27 ter AD, qui est relatif aux modalités de financement du dispositif retenu par le Gouvernement.
Fondé sur la notion d’incapacité partielle permanente, cet article met à la charge de la branche accidents du travail-maladies professionnelles les dépenses engendrées par cette mesure. En outre, il prévoit que le montant de la contribution des entreprises versées à la branche AT-MP pour financer ce dispositif pourra être modulé par secteur d’activité.
Monsieur le ministre, deux logiques se juxtaposent pour expliquer vos choix.
Premièrement, le financement par la branche AT-MP est cohérent avec le choix de la reconnaissance individuelle d’une incapacité partielle permanente. En quelque sorte, nous sommes dans une branche nouvelle de la législation sur l’invalidité. Ce choix, s’il se justifie d’une certaine façon au regard de la responsabilité des employeurs n’ayant pas pris les mesures de prévention et de protection indispensables, est la conséquence d’une mesure individualisée que nous désapprouvons.
Deuxièmement, vous prévoyez la modulation de la contribution supplémentaire pour financer votre système selon les secteurs d’activité. Ce choix aussi montre que vous êtes à l’opposé de la prise en charge d’un problème qui touche des millions de personnes.
À l’évidence, cette question est traitée au sein du patronat, entre les branches principales qui, malheureusement, abîment des salariés et celles qui ne les abîment pas. Le principe est celui du pollueur-payeur : ne paient que ceux qui polluent.
Pourtant, la pénibilité doit être prise en charge par la société dans son ensemble. Elle ne doit pas faire l’objet de telles tractations, d’autant plus que la pénibilité du travail n’est pas nouvelle et qu’elle n’est pas réservée aux tâches physiquement les plus dures, comme mes collègues l’ont montré à plusieurs reprises.
Nous le répétons, monsieur le ministre : c’est l’origine de la pénibilité que vous ne voulez pas reconnaître et sur laquelle les patronats des branches mégotent. En effet, c’est toute la condition faite au monde du travail – salariés et prestataires de services – qui est dénoncée par ce mot de pénibilité.
M. Roland Courteau. Bonne question. Je ne sais pas si elle recevra une réponse !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour présenter l'amendement n° 1067.
M. Jean-François Voguet. À travers cet amendement, nous vous proposons de supprimer l’article 27 ter AD.
En effet, cet article est relatif au financement du dispositif de départ en retraite avant l’âge légal pour les salariés reconnus atteints d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail ayant entraîné un taux d’incapacité permanente partielle d’au moins 20 %, ou 10 % à certaines conditions.
Cet article vise à mettre à la charge de la seule branche accidents du travail et maladies professionnelles les dépenses causées par cette nouvelle mesure.
Les auteurs de cet amendement entendent supprimer cet article, car cette prise en charge financière par la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la sécurité sociale constitue une nouvelle preuve que, pour le Gouvernement, la seule considération de la pénibilité se fait sur le terrain de la maladie ou de l’accident du travail avec séquelles.
Pour notre part, nous estimons que, dans un système qui aurait été réfléchi en amont et qui aurait permis une véritable prise en compte de la pénibilité, un vrai débat aurait dû s’ouvrir sur le mode de financement de ce mécanisme.
Or, monsieur le ministre, ce débat n’a pas eu lieu et, de toute façon, votre système ne prend pas en compte la pénibilité.
En ce qui concerne les mesures financières de votre texte, vous avez préféré remettre cette discussion à plus tard, preuve que votre projet n’est pas aujourd'hui financièrement équilibré.
Avec votre mécanisme de prise en compte de la pénibilité – en fait de l’incapacité au moment du départ à la retraite –, vous prétendez apporter une solution et la faire peser sur la branche AT-MP, mais, en réalité, la question n’est pas réglée. Nous verrons qu’elle sera rouverte bientôt lors des débats sur le PLFSS.
Pour ces raisons, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer cet article, donc de voter notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Chers collègues de l’opposition, comme vous êtes hostiles au dispositif de prise en compte de la pénibilité, vous en refusez le financement !
La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Ce serait assez curieux de faire porter sur la branche vieillesse les conséquences de la pénibilité liée au travail. Il est plus logique que ce soit la branche AT-MP, donc les entreprises, qui les supportent.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 441 et 1067.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 367 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
I. - Supprimer les mots :
couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge fixé en application de l'article L. 351-1-4
II. - Supprimer les mots :
qui peuvent être modulés par secteur d'activité
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Cet amendement vise à supprimer à l’intérieur de l’alinéa 4 de cet article deux éléments de phrase qui pourraient prêter à confusion, et notamment laisser entendre que l’on aurait une catégorie particulière de travailleurs.
Il a également pour objet de mieux encadrer le financement de cette mesure.
Je rappelle qu’un traitement identique a été appliqué aux employés victimes de l’amiante sur les chantiers navals. En effet, l’article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale de 2001 dispose : « Le fonds [d’indemnisation des victimes de l’amiante] est financé par une contribution de l’État, dans les conditions fixées par la loi de finances, et par une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale, sur la base d’un rapport d’activité du fonds établi par son conseil d’administration et transmis au Parlement et au Gouvernement[…]. »
La grande majorité des bénéficiaires du fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante étaient employés dans les chantiers navals et aucune modulation du taux AT-MP par secteur d’activité ne figure dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
C’est donc le même traitement que nous demandons s’agissant de ce nouveau dispositif.
M. le président. L'amendement n° 486 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Rozier et MM. J. Gautier et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
qui peuvent être modulés par secteur d'activité
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Je considère que cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Par cet amendement, vous nous proposez de supprimer la modulation par secteur d’activité des éléments de calcul de la cotisation AT-MP, alors qu’il est logique que cette nouvelle majoration soit plus importante pour les secteurs d’activité plus particulièrement concernés pas la pénibilité, et a contrario moins élevée dans les secteurs moins touchés.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 367 rectifié et 486 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Gautier, l'amendement n° 486 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Gautier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 486 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 367 rectifié.
Mme Annie David. Je souhaite simplement réagir aux propos de M. le rapporteur, qui affirme que certains secteurs d’activité sont plus concernés que d’autre part la pénibilité.
C’est en effet ce que nous essayons de vous dire, de vous faire entendre et de vous faire comprendre depuis le début de ce débat ! Alors que vous refusiez de nous écouter, à présent vous reprenez cet argument à votre compte pour justifier les modulations des taux de cotisation AT-MP !
Monsieur le rapporteur, il me semble que la réponse que vous avez donnée à notre collègue était illogique.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je ne suis pas le porte-parole du rapporteur ; permettez-moi néanmoins d’intervenir sur ce point.
La réponse de M. le rapporteur n’est pas contradictoire. Que certains secteurs soient, plus que d’autres, exposés à la pénibilité ne signifie pas automatiquement qu’en travaillant dans de tels secteurs chaque salarié pris individuellement supporte la pénibilité. C’est pourquoi, même s’il existe des facteurs d’exposition qui touchent plus certains secteurs d’activité que d’autres, la reconnaissance de la pénibilité doit être d’abord individuelle. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est une pirouette !
M. Guy Fischer. C’est machiavélique !
Mme Annie David. C’est une girouette permanente !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quel prestidigitateur !
M. le président. L'amendement n° 1068 rectifié, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la contribution mentionnée à l'alinéa précédent est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale. Une commission présidée par un magistrat à la Cour des comptes remet tous les trois ans, au Parlement et au Gouvernement, un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évaluant le coût réel des dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 351-1-4 pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. La composition de la commission est fixée par voie réglementaire. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Je ne reprendrai pas les arguments du groupe CRC-SPG contre votre conception de la pénibilité, qui, en fait, n’est rien de plus que la prise en compte d’une incapacité.
C’est tellement vrai que l’article dont nous débattons prévoit une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour compenser les dépenses engendrées par les départs à la retraite à 60 ans des salariés souffrant d’une invalidité.
Il est même prévu, à l’alinéa 4 de cet article, que la contribution devienne un élément du calcul de la cotisation par secteur d’activité.
Aussi, compte tenu de notre désaccord sur le fond de cette réforme et, surtout, de votre refus de prendre en compte la pénibilité au travail, vous comprendrez que l’amendement que je soutiens est pour nous un amendement de repli.
En effet, nous ne saurions accepter que le montant de la contribution soit fixé par un simple décret pris par un cabinet ministériel. S’agissant d’une contribution sociale, il serait naturel que son montant soit déterminé, chaque année, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale.
Par ailleurs, pour renforcer la visibilité de cette mesure et sa lisibilité, nous proposons qu’un rapport d’évaluation soit remis tous les trois ans au Parlement. Ce document permettrait aux parlementaires non seulement de faire régulièrement le point sur les conséquences financières de cette mesure, mais aussi de prendre la mesure, au plus près des réalités, du niveau des incapacités, branche par branche.
Ce rapport mettrait alors au cœur de nos réflexions un enjeu d’humanité, un enjeu social et économique qui ne manquerait pas de nous alerter régulièrement sur l’état des maladies professionnelles ainsi que sur l’évolution des accidents du travail, et représenterait alors, pour nous tous, un instrument de veille très utile.
Tous ces arguments justifient, à nos yeux, cet amendement de repli, qui tend à insérer un nouvel alinéa après l’alinéa 4.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je commencerai tout d’abord par faire une petite précision concernant les deux amendements précédents. Actuellement, la règle est déjà de moduler le taux de cotisation dans la branche AT-MP en fonction des risques supposés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais bien sûr ! C’est certain !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 1068 rectifié, ses auteurs nous proposent d’établir un rapport périodiquement. La commission n’est pas contre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement n’est pas contre non plus.
Cependant, nous souhaiterions que ce rapport soit rédigé comme celui du FSV, lequel prend en charge des dépenses non contributives, rapport qui est fourni au Parlement sur le sujet.
Nous souhaiterions donc que soient remplacés les mots « une commission présidée par un magistrat à la Cour des comptes remet tous les trois ans, au Parlement et au Gouvernement, un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évaluant » par les mots « un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évalue ». Si vous en êtes d’accord, un rapport très précis sur le sujet sera publié chaque année au moment du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais sans que soit créée une nouvelle commission, car cette procédure pourrait s’avérer très lourde.
M. le président. Monsieur Vera, que pensez-vous de la suggestion de M. le ministre ?
M. Bernard Vera. Je l’accepte, et je rectifie l’amendement en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 1068 rectifié bis, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, et ainsi libellé :
Après l'alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la contribution mentionnée à l'alinéa précédent est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale. Un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évalue le coût réel des dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 351-1-4 pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Mme Annie David. À l’unanimité ! Chers collègues, comment avez-vous fait ?
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l’article.