M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 21 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 151 est présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 347 rectifié est présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. François Autain, pour présenter l'amendement n° 21.
M. François Autain. À l’occasion de la présentation des amendements que nous avons défendus à l’article 9, nous sommes longuement revenus sur le cas particulier de la retraite des militaires, regrettant au passage que le ministre de la défense se soit montré incapable de tenir les engagements qu’il avait pris devant les militaires.
Étant fermement opposés à toute augmentation des bornes d’âge pour financer votre contre-réforme des retraites, nous sommes opposés à l’article 16, qui vise à relever de deux années l’ensemble des limites d’âge des militaires, lesquelles sont actuellement fixées entre 45 ans et 64 ans.
Toutefois, je soulignerai que, pour ne pas gêner le déroulement des carrières des officiers appelés à devenir prochainement officiers généraux, le Gouvernement a opté pour un autre mode de relèvement. En effet, comme le souligne M. le rapporteur « le relèvement ne s’effectuera pas nécessairement à raison de quatre mois par génération pour tous les militaires, même si tous atteindront les nouvelles limites d’âge à la date prévue ».
La démonstration est ainsi faite que, contrairement aux discours tenus depuis le début de l’examen du projet de loi dans cet hémicycle, d’autres pistes pouvaient être envisagées, notamment afin de rendre cette réforme moins insupportable pour nos concitoyens. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point ultérieurement.
Aussi, par cohérence avec l’ensemble des amendements que nous défendons sur ce projet de loi et parce que nous sommes convaincus que ce texte demeure injuste et insuffisant pour financer l’avenir des régimes de retraites – nous l’avons dit à maintes reprises –, nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 151.
M. Jean-Pierre Godefroy. L’article 16 prévoit le relèvement de deux années des limites d’âge des militaires, ainsi que le relèvement des durées de services des militaires sous contrat.
Je me suis procuré le rapport 2010 du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire. D’après ce rapport, les militaires prennent en moyenne leur retraite à 43,8 ans. Cet âge varie selon le grade : 51,3 ans pour les officiers ; 45,8 ans pour les sous-officiers ; 32,2 ans pour les militaires du rang.
En moyenne, les personnels militaires partent après une durée de service de 23,8 ans et bénéficient toujours en moyenne d’une bonification de 8,4 ans – opérations extérieures, services aériens, sous-marins, domaine que je connais particulièrement bien –, soit un total de 32,2 ans pour la durée moyenne d’assurance.
À titre de comparaison, les fonctionnaires civils de l’État prennent leur retraite à 58,8 ans après 33,6 années de service.
Les pensions des militaires sont relativement faibles : 1 484 euros à la fin de l’année 2008, contre 1 957 euros pour les fonctionnaires civils.
Il faut également rappeler que « les deux tiers – 63 % – des militaires quittent le service sans droit à pension militaire de retraite ». C’est le cas de la quasi-totalité des militaires du rang – 92 % – et du quart des sous-officiers, puisqu’ils sont rayés des cadres avant d’avoir accompli 15 années de services.
« Les militaires français partent à la retraite plus jeunes que les autres actifs, mais un peu plus âgés que les militaires américains, britanniques ou allemands », constate le rapport du Haut Comité. Il ne s’agit donc pas d’un avantage national, il s’agit bien plutôt d’une spécificité de l’état militaire que l’on retrouve dans les autres pays.
Quant à la proposition de l’article 16, le rapport énonce, noir sur blanc, qu’il n’est pas souhaitable de relever la limite d’âge des militaires. En effet, il précise qu’une telle réforme serait de nature à conduire à un vieillissement trop important de l’ensemble des effectifs.
Un relèvement des limites d’âge portant sur les grades terminaux de l’ensemble des corps risquerait de déséquilibrer la gestion et de ralentir les carrières, ce qui serait contraire à l’évolution induite par les nouveaux statuts particuliers.
Par ailleurs, une telle mesure nécessiterait de mettre en place un management particulier des fins de carrière.
La problématique de l’allongement de la vie active des militaires pose des difficultés.
La conjonction des facteurs structurels induit par cette réforme et des facteurs conjoncturels, tels que la disparation ou le transfert de régiments, aboutira à une impossibilité totale de reclasser certains personnels. Les collectivités locales sont déjà sollicitées à cette fin. Une fois de plus, l’État, qui pousse ces dernières à reprendre des personnels dont il ne veut plus, organise un transfert de ses charges à leurs dépens !
Aussi, en cohérence avec l’ensemble des propos que nous tenons depuis le début de l’examen de ce texte, nous vous proposons de supprimer cet article.
M. le président. L’amendement n° 347 rectifié n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 21 et 151 ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Ces deux amendements tendent à supprimer l’article 16, qui relève les limites d’âge et les durées de services des militaires.
La commission ne voit pas de raisons objectives d’écarter purement et simplement les militaires du projet de réforme des retraites. Aussi, elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Je remercie les orateurs qui ont défendu les deux amendements et ont avancé des arguments précis, en particulier issus du dernier rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire.
Je relativiserai néanmoins vos propos, monsieur Godefroy.
Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Il n’y a pas de raison objective – on peut ne pas être d’accord sur le principe – de déroger au principe même de la loi.
Je souhaite apporter quelques précisions.
Tout d’abord, l’impact de la mesure de relèvement ne concernera que 2 % des effectifs militaires totaux dans la mesure où les deux tiers des militaires réalisent une durée de service qui est bien plus faible que quinze ans. En moyenne, vous le savez, monsieur le sénateur, le militaire du rang a une durée moyenne de carrière de quatre à cinq ans, contre neuf ans en 2002. Cette durée va donc en diminuant. Le tiers restant a une moyenne de vingt-deux ans de carrière.
Le relèvement, vous le savez, sera fait de manière très progressive, puisqu’il va s’opérer en six ans à hauteur de quatre mois par an.
Compte tenu de ce relèvement très progressif et du faible impact de la mesure – seuls 2 % à 3 % des effectifs seront touchés –, toutes les questions que vous avez soulevées au sujet du format des armées et de leur capacité à pouvoir remplir leurs missions trouvent une réponse très mesurée.
Enfin, je précise que nous maintenons par ailleurs tous les avantages du régime des militaires, ce que j’aurai l’occasion de rappeler tout à l’heure. C’est vrai pour le droit à pension à jouissance immédiate et sans condition d’âge ; c’est vrai également pour la décote courte, qui, comme vous le savez, est de dix trimestres pour les militaires au lieu de vingt. Cela permet aujourd’hui, comme vous l’avez très justement relevé, messieurs les sénateurs, à un militaire de disposer d’une pension dès trente-trois ans s’il s’est engagé à dix-huit ans. Demain, il pourra prendre sa retraite à trente-cinq ans. Vous le voyez, nous sommes très loin des limites d’âge.
Vous avez évoqué de vraies questions, messieurs les sénateurs, mais je pense également vous avoir apporté de vraies réponses.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 21.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d'État, malgré les précisions que vous venez d’apporter et compte tenu de la logique qui est la nôtre, vous comprendrez que nous restions opposés pour les militaires – car, ne l’oublions pas, ce sont des fonctionnaires –, comme pour les autres professions, au recul de l’âge limite d’exercice.
Dans les faits, cumulé avec l’allongement de la durée de cotisation ainsi qu’avec le recul de l’ouverture de la retraite sans décote, il prend toute sa signification.
Ainsi, le recul d’une limite d’âge ne peut être considéré comme un droit nouveau pour des militaires qui souhaiteraient, par passion ou par amour du métier, se consacrer quelques années de plus à une profession qui les épanouit.
Associé aux autres mesures de cette réforme, le recul de la limite d’âge sera surtout un maintien en activité par nécessité financière, pour obtenir des pensions dont le montant sera le moins symbolique possible. Car, contrairement aux idées reçues, si le départ en retraite est accordé plus tôt, le montant des pensions militaires reste très faible.
À l’heure actuelle, les militaires connaissent un âge limite de départ à la retraite entre 45 ans et 64 ans en raison des nombreuses spécificités et des difficultés propres au métier. La pénibilité d’une carrière de militaire professionnel est réelle. Elle est actuellement reconnue à juste titre par cette limite d’âge.
Les militaires sont, en effet, envoyés de longs mois en mission loin de leur famille en caserne et en mission à l’étranger, cumulant de très nombreuses heures de service par jour et par semaine dans des conditions psychologiques et physiques particulièrement éprouvantes. N’oublions pas qu’un militaire, quand il est envoyé sur un lieu de conflit, est en service vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.
En matière de « privilèges », argument avancé pour mieux dégrader le droit à la retraite de tous les fonctionnaires des régimes spéciaux, on fait mieux ! Ce métier à risque exige de toute manière le maintien d’effectifs jeunes.
Il est également normal, comme le prévoit la législation actuelle, que les militaires puissent bénéficier du minimum contributif après 17 ans de services. Or le projet de loi que nous examinons, en plus du recul de la limite d’âge, prévoit le report du minimum contributif pour les militaires après 19,5 années de services. Rappelons, à ce titre, que le minimum contributif est inférieur au seuil de pauvreté et qu’un départ au bout de 17 ans ou 19,5 ans ne se justifie pas autrement que par la difficulté du métier.
De plus, comme l’indique le dernier rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, si les militaires français partent à la retraite plus jeunes que les autres actifs, ils partent cependant plus âgés que les militaires américains, britanniques ou allemands. La spécificité militaire est donc reconnue internationalement.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 16.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21 et 151.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 794, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 1 de l’article 16.
Chacun l’aura compris, il s’agit pour nous de rappeler notre opposition à cet article et, au-delà, à l’ensemble du projet de loi.
En décidant de bouger les trois curseurs fondamentaux que sont l’âge légal de départ à la retraite, l’âge permettant de bénéficier d’une retraite sans décote et la durée de cotisation, vous imposez à nos concitoyens une réforme qui est la plus lourde d’Europe et qui aura pour conséquence de rendre le régime de retraite français plus contraignant que partout ailleurs en Europe.
En effet, comme le soulignent avec raison Thierry Pech et Laurent Jeanneau dans le numéro d’Alternatives Économiques de juillet 2010 : « la plupart des pays qui ont décidé de relever les seuils d’âge compensent ce durcissement par des durées de cotisation inférieures ». Ils ajoutent : « le Royaume-Uni n’exige désormais que 30 ans de cotisations – contre précédemment 44 ans –, l’Espagne se contente de 15 ans de cotisations minimums et de 35 ans pour une pension complète, et les Pays-Bas demandent 50 ans… de résidence dans le pays ».
Autrement dit, contrairement à ce que vous ne cessez de répéter, cette réforme tend plus à satisfaire les agences de notation et ceux qui recherchent une harmonisation européenne vers le bas qu’à garantir l’avenir des régimes de retraites et le niveau des pensions.
Je regrette, d’ailleurs, que la commission des affaires sociales ait déclaré irrecevable l’un de nos amendements visant à préciser qu’aucune pension ne devait être inférieure au seuil de pauvreté.
En effet, à quoi bon une réforme si elle n’a pas pour objectif premier de garantir aux retraités, actuels et futurs, une retraite supérieure au seuil de pauvreté ? À quoi bon une réforme des retraites si elle n’a pas d’abord comme objectif la réduction des inégalités et l’assurance donnée aux retraités de vivre dignement.
Disant cela, je voudrais, une nouvelle fois, attirer l’attention de notre rapporteur, qui a personnellement contribué à la réécriture de l’article 1er A, déjà examiné. Cet article prévoit un niveau de retraite satisfaisant, sans que celui-ci soit jamais défini et sans qu’un plancher soit instauré. Or, pour que le dispositif soit efficace, il est nécessaire de définir dans la loi le montant en dessous duquel le niveau des pensions ne serait plus satisfaisant.
Aussi, je souhaite profiter de la présentation de cet amendement pour interroger de nouveau le rapporteur et le Gouvernement sur le montant en dessous duquel ils estiment qu’une pension n’atteint plus un niveau satisfaisant.
M. le président. L’amendement n° 1218, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
antérieures
par les mots :
dans sa version antérieure
La parole est à M. le rapporteur pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 794.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L’amendement n° 1218 est rédactionnel.
Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 794.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Il est défavorable à l’amendement n° 794 et favorable à l’amendement n° 1218.
M. le président. L’amendement n° 796, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 2 de cet article, qui porte l’âge de départ à la retraite sans décote pour les militaires à 47 ans, au lieu de 45 ans actuellement.
Vous le savez, nous sommes opposés sur le fond à la logique même des mesures d’âge, puisque nous sommes convaincus que cette disposition est destinée à contourner la question des financements. Il aurait pourtant fallu travailler plus en amont cette question, afin d’éviter que les salariés et les fonctionnaires, y compris les militaires, ne paient le prix de cette mesure.
Selon le dernier rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, les militaires prennent leur retraite, en moyenne, à 43,8 ans, partent après une durée de service de 23,8 années et bénéficient, toujours en moyenne, d’une bonification de 8,4 années. Ces bonifications sont, par exemple, celles qui sont accordées au titre des opérations extérieures, ou des services aériens et sous-mariniers. Au total, leur durée de cotisation correspond à 32,2 années.
De manière globale, les pensions sont relativement faibles : 1 484 euros en moyenne en 2008.
Afin d’éviter que les militaires de carrière, notamment les sous-officiers, ne soient sanctionnés, nous proposons par conséquent la suppression de cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 795, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Selon le dernier rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, les personnels militaires prennent leur retraite, en moyenne, à 44 ans. Cet âge varie selon le grade : 51 ans pour les officiers, 46 ans pour les sous-officiers, 32 ans pour les militaires du rang.
En moyenne, les personnels militaires partent après une durée de service de 23,8 années et bénéficient, toujours en moyenne, d’une bonification de 8,4 années – OPEX, services aériens, sous-marins, etc. –, soit, au total, une durée moyenne d’assurance de 32,2 années. À titre de comparaison, les fonctionnaires civils de l’État prennent leur retraite à 59 ans, après 33,6 années de service, auxquelles s’ajoute 1,6 année de bonifications.
Toutefois, à l’issue de leurs années de service, les militaires touchent des pensions relativement faibles : 1 484 euros, en moyenne, en 2008, contre 1 957 euros pour les fonctionnaires civils.
Surtout, ces pensions sont inégalement réparties. Il faut rappeler que les deux tiers, soit 63 %, des militaires quittent le service sans droit à pension militaire de retraite. C’est le cas de la quasi-totalité des militaires du rang et du quart des sous-officiers, puisqu’ils sont rayés des cadres avant d’avoir accompli 15 années de service.
Au final, les militaires français, s’ils partent à la retraite plus jeunes que les autres actifs, partent tout de même plus tard que les militaires américains, britanniques ou allemands. Il ne s’agit donc pas d’un avantage national, il s’agit bien d’une spécificité de l’état militaire que l’on retrouve dans les autres pays. Qui plus est, contrairement à ce que laissent penser les croyances en la matière, leur droit à une pension n’est absolument pas assuré.
Ce texte prévoit de retarder encore l’âge de leur départ à la retraite.
La possibilité pour les sous-officiers de partir à la retraite avec une pension à jouissance immédiate après 15 ans de service sera progressivement supprimée. Comme pour l’ensemble des salariés, leur durée de cotisation sera allongée de deux ans. En 2016, il leur faudra donc avoir servi 17 ans afin de pouvoir prétendre à une pension à jouissance immédiate.
Cela aura deux conséquences : le nombre de militaires quittant le service sans droit à pension augmentera considérablement, et ces métiers qui, par essence, ne peuvent plus être exercés au-delà d’un certain âge vont connaître un vieillissement particulièrement dommageable pour l’activité elle-même, pour les conditions de vie et de travail des militaires, et même pour leurs conditions de sécurité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 797, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 798, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 799, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter ces trois amendements.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous l’avons vu tout au long des débats qui ont précédé la séance d’aujourd’hui, l’un de vos arguments d’autorité est de prétendre que l’allongement de l’âge légal de la retraite serait l’une des conditions essentielles pour sauver notre système de retraite par répartition. Vous déclinez ce dogme de façon intangible, et aveuglément.
Comme pour les autres catégories de salariés, le relèvement de deux années de l’âge permettant l’ouverture de droits à pension serait ainsi, avec cet article 16, également applicable aux militaires.
Cette application « uniforme », si j’ose dire, ne tient aucunement compte de la spécificité de la condition militaire. En effet, dans un grand pays comme le nôtre, aux traditions et aux capacités militaires établies et internationalement reconnues, l’une des conditions nécessaires afin de pouvoir disposer de forces armées efficaces et opérationnelles est qu’elles soient composées d’hommes et de femmes jeunes, ou dans la force de l’âge.
Certes, les militaires ne sont pas tous affectés à des unités combattantes. Le ministre de la défense, en application des recommandations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, ne cesse pourtant d’affirmer son intention d’inverser le ratio actuel entre les fonctions de soutien et l’opérationnel, afin de mieux répondre aux exigences de la projection de nos forces à l’étranger.
Nos forces projetables, fer de lance de nos armées, doivent donc impérativement être composées d’hommes et de femmes jeunes, qu’il s’agisse des hommes du rang, de l’encadrement ou du commandement.
Ces mesures de relèvement des limites d’âge vont vite se heurter aux réalités du terrain, car il est évident pour tout le monde qu’un militaire ne peut pas accomplir les mêmes tâches physiques à 59 ans qu’à 20 ans. C’est pourtant l’objectif de certains alinéas de cet article.
Pour cette raison, nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cette série d’amendements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Même avis, car nous sommes toujours dans la même logique de suppression.
M. le président. L’amendement n° 800, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 801, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 802, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, pour présenter ces trois amendements.
Mme Marie-Agnès Labarre. Il s’agit d’amendements de conséquence.
Vous avez décidé, sans aucune concertation avec les intéressés, d’allonger systématiquement les limites d’âge des militaires, et ce pour toutes les tranches d’âge. Nous avons dénoncé précédemment la pratique dogmatique que révèle l’application mécanique de cette mesure, mais nous avons également d’autres raisons de nous y opposer.
On peut craindre, par exemple, que le vieillissement important de l’ensemble des effectifs de nos armées, auquel conduirait cette disposition, ne constitue rapidement un handicap, en accentuant la différence qui existe, dans ce domaine, avec les armées amies, qui sont d’un niveau opérationnel tout à fait comparable au nôtre. En effet, nos militaires partent aujourd’hui à la retraite un peu plus tard que leurs collègues américains, britanniques ou allemands.
En outre, cette disposition aura assurément un effet négatif sur le déroulement des carrières, car elle entrera en contradiction avec les politiques pratiquées jusqu’à présent, qui permettent une promotion rapide des officiers et des sous-officiers les plus méritants. Elle risque ainsi de créer un véritable goulet d’étranglement pour les grades les plus élevés.
Ces raisons supplémentaires nous incitent à proposer la suppression du relèvement, pour certaines tranches d’âge, des limites d’âge des militaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 800, 801 et 802
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Danglot. Mon explication de vote portera plus particulièrement sur l’amendement n° 802.
Il est vrai que les ressources de la caisse de retraite des militaires avoisinent 8,2 milliards d’euros pour seulement 513 000 personnes. À titre de comparaison, les régimes sociaux de la SNCF, de la RATP et d’EDF comptent deux fois plus de salariés et coûtent un tiers de moins que la retraite des militaires. Pourtant, ces salariés sont régulièrement montrés du doigt, désignés comme des privilégiés, voire des parasites, et continuellement accusés d’être responsables de tous les maux et de tous les déficits publics.
Le coût des retraites des militaires est donc beaucoup plus élevé pour un nombre de retraites moitié moins important. Il est pour le moins étrange de taire le coût de la politique militaire française, qui mériterait pourtant un large débat, et, dans le même temps, de stigmatiser sans cesse les acteurs d’un service public déjà dépouillé de tous ses biens.
De toute façon, nous avons renoncé à chercher une quelconque cohérence dans la politique du Gouvernement, qui agit, dans les faits, de façon dogmatique et, dans le fond, sous la pression des lobbys financiers.
Quoi qu’il en soit, la réforme proposée par le Gouvernement pour les retraites des militaires ne nous satisfait en rien. Au contraire, en relevant l’âge de la retraite pour tous les militaires sans distinction, elle ne fait qu’accentuer les inégalités et disparités qui existent au sein de l’armée.
Comme nous l’avons dit précédemment, les deux tiers des militaires quittent le service sans droit à pension militaire de retraite. Le rehaussement de l’âge de départ rendra encore plus nombreux ceux qui ne pourront pas toucher de pension. S’agissant de ceux qui ont servi durant le nombre d’années nécessaire, les situations sont totalement disparates. Si certains touchent des pensions importantes, d’autres – bien qu’ils aient exercé des métiers à haut risque, où la pénibilité est grande et qui les ont contraints tant dans leur vie sociale que familiale – touchent des pensions particulièrement minimes. Dois-je vous rappeler que le système des pensions militaires est d’abord conçu pour favoriser les départs jeunes, afin de maintenir une moyenne d’âge relativement basse et de permettre une reconversion des anciens militaires ?
En relevant la limite d’âge, non seulement vous contraignez des personnes à exercer un métier pénible plus longtemps, mais vous diminuez également le niveau de leurs pensions ainsi que leurs chances de reconversion dans la vie civile. (M. Guy Fischer applaudit.)