Mme Marie-Christine Blandin. Je trouve que c’est un excellent amendement, particulièrement intelligent et pondéré dans sa proposition. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Depuis cinquante ans, le ratio des produits du travail n’a cessé de se dégrader en passant de la masse salariale vers une capitalisation, dont on aurait pu espérer, à la limite, qu’elle dynamiserait l’outil de production industrielle. Pas du tout !
C’est une capitalisation spéculative, uniquement destinée à enrichir certains et à mettre sur les marchés boursiers des flux financiers qui, parfois, disparaissent dans des paradis fiscaux, ou bien s’en vont dans des placements, délétères et destructeurs d’empois. On marche vraiment sur la tête !
Quand je dis que cet amendement est intelligent, c’est parce qu’il est pondéré. Il renvoie à une modulation. Si nous procédions ainsi, je pense que les bulles spéculatives, les vraies et fausses alertes à la crise, la dégradation de l’emploi et l’impasse dans laquelle nous nous précipitons, tout cela serait derrière nous. En plus, nous aurions des moyens de solvabilité pour les guichets sociaux.
Aussi, mon groupe et moi-même soutiendrons cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l’amendement n° 847.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec cet amendement de suppression de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, nous visons un objectif double.
Premièrement, nous voulons à nouveau mettre en exergue l’incohérence entre vos discours et vos actions. Ainsi, le Premier ministre, qui est censé porter cette réforme des retraites, peut être qualifié de pompier pyromane. Celui qui, aujourd’hui, crie au feu et ne cesse de dire que cette réforme est inéluctable à cause de la faiblesse des comptes publics, est aussi celui qui, voilà huit ans, a réduit les cotisations sociales patronales sur les bas salaires.
Bien évidemment, cela n’a créé aucun emploi. Par ailleurs, cette mesure n’a entraîné aucune augmentation de salaire.
Deuxièmement, cette mesure a creusé les déficits des comptes sociaux de près de 30 milliards d’euros par an. Ainsi, depuis 2002, par un allégement global des cotisations sociales sur les salaires jusqu’à 1,6 fois le SMIC, ce sont près de 250 milliards d’euros qui ont été perdus, ce qui est considérable.
Cette ristourne généralisée, véritable cadeau aux actionnaires, aux côtés d’ailleurs de bien d’autres, comme vient de le démontrer le rapport de la Cour des comptes sur les niches fiscales en faveur des entreprises, est l’une des toutes premières causes de nos déficits.
Par cette réforme, vous présentez maintenant la note aux salariés en les contraignant à une vie professionnelle plus longue. Mes chers collègues, est-ce là une réforme juste ?
De la sorte, par cet amendement, nous vous proposons de réorienter cette dépense fiscale vers les caisses d’assurance sociale qui en ont bien besoin.
Une telle mesure serait tout particulièrement utile aux caisses de retraite qui trouveraient là une ressource substantielle, permettant le maintien du droit à la retraite à 60 ans.
Vous voyez que des solutions existent. Pourtant, vous ne cessez de dire qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses publiques. Cela est normal puisque, depuis dix ans, vous vous employez à les vider.
Aussi, par notre amendement, nous vous proposons de les remplir à nouveau, en supprimant cet avantage excessif. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 847.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 9 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l’adoption | 152 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 834.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l'amendement n° 844.
M. Jack Ralite. Monsieur le ministre, votre politique pour le financement des retraites s’explique par une seule formule : « 85% à la charge des salariés, 10 % à celle du patronat ».
M. Didier Guillaume. Eh oui !
M. Jack Ralite. C’est symptomatique de toute votre politique, jusqu’à la caricature !
Le versement d’un chèque de 30 millions d'euros à Mme Bettencourt (Protestations sur les travées de l’UMP.), geste de la plus grande injustice, a permis, paradoxalement, de démontrer à des millions de Français qu’il y avait de l’argent dans ce pays.
Vous nous aviez habitués à tenir le sempiternel discours sur la faillite de la France, sur des caisses de l’État qui seraient vides. Et d’un seul coup, nos compatriotes se sont rendu compte que c’était vous qui les vidiez en faisant des cadeaux, en toute légalité, à vos amis les plus chers, si je puis dire.
On comprend aujourd’hui toutes les gesticulations auxquelles vous êtes soumis pour tenter d’expliquer l’inexplicable.
Car en France, selon une étude de l’INSEE, 8 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté ; 1 million d’entre elles sont retraitées, alors que d’autres retraités des beaux quartiers s’offrent des îles et des tableaux à tout va. (Oh ! sur les travées de l’UMP. – Mme Annie David approuve.)
Ces 8 millions de personnes représentent 13 % de la population française.
Toujours selon la même étude, ce sont les familles monoparentales qui sont les plus touchées par la pauvreté. Ainsi, 30 % d’entre elles, soit 1,64 million de personnes, vivraient sous le seuil de pauvreté, alors que le pourcentage est de 19,7 % pour les couples ayant trois enfants et de 16,9 % pour les personnes seules.
La moitié des retraités touchent mensuellement moins de 1 000 euros et connaissent des fins de mois très difficiles.
Toutes les réductions de pensions ne sont que le fruit de « vos » réformes, et toutes les mesures d’âge que vous avez prises, et qui devaient, aux dires de M. Fillon, résoudre tous les problèmes, ont eu pour conséquence une chute de 20 % des pensions.
Cette situation n’est pas le fruit du hasard ; elle est la conséquence directe de votre politique qui abonde, jusqu’au gavage, une minorité des plus riches et appauvrit un nombre toujours plus important de familles.
Pourtant, il est possible d’opter pour d’autres solutions, mais celles-ci sont très éloignées de vos schémas de pensée. Je considère même que vous n’y accédez plus !
Vous balayez d’un trait de plume notre volonté de taxer les plus riches. Vous fuyez cette question pourtant centrale en matière de financement de nos retraites. Le partage des richesses pour vous se résume au bouclier fiscal. Vous avez réinventé la recette du pâté d’alouette, une alouette pour un cheval !
Avec la crise, les Français se sont rendu compte que vous étiez en capacité de mobiliser des millions d’euros pour venir en aide aux plus fortunés, comme les banques. Quand il s’agit des retraites, vous voulez nous faire oublier que ces mêmes entreprises ont des moyens suffisants pour les financer. Au cours du premier semestre 2010, les entreprises du CAC 40 ont vu leurs résultats augmenter de 85 % et ont mis de côté un pactole de 41,5 milliards d’euros. Pourquoi ces revenus seraient-ils à l’abri de toute taxation sociale ?
Mme Annie David. Bonne question !
M. Jack Ralite. Un établissement bancaire a vu ses profits multipliés par soixante-dix dans la même période ! Et les banques ne devraient pas participer à la solidarité nationale pour les retraites ?
Comme nous l’avons écrit dans l’exposé des motifs de notre proposition de loi, « trois chiffres illustrent l’impossible coexistence du capitalisme financier avec notre système de protection sociale par répartition : entre 1993 et 2009, le volume des cotisations sociales a augmenté de 19 % tandis que le PIB, notamment en raison des gains de productivité, augmentait de 33 % et que les revenus financiers des entreprises et des banques progressaient de 143 %...
« Par ailleurs, la part des produits financiers dans la valeur ajoutée des entreprises est désormais près de deux fois supérieure – 29 % contre 15 % – à celle de leurs cotisations sociales.
« Il devient donc de plus en plus difficile pour les entreprises et le secteur financier de concilier le maintien d’un taux d’emploi élevé, leur contribution au financement de la protection sociale et les revenus qu’ils doivent servir au capital, eux-mêmes détournés de l’investissement productif. »
Votre politique, monsieur le ministre, ne suscite que bas salaires et chômage à l’autre bout de la chaîne. On sait que 1 million de chômeurs de moins, ce sont 5 milliards d’euros supplémentaires qui rentrent dans les caisses de la sécurité sociale. Ce n’est pas rien !
Vous préférez favoriser la spéculation boursière, les revenus du capital plutôt que de participer à développer l’emploi.
Selon l’INSEE, les revenus financiers des entreprises représentent 305,2 milliards d’euros. On n’arrive même pas à s’imaginer cette somme quand on gagne moins de 1 000 euros par mois !
Et, dans le même temps, l’on assiste à des suppressions d’emplois, qui participent à l’augmentation de ces revenus financiers eux-mêmes. « Surexploiter », « délocaliser », telles sont les devises qui permettent au modèle social que vous défendez de faire flamber les revenus financiers. C’est un modèle qui marche sur la tête !
Le capital que vous défendez a besoin de plus en plus de revenus. Cette réforme des retraites, que vous voulez imposer, prépare en sous-main l’entrée des grands groupes d’assurance qui attendent avec « angoisse » l’heure de prendre en charge ce secteur. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Bizet. Caricature !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jack Ralite. Vous êtes en mission commandée pour mettre en place les basses œuvres du MEDEF. (M. Christian Cointat s’exclame.)
Vous étiez convaincu que rien ne vous arrêterait ; aujourd'hui, vous commencez à vous poser des questions. En jetant quelques miettes au peuple, vous pensez que vous allez vous en tirer à bon compte.
M. Christian Cambon. Monsieur le président, …
M. le président. Il vous faut vraiment conclure, mon cher collègue !
M. Jean Bizet. C’est terminé !
M. Jack Ralite. Mon explication de vote est presque terminée, monsieur le président. (C’est trop long ! sur les travées de l’UMP.)
Mes chers collègues, vous ne m’empêcherez pas de dire qu’il y a des riches et des pauvres, et que vous, vous attaquez les pauvres et gavez les riches ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Protestations sur celles de l’UMP.)
Aujourd’hui, un autre palier a été franchi. Des grèves reconductibles sont annoncées dans plusieurs secteurs. Ce n’est pas par caprice. Elles répondent à une nécessité.
Monsieur le ministre, vous n’avez pas d’autre solution que de retirer le présent projet de loi et de vous mettre autour d’une table pour négocier une réforme qui tienne compte de l’intérêt de l’ensemble des salariés, de l’ensemble de notre économie.
Vous pensiez pouvoir passer en force. C’est avoir peu de considération pour le peuple de France, …
M. Christian Cointat. Au contraire, nous, nous avons de la considération !
M. Jack Ralite. … qui a montré à de nombreuses reprises au cours de son Histoire ses capacités de résistance.
Mes chers collègues, je vais vous rappeler un souvenir, qui devrait vous être cher.
M. le président. Concluez, mon cher collègue !
Plusieurs sénateurs de l’UMP. C’est terminé !
M. Jack Ralite. En 1944, à Philadelphie, les Alliés, dont le général de Gaulle, ont décidé un premier progrès. C’était avant les accords de Bretton Woods, avant la création de l’ONU, avant la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1948 : il s’agissait de la déclaration d’une nouvelle politique des droits sociaux. La retraite française par répartition en est une expérience créatrice.
M. Christian Cointat. Contrairement à vous qui la laissez mourir, nous, nous voulons la sauver !
M. Jack Ralite. Rappelez-vous, au mois de mai 1944, le Débarquement n’avait pas commencé !
M. Jean Bizet. Le monde a changé !
M. le président. Mon cher collègue, votre temps de parole est largement épuisé.
M. Jack Ralite. Vendredi, vous verrez qu’un grand retournement aura lieu. Vous ne pouvez pas continuer ainsi ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Permettez-moi d’ajouter qu’il est agréable, au sens ironique du terme, de voir les représentants des riches interrompre un représentant des pauvres : j’ai été maire d’Aubervilliers, j’habite dans une HLM et je sais ce qu’est la pauvreté ! (Très bien ! et applaudissements sur mêmes travées.)
M. Alain Gournac. Rendez les HLM aux pauvres !
M. Jack Ralite. Vous devriez avoir honte de réagir ainsi ! (Vifs applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Mesdames, messieurs de la majorité, lorsque l’orateur précédent a reproché au Gouvernement de favoriser les futurs dispositifs d’assurance privée, vous avez ri, ou souri, ou éclaté de rire.
Or, si vous prenez le métro, vous pouvez voir sur les panneaux publicitaires depuis quarante-huit heures les nombreuses affiches d’un grand assureur portant le slogan : « C’est le moment de prendre une assurance privée pour votre retraite »… (Rires sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 670.
Mme Annie David. Monsieur le président, cette explication de vote porte sur l’ensemble des amendements que nous avons présentés et qui ont pour objet de soustraire aux dispositions de l’article 5 les assurés dont l’activité relève de certaines conventions collectives.
Monsieur le ministre, vous avez estimé injuste notre demande. Vous vous êtes interrogé sur la raison justifiant l’exemption de telle catégorie de profession plutôt que de telle autre. Votre raisonnement n’est pas totalement faux.
Mais, pour notre part, nous voulons la retraite à 60 ans pour tous, et c’est la raison pour laquelle nous avons déposé l’amendement n° 3 tendant à la suppression de l’article 5. Or cet amendement ayant été repoussé, nous avons ensuite énuméré, convention par convention, les branches professionnelles que nous voulions voir exclure du dispositif proposé.
Ces conventions collectives visent des femmes et des hommes qui se lèvent tous les matins pour se rendre à leur travail, parfois avec des horaires décalés, voire en 3x8, parfois le week-end. Ils peuvent être exposés à des produits chimiques, au bruit, travailler dehors, accomplir des gestes répétitifs.
Nous voulions attirer votre attention, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur les conditions de travail de ces millions de femmes et d’hommes, que la réforme que vous voulez leur imposer met de plus en plus en colère. Ils sont opposés aux deux années supplémentaires de travail que vous voulez leur infliger pour qu’ils puissent avoir droit à une retraite digne.
L’augmentation du nombre d’années de cotisation fera l’objet d’un autre débat.
Lors de votre intervention, vous avez plaidé pour une reconnaissance de la pénibilité métier par métier. Chiche, monsieur le ministre ! C’est ce que nous vous demandons, mais ce n’est pas ce que vous inscrivez dans votre texte, puisqu’il individualise la pénibilité. Vous ne voulez pas prendre en compte les métiers pénibles. Vous nous parlez de pénibilité par métier, mais ce n’est pas ce que vous prévoyez. Je vous avoue que je n’ai pas compris votre explication sur ce point.
Selon vous, on ne peut pas préjuger la pénibilité : elle doit être constatée une fois les salariés frappés d’une certaine invalidité. Vous refusez de ce fait la pénibilité différée.
Pourtant, comme vous le savez, il s’agit là d’un point de blocage dans les négociations sur la pénibilité engagée entre les partenaires sociaux et le MEDEF, puisque ce dernier ne veut prendre en compte ni la pénibilité différée ni les risques psychosociaux.
Monsieur le ministre, si vous nous faites des propositions sur la reconnaissance de la pénibilité métier par métier, en vous référant à l’ensemble des professions déjà répertoriées dans des listes visant des maladies professionnelles, si vous revenez sur l’article 25 que nous examinerons ultérieurement, peut-être pourrons-nous alors faire un pas dans votre direction.
En revanche, si vous maintenez votre position en faveur de la pénibilité individualisée, avec une reconnaissance médicale d’invalidité, l’examen de l’article 25 promet de grands débats !
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur l'amendement n° 676.
M. François Autain. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il me paraît nécessaire de revenir sur cet amendement parce qu’il ne m’a pas semblé que vous aviez su prendre l’exacte mesure de sa portée, concernant les salariés des coopératives agricoles.
La défense de cet amendement mettait l’accent principalement sur l’historique des caves coopératives vinicoles du midi de la France. Or, aujourd’hui, d’autres régions qui auraient pu se croire à l’abri sont également touchées, celle des vins de Bordeaux, par exemple.
On assiste à une concentration de plus en plus forte des caves coopératives. L’avenir de leurs salariés s’en trouve affecté. Pour cette seule région, les fusions ont abouti à passer de quarante à cinq groupes coopératifs qui regroupent 75 % de la production organisée. Le même processus se produit dans le Languedoc-Roussillon.
Il est possible que ces concentrations permettent de mieux répondre aux besoins de la viticulture d’aujourd’hui. Vignerons, salariés et sociétés de négoce sont exposés aux mêmes défis.
Mais comme l’a déclaré le président de la Fédération des caves coopératives d’Aquitaine, la coopération « a les cartes en main pour faire partie des acteurs majeurs de cette sortie de crise. », ajoutant : « La grande richesse du système coopératif est le facteur humain, mais c’est aussi, sans aucun doute, le socle de sa fragilité extrême. »
Il estime, en effet, que les salariés ont également leur mot à dire dans les restructurations nécessaires. Je cite ses propos : « Les conseils d’administration doivent prendre conscience que leur rôle a changé ; ils doivent être aujourd’hui les décideurs des grandes orientations de leurs entreprises et les garants de la pérennité de leur structure et du revenu de leurs adhérents, mais déléguer la majorité du pouvoir à un nombre restreint de décideurs, politiques et salariés. » (Mme Jacqueline Panis s’exclame.)
En faisant en sorte que les salariés des caves coopératives vinicoles continuent à bénéficier du même nombre d’années de cotisation, vous pourriez ne pas remettre en cause les règles conventionnelles qui régissent les relations entre les employeurs et les salariés des caves depuis 1983 pour ce qui est de l’âge du départ en retraite.
Rien ne justifie aujourd’hui que ces salariés soient pénalisés de cette façon. La situation de crise ne justifie en aucune manière que les droits sociaux soient tirés vers le bas.
En 2005, les 850 coopératives existantes rassemblaient 100 000 vignerons coopérateurs et 22 000 salariés, soit 8 100 équivalents temps plein. Le chiffre d’affaires s’élevait à 4 750 millions d’euros et le secteur coopératif pesait pour 51 % dans la production vinicole française et produisait 70 % des vins de pays. C’est dire le poids économique de ce secteur, qui est actuellement en pleine évolution !
Vouloir, comme vous le faites aujourd’hui, allonger le temps de travail pour l’ensemble de ces salariés me semble parfaitement inadmissible. En effet, les salariés de ce secteur sont confrontés à des conditions de travail souvent pénibles et, chacun le sait, l’espérance de vie des travailleurs moins qualifiés est inférieure à celle des autres salariés.
Donc, si voulez être logique, monsieur le ministre, ce n’est pas l’allongement de la durée de travail qu’il faut pour ces travailleurs-là, mais bien la réduction de leur durée de cotisation, si l’on veut réellement prendre des mesures tenant compte de l’âge, comme vous pouvez l’avancer dans vos arguments.
Vous connaissez, comme nous, l’âge de départ moyen des salariés. Le taux d’emploi des personnes âgées de 59 ans n’est plus que de 40 %. En allongeant la durée de cotisation et en relevant l’âge légal de départ à la retraite, vous allez aboutir à l’allongement de la durée d’attente pour des seniors hors travail.
Au lieu de servir à ces derniers des pensions de retraites pendant cette période, il faudra leur verser des allocations ASSEDIC, à moins que vous ne souhaitiez les voir basculer vers les dispositifs de revenu minimum pour en faire des assistés sociaux et transférer la dépense vers les départements.
Tels sont les compléments que je tenais à apporter afin de vous inciter, mes chers collègues, à voter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Didier Guillaume applaudit également.)
M. Guy Fischer. Il est très utile !
M. David Assouline. J’ai le tournis, ça va trop vite ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 691.
M. Guy Fischer. Vous avez trop accéléré le rythme, monsieur le président ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. David Assouline. Oui !
M. Guy Fischer. Je voudrais vous donner un exemple pratique. Pour illustrer mon vote sur cet amendement relatif à la situation des salariés de l’industrie des glaces, sorbets et crèmes glacées (Exclamations amusées.), je me permettrai, mes chers collègues, de me servir de cet emballage que je me suis procuré. (M. Guy Fischer brandit un emballage de cornets de glace. – Sourires.)
Cet emballage, que je vous montre, présente de manière séduisante et attirante l’un de ces produits qui fascinent la plupart des enfants et des petits-enfants et qui sollicitent notre gourmandise naturelle. Je vois Mme Christiane Demontès acquiescer. (Nouveaux sourires.)
À sa manière, cet emballage donne aussi des indications sur le travail dans cette industrie. Pour les voir, il faut oublier l’image et lire quelques-unes des mentions figurant sur les différentes faces du carton.
Tout d’abord, cet emballage concerne ce que l’on appelle un produit de distribution, ou encore « marque de distributeur », en l’occurrence Grand Jury, mais je ne fais pas de publicité ! (Sourires.)
Ensuite, l’emballage nous dit où est fabriqué le produit. Sur la face où figurent les ingrédients utilisés, une petite mention précise : « EMB 61006 ». Elle correspond au lieu de fabrication du produit. Ainsi, 61 désigne le département de l’Orne et 006, la commune d’Argentan. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Robert del Picchia. Quand la mangeons-nous, cette glace ?
M. Guy Fischer. Vous voyez, mes chers collègues, que j’ai pris un bon exemple !
Pour tout dire, je peux même ajouter que l’entreprise dont il est question et qui produit cette « marque de distributeur » est tout simplement la société Ségès Frigécrème, entreprise bien connue sous cette appellation et qui, comme l’ensemble des sociétés de l’agroalimentaire, fabrique à la fois des produits sous cette marque et des produits pour plusieurs grands groupes de la distribution.
Je vous propose d’aller un peu plus loin encore.
L’un des côtés de cet emballage porte un certain nombre de données.
On y trouve la date limite d’utilisation optimale, autrement dit la date à partir de laquelle la qualité du produit n’est plus garantie. Cette date figure en chiffres, soit « 12/2011 », c'est-à-dire décembre 2011.
Ne vous inquiétez pas, les collaborateurs de notre groupe, particulièrement productifs depuis le début de ce débat – je leur rends d’ailleurs hommage –, n’ont pas attendu Noël 2011 pour manger les glaces contenues dans l’emballage ! (Sourires.)
Plus intéressantes sont les autres indications. Ainsi, on peut lire « LO 159 », ce qui est non pas un code secret, mais uniquement une indication du jour de fabrication. Ce carton de crèmes glacées a donc été usiné le 159ème jour de l’année, c’est-à-dire le 8 juin. C’était un mardi, si je me souviens bien… (Rires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mais ce qui retient davantage encore notre attention, c’est l’indication « 00:48 ». Et j’atterris ! (Nouveaux rires sur les mêmes travées.) Ces chiffres nous précisent que ce dessert apprécié des enfants a été fabriqué, sans doute en grande partie, par d’immenses machines, commandées par des opérateurs derrière elle, à l’heure où la plupart de nos concitoyens dorment.
Je sais bien qu’on nous a dit que la pénibilité ne se mesurait pas au recours au travail de week-end ou de nuit, et que vous ne l’apprécieriez, avec votre texte rétrograde, qu’à concurrence du handicap supporté par le salarié. Le handicap serait une sorte de droit à la retraite !
C’est ce qui nous a fait plaider pour tenir compte de la pénibilité. Nous y reviendrons longuement. Plutôt que de voter cette réforme des retraites, il faudrait réformer le texte, le « retraiter » ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. C’était l’instant sourire ! Ne doutez pas que les salariés de Ségès Frigécrème seront informés de votre vote sur cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Robert del Picchia. Et la glace ?
M. le président. Mes chers collègues, maintenant que la glace est rompue (Sourires.), je mets aux voix l'amendement n° 691.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote sur l'amendement n° 773.