Sommaire

Présidence de Mme Catherine Tasca

Secrétaires :

Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Pierre Godefroy.

1. Procès-verbal

2. Nouvelle organisation du marché de l'électricité. – Suite de la discussion d'un projet de loi (Texte de la commission)

Article 8

Amendement n° 203 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l’économie ; Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. – Rejet.

Amendement n° 89 de M. Roland Courteau. – M. Roland Courteau.

Amendement n° 204 de M. Jean-Claude Danglot. – M. Gérard Le Cam.

Amendement n° 115 rectifié de M. Roland Courteau. – M. Roland Courteau.

Amendement n° 267 de la commission. – M. le rapporteur.

Mme la secrétaire d'État, MM. Roland Courteau, Didier Guillaume, Mmes Nicole Bricq, Nathalie Goulet. – Rejet des amendements nos 89, 204 et 115 rectifié ; adoption de l’amendement no 267.

Amendements identiques nos 90 de M. Roland Courteau et 263 rectifié bis de M. Yvon Collin. – MM. Didier Guillaume, François Fortassin, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, M. Claude Bérit-Débat, Mme Nathalie Goulet. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 197 rectifié de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Michel Billout, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, M. Roland Courteau. – Adoption.

M. Daniel Raoul.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 8

Amendement n° 1 de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. – MM. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Retrait.

Article 9

M. Roland Courteau.

Amendement n° 268 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption.

Amendement n° 92 de M. Roland Courteau. – MM. Claude Bérit-Débat, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 93 de M. Roland Courteau. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, Mmes la secrétaire d'État, Évelyne Didier. – Rejet.

Amendement n° 116 de M. Roland Courteau. – MM. Didier Guillaume, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 117 de M. Roland Courteau. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, M. Daniel Raoul. – Adoption.

Amendement n° 272 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption.

Amendement n° 273 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption.

Amendements identiques nos 94 rectifié de M. Roland Courteau et 264 rectifié bis de M. Yvon Collin. – MM. Roland Courteau, François Fortassin, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 128 de M. Roland Courteau. – MM. Claude Bérit-Débat, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, MM. Daniel Raoul, Dominique Leclerc, Roland Courteau. – Rejet.

Amendement n° 129 de M. Roland Courteau. – MM. Daniel Raoul, le rapporteur, Mme le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 207 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 206 rectifié de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l’article 9

Amendement no 277 de la commission. – M. le rapporteur.

Amendement n° 16 de M. Philippe Adnot. – M. Philippe Adnot.

M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, MM. Philippe Adnot, Daniel Raoul. – Adoption de l'amendement no 277 insérant un article additionnel, l’amendement no 16 devenant sans objet.

Article 9 bis

Amendement n° 35 rectifié de M. René Beaumont. – MM. René Beaumont, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Amendement no 91 rectifié de M. Roland Courteau. – Devenu sans objet.

Article 10 (suppression maintenue)

Article 11

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Amendement n° 205 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Michel Billout, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 11 bis A (nouveau)

Amendements identiques nos 11 rectifié de M. Xavier Pintat, 142 rectifié bis de M. Jean Besson, 241 rectifié bis de M. Jean-Claude Merceron, 253 rectifié quater de M. Yvon Collin et sous-amendements identiques nos 281 à 284 du Gouvernement. – M. Xavier Pintat, Mme la secrétaire d'État, MM. Michel Sergent, Jean-Claude Merceron, François Fortassin, le rapporteur, Alain Gournac. – Adoption des sous-amendements identiques nos 281 à 284 et des amendements identiques nos 11 rectifié, 142 rectifié bis, 241 rectifié bis, 253 rectifié quater, modifiés.

Amendement n° 208 de M. Jean-Claude Danglot. – Devenu sans objet.

Adoption de l'article modifié.

Article 11 bis

Amendement n° 5 rectifié bis de M. Charles Revet. – M. Charles Revet.

Amendement no 225 de M. Daniel Dubois. – M. Jean-Claude Merceron.

M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, MM. Xavier Pintat, Charles Revet, Jean-Claude Merceron. – Retrait des amendements nos 5 rectifié bis et 225.

Adoption de l'article.

Article 12

MM. Claude Bérit-Débat, Michel Billout.

Amendements identiques nos 102 de M. Michel Sergent et 209 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Nicole Bricq, MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Mmes la secrétaire d'État, Nathalie Goulet, M. le rapporteur pour avis. – Rejet des deux amendements.

Amendement no 3 rectifié de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. – MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, M. Michel Sergent. – Adoption.

Amendement n° 222 de M. Jacques Muller. – MM. Jacques Muller, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 105 de M. Michel Sergent. – M. Michel Sergent.

Amendement n° 2 de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. – M. le rapporteur pour avis. – Retrait.

M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, MM. Claude Bérit-Débat, Michel Sergent. – Rectification de l’amendement no 105 ; adoption de l’amendement no 105 rectifié.

Amendement no 103 de M. Michel Sergent. – MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme Nicole Bricq. – Retrait.

Amendement no 12 de M. Xavier Pintat. – Devenu sans objet.

Amendement n° 104 de M. Michel Sergent. – Mme Nicole Bricq.

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

M. le rapporteur, Mmes la secrétaire d'État, Nicole Bricq. – Rejet de l’amendement no 104.

Amendement n° 107 de M. Roland Courteau. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, Mmes la secrétaire d'État, Nathalie Goulet, Nicole Bricq. – Rejet.

Amendements identiques nos 210 de M. Jean-Claude Danglot et 227 de M. Daniel Dubois. – Mme Odette Terrade, MM. Jean-Claude Merceron, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

3. Questions d'actualité au Gouvernement

réforme des retraites

Mme Christiane Demontès, M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

réforme des retraites

MM. Guy Fischer, Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

programme clair

MM. Jacques Legendre, Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

réforme des collectivités territoriales

MM. François Fortassin, Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

réforme des collectivités territoriales

MM. Hervé Maurey, Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

projet de loi de finances pour 2011

MM. André Vantomme, François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

convention sur le maintien des services publics en milieu rural

MM. Bernard Fournier, Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

stages étudiants

Mme Catherine Procaccia, M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

égalité hommes-femmes

Mme Isabelle Debré, M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

fonctionnement de la justice

M. Jean-Pierre Sueur, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

4. Nouvelle organisation du marché de l'électricité. – Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (Texte de la commission)

Article 12 (suite)

Amendements identiques nos 210 de M. Jean-Claude Danglot et 227 de M. Daniel Dubois (suite). – MM. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l’économie ; Michel Sergent. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 236 de M. Daniel Dubois. – MM. Jean-Claude Merceron, le rapporteur, Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. – Adoption.

Amendement n° 242 de M. Jean-Claude Merceron. – MM. Jean-Claude Merceron, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Retrait.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 12

Amendement n° 106 de M. Michel Sergent. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur, Mmes la secrétaire d'État, Nathalie Goulet. – Retrait.

Article 13

Amendement no 33 rectifié de M. Pierre Bernard-Reymond. – MM. Pierre Bernard-Reymond, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 14

M. Michel Billout

Amendement n° 100 de M. Roland Courteau. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État, MM. Claude Bérit-Débat, Daniel Raoul. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l’article 14

Amendement n° 4 de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, et sous-amendement no 276 rectifié du Gouvernement. – M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Mme la secrétaire d'État, M. le rapporteur. – Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.

Amendement no 232 de M. Jean-Claude Merceron. – Devenu sans objet.

Amendement n° 101 rectifié de M. Thierry Repentin et sous-amendement no 285 rectifié de la commission. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel, le sous-amendement étant devenu sans objet.

Article 15

Amendement n° 212 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Michel Billout, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 15

Amendements identiques nos 24 rectifié de M. Francis Grignon et 235 rectifié de M. Daniel Dubois. – MM. Francis Grignon, Jean-Claude Merceron, le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption des deux amendements identiques insérant un article additionnel.

Seconde délibération

Demande de seconde délibération de l’article 12. – M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie ; Mme la secrétaire d'État, M. le rapporteur. – Adoption.

Article 12

Amendement no A-1 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Vote sur l’ensemble

M. Jean-Claude Merceron, Mme Nathalie Goulet, MM. François Fortassin, Jacques Muller, Roland Courteau, Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'État.

Adoption, par scrutin public, du projet de loi.

5. Commission mixte paritaire

6. Conventions fiscales avec la Suisse, la Belgique et le Luxembourg. – Adoption définitive d'un projet de loi en procédure accélérée et adoption définitive de deux projets de loi (Textes de la commission)

Discussion générale commune : Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ; M. Adrien Gouteyron, rapporteur de la commission des finances.

M. Thierry Foucaud, Mme Nicole Bricq.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.

Clôture de la discussion générale commune.

Mme la ministre.

convention fiscale avec la suisse

Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

convention fiscale avec la belgique

Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

convention fiscale avec le luxembourg

M. Thierry Foucaud.

Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

7. Conventions internationales. – Adoption définitive de quatre projets de loi en procédure d'examen simplifié (Textes de la commission)

Convention fiscale avec le Bahreïn. – Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

Convention fiscale avec la Malaisie. – Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

Convention fiscale avec Singapour. – Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

Convention douanière avec les Pays-Bas dans la région des Caraïbes. – Adoption définitive de l'article unique du projet de loi.

8. Organisation des débats

MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; le président.

9. Dépôt d'une question orale avec débat

10. Régulation bancaire et financière. – Discussion d'un projet de loi (Texte de la commission)

Discussion générale : Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.

Suspension et reprise de la séance

11. Communication du Conseil constitutionnel

12. Régulation bancaire et financière. – Suite de la discussion d'un projet de loi (Texte de la commission)

Discussion générale (suite) : MM. Bernard Vera, Jean-Jacques Jégou, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Pierre Chevènement, Jean-Pierre Fourcade, François Marc, Georges Patient.

M. Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Clôture de la discussion générale.

Articles additionnels avant le chapitre Ier

Amendement n° 97 de Mme Marie-Agnès Labarre. – Mme Marie-Agnès Labarre, M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Mme la ministre. – Rejet.

Amendement n° 99 de Mme Marie-Agnès Labarre. – Mme Marie-Agnès Labarre, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Amendement n° 107 de Mme Marie-Agnès Labarre. – Mme Marie-Agnès Labarre, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Articles additionnels avant l'article 1er

Amendement n° 108 de Mme Marie-Agnès Labarre. – Mme Marie-Agnès Labarre, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Amendement n° 53 de M. Bernard Vera. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur, Mme la ministre. – Rejet.

Amendement n° 100 rectifié de Mme Marie-Agnès Labarre. – Mme Marie-Agnès Labarre, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Article 1er

Amendement n° 54 de M. Bernard Vera. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article additionnel avant l'article 2

Amendement n° 22 rectifié bis de M. Yvon Collin. – MM. Denis Detcheverry, le rapporteur général, Mme la ministre. – Retrait.

Articles 2 et 2 bis. – Adoption

Article additionnel après l'article 2 bis

Amendement n° 112 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

Article 2 ter A

Amendement n° 161 de la commission. – M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles 2 ter et 2 quater. – Adoption

Article additionnel après l'article 2 quater

Amendement n° 23 rectifié bis de M. Yvon Collin. – MM. Denis Detcheverry, le rapporteur général, Mme la ministre. – Retrait.

Article 2 quinquies A (nouveau)

Amendement n° 113 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq.

Amendement n° 162 rectifié de la commission. – M. le rapporteur général.

Amendement no 183 du Gouvernement. – Mme la ministre.

M. le rapporteur général, Mme Nicole Bricq. – Rejet de l’amendement no 113 ; adoption des amendements nos 162 rectifié et 183.

Adoption de l'article modifié.

Article 2 quinquies

Amendement n° 94 rectifié de M. Joël Bourdin. – MM. Joël Bourdin, le rapporteur général, Mme la ministre. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 2 quinquies

Amendement n° 44 rectifié de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.

13. Clôture de la session extraordinaire

compte rendu intégral

Présidence de Mme Catherine Tasca

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Sylvie Desmarescaux,

M. Jean-Pierre Godefroy.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article 7 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article 8

Nouvelle organisation du marché de l'électricité

Suite de la discussion d'un projet de loi

(Texte de la commission)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, portant nouvelle organisation du marché de l’électricité (projet n° 556, texte de la commission n° 644, rapports nos 643 et 617).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 8.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article additionnel après l'article 8

Article 8

I. – L’article 28 de la même loi est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi rédigé :

« II. – Le collège est composé de cinq membres nommés en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique et technique. Le président et deux membres sont nommés par décret. Deux membres sont nommés respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et par le Président du Sénat.

« Les membres du collège sont nommés pour six ans. Leur mandat n’est pas renouvelable.

« En cas de vacance d’un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. Un mandat exercé pendant moins de deux ans n’est pas pris en compte pour l’application de la règle de non-renouvellement. » ;

2° À la première phrase du IV, le mot « cinq » est remplacé par le mot « trois » ;

3° Le V est ainsi rédigé :

« V. – Le président et les autres membres du collège exercent leur fonction à plein temps. Ces fonctions sont incompatibles avec tout mandat électif communal, départemental, régional, national ou européen, et avec la détention, directe ou indirecte, d’intérêts dans une entreprise du secteur de l’énergie. Chaque membre du collège fait une déclaration d’intérêts au moment de sa désignation.

« Les fonctions de membre du collège sont incompatibles avec celles de membre du comité.

« Les membres du collège ou du comité ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de soixante-dix ans.

« Le président du collège reçoit un traitement égal à celui afférent à la première des deux catégories supérieures des emplois de l’État classés hors échelle. Les autres membres du collège reçoivent un traitement égal à celui afférent à la seconde de ces deux catégories. Lorsqu’ils sont occupés par des fonctionnaires, les emplois de président et de membre du collège sont des emplois conduisant à pension au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite. » ;

II. – Le mandat des membres du collège de la Commission de régulation de l’énergie en exercice à la date de promulgation de la présente loi s’achève deux mois après cette date.

Le mandat des premiers membres du collège nommés après la date de promulgation de la présente loi entre en vigueur deux mois après cette date pour une durée de six ans en ce qui concerne le président, de quatre ans en ce qui concerne les membres nommés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat et de deux ans en ce qui concerne les deux autres membres.

Par dérogation au deuxième alinéa du II de l’article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, le président et les membres en fonction lors de l’entrée en vigueur de la présente loi peuvent faire partie des premiers membres du collège nommés après la date de promulgation de la présente loi.

III. – Le premier alinéa de l’article 32 de la même loi est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La Commission de régulation de l’énergie peut consulter le Conseil supérieur de l’énergie préalablement aux décisions importantes dont la liste est déterminée par décret en Conseil d’État. »

Mme la présidente. L'amendement n° 203, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, par cet amendement, nous souhaitons une nouvelle fois nous opposer à la vision de la politique énergétique portée par le Gouvernement et sa majorité.

En effet, à la lecture du rapport, nous apprenons que le présent article vise à adapter « la composition du collège de la CRE à ses nouvelles compétences, en la dotant d’un collège resserré et professionnalisé ».

Malgré toute l’estime que je porte aux compétences de notre collègue Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l’économie sur ce projet de loi, je dirai que cette formule me semble assez réductrice quant à la visée de l’article.

En effet, la rédaction de l’article 8 a pour unique objet de resserrer la composition de la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, autour du pouvoir exécutif et de rejeter toute représentation du corps social, que ce soit en supprimant le membre nommé par le président du Conseil économique et social ou encore en faisant disparaître les représentants des consommateurs d’électricité et de gaz naturel.

En effet, il s’agit de passer d’une composition de neuf membres – deux membres, dont le président de la CRE, nommés par décret, deux membres nommés par le président de l’Assemblée nationale, deux membres nommés par le président du Sénat, un membre nommé par le président du Conseil économique et social, ainsi que deux « représentants des consommateurs d’électricité et de gaz naturel » nommés par décret – à une composition de cinq membres.

Sur les cinq membres, trois personnes seraient nommées par décret, ce qui ne nous paraît pas aller dans le sens du renforcement du poids de la représentation parlementaire promis lors de la réforme constitutionnelle.

M. le rapporteur nous explique que, à l’échelle de l’Union européenne, l’exécutif nomme la totalité des membres de son instance de régulation. Mais cet argument ne nous semble pas suffisant pour renforcer le poids de l’exécutif dans la nomination de l’autorité de régulation de la France.

Nous reconnaissons pourtant que la commission de l’économie du Sénat a amélioré sur quelques points la rédaction du texte transmis par l’Assemblée nationale en ramenant la composition du collège de la CRE à cinq membres, mais également en confirmant très fortement l’exigence de qualification de ses membres. Il s’agit là, à notre avis, d’un minimum.

Cependant, nous regrettons que la commission de l’économie ait choisi de transformer l’obligation faite à la CRE de consulter le Conseil supérieur de l’énergie avant toute décision importante en simple possibilité. L’argument consistant à avancer que la CRE a déjà cette faculté devrait, à l’inverse, nous conduire à l’écrire dans la loi.

Nous proposons donc la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Je ferai un bref rappel. Le Gouvernement a proposé de resserrer la composition de la CRE et de la rendre plus professionnelle : il n’y aura plus de membres « non rémunérés » ; les membres de la CRE seront présents à plein temps pendant cinq ans et ils ne siégeront plus comme représentants d’un groupe professionnel ou – excusez-moi du mot – d’un lobby. C’est à mon avis un bon choix.

En même temps, le projet de loi initial prévoyait de réduire le nombre de membres de la CRE en le faisant passer de neuf à cinq. L’Assemblée nationale a, quant à elle, encore restreint le collège de la CRE en portant le nombre de ses membres à trois, avec un quorum. Dans ces conditions, nous pourrions nous retrouver dans la situation de blocage complet qu’a connue l’Italie pendant deux ans. En effet, en posant une obligation de quorum avec trois membres, la CRE peut se réunir sans jamais prendre de décision. C’est la raison pour laquelle la commission a souhaité revenir à la proposition initiale du projet de loi, c'est-à-dire à un collège composé de cinq membres.

Mon cher collègue, j’attire votre attention sur un point : si votre amendement était adopté et si l’article 8 était supprimé, nous en resterions à la situation actuelle, soit une CRE de neuf membres avec un président et deux vice-présidents « professionnalisés » – ils sont membres à plein temps –, six autres membres siégeant selon des modalités dont nous connaissons tous les inconvénients.

Par ailleurs, en ce qui concerne la consultation du Conseil supérieur de l’énergie, le CSE, un amendement adopté par la commission – je ne sais si vous l’avez voté… – prévoit que cette instance sera consultée pour toutes les décisions importantes, et ce pour une raison qui vous soucie particulièrement – vous avez été plusieurs à le faire savoir dans la discussion générale –, à savoir qu’une telle disposition permet de consulter aussi bien les consommateurs que l’ensemble des acteurs du secteur énergétique, y compris, bien sûr, les syndicats.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, l’évolution des missions de la CRE induit la nécessité d’en réformer le collège. C’est la raison de l’article 8.

Par la force des choses, le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à cette demande de suppression. Mes explications d’hier vont dans le sens de ce que vient de rappeler M. le rapporteur, à savoir qu’une professionnalisation des membres de la CRE – les membres siégeant à temps complet plutôt qu’à temps partiel et étant dotés d’un statut garantissant encore un peu plus leur objectivité – et un retour au nombre de membres prévu par le projet de loi initial sont des dispositions allant dans le bon sens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 203.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 89, présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. - Le collège est composé de sept membres dont cinq nommés en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique et technique et deux en tant que représentants des consommateurs d'électricité et de gaz naturel.

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. La commission de l’économie du Sénat a préféré ne pas suivre l’Assemblée nationale et a rétabli le texte initial du projet de loi aux termes duquel le collège de la CRE comprend cinq membres.

Nous pensons qu’il faut aller encore plus loin en élargissant la composition de ce collège à sept membres.

Cet amendement vise surtout à prendre en compte l’intérêt des consommateurs en réintroduisant la présence au sein de la CRE de deux représentants des consommateurs d’électricité et de gaz naturel.

Le rétrécissement du collège de la CRE ne doit pas se faire au détriment des représentants des consommateurs, car les décisions de la CRE liées à la régulation des marchés doivent prendre en compte la protection des consommateurs, qu’il s’agisse des ménages ou des industriels.

Cet amendement est d’autant plus important que la CRE récupère de nouvelles missions en matière de fixation des tarifs d’électricité et du prix de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, l’ARENH, à un moment où – nous avons déjà eu l’occasion de le souligner – la programmation des hausses de prix et de tarifs est déjà engagée.

Dans ce contexte, le maintien de représentants des consommateurs au sein du collège de la CRE nous semble constituer un véritable impératif.

Mme la présidente. L'amendement n° 204, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par six alinéas ainsi rédigés :

« II. - Le collège est composé de sept membres :

« 1° Deux vice-présidents nommés, en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique, social et technique, respectivement par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat ;

« 2° Deux membres nommés, en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique, social et technique, respectivement par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat ;

« 3° Un membre nommé, en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique, sociale et technique, par le président du Conseil économique, social et environnemental ;

« 5° Deux représentants des consommateurs d'électricité et de gaz naturel, nommés par décret.

« Le président du collège est élu parmi les membres du collège, après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Cet amendement est très proche de celui qui vient d’être présenté puisqu’il vise à porter la composition de la CRE à sept membres afin de garantir certains équilibres.

Tout d’abord – et cela nous semble très important –, nous souhaitons sauvegarder la représentation des consommateurs au sein de cette instance. Le rapporteur sur ce texte a toujours été opposé à cette intégration des représentants des consommateurs. Il justifiait sa position, à l’époque, par une exigence communautaire : les membres de l’autorité de régulation devaient être peu nombreux, impartiaux et désintéressés de la formation des prix de l’électricité.

Il est pourtant essentiel que les consommateurs soient représentés au sein de la CRE si cette dernière souhaite mener à bien sa mission de service public en faveur de la protection des consommateurs.

Par ailleurs, vous avez fait dans le même temps le choix de supprimer la présence d’un membre nommé par le président du Conseil économique et social. C’est donc toute la représentation du corps social qui est exclue de la CRE.

À ce titre, conformément à la place que nous souhaitons accorder au corps social au sein de cette instance, nous proposons d’intégrer dans les compétences requises pour être membre de la CRE la compétence sociale, afin de permettre aux représentants des syndicats de siéger dans cette commission. À nos yeux, c’est un élément de modernisation important.

De plus, si des efforts doivent être consentis quant au nombre de membres de cette instance afin de permettre à cette dernière de travailler efficacement, nous proposons qu’ils soient faits par l’exécutif.

Notre proposition d’une révision de la composition de la CRE a également le mérite, en conformité avec la préconisation présidentielle, de renforcer le pouvoir parlementaire : la majorité des membres seront ainsi nommés par les présidents des deux assemblées et non par l’exécutif.

Mme la présidente. L'amendement n° 115 rectifié, présenté par MM. Courteau, Bourquin, Raoul, Botrel, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent, Muller et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

cinq membres

insérer les mots :

comprenant un nombre de représentants de chacun des deux sexes ne pouvant être inférieur à 40% 

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Il est défendu.

Mme la présidente. L'amendement n° 267, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Alinéa 3, deuxième phrase

Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :

Le président est nommé par décret dans les conditions fixées par la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. Deux membres sont nommés par décret après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 267 et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 89 et 204.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L’amendement n° 267 vise à renforcer le contrôle du Parlement sur les nominations par l’exécutif de membres du collège de la Commission de régulation de l’énergie.

Il prévoit que la nomination du président de la CRE respectera la Constitution telle qu’elle a été modifiée : le président devra se présenter devant les deux commissions du Parlement compétentes en matière d’énergie, qui non seulement donneront un avis mais pourront même exercer un droit de veto.

Par ailleurs, il prévoit que les deux autres représentants désignés par le ministère de tutelle seront également entendus par les deux commissions compétentes du Parlement, lesquelles pourront s’assurer de leurs compétences même si elles ne disposent pas d’un droit de veto.

La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 89 et 204.

Monsieur Courteau, je vous ai entendu à différentes reprises, tant en commission que dans ce débat, exprimer votre souci que la CRE soit composée de membres compétents et qu’elle conserve une certaine indépendance.

L’objectif d’une réduction du collège de la CRE de neuf à cinq membres est bien de garantir l’indépendance de la CRE.

Vous souhaitez introduire au sein de la CRE deux membres supplémentaires, qui représenteraient les consommateurs. En toute logique, si votre objectif est bien de garantir l’indépendance de la CRE et la compétence de ses membres dans le domaine de l’énergie, de l’électricité, du gaz et sur tous les autres sujets sur lesquels la CRE est amenée à se prononcer, il ne faut alors pas limiter la disposition aux consommateurs !

Je vous renvoie à l’amendement n° 197 rectifié qui va bientôt venir en discussion et dont l’objet est d’obliger la CRE à consulter le Conseil supérieur de l’énergie, au sein duquel sont représentés les consommateurs pour toute une série de décisions importantes. Mais, fort heureusement, les consommateurs ne sont pas les seuls représentés, le Conseil supérieur de l’énergie regroupant tous les acteurs du secteur énergétique, et pas seulement les consommateurs.

J’insiste sur ce point car vous semblez me faire porter une certaine responsabilité ici. Or, je n’ai pas le sentiment d’avoir été, à un moment ou à un autre, hostile à ce que les consommateurs puissent s’exprimer sur des sujets comme ceux-ci. Bien au contraire ! D’ailleurs, je les ai personnellement beaucoup auditionnés, et le Sénat est exemplaire de ce point de vue. Nous écoutons plus car nous auditionnons plus qu’à l’Assemblée nationale.

M. Charles Revet. C’est bien vrai, et il faut le souligner !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Laissez-moi vous dire que l’amendement n° 197 rectifié que je vais présenter dans quelques minutes répond à l’attente exprimée par les amendements nos 89 et 204. C’est pourquoi la commission est défavorable à l’un comme à l’autre.

Par ailleurs, l’amendement n° 115 rectifié vise à favoriser la parité en instaurant un quota de 40 %. Mais vous ne donnez aucune indication concrète sur la façon de procéder pour atteindre un tel objectif. Or, je ne sais pas comment faire pour obtenir ce résultat dès lors que le président est désigné selon les nouvelles règles que nous connaissons, que deux de ses membres sont nommés par le Gouvernement, qu’un membre est désigné par le président du Sénat et qu’un autre l’est par le président de l’Assemblée nationale !

Vous ne proposez aucune solution concrète pour atteindre ce quota de 40 % ! Que souhaitez-vous au juste ? Que le ministre de tutelle et les deux présidents des chambres se mettent autour d’une table en choisissant le sexe de la personne qu’ils entendent nommer ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je veux dire par là que vous ne proposez aucune solution technique.

Je comprends parfaitement votre souhait de voir siéger des femmes au sein de la CRE : il faut qu’il soit entendu et qu’il figure au Journal officiel. Actuellement, sur les neuf membres que compte la CRE, il y a deux femmes. La parité n’est donc pas respectée.

Je partage votre opinion quant au caractère bénéfique d’une certaine parité. Cependant, je ne peux être favorable à un amendement qui ne propose aucune solution concrète pour atteindre un taux de 40 % de femmes dans un collège de cinq personnes.

Mme Nathalie Goulet. C’est comme pour les conseillers territoriaux !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mais nous prenons acte de votre souhait et en appelons au bon sens de ceux qui désigneront les membres de la CRE. Permettez-moi cependant de vous dire que la priorité est à la compétence de ceux qui devront demain se prononcer sur les problèmes énergétiques ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Mme Odette Terrade. Parce que les femmes ne sont pas compétentes ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Laissez-moi finir mon propos ! Il y a bien sûr des personnes compétentes quel que soit leur sexe !

M. Charles Revet. Voilà qui est rassurant !

M. René Garrec. Nous en avons la preuve avec Mme la secrétaire d’État !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, il importe que le collège de la CRE soit composé de spécialistes de la régulation, de personnes qui disposent des compétences voire de l’expérience nécessaire tout en étant indépendantes. C’est pourquoi il n’y a pas de raison de désigner au sein du collège des représentants ès qualités d’intérêts particuliers. Mieux vaut organiser l’écoute des parties prenantes par le collège. Nous y reviendrons d’ailleurs dans la suite des débats.

Dès lors, je suis défavorable aux amendements nos 89 et 204 qui visent à ajouter au collège deux représentants des consommateurs. Nous devons conserver un collège composé de personnes professionnalisées, à temps complet, indépendantes, qui écouteront et consulteront largement les parties prenantes.

Quant à l’amendement n° 115 rectifié, il me paraît difficile d’adopter une règle qui ne vaudrait que pour la CRE. La parité et la place des femmes dans les conseils d’administration d’entreprise ou d’autorités administratives indépendantes relèvent d’un débat de fond. Il me semble d’ailleurs que, dans les jours qui viennent, un texte portant sur ces questions sera soumis à votre assemblée. Vous aurez alors la possibilité de débattre de cette question extrêmement importante. On ne peut qu’encourager les parlementaires à enrichir le texte en question, qui est d’ailleurs d’initiative parlementaire.

Enfin, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 267 porté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l’économie. Ce texte introduit un bon équilibre entre le Gouvernement et le Parlement pour la désignation des commissaires de la CRE.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l'amendement n° 89.

M. Roland Courteau. Je n’ai pas changé d’avis. Jusqu’à présent, les consommateurs étaient représentés au sein de la CRE. Au vu des dispositions figurant dans ce projet de loi, tout laisse à penser que l’on va vers un renforcement des pouvoirs de la CRE et l’apparition de compétences nouvelles. Aussi il nous paraît impératif que soient pris en compte les intérêts des consommateurs. Nous persistons donc dans cette voie : on ne peut faire autrement ! Toute autre position serait considérée comme un recul grave.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je me permets d’insister au nom de notre groupe sur deux points importants que sont la parité et la prise en compte des intérêts des consommateurs, et donc de la société civile.

Nous devrions, me semble-t-il, changer notre logiciel de réflexion en matière politique. Il n’est plus possible d’agir comme par le passé, avec des élus qui débattent, tranchent et décident de tout sans jamais rendre de comptes.

Ce texte nous offre l’occasion de faire entrer les consommateurs au sein d’un organisme essentiel. Je ne dirai pas que la présence de consommateurs assurera l’indépendance de cet organisme, car ce dernier compte déjà des personnes qualifiées dont la qualité intrinsèque n’est pas en cause. Mais le fait d’accepter la participation des consommateurs à la CRE serait faire preuve d’ouverture d’esprit à l’égard de la société civile. Si nous souhaitons modifier notre façon d’appréhender les grands dossiers sociétaux et parvenir à un consensus sur des sujets comme celui-ci, alors il faut faire entrer la société civile dans les conseils d’administration ! Cela nous paraît aujourd’hui extrêmement important. Cette ouverture d’esprit ne peut qu’être bénéfique. Ce serait un geste fort à l’égard de la société, et cela ne coûterait rien.

On s’aperçoit en effet aujourd’hui que les Français ne croient plus en la politique. Ils ne croient plus aux grandes structures auxquelles ils ne se sentent pas associés. Ils imaginent que tout se passe au niveau du Gouvernement ou du Parlement, et qu’il n’y a à aucun moment de retour vers la société.

Le geste que vous pourriez faire maintenant montrerait l’importance que nous accordons à l’avis des Français et à leurs compétences en tant que consommateurs. Il serait en effet tout à fait possible de trouver des personnes compétentes parmi eux.

Voilà pourquoi je me permets d’insister sur ce point, après l’excellente argumentation de mon collègue Roland Courteau.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je vous renvoie à l’amendement n° 197 rectifié que nous allons examiner dans quelques minutes. Vous pourrez alors constater la réelle volonté du Gouvernement comme de la commission de ne pas écarter les consommateurs en tant que tels. Mais rien n’empêchera le ministère de tutelle, voire le président du Sénat ou de l’Assemblée nationale, de nommer une personne issue de l’UFC-Que Choisir ou d’une autre association de consommateurs. Cela ne sera cependant possible qu’à une seule condition : cette personne ne représentera pas un lobby ou un syndicat, de professionnels ou de consommateurs ; elle devra être indépendante de l’organisme où elle travaillait auparavant. Elle devra d’ailleurs donner sa démission de ce dernier et sera rémunérée pendant cinq ans pour remplir au sein du collège de la CRE cette mission, qui ne sera d’ailleurs pas une mission facile. Ne dites donc pas que le Gouvernement ou la commission sont hostiles aux consommateurs !

M. Didier Guillaume. Personne n’a dit ça !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. D’ailleurs, l’amendement n° 197 rectifié répond parfaitement au souci que vous avez exprimé, les uns et les autres, par ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. L’amendement n° 197 rectifié, qui rappelle que la CRE consulte le Conseil supérieur de l’énergie préalablement aux décisions, bénéficiera d’un avis favorable de la part du Gouvernement. Le conseil supérieur de l’énergie rassemble largement les représentants des consommateurs et bien d’autres représentants qui s’assureront, par cette consultation systématique, que les intérêts de chacun sont bien défendus. Cela représente tout de même une garantie assez forte et complète utilement la présence de cinq membres permanents à la CRE. L’articulation de ce dispositif et la méthode de suivi du travail accompli me paraissent garantir un équilibre certain.

S’agissant de la parité au sein de la CRE, il semble difficile de prévoir une règle propre à cet organisme, qui ne soit pas une règle législative d’ordre général. Vous aurez bientôt l’opportunité de débattre de ce point. Mais les autorités chargées de désigner des membres de la CRE peuvent d’ores et déjà faire en sorte que soient nommés dans cette instance à la fois des hommes et des femmes : il peut donc y avoir parité si tel est le choix et la décision des uns et des autres.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 89.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 204.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l'amendement n° 115 rectifié.

M. Roland Courteau. Il est évident que l’on trouve des personnes compétentes tant parmi les hommes que parmi les femmes ! Cela n’a jamais été contesté. Mais si nous n’avions pas légiféré, sous le gouvernement Jospin d’ailleurs, pour favoriser la parité en politique, nous n’aurions alors pas connu l’accélération à laquelle nous avons assisté ! À ce propos, la réforme des collectivités territoriales et l’élection des conseillers territoriaux constituent tout de même un sacré coup de canif à la parité…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce n’est pas le sujet ! On parle de la CRE, pas des conseillers territoriaux !

M. Roland Courteau. … puisque les femmes dans les conseils régionaux passeront de quelque 49 % à 16 %, 17 % ou 18 % ! (Oui ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Qui oserait prétendre le contraire ?

Il faut donc envoyer un signal fort, comme on a pu le faire dans le domaine politique ! C’est la raison pour laquelle nous maintenons cet amendement.

Nous fixons l’objectif à 40 %, et il appartiendra ensuite au ministère d’assurer la mise en musique, car ce n’est pas à nous de le faire !

M. Claude Bérit-Débat. Ce n’est pas notre rôle !

M. Roland Courteau. Nous fixons les grandes orientations dans le cadre de notre mission de législateurs, et le Gouvernement arrête les mesures d’application. Nous lui faisons confiance sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Le 27 octobre, nous allons débattre dans cet hémicycle d’une proposition de loi du groupe socialiste, dont je suis la première signataire, et d’une proposition de loi de nos collègues du groupe UMP, toutes deux relatives à la féminisation des conseils d’administration dans le secteur privé.

M. Didier Guillaume. Il y a du travail !

Mme Nicole Bricq. J’ai toujours défendu l’idée que les conseils d’administration qui relèvent, de près ou de loin, de la puissance publique devaient être relativement exemplaires ; or tel n’est pas le cas ! Nous pouvons très souvent constater que, dans les conseils d’administration des entreprises qui avaient été nationalisées et qui ont été depuis en partie privatisées, le contingent féminin est assuré par les administrateurs salariés.

Le Sénat s’honorerait d’adopter cet amendement et émettrait ainsi un signal positif. On ne peut pas à la fois tenir en public un discours favorable à la parité et tourner le dos à cette dernière lors de l’élaboration de la loi : ce double langage n’est pas acceptable ! Mes chers collègues, je vous invite donc à adopter cet amendement ; vous ne le regretterez pas !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Didier Guillaume. Donnez un signe, madame la secrétaire d’Etat !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ce débat ne peut pas nous laisser insensibles. Comme Mme Bricq, je pense que le Sénat peut parfaitement donner un signe. Nous disposons d’exemples multiples et variés de ce qu’une commission mixte paritaire peut défaire.

Mme Nathalie Goulet. Donnons donc l’exemple ! Donnons de notre assemblée l’image qu’elle mérite, et laissons aux députés le privilège de revenir sur l’amendement que nous aurons adopté !

M. Didier Guillaume. Faites un geste !

M. Claude Bérit-Débat. Faites un effort !

Mme Nicole Bricq. Laissez faire la navette !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 115 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

MM. Claude Bérit-Débat et Didier Guillaume. Dommage !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 267.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 90 est présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L’amendement n° 263 rectifié bis est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall.

Tous deux sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le président et les autres membres du collège ne peuvent, sous peine de l’application des sanctions prévues par l’article 432-13 du code pénal, prendre ou recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l’une de ces entreprises avant l’expiration d’un délai de trois ans suivant la cessation de leurs fonctions.

La parole est à M. Didier Guillaume, pour défendre l’amendement n° 90.

M. Didier Guillaume. Dans un souci d’éthique et de déontologie, cet amendement vise à interdire la reconversion immédiate des membres du collège de la CRE dans une entreprise du secteur de l’énergie. Nous proposons donc de compléter l’alinéa 8 en posant un double verrou.

Mme Nathalie Goulet et M. Roland Courteau. Très bien !

M. Didier Guillaume. Il s’agit de contraindre les comportements sur le plan de l’éthique et d’adresser un signal à l’opinion publique – c’est important dans le contexte actuel.

Nous ne voulons pas que des membres de la CRE, quelles que soient leurs qualités, leur indépendance et leur honnêteté intellectuelle, puissent, une fois libérés de leur poste, aller travailler immédiatement pour des organismes ayant des intérêts dans le secteur de l’énergie. Autrement dit, il s’agit de prendre des précautions afin d’éviter que ce genre de collusion ne puisse se produire.

MM. Michel Sergent et Roland Courteau. Très bien !

M. Daniel Raoul. Parfait !

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour présenter l’amendement n° 263 rectifié bis.

M. François Fortassin. Cet amendement, dont M. Yvon Collin est le premier signataire, est identique à l’amendement de nos collègues socialistes. Depuis le début de cette séance, nous entendons parler d’indépendance : permettez-moi d’apporter un peu d’eau au moulin des chantres de cette indépendance !

À l’évidence, il faut protéger les membres de la CRE, qu’ils soient président ou simple commissaire, d’un certain nombre de critiques qui pourraient s’abattre sur eux, en prévenant tout conflit d’intérêts. Aussi demandons-nous que, pendant un délai de trois ans après l’exercice de leurs fonctions au sein de la CRE, ils ne puissent pas entrer dans une entreprise du secteur de l’énergie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission souscrit tout à fait aux objectifs des auteurs de ces deux amendements…

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. … qui rappellent les règles de déontologie devant s’appliquer aux membres de la CRE.

Mais ces amendements sont totalement satisfaits par les dispositions actuellement en vigueur du code pénal. Il est paradoxal que vous vouliez inscrire cette disposition dans la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité…

M. Claude Bérit-Débat. Excellente loi !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. … qui, je le rappelle, est issue d’un projet de loi élaboré par le gouvernement Jospin et adopté par une majorité de gauche. À l’époque, ni le Gouvernement ni sa majorité n’ont trouvé utile d’inscrire une disposition déjà existante du code pénal dans le projet de loi qu’ils défendaient. Le code pénal s’applique à tout le monde !

Je vous rappelle les termes exacts de l’article 432-13 du code pénal : il vise toute personne « ayant été chargée, en tant que fonctionnaire ou agent d’une administration publique, dans le cadre des fonctions qu’elle a effectivement exercées, […] d’assurer la surveillance ou le contrôle d’une entreprise privée ». Autrement dit, je ne vois pas l’intérêt de reproduire dans le texte du présent projet de loi une disposition qui existe déjà par ailleurs.

Mme Nicole Bricq. Par les temps qui courent, ce n’est pourtant pas inutile !

M. Michel Sergent. Il y a trop d’exemples contraires !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Imaginez le nombre de textes législatifs dans lesquels il faudrait réinsérer des dispositions pénales !

Je sais bien que nous ne sommes pas radins s’agissant du nombre de textes de loi ou du volume de papier que nous produisons, mais je ne vois pas l’utilité de cet amendement. Encore une fois, le code pénal s’applique à tous, quelles que soient les circonstances !

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. Daniel Raoul. Pourtant pertinents !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Monsieur le rapporteur, les fonctionnaires ne sont pas les seuls visés par notre amendement, qui s’applique à tous les membres de la CRE.

J’insiste sur le fait que nous devons donner un signal fort. Le débat ne porte pas sur le code pénal : il s’agit tout simplement d’affirmer clairement un principe – et l’actualité nous démontre parfois que deux précautions valent mieux qu’une ! – : un membre de la CRE, dans les trois ans qui suivent la fin de ses fonctions, ne peut pas prétendre avoir accès à un emploi touchant le domaine de l’énergie.

M. Roland Courteau. Cela n’a rien de superfétatoire !

M. Didier Guillaume. Il nous semble que cette précaution relève de la logique. Nous ne faisons aucune comparaison ni ne tirons aucune conclusion prématurée : cette mesure concerne tout le monde.

Par les temps qui courent, compte tenu d’une actualité chargée, l’exigence citoyenne nous amène à penser que le Sénat s’honorerait d’imposer tranquillement le respect de la transparence, en dressant cette barrière éthique et déontologique. Il ne s’agit pas de mettre en cause qui que ce soit ; il ne s’agit pas de penser que tel ou tel membre de la CRE pourrait manquer à ses obligations ; la France doit tout simplement s’imposer des règles, le respect de la transparence totale, de la déontologie, de l’éthique et de l’équité républicaines. Il n’y a aucune raison pour qu’un membre de la CRE puisse, immédiatement après la fin de son mandat, travailler pour une grande entreprise du secteur de l’énergie, et il est important de le rappeler expressément.

La loi prévoit que, lorsqu’un haut fonctionnaire veut rejoindre une entreprise, une commission de déontologie – ou je ne sais trop quel organisme – est saisie. Nous voulons instaurer un mécanisme exactement inverse, en empêchant toute embauche d’un membre de la CRE par une entreprise du secteur de l’énergie pendant trois ans suivant l’expiration de ses fonctions.

En présentant cet amendement, j’évoquais la nécessité d’installer un « double verrou », afin d’assurer la transparence et l’éthique de cette commission.

Ce n’est pas beaucoup demander que de vouloir montrer aux Français, qui doutent de plus en plus de l’intégrité du personnel politique – je ne veux pas y revenir –, que, lorsque nous adoptons de nouvelles lois, nous prenons des engagements.

Bien sûr, M. le rapporteur a rappelé que nous n’avions pas introduit cette disposition dans la loi du 10 février 2000 ; mais le contexte était différent de celui de 2010 ! Nous pensons donc qu’il serait bon que la nouvelle loi rappelle l’existence de ce délai de trois ans à respecter entre la fin du mandat d’un membre de la CRE et l’entrée de ce dernier dans une entreprise du secteur de l’énergie.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Mon collègue Didier Guillaume a été très éloquent et a abordé les points essentiels que je souhaitais évoquer.

Je voudrais cependant insister sur la réponse de M. le rapporteur, selon laquelle toutes les garanties sont données par le code pénal. Mais cela n’a rien à voir ! Notre amendement tend à instaurer un « double verrou », en interdisant aux membres de la CRE, dans les trois ans qui suivent la fin de leur mandat, toute possibilité d’exercer leurs talents dans une entreprise du secteur de l’énergie.

Nous ne visons personne en particulier – tout le monde peut trouver des exemples, à droite comme à gauche ! Nous souhaitons simplement éviter que ne se reproduisent un certain nombre d’affaires ayant attiré l’attention non seulement de la justice mais également des parlementaires ou des citoyens.

Le Sénat devrait donc adopter ces dispositions afin que l’on ne puisse pas soupçonner une personne d’avoir représenté les intérêts d’un grand groupe parce qu’elle va exercer ses activités au sein de ce dernier à la fin de son mandat.

Cet amendement répond donc à un souci d’éthique et de morale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voterai ces amendements pour plusieurs raisons.

Premièrement, puisque la disposition existe déjà, je ne vois aucune raison de ne pas la rappeler. Nous essayons de rédiger des lois lisibles par nos concitoyens ; or tel n’est pas toujours le cas, c’est le moins que l’on puisse dire ! Un petit rappel ne peut donc nuire à la clarté : le citoyen qui lira le texte de cette loi saura immédiatement, sans devoir se référer au code pénal, que les personnes ayant siégé au sein de la CRE ne pourront pas bénéficier d’une reconversion immédiate. La loi n’en sera que plus lisible.

Deuxièmement, une personne ayant appartenu à une grande entreprise du secteur de l’énergie y conserve toujours des liens. C’est la raison pour laquelle on trouve partout, y compris au sein de l’Assemblée nationale, des personnes expertes dans ce domaine de l’énergie qui nous est cher !

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Un point est très important : on nous objecte le code pénal ; mais la référence au code pénal ne parle vraiment pas à nos concitoyens !

Si nous inscrivons expressément dans la loi que, pendant les trois années qui suivent la fin de leurs fonctions, les membres de la CRE ne peuvent pas être employés par une entreprise du secteur de l’énergie, le message est beaucoup plus clair pour tout le monde !

M. Roland Courteau. C’est simple !

M. François Fortassin. Ensuite, on nous dit que le code pénal s’applique à tout le monde. Dans ces conditions, je ne comprends pas pourquoi le CSA a adopté une mesure identique, interdisant à ses propres membres d’exercer des fonctions au sein d’entreprises du secteur de l’audiovisuel pendant un délai de trois ans après la fin de leur mandat !

L’adoption de cet amendement serait donc une bonne chose et enverrait un signal très fort à nos concitoyens !

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 90 et 263 rectifié bis.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas les amendements.)

M. François Fortassin. Le coup passa très près !

Mme la présidente. L'amendement n° 197 rectifié, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La Commission de régulation de l'énergie consulte le Conseil supérieur de l'énergie préalablement aux décisions, dont la liste est déterminée par décret en Conseil d'État, pouvant avoir une incidence importante sur les objectifs de la politique énergétique visés à l'article premier de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique. »

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Par cet amendement, nous proposons de revenir à la version initiale de l’article 8 du projet de loi, tendant à créer une obligation nouvelle à la charge de la Commission de régulation de l’énergie.

Le texte initial du projet de loi soumis au Parlement complétait l’article 32 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, en prévoyant que la CRE consulte le Conseil supérieur de l’énergie, le CSE, préalablement à toute proposition de principe ou décision importante dont la liste est déterminée par décret en Conseil d’État.

Bien que cet article, en faisant référence à une liste déterminée par décret en Conseil d’État, n’ait pas paru très explicite, nous estimions, sur le fond, que le principe posé d’une telle consultation était important.

En effet, dès lors que la majorité refuse d’intégrer à la CRE des représentants des associations d’usagers et supprime la représentation du Conseil économique et social, la consultation du Conseil supérieur de l’énergie, dont certains membres sont issus des associations de consommateurs, nous semble indispensable, à défaut d’être suffisante.

Nous proposons que cette consultation se fasse sur toutes les décisions pouvant avoir des incidences importantes sur les objectifs de la politique énergétique visés à l’article 1er de la loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, dite loi POPE : contribuer à l’indépendance énergétique nationale et garantir la sécurité d’approvisionnement ; assurer un prix compétitif de l’énergie ; préserver la santé humaine et l’environnement, en particulier en luttant contre l’aggravation de l’effet de serre ; garantir la cohésion sociale et territoriale en assurant l’accès de tous à l’énergie.

Le Conseil supérieur de l’énergie est d’ores et déjà consulté sur les actes de nature réglementaire intéressant le secteur de l’énergie et les décrets et arrêtés de nature réglementaire portant sur les certificats d’économies d’énergie. Élargir le domaine de consultation obligatoire nous semble donc pertinent.

Pourtant, monsieur le rapporteur, vous avez fait adopter un amendement supprimant cette consultation obligatoire, en la rendant facultative, au prétexte qu’une telle obligation alourdirait considérablement le processus de prise de décision par la CRE, mais également que le Conseil supérieur de l’énergie a la faculté d’entendre les membres de la CRE et de consulter cette dernière sur toute question entrant dans son champ de compétence. Vous avouerez qu’après avoir professionnalisé leur activité on peut peut-être demander un effort supplémentaire aux membres de la CRE…

Vous avez également argué que la CRE prend aujourd’hui ses décisions après de larges consultations. Ainsi, depuis 2008, vingt-quatre consultations publiques ont été organisées sur des sujets aussi divers que les principes de tarification de l’utilisation des réseaux publics d’électricité, les systèmes de comptage évolué en gaz pour le marché de détail ou encore les principes de régulation des terminaux méthaniers.

Nous souhaitons donc, par cet amendement, revenir à la rédaction initiale de l’alinéa 16 de l’article 8 et rendre la consultation du Conseil supérieur de l’énergie obligatoire préalablement à toute décision prise par la Commission de régulation de l’énergie pouvant avoir des incidences sur les objectifs de la politique énergétique visés à l’article 1er de la loi POPE.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission s’est prononcée sur l’amendement n° 197, initialement déposé, et non sur l’amendement n° 197 rectifié. À cette occasion, elle a effectivement émis un avis défavorable.

La première rédaction de cet amendement prévoyait une consultation obligatoire et systématique du CSE, et cette disposition a paru excessive à la commission. Les auteurs de l’amendement en sont d’ailleurs convenus, puisqu’ils proposent une nouvelle rédaction, qui, elle, me satisfait.

J’ai siégé pendant plusieurs années au sein du Conseil supérieur de l’énergie. Je tiens à préciser, à l’attention des sénateurs qui viennent de présenter certains amendements, que c’est un lieu de rencontre pour tous les acteurs du secteur. On y trouve non seulement des représentants des consommateurs, mais également des représentants des syndicats spécialisés dans les problèmes de l’énergie, des producteurs d’électricité ou encore des petites ou grandes entreprises du secteur électro-intensif. Certes, la structure est lourde, mais elle est utile !

Je remercie donc les auteurs de cet amendement de m’avoir entendu et d’avoir rectifié leur texte. La rédaction ainsi proposée me convient, et l’avis est donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable, car cette disposition vient utilement compléter le dispositif. Il faut travailler avec toutes les parties prenantes au sujet que nous traitons dans ce projet de loi, et donc s’assurer qu’elles sont toutes bien consultées.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Le Sénat a fait l’honneur à Daniel Raoul et à moi-même de nous désigner, sur proposition de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, membres du Conseil supérieur de l’énergie. Dans ces conditions, mes chers collègues, vous comprendrez que nous voterons cet amendement avec enthousiasme.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 197 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'article.

M. Daniel Raoul. L’article 8 ne vise qu’à donner une nouvelle mission à la CRE, et nous sommes fondamentalement en désaccord avec cette décision. Nous considérons le fait d’attribuer à cette autorité administrative prétendument indépendante des missions qui relèvent de l’aménagement du territoire et des politiques énergétique et industrielle comme un acte de démission du pouvoir politique. Ce n’est pas le rôle d’une autorité administrative indépendante !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 9

Article additionnel après l'article 8

Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa du I de l'article 28 de la même loi, après les mots : « Commission de régulation de l'énergie » sont insérés les mots : «, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, ».

II. - Les quatrième et cinquième alinéas de l'article 30 de la même loi sont ainsi rédigés :

« La Commission de régulation de l'énergie dispose de l'autonomie financière. Son budget est arrêté par son président, sur proposition du directeur général. Les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne lui sont pas applicables. Le président de la commission est ordonnateur des recettes et des dépenses. La commission est soumise au contrôle de la Cour des comptes.

« Elle perçoit directement sur son budget la contribution prévue à la section XIII du chapitre I bis du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts, ainsi que, le cas échéant, des rémunérations pour services rendus. »

III. - Le chapitre I bis du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section XIII ainsi rédigée :

« SECTION XIII

« Contribution perçue au profit de la Commission de régulation de l'énergie

« Art. 1609 quatertricies.- A compter du 1er janvier 2011, les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, à l'exception des distributeurs non nationalisés visés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, sont assujettis à une contribution acquittée chaque année au profit de la Commission de régulation de l'énergie.

« L'assiette de cette contribution est constituée par le chiffre d'affaires comptable lié à l'accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution de gaz et d'électricité de l'année civile précédente.

« Le taux de la contribution, fixé par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'énergie et de l'économie après avis du collège de la Commission de régulation de l'énergie, est compris entre 0,11 % et 0,14 %.

« La contribution est déclarée par les redevables sur une déclaration dont le modèle est fixé par l'administration. Elle est déposée dans les délais fixés en matière de taxe sur le chiffre d'affaires. Elle est liquidée annuellement par les redevables, en accompagnement du dépôt de la déclaration relative au dernier mois de l'année civile.

« Elle est contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances. La commission des finances a une position constante en la matière. Elle estime que le marché de l’énergie a besoin d’un arbitre fort, donc d’un régulateur disposant de la plénitude du statut juridique d’autorité administrative indépendante.

Ce statut, nous le savons, en particulier au travers des exemples de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de la concurrence auxquels nous pouvons nous référer, doit aller logiquement jusqu’à l’octroi de la personnalité morale et de l’autonomie financière à la Commission de régulation de l’énergie.

Peut-être ne serons-nous pas entendus ce matin… Mais nous reviendrons sur ce point, car c’est une position de principe.

Le droit communautaire que nous transposons ici est fort complexe, tout comme le seront les problèmes inévitablement soulevés par le mécanisme de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, l’ARENH, et son évolution. Les conflits d’intérêt au sein de l’État ne peuvent qu’être significatifs dans ces domaines. Cette situation explique notre souci de renforcer la Commission de régulation de l’énergie.

Je signale au passage que le fait de substituer à un financement budgétaire une contribution assise sur le chiffre d’affaires des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution d’électricité et de gaz naturel, à l’exception des distributeur non nationalisés – autre disposition prévue par cet amendement –, engendrerait une économie budgétaire de 20 millions d’euros. Certes, c’est peu de chose par rapport au déficit que nous visons en 2011 – 90 milliards d’euros –, mais, pour la commission des finances, même une petite économie est bonne à prendre.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Telles sont les raisons qui me conduisent à défendre avec conviction cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je reconnais bien volontiers à notre collègue Philippe Marini une grande constance sur ce sujet. J’ai eu l’occasion d’en débattre directement avec lui, sur des textes concernant le secteur énergétique comme la loi du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières et la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie. Mais je l’ai également entendu revenir à la charge sur ce point, toujours avec le même objectif, à d’autres occasions, notamment, me semble-t-il, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2004 et du projet de loi de finances pour 2005.

Bien sûr, je partage totalement la volonté et l’objectif de Philippe Marini de donner un caractère indépendant aux autorités, quelles qu’elles soient.

En revanche, je ne le suis pas sur la question du montage financier.

Je ne vais pas revenir sur le rapport que notre collègue Patrice Gélard avait rendu en 2006 et dans lequel il exprimait aussi, et ce de manière détaillée, un certain nombre de réserves. J’avais d’ailleurs admiré le débat que vous aviez eu tous deux, monsieur le rapporteur pour avis. Ce fut un moment épique de cette assemblée, et ceux d’entre vous qui y ont assisté, mes chers collègues, s’en souviennent sans doute.

Un dernier point me dérange : si je n’ai pas d’objection à ce que la commission des finances cherche à dégager des économies sur le budget de l’État, je ne suis pas du tout d’accord sur le fait que cette décision soit supportée par le budget du transporteur et du distributeur d’électricité.

À différentes reprises et sur toutes les travées de cette assemblée, vous avez déploré que RTE et, surtout, ERDF ne dépensent pas assez d’argent pour maintenir et pour développer le réseau de distribution d’électricité, qui se trouve dans un mauvais état. (M. Roland Courteau acquiesce.)

Le réseau de moyenne tension, par exemple, n’est pas bon en France, et cela fait seulement deux ans qu’un rattrapage sérieux est mis en œuvre, après une petite dizaine d’années pendant lesquelles on n’a pas fait ce qu’il fallait.

Je pense donc que ce n’est pas le moment de « déshabiller » ces structures et vous demande, monsieur Philippe Marini, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. De même que la question de la personnalité morale, celle de l’autonomie financière de la CRE est régulièrement évoquée lors des débats sur les lois traitant des questions énergétiques.

La CRE a aujourd’hui fait la preuve de son indépendance, et ce projet de loi renforce encore ses compétences. Le Gouvernement ne voit pas de raison, aujourd’hui, d’aller au-delà, en particulier de la doter de l’autonomie financière, et ce alors que de nombreuses autres autorités administratives indépendantes ne l’ont pas.

Il émet donc un avis défavorable sur cet amendement et considère que cette question mérite d’être examinée de manière générale, pour toutes les autorités administratives indépendantes.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° 1 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je suis naturellement en désaccord complet avec les propos tant de mon excellent ami rapporteur de la commission des affaires économiques que de Mme la secrétaire d’État.

Néanmoins, soucieux de ne pas allonger les débats – la commission des finances appelle de ses vœux la discussion la plus rapide possible du projet de loi de régulation bancaire et financière, inscrit en fin d’ordre du jour de notre séance. (Sourires.) –, j’accepte de retirer cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 1 est retiré.

Article additionnel après l'article 8
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Articles additionnels après l’article 9

Article 9

I. – La section 12 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation est ainsi modifiée :

1° À l’article L. 121-86, après le mot : « consommateur », sont insérés les mots : « ou un non-professionnel » ;

2° Le 12° de l’article L. 121-87 est complété par les mots : « et les modalités de remboursement ou de compensation en cas d’erreur ou de retard de facturation ou lorsque les niveaux de qualité des services prévus dans le contrat ne sont pas atteints » ;

3° Au 15° du même article L. 121-87, après le mot : « amiable », sont insérés les mots : « et contentieux » ;

4° Après le 16° du même article L. 121-87, il est inséré un 17° ainsi rédigé :

« 17° Les coordonnées du site internet qui fournit aux consommateurs soit directement, soit par l’intermédiaire de liens avec des sites internet d’organismes publics ou privés, les informations contenues dans l’aide-mémoire du consommateur d’énergie établi par la Commission européenne ou, à défaut, dans un document équivalent établi par les ministres chargés de la consommation et de l’énergie. » ;

5° Au début du deuxième alinéa de l’article L. 121-89, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Le client peut changer de fournisseur dans un délai qui ne peut excéder vingt et un jours à compter de sa demande. » ;

6° Le même alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Dans tous les cas, le consommateur reçoit la facture de clôture dans un délai de quatre semaines à compter de la résiliation du contrat. Le remboursement éventuel du trop-perçu est effectué dans un délai maximum de deux semaines après l’émission de la facture de clôture. » ;

7° À la première phrase du troisième alinéa du même article L. 121-89, les mots : « directement ou » sont supprimés ;

8° L’article L. 121-91 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Cet arrêté précise également les différents modes de paiement que le fournisseur est tenu d’offrir au client et leurs modalités.

« En cas de facturation terme à échoir ou fondée sur un index estimé, l’estimation du fournisseur reflète de manière appropriée la consommation probable. Cette estimation est fondée sur les consommations réelles antérieures sur la base des données transmises par les gestionnaires de réseaux lorsqu’elles sont disponibles ; le fournisseur indique au client sur quelle base repose son estimation.

« Le fournisseur est tenu d’offrir au client la possibilité de transmettre, par internet, par téléphone ou tout moyen à la convenance de ce dernier, des éléments sur sa consommation réelle, éventuellement sous forme d’index, à des dates qui permettent une prise en compte de ces index pour l’émission de ses factures. » ;

9° L’article L. 121-92 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le consommateur accède gratuitement à ses données de consommation. Un décret pris après avis du Conseil national de la consommation et de la Commission de régulation de l’énergie précise les modalités d’accès aux données et aux relevés de consommation. »

II. – (Non modifié) Les 2° à 9° du I du présent article entrent en vigueur le 1er mars 2011.

III. – L’article 20 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le décret précité précise également les conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de distribution est autorisé à communiquer aux fournisseurs les données de comptage de leurs clients ou, avec son accord exprès, de tout consommateur final d’électricité. Toute déclaration frauduleuse de la part d’un fournisseur en vue d’obtenir ces données est punie de l’amende mentionnée au premier alinéa ; le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut voir sa responsabilité engagée du fait des manœuvres frauduleuses d’un fournisseur. »

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.

M. Roland Courteau. L’article 9 de ce projet de loi vise à transposer dès à présent l’article 3 de la directive 2009/72/CE, constitutive du troisième paquet énergie adopté en juillet 2009. Or, un an après cette adoption, lors du conseil « Énergie » du 6 septembre 2010, les États membres ont fait un constat pour le moins inquiétant sur la qualité de la protection des consommateurs dans le processus d’ouverture à la concurrence des marchés de l’énergie.

Certains des ministres de l’énergie ont effectivement observé que cette libéralisation poussée n’avait pas conduit à plus de transparence dans le secteur énergétique ni, surtout, à une baisse des prix pour les consommateurs. Or il s’agissait de l’objectif principal revendiqué par les défenseurs de la concurrence totale pour les marchés de l’énergie.

Sur la base du rapport sur le marché intérieur présenté, à cette occasion, par l’ancien commissaire européen, M. Mario Monti, ces mêmes ministres ont reconnu que les intérêts des consommateurs étaient insuffisamment pris en compte en matière de facturation, comme de capacités à faire appel à un médiateur indépendant en cas de litige.

Les États membres ont également débattu, une fois n’est pas coutume, de la pauvreté énergétique, et des chiffres officiels ont été enfin avancés : ainsi, selon l’estimation la plus basse, plus de 50 millions de citoyens européens se trouvent aujourd'hui dans l’incapacité de maintenir un niveau adéquat de confort dans leur logement, ont des factures énergétiques impayées ou ne peuvent réaliser les investissements minimaux en matière d’efficacité énergétique.

Le rapport Monti est, à ce titre, éclairant : « Il y a eu lieu de prendre des mesures supplémentaires pour permettre à tous les consommateurs, en particulier les plus vulnérables, de tirer pleinement profit de la concurrence et de prix justes en commençant par renforcer les normes minimales communes. »

La Commission européenne présentera d’ailleurs un rapport au Conseil de l’énergie du 2 décembre prochain, qui permettra à la fois : d’élaborer une définition-cadre du consommateur vulnérable ; d’harmoniser au niveau européen les méthodes statistiques pour mieux quantifier l’ampleur de la précarité énergétique ; de lister les politiques énergétiques européennes existantes susceptibles de contribuer directement ou indirectement à la prise en compte des intérêts des consommateurs ; enfin, de favoriser l’échange de bonnes pratiques entre États membres et de créer une table ronde des médiateurs de l’énergie leur permettant d’envisager des synergies en matière de protection des consommateurs.

Mes chers collègues, il était temps, après trois étapes de libéralisation des marchés de l’énergie, que les États membres se préoccupent enfin des consommateurs et de la pauvreté énergétique !

Il était temps, aussi, qu’il soit enjoint à la Commission de faire un rapport reconnaissant que la libéralisation a non pas conduit à une baisse des prix pour les consommateurs, mais bien plutôt à la précarisation de ces derniers.

Nous remercions vivement la présidence belge du Conseil de l’Union européenne, et en particulier le ministre M. Magnette, d’avoir porté ces inquiétudes au plus haut niveau européen.

Ces préoccupations n’ont cessé d’être les nôtres pendant de nombreuses années. Rappelons que, à l’occasion du Conseil européen de Barcelone, en mars 2002, le Premier ministre Lionel Jospin avait déjà fait part de ses doutes sur les bénéfices d’une libéralisation, en particulier pour les consommateurs. J’ai déjà cité ses propos à plusieurs reprises ; je n’y reviens donc pas.

Telle n’a jamais été, en revanche, la préoccupation des gouvernements qui se sont succédé depuis 2002. La position française sur le rapport Monti ne fait aucune référence à ces inquiétudes. Seule est actée l’approbation du renforcement des informations des consommateurs européens sur leurs nouveaux droits en matière d’énergie. Seuls sont approuvés les compteurs intelligents, qui semblent avantager les opérateurs plus que les consommateurs. Le projet de loi NOME initial a du reste prévu une transposition sans imagination des dispositions consacrées aux consommateurs de la directive 2009/72/CE.

Mme la présidente. L'amendement n° 268, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° L'article L. 121-86 est complété par les mots : «, ainsi qu'aux contrats souscrits par un non-professionnel pour une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères ou pour une consommation de gaz naturel inférieure à 30 000 kilowattheures par an » ;

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement de précision vise à lever toute ambiguïté quant à l'applicabilité des articles L. 121-87 à L. 121-94 du code de la consommation aux non-professionnels, comme cela est prévu à l’alinéa 2 de l’article 9.

La notion de non-professionnels recouvre les personnes morales telles que les associations, les sociétés civiles et les syndicats de copropriétaires. L’adoption de cet amendement permettrait de circonscrire l'application de ces articles aux personnes morales ayant des situations identiques en termes de consommation à celles des consommateurs personnes physiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Cet amendement vise à préciser les limites dans lesquelles les dispositions du code de la consommation s’appliquent aux non-professionnels, afin d’éviter les ambiguïtés sur la notion de consommateurs personnes physiques au sens communautaire, de manière à ne pas exclure du champ du code de la consommation les personnes morales ayant de faibles consommations, comme les petites associations ou les petites copropriétés.

En introduisant les mêmes seuils que ceux qui sont applicables à la réversibilité des tarifs, l’ambiguïté est levée. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 268.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 92, présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Le 12° de l'article L. 121-87 est complété par les mots : «, les niveaux de qualité de leurs services respectifs et les modalités de remboursement et de compensation proportionnée au préjudice subi en cas d'erreur ou de retard de facturation ou lorsque ces niveaux de qualité ne sont pas atteints » ;

La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement vise à renforcer les droits des consommateurs en cas de défaillances constatées dans la qualité du service de fourniture d’électricité.

S’il existe déjà dans la loi des modalités de compensation pour les consommateurs lésés, aucune disposition ne permet d’assurer que cette compensation est proportionnée au préjudice. Notre proposition tend à remédier à ce défaut. Dans les faits, la compensation du préjudice subi par le consommateur s’avère souvent vraiment dérisoire.

Monsieur le rapporteur, vous allez me rétorquer qu’il appartient au juge de fixer le niveau de compensation. Certes, mais nous estimons que la loi peut apporter une sécurité supplémentaire aux consommateurs. Une telle disposition ne nous semblerait pas un luxe : elle serait conforme aux souhaits des membres du Conseil de l’énergie de remédier à l’insuffisante prise en compte des intérêts des consommateurs qu’ils ont constatée.

Rien ne nous empêche de prendre les devants, sans attendre la remise en décembre par la Commission européenne de son rapport sur la protection des consommateurs dans le cadre de la libéralisation des marchés de l’énergie, qui pourrait la conduire à nous mettre en demeure.

Mes chers collègues, je vous invite à voter cet amendement, pour adopter, par anticipation, une mesure de justice en faveur des consommateurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que le remboursement effectué par un fournisseur doit être proportionné au préjudice subi en cas d’erreur, de retard de facturation ou lorsque le niveau de qualité n’est pas atteint.

Monsieur Bérit-Débat, cette précision ne me paraît pas utile. Il s’agit en effet d’un principe général de droit civil. Si un client estime son indemnisation insuffisante, vous l’avez d’ailleurs vous-même fait remarquer, il suffit qu’il se tourne vers le juge, à qui il reviendra d’apprécier le degré de faute et de se prononcer sur le niveau de l’indemnisation.

Voilà ce qui me conduit à demander le retrait de cet amendement, qui est d’ores et déjà satisfait par le droit civil.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 92.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 93, présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

3° Le 15° du même article L. 127-87 est ainsi rédigé :

« 15° Le délai de traitement de la réclamation du consommateur, qui ne peut être supérieur à deux mois, et les modes de règlement des litiges amiables et contentieux, notamment les modalités de saisines du médiateur national de l'énergie ; ».

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Cet amendement vise à faire mieux respecter le délai de traitement des réclamations des consommateurs.

Aux termes de l’article 1er du décret du 19 octobre 2007, le consommateur peut saisir le médiateur national de l’énergie lorsque le litige qui l’oppose à un fournisseur d’électricité n’a pu trouver de solution dans les deux mois à compter de la réception de la réclamation. En pratique, ce délai d’examen est rarement respecté par le fournisseur.

Par cet amendement, nous souhaitons imposer un délai légal maximum de traitement des réclamations par les professionnels, d’autant que l’annexe n° 1 de la directive 2009/72/CE du « troisième paquet énergie » ne prévoit, quant à elle, qu’un délai de trois mois au maximum. Il apparaît donc nécessaire de sécuriser ce délai dans la loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission partage tout à fait le souci des auteurs de cet amendement, mais elle considère que celui-ci est doublement satisfait.

Il l’est, d’une part, par le 15° de l’article L. 127-87 du code de la consommation, tel que modifié par le projet de loi, aux termes duquel toute offre de fourniture précise les modes de règlement amiable et contentieux des litiges : cela inclut bien évidemment les modalités de saisine du médiateur national de l’énergie.

Il l’est, d’autre part, par le décret relatif au médiateur national de l’énergie. Or, cher Roland Courteau, vous proposez d’en reprendre quasiment les termes. Ce décret précise bien que le médiateur ne peut être saisi qu’après l’expiration du délai de traitement de la réclamation du consommateur, lequel est de deux mois. Il ne paraît pas donc utile d’inscrire dans la loi une disposition qui relève du domaine réglementaire.

Dans ces conditions, la commission souhaite le retrait de cet amendement et, à défaut, en demandera le rejet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je rappelle que le médiateur a mis en place cette année le « dispositif de la deuxième chance » : il lui permet de renvoyer au fournisseur pour réexamen tout dossier qu’il estime n’avoir pas été suffisamment instruit par le service clientèle.

Ce dispositif doit être expérimenté tout au long de l’année 2010. Il nous paraît donc prématuré d’adopter un tel amendement si la solution souple qui est actuellement expérimentée suffit à résoudre le problème.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 93.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 116, présenté par MM. Courteau, Bourquin, Raoul, Botrel, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Remplacer les mots :

Les coordonnées du site internet qui fournit

par les mots :

Les coordonnées du site internet et les coordonnées téléphoniques qui fournissent

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Puisqu’on nous a invités à aller vite, je serai bref, me contentant de rappeler que 36 millions de Français ont aujourd’hui accès à internet depuis chez eux : on est donc loin de 100 % d’abonnés. D’où la nécessité d’ajouter les coordonnées téléphoniques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le sixième alinéa de l’article 9 vise à permettre au consommateur d’avoir accès, via un site internet, aux informations contenues dans l’aide-mémoire du consommateur d’énergie qui devrait être établi par la Commission européenne, comme le prévoit le « troisième paquet énergie ».

Il me semble que l’amendement est satisfait par cette disposition. C’est la raison pour laquelle je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 117, présenté par MM. Courteau, Bourquin, Raoul, Botrel, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Après les mots :

qui fournit

insérer le mot :

gratuitement

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. On le sait, certaines informations ne sont délivrées aux clients que par le biais de services surtaxés. Car la tentation est grande de s’engraisser sur le dos des consommateurs ! Cet amendement vise donc à adresser un signal clair : il faut lutter contre ces pratiques inacceptables.

Madame la secrétaire d’État, je profite de cette occasion pour vous poser une question, qui n’est d’ailleurs pas sans rapport avec les missions sociales du service public de l’électricité : pourriez-vous nous éclairer sur le décret d’application, qui tarde à venir, concernant la gratuité des appels téléphoniques en direction des services sociaux ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement apporte une précision utile. Il permet en effet d’éviter que les documents constituant l’aide-mémoire du consommateur d’énergie puissent être mis en ligne sur des sites payants.

La commission a donc émis un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je veux revenir sur le prix des appels téléphoniques en direction de certaines administrations.

Je vous le dis à tous : essayez d’appeler Pôle emploi, vous allez voir combien cela va vous coûter ! C’est inadmissible !

À un moment, nous avions envisagé de rendre la période d’attente totalement gratuite. Mais il nous avait été répondu – je me souviens du débat que nous avions eu en commission mixte paritaire – qu’une telle mesure posait des problèmes techniques.

Je suis très content que le mot « gratuitement » soit introduit ici, mais il conviendrait que cette gratuité soit étendue à toutes les administrations de ce pays lorsque les usagers souhaitent les contacter.

Mme Odette Terrade. Absolument !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 117.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 272, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Alinéa 10, seconde phrase

Remplacer les mots :

remboursement éventuel du trop-perçu

par les mots :

remboursement du trop-perçu éventuel

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

Dans un délai de deux semaines à compter de l’émission de la facture de clôture a lieu non pas le remboursement éventuel du trop-perçu, ce qui serait assez curieux, mais bien le remboursement du trop-perçu éventuel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 272.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 273, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il précise quels sont les délais de remboursement ou les conditions de report des trop-perçus.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement vise à ce que soient précisées par arrêté les modalités de remboursement, en cours de contrat, des trop-perçus par un fournisseur.

De nombreuses réclamations portent en effet sur le refus des fournisseurs de rembourser des sommes perçues en excès durant l’exécution du contrat, notamment dans le cas de factures établies sur des index estimés.

Il y a quelques semaines, cela n’aura pas échappé à ceux qui sont des lecteurs assidus de la presse, un fournisseur a été accusé de constituer de la trésorerie sur le dos de ses clients. Le ministre d’État a saisi le médiateur national de l’énergie de cette question le 27 août dernier.

Le présent amendement constitue donc une première réponse à ce type de situation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 273.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 94 rectifié est présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L'amendement n° 264 rectifié bis est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Barbier, Baylet et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La facturation de la première année d'abonnement repose sur la consommation réelle de l'abonné. »

La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 94 rectifié.

M. Roland Courteau. Les surfacturations en début d’abonnement au service sont devenues monnaie courante. Ces pratiques ne sont plus acceptables.

GDF Suez a d’ailleurs à nouveau été mis en cause en août pour avoir gonflé les factures de ses clients, ne leur remboursant le trop-perçu qu’en fin d’année. Il était temps que M. le ministre d’État Jean-Louis Borloo se saisisse du dossier et demande un rapport sur ces facturations.

Le problème est général, mais l’occasion nous est donnée, avec l’examen de ce projet de loi, de remédier à cette situation pour les nouveaux abonnés au réseau d’électricité en faisant en sorte que seule soit prise en compte leur consommation réelle. Saisissons donc cette chance !

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour présenter l'amendement n° 264 rectifié bis.

M. François Fortassin. Notre collègue Roland Courteau a parfaitement défendu cet amendement, que nous avons déposé dans un souci non seulement d’équité, mais aussi de transparence vis-à-vis des consommateurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je comprends la volonté des auteurs de ces amendements d’éviter les abus et de faire en sorte que, pour la première année d’abonnement, la facturation se fasse sur la base de la consommation réelle de l’abonné.

La commission a cependant émis un avis défavorable, principalement pour deux raisons.

Tout d’abord, la loi impose un seul relevé des compteurs par an. Or, dans la pratique, les compteurs sont relevés deux fois par an. Il n’est donc pas nécessaire de modifier le dispositif législatif pour le moment.

Ensuite, seule l’installation de « compteurs intelligents » dans tous les foyers permettra de relever la consommation réelle « en direct ». Or vous avez tous suivi, mes chers collègues, l’expérimentation conduite à Tours, à Lyon et en Bretagne : pour le moment, les résultats sont mitigés.

M. Michel Sergent. Très mitigés !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Les « compteurs intelligents » se développent fortement aux États-Unis. Reste que cette appellation recouvre de nombreux systèmes : certains sont très intelligents, d’autres moins…

Je m’adresse d’ailleurs au président de la commission de l’économie : menée depuis bientôt un an dans trois régions françaises, cette expérimentation mérite que l’on en dresse le bilan. J’aimerais donc que nous organisions des auditions sur ce sujet.

Mes chers collègues, attendons les résultats de nos travaux avant d’aller plus loin.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Sur le fond, le Gouvernement partage l’idée défendue par les auteurs de ces amendements. Cela étant, il est matériellement impossible de mettre en œuvre une telle disposition aujourd’hui.

La généralisation, si l’expérimentation qui est menée actuellement est concluante, de la mise en place des « compteurs communicants » ou « compteurs intelligents » permettra effectivement de relever la consommation réelle en permanence. Les fournisseurs pourront établir leur facture sur les seuls index réels.

Il convient cependant de noter que l’alinéa 14 de l’article 9 a pour objet d’encadrer l’estimation des consommations effectuées par le fournisseur. Celui-ci doit indiquer au client sur quelle base repose son estimation.

Attendons donc que les outils qui nous permettraient de répondre à ce besoin de facturation sur la consommation réelle fassent leurs preuves.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 94 rectifié et 264 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 128, présenté par MM. Courteau, Teston, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 17

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article L. 121-92 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art L. ... I - Pour réaliser la pose de compteurs intelligents pour les particuliers, telle que prévue à l'article 18 de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, les fournisseurs d'électricité sont tenus :

« 1° d'apporter des garanties sérieuses de sécurisation des données collectées et de leur confidentialité ;

« 2° de financer, à parts égales avec le consommateur et le gestionnaire de réseaux de distribution, la mise en place de chaque compteur ;

« 3° de garantir que les offres commerciales liées aux abonnements avec effacement des heures de pointe engendrent une réduction effective du coût de la facture du consommateur.

« II - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »

La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. L’article 9 transpose dans le code de la consommation une partie de la directive 2009/72/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité.

Il est utile de rappeler que, dans ses considérants, cette directive précise notamment que l’un des aspects essentiels de la fourniture d’énergie au client réside dans l’accès à des données de consommation objectives et transparentes. Cet aspect renvoie à la fois au principe du droit à l’information des consommateurs et au principe d’efficacité de la concurrence, la bonne information étant censée permettre de faire jouer la concurrence sur les tarifs.

Par ailleurs, l’article 18 de la loi dite « Grenelle 1 » du 3 août 2009 prévoit la pose de « compteurs intelligents » pour les particuliers.

C’est dans cette optique que nous présentons cet amendement, qui vise à fixer trois grandes orientations de protection du consommateur relativement à la mise en œuvre de ces « compteurs intelligents », pour lesquels une expérimentation est actuellement en cours en Indre-et-Loire et dans l’agglomération lyonnaise.

La première de ces orientations concerne les garanties qui doivent être offertes pour la protection et la confidentialité des données recueillies par ces compteurs et fait écho aux demandes de la CNIL.

Les données recueillies à l’heure actuelle grâce à ces compteurs sont principalement utilisables par les fournisseurs et les gestionnaires de réseaux de distribution, notamment à des fins commerciales. De plus, les informations induites qu’elles apportent pourraient représenter des atteintes à la vie privée des consommateurs.

La deuxième orientation a trait au prix de l’installation de ces « compteurs intelligents ». Selon diverses sources d’information, la pose d’un tel compteur pourrait coûter jusqu’à 230 euros, somme qui serait entièrement imputée au consommateur par l’intermédiaire du TURPE, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité. Réclamer une telle somme à un grand nombre de foyers modestes est clairement inacceptable et préoccupe grandement les associations de consommateurs comme UFC-Que choisir ou CLCV.

En conséquence, il nous semble plus juste que le coût d’installation de ces « compteurs intelligents » soit partagé entre tous les acteurs qui pourraient trouver bénéfice à la connaissance des informations collectées : le consommateur, le gestionnaire du réseau de distribution et le fournisseur.

Enfin, la troisième orientation est relative au contrat avec effacement des heures de pointe, que les fournisseurs sont incités à proposer aux particuliers, notamment par les dispositions de l’article 2 de ce projet de loi. Les fournisseurs pourraient proposer aux particuliers des contrats de type bonus-malus : d’un côté, on trouverait des offres tarifaires attractives ; de l’autre, la consommation en période de pointe ferait l’objet d’un malus très élevé.

Mes chers collègues, nous souhaitons appeler votre attention sur l’attrait que pourraient susciter de tels tarifs chez certains consommateurs qui, faute d’en mesurer pleinement les contraintes, risqueraient de voir leur facture atteindre des montants exorbitants, avec les conséquences que l’on imagine.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur Bérit-Débat, vous reprenez les arguments des associations de consommateurs, qui font suite aux résultats en partie insatisfaisants de l’expérimentation dont il a déjà été question.

Le 31 août dernier, le Gouvernement a pris un arrêté – je sais que, lorsque vous avez rédigé cet amendement, vous ne disposiez pas encore de ces éléments – prévoyant les modalités et le calendrier de déploiement des « compteurs intelligents » et précisant, comme vous le souhaitez, les modalités de prise en charge financière du dispositif par les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité.

Autrement dit, le Gouvernement vous a pleinement entendu. Il vous a même doublement entendu puisqu’il a en outre décidé de prolonger cette expérimentation jusqu’au 31 mars prochain.

L’UFC-Que choisir ? et CLCV ont eu raison de dire que nous n’avions pas encore suffisamment d’informations, notamment pour la période hivernale. Vous vous êtes fait ici leur avocat, et vous avez eu raison, mais je crois que la double décision qui a été prise, à savoir l’arrêté et la prolongation, répond tout à fait à votre attente.

En conséquence, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. La réponse de M. le rapporteur sur la partie économique, notamment en ce qui concerne le TURPE, correspond bien à une partie de notre amendement. Reste que le problème des libertés qui a été soulevé par la CNIL, concernant l’utilisation des données de ces « compteurs intelligents », n’est pas résolu.

Je sais pertinemment quel sort sera réservé à cet amendement. Il n’empêche qu’il faudra être très vigilant, examiner de près le fonctionnement de ces compteurs et voir précisément à quelles fins ils sont utilisés.

M. Claude Bérit-Débat. Et c’est pourquoi nous le maintenons !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote.

M. Dominique Leclerc. Élu du département d’Indre-et-Loire, où cette expérimentation est en cours – et dont la prolongation soulève à juste titre quelques controverses sur le terrain –, je crois utile d’apporter mon témoignage.

Je pense que le compteur intelligent constitue certes un très grand progrès, mais que son premier bénéficiaire est le fournisseur d’électricité. Le consommateur, pour sa part, subit plusieurs conséquences.

Tout d’abord, la gestion « intelligente » de sa consommation d’électricité suppose une certaine attention, voire un apprentissage.

Mais surtout, c’est le consommateur qui supporte le coût de l’installation du compteur, dont il doit ensuite, de surcroît, payer la location. C’est tout de même extraordinaire, surtout à un moment où il est beaucoup question du poids croissant que représente la facture d’électricité ! Rapporteur de la réforme des retraites, je suis bien placé pour savoir qu’on fait payer au consommateur la moitié de la retraite « chapeau » des salariés d’EDF.

Il faudra mesurer très précisément l’avantage que le consommateur peut retirer de cette innovation en regard de la dépense supplémentaire qu’elle engendre pour lui.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Monsieur le rapporteur, pourriez-vous préciser dans quelle mesure l’arrêté pris apporte une solution à la question du financement de ces compteurs intelligents ? De quelle manière prévoit-on que ces compteurs seront financés ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Ils seront financés par le TURPE.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C’est effectivement ERDF qui prend en charge ce financement, grâce au TURPE.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 128.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 129, présenté par MM. Courteau, Teston, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 17

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article L. 121-92 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art L. ... I - Chaque fournisseur d'électricité s'engage à développer des contrats d'abonnement innovants en direction des particuliers, visant à la réduction de la consommation d'énergie de leur logement individuel.

« Ces contrats, qui doivent combiner la fourniture d'électricité à un tarif adapté et une offre conjointe d'amélioration des qualités énergétiques du logement, peuvent, le cas échéant, prendre la forme de contrats de performance énergétique.

« II - Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d'application du présent article. »

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Il nous semble intéressant d’envisager une relation plus partenariale entre les consommateurs et les fournisseurs. Cela va dans le sens des orientations du Grenelle de l’environnement.

Au-delà de la maîtrise de la consommation d’électricité de pointe, la réduction de la consommation énergétique, notamment celle des bâtiments, demeure le moyen le plus durable pour parvenir aux objectifs du Grenelle 1. Ce qui a été prévu pour les bâtiments publics et industriels constitue une réponse à ces objectifs. S’agissant au contraire des bâtiments et des habitations des particuliers, aucune mesure n’a été prise.

C’est ce qui nous a conduits à déposer cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Un dispositif incitatif, les certificats d’économie d’énergie, existe déjà. Il permet d’atteindre l’objectif de réduction de la consommation énergétique que vise cet amendement. Dans ce cadre, en effet, les fournisseurs de gaz et d’électricité sont soumis à un certain nombre d’obligations.

La commission émet en conséquence un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 129.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 207, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 20, première phrase

Après les mots :

de leurs clients

supprimer la fin de cette phrase.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet amendement concerne la transmission des données.

Le présent article complète le code de la consommation afin de transposer certaines dispositions du « troisième paquet énergie », en faveur de la protection du consommateur. Les sénateurs de mon groupe estiment par conséquent que l’économie de cet article est plutôt positive.

Toutefois, la protection des consommateurs passe prioritairement, notamment au regard de la crise sociale et économique que nous traversons, par la garantie d’une tarification de l’énergie basse que ce texte ne permet pas de maintenir.

Plus précisément, nous estimons que la disposition introduite à l’Assemblée nationale prévoyant qu’un décret « précise également les conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de distribution est autorisé à communiquer aux fournisseurs les données de comptage de leur client ou, avec son accord exprès, de tout consommateur final d’électricité » ouvre la voie à des pratiques contestables.

Nous considérons en effet que les fournisseurs n’ont pas à connaître les données de comptage des consommateurs finals qui ne seraient pas directement leurs clients, que ces derniers aient ou non donné leur accord.

C’est pourquoi nous proposons la suppression de cette disposition.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski., rapporteur. L’alinéa 20 de l’article 9 prévoit que la communication au fournisseur, par le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité, des données de comptage de tout consommateur d’électricité ne pourra se faire qu’après avis exprès de ce dernier. La transmission de ces données me semble donc suffisamment encadrée.

La commission émet, par conséquent, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 207.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 206 rectifié, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'avant-dernier alinéa de l'article L. 121-1-1 du code de la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° De proposer une souscription à un contrat de fourniture, de prestation de service ou de raccordement pour l'électricité et le gaz »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Nous abordons, avec cet amendement, la question du démarchage à domicile.

Vous le savez, des opérateurs privés, plus précisément Direct Énergie et Poweo, ont été accusés de démarchage abusif. Ces pratiques commerciales abusives ont conduit les associations de consommateurs et les élus à réagir. Ainsi, le maire communiste d’Houdain, dans le Pas-de-Calais, l’a fait de manière inédite et courageuse en prenant un arrêté « anti-démarchage » visant Poweo et sa filiale Arelys. Cette décision avait pour objectif de dénoncer publiquement les dérapages de leurs agents commerciaux.

En effet, selon la mairie, alertée par les habitants, les démarcheurs de Poweo se présentaient « comme des agents EDF vérifiant l’application d’une remise sur les factures ». Depuis que cet arrêté a été pris, des témoignages faisant étant de semblables pratiques arrivent de la France entière.

Cette affaire fait écho au rapport du médiateur national de l’énergie qui indique que « les contestations de souscriptions et les dénonciations de pratiques commerciales ont continué d’augmenter en 2009 » – de 20% par rapport à 2008 – et que « les nouvelles dispositions du code de la consommation adoptées en août 2008 » dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie « pour protéger les consommateurs de ces pratiques n’ont pas eu les effets escomptés ».

Ce rapport précise en outre : « Le démarchage à domicile [est] la porte ouverte aux dérives. Dans la grande majorité des cas les souscriptions litigieuses font suite à un démarchage à domicile. Le défaut d’information, notamment à l’égard des personnes les plus fragiles, est régulièrement dénoncé par les consommateurs. »

La loi de modernisation de l’économie a prévu que le consommateur n’est engagé, dans le cas du démarchage à domicile, que par sa signature. Mais les consommateurs signent des contrats qui les engagent et ne sont donc pas protégés. Il est vrai que la loi prévoit un délai de rétractation de sept jours et qu’un bordereau de rétractation doit être joint au contrat. Toutefois, ce délai est souvent dépassé avant que les personnes concernées ne s’aperçoivent de la supercherie. De plus, les réclamations doivent être envoyées par lettre recommandée avec avis de réception, une démarche qui n’est pas forcément facile pour les personnes « fragilisées ».

Par cet amendement, nous souhaitons donc interdire les démarchages à domicile lorsque sont en cause des offres de souscription de contrat de fourniture, de prestation de service ou de raccordements pour l’électricité et le gaz. C’est pourquoi nous proposons de compléter l’article L. 121-1-1 du code de la consommation afin que de telles pratiques soient réputées trompeuses et donc interdites.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission avait émis un avis défavorable sur l’amendement initial. Elle considérait en effet que tout consommateur pouvait quitter son fournisseur à tout moment. Nous avons par ailleurs reconnu l’existence d’abus.

Je tiens toutefois à signaler que la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a constaté une forte diminution des plaintes à ce sujet.

Votre amendement rectifié, madame Terrade, n’a plus aucun rapport avec le démarchage à domicile. Il vise à ce que le fait de proposer un contrat de fourniture de gaz et d’électricité soit considéré comme une pratique commerciale trompeuse.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L’adoption de cet amendement constituerait une entrave grave au développement de la concurrence dans le domaine de l’électricité et du gaz.

En conséquence, bien que la commission n’ait pas pu examiner l’amendement rectifié, je maintiens son avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Il est défavorable. Une telle disposition est excessive : il ne s’agit pas d’interdire, mais d’encadrer strictement le démarchage dans le code de la consommation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 206 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Article 9
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article 9 bis (Nouveau)

Articles additionnels après l’article 9

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 277, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 30-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :

1° A la seconde phrase du premier alinéa, les mots : «, jusqu'au 31 décembre 2010 » sont remplacés par les mots : « jusqu'à la date de mise en place effective du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, » ;

2° A la dernière phrase du deuxième alinéa, les mots : « à compter du 1er janvier 2011 » sont remplacés par les mots : « à compter du lendemain de la mise en place effective du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je souhaiterais, par courtoisie, et avec votre accord, madame la présidente, proposer à Philippe Adnot de présenter son amendement avant que je ne présente mien.

Mme la présidente. L'amendement n° 16, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :

Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 30-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « jusqu'au 31 décembre 2010 » sont remplacés par les mots : « jusqu'à la date de mise en place effective du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique et au plus tard le 30 juin 2011 » ;

2° À la dernière phrase du deuxième alinéa, les mots : « à compter du 1er janvier 2011 » sont remplacés par les mots : « après le 30 juin 2011 ».

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Je remercie M. le rapporteur de son élégance.

Il convient d’éviter qu’il existe un espace sans réglementation après l’abandon du système actuel et avant que la loi NOME n’entre en application, compte tenu du temps qui va s’écouler d’ici à son adoption définitive et des délais qu’implique la publication des décrets qui devront être pris. Il s’agit donc de faire en sorte que le système actuel soit maintenu jusqu’à la date probable de mise en œuvre de la loi NOME.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, je vous donne à nouveau la parole pour présenter l’amendement n° 277 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 16 ?

M. Ladislas Poniatowski. L’amendement n°°277 a le même objet que l’amendement n° 16. La seule différence réside dans le fait que, au lieu d’arrêter la date butoir du 30 juin 2011, mon amendement précise que le système actuel sera prolongé « jusqu’à la date de mise en place effective du dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique ». Je ne voudrais pas mettre la France, ni son gouvernement, en difficulté au regard des exigences européennes.

J’espère que Mme la secrétaire d’État considérera que mon amendement, tel qu’il est libellé, répond bien à cette préoccupation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. L’amendement présenté par M. le rapporteur vise à faire en sorte qu’il n’y ait pas d’interruption entre le dispositif du TARTAM et celui de l’ARENH, et je comprends cette préoccupation, qui est légitime.

Je ne peux que rappeler l’engagement du Gouvernement à tout mettre en œuvre pour présenter les textes d’application de ce projet de loi NOME avant la fin de l’année.

Je suggère à M. Adnot de se rallier à l’amendement n° 277, sur lequel je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l’amendement n° 277.

M. Daniel Raoul. Vous le savez, nous n’avons aucun doute quant aux difficultés que va soulever l’application de cette loi. C’est votre affaire et, sur cet amendement, nous nous abstiendrons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 277.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9, et l'amendement n° 16 n'a plus d'objet.

Articles additionnels après l’article 9
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article 10

Article 9 bis

L’article 43-1 de la même loi est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Celui-ci est aussi chargé de recommander des solutions aux litiges entre les gestionnaires des réseaux publics de distribution et les utilisateurs raccordés en basse tension pour une puissance électrique inférieure ou égale à 36 kVA ou les consommateurs de gaz naturel consommant moins de 30 000 kWh par an. » ;

2° Au deuxième alinéa, après les mots : « secteur de l’énergie et », sont insérés les mots : « des contrats de raccordement conclus entre un consommateur final ou un fournisseur pour le compte de ce dernier et un gestionnaire de réseau public de distribution d’électricité ou de gaz naturel permettant la formation des contrats de fourniture précités » et après le mot : « fournisseur », sont insérés les mots : « ou du gestionnaire de réseau ».

Mme la présidente. L'amendement n° 35 rectifié, présenté par MM. Beaumont, Pierre et Fouché, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. René Beaumont.

M. René Beaumont. L'article 9 bis, introduit par la commission de l'économie, élargit le champ de compétence du médiateur national de l'énergie aux litiges entre gestionnaires de réseaux de distribution et petits consommateurs, ainsi qu’aux litiges nés des contrats de raccordement.

Or l'article 7 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie a déjà confié au comité de règlement des différends et des sanctions – CORDIS – de la Commission de régulation de l'énergie le traitement des différends entre gestionnaires et utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité.

L'extension des compétences du médiateur national de l’énergie prévue par l'article 9 bis pourrait donc conduire à un conflit de compétences avec le CORDIS. C'est pourquoi le présent amendement vise à supprimer ledit article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, car il convient en effet d’éviter les conflits de compétences entre le CORDIS et le médiateur.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 35 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 9 bis est supprimé.

Par ailleurs, l'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, n’a plus d’objet.

Je précise que cet amendement était ainsi libellé :

Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :

3° Après le troisième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les dispositions qui précèdent sont également applicables aux contrats conclus par :

« - les non-professionnels ;

« - les professionnels et les entreprises employant moins de cinquante personnes et dont le chiffre d'affaires ou le bilan annuel n'excède pas dix millions d'euros. »

Article 9 bis (Nouveau)
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Article 11

Article 10

(Suppression maintenue)

Article 10
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Article 11 bis A (Nouveau)

Article 11

(Non modifié)

Le III de l’article 20 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« À titre dérogatoire, un report de cinq ans pour la mise en œuvre du plan de constitution des actifs définis au II est accordé à un exploitant nucléaire si les deux conditions suivantes sont remplies :

« 1° Les charges mentionnées au I, à l’exclusion de celles liées au cycle d’exploitation, évaluées en euros courants sur la période allant de la date de publication de la présente loi à 2030 sont inférieures à 10 % de l’ensemble des charges mentionnées au I du présent article, à l’exclusion de celles liées au cycle d’exploitation, évaluées en euros courants ;

« 2° Au moins 75 % des provisions mentionnées au premier alinéa du II, à l’exclusion de celles liées au cycle d’exploitation, sont couvertes au 29 juin 2011 par des actifs mentionnés à ce même II.

« Jusqu’au 29 juin 2016, la dotation moyenne annuelle au titre des actifs susmentionnés doit être positive ou nulle, déduction faite des décaissements au titre des opérations de démantèlement en cours et des dotations au titre des charges nouvelles ajoutées au passif des fonds dédiés. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec cet article 11, nous abordons la question de la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Il est en effet ici proposé de reporter de cinq ans le délai de mise en œuvre par les exploitants du plan de constitution des actifs dédiés au démantèlement des installations nucléaires.

Est donc également ici en jeu la sûreté nucléaire, et c’est à ce titre que je souhaite vous faire part, madame la secrétaire d’État, des inquiétudes suscitées par la décision du Gouvernement de diminuer les moyens accordés à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, et de créer une redevance qui lui serait versée directement par les exploitants nucléaires.

L’IRSN est un établissement public à caractère industriel ou commercial qui exerce quatre grandes missions : une mission d’appui aux pouvoirs publics dans les domaines de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et du contrôle des matières nucléaires, sujet qui nous occupe avec cet article 11 ; une mission de surveillance radiologique de l’environnement et de la population ; une mission d’expertise, d’étude, de mesure et de recherche effectuée à la demande d’organismes français ou étrangers ; enfin, une mission de recherche afin que l’expertise repose sur les meilleures connaissances scientifiques.

Le rôle de l’IRSN est donc très important et il se trouve confronté à une charge de travail croissante qui nécessiterait plus de moyens humains et financiers. Or c’est exactement le contraire qui est prévu !

En effet, le contrat d’objectifs 2010-2013 passé entre l’État et l’IRSN prévoit une diminution de 30 millions d’euros de la subvention de l’État, qui passerait de 243 millions à 213 millions d’euros. Cette baisse des moyens – on peut s’en étonner et même s’en inquiéter quand le Gouvernement entend développer l’énergie nucléaire en France – va toucher directement le budget de l’expertise en sûreté nucléaire : celui-ci sera presque réduit de moitié, puisque les 30 millions d’euros en question seront en totalité ponctionnés sur le budget de l’expertise, qui est actuellement d’environ 80 millions d’euros.

Pour compenser une partie de ce désengagement, le Gouvernement a prévu la création, par décret, d’une redevance payée par les industriels du nucléaire lorsque ceux-ci présentent des dossiers que l’IRSN doit analyser pour rendre son avis à l’Autorité de sûreté nucléaire. Cette décision, prise dans la plus grande précipitation et au seul motif d’afficher une baisse des dépenses publiques, suscite la plus vive inquiétude des personnels de l’IRSN. Comment pourrait-il en être autrement ?

Cette redevance est, en effet, en contradiction avec l’un des principes fondateurs de l’IRSN, créé notamment pour rendre l’expertise indépendante de tout exploitant. Or, avec l’instauration d’une telle relation entre l’IRSN et les exploitants, on peut craindre à terme l’existence de pressions sur le travail de cet institut et une dérive du système dans la mesure où l’on fait entrer l’expertise en sûreté nucléaire dans le domaine marchand. D’ailleurs, l’Autorité de sûreté nucléaire a rendu un avis négatif sur le projet de redevance.

Pour le Gouvernement, on voit bien sûr tout l’intérêt « budgétaire » d’une telle décision. Il semble d’ailleurs que ce soit là la seule raison qui ait motivé cette décision. En effet, si, dans le précédent contrat d’objectifs, il était prévu de rechercher de nouveaux modes de financement et si, en conséquence, l’idée de créer une redevance avait été envisagée – parmi d’autres, comme celle de créer l’équivalent d’une nouvelle taxe sur les installations nucléaires de base –, il s’agissait alors de trouver un financement supplémentaire pour l’expertise, afin de réduire les délais de traitement des dossiers déposés par les exploitants. Cette idée était dans l’air, mais sans avoir été complètement développée et encore moins finalisée. Or Bercy, dans sa traque aveugle des dépenses publiques, a « sauté » sur l’idée pour la dénaturer.

Résultat : pour l’IRSN, c’est l’effet inverse de ce qui avait été envisagé qui se produit. Au lieu d’une augmentation de ses moyens, elle voit son budget d’expertise amputé de 30 millions d’euros, avec une compensation seulement partielle, et grâce à une redevance !

Quid de l’efficacité de l’IRSN avec un budget moindre et non pérenne, couplé au risque de la perte de son indépendance ?

Comble de l’histoire, il est aujourd’hui demandé aux services de l’IRSN d’estimer et de mettre au point eux-mêmes, dans l’urgence et la précipitation – avec un délai de trois mois –, les barèmes qui régiront cette redevance. Une double peine, en somme !

Devant un tel degré de précipitation et d’inconséquence, vous comprendrez l’inquiétude légitime suscitée par cette décision. Aussi, dans un souci de transparence et de parfaite information de notre assemblée, je vous demande, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir me communiquer votre projet de décret, ainsi que l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire qui vous a été remis sur ce projet de redevance.

Mme la présidente. L'amendement n° 205, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Madame la secrétaire d'État, j’espère qu’en donnant l’avis du Gouvernement vous pourrez répondre à l’intervention de ma collègue, qui a soulevé une question vraiment importante.

L’article 20 de la loi du 28 juin 2006, loi de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, impose non seulement aux exploitants d’installations nucléaires d’évaluer « de manière prudente » les charges de démantèlement de leurs installations ainsi que les charges de gestion de leurs combustibles usés et déchets radioactifs, mais également de constituer les provisions afférentes et d’affecter à leur couverture, à titre exclusif, les actifs nécessaires.

Selon cet article, le plan de constitution d’actifs doit être mis en œuvre par les exploitants dans un délai de cinq ans à compter de la publication de la loi, soit en juin 2011.

Nous avions estimé à l’époque qu’il s’agissait d’une bonne disposition, permettant de préparer l’avenir, c'est-à-dire le démantèlement des centrales dont la durée de vie, je le rappelle, n’est pas extensible à l’infini. Nous avions alors affirmé que « l’avenir et la sûreté de la gestion des déchets toxiques dépendent du montant et de la pérennité des moyens qui y seront dédiés ». Nous avions raison et, malheureusement, vous remettez aujourd'hui ce principe en cause.

Le présent article du projet de loi NOME s’écarte clairement de cet objectif en reportant de cinq années le délai de mise en œuvre par les exploitants du plan de constitution des actifs dédiés au démantèlement des installations nucléaires.

Certes, vous prenez quelques précautions, en prévoyant que ce report suppose que deux conditions soient remplies, notamment qu’au moins 75 % des provisions, à l’exclusion de celles qui sont liées au cycle d’exploitation, soient couvertes par des actifs au 29 juin 2011.

Cependant, nous considérons qu’il s’agit d’un recul important et d’un aveu de la difficulté dans laquelle vous plongez EDF en l’obligeant à vendre le quart de sa production nucléaire à la concurrence.

Ainsi, EDF, selon la législation en vigueur, aurait dû investir 6,7 milliards d’euros entre le début de l’année 2010 et la mi-2011. EDF n’en est évidemment pas capable, alors que vous l’obligez à céder une grande partie de la rente nucléaire à ses concurrents.

Vous faites donc le choix de la concurrence contre celui de la sûreté et de l’avenir. Vous préférez permettre l’investissement dans la prolongation de vie des centrales, à hauteur de 600 millions d’euros par tranche, plutôt que de préparer réellement l’avenir, par le démantèlement des trop vieilles centrales et la mise en chantier de nouveaux moyens de production. Nous le regrettons !

Sur la forme, nous regrettons également, comme M. le rapporteur, l’absence de saisine du Conseil économique, social et environnemental sur cette question, saisine que prévoit pourtant l’article 70 de la Constitution.

C’est pour toutes ces raisons que nous demandons la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Ma réponse portera sur votre amendement, cher collègue, et non sur l’ensemble de votre intervention.

Je voudrais attirer votre attention sur le fait que supprimer l’article 11, ce serait forcément léser EDF, et je sais que tel n’est pas votre objectif.

Où en est EDF s’agissant de la constitution des fonds dédiés au démantèlement des installations nucléaires ? Aujourd'hui, 11,5 milliards d'euros d’actifs sont d’ores et déjà dégagés sur les 17,5 milliards d'euros qui doivent l’être. L’article 11 prévoit que 1,6 milliard d'euros supplémentaires y seront consacrés entre 2009 et 2011, le reliquat de 4 milliards d'euros devant être affecté entre 2011 et 2016.

En procédant à un étalement de la constitution de ces fonds, nous rendons service à EDF. Il faut donc maintenir l’article 11 : c'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. L’article 11 traite des dépenses de démantèlement des installations nucléaires, étant entendu que les situations sont très disparates parmi les exploitants.

Pour EDF, l’échéance moyenne des dépenses de démantèlement; d’évacuation et de stockage des déchets définitifs est de plus de vingt-cinq ans dans une hypothèse conservatrice d’une durée d’exploitation de quarante ans. Même si ces échéances sont lointaines, il n’en demeure pas moins qu’EDF est l’exploitant qui aura à constituer le plus important portefeuille d’actifs dédiés.

Afin de remplir les obligations légales résultant de l’article 20 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006, EDF a mis en place, dès la publication de cette loi, un programme notable de constitution d’actifs dédiés, mais dans une logique de montée en puissance progressive du fait de l’échéance lointaine des décaissements et eu égard aux montants en jeu, afin de garantir la liquidité du groupe.

Dans l’hypothèse conservatrice d’une durée d’exploitation des réacteurs d’EDF de quarante ans, l’essentiel des dépenses de démantèlement se situe à partir de l’horizon 2030 ; or cet horizon pourrait être significativement repoussé si EDF atteint son objectif d’allongement de la durée de vie de ses réacteurs au-delà de quarante ans.

En phase de constitution des actifs, les théories économiques et financières plaident pour un étalement des dotations afin de diversifier les actifs et les périodes de placement au sein des cycles économiques.

En raison de l’échéance lointaine des décaissements et des montants en jeu, afin de garantir la liquidité du groupe, il est important que la réglementation ne conduise pas les exploitants à investir massivement, dans une période de volatilité forte des marchés, mettant en risque les dotations restant à réaliser et conduisant à une mauvaise affectation des actifs.

Compte tenu de ces éléments et du niveau de couverture déjà atteint par les exploitants nucléaires, une prolongation de l’échéance de constitution des actifs de cinq ans paraît raisonnable et prudente pour les exploitants dont les décaissements seront tardifs. Cela permettra un programme de placement plus diversifié dans le temps et donc plus efficace, car moins exposé aux aléas de la conjoncture économique.

En tout état de cause, la modification proposée assure qu’il sera pour tout exploitant impossible de réduire son niveau de couverture du fait du report de l’échéance à la mi-2011 et d’utiliser les décaissements induits à autre chose qu’à des opérations de démantèlement des installations nucléaires de base tant que la nouvelle échéance de 2016 de première constitution des actifs ne sera pas atteinte. Autrement dit, un exploitant qui aurait complètement constitué son portefeuille ne serait pas concerné par la modification législative envisagée.

C'est pourquoi nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote.

M. Michel Billout. Je regrette que l’occasion n’ait pas été saisie pour répondre à la question de ma collègue concernant le financement de l’IRSN.

Je me permettrai de dire à M. le rapporteur qu’il ne faut tout de même pas pousser le bouchon trop loin… Avec beaucoup d’élégance, il essaie de nous culpabiliser en considérant que notre amendement mettrait en péril l’avenir d’EDF. Je lui répondrai que c’est le projet de loi NOME lui-même qui pose de sérieuses difficultés à cet égard en contraignant EDF à céder 25 % de sa production nucléaire à ses concurrents dans des conditions tout à fait inacceptables.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 205.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11
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Article 11 bis

Article 11 bis A (nouveau)

Le troisième alinéa du I de l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots: «, ainsi qu’un compte rendu de la politique d’investissement et de développement des réseaux prévue au 1° du II de l’article 13 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières. »

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 11 rectifié est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doublet, Laurent, B. Fournier, Revet et Pierre et Mme Des Esgaulx.

L'amendement n° 142 rectifié bis est présenté par MM. Besson et Sergent.

L'amendement n° 241 rectifié bis est présenté par MM. Merceron, Amoudry et Dubois.

L'amendement n° 253 rectifié quater est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade et Tropeano.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

I. - Remplacer les mots :

les mots : «, ainsi qu'un

par les mots :

deux phrases ainsi rédigées : « Chaque organisme de distribution d'électricité et de gaz transmet à chacune des autorités concédantes précitées un

II. - Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Ce compte rendu comporte un bilan détaillé de la mise en œuvre du programme prévisionnel d'investissements transmis à chacune des autorités concédantes, qui distingue notamment le montant et la localisation des travaux de maintenance, de renouvellement et de développement des réseaux à réaliser.

La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter l'amendement n° 11 rectifié.

M. Xavier Pintat. Cet amendement a trait à la communication de la politique d’investissement d’ERDF sur les réseaux de distribution.

Mme Nathalie Goulet. C’est très important !

M. Xavier Pintat. Il s’agit d’une demande exprimée depuis longtemps par les élus des autorités concédantes de la distribution. En effet, sans cette communication, il est difficile d’assurer une régulation et une coordination locales ambitieuses des réseaux, surtout dans un contexte de diminution de la qualité des réseaux de distribution.

Les élus souhaitent obtenir de la part d’ERDF plus d’informations et de concertation sur les décisions d’investissement de ce concessionnaire.

Ce souhait, vous l’avez entendu, monsieur le rapporteur, en faisant approuver cet amendement en commission de l’économie, sous réserve de quelques modifications. Nous avons donc procédé à deux rectifications. La première porte sur l’élargissement de la communication du programme prévisionnel d’investissement d’ERDF à toutes les autorités concédantes de la distribution. La seconde précise que ce programme sera transmis, et non soumis pour avis, à chacune des autorités concédantes, afin qu’elles puissent disposer d’informations suffisamment détaillées et présentées à la maille de la concession, c’est-à-dire la plupart du temps à l’échelon départemental.

La précision porte sur le contenu de l’information qui sera transmise aux élus. À cet égard, nous estimons qu’il est incontournable de poser un minimum d’éléments concernant le contenu. À cette fin, nous avons proposé d’y inclure le montant et la localisation des investissements.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 281, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 6 de l'amendement n° 11 rectifié

Rédiger ainsi cet alinéa :

Sur la base de ce compte rendu, les autorités organisatrices établissent un bilan détaillé de la mise en œuvre du programme prévisionnel de tous les investissements envisagés sur le réseau de distribution. Ce programme prévisionnel, qui précise notamment le montant et la localisation des travaux, est élaboré à l'occasion d'une conférence départementale réunie sous l'égide du préfet et transmis à chacune des autorités concédantes.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Ce sous-amendement tend à modifier l’amendement n° 11 rectifié qui vient d’être présenté par M. Pintat. J’indique d’emblée que le Gouvernement sera favorable à ce dernier sous réserve qu’il soit sous-amendé par la disposition que je vais maintenant présenter.

La demande qui justifie le II de l’amendement de M. Pintat, et qui vise à la réalisation d’un programme prévisionnel des investissements sur le réseau de distribution, est légitime. Un tel programme permettra en particulier aux autorités concédantes de mieux coordonner les travaux dont elles assurent la maîtrise d’ouvrage avec ceux qui sont programmés par leur concessionnaire.

Toutefois, le périmètre actuel des concessions ne constitue pas systématiquement le périmètre le plus adéquat pour établir des programmes d’investissements. Compte tenu du caractère interconnecté du réseau de distribution, les investissements réalisés sur un point du réseau, notamment sur les lignes à moyenne tension ou sur les postes sources, ont des effets sur la qualité de l’électricité, indépendamment des périmètres de concession.

Par ailleurs, les capacités d’investissement dans les réseaux sont forcément une enveloppe sous contrainte du TURPE péréqué, ne pouvant augmenter sans limite, et cela dans l’intérêt des consommateurs. Les autorités concédantes sont d’ailleurs, elles aussi, limitées dans leurs capacités d’investissement en la matière.

La réalisation d’un programme d’investissements doit donc être optimisée. Le programme ne peut se réduire à l’addition de toutes les demandes. L’échelon départemental est le bon niveau pour une première présentation proche du terrain, ce qui est conforme à la politique de départementalisation de l’autorité concédante.

En cohérence avec la politique de regroupement des autorités concédantes à l’échelle départementale, le Gouvernement propose d’instituer à l’échelon départemental, sous l’égide du préfet, des instances de dialogue entre les autorités concédantes et les gestionnaires de réseau, qui permettront d’identifier, au travers d’un programme prévisionnel d’investissements, tous les travaux envisagés par les différents maîtres d’ouvrage.

Enfin, ces bilans de niveau départemental seront un instrument des plus utiles dans la perspective de l’élaboration de TURPE 4, qui est le prochain rendez-vous majeur pour les investissements à venir.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter l'amendement n° 142 rectifié bis.

M. Michel Sergent. Je ferai d’abord une remarque sur la forme. Nous voyons arriver un sous-amendement, certainement respectable, où la mention des amendements qu’il tend à modifier, à savoir les amendements identiques nos 11 rectifié, 142 rectifié bis, 241 rectifié bis et 253 rectifié quater a été partiellement rayée pour ne laisser subsister que l’amendement n° 11 rectifié, celui qu’a défendu M. Pintat. S’agissant d’amendements identiques, il y a de quoi s’étonner du procédé !

M. Daniel Raoul. Ce n’est pas très élégant !

M. Michel Sergent. On aurait pu au moins dire que ce sous-amendement s’appliquait aux quatre amendements identiques, comme cela avait apparemment été envisagé au départ.

Vous allez me dire que tout cela n’a pas grande importance,…

M. Daniel Raoul. Cela révèle un état d’esprit !

M. Michel Sergent. … mais il convenait tout de même de le noter.

J’en viens à la défense de notre amendement n° 142 rectifié bis.

Il existe, comme l’a indiqué M. Pintat, une demande très forte des présidents des autorités organisatrices dans les divers départements de disposer d’un compte rendu détaillé des décisions prises par les concessionnaires sur leur territoire dans le domaine de l’électricité.

Cet amendement vise, en son I, à améliorer la rédaction de l’article 11 bis A compte tenu d’une nouvelle phrase récemment introduite à la fin du troisième alinéa du I de l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.

Le II de l’amendement répond à la volonté des élus locaux d’obtenir de la part de leur concessionnaire plus de transparence et de concertation sur ses décisions d’investissement, transparence d’autant plus nécessaire que la qualité des réseaux de distribution se dégrade, et cela très nettement à la suite de la baisse des investissements du concessionnaire.

Il est ainsi proposé de rendre obligatoire l’établissement d’un programme prévisionnel de travaux dans les départements où il existe une autorité concédante unique ou regroupant au moins un million d’habitants.

L’objectif est également, en cohérence avec le dispositif législatif de regroupement des autorités concédantes à l’échelon départemental, de leur permettre de se doter de capacités d’expertise et de contrôle.

L’analyse rapide du sous-amendement n° 281, que nous venons de recevoir, soulève un certain nombre de questions.

Tout d’abord, il prévoit que, dans les départements comptant plusieurs autorités organisatrices – nous savons que, dans quarante-cinq départements, il y a une autorité unique –, l’élaboration du programme prévisionnel se fait à l’occasion d’une conférence réunie « sous l’égide du préfet ».

Cela vaut-il la peine de faire intervenir le préfet entre l’autorité organisatrice et ERDF à l’échelon départemental pour dire ce qu’il y a lieu de décider ? Force est de le reconnaître, et je suppose que notre rapporteur le constate aussi dans son département, les préfets sont souvent bien peu au fait de nos activités.

Que le préfet soit ensuite chargé de transmettre les informations sur la localisation des travaux à chacune des autorités concédantes, pourquoi pas ? Je dirai que c’est un moindre mal.

Il n’en reste pas moins que ce sous-amendement aurait mérité d’être déposé plus tôt, de façon que nous puissions mieux l’expertiser.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour présenter l'amendement n° 241 rectifié bis.

M. Jean-Claude Merceron. Je ne formulerai pas d’observations particulières sur la forme, l’essentiel étant que nous puissions répondre aux besoins et aux désirs des collectivités d’obtenir de la part d’ERDF la transparence et la concertation s’agissant des investissements envisagés.

Pour le reste, je m’interroge également sur l’opportunité de l’intervention du préfet à partir du moment où un syndicat couvre la totalité d’un département.

Cela étant, sur le principe, je souscris aux propositions qui ont été faites.

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour présenter l'amendement n° 253 rectifié quater.

M. François Fortassin. Comme il nous a été demandé d’aller vite, je vais abréger quelque peu ma présentation de cet amendement, qui est identique à celui de M. Pintat et aux deux autres amendements qui viennent d’être défendus.

Je ferai simplement deux observations.

Tout d’abord, il importe que les élus locaux soient associés aux décisions d’investissement et qu’ils aient connaissance des travaux réalisés par ERDF.

Ensuite, en tant que président du syndicat départemental d’électricité des Hautes-Pyrénées, j’ai le plus profond respect pour les fonctions de M. le préfet, mais, en l’occurrence, je ne vois pas trop ce qu’il vient faire dans ce cadre-là. En effet, ou bien nous sommes majeurs et nous avons un interlocuteur qui est ERDF, ou bien nous ne sommes que de pâles exécutants (Mme la secrétaire d'État sourit.)

Je vois que vous souriez, madame la secrétaire d'État ! Je vous demande donc d’essayer de corriger un peu cet aspect. (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission, même si elle n’a pas elle-même déposé d’amendement sur ce point, a été étroitement associée à l’élaboration de la proposition qui vient de nous être présentée.

Sur la forme, c’est vrai, dans la mesure où quatre amendements identiques sont issus de différentes travées, il aurait été préférable que le Gouvernement présente non pas un, mais quatre sous-amendements visant à modifier chacun des amendements. Cela étant, les choses se sont faites un peu dans la précipitation.

Ce n’est pas un secret, des discussions ont eu lieu sur ce sujet, comme il est normal, entre le président de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, la FNCCR, et le Gouvernement. Elles ont sans doute été un peu rapides, mais vous avez l’habitude de travailler avec le président de cette instance, et vous savez qu’il ne peut qu’avoir défendu l’intérêt de tous en la matière. (M. Bernard Frimat s’exclame.)

Sur le fond, j’indique, notamment pour ceux de nos collègues qui ne jonglent pas avec ces questions, qu’il est à l’évidence très important que, dans chaque département, une coordination soit assurée entre les travaux réalisés par ERDF sur le réseau de moyenne tension et ceux que nous, présidents de syndicats d’électricité, engageons sur le réseau de basse tension. Ils sont en effet en lien direct. Ainsi, le renforcement par ERDF d’une ligne et d’un transformateur à moyenne tension nous évite très souvent, à nous syndicats d’électricité, de procéder à certains travaux sur le réseau de basse tension. Inversement, lorsque, sur ce dernier, nous renforçons des transformateurs et remplaçons des lignes électriques, ERDF est ravi de l’économie qui en résulte pour son budget.

Par conséquent, il faut coordonner nos travaux.

La solution à laquelle nous avons abouti, c’est-à-dire ces quatre amendements identiques avec une proposition de modification émanant du Gouvernement, est très bonne, car il faut que les uns et les autres discutent et communiquent leur programme pour l’année à venir. Soyons intelligents et souples !

Par ailleurs, le choix de la présence du préfet n’a rien de dramatique. Peu importe si le préfet ne connaît pas forcément grand-chose aux problèmes électriques ; l’essentiel est d’avoir un lieu neutre de discussion. Nous ne sommes pas dans un monde idéal, où tout le monde il est beau, tout le monde il est intelligent !

M. Alain Gournac. Ça, c’est sûr !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Les relations ne sont pas toujours très bonnes entre certains syndicats d’électricité et ERDF.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C’est pourquoi il n’est pas inutile d’avoir ce lieu neutre de discussion.

Dans certains départements, il n’y a qu’un seul syndicat : c’est le cas de celui que je préside. Il est évident que le dialogue avec ERDF est alors plus facile. En revanche, dans d’autres départements, qui comptent six, sept ou huit syndicats, il est pratique d’avoir un lieu neutre, la table du préfet, pour qu’ERDF et les syndicats se rencontrent afin de mettre au point leur programme de travaux à venir.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Voilà pourquoi je considère que la solution à laquelle nous aboutissons est bonne et j’émets un avis tout à fait favorable sur ces quatre amendements identiques, chacun d’eux étant, au moins moralement, sous-amendé par le Gouvernement ; n’est-ce pas, madame la secrétaire d'État ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Bien sûr !

Mme la présidente. Mes chers collègues, je tiens à préciser que Mme la secrétaire d'État n’est en rien responsable de la situation où certains ont cru voir une mauvaise manière à leur égard.

Si, dans le sous-amendement qui vous a été distribué, la mention des amendements nos 142 rectifié bis, 241 rectifié bis et 253 rectifié quater a bien été biffée, c’est tout simplement parce qu’il est impossible d’appliquer un seul et même sous-amendement à quatre amendements, fussent-ils identiques. Le service de la séance a donc considéré, conformément à notre règlement, que le sous-amendement du Gouvernement ne pouvait porter que sur le premier des quatre amendements identiques, à savoir l’amendement n° 11 rectifié.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je vous remercie, madame la présidente, d’avoir apporté ces précisions.

M. le rapporteur a parfaitement parlé, et il est clair que, quand il s’agit de traiter des questions des autorités concédantes, tout le monde peut se rejoindre. Nous sommes manifestement au-delà des clivages politiques et nous réalisons là un travail véritablement collectif.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Quel bonheur !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je tiens d’ailleurs à saluer le sens de l’intérêt général dont témoignent tous les membres de cette assemblée.

Pour bien marquer ce consensus, tout en respectant le règlement du Sénat, madame la présidente, suivant la suggestion de M. le rapporteur, je dépose trois nouveaux sous-amendements reprenant strictement les termes du sous-amendement n° 281, mais s’appliquant respectivement aux amendements nos 142 rectifié bis, 241 rectifié bis et 253 rectifié quater. Ainsi, toute ambiguïté sera levée.

Mme la présidente. Je suis donc saisie de trois sous-amendements nos 282, 283 et 284, dont le libellé est identique à celui du sous-amendement n° 281, sinon qu’ils s’appliquent respectivement aux amendements nos 142 rectifié bis, 241 rectifié bis et 253 rectifié quater.

La parole est à M. Alain Gournac pour explication de vote.

M. Alain Gournac. En tant que président d’un important syndicat d’électricité, je ne peux qu’approuver le dispositif qui nous est proposé.

Comme l’a fort bien expliqué M. le rapporteur, il faut arrêter de croire que tout va bien et que les choses vont nécessairement bien se passer. Non ! De temps en temps, il faut se retrouver autour d’une table pour se mettre d’accord. ERDF défend ses positions, ce que l’on peut comprendre. Quant à nous, qui sommes sur le terrain, nous devons défendre celles de nos syndicats et de nos communes.

Si tout se passait toujours parfaitement, nous pourrions nous passer de cette disposition, mais, compte tenu de ce qu’est la situation sur le terrain, je ne peux que l’approuver.

Mme la présidente. Je mets aux voix les sous-amendements n° 281, 282, 283 et 284.

(Les sous-amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11 rectifié, 142 rectifié bis, 241 rectifié bis et 253 rectifié quater, modifiés.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 208, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, n’a plus d’objet.

Je précise que cet amendement était ainsi libellé :

Compléter cet article par les mots :

et un document retraçant l'état du réseau dans le cadre des missions prévues au 6° du II de l'article 13 de cette même loi.

Je mets aux voix l'article 11 bis A, modifié.

(L'article 11 bis A est adopté.)

Article 11 bis A (Nouveau)
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Article 12 (début)

Article 11 bis

L’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la compétence d’autorité organisatrice de la distribution d’électricité ou de gaz a été transférée, dans une de ces communes, à un établissement public de coopération intercommunale avant la publication de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, cette commune peut, nonobstant toutes dispositions contraires, être autorisée par le représentant de l’État dans le département, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale réunie dans la formation prévue au second alinéa de l’article L. 5211-45, à se retirer de l’établissement public de coopération intercommunale lorsque cet établissement ne décide pas d’exercer le droit prévu au premier alinéa. »

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 5 rectifié bis, présenté par MM. Revet, Cornu et Pintat, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité desservies en tout ou partie par un distributeur non autorisé à étendre sa desserte à d'autres territoires ne peuvent être incluses dans le périmètre fixé par arrêté du représentant de l'État qu'après accord de leur assemblée délibérante ou de leur instance délibérante. »

La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. L’intérêt de la coopération intercommunale réside avant tout dans la possibilité d’optimiser l’organisation des services publics locaux. Cet objectif peut être atteint en réalisant des économies d’échelle, liées à l’agrégation des collectivités associées.

Cependant, le cas de la distribution d’électricité est particulier. Les distributeurs locaux non nationalisés en 1946, les DNN, ne sont pas actuellement autorisés à étendre le périmètre géographique de leur desserte à d’autres territoires que ceux qu’ils desservaient au moment de leur nationalisation. Dans ces conditions, l’inclusion de leur autorité organisatrice dans le périmètre d’un établissement public de coopération ne peut engendrer les effets d’échelle habituellement attendus d’un tel regroupement. En effet, si ces autorités organisatrices adhèrent à un établissement public de coopération de grande taille, le périmètre de desserte de leur distributeur ne sera pas modifié et demeurera cantonné à leur territoire géographique historique.

Dès lors, il est proposé de subordonner une telle inclusion au volontariat de l’autorité organisatrice concernée. Cet amendement me paraît de bon sens et répond à un souci de cohérence.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 136 est présenté par M. Repentin, Mme Printz et M. Masseret.

L'amendement n° 225 est présenté par MM. Dubois, Amoudry, Jégou et Merceron.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l'alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

Avant la dernière phrase du deuxième alinéa du IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité desservies par un distributeur mentionné à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz ne sont concernées par cette procédure qu'après accord de leur assemblée ou instances délibérantes. »

L’amendement n° 136 n’est pas soutenu.

La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour présenter l'amendement n° 225.

M. Jean-Claude Merceron. Cet amendement vise à préserver la décision des élus locaux ayant décidé d’exercer leur compétence d’autorité organisatrice de distribution publique d’électricité, dans le cadre de l’article 23 de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz.

À cet égard, il convient de prévoir que le regroupement départemental des autorités organisatrices, réalisé à l’instigation du préfet, prend en compte leurs prérogatives et le choix qui en découle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je comprends bien l’objectif des auteurs de ces amendements, mais ceux-ci posent tout de même un vrai problème juridique : ils sont en contradiction avec l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, qui a pour objet de favoriser le regroupement des autorités organisatrices de la distribution d’électricité sous forme de syndicats.

Nous ne pouvons pas autoriser une commune à refuser d’entrer dans un syndicat et c’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable : l’adoption de ces amendements risquerait de généraliser de telles situations. Je suis certain que Charles Revet, qui est un véritable champion des regroupements aussi bien en matière d’électricité que de gestion de l’eau, voudra bien convenir des effets négatifs probables d’un tel amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le regroupement au niveau départemental de l’autorité concédante de la distribution publique de l’électricité vise, entre autres objectifs, à instituer un interlocuteur de poids vis-à-vis du ou des concessionnaires, à réaliser des économies d’échelle dans les concessions ainsi qu’à rationaliser les investissements réalisés sous maîtrise d’ouvrage de la collectivité.

Dans ce contexte, il ne nous semble pas opportun de traiter différemment les divers gestionnaires des réseaux publics de distribution. C’est pourquoi nous demandons le retrait de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Pintat, pour explication de vote.

M. Xavier Pintat. Je crois qu’il y a une petite confusion sur les objectifs de l’article 33 de la loi du 7 décembre 2006, dont j’ai été l’un des promoteurs.

Dans la plupart des départements, cette disposition a permis de mettre en place un syndicat unique pour l’exercice de la compétence d’autorité organisatrice de la distribution d’électricité. Ce résultat est très encourageant, d’autant que la tendance se généralise.

Je tiens cependant à préciser que l’amendement concerne non pas les autorités organisatrices de distribution desservies par ERDF, mais uniquement celles des distributeurs non nationalisés, qui n’opèrent que dans 5 % des départements.

L’amendement n° 5 rectifié bis est réellement motivé –  contrairement à l’amendement n° 225, ce qui rend celui-ci plus dangereux – et il vise à rassurer les autorités organisatrices en indiquant explicitement qu’elles ne pourront pas intégrer contre leur gré le périmètre d’un syndicat départemental d’électricité en application de l’article 33 de la loi de 2006.

Force est d’admettre que cette adhésion ne concourt pas à l’optimisation du service public dans un réseau plus grand que celui d’un distributeur. Au contraire, elle ne changerait rien en pratique et constituerait un dispositif perdant-perdant : la collectivité perd du pouvoir, puisque c’est le syndicat qui va devoir conduire la gouvernance de sa régie, et la régie, de par la loi, est bloquée, puisqu’elle ne peut pas desservir un territoire plus vaste que son territoire historique.

Il faut savoir que cette demande a été entendue et satisfaite par une circulaire du ministère de l’intérieur, qui a donné en 2007 des instructions très claires et très précises aux préfets. Aucun problème sur le terrain n’a d’ailleurs été signalé depuis sa publication. Les DNN peuvent, s’ils le souhaitent, adhérer au syndicat pour des compétences spécifiques. Il serait néanmoins paradoxal qu’ils y soient intégrés de force alors que le territoire de la régie mise en place à partir de ces collectivités ne peut pas être étendu ! La régie est restreinte à son territoire…

M. Alain Gournac. C’est la loi !

M. Xavier Pintat. Certes, c’est la loi, mais la circulaire a prévu des exceptions dans le cas d’une autorité organisatrice avec un distributeur unique ! Nous abordons ici celui des DNN qui ont des régies, lesquelles sont limitées au territoire historique pour lequel elles ont été créées. Dès lors, l’adhésion au syndicat ne va pas élargir leur zone d’opération : les régies vont rester bloquées, avec la gouvernance du syndicat et non plus celle de la commune concernée. Cela pourrait créer une confusion, que la circulaire avait d’ailleurs prévue.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Tout cela conforte ma position. Je demande à nouveau à Charles Revet et à Xavier Pintat de retirer leur amendement, car son effet ne correspond pas à leur souhait ! Son véritable effet est qu’une commune pourrait refuser d’intégrer un syndicat !

Puisqu’une circulaire traite déjà de ce sujet, voyons comment le problème peut être abordé d’un point de vue réglementaire, et non pas en commettant une erreur législative. Je réitère donc ma demande de retrait.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet pour explication de vote.

M. Charles Revet. Je consens à retirer cet amendement mais je crois qu’il convient d’aller au fond du sujet et de trouver une solution qui respecte la législation.

Il y a, au sein de cette assemblée, un grand nombre de juristes, dont je ne suis pas, et les divergences d’approche ou d’interprétation sont nombreuses. En tout cas, je pense pouvoir dire qu’une circulaire n’a pas le poids d’un décret ou d’une loi ! Enfin, les textes auxquels nous nous référons sont parfois lointains, telle la loi du 8 avril 1946.

Mme la présidente. L'amendement n° 5 rectifié bis est retiré.

Monsieur Merceron, maintenez-vous l’amendement n° 225 ?

M. Jean-Claude Merceron. Non, madame la présidente, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° 225 est retiré.

Je mets aux voix l'article 11 bis.

(L'article 11 bis est adopté.)

Article 11 bis
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article 12 (interruption de la discussion)

Article 12

I. – La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie du même code est ainsi rédigée :

« Section 2

« Taxe communale sur la consommation finale d’électricité

« Art. L. 2333-2. – Il est institué, au profit des communes ou, selon le cas, au profit des établissements publics de coopération intercommunale ou des départements qui leur sont substitués au titre de leur compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité visée à l’article L. 2224-31, une taxe communale sur la consommation finale d’électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière.

« Art. L. 2333-3. – La taxe mentionnée à l’article L. 2333-2 s’applique dans les mêmes conditions que celles mentionnées à l’article L. 3333-2.

« Art. L. 2333-4. – La taxe mentionnée à l’article L. 2333-2 est assise selon les mêmes règles que celles mentionnées à l’article L. 3333-3.

« Lorsque la taxe est instituée au profit de la commune, le conseil municipal en fixe le tarif en appliquant aux montants mentionnés à l’article L. 3333-3 un coefficient multiplicateur unique compris entre 0 et 8. Les montants qui en résultent sont arrondis à la deuxième décimale la plus proche.

« La décision du conseil municipal doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l’année suivante. Le maire la transmet, s’il y a lieu, au comptable public assignataire de la commune au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu’elle n’est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le coefficient multiplicateur mentionné au deuxième alinéa est, sous réserve du respect des limites qui y sont fixées, égal à la multiplication par 100 du taux en valeur décimale appliqué au 31 décembre 2010 conformément à l’article L. 2333-4 dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la loi n° …du … portant nouvelle organisation du marché de l’électricité.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d’une période de facturation, les quantités d’électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Art. L. 2333-5. – Les redevables de la taxe sont tenus d’adresser aux comptables publics assignataires des communes la déclaration mentionnée au premier alinéa de l’article L. 3333-3-1 dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné, accompagnée du paiement de la taxe, selon les mêmes modalités, périodicité et délai que ceux prévus audit article.

« Les redevables sont également tenus d’adresser aux maires des communes une copie de la déclaration mentionnée au premier alinéa dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu’ils versent aux communes.

« La taxe est contrôlée et sanctionnée par les agents habilités par le maire dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article L. 3333-3-2.

« Le droit de reprise de la commune, les réclamations relatives à l’assiette et au recouvrement de la taxe ainsi que les contestations relatives aux poursuites s’effectuent dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article L. 3333-3-3.

« Le maire informe le président du conseil général des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d’office opérées. Sur la base des informations transmises, le président du conseil général procède au recouvrement de la taxe affectée au département en application de l’article L. 3333-2.

« Une personne qui a fait l’objet d’une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues ci-dessus par les agents habilités par le maire et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l’objet d’une nouvelle vérification de la part d’agents habilités par une autorité locale en application des articles L. 3333-3-2 ou L. 5212-24-2.

« Lorsque l’électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs communes et fait l’objet d’une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

II. – La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la troisième partie du même code est ainsi rédigée :

« Section 2

« Taxe départementale sur la consommation finale d’électricité

« Art. L. 3333-2. – I. – Il est institué, au profit des départements, une taxe départementale sur la consommation finale d’électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière.

« II. – Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de l’électricité par un fournisseur à chaque point de livraison, situé en France, d’un utilisateur final. La taxe est exigible au moment de la livraison. Toutefois, lorsque la livraison donne lieu à des décomptes ou à des encaissements successifs et que le redevable a exercé l’option prévue au second alinéa du a du 2 de l’article 269 du code général des impôts, l’exigibilité intervient au moment du débit.

« L’exigibilité intervient en tout état de cause dès la perception d’acomptes financiers lorsqu’il en est demandé avant l’intervention du fait générateur.

« Dans le cas mentionné au 2° du III du présent article, le fait générateur et l’exigibilité de la taxe interviennent lors de la consommation de l’électricité.

« III. – Sont redevables de la taxe :

« 1° Les fournisseurs d’électricité.

« Un fournisseur d’électricité s’entend de la personne qui produit ou achète de l’électricité en vue de la revendre à un consommateur final.

« Les fournisseurs d’électricité non établis en France et qui y sont redevables de la taxe au titre des livraisons d’électricité qu’ils effectuent à destination d’un utilisateur final sont tenus de faire accréditer, auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, un représentant établi en France. Ce représentant se porte garant du paiement de la taxe et du dépôt de la déclaration mentionnée à l’article L. 3333-3-1 en cas de défaillance du redevable.

« Le montant de la taxe dû par les fournisseurs apparaît distinctement, en addition au prix de vente de l’électricité, sur les factures qu’ils émettent ou qui sont émises pour leur compte ;

« 2° Les personnes qui, dans le cadre de leur activité économique, produisent de l’électricité et l’utilisent pour les besoins de cette activité.

« IV. – L’électricité n’est pas soumise à la taxe mentionnée au I dans les cas suivants :

« 1° Lorsqu’elle est principalement utilisée dans des procédés métallurgiques, de réduction chimique ou d’électrolyse. Le bénéfice de la présente mesure ne s’applique pas aux quantités d’électricité utilisées pour des besoins autres que ceux de ces procédés ;

« 2° Lorsque sa valeur représente plus de la moitié du coût d’un produit ;

« 3° Lorsqu’elle est utilisée dans des procédés de fabrication de produits minéraux non métalliques classés conformément au règlement (CEE) n° 3037/90 du Conseil, du 9 octobre 1990, relatif à la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne ;

« 4° Lorsqu’elle est consommée dans l’enceinte des établissements de production de produits énergétiques, pour les besoins de la production des produits énergétiques eux-mêmes ou pour ceux de la production de tout ou partie de l’énergie nécessaire à leur fabrication.

« V. – L’électricité est exonérée de la taxe mentionnée au I lorsqu’elle est :

« 1° Utilisée pour la production de l’électricité et pour le maintien de la capacité de production de l’électricité ;

« 2° Utilisée pour le transport de personnes et de marchandises par train, métro, tramway et trolleybus ;

« 3° Produite à bord des bateaux ;

« 4° Produite par de petits producteurs d’électricité qui la consomment pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme petits producteurs d’électricité les personnes qui exploitent des installations de production d’électricité dont la production annuelle n’excède pas 240 millions de kilowattheures par site de production.

« VI. – Sont admis en franchise de la taxe les achats d’électricité effectués par les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d’électricité pour les besoins de la compensation des pertes inhérentes aux opérations de transport et de distribution de l’électricité.

« VII. – Les personnes qui ont reçu de l’électricité qu’elles utilisent dans les conditions mentionnées aux IV à VI adressent à leurs fournisseurs une attestation, conforme au modèle fixé par arrêté du directeur général chargé de l’énergie, justifiant la livraison de cette électricité sans application de la taxe mentionnée au I. Elles sont tenues d’acquitter la taxe ou le supplément de taxe due lorsque tout ou partie de l’électricité n’a pas été affectée à l’usage ayant justifié l’absence de taxation, l’exonération ou la franchise.

« Art. L. 3333-3. – La taxe mentionnée à l’article L. 3333-2 est assise sur la quantité d’électricité fournie ou consommée, exprimée en mégawattheures ou fraction de mégawattheure.

« 1. Pour les consommations professionnelles, le tarif de la taxe est fixé selon le barème suivant :

«

Qualité de l’électricité fournie

Tarif en euro par mégawattheure

Puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères

0,75

Puissance supérieure à 36 kilovoltampères et inférieure ou égale à 250 kilovoltampères

0,25

« Relèvent de ce barème les consommations professionnelles des personnes qui assurent d’une manière indépendante, en tout lieu, la fourniture de biens et de services quels que soient la finalité ou les résultats de leurs activités économiques, qu’il s’agisse des activités de producteurs, de commerçants ou de prestataires de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées.

« 2. Le tarif de la taxe est fixé à 0,75 euro par mégawattheure pour toutes les consommations autres que professionnelles.

« 3. Le conseil général applique aux montants mentionnés aux 1 et 2 un coefficient multiplicateur unique compris entre 2 et 4. Les montants qui en résultent sont arrondis à la deuxième décimale la plus proche.

« La décision du conseil général doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l’année suivante. Le président du conseil général la transmet, s’il y a lieu, au comptable public assignataire du département au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu’elle n’est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le coefficient multiplicateur mentionné au premier alinéa du présent 3 est, sous réserve du respect des limites qui y sont fixées, égal à la multiplication par 100 du taux en valeur décimale appliqué au 31 décembre 2010 conformément à l’article L. 3333-2 dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la loi n° … du … portant nouvelle organisation du marché de l’électricité.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d’une période de facturation, les quantités d’électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Art. L.3333-3-1. – Les redevables de la taxe doivent établir une déclaration au titre de chaque trimestre civil, conforme au modèle fixé par arrêté conjoint du directeur général chargé des finances publiques et du directeur général chargé de l’énergie, comportant les indications nécessaires à la détermination de l’assiette, à la liquidation et au recouvrement de la taxe. Les petits producteurs mentionnés au 4° du V de l’article L. 3333-2 sont dispensés de l’obligation d’établir la déclaration.

« Les redevables sont tenus d’adresser aux comptables publics assignataires des départements la déclaration mentionnée au premier alinéa du présent article dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné. La déclaration est accompagnée du paiement de la taxe.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu’ils versent aux départements.

« Art. L. 3333-3-2. – I. – La déclaration trimestrielle mentionnée à l’article L. 3333-3-1 est contrôlée par les agents habilités par le président du conseil général.

« Ces agents peuvent demander aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l’article L. 3333-2 tous les renseignements ou justificatifs relatifs aux éléments de la déclaration ou de l’attestation adressée aux fournisseurs. Ils peuvent examiner sur place les documents utiles. Préalablement, un avis de vérification est adressé au redevable ou à la personne mentionnée au même VII, afin qu’il puisse se faire assister d’un conseil. Au titre de la période concernée, le contrôle porte à la fois sur la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité ainsi que sur la taxe communale prévue à l’article L. 2333-2.

« Les agents habilités sont soumis à l’obligation de secret professionnel définie aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

« Pour les contrôles qu’ils effectuent, les agents habilités sont autorisés à se faire communiquer par les gestionnaires de réseaux les informations relatives aux fournisseurs qui effectuent des livraisons d’électricité dans le périmètre du département.

« Le droit de communication s’exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents.

« Le refus de communiquer les informations relatives aux fournisseurs sous un délai de trente jours ou la communication d’informations incomplètes ou inexactes constituent une entrave à l’exercice du droit de communication entraînant l’application d’une amende de 3 000 € par commune concernée.

« II. – 1. Lorsque les agents habilités constatent une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation des éléments servant de base au calcul de la taxe, les rectifications correspondantes sont notifiées aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l’article L. 3333-2 qui disposent d’un délai de trente jours à compter de la date de réception de la notification pour présenter leurs observations. Dans le cas où le redevable ou la personne tenue d’acquitter la taxe fait part de ses observations, une réponse motivée lui est adressée. Les droits notifiés sont assortis d’une majoration de 10 %.

« 2. Lorsque le redevable n’a pas adressé la déclaration mentionnée à l’article L. 3333-3-1, une lettre de mise en demeure avec accusé de réception lui est adressée par le président du conseil général. À défaut de régularisation dans un délai de trente jours à compter de la date de réception de cette mise en demeure, il est procédé à la taxation d’office. À cette fin, la base d’imposition est fixée sur la base des livraisons d’un fournisseur ou d’un producteur comparable. Les droits notifiés sont assortis d’une majoration de 40 %.

« 3. En cas d’entrave à l’exercice du contrôle par les agents habilités, y compris le défaut ou l’insuffisance de réponse aux demandes de renseignements ou de justificatifs prévues au deuxième alinéa du I du présent article, une lettre de mise en demeure est adressée par pli recommandé avec demande d’avis de réception aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l’article L. 3333-2 par le président du conseil général. Si, au terme d’un délai de trente jours à compter de la date de réception de cette mise en demeure, les entraves au contrôle perdurent, il est procédé à une taxation d’office dans les conditions mentionnées au 2 du présent II. Les droits notifiés sont assortis d’une majoration de 40 %.

« 4. Les montants de la taxe et, le cas échéant, des majorations notifiés aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l’article L. 3333-2 sont exigibles trente jours après la date de réception par ces personnes de la réponse à leurs observations ou, en l’absence d’observations, trente jours après la date de la notification ou, en cas de taxation d’office, trente jours après la date de notification des droits. L’action des comptables publics, les réclamations contentieuses relatives à l’assiette de la taxe, aux actes de poursuites et au recouvrement sont effectuées dans les conditions prévues par l’article L. 1617-5.

« 5. Le président du conseil général informe les collectivités territoriales auxquelles est affectée la taxe mentionnée à l’article L. 2333-2 des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d’office opérées. Sur la base des informations transmises, les maires et les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale concernés procèdent au recouvrement de ladite taxe.

« Art. L. 3333-3-3. – I. – Le droit de reprise des collectivités territoriales bénéficiaires de la taxe s’exerce jusqu’au 31 décembre de la troisième année qui suit celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible.

« II. – Une personne qui a fait l’objet d’une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues à l’article L. 3333-3-2 par les agents habilités par le président du conseil général et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l’objet d’une nouvelle vérification de la part d’agents habilités par une autorité locale en application des articles L. 2333-5 ou L. 5212-24-2.

« III. – Lorsque l’électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs départements et fait l’objet d’une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

III. – L’article L. 5212-24 du même code est ainsi rédigé et, après ce même article, sont insérés deux articles, L. 5212-24-1 et L. 5212-24-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 5212-24. – Lorsqu’il existe un syndicat intercommunal exerçant la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité ou que cette compétence est exercée par le département, la taxe prévue à l’article L. 2333-2 est perçue par le syndicat ou par ce département en lieu et place de toutes les communes dont la population recensée par l’Institut national de la statistique et des études économiques au 1er janvier de l’année est inférieure ou égale à 2 000 habitants ou dans lesquelles la taxe est perçue par le syndicat au 31 décembre 2010. Pour les autres communes, cette taxe peut être perçue par le syndicat ou le département en lieu et place de la commune s’il en est décidé ainsi par délibérations concordantes du syndicat, ou du département s’il exerce cette compétence, et de la commune.

« Lorsque la taxe est perçue au profit du syndicat intercommunal ou du département en lieu et place de la commune en application de l’alinéa précédent, l’organe délibérant du syndicat intercommunal ou le conseil général fixe le tarif applicable dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 2333-4.

« Par dérogation à l’alinéa précédent, lorsqu’il est situé hors du territoire métropolitain, le syndicat intercommunal peut fixer le coefficient multiplicateur mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 2333-4 dans la limite de 12, sous réserve qu’il affecte la part de la taxe résultant de l’application d’un coefficient multiplicateur excédant 8 à des opérations de maîtrise de la demande d’énergie concernant les consommateurs domestiques.

« La décision de l’organe délibérant du syndicat intercommunal ou du conseil général doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l’année suivante. Le président du syndicat intercommunal ou du conseil général la transmet, s’il y a lieu, au comptable public assignataire au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu’elle n’est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le tarif est fixé dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l’article L. 2333-4.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d’une période de facturation, les quantités d’électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Le syndicat intercommunal ou le département peut reverser à une commune une fraction de la taxe perçue sur le territoire de celle-ci.

« Art. L. 5212-24-1. – Les redevables sont tenus d’adresser, selon le cas, aux comptables publics assignataires du syndicat intercommunal ou du département la déclaration mentionnée au premier alinéa de l’article L. 3333-3-1 dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné, accompagnée du paiement de la taxe, selon les mêmes modalités, périodicité et délai que ceux prévus audit article.

« Les redevables sont également tenus d’adresser, selon le cas, au président du syndicat intercommunal ou du conseil général une copie de la déclaration mentionnée à l’alinéa précédent dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu’ils versent aux syndicats ou aux départements.

« Par dérogation au troisième alinéa, lorsque le tarif prévu au deuxième alinéa de l’article L. 5212-24 est unique sur le territoire du syndicat ou du département, les redevables ne prélèvent aucun frais de déclaration et de versement.

« Art. L. 5212-24-2. – La taxe est contrôlée et sanctionnée par les agents habilités, selon le cas, par le président du syndicat intercommunal ou du conseil général, dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article L. 3333-3-2. Les informations requises comportent le cas échéant une ventilation par commune.

« Le droit de reprise, selon le cas, du syndicat intercommunal ou du conseil général, s’exerce dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article L. 3333-3-3. Les réclamations relatives à l’assiette et au recouvrement de la taxe ainsi que les contestations relatives aux poursuites s’effectuent dans les mêmes conditions que celles prévues au 4 du II de l’article L. 3333-3-2.

« Le président du syndicat intercommunal informe le président du conseil général des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d’office opérées. Sur la base des informations transmises, le président du conseil général procède au recouvrement de la taxe affectée au département en application de l’article L. 3333-2.

« Une personne qui a fait l’objet d’une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues ci-dessus par les agents habilités par le président du syndicat intercommunal et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l’objet d’une nouvelle vérification de la part d’agents habilités par le président du conseil général en application de l’article L. 3333-3-2.

« Lorsque l’électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs communes et fait l’objet d’une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

III bis (nouveau). – La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre II de la partie V du même code est complétée par un article L. 5212-26 ainsi rédigé :

« Art. L. 5212-26. – Afin de financer la réalisation ou le fonctionnement d’un équipement public local, des fonds de concours peuvent être versés entre un syndicat visé à l’article L. 5212-24 et les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale membres, après accords concordants exprimés à la majorité simple du comité syndical et des conseils municipaux ou des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale concernés.

« Le montant total des fonds de concours ne peut excéder les trois quarts du coût hors taxe de l’opération concernée. »

IV. – (Non modifié) Au second alinéa du 1° des articles L. 5214-23 et L. 5216-8 du même code, les mots : « à la place des communes membres, selon les compétences qui lui sont transférées, la taxe sur les fournitures d’électricité dans les conditions prévues aux articles L. 2333-2 à L. 2333-5 » sont remplacés par les mots : « , au titre de la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité mentionnée à l’article L. 2224-31, sous réserve que cette compétence ne soit pas déjà exercée par une autorité mentionnée à l’article L. 5212-24, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité prévue à l’article L. 2333-2 ».

V. – L’article 76 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est supprimé ;

2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2007, les tarifs de vente de l’électricité applicables dans la collectivité départementale sont identiques à ceux pratiqués en métropole. »

3° Le cinquième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« À compter du 1er janvier 2011, la collectivité départementale peut instituer à son profit une taxe locale sur l’électricité dont l’assiette est définie à l’article L. 3333-3 du code général des collectivités territoriales et dont les modalités de recouvrement sont définies à l’article L. 3333-3-1 du même code. Le tarif ne peut dépasser :

« – 8,40 € par mégawattheure pour les consommations autres que professionnelles ;

« – 8,40 € par mégawattheure lorsque la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères et 2,40 € par mégawattheure lorsque la puissance souscrite est supérieure à 36 kilovoltampères et inférieure ou égale à 250 kilovoltampères, pour les consommations professionnelles.

VI. – Le e de l’article 1609 nonies D du code général des impôts est ainsi rédigé :

« e) La taxe communale sur la consommation finale d’électricité prévue à l’article L. 2333-2 du code général des collectivités territoriales en lieu et place des communes membres dont la population est inférieure ou égale à 2 000 habitants. »

VII. – Le a du 3 de l’article 265 bis et le 1° du 5 de l’article 266 quinquies B du code des douanes sont complétés par les mots : « et des produits utilisés pour leurs besoins par les petits producteurs d’électricité au sens du 4° du V de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales ».

VIII. – (Non modifié) À la première phrase du second alinéa du 2° du I de l’article 265 C du même code, après les mots : « procédés métallurgiques », sont insérés les mots : «, d’électrolyse ».

IX. – (Non modifié) Le premier alinéa du a du 5 de l’article 266 quinquies du même code est complété par les mots : «, à l’exclusion du gaz naturel utilisé par les petits producteurs d’électricité au sens du 4° du V de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales ».

X. – Après l’article 266 quinquies B du même code, il est inséré un article 266 quinquies C ainsi rédigé :

« Art. 266 quinquies C. – 1. Il est institué une taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière, fournie ou consommée sous une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères.

« 2. Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de l’électricité par un fournisseur à chaque point de livraison situé en France d’un utilisateur final. La taxe est exigible au moment de la livraison. Toutefois, lorsque la livraison donne lieu à des décomptes ou à des encaissements successifs et que le redevable a exercé l’option prévue au second alinéa du a du 2 de l’article 269 du code général des impôts, l’exigibilité intervient au moment du débit.

« L’exigibilité intervient, en tout état de cause, dès la perception d’acomptes financiers lorsqu’il en est demandé avant l’intervention du fait générateur.

« Dans le cas mentionné au 2° du 3 du présent article, le fait générateur et l’exigibilité de la taxe interviennent lors de la consommation de l’électricité.

« 3. Sont redevables de la taxe :

« 1° Les fournisseurs d’électricité.

« Un fournisseur d’électricité s’entend de la personne qui produit ou achète de l’électricité en vue de la revendre à un consommateur final.

« Le montant de la taxe dû par les fournisseurs apparaît distinctement, en addition au prix de vente de l’électricité, sur les factures qu’ils émettent ou qui sont émises pour leur compte ;

« 2° Les personnes qui produisent de l’électricité et l’utilisent pour leurs propres besoins.

« 4. L’électricité n’est pas soumise à la taxe mentionnée au 1 dans les cas suivants :

« 1° Lorsqu’elle est principalement utilisée dans des procédés métallurgiques, d’électrolyse ou de réduction chimique. Le bénéfice de la présente mesure ne s’applique pas aux quantités d’électricité utilisées pour des besoins autres que ceux de ces procédés ;

« 2° Lorsque sa valeur représente plus de la moitié du coût d’un produit ;

« 3° Lorsqu’elle est utilisée dans des procédés de fabrication de produits minéraux non métalliques classés conformément au règlement (CEE) n° 3037/90 du Conseil, du 9 octobre 1990, relatif à la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne ;

« 4° Lorsqu’elle est consommée dans l’enceinte des établissements de production de produits énergétiques, pour les besoins de la production des produits énergétiques eux-mêmes ou pour ceux de la production de tout ou partie de l’énergie nécessaire à leur fabrication.

« 5. L’électricité est exonérée de la taxe mentionnée au 1 lorsqu’elle est :

« 1° Utilisée pour la production de l’électricité et pour le maintien de la capacité de production de l’électricité ;

« 2° Utilisée pour le transport de personnes et de marchandises par train, métro, tramway et trolleybus ;

« 3° Produite à bord des bateaux ;

« 4° Produite par de petits producteurs d’électricité qui la consomment pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme petits producteurs d’électricité les personnes qui exploitent des installations de production d’électricité dont la production annuelle n’excède pas 240 millions de kilowattheures par site de production ;

« 5° D’une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et utilisée par des personnes grandes consommatrices d’énergie soumises à autorisation pour l’émission de gaz à effet de serre pour les besoins des installations mentionnées à l’article L. 229-5 du code de l’environnement.

« Sont considérées comme grandes consommatrices en énergie les entreprises :

« – dont les achats d’électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et de produits énergétiques soumis aux taxes intérieures de consommation visées aux articles 265, 266 quinquies et 266 quinquies B du présent code atteignent au moins 3 % du chiffre d’affaires ;

« – ou pour lesquelles le montant total de la taxe applicable à l’électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et des taxes intérieures de consommation visées au précédent alinéa est au moins égal à 0,5 % de la valeur ajoutée telle que définie à l’article 1586 sexies du code général des impôts.

« 6. Sont admis en franchise de la taxe les achats d’électricité effectués par les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d’électricité pour les besoins de la compensation des pertes inhérentes aux opérations de transport et de distribution de l’électricité.

« 7. Les personnes qui ont reçu de l’électricité qu’elles utilisent dans les conditions mentionnées aux 4 à 6 adressent à leurs fournisseurs une attestation, conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du budget, justifiant la livraison de cette électricité sans application de la taxe. Elles sont tenues d’acquitter la taxe ou le supplément de taxe due lorsque tout ou partie de l’électricité n’a pas été affectée à l’usage ayant justifié l’absence de taxation, l’exonération ou la franchise.

« 8. La taxe est assise sur la quantité d’électricité d’une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères fournie ou consommée, exprimée en mégawattheures ou fraction de mégawattheure.

« Le tarif de la taxe est fixé à 0,50 € par mégawattheure.

« Les fournisseurs d’électricité établis en France sont tenus de se faire enregistrer auprès de l’administration des douanes et droits indirects chargée du recouvrement de la taxe intérieure de consommation préalablement au commencement de leur activité.

« Ils tiennent une comptabilité des livraisons d’électricité d’une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères qu’ils effectuent en France et communiquent à l’administration chargée du recouvrement le lieu de livraison effectif, le nom ou la raison sociale et l’adresse du destinataire.

« La comptabilité des livraisons doit être présentée à toute réquisition de l’administration.

« Les fournisseurs d’électricité non établis en France désignent une personne qui y est établie et a été enregistrée auprès de l’administration des douanes et droits indirects pour effectuer en leurs lieu et place les obligations qui leur incombent et acquitter la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité. À défaut, la taxe est due par le destinataire du produit soumis à accise.

« 9. La taxe est acquittée, selon une périodicité trimestrielle, auprès de l’administration des douanes et des droits indirects.

Les quantités d’électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères livrées à un utilisateur final ou consommées par un utilisateur final au titre d’un trimestre, pour lesquelles la taxe est devenue exigible, sont portées sur une déclaration déposée au plus tard le 20 du mois suivant le trimestre concerné. La taxe correspondante est acquittée lors du dépôt de la déclaration. Toutefois les petits producteurs mentionnés au 4° du 5 sont dispensés de l’obligation d’établir la déclaration.

La forme de la déclaration d’acquittement et les modalités déclaratives sont définies par arrêté du ministre chargé du budget. 

Un décret détermine les modalités d’application de l’assiette de la taxe lorsque les livraisons d’électricité donnent lieu, de la part des fournisseurs, à des décomptes ou à des encaissements successifs, ou à la perception d’acomptes financiers. Il détermine également les modalités du contrôle et de la destination de l’électricité et de son affectation aux usages mentionnés aux 4 à 6. »

XI. – (Non modifié) À la première phrase du premier alinéa du 1 de l’article 267 du même code, la référence : « et 266 quinquies B » est remplacée par les références : «, 266 quinquies B et 266 quinquies C ».

XII. – Un décret détermine la notion de puissance utilisée pour déterminer le tarif de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité, de la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité et de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité ainsi que les modalités d’application de l’assiette de la taxe prévue aux I et II du présent article lorsque les livraisons d’électricité donnent lieu, de la part des fournisseurs, à des décomptes ou encaissements successifs, ou à la perception d’acomptes financiers.

Il détermine aussi la liste des procédés métallurgiques, d’électrolyse, de réduction chimique et de fabrication de produits minéraux non métalliques mentionnés aux 1° et 3° du IV de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales, la nature des sites ou installations directement utilisées pour les besoins des activités de transport mentionnées au 2° du V du même article, la liste des documents ou éléments mentionnés au I de l’article L. 3333-3-2 du même code que les redevables, les personnes mentionnées au VII de l’article L. 3333-2 du même code et les gestionnaires de réseaux doivent tenir à disposition ou communiquer aux agents habilités.

XIII. – (Non modifié) Les I à XI du présent article entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2011.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l’article.

M. Claude Bérit-Débat. Compte tenu des délais et des engagements que nous avons pris, je renonce à mon intervention sur l’article. L’examen des amendements me donnera l’occasion de m’exprimer sur différents points.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Billout, sur l’article.

M. Michel Billout. Cet article 12, qui instaure une taxe nationale sur la distribution d’électricité. Il répond simplement, paraît-il, à la nécessité de modifier la loi pour mettre la France à l’abri de la menace que la Commission européenne fait planer depuis plusieurs années, à savoir l’engagement d’une procédure contre nous. Le motif est connu : nous n’aurions pas transposé fidèlement et avec suffisamment de célérité une disposition tendant à « nationaliser » la perception d’une taxe sur la consommation, dont l’application était, jusqu’ici, aléatoire et uniquement guidée par des décisions locales.

De fait, pour 44 % des communes de France, celles où n’existaient aucune de ces taxes ou celles où se pratiquait un taux intermédiaire, l’opération se concrétisera par une évolution à la hausse de la facture d’électricité, au moment même où le secteur de l’électricité est livré aux appétits de la grande finance, ce qui ne sera certainement pas sans graves incidences sur l’augmentation des prix.

L’État s’empresse, pour sa part, de laisser agir les parlementaires, car, au terme de l’opération, ce sont quelques dizaines de millions d’euros de TVA qui seront apportés, en guise d’écot, à l’effort de redressement des comptes publics.

Au demeurant, il suffira de pousser toujours un peu plus loin la logique de la hausse de prix demandée par les opérateurs d’un marché électrique, que l’on tente avec ce texte de rendre prétendument concurrentiel, pour que naisse, en bout de course, une recette marginale de plus pour l’État, faisant contribuer les redevables, et d’abord les plus modestes, à cet effort de « convergence » des déficits publics qu’entend mener le Gouvernement.

Une question mérite tout de même d’être posée : la qualité de la distribution électrique a-t-elle quelque chose à gagner de la création d’une telle taxe ?

Une taxe dont le rendement, nous annonce-t-on n’augmentera pas : refrain déjà maintes fois entonné, et pas plus tard que l’an dernier, avec la suppression de la taxe professionnelle ! On peut évidemment en douter, ne serait-ce que parce que, en lieu et place d’une utilisation locale du produit de la taxe, nous allons passer à une sorte d’enveloppe nationale dont la redistribution risque fort d’être aussi porteuse de tensions que bien des enveloppes de dotations budgétaires ainsi « nationalisées » et qui font régulièrement ici l’objet de débats, notamment lors des discussions budgétaires.

Au final, nous sommes donc en présence d’une disposition que nous ne pouvons évidemment que combattre, d’autant qu’elle résulte de la philosophie générale d’un texte dont les défauts sont tels qu’il n’est décidément pas acceptable.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 102 est présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L’amendement n° 209 est présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° 102.

Mme Nicole Bricq. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, vous l’aurez compris, nous défendons là un amendement de principe.

La réforme des taxes locales d’électricité est directement liée à l’adoption, par les instances européennes, d’une directive du 27 octobre 2003. Depuis cette date, nous savions qu’une adaptation de ces taxes était indispensable. La France avait obtenu une période transitoire, allant jusqu’au 1er janvier 2009. Pour respecter ce délai, notre collègue député Charles de Courson avait proposé par amendement d’adopter cette réforme dans le cadre du collectif pour 2008. Mais sa tentative n’a pas abouti.

La Commission européenne nous a donc, fort logiquement, mis en demeure le 18 mars dernier de modifier impérativement notre législation dans un délai de deux mois. L’inertie des gouvernements qui se sont succédé pendant toutes ces années nous amène donc aujourd’hui à discuter d’une réforme de manière précipitée, voire improvisée.

Une fois encore, force est de constater que l’esprit de la réforme constitutionnelle, censée donner un espace plus large au Parlement, est bafoué.

S’il est des réformes pour lesquelles les études d’impact sont particulièrement indispensables, ce sont au premier chef les réformes fiscales, puisque leur adoption induit inévitablement des transferts de charges et de recettes entre les contribuables et les bénéficiaires des impôts concernés.

Or l’introduction de cet article 12 à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par M. de Courson permet au Gouvernement de se soustraire – le procédé est connu ! – à son obligation de fournir une étude d’impact. Malgré tout, l’exécutif aurait pu transmettre des évaluations, d’autant que l’amendement adopté à l’Assemblée reprend de manière quasi identique son propre projet de réforme qui circulait il y a encore quelques mois.

Une nouvelle fois, le Parlement, tout particulièrement le Sénat, est contraint de légiférer « à l’aveugle ».

J’observe en outre que la majorité parlementaire ne respecte pas la règle qui a pourtant été fixée lors de la Conférence des déficits du 20 mai dernier par le Président de la République lui-même. Quelques jours après, Charles de Courson « s’assoit » sur cette prescription ; mais il est vrai que notre collègue a toujours fait preuve d’un certain esprit d’indépendance…

À cet égard, il est intéressant de se reporter à l’instruction donnée par le Premier ministre le 4 juin. Sa rédaction est très astucieuse, dans la mesure où elle donne l’impression d’avoir été pensée pour permettre à la réforme des taxes locales d’électricité d’échapper à la règle fixée par le Président de la République.

Monsieur Marini, je sais que la commission des finances est particulièrement attachée au principe selon lequel une disposition fiscale ne peut être insérée ailleurs que dans une loi fiscale. Comment, en l’espèce, entendez-vous faire respecter ce principe, notamment à des parlementaires qui ne sont pas forcément membres de la commission des finances ?

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je vais vous répondre, madame Bricq !

Mme Nicole Bricq. Toutes ces raisons nous conduisent à demander la suppression de l’article 12 et le report de la mesure envisagée jusqu’à l’examen du projet de loi de finances pour 2011. Cela n’aura aucun impact quant à la date d’entrée en vigueur de la réforme puisque l’article prévoit qu’elle ne s’appliquera qu’au 1er janvier 2011. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 209.

M. Gérard Le Cam. Cet amendement de suppression de l’article 12 est en cohérence avec notre position générale sur le texte.

La Commission européenne nous impose de nationaliser non pas les opérateurs, mais la taxe sur la distribution. Comme les commissaires européens sont attentifs et sourcilleux s’agissant de la compétitivité des entreprises, c’est évidemment le particulier qui va payer le taux le plus élevé. Et tant pis pour la « compétitivité » de son pouvoir d’achat à lui, le consommateur privé !

Quant aux élus locaux, retrouveront-ils, dans cette affaire, les fonds dont ils auront besoin pour garantir la sécurité d’approvisionnement du consommateur, notamment en zone rurale ou en secteur faiblement peuplé ? Rien n’est moins sûr !

Refuser l’article 12, c’est se mettre en défaut vis-à-vis de la Commission, nous dira-t-on. Et alors ? Le sujet ne justifie-t-il pas que la France ait le courage politique de poser la question de l’organisation au niveau communautaire de la distribution d’électricité, bien public essentiel à la vie moderne, et d’évoquer la possibilité de sortir des schémas aujourd’hui à l’œuvre, qui n’ont empêché ni la hausse des tarifs, ni le développement des risques technologiques, ni celui de l’inégalité d’accès ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L’ensemble des pays européens ont l’obligation de transposer dans leur législation la directive du 27 octobre 2003.

Mme Nicole Bricq. On a attendu sept ans !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La France est donc aujourd’hui contrainte de réformer les taxes locales d’électricité.

Elle a été mise en demeure d’agir le 18 mars dernier par la Commission européenne. L’ajout par l’Assemblée nationale de cet article 12 dans le texte du projet de loi a permis de suspendre la procédure. Une procédure de moins à l’encontre de la France, c’est tout bénéfice !

Mes chers collègues, cet article 12 est donc indispensable et nous devons absolument le voter à notre tour. La commission ne peut, en conséquence, qu’être défavorable à ces deux amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet le même avis que la commission. La France a déjà reçu de la Commission européenne un avis motivé pour non-transposition de la directive.

Mme Nicole Bricq. La faute à qui ?

M. Bernard Frimat. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude !

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. La suppression de cet article l’exposerait à une condamnation par la Cour de justice des Communautés européennes et, par la suite, à des sanctions pécuniaires.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ces deux amendements me semblent pleins de bon sens. Chaque fois que le Sénat a voulu voter des dispositions fiscales, notamment lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, on nous a renvoyés vers la loi de finances.

M. Didier Guillaume. Exactement !

Mme Nathalie Goulet. À moins d’être convaincue par les explications de M. Marini, je voterai donc ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, je vais m’efforcer de convaincre celles ou ceux qui hésitent sur leur vote !

M. Bernard Frimat. Mission impossible !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. N’oublions pas, madame Bricq, que la commission des finances, de longue date, est intervenue sur le sujet, en organisant une table ronde avec l’ensemble des parties prenantes.

Cet article 12 est véritablement nécessaire, et ce pour deux raisons : d’une part, il s’agit de sauvegarder les ressources des collectivités territoriales ; d’autre part, c’est vrai, il est urgent de se mettre en conformité avec le droit européen.

Mme Nicole Bricq. On va en parler !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Peut-être vous rappelez-vous que le Gouvernement nous avait déjà saisis une première fois de ce sujet dans le cadre d’une loi de finances rectificative présentée tout à fait en fin d’année, avec une formule qui était absolument inacceptable.

Mme Nicole Bricq. C’était en 2008 !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Depuis, la commission des finances a eu le temps de mener études et analyses, de recevoir d’autres propositions. Et, contrairement à ce que vous laissez entendre, des simulations ont été effectuées.

Dans le dispositif que nous sommes en mesure de voter avec l’article 12, les collectivités territoriales ne seront pas perdantes, non plus que les usagers domestiques, non plus que les entreprises...

M. Didier Guillaume. Personne ne le sait !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. … puisque la taxe sera acquittée à l’échelon intermédiaire.

Ainsi, pour les élus locaux que nous sommes ou, en tout cas, pour les défenseurs des budgets locaux que nous sommes, il y a une décision simple et claire à prendre pour sauvegarder les ressources des communes, des intercommunalités et des départements : voter l’article 12 !

M. Didier Guillaume. Ce n’est pas convaincant !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Chers collègues du groupe socialiste, vous qui, en maintes occasions, prétendez défendre l’autonomie fiscale des collectivités territoriales (Exclamations sur les travées du groupe socialiste),…

M. Roland Courteau. C’est pour nous une exigence !

M. Didier Guillaume. Nous, nous défendons les collectivités territoriales !

M. Claude Bérit-Débat. Tandis que vous, vous les enfoncez !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. … sachez que l’autonomie fiscale est ici parfaitement sauvegardée : les collectivités bénéficiaires pourront voter sur les taux de cette contribution, alors que, dans l’épure initiale, celle de la fin de 2008, tout le monde se voyait imposer un tarif unique.

Ayez donc au moins l’honnêteté de reconnaître que les collectivités territoriales ont été entendues. Si l’on peut arriver à un tel résultat, ici, au Sénat, il faut adopter cet article le plus vite possible !

M. Claude Bérit-Débat. Ce sont des contorsions !

M. Didier Guillaume. Et elles ne sont pas convaincantes !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Non, c’est la vérité !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 102 et 209.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme Nicole Bricq. Nous saurons nous souvenir de cette exception !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. On se souviendra surtout de la façon dont vous défendez les finances locales : elle est à géométrie variable !

M. Roland Courteau. C’est plutôt vous qui êtes à géométrie variable !

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.

Cet amendement est ainsi libellé :

Alinéas 7 et 50, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

« À partir de l’année 2012, la limite supérieure du coefficient multiplicateur est actualisée en proportion de l’indice moyen des prix à la consommation hors tabac établi pour l’année précédente par rapport au même indice établi pour l’année 2009.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cet amendement résulte d’un dialogue qui s’est poursuivi avec le Gouvernement.

La commission des finances ne souhaite pas que la réforme des taxes locales sur l’électricité aboutisse à priver, en quelque sorte, les collectivités territoriales du bénéfice de la composante « prix » de ces taxes. En d’autres termes, nous considérons que les recettes doivent évoluer en fonction de l’inflation.

Dans un premier temps, nous avions proposé d’indexer le tarif des taxes sur la hausse des prix. Cette solution présentait peut-être – c’est du moins ce que l’on m’a laissé entendre du côté du Gouvernement – l’inconvénient d’une trop grande automaticité.

C’est pourquoi le présent amendement, qui, je le répète, est le fruit d’un compromis, vise à indexer sur l’inflation la borne supérieure du coefficient multiplicateur des taxes. Ainsi les collectivités bénéficiaires pourront-elles réévaluer le produit, à condition de voter, chaque année, l’augmentation du coefficient. Voilà qui est conforme au principe de l’autonomie fiscale !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Autant j’avais des réticences sur la version initiale de l’amendement, autant je suis favorable au compromis qui a été trouvé !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. Autant il était difficile au Gouvernement de se rallier à l’orientation reposant sur une indexation mécanique du tarif appliqué par chaque collectivité, autant il peut soutenir une solution consistant dans l’actualisation annuelle du plafond qui encadre les nouvelles taxes.

En effet, une indexation automatique aurait donné aux ménages un signal d’augmentation continue du prix de l’électricité, à l’opposé de l’esprit de ce texte qui tend, au contraire, à dynamiser la concurrence au bénéfice des utilisateurs.

De plus, cette indexation aurait alimenté chaque année une querelle stérile sur la responsabilité de la décision.

En revanche, l’actualisation du plafond que vous proposez, et qui est calée sur la réalité économique, est exactement conforme à l’engagement que nous avons pris envers les collectivités locales dans le cadre de cette réforme : respecter scrupuleusement le potentiel de ressources existant pour chacun des niveaux concernés – communes, départements, syndicats – et valoriser ce degré de liberté fiscale auquel vous êtes attachés.

Votre solution, monsieur le rapporteur général, garantit le dynamisme de ce potentiel sans pénaliser le consommateur par anticipation. C’est pourquoi le Gouvernement s’y rallie volontiers.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Sergent, pour explication de vote.

M. Michel Sergent. J’aimerais avoir quelques explications parce que, là, nous travaillons presque sans filet !

L’amendement n° 3 rectifié est certainement très intéressant, mais je rappelle que nous avions déposé un amendement n° 103, identique à l’amendement n° 3 initialement déposé par M. Marini, et qui a été adopté par la commission des finances.

J’ai bien compris l’indexation qu’il est maintenant proposé de mettre en œuvre. La nouvelle initiative de M. Marini résulte d’un échange avec le Gouvernement, qui émet évidemment un avis favorable, tout comme la commission.

Nous retrouvons, certes, le niveau de ressources que nous souhaitions. Peut-être les calculs ne sont-ils plus tout à fait les mêmes – nous n’avons toujours pas de simulations à ce sujet. Si j’ai bien compris, il appartiendra à chaque collectivité de prendre la décision, chaque année. Il ne s’agit donc plus d’une indexation automatique.

Bien sûr, les collectivités prennent chaque année un certain nombre de décisions concernant l’évolution des taux. Elles devront y ajouter cette actualisation.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. On ne peut pas demander une chose et son contraire !

M. Michel Sergent. Il n’en reste pas moins que l’automaticité était synonyme de simplicité. Je crains que cette solution ne rende les choses un peu plus difficiles, même si, je dois le reconnaître, elle permet aux collectivités de conserver le niveau de cette ressource.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Merci, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Fourcade. C’est l’objectif !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 222, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l'alinéa précédent, la commune peut fixer le coefficient multiplicateur mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 2333-4 dans la limite de 12, sous réserve qu'elle affecte la part de la taxe résultant de l'application d'un coefficient multiplicateur excédant 8 à des opérations de maîtrise de la demande d'énergie concernant les consommateurs domestiques ou son patrimoine.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. La taxe locale sur l’électricité, la TLE, est aujourd’hui la seule taxe perçue par les collectivités locales sur l’énergie consommée sur leur territoire.

Les collectivités sont par ailleurs des vecteurs importants de la promotion de la maîtrise de l’énergie auprès des particuliers et se doivent, bien entendu, d’être exemplaires en termes de réduction de leur propre consommation d’énergie, notamment en ce qui concerne les bâtiments et l’éclairage publics. C’est pourquoi le Grenelle de l’environnement leur impose, à juste titre, de nouvelles obligations fortes en la matière.

Cet amendement permet d’étendre à tout le territoire le dispositif qui est, pour le moment, réservé aux départements d’outre-mer, en vue d’abonder des fonds locaux de maîtrise de l’énergie, notamment dans le cadre des plans climat-énergie territoriaux.

Cet excellent dispositif a pour vocation d’aider les particuliers et les communes à réaliser des actions de maîtrise de l’énergie.

Avec cet amendement, qui prévoit une augmentation mesurée de la TLE, le surcoût de l’énergie lié à cette augmentation, et supporté par les consommateurs domestiques et les communes, sera – pour ceux qui participent aux opérations ainsi mises en œuvre – inférieur à la baisse de facture entraînée par la maîtrise de l’énergie consommée : nous nous devons d’encourager, par la fiscalité, la vertu écologique

Par ailleurs, chacun sait que de nombreuses communes, notamment rurales, manquent de moyens pour financer les investissements de maîtrise de l’énergie dans les équipements publics. Cette disposition apportera à celles qui souhaitent s’inscrire dans une dynamique de développement durable un outil opérationnel pour affecter une part des recettes de la fiscalité énergétique locale à la baisse de consommation énergétique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le mécanisme prévu par le présent amendement me semble intéressant. C’est la raison pour laquelle l’article 12 l’a prévu, notamment pour les départements d’outre-mer. Il me paraît cependant complexe de le généraliser à l’échelle de l’Hexagone. C’est la raison pour laquelle j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 222.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 105, présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéas 14, 57 et 83

Remplacer le taux :

2 %

par le taux :

1,5 %

La parole est à M. Michel Sergent.

M. Michel Sergent. Il s’agit, par cet amendement, d’abaisser le taux de prélèvement pour frais de déclaration et de versement en le faisant passer de 2 % à 1,5 %.

Sous le régime actuel des taxes locales sur l’électricité, les fournisseurs d’électricité sont chargés de la collecte de ces taxes auprès des redevables que sont les consommateurs d’électricité. Ils reversent ensuite le produit de cette collecte à la collectivité ou au syndicat bénéficiaire. Pour cette mission de collecteur, le code général des collectivités territoriales attribue aux fournisseurs un prélèvement de 2% sur le produit.

L’article 12 modifie le régime de ces taxes, en passant d’une taxe ad valorem à un droit d’accise. De même, les redevables de l’impôt ne seront plus demain les consommateurs, mais les fournisseurs d’électricité. Par conséquent, les fournisseurs n’auront plus pour mission de collecter la taxe auprès des consommateurs, ce qui facilite la gestion de l’impôt et en limite donc le coût. Pour cette raison, les frais de gestion de l’impôt devraient être normalement supprimés.

Néanmoins, les fournisseurs invoquent deux arguments pour maintenir ce prélèvement sur les recettes : d’une part, ils devront assumer les impayés des consommateurs ; d’autre part, ils devront financer la transition de leurs outils, notamment informatiques, vers le nouveau régime de taxation.

Leurs motivations ont été entendues par le Gouvernement puisque l’article 12 prévoit non plus des frais de perception, mais des frais de déclaration et de versement, au profit des fournisseurs d’électricité, d’un montant toujours égal à 2 % du produit de la taxe.

Or, ni le Gouvernement ni les fournisseurs ne sont en mesure de fournir au Parlement une évaluation des coûts réellement engendrés par les impayés et par l’adaptation des moyens de gestion des fournisseurs.

En l’absence d’information, il est inacceptable de maintenir un taux élevé de frais. Il induit des pertes de recettes importantes pour les syndicats et collectivités bénéficiaires, dont beaucoup doivent assumer la maîtrise d’ouvrage des travaux d’entretien des réseaux.

Rappelons également que l’éclairage public sera dorénavant également imposé, ce qui augmentera d’autant les factures des communes au titre de la taxe départementale sur les consommations d’électricité.

Nous devons donc rechercher toutes les solutions possibles pour maintenir le niveau des recettes de nos collectivités. C’est la raison pour laquelle nous demandons cette diminution du taux de prélèvement opéré au profit des fournisseurs. Il devrait même diminuer encore plus à l’avenir.

Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéas 14 et 57

Remplacer le taux :

2 %

par le taux :

1,5 %

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Une fois n’est pas coutume, je ne peux que réitérer tout ce qui vient d’être dit à l’appui d’un amendement très proche de celui de la commission des finances.

Nous préconisons, comme Michel Sergent, l’un des membres les plus assidus de cette commission, une diminution du taux de prélèvement de 2 % à 1,5 %.

En effet, la pertinence d’un taux de 2 % – ce qui est relativement élevé par rapport aux différentes références dont on dispose – n’est pas démontrée au regard des coûts de gestion qui seront réellement supportés par les opérateurs. En outre, nous pensons que tout le monde doit faire des économies de gestion. Le taux de 1,5 % serait, dans ces conditions, tout à fait raisonnable.

Compte tenu de la proximité des deux amendements, je me rallie à celui qu’a présenté Michel Sergent voilà un instant.

Mme la présidente. L’amendement n° 2 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 105 ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable tout simplement parce que ce taux de 2 % existe depuis un certain temps : il n’est pas sorti du chapeau d’un magicien !

De plus, nous pensons qu’il permet de couvrir tous les coûts de gestion, les frais de déclaration, les frais de versement de ces taxes. Doutant qu’un taux de 1,5 % permette de continuer d’assumer ces différentes tâches, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je comprends et partage, monsieur Sergent, votre souci d’optimiser l’équilibre entre la charge des opérateurs et les recettes des collectivités. Je me dois toutefois d’attirer l’attention de chacun sur la charge qui va peser sur ces opérateurs, la première année, pour initialiser leur système informatique.

Pour m’éviter d’émettre un avis défavorable, je vous demanderai, monsieur le sénateur, de bien vouloir satisfaire une seule condition, essentielle : préciser que votre proposition ne vaudrait qu’à compter du 1er janvier 2012, ce qui laisse aux opérateurs une année pour adapter leur outil informatique.

Mme la présidente. Monsieur Sergent, que pensez-vous de cette suggestion ?

M. Michel Sergent. Je crois effectivement qu’il serait judicieux d’attendre 2012 pour mettre en œuvre cette modification. Je rectifie mon amendement en conséquence.

Mme la présidente. Je suis donc saisie de l'amendement n° 105 rectifié, présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe Socialiste et apparentés, et ainsi libellé :

Alinéas 14, 57 et 83

I - Remplacer le taux :

2 %

par le taux :

1,5 %

II- Compléter ces alinéas par les mots :

à compter du 1er janvier 2012

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement rectifié ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J’ai été frappé par la très grande dureté de la négociation entre le Gouvernement, le rapporteur général du budget et Michel Sergent ! (Sourires.) Je me rallie à ce constat de compromis et renonce, à titre personnel, à émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Cette proposition me paraît en effet sage et acceptable.

Contrairement à ce que nous avons entendu, ce sont en fait les ménages qui supportent la charge de ce prélèvement. Les fournisseurs ne font pas de « cadeaux » et le répercutent dans le prix.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Sergent, pour explication de vote.

M. Michel Sergent. Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué le rôle de Michel Sergent dans cette affaire. Je tiens à préciser qu’il s’agit de Michel Sergent, membre et, en l’occurrence, représentant du groupe socialiste. (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 105 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 103, présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 47

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À compter de 2012, ce tarif est indexé, chaque année, sur la prévision de l'indice des prix à la consommation hors tabac retenue dans le projet de loi de finances de l'année.

II. - Alinéa 49

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À compter de 2012, ce tarif est indexé, chaque année, sur la prévision de l'indice des prix à la consommation hors tabac retenue dans le projet de loi de finances de l'année.

Puis-je considérer qu’il est satisfait ?...

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il me semble qu’il est devenu sans objet !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. L’amendement n° 103 était identique à l’amendement n° 3 de M. Marini – nous nous étions mis d’accord lors des travaux de la commission des finances – avant que ce dernier ne soit rectifié. Or nous ne disposons pas en cet instant des éléments nous permettant d’évaluer la portée de la rectification effectuée par M. le rapporteur pour avis qui n’est pas neutre pour les collectivités territoriales. En effet, on rompt avec l’automaticité prévue dans la version initiale de l’amendement n° 3. Vous aurez remarqué que le groupe socialiste n’a pas fait part de sa désillusion sur ce point.

Néanmoins, la rectification de M. Marini ayant permis de parvenir à un compromis entre le Gouvernement et la commission saisie au fond, nous considérons, sous réserves, que l’amendement n° 103 est satisfait. Il n’y a pas plus courtoise que moi, monsieur Marini ! (Sourires.)

Mme la présidente. Monsieur Sergent, l'amendement n° 103 est-il maintenu ?

M. Michel Sergent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 103 est retiré.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 12 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doublet, Laurent, Revet et Pierre et Mme Des Esgaulx.

L'amendement n° 143 est présenté par M. Besson.

L'amendement n° 254 rectifié bis est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade et Tropeano.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'alinéa 54

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

« À compter de l'année 2012, les tarifs mentionnés aux 1 et 2 sont relevés chaque année par arrêté dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.

La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter l’amendement n° 12.

M. Xavier Pintat. Il est satisfait, madame la présidente.

Mme la présidente. Les amendements nos 143 et 254 rectifié bis ne sont pas soutenus.

L'amendement n° 104, présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 74

Après le mot :

applicable

insérer les mots :

sur le territoire de cette commune

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à lever le doute sur la possibilité pour les syndicats d’électricité de fixer librement les tarifs des taxes sur la consommation d’énergie pour chaque commune présente sur leur territoire.

L’article 12 définit le tarif de la taxe communale sur la consommation d’électricité et précise que la commune le fixe en retenant chaque année un coefficient multiplicateur applicable aux montants fixés par la loi compris entre zéro et huit.

En vertu de l’article L. 5212-24 du code général des collectivités territoriales, lorsque la commune a transféré à un syndicat, ou à un département, sa compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité, celui-ci perçoit de plein droit, ou après accord des communes de plus de 2 000 habitants, le produit de la taxe. Dans ces conditions, il me semble qu’il lui revient également le droit de fixer le tarif de la taxe.

L’amendement n° 104 vise à préciser que la possibilité de voter le coefficient multiplicateur s’apprécie à l’échelon de chaque commune et que, par conséquent, le syndicat ou le département conserve la faculté de moduler le tarif de la taxe, en fonction des communes présentes sur son territoire.

Le maintien de cette modulation est important si l’on souhaite éviter un alignement brutal et à la hausse des tarifs des taxes sur la consommation d’électricité pour les communes membres d’un syndicat.

Ainsi, dans mon département, la Seine-et-Marne, qui compte deux grands syndicats, l’un au nord, institué avec difficulté, l’autre au sud, les taux ne sont pas unifiés.

Je rappelle que, actuellement, 26 % des communes n’ont pas instauré de taxe, 20 % d’entre elles ont adopté un taux intermédiaire ; de surcroît, seules 54 % des communes ont un taux plein sur le territoire national.

Cette précision me semble nécessaire.

(M. Guy Fischer remplace Mme Catherine Tasca au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car il est contraire à la logique qui a conduit à la création des syndicats intercommunaux. En effet, pourquoi créer une telle structure si c’est pour lui permettre d’appliquer des taux différents d’une commune à l’autre ? Le rôle d’un syndicat, qui est une association de communes, est d’appliquer le même taux partout. C’est d’ailleurs l’argument que mettent en avant ces syndicats pour convaincre les communes d’y adhérer.

Ma chère collègue, s’il était adopté, votre amendement aurait, je le crains sincèrement, des conséquences particulièrement dangereuses. C’est la raison pour laquelle je vous prie de bien vouloir le retirer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Même avis que M. le rapporteur, pour les mêmes raisons.

M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 104 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. Il m’est un peu difficile de retirer cet amendement, même si je comprends votre point de vue, monsieur le rapporteur. Le sujet est assez sensible. Je ne fais pas là un plaidoyer pro domo, mais il n’est jamais facile de procéder à une unification.

Le fait d’unifier est certes, vous venez de le rappeler, un argument pour convaincre les communes d’adhérer au syndicat, mais je parle, pour ma part, du coefficient multiplicateur de zéro à huit précité. Vous savez bien qu’une modulation est déjà possible en fonction de la population de la commune.

L’amendement n° 104 traduit une conviction. Certes, je ne voudrais pas qu’il produise l’effet inverse de celui qui est recherché, mais j’ai tout de même du mal, je le répète, à le retirer.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J’aimerais vous convaincre sur cette question, ma chère collègue, afin que nous ne donnions pas une mauvaise image du Sénat.

Imaginez que le président d’un syndicat intercommunal n’ait plus un comportement indépendant, qu’il ne soit plus animé par la volonté de rendre service à toutes les communes, et qu’il veuille – pardonnez-moi de le dire – régler des comptes politiques avec Pierre, Paul ou Jacques… Adopter l’amendement n° 104, c’est prendre le risque de permettre un tel comportement. Vous ne pourrez pas empêcher certains de faire une telle interprétation, je vous assure.

C’est la raison pour laquelle je pense qu’il serait vraiment préférable que vous retiriez votre amendement.

M. le président. Madame Bricq, qu’en est-il en définitive de l'amendement n° 104 ?

Mme Nicole Bricq. Je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 107, présenté par MM. Courteau, Rainaud et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 78

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque l'arrêté de création d'un syndicat mentionné au premier alinéa est exécutoire après le 31 décembre 2010, l'organe délibérant de ce syndicat fixe le tarif applicable en 2011 dans les conditions prévues au deuxième alinéa. Ce tarif est applicable au début du troisième mois qui suit la décision de l'organe délibérant.

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Selon le régime prévu à l’article 12, la commune ou le syndicat exerçant la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité doit adopter le coefficient multiplicateur applicable aux tarifs de la taxe fixés par la loi avant le 1er octobre de l’année afin qu’il puisse être applicable l’année suivante.

Ce calendrier pénalise particulièrement les syndicats créés après le 1er octobre de l’année, car ils ne sont pas en mesure de fixer leur niveau de recettes pour l’année à venir.

Ainsi un syndicat créé après le 1er octobre 2010 sera-t-il dans l’une ou l’autre de ces deux situations : soit les futures communes membres auront déjà institué la taxe et voté son tarif avant cette date, auquel cas la taxe et son produit seront transmis au syndicat, soit elles ne l’auront pas instaurée, auquel cas le syndicat ne percevra aucune recette pour l’année 2011 !

Vous n’êtes pas sans savoir, madame la secrétaire d’État, combien il est difficile de regrouper, sur un même territoire, l’exercice de la compétence « électricité » au sein d’une même instance.

Cet objectif a été fixé à l’échelon national dans la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie. Près de quatre ans après, rares sont les départements l’ayant atteint.

Il est donc indispensable de ne pas faire peser des contraintes plus fortes sur ces regroupements en privant les syndicats de leur pouvoir de voter leurs recettes l’année de leur création.

L’amendement n° 107 tend à permettre à un syndicat créé après le 31 décembre 2010 de voter pour 2011 le tarif de la taxe sur son territoire.

Permettez-moi de vous donner un exemple précis pour illustrer mon propos, mes chers collègues. Dans le département de l’Aude, un syndicat sera créé le 1er janvier 2011, sur l’initiative du conseil général et de son président, notre collègue et ami Marcel Rainaud, et avec l’appui des services de la préfecture.

Si l’amendement n° 107, qui vise à permettre aux nouveaux syndicats de fixer à titre dérogatoire – j’insiste sur ce point – le tarif de la taxe sur l’électricité au moment de la création, même si celle-ci intervient après le 1er octobre, n’était pas adopté, de tels syndicats, privés de ressources, ne pourraient réaliser pratiquement aucun investissement en 2011. Ce serait particulièrement préoccupant, madame la secrétaire d’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je me réjouis que le département de l’Aude crée un syndicat. Roland Courteau et moi avons discuté à plusieurs reprises du problème qu’il vient d’évoquer : à quoi servirait la création d’un syndicat le 1er janvier 2011 s’il ne devait avoir aucune recette pour effectuer des travaux ?

Malheureusement, la solution que vous proposez, mon cher collègue, n’est techniquement pas possible. Le problème demeure donc entier.

Il existe cependant deux autres solutions.

La première, même si je crois savoir qu’elle est compliquée à mettre en œuvre, consisterait à avancer d’un mois, avant la fin de l’année 2011, la création du syndicat.

La seconde tendrait à permettre au syndicat qui sera créé au mois de janvier prochain de passer des conventions avec toutes les communes qui en font partie afin de pouvoir bénéficier de recettes et de disposer d’un budget.

Étudiez cette solution, mon cher collègue. Elle me paraît moins compliquée à mettre en œuvre que la première, qui nécessiterait de négocier avec toutes les communes de votre département prêtes à adhérer au syndicat.

Telles sont les raisons pour lesquelles je n’avais émis aucun avis sur l’amendement n° 107. Je souhaite connaître l’avis du Gouvernement

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Comme vient de le rappeler M. le rapporteur, l’organisation mécanique de la transition pendant l’année 2011 de l’ancien dispositif de taxe locale sur l’électricité vers le nouveau régime conforme au droit communautaire ne permet pas l’intervention de nouveaux taux au cours de cet exercice.

En revanche, dans le cadre du droit commun de la coopération intercommunale, les communes membres du syndicat créé au cours de cette année 2011 auront tout loisir d’organiser par convention leur collaboration avec celui-ci à partir de la taxe qu’elles continueront à percevoir pour compte propre jusqu’au 31 décembre.

Même si je comprends vos préoccupations, monsieur Courteau, je ne peux émettre un avis favorable sur votre amendement, et ce pour des raisons techniques. En revanche, je vous encourage à étudier la solution alternative qu’a évoquée M. le rapporteur.

M. le président. Monsieur Courteau, l'amendement n° 107 est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.

Mes chers collègues, la commission et le Gouvernement ayant émis un avis défavorable sur cet amendement, je m’adresse à vous maintenant : vous êtes aussi des élus et vous êtes ou pouvez être confrontés à une situation semblable à celle que j’ai décrite.

Si l’amendement n° 107 n’est pas adopté, le syndicat devra vivre au ralenti en 2011. Privé de recettes, il ne pourra réaliser aucun investissement. L’année sera perdue. Une telle attitude récompenserait mal les efforts déployés par les élus au cours de ces derniers mois.

Quant à la solution que vous avez exposée, madame la secrétaire d’État, j’ignore si elle permettra d’éviter la situation à laquelle je crains que nous n’ayons à faire face. N’en existe-t-il pas d’autres qui nous donneraient une assurance ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous aimerions bien sûr aider à la création du syndicat que vous évoquez, monsieur Courteau, mais l’adoption de l’amendement n° 107 ne résoudrait pas le problème que vous soulevez. Vous n’auriez pas de recettes !

L’idéal, je le répète, serait de créer le syndicat dans votre département un mois plus tôt. Pour quelle raison serait-il possible de le créer le 1er janvier et pas avant le 31 décembre ?

M. Roland Courteau. Apparemment, ce n’est possible !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Ce serait la meilleure solution, car elle permettrait au syndicat de bénéficier automatiquement de recettes.

L’autre solution que je vous propose n’est pas très bonne, et je vais vous expliquer pourquoi.

Par expérience, je comprends la difficulté que rencontre le président du conseil général de l’Aude, Marcel Rainaud, qui est aussi membre de notre assemblée. Il n’est déjà pas facile de convaincre toutes les communes d’adhérer à la création d’un syndicat ; alors, demander à ce dernier de passer des conventions avec chacune des communes alors qu’il est à peine créé, c’est lui compliquer encore la tâche ! Je n’aimerais pas être à sa place ... La bonne solution consiste à créer ce syndicat un mois plus tôt.

Je sais que cette idée vous a été suggérée un peu tardivement, monsieur Courteau, mais je vous propose de l’examiner de près. En revanche, il ne faut pas adopter l’amendement n° 107, car il n’est pas applicable techniquement. Ce ne serait pas du bon travail législatif.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Dans une autre vie, j’étais juriste, et je me demande si on ne pourrait pas se référer, dans ce cas, au droit applicable aux sociétés en voie de constitution. En effet, lors de la constitution d’une société, un certain nombre d’actes sont repris par cette personne morale en cours de formation.

Il ne s’agit pas d’entraver la constitution des syndicats et de démobiliser les bonnes volontés, au motif que les ressources risquent de manquer au cours de l’année à venir. Il est suffisamment difficile de gérer des syndicats primaires et, d’un point de vue psychologique, de créer des syndicats départementaux dans certains endroits...

Ne pourrait-on imaginer qu’une liste des travaux à effectuer, établie avant le 1er janvier, soit reprise à son compte par le syndicat en formation après le 1er janvier et les travaux seraient alors financés ? Les actes correspondant à ces travaux, « prêts à l’emploi » pour le syndicat en cours de formation, seraient ainsi repris, une fois ce syndicat formé.

Cette solution juridique s’applique, me semble-t-il, dans nombre de situations identiques impliquant des sociétés. Un syndicat étant une personne morale, à l’instar des sociétés, il n’y a aucune raison pour qu’il ne reprenne pas à son compte une liste de travaux à réaliser, une fois la procédure de constitution achevée.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Puisqu’il s’agit d’une disposition fiscale, nous avons jusqu’à la fin de l’année pour la rectifier. Vous dites, monsieur le rapporteur, que cela pose un problème technique.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Un problème non législatif...

Mme Nicole Bricq. Le projet de loi de finances et les projets de loi de finances rectificative nous permettront de rectifier cette disposition. Peut-être la navette parlementaire permettra-elle d’éclaircir cette affaire ? Je soutiens donc cet amendement.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. On peut aussi faire le contraire : on rejette d’abord, et on regarde après !

Mme Nicole Bricq. Je suis bien placée pour savoir que la création d’un syndicat à l’échelon départemental n’est pas chose aisée ! Je suis en effet l’élue d’un département très important, qui compte 1,250 million d’habitants, et qui est à la fois rural, urbain et semi-urbain : nous ne sommes pas encore parvenus à créer ce type de syndicat, car c’est très compliqué. Il faut donc donner un coup de pouce à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Vous me suggérez, monsieur le rapporteur, madame le secrétaire d’État, de faire en sorte que le syndicat soit créé au 1er décembre. J’ai pris des contacts avec mon département : Marcel Rainaud et ses collaborateurs m’ont confirmé qu’il n’était pas possible de précipiter ainsi les choses.

Nicole Bricq a eu raison de souligner la difficulté de cette opération. C’est un sacré travail de mettre en place une telle structure ! Voilà pourquoi j’aimerais que vous me donniez un coup de pouce.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Si vous votez le texte, on vous le donnera ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mme Goulet nous a soufflé la bonne solution...

Mes chers collègues, n’adoptons pas un amendement qui ne règle rien du tout !

Mme Nicole Bricq. Ce ne serait pas la première fois !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Voter des dispositions qui ne servent à rien, ce n’est ni du bon travail parlementaire ni l’habitude de notre assemblée.

Je vous propose de prévoir dans les statuts de votre syndicat l’équivalent de la convention qui lie le syndicat et toutes les communes. En faisant figurer dans ces statuts que la ressource pourra provenir de la convention passée entre le syndicat en cours de constitution et les communes, vous garantirez le versement automatique de la taxe. C’est une bonne solution technique, juridiquement tout à fait possible. Il suffit de modifier le point des statuts qui concerne la constitution du syndicat ; ainsi, vous ne perdrez pas de temps.

M. Roland Courteau. Avant la création du syndicat ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Au moment de sa constitution !

M. le président. Monsieur Courteau, l’amendement n° 107 est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 107.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 135 est présenté par M. Repentin, Mme Printz et M. Masseret.

L’amendement n° 210 est présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

L’amendement n° 227 est présenté par MM. Dubois, Amoudry, Jégou et Merceron.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 84

Supprimer cet alinéa.

L’amendement n° 135 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 210.

Mme Odette Terrade. La perception de frais d’émission de rôle et de recouvrement est une chose somme toute parfaitement naturelle pour toute imposition dans notre pays. Si je me réfère à nos débats relatifs à la création de nouvelles taxes, j’observe que ces droits d’émission existent quasiment dans tous les cas.

Pourquoi prévoir une exception, alors même que la fixation d’un tel droit d’accise, à l’échelon national, pose le problème récurrent du déni des contraintes de gestion qui peuvent découler, soit de la diversité des territoires, soit de la diversité sociologique des redevables ?

Telle est, notamment, l’utilité des frais d’émission de rôle et de recouvrement : permettre la prise en compte des difficultés que les usagers peuvent rencontrer, temporairement ou de façon plus ou moins chronique, pour régler leur facture. Que nous l’appelions accise ou taxe locale, la taxe prévue à l’article 12 apparaîtra sur la facture en tant que composante à part entière de celle-ci, de même qu’y figure la contribution au service public de l’électricité.

Il faut maintenir les frais de recouvrement pour répondre, dans de bonnes conditions, à l’ensemble des problématiques qui continueront de se poser et risquent fort d’entraîner, avec l’ouverture à la concurrence, de nouvelles tensions.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour présenter l’amendement n° 227.

M. Jean-Claude Merceron. Les compétences exercées par des syndicats intercommunaux ou des départements en tant qu’autorités organisatrices de distribution publique d’électricité, définies au premier alinéa de l’article L. 5212-24 du code général des collectivités territoriales, impliquent que le tarif de la taxe locale est unique sur l’ensemble des territoires qu’ils contrôlent.

Néanmoins, le caractère unique du tarif de la taxe locale établi sur l’ensemble du territoire sur lequel s’exerce la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité ne réduit qu’à la marge les frais de collecte et de versement supportés par le redevable. En outre, dès lors que l’administration estime que ces frais intègrent les défauts de paiement imputables aux consommateurs finals d’électricité, les pertes en découlant n’ont pas à être intégralement supportées par le redevable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je suis tout à fait défavorable à ces amendements. Des sénateurs de toutes tendances ont adopté, en commission, un amendement présenté par Xavier Pintat tendant à supprimer le prélèvement de 2 % par les redevables des taxes locales sur l’électricité, dans le cas où la taxe communale est perçue par un syndicat d’électricité pratiquant un tarif unique sur l’ensemble de son territoire.

Les amendements nos 210 et 227 vont dans le sens contraire. J’invite donc tous les présidents de syndicat d’électricité à les repousser. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. Ces amendements ont pour objet de rétablir le prélèvement des frais de déclaration et de recouvrement au profit des fournisseurs lorsque la taxe est collectée, à la demande des communes, au bénéfice du département ou d’un syndicat d’électrification.

Le Gouvernement est favorable à cette mesure. En effet, la réforme doit modifier le moins possible l’équilibre financier de chacune des parties. Elle doit maintenir les ressources des collectivités locales et n’a pas vocation à créer de charge supplémentaire pour ces opérateurs qui doivent collecter cet impôt.

De plus, ce dispositif, qui résulte d’une directive européenne, impose aujourd’hui aux fournisseurs, par ailleurs placés en position de concurrence, d’être les redevables de cette taxe. Dès lors, il importe de ne pas créer à leur égard de situation discriminatoire qui serait sans doute contraire à la Constitution. Ainsi les fournisseurs qui assument désormais le risque du recouvrement en cas d’impayés doivent percevoir dans les mêmes conditions économiques les taxes qui reviennent aux communes, aux départements et aux syndicats.

Enfin, il paraît nécessaire de permettre aux fournisseurs de percevoir des frais de déclaration et de versement, de la même manière que l’État effectue un prélèvement sur le montant des impôts pour les frais d’assiette et de recouvrement. Le Gouvernement émet donc un avis favorable. (Ah ! sur les travées de lUMP.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article 12 (début)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Discussion générale

3

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. Madame la ministre d’État, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.

Je vous demande, mes chers collègues, de respecter ce temps de parole.

réforme des retraites

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Christiane Demontès. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Monsieur le ministre, nos compatriotes sont de plus en plus nombreux à exprimer leur inquiétude et leur mécontentement face à la réforme des retraites que vous allez leur imposer.

Mme Éliane Assassi. Ils ont raison !

Mme Christiane Demontès. Ce que vous appelez une réforme, et qui n’est qu’une série d’ajustements comptables, s’avère injuste, brutal, inéquitable et inefficace.

Injuste, parce que le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans et celui auquel on peut percevoir une pension à taux plein de 65 à 67 ans pénalisent les salariés qui ont commencé à travailler tôt, ceux qui ont travaillé longtemps, ceux qui ont alterné périodes de travail et périodes de chômage ou de travail à temps partiel – je pense particulièrement aux femmes, monsieur le ministre.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Christiane Demontès. Maintenir le droit au départ à la retraite à 60 ans pour ces derniers, tout en permettant à ceux qui le souhaitent et qui le peuvent de poursuivre leur activité serait juste. Maintenir l’obtention d’une pension à taux plein à 65 ans serait juste.

Le projet de loi que vous présentez est brutal. En effet, contrairement à ce qui se pratique dans tous les autres pays, en France, l’application de ces ajustements se fait sur une durée très courte. Sur un sujet nécessitant dialogue, concertation, construction avant toute décision, vous, ou plutôt le Président de la République, décidez de passer en force !

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Christiane Demontès. Ce projet de loi est inéquitable : 85 % des efforts exigés le sont des salariés, alors que les revenus du capital n’y contribuent qu’à hauteur de 15 %.

Un sénateur du groupe socialiste. Ce sont leurs amis ! Ils sont ailleurs !

M. Bernard Vera. Bien sûr !

Mme Christiane Demontès. Le capital doit être mis à contribution, monsieur le ministre. Il faut augmenter les prélèvements sociaux sur les bonus et les stock-options, et remettre en cause la défiscalisation des plus-values sur les cessions de filiales.

Ce projet de loi est inefficace : il ne règle rien en matière d’équilibre financier de notre régime de retraite, malgré le scandaleux siphonage du Fonds de réserve pour les retraites, le FRR.

Mme Nicole Bricq. C’est vrai !

Mme Christiane Demontès. Il ne règle pas non plus la question de l’emploi des seniors et des jeunes. Vous ne les rencontrez donc pas, monsieur le ministre, ces gens condamnés au chômage parce que leur entreprise estime qu’ils coûtent trop cher ?

Je sais ce que vous me répondrez : il s’agit de sauver notre système de retraite par répartition.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Louis Carrère. C’est un mensonge !

Mme Christiane Demontès. Avez-vous mesuré l’inquiétude grondante de nos concitoyens, en particulier des plus jeunes d’entre eux, qui n’ont plus aucune confiance dans l’avenir ?

M. Alain Gournac. La question !

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.

Mme Christiane Demontès. Monsieur le ministre, quel message d’espoir peuvent-ils encore espérer de vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

M. René-Pierre Signé. Il aura du mal à répondre !

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous débattrons de ces questions pendant plus de quinze jours dans cette enceinte, nous pourrons ainsi les approfondir.

M. David Assouline. Nous débattrons beaucoup plus longtemps !

M. Éric Woerth, ministre. Si les discussions durent au-delà, ce sera tant mieux : je suis favorable au débat ! Je suis d’ailleurs persuadé, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous ferez vivre ce débat.

M. Jean-Louis Carrère. Heureusement, nous n’avons pas Accoyer ! (Approbations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Éric Woerth, ministre. Vous nous reprochez, madame Demontès, de procéder à des « ajustements comptables ». Dans votre bouche, ce n’est pas très aimable...

Pourtant, la France ne peut pas se contenter d’un système de retraite qui accumule les déficits.

M. Jean-Louis Carrère. La faute à qui ?

M. Éric Woerth, ministre. Ce n’est sans doute pas ce que vous souhaitez.

En raison de la crise, les déficits anticipés de nos régimes de retraites seront réalisés vingt ans plus tôt que prévu.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas vrai !

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement doit bien apporter une réponse appropriée ! Il s’y emploie.

M. Jean-Louis Carrère. C’est faux, vous mentez sans cesse !

M. Éric Woerth, ministre. La première des justices d’un régime de retraite est d’être en équilibre.

M. Didier Boulaud. La justice, c’est de faire payer les riches !

M. Éric Woerth, ministre. Un système de retraite en déséquilibre rendrait plus fragiles les personnes qui le sont déjà, c’est-à-dire celles qui n’ont pas pu mettre de l’argent de côté, et elles sont très nombreuses en France. (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Le système de retraite français est basé sur la répartition, autrement dit sur la solidarité entre les générations.

M. Jean-Louis Carrère. Vous voulez tuer le système par répartition !

M. Éric Woerth, ministre. Madame Demontès, il est logique de considérer que ce sont en premier lieu les travailleurs qui le financent.

Votre logique évoque un système par capitalisation. Dans ce cas de figure, vos propos pourraient être exacts. Mais nous, nous voulons un système par répartition,…

Mme Christiane Demontès. Ce sont toujours les mêmes qui paient, arrêtez !

M. Jean-Louis Carrère. Votre conception de la répartition, c’est tout pour vous, rien pour les autres !

M. Éric Woerth, ministre. … financé par les actifs : ce sont les actifs de l’année qui payent les retraites. C’est notre pacte social et notre lien social ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous vous y connaissez en lien social !

M. Éric Woerth, ministre. C’est sur ce principe, dans le droit fil du système élaboré par le Conseil national de la Résistance, que notre réforme du système des retraites est fondée.

Cette réforme est profondément juste.

M. Jean-Louis Carrère. Juste comme notre justice !

M. Éric Woerth, ministre. Ainsi, les personnes qui ont commencé à travailler très jeunes ont la faculté de partir plus tôt.

Madame Demontès, lorsque les socialistes ont institué la retraite à 60 ans en 1982, le fait que les personnes ayant commencé leur activité professionnelle à 14 ans travaillent 46 ans ne vous gênait pas ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) À l’époque, vous n’aviez pas envisagé cette question ; nous, nous y répondrons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP et de l’Union centriste.)

réforme des retraites

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Votre réforme des retraites est massivement rejetée. En effet, 70 % des Français exigent le maintien de l’âge de départ à la retraite à taux plein à 60 ans, restent attachés à la répartition et disent non à la capitalisation ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Alain Gournac. Il a lu L’Humanité !

M. Guy Fischer. En outre, 68 % d’entre eux ont soutenu la dernière journée de mobilisation.

M. Claude Bérit-Débat. C’est vrai !

M. Guy Fischer. Votre électorat vous abandonne !

M. Alain Gournac. Ce n’est pas le vôtre ! (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Guy Fischer. Votre tentative d’imposer la réforme dans les esprits durant l’été a échoué. C’est une bien mauvaise surprise pour Nicolas Sarkozy et pour l’UMP !

M. Claude Bérit-Débat. Ce n’est pas la dernière !

M. Guy Fischer. Pressé par le temps, monsieur le ministre, inquiet de la mobilisation croissante dans le pays, vous êtes passé en force à l’Assemblée nationale, aidé par un président aux ordres de l’Élysée.

Le scénario ne sera pas le même au Sénat, qui n’a pas adopté le règlement scélérat de l’Assemblée nationale qui bafoue les droits de l’opposition !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Guy Fischer. On ne le répétera jamais assez, cette réforme est injuste et inefficace : elle est supportée à 85 % par les salariés et marginalement par les revenus du capital.

M. Guy Fischer. C’est cette injustice criante qui a fait basculer l’opinion publique. Notre peuple sait, en effet, que l’argent existe pour financer les retraites. (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. René-Pierre Signé. Les niches fiscales !

M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, vous avez tenté jusqu’au bout de masquer cette évidence économique et financière, mais l’affaire Bettencourt ne vous a pas aidé. (Nouvelles exclamations sur les travées de lUMP.)

La volonté du Gouvernement et de l’UMP de flatter et de protéger les plus riches est devenue une réalité palpable par nos compatriotes.

M. Didier Boulaud. Le Fouquet’s !

M. Guy Fischer. La collusion du pouvoir et de l’argent devient évidente.

M. René-Pierre Signé. Ça c’est vrai !

M. Guy Fischer. La jeunesse attend-elle cette réforme ? Non, elle la rejette car cette dernière supprime, de fait, le droit à la retraite pour les plus jeunes !

M. Guy Fischer. La démographie l’exige-t-elle ? Non, car la France a un taux de natalité qui permet de voir l’avenir sereinement.

L’Europe nous a-t-elle précédés ? C’est mal connaître la réalité, car les conditions de travail et de départ à la retraite sont plus protectrices dans nombre de pays voisins.

Les caisses sont-elles vides ? Non, celles du patronat et des banques sont pleines !

Vous voulez faire payer au peuple la cupidité des banques et d’un CAC 40 dont les profits explosent. Là est le cœur du problème.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Guy Fischer. D’autres moyens existent, comme une taxation efficace des revenus du capital, pour financer la retraite à 60 ans à taux plein. (Les membres du groupe CRC-SPG se lèvent et brandissent des feuilles portant l’inscription : « Retraite à 60 ans ».) Nous avons déposé une proposition de loi en ce sens (Protestations sur les travées de lUMP.), et nous invitons le Gouvernement à en prendre connaissance. (Après avoir distribué leur proposition de loi aux membres du Gouvernement, les mêmes parlementaires regagnent leurs travées.)

Le Gouvernement doit retirer son projet de loi et ouvrir les négociations qui n’ont pas eu lieu ! (Les membres du groupe CRC-SPG se lèvent et brandissent des feuilles portant cette fois l’inscription : « Taxons les profits ».)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Les autres pays ont-ils toujours tort ? Les Allemands, les Britanniques, les Italiens, les Espagnols, les Suédois ont-ils nécessairement tort lorsqu’ils repoussent l’âge de départ à la retraite ?

Mme Christiane Demontès et M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !

M. Éric Woerth, ministre. Vous brandissez des affiches portant le slogan : « Retraite à 60 ans ». Soit. Mais c’est facile, c’est de l’électoralisme et de la démagogie, rien d’autre ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

La retraite est d’abord une question d’âge et d’espérance de vie. C’est le temps que l’on se donne à soi-même, après avoir travaillé.

M. Jean-Louis Carrère. Trente-sept ans !

M. Éric Woerth, ministre. Ce temps doit augmenter, et tel est bien le cas : aujourd’hui, la retraite des personnes qui ont cessé leur activité est plus longue qu’auparavant…

M. Jean-Louis Carrère. C’est un mensonge !

M. Éric Woerth, ministre. … et le sera encore plus lorsque l’âge de départ à la retraite sera porté à 62 ans, parce que l’espérance de vie augmente.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On ne sera pas en bonne santé plus longtemps !

M. Jean-Louis Carrère. C’est le contraire !

M. Éric Woerth, ministre. Vous n’avez pas le droit de toujours vouloir mettre à la charge des générations à venir ce que les générations actuelles n’auraient pas accepté. Nous devons être responsables !

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Éric Woerth, ministre. Dans un régime par répartition, vous le savez, monsieur Fischer – d’ailleurs, vous y tenez, tout comme nous –, ce sont les actifs, c’est-à-dire les travailleurs, qui payent la pension des retraités.

Lorsque nous dégageons 4 milliards d’euros de recettes fiscales prélevées sur nos concitoyens les plus aisés, c’est pour financer non pas la répartition, mais la solidarité dans la répartition.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’y a pas de solidarité quand ce sont toujours les mêmes qui paient !

M. Éric Woerth, ministre. Il est logique de considérer que tout ce qui relève de la solidarité doit être financé par les impôts.

M. Guy Fischer. Parlons-en des impôts !

M. Éric Woerth, ministre. La réforme serait injuste. Mais est-il injuste de permettre à nos compatriotes qui exercent des métiers pénibles de partir plus tôt à la retraite ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Est-il injuste de permettre à nos concitoyens qui ont commencé à travailler très jeunes, à 14 ans ou 17 ans, de prendre leur retraite à 60 ans ?

M. René-Pierre Signé. C’est l’hôpital qui se moque de la charité !

M. Didier Boulaud. Cherchez le démagogue !

M. Éric Woerth, ministre. Est-il injuste de permettre aux fonctionnaires de la catégorie active de partir plus tôt à la retraite ?

M. Didier Boulaud. C’est le démago du Fouquet’s !

M. Éric Woerth, ministre. Voilà quelques mesures de cette réforme.

Certes, elle est difficile, mais il est plus difficile d’élaborer une réforme des retraites que de ne rien faire, comme la gauche ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP. – Les membres du groupe CRC-SPG se lèvent et brandissent des feuilles portant l’inscription : « 60 ans pour tous ».)

programme clair

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement, et concerne le programme CLAIR.

M. David Assouline. Il est très flou !

M. Jean-Louis Carrère. C’est une réussite ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Legendre. Depuis la rentrée 2010, le programme « collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite », dit « programme CLAIR », est expérimenté dans les établissements concentrant le plus de difficultés du point de vue de la réussite, du climat scolaire et, malheureusement, de la violence.

Il concerne en l’état 105 collèges et lycées et sera étendu à la rentrée 2011.

À la mesure de l’enjeu, les objectifs de ce programme sont ambitieux. Il s'agit tout à la fois d’améliorer sensiblement le climat scolaire, de renforcer la stabilité des équipes et de faciliter la réussite de chacun.

Aussi ce programme défend-il une approche de nature à répondre aux défis de l’enseignement secondaire. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jacques Mahéas. Et surtout à supprimer des postes !

M. Jacques Legendre. La volonté de replacer l’élève au cœur des préoccupations en est la composante essentielle, laquelle se réalise avec la définition du projet d’orientation de l’élève, en lien avec le parcours de découverte des métiers et des formations.

Le succès d’un tel projet dépend également, nous le savons, de la motivation, de l’implication et de la mobilisation de tous les acteurs de la communauté scolaire qui seront associés à l’élaboration de règles communes de vie.

M. Jean-Louis Carrère. Pas facile avec 16 000 suppressions de postes !

M. Jacques Legendre. Indispensable, l’évaluation du programme CLAIR implique que chacun des établissements qui le suit signe un contrat d’objectifs avec les autorités académiques. Un accompagnement par les corps d’inspection est ainsi prévu, avec la désignation par le recteur d’un inspecteur d’académie, inspecteur pédagogique régional référent pour chacun des établissements concernés.

Ce programme, pour répondre pleinement à sa vocation, suppose une plus grande autonomie des équipes pédagogiques, seules en mesure d’apporter à des problèmes spécifiques les réponses adaptées.

M. Didier Boulaud. Pour être clair, c’est clair !

M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer comment se concrétisera cette autonomie, dont la finalité est d’assurer la nécessaire réussite des élèves ? (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Didier Boulaud. Ça va faire plouf !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Legendre, pour permettre la réussite de chaque élève, le système éducatif français est confronté aujourd'hui…

Mme Christiane Demontès. Au manque de professeurs !

M. Luc Chatel, ministre. … à deux défis : celui de la personnalisation de notre enseignement, que nous devons être capables d’adapter à la diversité des élèves, et celui de l’autonomie. Pour relever ce dernier, il faut faire confiance à l’échelon local, c'est-à-dire à ceux qui connaissent le mieux les élèves.

La personnalisation et l’autonomie constituent les fils conducteurs des réformes que nous avons engagées. En primaire, une aide personnalisée est apportée, à raison de deux heures par semaine, aux élèves qui éprouvent des difficultés à lire ; au lycée, depuis la dernière rentrée, deux heures d’accompagnement personnalisé hebdomadaires sont offertes aux élèves, que l’on prend à part pour les faire bénéficier d’un enseignement sur mesure.

M. Jacques Mahéas. Ce n’est pas nouveau !

M. Luc Chatel, ministre. Toutefois, nous savons tous, et vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, que dans les établissements qui suscitent le plus d’inquiétudes et concentrent les difficultés, il faut faire davantage.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez diminué les subventions qui leur étaient versées de 50 % !

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons donc décidé, dans 105 collèges et lycées situés en zones d’éducation prioritaire, qui comptent des élèves en grande difficulté, d’aller plus loin et d’instituer, dans un cadre expérimental, une triple autonomie.

Premièrement, nous souhaitons mettre en place une autonomie pédagogique, à travers un projet véritablement adapté aux élèves présents dans ces établissements, un enseignement transdisciplinaire et des rythmes scolaires que nous voulons aménager au plus près des besoins.

Deuxièmement, nous entendons instituer une autonomie en matière de recrutement des personnels. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Didier Boulaud. Nous y voilà !

M. Luc Chatel, ministre. Le chef d’établissement pourra recruter ses personnels d’enseignement sur profil, c'est-à-dire sur la base du volontariat, et constituer ainsi ses équipes pédagogiques. (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)

M. Jacques Mahéas. Le démantèlement a commencé !

M. Luc Chatel, ministre. En effet, il est très important que ces professeurs soient volontaires et motivés, et qu’ils s’engagent à travailler dans ces établissements pendant une durée d’au moins cinq années.

Troisièmement, et enfin, nous voulons instituer une autonomie dans la gestion du climat des établissements, avec la nomination d’un préfet des études,… (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud. Voilà qui me rappelle des souvenirs !

M. Luc Chatel, ministre. … dont la tâche sera d’assurer le lien avec les familles et d’améliorer l’ambiance au sein des collèges et des lycées. Il sera chargé, auprès du chef d’établissement, de l’organisation et du suivi de la vie scolaire.

Vous le voyez, monsieur Legendre, nous mettons en place un dispositif expérimental, que nous évaluerons, et qui laisse une large place à l’autonomie.

Pour que notre système éducatif réussisse, nous devons lui donner de plus grandes marges de manœuvre et faire davantage confiance aux acteurs locaux. Tel est l’objet du programme CLAIR. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Didier Boulaud. C’est du clair-obscur !

réforme des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. François Fortassin. (M. Yvon Collin applaudit.)

M. François Fortassin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne les droits du Parlement, la Haute Assemblée et les collectivités territoriales, dont nous assurons par ailleurs, en qualité de sénateurs, la représentation, conformément à l’article 24 de la Constitution.

Dans le temps qui m’est imparti, je n’aborderai pas le fond, mais seulement la méthode du projet gouvernemental. Une réforme des collectivités peut-elle se faire contre le Sénat ? (Non ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Pourtant, les choses avaient bien commencé, avec la mission Belot, dont les membres s’étaient déplacés sur le terrain. Elle avait suscité quelques inquiétudes, certes,…

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. François Fortassin. … mais aussi beaucoup d’espérances.

M. René-Pierre Signé. L’espérance, c’est 2012 !

M. François Fortassin. Ses membres ont rédigé un rapport remarquable et quasi-consensuel. Pourtant, celui-ci a été foulé aux pieds,…

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. François Fortassin. … ce qui a suscité inquiétudes et déceptions.

Saisi d’un texte extravagant et surréaliste, le Sénat a toutefois essayé de l’améliorer par un travail en profondeur, guidé par un grand principe : sauvegarder l’autonomie de chaque strate de collectivités locales.

Le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale est très éloigné de la version votée au Sénat. Les plus dociles des sénateurs sont dépités, résignés (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.), ...

MM. René-Pierre Signé et Guy Fischer. Non ! Nous ne sommes pas résignés !

M. François Fortassin. … les autres sont particulièrement en colère !

En réalité, le Sénat est humilié et piétiné.

M. David Assouline. Comme à chaque fois !

M. François Fortassin. M. le Premier ministre connaît bien le fonctionnement du Sénat, tout comme vous, monsieur Mercier, aujourd'hui ministre chargé de l’aménagement du territoire.

M. René-Pierre Signé. Il a eu tort de devenir ministre !

M. François Fortassin. Monsieur le ministre, comme l’a souligné Yvon Collin dans un courrier auquel vous n’avez pas encore répondu,…

M. Yvon Collin. C’est vrai !

M. François Fortassin. … vous avez deux possibilités.

M. Jacques Legendre. La question !

M. François Fortassin. Soit vous provoquez la réunion d’une commission mixte paritaire, en laissant à une poignée de parlementaires triés sur le volet la possibilité de modifier une réforme qui touche en profondeur à l’organisation décentralisée de la République.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Fortassin !

M. François Fortassin. Soit vous laissez se poursuivre la navette parlementaire par une troisième lecture. Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et de lUnion centriste, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question,…

M. Jean-Pierre Raffarin. Cela ne suffira pas !

M. Michel Mercier, ministre. … qui est extrêmement intéressante, même si elle est parfois – mais si peu ! – excessive. (Sourires sur les travées de lUMP.)

Je rappellerai tout d’abord que cette réforme est particulièrement importante…

M. Jean-Pierre Sueur. Raison de plus pour faire une troisième lecture !

M. Michel Mercier, ministre. … et que le Gouvernement a veillé avec beaucoup de soin à ce qu’elle ne soit pas réalisée de façon précipitée.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle s’est faite contre les collectivités territoriales !

M. Michel Mercier, ministre. Il y a eu, tout d’abord, comme vous l’avez rappelé, le rapport Belot. Il y a eu également les travaux de la commission que présidait M. Balladur.

M. Didier Boulaud. Qu’est-ce qu’il y connaît, M. Balladur, aux collectivités territoriales ?

M. Michel Mercier, ministre. En outre, dès le premier semestre de 2008, le Gouvernement a pris soin de consulter toutes les associations d’élus.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elles sont toutes opposées à cette réforme !

M. Michel Mercier, ministre. Ensuite, le projet de loi a fait l’objet de deux lectures dans chaque chambre.

M. René-Pierre Signé. Quand vous étiez parlementaire, vous étiez contre !

M. Michel Mercier, ministre. Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que, depuis la dernière révision constitutionnelle, le Sénat se prononce non plus sur le texte du Gouvernement, mais sur celui de la commission.

M. Roland Courteau. On le savait !

Mme Catherine Tasca. Mais le Gouvernement dépose par la suite des amendements !

M. Michel Mercier, ministre. Les deux commissions concernées ont ainsi délibéré à quatre reprises.

Cette question a donc donné lieu à une très longue discussion. Près de trois cents heures de débats parlementaires ont été consacrées à la réforme des collectivités locales, ce qui est tout à fait exceptionnel.

Les deux assemblées ont d’ailleurs très bien travaillé, puisque de nombreuses dispositions ont été votées conformes par les deux chambres. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Guy Fischer. Non ! C’est anti-démocratique !

M. Michel Mercier, ministre. Je le rappelle, les points essentiels de la réforme, comme la création du conseiller territorial, ont été adoptés par l’Assemblée nationale et par le Sénat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est faux ! Vous êtes dans l’impasse, monsieur le ministre !

M. Michel Mercier, ministre. De même pour toutes les dispositions relatives à l’intercommunalité.

M. François Marc. Le Sénat a travaillé pour rien !

M. Michel Mercier, ministre. Il est vrai qu’il reste des points de désaccord importants,…

M. Michel Billout. Ce ne sont pas des détails !

M. Michel Mercier, ministre. … en particulier s'agissant du mode d’élection du conseiller territorial.

Je rappelle que l’Assemblée nationale a pris une position claire et que le Sénat, par trois votes successifs, a rejeté tous les modes de scrutin proposés. Il faudra maintenant, dans la suite de la discussion parlementaire, achever la mise au point de ces articles. (Applaudissements sur les travées de lUMP – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. David Assouline. Il n’a rien dit ! C’est une réponse de centriste ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

réforme des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

Monsieur le ministre, l’Assemblée nationale a adopté avant-hier le projet de loi portant réforme des collectivités territoriales.

De manière assez surprenante, en seulement quelques heures, elle a fait table rase du travail accompli par le Sénat pendant près de soixante heures de débats, au cours desquels nous avions fait en sorte de prendre en compte les attentes et les inquiétudes des élus locaux et des territoires dont nous sommes les représentants.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

M. Hervé Maurey. De l’avis unanime des élus locaux de toutes tendances, nous avions fait du bon travail.

Comment, dans ce contexte, ne pas s’étonner du mépris dont les députés ont fait preuve à l’égard de la Haute Assemblée ?

Comment ne pas s’étonner que les députés de l’opposition n’aient pas jugé bon de prendre part aux débats sur un texte aussi important, alors qu’ils ne se privent pas, sur le terrain, de susciter l’inquiétude des élus en diffusant des informations erronées ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et qu’ont fait les centristes au Parlement ?

M. Hervé Maurey. Au terme de cet examen par l’Assemblée nationale, le mode de scrutin du conseiller territorial, rejeté par le Sénat, a été rétabli, tout comme les articles concernant les compétences et les financements. Les dispositions relatives au cumul des mandats ont été supprimées. Le tableau des conseillers territoriaux que nous avions adopté a été largement revu. Les améliorations apportées en ce qui concerne la parité ont été supprimées. Le dispositif relatif aux communes nouvelles a été modifié, au point d’être de nouveau source d’inquiétude pour les communes.

Dans une interview parue dans le quotidien Le Figaro du 12 août 2010, le président du Sénat Gérard Larcher déclarait qu’il ne « souhaitait pas » que le Gouvernement convoque une commission mixte paritaire,…

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien ! Excellent !

M. Hervé Maurey. … préférant « que le processus parlementaire aille à son terme. » (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste, sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Aussi, monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il laisser le processus parlementaire aller à son terme ou convoquer une commission mixte paritaire ? Considérez-vous qu’un texte concernant les collectivités territoires peut être adopté par la seule Assemblée nationale ?

M. Didier Guillaume. Impossible !

M. Hervé Maurey. Dans ce cas, celui-ci ne serait-il pas, selon l’expression même du président du Sénat, quelque peu « fragile » ?

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Hervé Maurey. Ne serait-ce pas, comme nous le pensons, adresser un très mauvais signal aux collectivités locales que d’adopter un texte les concernant sans l’accord de l’assemblée chargée par la Constitution de les représenter ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est un très mauvais signal dans la perspective des élections sénatoriales !

M. Hervé Maurey. Enfin, monsieur le ministre, quelle initiative compte prendre le Gouvernement pour éviter que nous en arrivions à une telle situation ? (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. Yannick Bodin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, j’ai bien compris votre question,…

M. Roland Courteau. C’est déjà ça !

M. Michel Mercier, ministre. … d’autant plus que vous avez activement participé au débat sur ce texte au Sénat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le texte que vous avez fait voter !

M. Michel Mercier, ministre. Je le répète, un véritable débat a été mené, qui a permis de progresser et de dégager peu à peu certains consensus entre les deux chambres. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Pour ce qui concerne le conseiller territorial, qui constitue la pierre angulaire de la réforme,…

M. Didier Boulaud. Mais ce n’est pas la pierre philosophale !

M. Michel Mercier, ministre. … je rappelle que, désormais, le même élu siégera au conseil général et au conseil régional, ce qui constitue naturellement un élément tout à fait nouveau.

M. Jacques Mahéas. Ce n’est pas la question !

M. Michel Mercier, ministre. C’est ma réponse !

Ensuite, les deux chambres ont réalisé un travail de fond sur toutes les questions relatives à l’intercommunalité. Plus de trois cents heures de débats parlementaires ont été consacrées à ce sujet.

M. Pierre Hérisson. Très bien !

M. Michel Mercier, ministre. Le Gouvernement souhaite parvenir à un accord entre les deux assemblées. Celui-ci peut être dégagé dans les formes prévues par la Constitution, et c’est ce qui va arriver.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est une impasse !

M. Michel Mercier, ministre. Il appartiendra donc au Premier ministre de faire connaître la position du Gouvernement au président du Sénat et au président de l’Assemblée nationale sur ce point.

M. David Assouline. Arrêtez le supplice !

M. Michel Mercier, ministre. Le Gouvernement mènera jusqu’au bout le dialogue. Il souhaite qu’un accord entre les deux chambres se dégage sur ce texte …

M. François Marc. C’est un passage en force !

M. Michel Mercier, ministre. … et que le projet de loi de réforme des collectivités territoriales soit voté par l’Assemblée nationale et par le Sénat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il ne sera pas voté !

M. Michel Mercier, ministre. Le Gouvernement ne souhaite pas qu’une assemblée impose sa vision à l’autre, et fera tout ce qui est en son pouvoir pour que les deux chambres parviennent à un accord. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

projet de loi de finances pour 2011

M. le président. La parole est à M. André Vantomme.

M. André Vantomme. Ma question s’adresse à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

Voilà bientôt une décennie que la droite est au pouvoir. Aujourd’hui, 13 % des ménages français vivent sous le seuil de pauvreté, et la situation ne s’améliore pas.

Votre politique relative au logement, secteur de compétence de l’État, est à nos yeux caractérisée par des actes répréhensibles successifs : braquage des crédits immobiliers délestés d’une bonne partie de leurs moyens, hold-up sur les ressources du 1 % logement, racket pour trois ans pratiqué sur les occupants des logements d’HLM astreints, par l’intermédiaire des bailleurs sociaux, à verser à l’État 340 millions d’euros, soit 80 euros par an et par locataire.

M. David Assouline. Quel racket !

M. André Vantomme. Vous en conviendrez avec nous, monsieur le ministre, la politique que vous et votre majorité menez n’inclut pas d’actes positifs pour résoudre la crise du logement. Elle est plutôt le signe évident de la politique d’un État impécunieux, qui n’a plus le sou à consacrer à l’une de ses missions pourtant essentielle : faire vivre le droit au logement.

M. Alain Gournac. Les 35 heures !

M. Charles Revet. C’est vous qui avez vidé les caisses !

M. André Vantomme. Vous nous soutiendrez le contraire, mais les résultats sont là, marqués par la dégringolade de la construction depuis plusieurs années.

Pourtant, aux dires des experts, il faudrait construire 500 000 logements nouveaux par an pour espérer sortir de la crise d’ici à cinq ans.

On vous reverra bientôt, à l’approche des fêtes de fin d’année…

M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas la fête pour tout le monde !

M. André Vantomme. … et des froids hivernaux, vous apitoyer sur le sort de celles et ceux qui restent sans toit et qu’on veut bien héberger, pour la nuit seulement, dans des structures dites « adaptées ».

M. André Vantomme. L’examen attentif du budget du logement que vous présenterez devant le Parlement abondera dans mon sens : pas de moyens suffisants, pas d’ambition, mais des artifices et des faux-semblants.

Ainsi va la France sous le règne de Nicolas ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Raffarin. Quelle familiarité !

M. André Vantomme. Les riches continueront d’être abrités grâce au bouclier fiscal.

M. le président. Veuillez poser votre question, cher collègue !

M. André Vantomme. Des pauvres, trop nombreux, resteront sans toit pour s’abriter. Et si par chance les personnes démunies en ont un, elles devront consacrer toujours plus de leurs maigres ressources au financement de leur logement.

M. Alain Gournac. C’est une litanie ! La question !

M. André Vantomme. Monsieur le ministre, quand votre politique fera-t-elle preuve de davantage d’équité et d’humanisme à l’égard des plus précaires ? Quand prendrez-vous la mesure de l’indécence qu’il y a à maintenir le bouclier fiscal quand on demande toujours plus aux plus modestes ?

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. André Vantomme. Les locataires, les bailleurs sociaux, les salariés et les entreprises du bâtiment écouteront attentivement la réponse que vous allez me faire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le sénateur, vous vous demandez quand une véritable politique du logement sera menée. Vous obtiendrez la réponse à cette question lorsque vous étudierez attentivement le projet de loi de finances pour 2011, lequel s’inscrit dans la continuité de tous les budgets préparés au cours des années précédentes. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. David Assouline. Personne n’y croit !

M. François Baroin, ministre. Retenez un chiffre : au cours des quinze dernières années, le soutien apporté à ce secteur dans le cadre des politiques publiques de l’État représentait, bon an mal an, entre 800 millions à 1 milliard d’euros ; cette année, l’effort sera porté à 2,6 milliards d’euros. De quelque façon que vous abordiez le problème, ce chiffre atteste que le Gouvernement soutient activement la construction de logements.

Par ailleurs, vous m’interrogez sur les mesures relatives aux HLM. Considérer que les bailleurs sociaux sont propriétaires de l’argent destiné à l’amélioration des logements sociaux à destination des personnes qui en ont le plus besoin est une façon très orientée d’envisager la question, ce qui souligne votre engagement politique.

M. David Assouline. Vous n’êtes pas engagé, vous ?

M. François Baroin, ministre. Que faites-vous des 10 milliards d’euros d’aides fiscales, c’est-à-dire des dépenses de l’État sous forme de prêt bonifié de la Caisse des dépôts et consignations, d’exonération sur les sociétés ou sur les taxes foncières ? Que faites-vous des 5 milliards d’euros d’aide personnalisée au logement qui permettent de réduire d’un tiers les loyers que les bailleurs sociaux proposent à leurs locataires ?

Le secrétaire d'État chargé du logement, M. Apparu, défend avec courage à l’heure actuelle une mesure. Je dispose de tous les arguments me permettant de vous démontrer que l’intention du Gouvernement est de mobiliser la trésorerie dormante, soit 6,5 milliards d’euros, des bailleurs sociaux …

M. François Baroin, ministre. … aux fins prioritaires, d’une part, de promouvoir le renouvellement urbain via le financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, et, d’autre part, de construire des logements locatifs à vocation sociale.

La finalité est de permettre aux bailleurs sociaux, qui ont pour mission essentielle, je le rappelle, d’accompagner la politique immobilière et sociale des collectivités territoriales ou de l’État, …

M. François Baroin, ministre. … d’atteindre un objectif simple : offrir des loyers modérés aux personnes qui ne peuvent pas se loger ailleurs que dans une HLM.

Pour conclure, vous ne pourrez pas faire campagne dans les villes, accompagnés de quelques bailleurs sociaux, en clamant que les loyers vont augmenter à cause de l’attitude du Gouvernement. Car, justement, le Gouvernement proposera au Parlement lors du prochain débat budgétaire de bloquer l’augmentation des loyers de façon obligatoire et non, comme les années passées, de manière incitative.

M. Jacques Mahéas. Ce n’est pas vrai !

M. François Baroin, ministre. Ne vous en vous déplaise, c’est la vérité ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Claude Bérit-Débat. C’est scandaleux !

convention sur le maintien des services publics en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Bernard Fournier. Ma question s'adresse à M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

M. René-Pierre Signé. Le revoilà !

M. Bernard Fournier. Monsieur le ministre, à l’issue des Assises des territoires ruraux, neuf des principaux opérateurs publics français se sont réunis pour signer avec l’État une convention de partenariat des services publics, dont l’ambition est d’accompagner le développement des territoires ruraux dans lesquels la population commence à croître.

Cette augmentation est en particulier due aux ménages actifs qui ont quitté les grandes agglomérations pour s’installer dans les zones rurales où la pression foncière est moins forte. À telle enseigne, d’ailleurs, qu’une étude de l’INSEE réalisée entre 2002 et 2007 a montré que c’est dans les petites communes de l’espace rural que les revenus augmentent le plus vite. Cependant, les revenus médians en campagne restent inférieurs à ceux des villes.

On recense aujourd’hui en France 30 644 communes rurales, lesquelles couvrent 82 % du territoire et regroupent 25 % de la population. Alors qu’un habitant sur quatre vit dans une commune rurale, on n’y compte qu’un établissement commercial sur six et un salarié sur dix. Ainsi, la valorisation des territoires ruraux, notamment les plus oubliés, les moins bien desservis, garde tout son sens.

Il s’agit, comme l’a souhaité le Président de la République lors de son discours à Morée au mois de février dernier,…

M. Didier Boulaud. Un de plus ! On n’y fait même plus attention !

M. Bernard Fournier. … de permettre à nos concitoyens vivant hors des villes de bénéficier du plus grand nombre possible de services publics en mutualisant les moyens des grands opérateurs.

M. Jean-Louis Carrère. Péréquation !

M. Guy Fischer. En même temps on leur tord le cou !

M. Bernard Fournier. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que l’expérimentation de ce projet, puis sa généralisation, fera l’objet d’un contrat local. Par ailleurs, vous avez souligné que les préfets des départements concernés détermineront, avec les opérateurs et les collectivités locales volontaires, les actions devant être menées et les lieux où doivent être améliorés les services publics.

Monsieur le ministre, quels sont les critères retenus pour mener à bien cette expérimentation, dont nous nous félicitons ? (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. René-Pierre Signé. Il y en a au moins un de content !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur Fournier, depuis quelques années, nous assistons dans notre pays au renouveau des territoires ruraux.

M. David Assouline. Il n’est pas de votre fait !

M. Michel Mercier, ministre. Ce n’est pas grâce à vous non plus !

Il s’agit d’un phénomène nouveau. Pendant très longtemps, nous avons accompagné le déclin de ces territoires. Il s’agit maintenant d’organiser leur renouveau.

M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas vrai, c’est périurbain !

M. Michel Mercier, ministre. Les chiffres témoignent de ce renouveau des territoires, comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur Fournier.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Heureux de le savoir, nous ne nous en étions pas aperçus !

M. Michel Mercier, ministre. Les derniers recensements ont montré que, globalement, malgré des situations contrastées suivant les départements, les territoires ruraux ont enregistré une augmentation de leur population de 3,7 %, …

M. Michel Mercier, ministre. … identique à celle des territoires urbains.

Il faut donc répondre à l’attente des habitants de ces territoires. Tel a été l’objet des Assises des territoires ruraux et du Comité interministériel pour l’aménagement et le développement du territoire, le CIADT, que le Premier ministre a présidé au mois de mai dernier.

Ce matin, avec Henri de Raincourt et Brice Hortefeux, j’ai accompagné le Président de la République dans l’Yonne, à Montillot, …

M. Guy Fischer. Quel hasard !

M. Michel Mercier, ministre. … pour saluer le renouveau des territoires ruraux.

M. Didier Boulaud. Il a fait un discours j’espère ?

M. Michel Mercier, ministre. La semaine dernière a été mis au point un protocole avec neuf grands opérateurs de services au public afin d’expérimenter dans vingt-deux départements métropolitains et un département d’outre-mer la mutualisation des services. La Caisse des dépôts et consignations et les points d’information multiservices sont associés à cette expérience. En fonction des résultats de celle-ci, nous envisageons de généraliser rapidement la mutualisation à l’ensemble des territoires ruraux.

Pour conduire cette expérimentation, l’État a dégagé des moyens financiers en provenance du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire à hauteur de 15 millions d’euros. Chaque opérateur apportera également sa contribution financière.

Les préfets, dès la semaine prochaine, prendront l’attache des élus locaux et des représentants des opérateurs dans les départements pour mettre au point ces contrats locaux d’expérimentation et préparer leur généralisation. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de l’Union centriste.)

stages étudiants

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Ma question s’adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

L’an passé, lors de l’examen de la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, en adoptant l’obligation de rémunérer les stages de plus de deux mois, nous avons voulu protéger les étudiants des abus qui permettaient à certaines entreprises d’utiliser une main-d’œuvre de haut niveau gratuite et consentante.

La loi évoquait la notion de stages intégrés dans le cursus universitaire et la publication d’un décret.

Immédiatement, certaines universités, par trop prudentes, ont refusé de délivrer des conventions dans l’attente de cette publication.

De ce fait, plusieurs centaines d’étudiants, si ce n’est un millier, ont été privés d’une expérience dont ils ont besoin pour obtenir leur diplôme et pour préparer leur insertion dans la vie professionnelle.

Mme Catherine Procaccia. Un groupe de 4 000 étudiants s’est ainsi spontanément formé sur un réseau social pour attirer notre attention. Dès le mois de janvier dernier, j’ai alerté Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche de la situation. Même si elle a très vite écrit aux présidents des universités, de nombreux étudiants ont perdu le stage qu’ils avaient eu tant de mal à obtenir dans une entreprise, faute d’avoir fourni à temps la fameuse convention.

M. David Assouline. Grande question d’actualité !

Mme Catherine Procaccia. Le décret publié le 26 août dernier et applicable dès cette rentrée me paraissait clair – j’ai présidé l’ancienne commission spéciale sur la formation professionnelle –, mais il donne déjà lieu à des interprétations différentes selon les universités.

Mme Catherine Procaccia. Des étudiants m’ont fait part de cas concrets. Ces refus répétés à la délivrance d’une convention leur donnent le sentiment d’être vraiment pénalisés, car les stages demeurent pour eux le seul véritable moyen de se préparer à leur entrée dans le monde professionnel lorsqu’ils font des études longues.

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le ministre, je vous demande aujourd’hui de bien vouloir préciser dans quelles conditions les étudiants de licence, de master 1 ou de master 2 peuvent effectuer un stage d’études, qu’il soit obligatoire ou optionnel, comme le prévoit le décret.

Quel recours ont-ils si leur université leur refuse une convention pour un stage intégré dans le cursus optionnel, parfois demandé par l’un de leurs professeurs, particulièrement s’il s’agit d’un stage de réorientation ?

Enfin, que comptez-vous faire à l’encontre des officines qui, profitant du flou de la loi, abusent de la détresse des étudiants en vendant des conventions de stage ? (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelles sont ces officines… patronales ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir excuser Valérie Pécresse, qui n’a pas pu se libérer cet après-midi pour répondre à votre question. Elle m’a chargé de le faire à sa place.

Vous connaissez l’importance que le Gouvernement attache aux stages, quel que soit le cursus, car ils sont un élément absolument irremplaçable de la formation, mais aussi de l’insertion professionnelle des jeunes diplômés de notre pays.

M. Didier Boulaud. On a remarqué que vous y teniez beaucoup, surtout dans les IUFM !

M. Luc Chatel, ministre. Il est vrai que Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche a été saisie par plusieurs étudiants auxquels leur université avait refusé le conventionnement des stages qu’ils souhaitaient effectuer pour compléter leur formation, sous prétexte que ces stages étaient facultatifs. Ces universités s’appuieraient sur le décret du 25 août 2010, que vous avez cité, madame Procaccia, qui interdit effectivement les stages hors cursus, pour refuser tout stage qui ne serait pas qualifié d’obligatoire dans les maquettes de diplôme.

Je vous le dis très clairement, madame le sénateur, cette interprétation des textes en vigueur est erronée. L’application de ces derniers ne doit en aucun cas conduire à restreindre l’accès aux stages des étudiants volontaires qui ont vraiment besoin de ces stages pour élargir leurs compétences et approfondir leur formation.

Naturellement, ces stages doivent être encadrés, faire l’objet d’une convention, d’un échange entre l’université et l’entreprise, de façon qu’ils puissent être valorisés dans le parcours des étudiants. Une circulaire ayant pour objet de rappeler tous ces éléments est donc en cours d’élaboration au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ; Valérie Pécresse en a d’ailleurs déjà informé les présidents d’université.

Vous avez également appelé l’attention de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, madame le sénateur, sur la question des officines : leur existence est absolument inacceptable ! C’est d’ailleurs pour lutter contre de telles dérives, vous vous en souvenez, que nous avons décidé d’interdire les stages hors cursus, dans le cadre de la loi que vous avez mentionnée, parce que ces pratiques sont scandaleuses : elles sont contraires aux dispositions du code du travail et doivent être combattues sans relâche. Valérie Pécresse a d’ailleurs rappelé à plusieurs reprises la réglementation en la matière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous souvenez d’abord que le Gouvernement s’est battu pour que les étudiants obtiennent une juste rétribution sous forme d’une gratification, ce qui n’était pas systématiquement le cas. Vous vous souvenez aussi que le Gouvernement s’est battu contre des pratiques qui n’avaient rien à voir avec ces stages…

M. Didier Boulaud. C’est un gouvernement guerrier !

M. Luc Chatel, ministre. Soyez sûre, madame Procaccia, que Valérie Pécresse veillera à ce que tous les étudiants inscrits à ces cursus bénéficient effectivement de stages, qu’ils soient obligatoires ou non ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

égalité hommes-femmes

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Isabelle Debré. Ma question s’adresse à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Monsieur le ministre, alors que notre assemblée s’apprête à débattre, la semaine prochaine, du projet de loi portant réforme des retraites, la condition des femmes, notamment la place qui leur est faite au sein du monde du travail, est l’objet de débats. En la matière, la majorité a, de manière constante, affirmé sa volonté de répondre aux inquiétudes, justifiées, qui sont exprimées à ce sujet.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela ne se voit pas !

Mme Isabelle Debré. Exposées, plus que la moyenne, au chômage, à la précarité et aux inégalités de traitement, les femmes doivent faire face à un grand nombre de difficultés spécifiques qu’aucun des gouvernements en place depuis 2002 n’a négligées.

Mme Isabelle Debré. C’est ainsi que nous avons voté, en 2006, la loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes définissant le cadre qui doit nous conduire à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, ainsi que les mesures tendant à remédier aux inégalités constatées.

M. Guy Fischer. Elle a eu vraiment peu de portée !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n’impose aucune contrainte !

Mme Isabelle Debré. De ce point de vue, il apparaît clairement que la droite n’a eu de cesse de développer les outils et les procédures de nature à répondre au défi majeur que représente l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, alors que la gauche demeure dans l’incantatoire ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Charles Revet. Comme toujours !

M. Didier Boulaud. Il vaut mieux entendre ça qu’être sourd !

Mme Isabelle Debré. L’amélioration de la situation de millions de femmes ne saurait se contenter de slogans.

M. Didier Boulaud. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois !

Mme Isabelle Debré. Ayant à cœur de nous adresser à toutes les femmes, quelle que soit leur condition, nous avons souhaité qu’elles puissent investir en nombre les conseils d’administration.

Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelles mesures complémentaires…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Des mesures, tout court !

Mme Isabelle Debré. … le Gouvernement entend promouvoir pour améliorer les dispositifs en place et pour assurer l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes en matière de politique salariale, notamment ? (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est au bon cœur des patrons !

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord d’exprimer ma satisfaction quant au travail réalisé pendant ces deux dernières journées avec la commission des affaires sociales du Sénat, sous l’autorité de sa présidente Muguette Dini et du rapporteur Dominique Leclerc, que je salue. Dans ce cadre, vous nous avez présenté des propositions, madame la sénatrice.

Des avancées très importantes ont été réalisées.

M. Éric Woerth, ministre. Grâce à ces avancées, grâce aux amendements adoptés par la commission, mais aussi, j’imagine, monsieur le président, grâce à ceux qui le seront en séance publique, la semaine prochaine et les semaines suivantes, ce projet de loi portant réforme des retraites sortira du Sénat considérablement amélioré.

Nous avons pu faire progresser la question des handicapés, des chômeurs, notamment des seniors, et nombre d’autres sujets.

Mme Raymonde Le Texier. Chômeurs, femmes, handicapés, même combat !

M. Éric Woerth, ministre. D’autres questions restent à traiter, vous avez raison, madame la sénatrice. Mais, pour cela, il faut partir d’une appréciation réaliste de la situation et non de descriptions fausses. En effet, il est difficile d’apporter une vraie réponse si la situation n’est pas bien décrite.

M. Didier Boulaud. C’est votre problème !

M. Éric Woerth, ministre. La situation des femmes préoccupe bien évidemment notre majorité, mais aussi, bien sûr, l’opposition. Nous devons d’abord considérer que l’enjeu n’est pas aujourd’hui une question de trimestres. Cela le sera peut-être encore pendant les quelques années qui viennent, les femmes nées autour de 1956 auront le même nombre de trimestres que les hommes, …

Mme Nicole Bricq. Elles vont travailler jusqu’à quatre-vingts ans !

M. Éric Woerth, ministre. … parce que de multiples dispositifs ont été votés par les majorités qui se sont succédé, notamment la bonification pour les enfants ou la prise en compte du congé parental dans le calcul de la pension.

Mme Odette Terrade. Vous oubliez que les femmes touchent des salaires inférieurs !

M. Éric Woerth, ministre. Les femmes nées après 1956, au fil du temps, cumuleront plus de trimestres que les hommes. Les périodes hachées, les carrières écourtées ou séquencées à cause des enfants ou de charges familiales supplémentaires sont donc déjà prises en compte.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Précarité généralisée pour les femmes !

M. Éric Woerth, ministre. Pour ce qui concerne le travail à temps partiel, il concerne plus de femmes que d’hommes : cette situation est parfois voulue, mais elle est aussi quelquefois subie, vous le savez très bien, madame Debré.

M. Guy Fischer. Enfin, il le reconnaît !

M. Éric Woerth, ministre. Il suffit de travailler à mi-temps et de percevoir la moitié d’un SMIC pour valider une année entière ; le temps partiel est donc déjà intégré dans les mécanismes de solidarité de notre système de retraite, je tenais à le rappeler parce que cela n’est pas suffisamment su.

Nous devrons peut-être aller plus loin et, notamment, essayer de régler ce problème majeur et scandaleux dans la société française du xxie siècle, l’inégalité salariale entre les femmes et les hommes, car c’est elle qui est à l’origine des inégalités en termes de retraites. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

fonctionnement de la justice

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Sueur. Ma question s’adresse à Mme le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Madame le garde des sceaux, il paraît indispensable qu’un juge d’instruction indépendant soit nommé dans l’affaire Bettencourt. J’ai pris connaissance de vos déclarations de mardi dernier devant l’Assemblée nationale. Si j’ai bien compris, vous avez dit, en substance, que vous n’y pouviez rien, que vous étiez spectatrice et que vous regardiez passer les trains ! (Sourires.)

Nous ne partageons pas cette conception de votre rôle, madame la ministre d’État : du moment qu’un juge d’instruction indépendant n’est pas désigné, la porte est ouverte à toutes les suspicions, dans une affaire qui implique ou pourrait impliquer des personnages éminents.

Madame le garde des sceaux, M. le procureur Courroye refuse la nomination d’un juge d’instruction. M. le procureur général de Versailles la refuse aussi. Une seule personne a donc la possibilité d’agir : vous.

Nous ne vous demandons pas d’intervenir dans une affaire en cours. Compte tenu de vos fonctions, nous vous demandons de garantir, ès qualités, l’indépendance de la justice dans une affaire en cours. À cet égard, fait sans précédent, M. Jean-Louis Nadal qui, vous le savez, est le premier magistrat du parquet dans ce pays,…

M. Jean-Pierre Sueur. … puisqu’il est procureur général près la Cour de cassation, a déclaré qu’il était nécessaire de désigner un juge d’instruction, bien sûr indépendant, afin d’assurer le respect des droits de la défense dont vous êtes aussi la garante.

Madame le ministre d’État, ma question est double mais très simple. Premièrement, quelles conclusions tirez-vous de la déclaration de M. Jean-Louis Nadal ? Deuxièmement, allez-vous enfin vous exprimer clairement sur ce sujet et prendre les initiatives nécessaires, ou qui peuvent le devenir ? Vous pouvez faire en sorte qu’un juge d’instruction indépendant se voie confier ce dossier : nous le devons – vous le devez ! – à l’indépendance de la justice, pour faire la clarté dans cette affaire très sensible.

Merci de nous répondre sur le fond, madame le garde des sceaux, car nous espérons que vous renoncerez à la langue de bois que nous avons entendue à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Pierre Raffarin. Ce n’est pas très courtois !

M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur Sueur, je n’ai pas l’habitude de manier la langue de bois (M. Didier Boulaud s’exclame.), contrairement à ce que vous soutenez. Connaissant votre honnêteté intellectuelle, permettez-moi d’observer que, lorsque l’on cite le procureur général près la Cour de cassation, il faut le citer en entier et de façon précise.

M. Alain Gournac. Il faut tout lire !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Premièrement, le procureur général près la Cour de cassation a estimé qu’il n’y avait pas lieu, en l’état du dossier, de saisir la Cour de justice de la République, comme certains l’avaient demandé. Je conçois que cette position déçoive, mais il faut faire ce rappel.

M. Alain Gournac. Et voilà !

M. Didier Boulaud. Ce n’est pas l’objet de la question !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Deuxièmement, M. Nadal a souhaité que l’enquête continue. C’est la moindre des choses, et tel est bien le cas, nous le voyons.

Troisièmement, le procureur général a émis un avis.

MM. Jean-Pierre Sueur et Didier Boulaud. Une recommandation !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Il a donné son avis sur le mode procédural le mieux à même, selon lui, de préserver les droits de la défense.

Cela dit, monsieur le sénateur, je dois aussi rappeler un certain nombre de règles. Le parquet peut, dans tous les cas, décider d’ouvrir une instruction judiciaire, comme il peut choisir de poursuivre lui-même l’enquête. Ce choix lui appartient…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il a fait un mauvais choix !

M. René-Pierre Signé. Vous pouvez intervenir !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. … et il ne saurait en aucun cas faire l’objet de pressions politiciennes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Je vous le dis très clairement – j’avais pensé l’avoir fait devant l’Assemblée nationale –, je ne vois pas ce qui, en l’état, justifierait que quiconque s’immisçât dans les enquêtes en cours.

M. Jean-Pierre Sueur. Si, l’indépendance de la justice et la garantie des droits de la défense !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. D’ailleurs, je note que ce serait une totale nouveauté, monsieur Sueur. Depuis dix ans, le ministre de la justice n’est jamais intervenu dans une enquête, et Dieu sait si des enquêtes impliquant de hautes personnalités ont souvent eu lieu !

Quant à moi, je respecte l’indépendance de la justice, monsieur Sueur, et j’ai beaucoup trop de considération pour les magistrats pour m’immiscer dans les procédures.

M. Jacques Mahéas. Pourtant, vous êtes la courroie de transmission !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Si j’ai bien compris vos propos, monsieur Sueur, quelque chose m’étonne : vous me demandez, pour garantir l’indépendance des procureurs…

M. Jean-Pierre Sueur. Non, pour garantir les droits de la défense !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. … de leur donner des ordres ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Cela me paraît pour le moins étrange, et telle n’est pas ma conception.

M. Jacques Mahéas. Mme Dati n’était pas du même avis !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Vous ne pouvez à la fois louer l’indépendance des magistrats lorsque leur décision vous convient et la critiquer dans le cas contraire. Ce n’est pas ainsi que je conçois l’indépendance !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je crois que c’est faire insulte aux magistrats du parquet que d’agir comme vous le faites : c’est peut-être votre conception de la justice, mais ce n’est certainement pas la mienne ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Didier Boulaud. Parlez-nous donc des droits de la défense !

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Guy Fischer.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Article 12 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article 12

Nouvelle organisation du marché de l'électricité

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, portant nouvelle organisation du marché de l’électricité.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 12, aux explications de vote sur les amendements identiques nos 210 et 227.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Article additionnel après l'article 12

Article 12 (suite)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. S’agissant des amendements identiques nos 210 et 227, je tiens, mes chers collègues, à vous faire part d’un changement important.

Je vous rappelle que la commission avait émis un avis défavorable sur ces deux amendements. En effet, au mois de juillet dernier, elle avait décidé de supprimer le prélèvement de 2 % par les redevables des taxes locales sur l’électricité, dans le cas où la taxe communale est perçue par un syndicat d’électricité pratiquant un tarif unique sur l’ensemble de son territoire.

Néanmoins, j’ai bien entendu les arguments du Gouvernement portant sur les risques d’un point de vue constitutionnel et communautaire de cette disposition. Par conséquent, la commission est maintenant favorable à ces deux amendements de suppression.

Cette prise de position nécessite, par cohérence et dans un souci de compromis, de revenir sur certaines des dispositions que nous avons adoptées, ce matin, sur ce même article 12. C’est pourquoi il semble nécessaire à la commission, une fois que tous les articles auront été votés, de demander une seconde délibération au cours de laquelle elle vous soumettra un nouvel amendement comportant deux volets.

Il s’agira en premier lieu de clarifier les dispositions intégrées à la suite du vote du fameux amendement n° 105 rectifié, sur lequel ses auteurs, notamment notre collègue Michel Sergent, et le Gouvernement ont trouvé un compromis. Cet amendement, tel qu’il a été adopté, conduirait à supprimer totalement les prélèvements en 2011, puis à appliquer un taux de 2 % en 2012. Cela ne correspond pas à ce que souhaite la commission.

L’amendement qui, si le Gouvernement l’accepte, sera examiné en seconde délibération visera à fixer précisément, dans le cas des départements et des communes, un taux de prélèvement de 2 % en 2011 et de 1,5 % en 2012.

En second lieu, une solution de compromis sera adoptée simultanément pour les syndicats d’électricité. Plutôt que de supprimer le taux de prélèvement, ce qui poserait des problèmes constitutionnels et communautaires, l’amendement tendra à l’établir à 2 % en 2011 et à 1 % en 2012.

Afin de tenir compte des remarques du Gouvernement, des souhaits – c’était logique ! – de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, la FNCCR, et du compromis trouvé entre le Gouvernement et les auteurs de l’amendement n° 105 rectifié, la commission a donc changé de position et vous demande, mes chers collègues, d’adopter les deux amendements identiques nos 210 et 227.

M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour explication de vote.

M. Michel Sergent. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous simplement nous confirmer les taux que vous avez retenus ? Ce matin, nous évoquions des taux de 2 % et 1,5 %. Sauf erreur de ma part, vous venez d’avancer les taux de 2 % et 1 %.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je ne reviens pas sur le compromis trouvé ce matin, monsieur Sergent. Les taux retenus sont bien 2 % et 1,5 %.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 210 et 227.

(Les amendements sont adoptés à l'unanimité des présents.)

M. le président. L'amendement n° 236, présenté par MM. Dubois, Deneux, Merceron et Amoudry, est ainsi libellé :

Alinéa 140, première phrase

Remplacer les mots :

au plus tard le 20 du mois suivant le trimestre concerné

par les mots :

dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné

La parole est à M. Jean-Claude Merceron.

M. Jean-Claude Merceron. Cet amendement a pour objet d'harmoniser le versement des taxes, indépendamment de la puissance souscrite, qui fixe le type de la taxe, en l'alignant sur ce qui est prévu pour les versements aux collectivités locales pour la taxe douanière.

Une telle mesure facilitera l'automatisation des traitements, étant donné les délais réduits pour la mise en œuvre opérationnelle chez les opérateurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cette simplification est une excellente idée. La commission émet un avis est favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 236.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 242, présenté par MM. Merceron, Deneux, Dubois et Amoudry, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 143

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

... - Le nouveau régime s'applique aux opérations pour lesquelles la facture est émise, à compter du 1er janvier 2011, quelle que soit la période de facturation.

Pour les livraisons effectuées pour le compte de consommateurs dont la date de facturation est antérieure au 1er janvier de l’année de mise en œuvre, l’ancien régime s’applique quelle que soit la période de facturation.

La parole est à M. Jean-Claude Merceron.

M. Jean-Claude Merceron. Il convient de prévoir les modalités de transition permettant le passage de l’ancien au nouveau régime d’imposition.

Il est utile que les consommateurs constatent sans ambigüité que le nouveau régime s'appliquera aux factures émises par les fournisseurs à compter du 1er janvier 2011, par équivalence avec les règles prévues par le code général des impôts en matière de TVA pour les livraisons de biens meubles corporels donnant lieu à l'établissement de décomptes ou à des encaissements successifs.

Les factures émises par les fournisseurs jusqu'au 31 décembre 2010 inclus feront application des règles prévues par l'ancien régime.

Cette précision permettra une parfaite compréhension de la date d'entrée en vigueur des nouvelles règles par les consommateurs et une sécurisation de la gestion de la facturation pour les fournisseurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement est contraire au principe d’égalité de traitement entre les consommateurs. Son adoption conduirait effectivement à appliquer une règle différente entre des consommateurs livrés sur une même période, mais dont la facturation, devenue le fait générateur, intervient à des moments différents. C’est pourquoi je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer cet amendement. Sans cela, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette solution, qui soulève des difficultés juridiques, malgré une apparente simplicité, et souhaite, monsieur le sénateur, que vous retiriez votre amendement.

M. le président. Monsieur Merceron, l'amendement n° 242 est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Merceron. Cette disposition se voulait simplificatrice. Si, en définitive, elle complique la situation, j’accepte de retirer mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 242 est retiré.

Je mets aux voix l'article 12, modifié.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
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Article 13

Article additionnel après l'article 12

M. le président. L'amendement n° 106, présenté par M. Sergent, Mme Bricq, MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport effectuant le bilan de l'application de l'article 33 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Sur l’initiative de notre collègue Michel Sergent, qui intervenait au nom du groupe socialiste, un amendement avait été adopté au Sénat lors de l’examen de la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie. Cet amendement, qui est devenu l’article 33 de la loi, avait pour objet de consolider la coopération intercommunale en matière de distribution de l’énergie, en prévoyant la création d’une seule autorité concédante départementale ou supra-départementale.

Malgré le délai laissé aux autorités organisatrices pour répondre à cette instigation, délai fixé par la loi à la fin de l’année 2007, et malgré la mission confiée aux préfets d’engager la procédure si l’échéance était dépassée, nous constatons que de nombreux départements disposent encore aujourd’hui de plusieurs autorités organisatrices sur leur territoire, au détriment parfois de l’efficacité du service public. Seuls quarante-cinq départements, environ, disposeraient d’une entité unique depuis 2006.

Nous n’avons jamais obtenu d’évaluation de cette mesure de la part du Gouvernement.

Je rappelle que notre amendement instaurant l’article 33 de la loi du 7 décembre 2006 avait recueilli le vote positif de certains de nos collègues de la majorité. Nous nous étonnons de l’inaction du Gouvernement en matière de rationalisation de la carte intercommunale pour la gestion de la compétence « électricité ». Cette inertie, à nos yeux, contraste quelque peu avec la vigueur dont fait preuve le Gouvernement lorsqu’il fustige depuis plusieurs mois la hausse des dépenses locales de fonctionnement. Actuellement, 1 165 syndicats coexistent et se partagent cette compétence.

Quatre ans après l’adoption de notre mesure, nous demandons, par cet amendement n° 106, un rapport d’évaluation sur l’effort de clarification opéré, soit volontairement par les communes, soit par l’État.

Nous souhaitons également attirer l’attention du Gouvernement sur les obstacles à ce regroupement intercommunal que peut engendrer le manque de clarification dans la détermination des régimes d’électrification – régime dit « urbain » ou régime d’électrification rurale. Ceux-ci déterminent notamment qui du fournisseur ou de l’autorité organisatrice est compétent en matière de maîtrise d’ouvrage des travaux d’entretien des réseaux d’électricité.

Or, le classement des communes date le plus souvent du début des années soixante-dix et ne relève aujourd’hui d’aucune rationalité. C’est le cas pour mon département, mais je ne pense qu’il y en a d’autres. Certaines communes rurales se trouvent être sous régime urbain et vice versa. L’expérience a montré que le regroupement intercommunal est d’autant plus facile à réaliser que les disparités de régime entre communes d’un même territoire sont peu importantes.

Notre collègue Michel Sergent a ainsi réussi, voilà quelques années, à rassembler tout le territoire du Pas-de-Calais sous un régime urbain d’électrification alors que l’essentiel des communes étaient rurales.

Nous aimerions tout de même disposer d’une évaluation du choix que nous avions fait collectivement en 2006 et connaître l’appréciation du Gouvernement sur ce point.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Contrairement à mon comportement habituel qui consiste à refuser, par principe, la production d’un rapport, j’ai demandé l’avis du Gouvernement en commission. En effet, il ne s’agit pas là d’un rapport d’obstruction – cela arrive parfois – ou qui viserait à retarder la mise en place de la loi que nous souhaitons voir adoptée.

Mme Nicole Bricq. Cela nous aiderait !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C’est sur un vrai sujet de fond, d’importance notable, que vous réclamez un rapport. Mais j’ignore si le rapport constitue le moyen le plus approprié pour obtenir ces informations, que les parlementaires méritent d’avoir entre les mains. Je souhaiterais connaître votre avis, madame la secrétaire d’État. Je me tourne également vers le président de notre commission. Il serait peut-être opportun de consacrer une demi-journée complète à l’audition de plusieurs acteurs susceptibles de répondre aux questions soulevées à travers cette demande de rapport.

En effet, seuls quelques sénateurs travaillent à l’élaboration d’un rapport. J’apprécie au contraire les auditions, car je considère le travail en commission de bonne qualité ici au Sénat. Cette solution intéressante permettrait aux membres de la commission de l’économie de réaliser un vrai travail de fond sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, la politique de regroupement des autorités concédantes de la distribution publique d’électricité au sein de syndicats départementaux est un élément important pour conférer à ces autorités une taille suffisante pour la gestion optimale du service public de la distribution d’électricité et pour rationaliser les investissements sur le réseau.

Toutefois, si des avancées significatives ont déjà été réalisées, il s’agit d’un processus qui s’inscrit dans la durée en raison de la nécessité de développer une concertation approfondie au niveau local avec les divers syndicats d’électrification concernés. Au début de l’année 2010, sur la vingtaine de départements concernés par un morcellement important de l’autorité concédante, plusieurs regroupements ont déjà été réalisés, dans l’Aisne, le Lot et la Somme, ou sont sur le point de l’être, dans l’Aude, la Haute-Saône, l’Hérault et l’Oise.

Les négociations sont plus difficiles pour certains départements. Au total, 302 regroupements ont été effectués, avec l’objectif d’atteindre 400 regroupements à la fin de l’année. Le Fonds d’amortissement des charges d’électrification, le FACÉ, est particulièrement impliqué dans cette politique puisque c’est lui qui octroie les aides aux collectivités maîtres d’ouvrage. Il tient en toute transparence à la disposition des personnes intéressées les données en la matière.

Il ne semble donc pas qu’un rapport formalisé sur ce point et dans des délais aussi courts puisse être l’outil le plus adapté. En revanche, nous nous rangeons à la proposition faite par le rapporteur de la commission. Le Gouvernement se tient bien sûr à la disposition de la commission pour réaliser, à côté d’autres intervenants, un travail plus interactif et tout aussi riche avec les parlementaires, afin de permettre au Sénat de recueillir les informations les plus précises possibles pour avancer sur ces questions.

C’est pourquoi nous demandons le retrait de cet amendement, en nous engageant à ce que le Gouvernement soit à la disposition de la commission pour effectuer un travail de fond sur ses questions et apporter tous les éléments nécessaires.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cette question est importante pour les sénateurs des champs comme pour ceux des villes. Je crois que les territoires ne peuvent pas tous cheminer au même rythme et que ce texte sur la départementalisation des syndicats primaires a été quelque part mal expliqué. Le FACÉ joue un rôle extrêmement important puisqu’il peut à la fois donner mais aussi retirer un certain nombre de subventions. Tel sera le sort des syndicats qui n’auront pas été unifiés à la date prévue par les textes.

Notre collègue Xavier Pintat, qui préside le FACÉ, est à l’écoute des élus locaux. Nous avons d’ailleurs, dans mon département, demandé plusieurs rendez-vous d’explications. Le souci premier doit être d’expliquer pourquoi le nombre de syndicats primaires est passé de quarante à trente, puis vingt et tend à se réduire. Il n’en demeure pas moins qu’un certain nombre de présidents de syndicats primaires, qu’ils soient des bénévoles, des maires ou des élus locaux, sont absolument persuadés que leur travail est plus rationnel et que leurs frais de fonctionnement sont moindres par rapport à un syndicat strictement départementalisé et si tout était unifié.

Je ne suis absolument pas hostile à une audition, qui me semble nécessaire étant donné que la situation disparate des territoires français. Je pense également qu’un rapport serait relativement intéressant. Encore une fois, tous nos territoires ne peuvent pas avancer à la même allure. En outre, dans le texte sur les collectivités territoriales adopté dans les conditions que l’on sait, nous avons souligné à plusieurs reprises que tous les textes n’étaient pas applicables à l’ensemble des départements et territoires dans les mêmes délais d’exécution.

Si jamais un rapport devait être fait, je voudrais qu’il prenne bien en compte ces disparités locales et cette question des frais de fonctionnement, mais aussi l’impérieuse nécessité d’examiner la situation avec le FACÉ et d’expliquer clairement les choses. En effet, nos syndicats primaires ont de réels problèmes de compréhension du texte. C’est un point sur lequel je voulais insister dans mon explication de vote, mais l’amendement de Mme Bricq me donne l’occasion de le faire dès à présent.

Madame le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission de l’économie, des auditions, voire des déplacements seraient extrêmement intéressants pour étudier la façon dont ces élus, tous bénévoles, travaillent en ayant des frais de fonctionnement tout à fait respectables et conformes à la RGPP. En tous les cas, il s’agit de fonds qui sont bien utilisés.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’économie.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, M. le rapporteur, à plusieurs reprises tout au long du projet de loi, s’est opposé à la production d’un rapport. C’est un principe que nous défendons à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Toutefois, nous ne sommes pas définitivement hostiles aux rapports que vous trouvez, mes chers collègues, sur vos bureaux toutes les semaines. Je vous fais confiance pour les lire entièrement, même si je ne le fais pas moi-même. La commission se prononce unanimement, toutes sensibilités politiques confondues, sur le principe constitutionnel qui permet aux commissions compétentes au fond d’organiser des auditions.

Je vous propose donc, comme notre rapporteur l’a dit à plusieurs reprises, d’associer à nos travaux le groupe d’études de l’énergie et d’auditionner des syndicats…

Mme Nathalie Goulet. … de l’Orne !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. … susceptibles d’évoquer devant nous leurs difficultés ainsi que le ministre chargé des questions énergétiques. La commission est tout à fait ouverte à ce type d’auditions, qui, à mon avis, sont bien plus efficaces qu’un grand rapport que vous entasserez sur les autres, après l’avoir lu, je l’ai bien compris.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. le président. Madame Bricq, l’amendement n° 106 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. Nous sommes prêts à entendre la proposition du rapporteur, du président de la commission de l’économie et de la secrétaire d’État. Si j’ai bien écouté, elle est prête à mettre ses services à notre disposition pour faciliter le travail de la commission. Nous souhaitons obtenir un état des lieux et comprendre l’origine des difficultés. Il y a certes des raisons objectives à ces difficultés, mais aussi des raisons subjectives. Je n’en dis pas plus.

M. Daniel Raoul. J’ai des noms !

Mme Nathalie Goulet. Moi aussi !

Mme Nicole Bricq. Ceux qui connaissent bien ce sujet m’auront comprise.

Nous allons accepter de retirer notre amendement. Cependant, ce ne sont pas vraiment des auditions que nous souhaitions. Certes, il est important d’écouter, mais il faut aussi donner plus que des recommandations pour que le mouvement s’achève. Le rapport n’est pas une fin en soi ! Nous devons à tous nos concitoyens un service public de l’électricité, si possible à des coûts compatibles avec ceux qu’ils sont amenés à assumer par ailleurs. Tel est notre objectif.

Je retire donc mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 106 est retiré.

Article additionnel après l'article 12
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Article 14

Article 13

L’article 23 bis de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz est ainsi modifié :

1° Au troisième alinéa, après le mot : « régie », sont insérés les mots : «, d’une société publique locale » ;

2° (nouveau) Au quatrième alinéa, après les mots : « Les sociétés d’économie mixte locales », sont insérés les mots : « et les sociétés publiques locales » et les mots : « de lui transférer l'ensemble de leurs contrats de fourniture d'électricité ou de gaz à des clients qui ont exercé leur droit à l'éligibilité, » sont remplacés par les mots : « d’y localiser les activités de fourniture d'électricité ou de gaz à des clients situés en dehors de leur zone de desserte qui ont exercé leur droit à l'éligibilité en lui transférant l'ensemble de leurs contrats de fourniture, ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 33 rectifié est présenté par MM. Bernard-Reymond, Alduy, Beaumont et Bizet, Mme Bruguière et MM. Carle, B. Fournier, Jarlier, Laménie, Lecerf, Lefèvre, Milon, Pierre et Trillard.

L'amendement n° 133 est présenté par MM. Todeschini et Pastor, Mme Printz et M. Masseret.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Au dernier alinéa du même article, après les mots : « La condition de transfert de l'ensemble des contrats de fourniture d'électricité ou de gaz des clients », sont insérés les mots : « situés hors de leur zone de desserte historique ».

La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond, pour présenter l’amendement n° 33 rectifié.

M. Pierre Bernard-Reymond. Il s’agit simplement de mettre en cohérence les dispositions portées au dernier alinéa de l’article 23 bis de la loi de 1946 avec celles qui sont portées au quatrième alinéa du même article.

M. le président. L’amendement n° 133 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 33 rectifié ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement de cohérence avec l’amendement de M. Amoudry précédemment examiné.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Avis favorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Articles additionnels après l’article 14

Article 14

La première phrase du troisième alinéa de l’article 47 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Ce statut s’appliquera à tout le personnel de l’industrie électrique et gazière en situation d’activité ou d’inactivité, en particulier celui des entreprises de production, de transport, de distribution, de commercialisation et de fourniture aux clients finals d’électricité ou de gaz naturel, sous réserve qu’une convention collective nationale du secteur de l’énergie, qu’un statut national ou qu’un régime conventionnel du secteur de l’énergie ne s’applique pas au sein de l’entreprise. Il s’appliquera au personnel des usines exclues de la nationalisation par l’article 8, à l’exception des ouvriers mineurs employés par les centrales et les cokeries des houillères et des employés de chemin de fer qui conservent, sauf demande de leur part, leur statut professionnel. »

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, sur l'article.

M. Michel Billout. L’article 14 du projet de loi a trait au statut du personnel des industries électriques et gazières et à son extension aux activités de commercialisation. L’article 47 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz qui instaure un statut national du personnel de l’industrie électrique et gazière concerne toutes les entreprises du secteur à de rares exceptions près.

Théoriquement, le statut devrait s’appliquer aux activités de commercialisation puisque à l’origine la commercialisation était inclue dans la distribution. Or, la pratique défavorable aux salariés a montré que cette interprétation n’a pas été retenue.

Nicolas Sarkozy s’était engagé en 2005 à étendre ledit statut aux salariés de la commercialisation. En effet, au moment de la fusion entre GDF et Suez, le Gouvernement avait indiqué qu’il étendrait le statut à cette activité. D’ailleurs, à l’époque, un décret avait été rédigé dans ce sens, mais il n’a jamais été signé.

L’amendement déposé en séance publique par le rapporteur Lenoir pour compléter la rédaction de l’article 14 conduit à réduire l’application du statut et, surtout, à restreindre toute possibilité d’extension à d’autres salariés. En effet, l’ajout à l’article 14 présente l’inconvénient majeur de permettre à toute entreprise qui voudrait s’exonérer de l’application du statut de le faire par un accord collectif interne.

L’article 14 dispose que le statut IEG s’applique sous réserve « qu’une convention collective nationale du secteur de l’énergie, qu’un statut national ou qu’un régime conventionnel du secteur de l’énergie ne s’applique pas au sein de l’entreprise ». Au sein de l’entreprise ne veut pas dire aux salariés.

Cela étant dit, notons que dès aujourd’hui une entreprise qui dépend de la convention collective nationale de l’entreprise du pétrole pourrait avoir une activité dans le champ de la branche IEG sans pour autant appliquer le statut. Pour mémoire, les salariés de POWEO relèvent non pas du statut national, mais de la convention collective du commerce de gros et à ce titre cette entreprise n’applique pas le statut aux salariés de la nouvelle centrale à cycle combiné à gaz de Pont-sur-Sambre.

Pour éviter un phénomène d’émiettement des régimes spéciaux, préjudiciable aux salariés, au sein du statut, nous avions déposé un amendement visant à appliquer automatiquement les statuts des IEG aux salariés des opérateurs du secteur. Hélas ! le trop fameux article 40 a eu raison de cette proposition, au motif que l’on créait ainsi une charge future pour la caisse de retraite, « organisme de sécurité sociale et assimilé ». Nous le regrettons fortement.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cet article 40 est pourtant bien nécessaire !

M. le président. L'amendement n° 100, présenté par MM. Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Repentin, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Première phrase

Après les mots :

gaz naturel

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

sous réserve que ces entreprises ne relèvent pas déjà d'une convention collective nationale, de statuts nationaux ou d'accords collectifs en vigueur, plus favorables, dans le cadre de leur appartenance à un groupe dont le champ d'activité serait plus large que les secteurs de l'électricité et du gaz

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. L’amendement que nous vous proposons est extrêmement important, puisqu’il concerne les droits des salariés du secteur de l’énergie.

L’article 14 précise que le statut national du personnel des industries électriques et gazières, les IEG, s’applique également aux activités de commercialisation. Cette disposition était attendue depuis très longtemps. Il était en effet indispensable d’éviter que des discriminations de statut entre le personnel des IEG et celui des entreprises de commercialisation et de fournitures, notamment celles qui pénètrent le marché, ne puissent perdurer.

Nous ne pouvons donc que nous réjouir qu’un article du projet de loi intègre enfin dans le champ du statut des IEG le personnel chargé de la commercialisation. Néanmoins, une petite précision rédactionnelle mérite d’être apportée.

Actuellement, il est possible que certains personnels bénéficient d’une convention collective ou d’accords meilleurs que ceux qui pouvaient leur être proposés en leur appliquant le statut des IEG. En effet, les personnels salariés et retraités de certaines entreprises ayant développé des activités dans le domaine électrique ou gazier, notamment lorsqu’elles appartiennent à des groupes industriels dont le champ d’activité est plus large que l’électricité et le gaz, relèvent plus souvent de statuts ou de conventions attachés à leur activité principale.

Pour éviter de leur appliquer des conditions au final moins avantageuses, nous proposons que les conventions collectives ne s’appliquent à ces personnels que dans la mesure où ils ne bénéficient pas déjà d’un statut plus favorable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L’article 14, qui résulte d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale, a pour objet de confirmer que le statut national du personnel des industries électriques et gazières s’applique bien aux activités de commercialisation des fournisseurs d’énergie.

Toutefois, une dérogation a été introduite afin d’éviter de faire basculer dans le statut IEG les personnels salariés de certaines entreprises du secteur de l’énergie qui ont développé des activités dans le domaine électrique ou gazier, mais qui relèvent actuellement de conventions collectives rattachées à l’activité principale du groupe.

Cet amendement tend à proposer une nouvelle rédaction pour cette dérogation. Lorsqu’il a été présenté en commission, j’ai indiqué qu’il appartenait au Gouvernement de prendre ses responsabilités sur cette question et que je me rallierais à sa position.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. M. le rapporteur vient de le préciser, l’article 14 permet déjà de clarifier le périmètre du statut des IEG tout en n’imposant pas de soumettre leurs employés au statut des IEG aux entreprises ayant développé des activités dans le domaine électrique ou gazier notamment lorsqu’elles appartiennent à des groupes industriels dont le champ d’activité est plus large que l’électricité et le gaz, qui ont conclu avec leurs salariés des dispositions particulièrement favorables.

Monsieur Courteau, la rédaction qui est proposée dans l’amendement n° 100 n’apparaît pas opératoire, car il est objectivement impossible de comparer l’ensemble des dispositions relatives au statut des IEG à celles de conventions collectives et de conclure sans ambiguïtés sur le cadre le plus favorable. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, sinon je serais obligée d’émettre un avis défavorable. En effet, nous sommes arrivés, me semble-t-il, à une position d’équilibre acceptable par tous.

Des salariés d’entreprise peuvent considérer que la convention collective qui leur est appliquée n’est pas opportune, parce qu’elle n’est pas conforme à l’activité principale de la société et qu’elle leur est défavorable : dans ces cas extrêmes, ils sont libres d’attaquer cette décision devant les juridictions. Il existe toujours des solutions de recours. Mais, j’insiste, nous sommes arrivés aujourd'hui à une position d’équilibre, à un statu quo qui nous paraît tout à fait raisonnable.

M. le président. Monsieur Courteau, l'amendement n° 100 est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Madame la secrétaire d’État, M. le rapporteur vous a laissé la responsabilité de la décision et a précisé qu’il se rallierait à la position que vous prendriez.

Nous proposons aux salariés de choisir en fonction de la convention collective. Ceux-ci sont tout de même capables, me semble-t-il, de déterminer eux-mêmes si cette convention collective leur est ou non favorable.

Vous nous dites qu’ils auront toujours la possibilité de revenir sur la décision en engageant des actions en justice. Or celles-ci sont coûteuses et parfois dissuasives. Alors que nous étions dans une démarche plutôt consensuelle, votre réponse porte un mauvais coup aux salariés – ils ne sont peut-être pas très nombreux – qui auraient intérêt à rester dans le champ de la convention collective de leur entreprise, parce qu’elle est plus intéressante que celle à laquelle ils vont adhérer. C’est vraiment dommage ! Je ne vois pas en quoi l’ajout d’une telle disposition, qui est très bien rédigée, enlève quoi que ce soit à la loi.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je soutiendrai moi aussi cet amendement qui va dans l’intérêt des personnels employés, en particulier, par les concurrents d’EDF ou de Gaz de France historiquement. Il est hors de question qu’ils aient un statut plus défavorable. La disposition que nous proposons au travers de cet amendement constitue un apport tout à fait intéressant.

En revanche, je souhaiterais faire une remarque pour qu’elle figure au compte rendu de nos débats : il est tout à fait désagréable que certains agents du circuit de distribution – vous imaginez bien qu’il s’agit d’ERDF – ne soient pas neutres quant au choix de l’opérateur. (Mme Nathalie Goulet opine.) Je n’ose imaginer qu’il puisse y avoir un intéressement à un abonnement à un fournisseur alternatif. Je trouve ces comportements pour le moins étranges.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Madame la secrétaire d’État, ce que vous nous proposez là est trop complexe ; mais pourquoi faire simple lorsqu’on peut faire compliqué ? La disposition que nous proposons présente l’avantage d’être carrée et simple. Votre réponse ne m’a guère convaincu : ce que vous préconisez nécessitera des démarches longues et complexes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 100.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Article 14
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Article 15

Articles additionnels après l’article 14

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- L'article  L. 5424-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 6° Les salariés des entreprises de la branche professionnelle des industries électriques et gazières soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières. »

II.- Au quatrième alinéa (2°) de l'article L. 5424-2 du même code, les mots : « et 4° » sont remplacés par les mots : «, 4° et 6° ».

III.- La perte de recette résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances. Madame le secrétaire d’État, cet amendement a pour objet de maintenir aux salariés du groupe GDF Suez le bénéfice du régime spécifique d’assurance chômage applicable actuellement aux industries électriques et gazières, et ce nonobstant l’évolution, ces dernières années, du capital de GDF Suez.

M. le président. Le sous-amendement n° 276 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 4

I. - Avant l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

I A. - Dans l'intitulé de la section 1, chapitre IV, titre II, du livre IV de la cinquième partie du code du travail, les mots : « secteur public » sont supprimés.

II. - Après l'alinéa 4

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

II bis - L'article L. 5424-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les entreprises de la branche professionnelle des industries électriques et gazières soumises au statut national du personnel des industries électriques et gazières, adhérentes, avant leur assujettissement au statut national, au régime d'assurance chômage prévue par les articles L. 5422-1 et suivants, ainsi que les entreprises en création sont considérées comme ayant exercé leur option irrévocable mentionnée au 2°. »

III. - Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. EDF et GDF bénéficiaient depuis longtemps d’un régime d’auto-assurance chômage en raison de leur capital public. Cette option a été généralisée à l’ensemble des entreprises des IEG par des dispositions conventionnelles. L’évolution de GDF, désormais GDF Suez, nécessite de modifier les dispositions pour permettre une continuité avec la situation actuelle et une équité au sein de la branche des IEG. C’est l’objet de l’amendement n° 4. Aussi, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, sous réserve que son sous-amendement soit adopté.

Ce sous-amendement précise l’amendement n° 4 en permettant la poursuite du régime d’auto-assurance pour toutes les entreprises aujourd’hui au statut des IEG qui ont choisi cette forme d’auto-assurance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission attendait que le Gouvernement prenne position sur la question du périmètre du régime d’auto-assurance chômage des entreprises relevant du statut IEG. C’est ce qu’il fait aujourd'hui en présentant ce sous-amendement, qui aboutit en fait à figer la situation existante.

Toutes les entreprises IEG qui ont opté pour le régime de l’auto-assurance en matière de risque chômage y demeureront. Cela concerne notamment EDF et GDF Suez, mais aussi un certain nombre de DNN, les cinq ou six grands, me semble-t-il.

Les autres entreprises, ainsi que les nouvelles venues, continueront de relever du régime de droit commun de cotisations à l’UNEDIC.

Compte tenu de ces éléments, la commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 276 rectifié et sur l’amendement n° 4.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 276 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 36 rectifié est présenté par Mme Des Esgaulx et M. Pintat.

L'amendement n° 232 est présenté par MM. Merceron, Deneux, Dubois et les membres du groupe Union centriste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 28 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés des entreprises de la branche professionnelle des industries électriques et gazières soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières se voient appliquer  les dispositions des articles L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail. »

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 36 rectifié n’est pas soutenu.

Quant à l’amendement n° 232, il n’a plus d’objet !

M. le président. L'amendement n° 101, présenté par MM. Repentin, Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au dernier alinéa du I de l'article L. 442-3 du code de la construction et de l'habitation, après le mot : « entreprise », sont insérés les mots : « ou d'un contrat d'achat d'électricité, d'énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ainsi que d'achat de chaleur, lorsque l'achat d'énergie est fait directement à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de celle du bailleur, ».

II. - Au dernier alinéa de l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, après le mot : « entreprise », sont insérés les mots : « ou d'un contrat d'achat d'électricité, d'énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ainsi que d'achat de chaleur, lorsque l'achat d'énergie est fait directement à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de celle du bailleur, ».

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. L'achat d'énergie par un bailleur est récupérable sur les locataires des immeubles de tous les secteurs locatifs. La volonté de rendre plus transparentes les factures transmises par les fournisseurs dans le cadre de l'ouverture des marchés des énergies permet aux consommateurs d'identifier les différents éléments concourant à la définition du prix de l'énergie consommée. La tarification dite « binôme », étendue à toutes les énergies – électricité, gaz, chaleur –, permet cette transparence.

Il ne peut pour autant en être déduit une moindre récupération du coût refacturé aux bénéficiaires de ces énergies, quelle qu'en soit l'origine. C'est pourtant ce que vient de décider la Cour de cassation dans un arrêt du 10 novembre 2009 relatif à la vente de chaleur, en s'appuyant sur une liste de charges récupérables conçue avant ces nouveaux modes de tarification.

Aux termes de cet arrêt, la part R2 d'une facture de vente de chaleur, dans le cadre d’un abonnement, n'est pas récupérable auprès du locataire et le bailleur ne peut récupérer que le prix de la consommation, R1. Jusqu'alors, les bailleurs, sur la base d'un arrêt de la Cour de cassation de 1974, récupéraient l'intégralité de la facture d'un fournisseur de chaleur au même titre que les factures provenant de fournisseurs de gaz ou d'électricité. Ainsi, est remis en cause le développement des réseaux de chaleur, leur mode de tarification ne permettant pas une récupération normale par le propriétaire.

Cet amendement vise à maintenir la possibilité pour un bailleur de récupérer le prix d'une énergie qu'il achète à une entité juridique indépendante, sans distinguer les éléments constitutifs de ce prix – R1 et R2 –, sur lesquels il n'a aucune maîtrise.

M. le président. Le sous-amendement n° 279, présenté par M. Bizet, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3 de l'amendement n° 101

Supprimer les mots :

lorsque l’achat d’énergie est fait directement à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de celle du bailleur,

Ce sous-amendement n'est pas soutenu.

Le sous-amendement n° 285 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3 de l'amendement n° 101

Supprimer les mots :

ainsi que d’achat de chaleur, lorsque l’achat d’énergie est fait directement à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de celle du bailleur,

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mes chers collègues, je vais me livrer à une petite gymnastique : plutôt que de soutenir mon sous-amendement, je souhaite demander à M. Courteau de bien vouloir rectifier son amendement. S’il accepte, j’aurai ainsi le plaisir d’émettre un avis favorable. 

En effet, l’amendement n° 101 vise à corriger législativement une jurisprudence récente de la Cour de cassation, aux termes de laquelle un bailleur ne peut récupérer auprès de son locataire que le prix de sa consommation de chaleur, et donc pas la part fixe de la facture.

Cet arrêt, en date du 10 novembre 2009, contredit la pratique habituelle des bailleurs. Il pourrait rapidement faire école, car d’autres procédures ont été lancées par des associations de locataires. À terme, l’impossibilité de répercuter les charges pourrait concerner non seulement la fourniture de chaleur, mais aussi la partie abonnement des factures d’électricité et de gaz.

Si cette jurisprudence constitue une aubaine pour les locataires, on voit mal ce qui la justifie. Sa généralisation aboutirait à freiner considérablement le développement des réseaux de chaleur, que les lois Grenelle 1 et Grenelle 2 veulent par ailleurs encourager.

Cela étant, cet amendement va trop loin. Tel qu’il est rédigé, il profiterait également aux chaufferies dédiées, lesquelles sont des installations affectées à un seul immeuble qui est géré par un tiers. C’est pourquoi j’invite M. Courteau à supprimer, à la fin des paragraphes I et  II, les mots « ainsi que d’achat de chaleur, lorsque l’achat d’énergie est fait directement à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de celle du bailleur, ».

Seule la référence aux chaufferies dédiées serait donc supprimée, le cœur de l’amendement demeurant inchangé. Sous réserve de cette rectification, comme je l’ai déjà dit, j’émettrai un avis favorable. Dans ces conditions, mon sous-amendement n’aura bien évidemment plus de raison d’être.

M. le président. Monsieur Courteau, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur ?

M. Roland Courteau. Je l’en remercie, monsieur le président.

Je sais que l’auteur de l’amendement, Thierry Repentin, serait tout à fait favorable à cette rectification. Je modifie par conséquent ainsi cet amendement.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 101 rectifié, présenté par MM. Repentin, Courteau, Raoul, Botrel, Bourquin, Daunis, Guillaume et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Rainaud, Teston, Bérit-Débat, Berthou et Besson, Mme Bourzai, MM. Guérini, Jeannerot, Mazuir, Sergent et les membres du groupe Socialiste et apparentés, ainsi libellé :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au dernier alinéa du I de l'article L. 442-3 du code de la construction et de l'habitation, après le mot : « entreprise », sont insérés les mots : « ou d'un contrat d'achat d'électricité, d'énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ».

II. - Au dernier alinéa de l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, après le mot : « entreprise », sont insérés les mots : « ou d'un contrat d'achat d'électricité, d'énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par réseaux,  ».

En conséquence, le sous-amendement n° 285 rectifié n’a plus d’objet.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 101 rectifié ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement tel qu’il vient d’être modifié sur la suggestion de M. le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 101 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

Articles additionnels après l’article 14
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Articles additionnels après l'article 15

Article 15

(Non modifié)

L’article 92 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, après le mot : « environnement », sont insérés les mots : « et le code de la défense » et après les mots : « les dispositions des lois », sont insérés les mots : « n° 68-943 du 30 octobre 1968 relative à la responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire, » ;

2° Au premier alinéa du II, les mots : « dix-huit mois » sont remplacés par les mots : « vingt-quatre mois ».

M. le président. L'amendement n° 212, présenté par M. Danglot, Mmes Didier, Schurch et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. La loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures fait partie de ces textes qui ressemblent plus à de longs inventaires qu’à des projets cohérents. Il n’est pas rare d’y trouver des articles habilitant le Gouvernement à légiférer dans des domaines variés.

Ainsi, l’article 92 de ladite loi autorise le pouvoir exécutif à empiéter sur le domaine législatif pour adopter par voie d’ordonnance la partie législative de trois codes. Si le propos se veut rassurant, en précisant que la codification se fait à droit constant, il n’en reste pas moins que nous considérons que la fonction législative ne doit pas être réduite.

Outre les critiques fondées de M. le rapporteur, qui concède une habilitation un peu large, plusieurs raisons nous conduisent à demander la suppression de l’article 15 du projet de loi NOME : tout d’abord, le recours aux ordonnances de l’article 38 nous semble déjà trop souvent utilisé pour que l’on élargisse son application dans le temps ; ensuite, il nous semble également un peu cavalier que cette demande provienne d’un amendement du Gouvernement ; enfin, par cet amendement, devenu l’article 15, le Gouvernement réclame une nouvelle habilitation pour modifier le code de l’environnement et le code de la défense.

C’est pourquoi, au nom du respect des droits du Parlement, nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter notre amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Vous ne serez pas surpris, mon cher collègue, si je vous dis que la commission a émis un avis défavorable.

Vous vous opposez par principe au recours aux ordonnances, que vous considérez comme une diminution du pouvoir législatif. Pourtant, en matière de codification, le recours aux ordonnances est d’usage constant. Le Parlement conserve d’ailleurs, lorsqu’il ratifie les ordonnances, la faculté de modifier les codes élaborés par le Gouvernement sur les points qui ne lui conviendraient pas.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je ne vais pas répéter ce que vient de dire M. le rapporteur. J’ajoute simplement que c’est le principe même de la codification par voie d’ordonnance qui est ici mis en cause, et non le contenu précis de l’article.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 212.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Article 15
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Demande de seconde délibération

Articles additionnels après l'article 15

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 24 est présenté par M. Grignon.

L'amendement n° 34 rectifié est présenté par MM. Bernard-Reymond, Alduy, Beaumont et Bizet, Mme Bruguière et MM. Carle, Jarlier, Laménie, Lecerf, Lefèvre, Milon et Pierre.

L'amendement n° 134 est présenté par MM. Todeschini et Pastor, Mme Printz et M. Masseret.

L'amendement n° 235 est présenté par MM. Dubois, Deneux, Merceron et Amoudry.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au deuxième alinéa du V de l'article 18 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, après les mots : « transport d'électricité », sont insérés les mots : « ou à un réseau public de distribution d'électricité de tension supérieure ou égale à 50 kV » et, avant le mot : « consommateurs », est inséré le mot : « autres ».

II. - La perte de recettes résultant pour la Caisse nationale des industries électriques et gazières du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Francis Grignon, pour présenter l’amendement n° 24.

M. Francis Grignon. Je vais être synthétique, car des amendements identiques ont été déposés par plusieurs de nos collègues appartenant à d’autres groupes. À cet égard, je veux indiquer que Pierre Bernard-Reymond regrette vraiment de ne pouvoir être présent pour défendre son amendement.

La mesure que nous proposons vise à lutter contre une injustice flagrante, principalement en direction des industries consommatrices d’électricité de haut voltage, c’est-à-dire supérieur à 50 kilovolts. En effet, le taux de la contribution tarifaire d’acheminement, la CTA, est différent suivant que l’électricité est acheminée par la société RTE ou par un distributeur non nationalisé : 8,2 % dans le premier cas, contre 21 % dans le second. Une telle discrimination est d’ailleurs contraire à l’article 34 de la Constitution.

Aussi, notre amendement vise à rétablir une égalité de traitement. Il convient de souligner que ce dispositif concernerait peu d’entreprises et n’aurait donc pas d’énormes conséquences, sauf pour les entreprises elles-mêmes, qui sont pénalisées de 2 % à 5 % sur les factures d’acheminement en fonction de l’importance de leur consommation.

M. le président. Les amendements nos 34 rectifié et 134 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour présenter l’amendement n° 235.

M. Jean-Claude Merceron. Je n’ai rien à ajouter aux propos qui viennent d’être tenus par M. Francis Grignon sur cette disposition visant à rétablir une égalité de traitement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La contribution tarifaire d’acheminement a été instaurée pour financer une partie du surcoût du régime de retraite des personnels des industries électriques et gazières. Elle est supportée par les consommateurs d’électricité.

Reste qu’elle instaure une inégalité entre les consommateurs : selon qu’ils sont raccordés à la société RTE ou à un distributeur non nationalisé, ils acquittent la CTA à des taux différents.

La commission a donc émis un avis favorable sur ce bon dispositif, mais elle demande au Gouvernement de se prononcer en ce qui concerne le gage.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 24 et 235 ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Ces amendements visent à remédier à une discrimination du fait que les gros sites de consommation reliés au réseau HTB de distributeurs non nationalisés ne bénéficient pas d’un taux de transport, mais d’un taux de distribution. Il s’agit donc d’une question d’équité devant l’impôt.

Ces amendements ont néanmoins pour effet de diminuer globalement l’assiette de la contribution tarifaire d’acheminement.

Pour assurer un niveau constant de recettes pour la Caisse nationale des industries électriques et gazières et garantir l’équilibre, il faut non pas créer une taxe additionnelle, qui serait contraire au principe d’établissement de la CTA et qui constituerait une aide d’État, mais adapter en conséquence les taux de la CTA. Cela doit être prochainement mis en œuvre, comme le dispose la loi de 2004, qui prévoit d’ajuster les taux de CTA pour permettre un équilibre sur les cinq années à venir.

Dans ces conditions, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat. Consciente que la Haute Assemblée va sans doute adopter ces amendements, je lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc des amendements identiques nos 24 rectifié et 235 rectifié.

La parole est à M. Francis Grignon, pour explication de vote.

M. Francis Grignon. S’il est nécessaire de convaincre un peu plus encore notre assemblée, je précise que la Caisse nationale des industries électriques et gazières est excédentaire – je l’ai vérifié – et qu’elle en fait bénéficier le régime général.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 rectifié et 235 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15.

Seconde délibération

Articles additionnels après l'article 15
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Seconde délibération

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’économie.

Demande de seconde délibération
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Article 12

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Monsieur le président, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement, la commission de l’économie demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 12.

La commission souhaite en effet présenter un amendement visant à rédiger en particulier l’alinéa 14.

M. le président. Je rappelle que, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement, tout ou partie d’un texte peut être renvoyé, sur décision du Sénat, à la commission pour une seconde délibération, à condition que la demande de renvoi ait été formulée ou acceptée par le Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de seconde délibération ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, acceptée par le Gouvernement.

Il n’y a pas d’opposition ?...

La seconde délibération est ordonnée.

Nous allons procéder à la seconde délibération de l’article 12.

Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 5, du règlement : « Lorsqu'il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport. ».

La commission est-elle prête à rapporter ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement :

« Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »

Seconde délibération
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 12

I. – La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie du même code est ainsi rédigée :

« Section 2

« Taxe communale sur la consommation finale d'électricité

« Art. L. 2333-2. – Il est institué, au profit des communes ou, selon le cas, au profit des établissements publics de coopération intercommunale ou des départements qui leur sont substitués au titre de leur compétence d'autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité visée à l'article L. 2224-31, une taxe communale sur la consommation finale d'électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière.

« Art. L. 2333-3. – La taxe mentionnée à l'article L. 2333-2 s'applique dans les mêmes conditions que celles mentionnées à l'article L. 3333-2.

« Art. L. 2333-4. – La taxe mentionnée à l'article L. 2333-2 est assise selon les mêmes règles que celles mentionnées à l'article L. 3333-3.

« Lorsque la taxe est instituée au profit de la commune, le conseil municipal en fixe le tarif en appliquant aux montants mentionnés à l'article L. 3333-3 un coefficient multiplicateur unique compris entre 0 et 8. À partir de l'année 2012, la limite supérieure du coefficient multiplicateur est actualisée en proportion de l'indice moyen des prix à la consommation hors tabac établi pour l'année précédente par rapport au même indice établi pour l'année 2009. Les montants qui en résultent sont arrondis à la deuxième décimale la plus proche.

« La décision du conseil municipal doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l'année suivante. Le maire la transmet, s'il y a lieu, au comptable public assignataire de la commune au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu'elle n'est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le coefficient multiplicateur mentionné au deuxième alinéa est, sous réserve du respect des limites qui y sont fixées, égal à la multiplication par 100 du taux en valeur décimale appliqué au 31 décembre 2010 conformément à l'article L. 2333-4 dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la loi n°… du … portant nouvelle organisation du marché de l'électricité.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d'une période de facturation, les quantités d'électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Art. L. 2333-5. – Les redevables de la taxe sont tenus d'adresser aux comptables publics assignataires des communes la déclaration mentionnée au premier alinéa de l'article L. 3333-3-1 dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné, accompagnée du paiement de la taxe, selon les mêmes modalités, périodicité et délai que ceux prévus audit article.

« Les redevables sont également tenus d'adresser aux maires des communes une copie de la déclaration mentionnée au premier alinéa dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 1,5 % du montant de la taxe qu'ils versent aux communes à compter du 1er janvier 2012.

« La taxe est contrôlée et sanctionnée par les agents habilités par le maire dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3333-3-2.

« Le droit de reprise de la commune, les réclamations relatives à l'assiette et au recouvrement de la taxe ainsi que les contestations relatives aux poursuites s'effectuent dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3333-3-3.

« Le maire informe le président du conseil général des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d'office opérées. Sur la base des informations transmises, le président du conseil général procède au recouvrement de la taxe affectée au département en application de l'article L. 3333-2.

« Une personne qui a fait l'objet d'une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues ci-dessus par les agents habilités par le maire et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l'objet d'une nouvelle vérification de la part d'agents habilités par une autorité locale en application des articles L. 3333-3-2 ou L. 5212-24-2.

« Lorsque l'électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs communes et fait l'objet d'une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

II. – La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la troisième partie du même code est ainsi rédigée :

« Section 2

« Taxe départementale sur la consommation finale d'électricité

« Art. L. 3333-2. – I. – Il est institué, au profit des départements, une taxe départementale sur la consommation finale d'électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière.

« II. – Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de l'électricité par un fournisseur à chaque point de livraison, situé en France, d'un utilisateur final. La taxe est exigible au moment de la livraison. Toutefois, lorsque la livraison donne lieu à des décomptes ou à des encaissements successifs et que le redevable a exercé l'option prévue au second alinéa du a du 2 de l'article 269 du code général des impôts, l'exigibilité intervient au moment du débit.

« L'exigibilité intervient en tout état de cause dès la perception d'acomptes financiers lorsqu'il en est demandé avant l'intervention du fait générateur.

« Dans le cas mentionné au 2° du III du présent article, le fait générateur et l'exigibilité de la taxe interviennent lors de la consommation de l'électricité.

« III. – Sont redevables de la taxe :

« 1° Les fournisseurs d'électricité.

« Un fournisseur d'électricité s'entend de la personne qui produit ou achète de l'électricité en vue de la revendre à un consommateur final.

« Les fournisseurs d'électricité non établis en France et qui y sont redevables de la taxe au titre des livraisons d'électricité qu'ils effectuent à destination d'un utilisateur final sont tenus de faire accréditer, auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, un représentant établi en France. Ce représentant se porte garant du paiement de la taxe et du dépôt de la déclaration mentionnée à l'article L. 3333-3-1 en cas de défaillance du redevable.

« Le montant de la taxe dû par les fournisseurs apparaît distinctement, en addition au prix de vente de l'électricité, sur les factures qu'ils émettent ou qui sont émises pour leur compte ;

« 2° Les personnes qui, dans le cadre de leur activité économique, produisent de l'électricité et l'utilisent pour les besoins de cette activité.

« IV. – L'électricité n'est pas soumise à la taxe mentionnée au I dans les cas suivants :

« 1° Lorsqu'elle est principalement utilisée dans des procédés métallurgiques, de réduction chimique ou d'électrolyse. Le bénéfice de la présente mesure ne s'applique pas aux quantités d'électricité utilisées pour des besoins autres que ceux de ces procédés ;

« 2° Lorsque sa valeur représente plus de la moitié du coût d'un produit ;

« 3° Lorsqu'elle est utilisée dans des procédés de fabrication de produits minéraux non métalliques classés conformément au règlement (CEE) n° 3037/90 du Conseil, du 9 octobre 1990, relatif à la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne ;

« 4° Lorsqu'elle est consommée dans l'enceinte des établissements de production de produits énergétiques, pour les besoins de la production des produits énergétiques eux-mêmes ou pour ceux de la production de tout ou partie de l'énergie nécessaire à leur fabrication.

« V. – L'électricité est exonérée de la taxe mentionnée au I lorsqu'elle est :

« 1° Utilisée pour la production de l'électricité et pour le maintien de la capacité de production de l'électricité ;

« 2° Utilisée pour le transport de personnes et de marchandises par train, métro, tramway et trolleybus ;

« 3° Produite à bord des bateaux ;

« 4° Produite par de petits producteurs d'électricité qui la consomment pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme petits producteurs d'électricité les personnes qui exploitent des installations de production d'électricité dont la production annuelle n'excède pas 240 millions de kilowattheures par site de production.

« VI. – Sont admis en franchise de la taxe les achats d'électricité effectués par les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d'électricité pour les besoins de la compensation des pertes inhérentes aux opérations de transport et de distribution de l'électricité.

« VII. – Les personnes qui ont reçu de l'électricité qu'elles utilisent dans les conditions mentionnées aux IV à VI adressent à leurs fournisseurs une attestation, conforme au modèle fixé par arrêté du directeur général chargé de l'énergie, justifiant la livraison de cette électricité sans application de la taxe mentionnée au I. Elles sont tenues d'acquitter la taxe ou le supplément de taxe due lorsque tout ou partie de l'électricité n'a pas été affectée à l'usage ayant justifié l'absence de taxation, l'exonération ou la franchise.

« Art. L. 3333-3. – La taxe mentionnée à l'article L. 3333-2 est assise sur la quantité d'électricité fournie ou consommée, exprimée en mégawattheures ou fraction de mégawattheure.

« 1. Pour les consommations professionnelles, le tarif de la taxe est fixé selon le barème suivant :

«

Qualité de l'électricité fournie

Tarif en euro par mégawattheure

 

 

Puissance inférieure ou égale à36 kilovoltampères

0,75

 

 

Puissance supérieure à 36 kilovoltampères et inférieure ou égale à 250 kilovoltampères

0,25

« Relèvent de ce barème les consommations professionnelles des personnes qui assurent d'une manière indépendante, en tout lieu, la fourniture de biens et de services quels que soient la finalité ou les résultats de leurs activités économiques, qu'il s'agisse des activités de producteurs, de commerçants ou de prestataires de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées.

« 2. Le tarif de la taxe est fixé à 0,75 euro par mégawattheure pour toutes les consommations autres que professionnelles.

« 3. Le conseil général applique aux montants mentionnés aux 1 et 2 un coefficient multiplicateur unique compris entre 2 et 4. À partir de l'année 2012, la limite supérieure du coefficient multiplicateur est actualisée en proportion de l'indice moyen des prix à la consommation hors tabac établi pour l'année précédente par rapport au même indice établi pour l'année 2009. Les montants qui en résultent sont arrondis à la deuxième décimale la plus proche.

« La décision du conseil général doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l'année suivante. Le président du conseil général la transmet, s'il y a lieu, au comptable public assignataire du département au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu'elle n'est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le coefficient multiplicateur mentionné au premier alinéa du présent 3 est, sous réserve du respect des limites qui y sont fixées, égal à la multiplication par 100 du taux en valeur décimale appliqué au 31 décembre 2010 conformément à l'article L. 3333-2 dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la loi n°… du … portant nouvelle organisation du marché de l'électricité.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d'une période de facturation, les quantités d'électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Art. L. 3333-3-1. – Les redevables de la taxe doivent établir une déclaration au titre de chaque trimestre civil, conforme au modèle fixé par arrêté conjoint du directeur général chargé des finances publiques et du directeur général chargé de l'énergie, comportant les indications nécessaires à la détermination de l'assiette, à la liquidation et au recouvrement de la taxe. Les petits producteurs mentionnés au 4° du V de l'article L. 3333-2 sont dispensés de l'obligation d'établir la déclaration.

« Les redevables sont tenus d'adresser aux comptables publics assignataires des départements la déclaration mentionnée au premier alinéa du présent article dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné. La déclaration est accompagnée du paiement de la taxe.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 1,5 % du montant de la taxe qu'ils versent aux départements à compter du 1er janvier 2012.

« Art. L. 3333-3-2. – I. – La déclaration trimestrielle mentionnée à l'article L. 3333-3-1 est contrôlée par les agents habilités par le président du conseil général.

« Ces agents peuvent demander aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l'article L. 3333-2 tous les renseignements ou justificatifs relatifs aux éléments de la déclaration ou de l'attestation adressée aux fournisseurs. Ils peuvent examiner sur place les documents utiles. Préalablement, un avis de vérification est adressé au redevable ou à la personne mentionnée au même VII, afin qu'il puisse se faire assister d'un conseil. Au titre de la période concernée, le contrôle porte à la fois sur la taxe départementale sur la consommation finale d'électricité ainsi que sur la taxe communale prévue à l'article L. 2333-2.

« Les agents habilités sont soumis à l'obligation de secret professionnel définie aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

« Pour les contrôles qu'ils effectuent, les agents habilités sont autorisés à se faire communiquer par les gestionnaires de réseaux les informations relatives aux fournisseurs qui effectuent des livraisons d'électricité dans le périmètre du département.

« Le droit de communication s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents.

« Le refus de communiquer les informations relatives aux fournisseurs sous un délai de trente jours ou la communication d'informations incomplètes ou inexactes constituent une entrave à l'exercice du droit de communication entraînant l'application d'une amende de 3 000 € par commune concernée.

« II. – 1. Lorsque les agents habilités constatent une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation des éléments servant de base au calcul de la taxe, les rectifications correspondantes sont notifiées aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l'article L. 3333-2 qui disposent d'un délai de trente jours à compter de la date de réception de la notification pour présenter leurs observations. Dans le cas où le redevable ou la personne tenue d'acquitter la taxe fait part de ses observations, une réponse motivée lui est adressée. Les droits notifiés sont assortis d'une majoration de 10 %.

« 2. Lorsque le redevable n'a pas adressé la déclaration mentionnée à l'article L. 3333-3-1, une lettre de mise en demeure avec demande d'avis de réception lui est adressée par le président du conseil général. À défaut de régularisation dans un délai de trente jours à compter de la date de réception de cette mise en demeure, il est procédé à la taxation d'office. À cette fin, la base d'imposition est fixée sur la base des livraisons d'un fournisseur ou d'un producteur comparable. Les droits notifiés sont assortis d'une majoration de 40 %.

« 3. En cas d'entrave à l'exercice du contrôle par les agents habilités, y compris le défaut ou l'insuffisance de réponse aux demandes de renseignements ou de justificatifs prévues au deuxième alinéa du I du présent article, une lettre de mise en demeure est adressée par pli recommandé avec demande d'avis de réception aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l'article L. 3333-2 par le président du conseil général. Si, au terme d'un délai de trente jours à compter de la date de réception de cette mise en demeure, les entraves au contrôle perdurent, il est procédé à une taxation d'office dans les conditions mentionnées au 2 du présent II. Les droits notifiés sont assortis d'une majoration de 40 %.

« 4. Les montants de la taxe et, le cas échéant, des majorations notifiés aux redevables ou aux personnes mentionnées au VII de l'article L. 3333-2 sont exigibles trente jours après la date de réception par ces personnes de la réponse à leurs observations ou, en l'absence d'observations, trente jours après la date de la notification ou, en cas de taxation d'office, trente jours après la date de notification des droits. L'action des comptables publics, les réclamations contentieuses relatives à l'assiette de la taxe, aux actes de poursuites et au recouvrement sont effectuées dans les conditions prévues par l'article L. 1617-5.

« 5. Le président du conseil général informe les collectivités territoriales auxquelles est affectée la taxe mentionnée à l'article L. 2333-2 des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d'office opérées. Sur la base des informations transmises, les maires et les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale concernés procèdent au recouvrement de ladite taxe.

« Art. L. 3333-3-3. – I. – Le droit de reprise des collectivités territoriales bénéficiaires de la taxe s'exerce jusqu'au 31 décembre de la troisième année qui suit celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible.

« II. – Une personne qui a fait l'objet d'une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues à l'article L. 3333-3-2 par les agents habilités par le président du conseil général et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l'objet d'une nouvelle vérification de la part d'agents habilités par une autorité locale en application des articles L. 2333-5 ou L. 5212-24-2.

« III. – Lorsque l'électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs départements et fait l'objet d'une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

III. – L'article L. 5212-24 du même code est ainsi rédigé et, après ce même article, sont insérés deux articles, L. 5212-24-1 et L. 5212-24-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 5212-24. – Lorsqu'il existe un syndicat intercommunal exerçant la compétence d'autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité ou que cette compétence est exercée par le département, la taxe prévue à l'article L. 2333-2 est perçue par le syndicat ou par ce département en lieu et place de toutes les communes dont la population recensée par l'Institut national de la statistique et des études économiques au 1er janvier de l'année est inférieure ou égale à 2 000 habitants ou dans lesquelles la taxe est perçue par le syndicat au 31 décembre 2010. Pour les autres communes, cette taxe peut être perçue par le syndicat ou le département en lieu et place de la commune s'il en est décidé ainsi par délibérations concordantes du syndicat, ou du département s'il exerce cette compétence, et de la commune.

« Lorsque la taxe est perçue au profit du syndicat intercommunal ou du département en lieu et place de la commune en application de l'alinéa précédent, l'organe délibérant du syndicat intercommunal ou le conseil général fixe le tarif applicable dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2333-4.

« Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsqu'il est situé hors du territoire métropolitain, le syndicat intercommunal peut fixer le coefficient multiplicateur mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 2333-4 dans la limite de 12, sous réserve qu'il affecte la part de la taxe résultant de l'application d'un coefficient multiplicateur excédant 8 à des opérations de maîtrise de la demande d'énergie concernant les consommateurs domestiques.

« La décision de l'organe délibérant du syndicat intercommunal ou du conseil général doit être adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l'année suivante. Le président du syndicat intercommunal ou du conseil général la transmet, s'il y a lieu, au comptable public assignataire au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour son adoption.

« La décision ainsi communiquée demeure applicable tant qu'elle n'est pas rapportée ou modifiée par une nouvelle décision.

« Pour 2011, le tarif est fixé dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 2333-4.

« En cas de changement du tarif de la taxe au cours d'une période de facturation, les quantités d'électricité concernées sont réparties en fonction des tarifs proportionnellement au nombre de jours de chaque période.

« Le syndicat intercommunal ou le département peut reverser à une commune une fraction de la taxe perçue sur le territoire de celle-ci.

« Art. L. 5212-24-1. – Les redevables sont tenus d'adresser, selon le cas, aux comptables publics assignataires du syndicat intercommunal ou du département la déclaration mentionnée au premier alinéa de l'article L. 3333-3-1 dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné, accompagnée du paiement de la taxe, selon les mêmes modalités, périodicité et délai que ceux prévus audit article.

« Les redevables sont également tenus d'adresser, selon le cas, au président du syndicat intercommunal ou du conseil général une copie de la déclaration mentionnée à l'alinéa précédent dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné.

« Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 1,5 % du montant de la taxe qu'ils versent aux syndicats ou aux départements à compter du 1er janvier 2012.

[ ]

« Art. L. 5212-24-2. – La taxe est contrôlée et sanctionnée par les agents habilités, selon le cas, par le président du syndicat intercommunal ou du conseil général, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3333-3-2. Les informations requises comportent le cas échéant une ventilation par commune.

« Le droit de reprise, selon le cas, du syndicat intercommunal ou du conseil général, s'exerce dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3333-3-3. Les réclamations relatives à l'assiette et au recouvrement de la taxe ainsi que les contestations relatives aux poursuites s'effectuent dans les mêmes conditions que celles prévues au 4 du II de l'article L. 3333-3-2.

« Le président du syndicat intercommunal informe le président du conseil général des contrôles effectués, des rectifications du montant de la taxe ou de la taxation d'office opérées. Sur la base des informations transmises, le président du conseil général procède au recouvrement de la taxe affectée au département en application de l'article L. 3333-2.

« Une personne qui a fait l'objet d'une vérification de la taxe exigible au titre de ses livraisons ou de sa consommation dans les conditions prévues ci-dessus par les agents habilités par le président du syndicat intercommunal et qui a acquitté la taxe due ne peut, pour les mêmes opérations, faire l'objet d'une nouvelle vérification de la part d'agents habilités par le président du conseil général en application de l'article L. 3333-3-2.

« Lorsque l'électricité est livrée à des points de livraison situés dans plusieurs communes et fait l'objet d'une facturation globale, le produit de la taxe est réparti entre les collectivités au prorata de la consommation afférente à chaque point de livraison. »

III bis (nouveau). – La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre II de la cinquième partie du même code est complétée par un article L. 5212-26 ainsi rédigé :

« Art. L. 5212-26. – Afin de financer la réalisation ou le fonctionnement d'un équipement public local, des fonds de concours peuvent être versés entre un syndicat visé à l'article L. 5212-24 et les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale membres, après accords concordants exprimés à la majorité simple du comité syndical et des conseils municipaux ou des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale concernés.

« Le montant total des fonds de concours ne peut excéder les trois quarts du coût hors taxe de l'opération concernée. »

IV. – (Non modifié)

V. – L'article 76 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est supprimé ;

2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2007, les tarifs de vente de l'électricité applicables dans la collectivité départementale sont identiques à ceux pratiqués en métropole. » ;

3° Le dernier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« À compter du 1er janvier 2011, la collectivité départementale peut instituer à son profit une taxe locale sur l'électricité dont l'assiette est définie à l'article L. 3333-3 du code général des collectivités territoriales et dont les modalités de recouvrement sont définies à l'article L. 3333-3-1 du même code. Le tarif ne peut dépasser :

« – 8,40 € par mégawattheure pour les consommations autres que professionnelles ;

« – 8,40 € par mégawattheure lorsque la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères et 2,40 € par mégawattheure lorsque la puissance souscrite est supérieure à 36 kilovoltampères et inférieure ou égale à 250 kilovoltampères, pour les consommations professionnelles. »

VI. – Le e de l'article 1609 nonies D du code général des impôts est ainsi rédigé :

« e) La taxe communale sur la consommation finale d'électricité prévue à l'article L. 2333-2 du code général des collectivités territoriales en lieu et place des communes membres dont la population est inférieure ou égale à 2 000 habitants. »

VII. – Le a du 3 de l'article 265 bis et le 1° du 5 de l'article 266 quinquies B du code des douanes sont complétés par les mots : « et des produits utilisés pour leurs besoins par les petits producteurs d'électricité au sens du 4° du V de l'article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales ».

VIII et IX. – (Non modifiés)

X. – Après l'article 266 quinquies B du même code, il est inséré un article 266 quinquies C ainsi rédigé :

« Art. 266 quinquies C. – 1. Il est institué une taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière, fournie ou consommée sous une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères.

« 2. Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de l'électricité par un fournisseur à chaque point de livraison situé en France d'un utilisateur final. La taxe est exigible au moment de la livraison. Toutefois, lorsque la livraison donne lieu à des décomptes ou à des encaissements successifs et que le redevable a exercé l'option prévue au second alinéa du a du 2 de l'article 269 du code général des impôts, l'exigibilité intervient au moment du débit.

« L'exigibilité intervient, en tout état de cause, dès la perception d'acomptes financiers lorsqu'il en est demandé avant l'intervention du fait générateur.

« Dans le cas mentionné au 2° du 3 du présent article, le fait générateur et l'exigibilité de la taxe interviennent lors de la consommation de l'électricité.

« 3. Sont redevables de la taxe :

« 1° Les fournisseurs d'électricité.

« Un fournisseur d'électricité s'entend de la personne qui produit ou achète de l'électricité en vue de la revendre à un consommateur final.

« Le montant de la taxe dû par les fournisseurs apparaît distinctement, en addition au prix de vente de l'électricité, sur les factures qu'ils émettent ou qui sont émises pour leur compte ;

« 2° Les personnes qui produisent de l'électricité et l'utilisent pour leurs propres besoins.

« 4. L'électricité n'est pas soumise à la taxe mentionnée au 1 dans les cas suivants :

« 1° Lorsqu'elle est principalement utilisée dans des procédés métallurgiques, d'électrolyse ou de réduction chimique. Le bénéfice de la présente mesure ne s'applique pas aux quantités d'électricité utilisées pour des besoins autres que ceux de ces procédés ;

« 2° Lorsque sa valeur représente plus de la moitié du coût d'un produit ;

« 3° Lorsqu'elle est utilisée dans des procédés de fabrication de produits minéraux non métalliques classés conformément au règlement (CEE) n° 3037/90 du Conseil, du 9 octobre 1990, relatif à la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne ;

« 4° Lorsqu'elle est consommée dans l'enceinte des établissements de production de produits énergétiques, pour les besoins de la production des produits énergétiques eux-mêmes ou pour ceux de la production de tout ou partie de l'énergie nécessaire à leur fabrication.

« 5. L'électricité est exonérée de la taxe mentionnée au 1 lorsqu'elle est :

« 1° Utilisée pour la production de l'électricité et pour le maintien de la capacité de production de l'électricité ;

« 2° Utilisée pour le transport de personnes et de marchandises par train, métro, tramway et trolleybus ;

« 3° Produite à bord des bateaux ;

« 4° Produite par de petits producteurs d'électricité qui la consomment pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme petits producteurs d'électricité les personnes qui exploitent des installations de production d'électricité dont la production annuelle n'excède pas 240 millions de kilowattheures par site de production ;

« 5° D'une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et utilisée par des personnes grandes consommatrices d'énergie soumises à autorisation pour l'émission de gaz à effet de serre pour les besoins des installations mentionnées à l'article L. 229-5 du code de l'environnement.

« Sont considérées comme grandes consommatrices en énergie les entreprises :

« – dont les achats d'électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et de produits énergétiques soumis aux taxes intérieures de consommation visées aux articles 265, 266 quinquies et 266 quinquies B du présent code atteignent au moins 3 % du chiffre d'affaires ;

« – ou pour lesquelles le montant total de la taxe applicable à l'électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères et des taxes intérieures de consommation visées au précédent alinéa est au moins égal à 0,5 % de la valeur ajoutée telle que définie à l'article 1586 sexies du code général des impôts.

« 6. Sont admis en franchise de la taxe les achats d'électricité effectués par les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d'électricité pour les besoins de la compensation des pertes inhérentes aux opérations de transport et de distribution de l'électricité.

« 7. Les personnes qui ont reçu de l'électricité qu'elles utilisent dans les conditions mentionnées aux 4 à 6 adressent à leurs fournisseurs une attestation, conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du budget, justifiant la livraison de cette électricité sans application de la taxe. Elles sont tenues d'acquitter la taxe ou le supplément de taxe due lorsque tout ou partie de l'électricité n'a pas été affectée à l'usage ayant justifié l'absence de taxation, l'exonération ou la franchise.

« 8. La taxe est assise sur la quantité d'électricité d'une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères fournie ou consommée, exprimée en mégawattheures ou fraction de mégawattheure.

« Le tarif de la taxe est fixé à 0,50 € par mégawattheure.

« Les fournisseurs d'électricité établis en France sont tenus de se faire enregistrer auprès de l'administration des douanes et droits indirects chargée du recouvrement de la taxe intérieure de consommation préalablement au commencement de leur activité.

« Ils tiennent une comptabilité des livraisons d'électricité d'une puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères qu'ils effectuent en France et communiquent à l'administration chargée du recouvrement le lieu de livraison effectif, le nom ou la raison sociale et l'adresse du destinataire.

« La comptabilité des livraisons doit être présentée à toute réquisition de l'administration.

« Les fournisseurs d'électricité non établis en France désignent une personne qui y est établie et a été enregistrée auprès de l'administration des douanes et droits indirects pour effectuer en leurs lieu et place les obligations qui leur incombent et acquitter la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité. À défaut, la taxe est due par le destinataire du produit soumis à accise.

« 9. La taxe est acquittée, selon une périodicité trimestrielle, auprès de l'administration des douanes et des droits indirects.

Les quantités d'électricité de puissance souscrite supérieure à 250 kilovoltampères livrées à un utilisateur final ou consommées par un utilisateur final au titre d'un trimestre, pour lesquelles la taxe est devenue exigible, sont portées sur une déclaration déposée dans un délai de deux mois suivant le trimestre concerné. La taxe correspondante est acquittée lors du dépôt de la déclaration. Toutefois les petits producteurs mentionnés au 4° du 5 sont dispensés de l'obligation d'établir la déclaration.

La forme de la déclaration d'acquittement et les modalités déclaratives sont définies par arrêté du ministre chargé du budget. 

Un décret détermine les modalités d'application de l'assiette de la taxe lorsque les livraisons d'électricité donnent lieu, de la part des fournisseurs, à des décomptes ou à des encaissements successifs, ou à la perception d'acomptes financiers. Il détermine également les modalités du contrôle et de la destination de l'électricité et de son affectation aux usages mentionnés aux 4 à 6. »

XI. – (Non modifié)

XII. – Un décret détermine la notion de puissance utilisée pour déterminer le tarif de la taxe communale sur la consommation finale d'électricité, de la taxe départementale sur la consommation finale d'électricité et de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité ainsi que les modalités d'application de l'assiette de la taxe prévue aux I et II du présent article lorsque les livraisons d'électricité donnent lieu, de la part des fournisseurs, à des décomptes ou encaissements successifs, ou à la perception d'acomptes financiers.

Il détermine aussi la liste des procédés métallurgiques, d'électrolyse, de réduction chimique et de fabrication de produits minéraux non métalliques mentionnés aux 1° et 3° du IV de l'article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales, la nature des sites ou installations directement utilisées pour les besoins des activités de transport mentionnées au 2° du V du même article, la liste des documents ou éléments mentionnés au I de l'article L. 3333-3-2 du même code que les redevables, les personnes mentionnées au VII de l'article L. 3333-2 du même code et les gestionnaires de réseaux doivent tenir à disposition ou communiquer aux agents habilités.

XIII. – (Non modifié)

M. le président. L'amendement n° A-1, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu'ils versent aux communes. Ce prélèvement est ramené à 1,5 % à compter du 1er janvier 2012.

II. - Alinéa 57

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu'ils versent aux départements. Ce prélèvement est ramené à 1,5 % à compter du 1er janvier 2012.

III. - Alinéa 83

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les redevables prélèvent à leur profit, pour les frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu'ils versent aux syndicats ou aux départements. Ce prélèvement est ramené à 1 % à compter du 1er janvier 2012.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J’ai évoqué le sujet tout à l’heure. Nos collègues Michel Sergent, Jean-Claude Merceron et Xavier Pintat ont été associés au travail relatif à cet amendement.

Les paragraphes I et II de l’amendement visent à préciser le dispositif à la suite de l’amendement n°°105 adopté ce matin après une rectification ayant eu lieu pendant la séance. Les compromis, c’est bien, mais lorsqu’ils interviennent au dernier moment, cela ne permet pas d’examiner toutes les situations. Tel qu’il a été rédigé, cet amendement conduit en effet à une année blanche pour les fournisseurs redevables de la taxe en matière de prélèvement pour les frais de gestion.

Le présent amendement prévoit donc – conformément à l’intention des auteurs de l’amendement n° 105 et à la volonté du Gouvernement – que le taux de ce prélèvement sera égal à 2 % en 2011 et à 1,5 % à partir du 1er janvier 2012. (M. Philippe Marini s’exclame.) En effet, cher collègue Philippe Marini, vous aviez déposé un amendement identique, mais vous aviez eu la courtoisie de laisser notre collègue Michel Sergent « monter au créneau » pour le défendre, et négocier, si je puis dire.

Le paragraphe III de l’amendement que je présente en cet instant est également une disposition de compromis. Elle permet de répondre à la situation dans laquelle la taxe communale est perçue par les syndicats d’électricité. Nous avons supprimé tout à l’heure l’exonération du taux de prélèvement pour ce cas. Cet amendement propose un compromis : un taux de prélèvement de 2 % en 2011, qui serait ramené à 1 % à partir du 1er janvier 2012.

Voilà la proposition que fait la commission de l’économie.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le Gouvernement est bien entendu tout à fait satisfait du travail accompli, car cet amendement permet de résoudre deux sujets que nous avons évoqués lors des débats.

Le premier trouve une réponse dans les paragraphes I et II de l’amendement. Au cours du débat, un accord a été trouvé sur la nécessité de permettre aux redevables de prélever, afin de couvrir leurs frais de déclaration et de versement, 2 % du montant de la taxe qu’ils versent au département, ce taux étant ramené à 1,5 % à compter du 1er janvier 2012.

Nous avions exposé ces éléments lors de la discussion. Il nous a fallu les préciser de nouveau dans la rédaction définitive. Cet amendement clarifie les choses.

Concernant le second point, nous avons constaté lors de la discussion que la commission et le Gouvernement voulaient atteindre le même objectif. Une solution de compromis était nécessaire afin de trouver un équilibre raisonnable entre les exigences constitutionnelles et communautaires, tout en prenant en compte la spécificité historique des syndicats d’électrification.

La commission a défendu son objectif initial, et le Gouvernement a fait valoir l’importance de la prise en compte des enjeux constitutionnels. Nous avons trouvé un point d’équilibre au travers de cet amendement.

Je remercie M. le rapporteur et les autres membres de la commission d’avoir bien voulu travailler sur cet amendement, et ce dans des délais très courts. Je pense en particulier à MM. Xavier Pintat, Jean-Claude Merceron et Michel Sergent.

Ce travail clair, accompli dans les règles de l’art, a permis d’aboutir à un texte répondant à toutes les exigences et qui constitue une avancée.

Merci encore à la commission de l’économie !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° A-1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.

(L'article 12 est adopté.)

M. le président. Nous en avons terminé avec la seconde délibération.

Vote sur l’ensemble

Article 12
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Merceron. Après ces longues heures de débat, je me contenterai d’une intervention courte, simplement pour vous faire part de la tiédeur avec laquelle le groupe de l’Union Centriste accueille le texte, modifié marginalement pendant le débat.

Je ne vais donc pas entrer dans le détail des articles, je préciserai seulement les raisons pour lesquelles le soutien de notre groupe n’est ni unanime, ni enthousiaste. En effet, le texte ne nous semble pas être à la hauteur des enjeux. Autrement dit, il manque terriblement d’ambition.

L’enjeu du texte dépasse la simple mise en conformité du droit français avec le droit communautaire. Pourtant, il semblerait que l’on s’en contente.

Les enjeux d’une nouvelle organisation du marché de l’électricité sont multiples.

L’enjeu énergétique consistait à assurer la pérennité de notre approvisionnement énergétique, et la stabilité à long terme de notre politique énergétique, notamment nucléaire.

L’enjeu industriel consistait à conforter la place de champions énergétiques des entreprises françaises, en France, en Europe, voire dans le monde.

La difficulté pour GDF Suez de vendre une centrale à l’étranger alors qu’elle n’en a pas en France est bien connue.

Malheureusement, la réglementation actuelle ne permet toujours pas l’émergence d’une concurrence industrielle créatrice d’emplois et facteur d’innovation. Elle ne permet pas plus la vente de notre savoir-faire énergétique à l’étranger.

Enfin, l’enjeu de société d’une nouvelle organisation du marché de l’électricité consistait à assurer la nécessaire et progressive remontée des tarifs réglementés d’électricité, afin de financer l’intégralité du coût de production de l’énergie nucléaire.

Malgré l’intérêt pour ce débat, et la pédagogie de notre rapporteur, dont je salue l’effort, j’ai tout de même l’impression que l’on a rogné les fondamentaux.

Cette situation est d’autant plus embarrassante qu’un texte transitoire doit justement poser des bases saines et solides, répondant aux enjeux visés par le texte, quitte à opérer des ajustements par la suite.

Or, d’un point de vue industriel, on ne gagne pas vraiment en lisibilité, ni sur la stratégie globale de la France en matière énergétique, ni sur le prix de l’ARENH, ni sur les tarifs réglementés et leurs évolutions.

Jusqu’en 2015, les industriels comme les consommateurs d’électricité vont « naviguer à vue », et après 2025, on ne sait pas. Il n’y a même pas de sortie en sifflet de l’ARENH.

Or, d’un point de vue sociétal, est repoussée à 2015 l’adéquation des tarifs avec la réalité du coût de production nucléaire, c’est-à-dire de l’ARENH.

Pourquoi attendre ? Il n’est pourtant pas « grossier » de demander au consommateur de payer le prix réel de l’électricité, si toutefois deux conditions sont être réunies.

La première, c’est que cette « rationalisation tarifaire » finance l’investissement dans le parc nucléaire.

La seconde condition d’acceptabilité de la hausse tarifaire, certes déconnectée de la loi, mais ô combien actuelle, c’est que les plus démunis puissent bénéficier d’un tarif social.

Je me réjouis d’ailleurs que l’amendement centriste – disposition déposée par chaque groupe ! – sur l’automaticité du tarif social pour le gaz ait été voté.

Quant à l’attribution d’office du tarif social de l’électricité, nous serons tous très attentifs à la sortie du décret, madame le secrétaire d’État.

Voilà les principales raisons pour lesquelles le soutien des sénateurs centristes n’est ni unanime, ni allant. (M. Roland Courteau s’exclame.)

Cependant, la majorité d’entre nous va soutenir ce texte. Nous faisons en effet un pari, ou plutôt des paris.

Tout d’abord, nous faisons le pari que les industriels joueront le jeu de l’investissement, et que notre « champion » jouera celui du partenariat.

Ensuite, nous faisons le pari de la capacité d’action en toute indépendance de la Commission de régulation de l’énergie.

Enfin, nous faisons le pari d’une responsabilisation du Gouvernement sur le calendrier, afin de mettre en place, progressivement et courageusement, les ajustements réglementaires, notamment en ce qui concerne la politique des tarifs réglementés.

Pour ces raisons, nous serons extrêmement vigilants à ce que le texte, si peu ambitieux soit-il, puisse au moins tenir ses promesses, et surveillerons le calendrier de son exécution, que j’espère volontariste.

La réorganisation du marché de l’électricité est en effet une chance de développement industriel.

La France des « champions énergétiques » a une carte importante à jouer pour se positionner comme une puissance dans le domaine de l’énergie, à l’échelle européenne, dans un réseau interconnecté, et dans le monde, à condition que nos industriels disposent de la lisibilité nécessaire au développement de leur potentiel.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Je ne suis pas spécialiste en la matière, contrairement aux rapporteurs de ce texte, non seulement au Sénat mais aussi à l’Assemblée nationale, avec l’aimable Jean-Claude Lenoir, ancien cadre d’EDF qui, par ailleurs, a été médiateur de l’énergie. Il cumule un certain nombre de mandats en dehors de celui de député de l’Orne, département que j’ai l’honneur de représenter au sein de la Haute Assemblée.

Je n’ai aucun doute sur le fait que notre commission de l’économie entendra des présidents de syndicats primaires, voire du syndicat départemental de l’Orne, qui lui exposeront les difficultés et les « petits bonheurs » de tous les jours relatifs à ce texte.

Je souhaite attirer l’attention de notre assemblée, de Mme la secrétaire d’État et de M. le rapporteur sur les dangers de la contractualisation.

En effet, nous avons beaucoup parlé de contractualisation sur des montants prévisionnels.

De nombreuses entreprises, dans l’Orne ainsi que, je présume, dans toute la France, ont subi de plein fouet la crise économique. Liées par des contrats de fourniture d’EDF, ces entreprises, je pense en particulier à l’usine KME de Boisthorel, ont vu leur consommation d’électricité chuter. En conséquence, elles ont été contraintes de payer non seulement les montants prévus par le contrat, mais également un certain nombre de pénalités liées à la sous-consommation d’électricité.

S’agissant des dispositions à venir relatives à ces contrats, il est important d’attirer l’attention des fournisseurs et des clients sur ce type de risque. Les clauses des contrats doivent être suffisamment claires afin que nos entreprises ne soient pas doublement pénalisées.

J’ai l’honneur de faire partie de la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires. Nous avons procédé à de nombreuses auditions avec le président Martial Bourquin.

Il est parfaitement évident que l’aspect énergétique et la question de la fourniture d’énergie constituent un point très important de la stabilité économique, de l’attractivité du territoire ainsi que de la compétitivité de nos entreprises.

J’espère que ce texte ne ruinera pas les efforts mis en œuvre pour faciliter la reprise économique tant attendue et qui commence d’ailleurs peut-être à se faire sentir.

Je souhaite également vous indiquer que ces réserves sont relayées dans les territoires. J’espère que les conditions d’application de ce texte ne porteront atteinte ni aux particuliers ni, surtout, aux entreprises, qui n’en n’ont pas besoin en cette période difficile.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord louer la qualité des débats, et ce grâce à la compréhension du Gouvernement – même si nous n’avons pas toujours été écoutés –, mais aussi et surtout à la qualité de notre rapporteur, dont la compétence est remarquable. Nous pouvons lui décerner le titre de « Monsieur électricité du Sénat » !

M. François Trucy. Monsieur 100 000 volts ! (Sourires.)

M. François Fortassin. Toutefois, si je devais résumer ce texte, les deux mots qui me viendraient à l’esprit seraient « inégalité » et « complexité ». J’ai le sentiment que celui-ci va être très difficile à mettre en œuvre…

M. François Fortassin. … et je souhaite bien du plaisir à nos concitoyens pour en comprendre la finalité !

Mme Nathalie Goulet. Effectivement.

M. François Fortassin. Or nous ne devons jamais oublier que nous sommes des législateurs et que, plus la loi est simple, plus elle a des chances d’être comprise par nos concitoyens.

Il faut bien entendu compter avec l’obsession européenne à remettre en cause les acquis du service public pour, sinon casser, du moins détériorer l’un des fleurons de l’industrie française, notamment dans le domaine nucléaire.

Ce qui me gêne le plus, au fond, avec la bagarre des prix qui va intervenir – dont je ne suis d’ailleurs pas certain qu’elle les fasse baisser –, c’est que les Français vont être soumis à une sorte de double peine.

Le parc nucléaire, lorsqu’il a été mis en place, voilà trente ou quarante ans, a été financé avec les deniers des contribuables.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. François Fortassin. Jusqu’à présent, les consommateurs français en retiraient un avantage tarifaire. Désormais, les consommateurs allemands, qui n’ont jamais mis le moindre mark dans cette affaire, ne paieront pas l’électricité beaucoup plus chère que les consommateurs français.

Ce ne sont pas tout à fait les mêmes consommateurs, me direz-vous. Certes, beaucoup de ceux qui ont payé le parc nucléaire français sont maintenant dans l’au-delà, mais nous ne devons pas pour autant les oublier… De plus, certains auront effectivement payé deux fois.

Ce texte comporte des avancées, nous ne les nions pas. Je pense en particulier au réexamen annuel du prix de cession de l’électricité, à la possibilité, sous certaines conditions, de proroger les conventions favorables au secteur de l’hydroélectricité, etc. Par ailleurs, un quart des amendements déposés par mon groupe ont été acceptés. Ce sont des éléments positifs.

En revanche, il est des points sur lesquels j’ai trouvé le texte un peu timide, en particulier sur les syndicats primaires. Bien entendu, ils ont leur importance historiquement et un certain nombre d’élus y sont particulièrement attachés, mais il faudrait tout de même fixer un cap, même si on l’a dit en filigrane, afin que, dans un délai raisonnable – cinq ans, dix ans –, il existe un véritable syndicat départemental d’électricité dans tous les départements, qui sera un partenaire beaucoup plus puissant, notamment à l’égard de ERDF.

Il convient également de souligner la question des réseaux. Aujourd’hui, chaque client, qu’il réside dans un hameau de 50 habitants ou dans une ville de 20 000 ou 30 000 habitants, bénéficie de réseaux et de services à peu près comparables, notamment en termes de réparations. Nous pouvons, à cet égard, féliciter EDF et ERDF. Demain, je ne sais pas si la loi du marché permettra d’avoir la même réactivité.

Enfin, pour ma part, je regrette que les particuliers ne soient pas tenus, lorsqu’il y a des lignes électriques, de faire en sorte que les arbres ne dépassent pas six ou huit mètres de hauteur. En cas de coup de vent ou de tempête, ce serait une importante mesure de protection des réseaux.

Compte tenu des réserves que je viens d’émettre et du risque de mauvais entretien pour l’avenir, la majorité de notre groupe ne votera pas le projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à l’issue de nos débats au demeurant fort courtois, force est de constater que la loi NOME instaure une usine à gaz, objectivement kafkaïenne, dont il ressort in fine que l’on fait un pas de plus en direction de l’abandon au secteur privé de la gestion d’un bien pourtant essentiel et stratégique, l’électricité, avec comme première conséquence une hausse à court terme de 12 % de son prix, préjudiciable aux entreprises et aux ménages, particulièrement les plus modestes qui chauffent leurs logements mal isolés à l’électricité.

La discussion a cependant permis de mettre sur la place publique les défis colossaux sur le plan financier pour EDF entraînés par la décision de prolonger de vingt ans la durée de vie du parc nucléaire – 35 milliards d’euros à trouver rapidement – dans la perspective de son renouvellement estimé par le président Proglio à plus de 230 milliards d’euros, sans compter l’explosion du coût du développement de l’EPR : on comprend ses inquiétudes quant au prix de cession du courant nucléaire à ses concurrents…

Ainsi la filière électronucléaire française apparaît-elle désormais comme un colosse aux pieds d’argile, essentiellement pour deux raisons.

D’une part, elle dépend fondamentalement de gisements fossiles limités et situés dans des zones sensibles : les drames récents au Niger viennent démontrer combien l’indépendance énergétique de la France grâce au nucléaire n’est finalement qu’un mythe !

D’autre part, elle est entrée dans un goulet d’étranglement financier parce que le parc est vieillissant et que les stratégies de long terme qui s’imposent ne sont plus de mise dans une économie financiarisée où les actionnaires exigent des retours de dividendes rapides !

Nous connaissons tous la fameuse injonction : « Boire ou conduire, il faut choisir ! ». Il en est de même en termes de stratégie de production électrique : « nucléaire ou renouvelable, il faut choisir », tout simplement parce que nos capacités d’investissement ne sont pas illimitées et que la filière nucléaire est l’industrie la plus gourmande en capital.

Le couperet est tombé. Rappelons trois décisions emblématiques. En adoptant l'amendement n° 245 déposé par la majorité ouvrant la possibilité pour les grands groupes privés de participer au financement des investissements colossaux exigés dès aujourd’hui, le Sénat tente de consolider la filière nucléaire française, pourtant structurellement fragilisée.

Par contre, en refusant notre amendement n° 213 élargissant la possibilité pour des fournisseurs à vocation non lucrative – notamment les sociétés d’économie mixte et les sociétés coopératives d’intérêt collectif – de bénéficier de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, le Sénat refuse un dispositif qui permettait de stimuler le développement de la production d’énergie renouvelable.

De même, en refusant notre amendement n° 221 permettant de mettre à contribution les fournisseurs privés dans le cadre des plans départementaux destinés à lutter contre la précarité énergétique, le Sénat a démontré qu’il préférait ménager le secteur privé plutôt que de le mobiliser pour économiser l’énergie et se donner les moyens nécessaires pour isoler les logements des familles les plus pauvres.

Pour conclure, je considère que les affirmations ex cathedra de M. Apparu concernant le prix de revient du courant nucléaire ne manquent pas de culot. En effet, les provisions affichées pour le traitement des déchets, le démantèlement des centrales en fin de vie et le traitement de ces sites gravement pollués relèvent purement et simplement du dumping environnemental : en témoigne le scandaleux moratoire de cinq ans portant sur l’abondement par EDF aux fonds dédiés au traitement des déchets nucléaires, comme si le problème était réglé !

Alors, tentative de ménager le système électronucléaire français dans le cadre d’une libéralisation du marché de l’électricité, privilèges octroyés aux opérateurs privés, immobilisme coupable en termes d’économies d’énergie, de promotion des énergies renouvelables et de lutte contre la précarité énergétique… Nous votons contre cette loi NOME, qu’il faudra désormais appeler « Nouvelle opération mainmise sur l’électricité » au profit du secteur privé !

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. La démonstration est faite qu’à l’issue de nos débats, très courtois pour reprendre la formule de Jacques Muller, les exigences très libérales de la Commission européenne, faisant primer la concurrence sur toute autre considération, ont offert une nouvelle fois un appui au Gouvernement et à la majorité sénatoriale pour détricoter encore un peu plus notre système énergétique et pour revenir sur les acquis du mode de régulation mis en place depuis 1946.

Les spécificités du secteur de l’électricité ne sont pourtant pas compatibles avec les mécanismes concurrentiels, nous l’avons dit et répété. La recherche de la concurrence à tout prix est néanmoins devenue une fin en soi, à tel point que, à défaut de pouvoir la faire émerger en France, il vous faut la créer de façon factice, quitte d’ailleurs à affaiblir un système qui donne entière satisfaction depuis des décennies et que le monde entier nous envie.

Pourtant, l’ouverture à la concurrence, ça ne marche pas. Plusieurs ministres, des États membres de l’Union européenne, l’ont reconnu, encore récemment, au cours d’un Conseil des ministres de l’énergie. Démonstration est faite, une fois encore, que ce texte constitue bien une énième étape du mouvement de libéralisation.

La politique énergétique, telle que nous sommes en train de la subir depuis maintenant huit ans, n’est que bonds en arrière successifs déguisés en symboles de modernité. C’est la revanche sur les acquis de 1946, où la France avait justement tiré toutes les leçons d’un passé confié aux compagnies privées de l’eau et de l’éclairage.

Aujourd’hui, nous assistons à la montée en puissance d’énormes intérêts privés et la loi NOME, je l’ai déjà dit, est, pour l’instant, le dernier avatar d’un processus délétère.

Ce texte se traduira bien par l’augmentation des prix, et ce quoi que vous nous disiez. Nous l’avons démontré et vous ne nous avez pas convaincus du contraire.

Ce texte, quoi que vous nous disiez, va compromettre les investissements de production en électricité. Nous en avons fait la démonstration et, là encore, vous ne nous avez pas convaincus du contraire.

Ce texte est par ailleurs ambigu : soit le dispositif mis en place constitue ce que l’on appelle une clause de destination, et il risque de subir les foudres de Bruxelles ; soit, comme vous l’affirmez, il n’y a pas de clause de destination et rien n’oblige alors le fournisseur à destiner l’électricité bon marché qu’il obtient aux consommateurs français. Dans ce cas, cela signifie clairement que le fournisseur ayant accès à l’ARENH pourra vendre son électricité sur le marché de gros, et à des clients hors de France voire hors de l’Union européenne. Merci pour les consommateurs français, qui, eux, subiront nombre d’inconvénients liés à la production de l’électricité sans bénéficier complètement des prix compétitifs !

Dans un cas comme dans l’autre, c’est le piège dans lequel tout le monde est tombé. Au final, ce texte n’est pas bon ; il est même dangereux. Nous savons désormais, à l’issue de ces quatre jours et trois nuits de débat, que, s’il reste en l’état, il n’y aura pas que des gagnants, contrairement à ce qu’affirme d’une manière aveuglément optimiste l’étude d’impact du Gouvernement.

Les perdants seront les consommateurs français, petits et gros. Les gagnants seront les fournisseurs privés, petits et gros. En fait, par la grâce de la loi NOME, la rente nucléaire passera en partie de la poche des consommateurs dans celle des fournisseurs d’électricité privés… Et tout cela au nom de l’ouverture à la concurrence et de la libéralisation. Beau résultat que voilà ! Et nous qui pensions que l’Union européenne s’était construite autour d’une priorité principale : l’intérêt du consommateur !

D’ailleurs, le rapport Monti, que j’ai cité tout à l’heure, est parfaitement clair sur ce point.

Voilà l’un des résultats de la propagation de ce que l’on appelle souvent l’idéologie libérale !

Ce résultat, vous pouvez le constater : les conséquences économiques, environnementales, sociales démontrent que partout où cette politique a été appliquée il y a eu échec. Or, nous, en France, nous allons persister dans cette voie, alors que nombre de pays commencent à faire marche arrière.

Non, ce texte n’est pas bon ! Il n’est bon ni pour le pouvoir d’achat des ménages ni pour les industriels. Il n’est bon non plus ni pour l’attractivité de notre pays ni pour les investissements dans la production électrique. De plus, la France s’expose à un risque de dysfonctionnement et de défaillance de son système électrique.

Pour notre part, nous sommes plus inquiets encore que nous ne l’étions sur le risque de privatisation rampante du nucléaire.

Nous avons essayé de vous convaincre en vous proposant, par voie d’amendements, une autre solution, une autre direction, certes aux antipodes de la nouvelle étape de libéralisation que vous mettez en œuvre.

Bref, nul ne sera étonné que nous votions contre ce projet de loi, même si, je l’ai noté, quelques amendements du groupe socialiste ont été adoptés, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’énergie est au cœur d’enjeux sociaux, économiques et environnementaux. Elle constitue un bien vital pour les populations et, à ce titre, elle ne peut être considérée comme une simple marchandise. Elle est une ressource nécessaire et indispensable, à l’instar de l’eau.

La question de la pénurie des sources d’énergie de la planète n’est pas réglée, pas plus que celle du droit d’accès pour tous au chauffage et à l’éclairage : deux milliards d’êtres humains n’ont toujours pas accès à l’électricité et 80 % de l’énergie produite à l’échelle du globe est consommée par 20 % de la population mondiale.

Dans notre pays, la question de la précarité énergétique se pose avec force puisque 8 millions de personnes vivent au-dessous du seuil de pauvreté.

De plus, la production énergétique a des incidences sur l’environnement. Il est donc de la responsabilité des gouvernements de mettre en œuvre des politiques cohérentes et à grande échelle afin de lutter contre le réchauffement climatique et l’émission de gaz à effet de serre.

La voie suivie en Europe et en France par la droite, au nom de la primauté des règles du marché, conduit à banaliser le secteur énergétique, à le réduire à un secteur commercial comme un autre, et ce au détriment de la sûreté de toutes les installations produisant de l’électricité, pas seulement des centrales nucléaires.

Cette politique fondée sur les flux commerciaux et les profits à court terme met en danger l’indépendance énergétique de l’Europe.

Le projet de loi NOME est de la même veine. Avec ce texte, le Gouvernement intervient en faveur des opérateurs privés, au détriment de l’intérêt général. En effet, la concurrence ne fonctionne tout simplement pas. Les prix relativement bas proposés par EDF au titre des tarifs réglementés – qui sont le fruit des investissements passés –, le savoir-faire des salariés de l’entreprise, et sans doute d’autres raisons, ont conduit nos concitoyens à ne pas quitter l’opérateur historique.

Face à la concurrence, les gens ont pesé le pour et le contre. Ils ont fait le choix évident de l’entreprise publique. Quoi que vous en disiez, et parce qu’il ne serait pas populaire d’avouer le contraire, la conséquence principale de cette loi sera de tirer tous les tarifs électriques vers le haut, mais pas pour permettre les investissements nécessaires à l’entretien du réseau, à la construction de nouveaux moyens de production, à l’entretien de l’existant ou au financement de la recherche pour l’avenir.

La fin des tarifs réglementés pour les consommateurs non domestiques et la fin du TARTAM vont avoir des conséquences dramatiques sur l’activité industrielle et économique de notre pays. Les tarifs réglementés pour les particuliers vont être remis en cause par le système proposé.

Or, les conséquences sociales de la crise qui frappe des millions de familles conduisent à l’explosion des coupures d’électricité pour impayés et à la montée vertigineuse de la précarité énergétique.

L’article 2 du projet de loi, qui vise à assurer la sécurité d’approvisionnement à travers un marché des capacités d’effacement et des moyens de production, ne nous convainc absolument pas.

L’usager, même industriel, n’est pas en mesure de peser en tant que client sur les politiques menées, lesquelles sont structurantes pour le pays et pour l’environnement.

Il est indispensable de créer une filière énergétique des énergies renouvelables et de mettre en cohérence les différentes filières en tenant compte de leur particularité. D’où l’importance dans le secteur énergétique d’une entreprise publique intégrée !

Je dirai également deux mots sur la clause de destination actée dans le projet de loi et qui, à n’en pas douter, justifiera à l’avenir une nouvelle loi de libéralisation, voire de privatisation, car elle contrevient au droit communautaire.

Cette disposition permettra aux fournisseurs de revendre n’importe où l’électricité nucléaire achetée à bon prix à EDF, à la seule condition de payer la différence entre le prix d’achat et le prix du marché. Évidemment, en s’alignant sur le prix moyen du marché et en choisissant judicieusement la période, l’opération commerciale sera très lucrative ! Ensuite, notre pays devra augmenter ses importations pour fournir les Français, usagers ou industriels.

En matière de nucléaire, les reports de la constitution d’actifs dédiés au démembrement sont intolérables. La question du démantèlement des centrales et de la gestion des déchets nucléaires doit être la priorité du Gouvernement.

Enfin, nous l’avons clairement dit, il est impératif que la filière nucléaire soit entièrement maîtrisée par le secteur public. Nous vous avons exposé la situation préoccupante pour les salariés de l’explosion de la sous-traitance dans le secteur nucléaire. D’ailleurs, l’avenir nous inquiète lorsque nous entendons le secrétaire d’État M. Benoist Apparu ou M. le rapporteur déclarer qu’ils ne voient pas de raison de ne pas autoriser un opérateur privé à exploiter une centrale nucléaire !

Faut-il rappeler que l’acceptabilité du nucléaire en France reposait en grande partie sur le fait que l’opérateur et le propriétaire de la centrale, responsable de la sûreté devant la loi, étaient publics ?

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, les membres du groupe communiste républicain et citoyen et des sénateurs du parti de gauche voteront contre ce texte, qui met en œuvre une politique énergétique purement commerciale. Une telle politique oublie, et c’est grave, les aspects industriels, sociaux et les besoins en termes de recherche. Or ils devraient guider l’action du Gouvernement, au nom de l’intérêt général.

M. Thierry Foucaud. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Afin de ne pas prolonger nos débats, je serai bref. Je ne répéterai pas ce que j’ai dit dans la discussion générale ou à plusieurs reprises au cours de l’examen des articles.

Je tiens simplement à remercier Mme la secrétaire d’État, le Gouvernement et tous leurs collaborateurs, notamment ceux du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer et du ministère des finances, de nous avoir permis de travailler en amont sur ce texte.

Pour un rapporteur, être associé à un projet de loi avant même qu’il ne soit définitif est assez exceptionnel et appréciable. Le fait que les différents collaborateurs ont été mis à notre disposition pendant toute la phase de préparation du projet de loi a permis une bonne coopération entre le législatif et l’exécutif.

Je tiens également à remercier tous mes collègues, sur l’ensemble des travées. Certains d’entre vous ont naturellement exprimé très clairement leur opposition au texte – c’est votre rôle –, au cours de la discussion générale ou lors de l’examen de l’article 1er, qui est le cœur du texte. C’est normal. Mais vous avez aussi, sur toutes les travées, contribué à enrichir ce texte, sur des sujets qui n’étaient pas prévus initialement, et je l’ai apprécié. Il n’y a pas eu d’obstruction systématique.

Mes chers collègues, vous avez enrichi ce texte sur la CRE et pour régler le problème du TARTAM, qui était dans une situation délicate. Vous l’avez également enrichi sur la petite hydroélectricité, sur la biomasse énergie, ainsi que sur des sujets plus techniques, comme l’enfouissement des lignes à haute tension. Vous l’avez encore enrichi pour conforter ERDF dans ses missions de service public et pour résoudre des problèmes de coordination de travail entre les syndicats d’électricité et ERDF. Vous l’avez enfin enrichi sur les DNN, qui connaissent des petits problèmes de pertes de réseau.

Cela montre bien que, sur un texte ne faisant pas l’objet d’un consensus – comme nous allons le voir lors du vote dans quelques instants –, nous sommes les uns et les autres capables d’être concrets et pragmatiques, afin d’enrichir un texte.

Cela montre également, madame la secrétaire d’État, que le Sénat, fidèle à sa réputation, sait travailler, enrichir et renforcer un texte. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je ne dirai bien évidemment pas le contraire de ce que vous venez de dire, monsieur le rapporteur, concernant le Sénat. Il est clair que cette assemblée a toujours beaucoup travaillé et enrichi les textes qui lui ont été soumis. J’ai eu l’occasion de m’en rendre compte tant hier, lorsque je siégeais sur vos travées, qu’aujourd’hui, en tant que membre du Gouvernement. Le travail que fournissent les sénateurs est de grande qualité.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi, en mon nom et au nom de Jean-Louis Borloo, de remercier chaleureusement et sincèrement M. le président de la commission de l’économie, Jean-Paul Emorine, ainsi, bien sûr, que M. le rapporteur, Ladislas Poniatowski, pour le travail effectué tant durant la préparation de ce texte d’importance qu’au cours des débats en commission et en séance publique.

Je remercie également tous les sénateurs qui, par leur présence durant ces vingt-cinq heures de débats et leurs propositions, ont permis d’améliorer ce projet de loi.

Qu’il me soit aussi permis de revenir, très rapidement, sur quelques points essentiels de nos débats.

Maintenir pour l’ensemble des consommateurs en France le bénéfice de la compétitivité du parc nucléaire historique est un objectif sur lequel nous sommes tous d’accord. C’est en effet non seulement une condition de l’attractivité de notre pays pour les industries, mais aussi un élément du « pacte nucléaire » pour les citoyens.

Pour cela, ce projet de loi donne des droits et des devoirs aux fournisseurs alternatifs : le droit d’acheter à EDF de l’électricité au coût complet du parc nucléaire historique, le devoir de prendre toute leur part de responsabilité en ce qui concerne la sécurité d’approvisionnement et la maîtrise de la demande en électricité.

Ce projet de loi pérennise les tarifs réglementés pour les petits consommateurs et permet une réversibilité totale entre les offres libres et réglementées. C’est un gage de liberté de choix pleine et entière pour les petits consommateurs.

Je soulignerai maintenant brièvement les améliorations apportées à ce texte par les différents parlementaires qui se sont succédé hier et aujourd'hui.

Nous devons au rapporteur M. Poniatowski et à M. Vial une meilleure explicitation de la possibilité laissée aux fournisseurs alternatifs et, le cas échéant, aux électro-intensifs de conclure de gré à gré des partenariats avec EDF pour participer aux investissements de prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires.

Des précisions ont été apportées sur le mode de fonctionnement de l’obligation de capacité, à l’initiative de M. le rapporteur.

Nous devons à M. Vial la mise en place d’appels d’offres par RTE pour l’effacement des consommateurs industriels, dans l’attente de la mise en place opérationnelle de l’obligation de capacité.

Les règles de réversibilité pour les consommateurs non domestiques d’électricité et de gaz naturel ont été harmonisées.

Tous les membres de cette assemblée ont unanimement défendu l’idée de l’automatisation de l’attribution des tarifs sociaux, qu’il s’agisse du gaz ou de l’électricité. L’automaticité est maintenant une affaire en voie de régularisation.

Je tiens à saluer le large consensus dont a fait l’objet l’adoption de ces deux dernières dispositions.

Un équilibre a été trouvé concernant la Commission de régulation de l’énergie avec, entre autres éléments, la consultation par la CRE du Conseil supérieur de l’énergie.

Grâce à MM. Pintat et Merceron, des compromis ont été trouvés afin de favoriser un meilleur dialogue entre les autorités concédantes et le gestionnaire du réseau de distribution, sur la participation du gestionnaire du réseau public de transport au financement de l’enfouissement d’ouvrages, ou encore sur la réforme de la taxe locale sur l’électricité. Toutes ces avancées, nous les devons au travail parlementaire, que je salue une dernière fois.

Encore une fois, je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de ces riches échanges, qui ont conduit à un texte bien plus équilibré que celui qui a été déposé sur le bureau de votre assemblée. Il est le résultat d’une véritable coproduction législative. Comme vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, ce travail, le Gouvernement et le Parlement l’ont entamé dès la réflexion sur le contenu du texte. C’est ainsi que l’on parvient à des dispositifs plus efficaces. (Mme Bernadette Dupont applaudit.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 283 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 333
Majorité absolue des suffrages exprimés 167
Pour l’adoption 181
Contre 152

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
 

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Commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

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Conventions fiscales avec la Suisse, la Belgique et le Luxembourg

Adoption définitive d'un projet de loi en procédure accélérée et adoption définitive de deux projets de loi

(Textes de la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion :

- du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (projet n° 715, texte de la commission n° 725, rapport n° 724) ;

- du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Belgique tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur les revenus (projet n° 664, texte de la commission n° 706, rapport n° 705) ;

- du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (projet n° 666, texte de la commission n° 708, rapport n° 705).

La conférence des présidents a décidé que ces trois projets de loi feraient l’objet d’une discussion générale commune.

Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez souhaité débattre en séance publique des avenants aux conventions fiscales avec la Suisse, signé le 31 août 2009, avec la Belgique, signé le 7 juillet 2009, et avec le Luxembourg, signé le 3 juin 2009.

C’est évidemment l’occasion de faire le point sur la situation de la France en matière de lutte contre les paradis fiscaux : elle est déterminée à tenir ses engagements, mobilisée pour les faire respecter par un certain nombre de pays.

Je souhaite vous exposer très brièvement notre action en trois points, en rappelant, d’abord, la politique que nous avons menée sur le plan international depuis maintenant trois ans pour accélérer ce processus, ensuite, comment nous avons transcrit ces engagements internationaux dans notre corpus législatif intérieur et, enfin, en vous apportant un éclairage spécifique sur le cas particulier de la Suisse.

En premier lieu, depuis la fin de l’année 2008, la France a sans cesse porté ce combat contre les paradis fiscaux conjointement avec un certain nombre d’autres États membres de l’OCDE ; nous étions alors 17, représentés en l’espèce par mon collègue Éric Woerth, aux côtés de Peer Steinbrück, mon homologue allemand. Ces 17 États membres de l’OCDE, réunis à Paris, avaient décidé de faire de la question de la transparence fiscale un des combats essentiels du G20.

Ce point a été évoqué pour la première fois à l’occasion de la réunion du G20 à Washington. Les premiers résultats effectifs ont commencé à voir le jour grâce en particulier à la pugnacité, à la détermination, à la résilience du Président de la République, qui n’a pas souhaité quitter la séance de la réunion du G20 tant que nous n’étions pas parvenus à un accord spécifique concernant les différentes listes établies par l’OCDE.

Vous vous souviendrez probablement que, à l’époque, l’OCDE avait publié trois listes : une liste noire comprenant quatre États, une liste grise sur laquelle figuraient trente-huit États ou territoires et, enfin, une dernière liste incluant tous les autres États, c'est-à-dire ceux qui non seulement avaient pris l’engagement de respecter les standards internationaux de transparence fiscale et les avaient mis en œuvre, mais respectaient également le principe selon lequel ils échangeraient avec au moins douze autres États membres des informations sur la situation fiscale des ressortissants de l'État requérant.

Ces travaux et cette pression internationale ont porté leurs fruits, puisque, à ce jour, les listes ont considérablement changé : la liste noire a disparu et la liste grise, qui comprend les pays ayant pris des engagements, mais n’ayant pas véritablement signé douze conventions, ne comporte plus que treize juridictions.

Ainsi, monsieur le président de la commission des finances, en près d’un an et demi, pas moins de cinq cents accords d’échange d’informations ou avenants à des conventions visant à éviter la double imposition ont été signés.

Grâce à ces signatures, un peu plus de transparence règne dorénavant. Le secret bancaire qui était souvent opposé par un certain nombre de ces juridictions n’est plus opposable et une véritable coopération peut s’instaurer entre l'État requérant et l'État à l’égard duquel les informations sont demandées.

Certains pays, le Brésil, le Chili, le Luxembourg et la Suisse, ont levé leur réserve sur la convention type de l’OCDE, qu’ils reconnaissent dorénavant.

De nombreux pays ont modifié leur législation nationale, à l’instar du Liechtenstein, de l’Autriche ou de Hongkong et Singapour.

Résultat, plus d’accords ont été signés en l’espace de deux ans qu’au cours de la décennie précédente. Ce fameux secret bancaire, que l’on pensait impénétrable, a été abandonné par un certain nombre d’États.

Telles sont les actions qui ont été menées sur le plan international. La France a vraiment joué son rôle et l’action du Président de la République a été déterminante pour faire avancer ces thèses de lutte contre l’obscurité fiscale, au détriment parfois de relations tranquilles avec d’autres participants.

En deuxième lieu, concernant l’ordre juridique français, le Gouvernement a pris soin de traduire ses engagements internationaux. Dès le lendemain du G20, le Gouvernement a engagé une politique de négociation d’accords bilatéraux tous azimuts avec les États de la liste de l’OCDE. Nous avons proposé à tous les États ou territoires qui figuraient sur les listes grise et noire de signer un accord permettant l’échange de renseignements.

Dans les cas où nous étions déjà liés par une convention fiscale, nous avons choisi de proposer de conclure des avenants.

Nous avons proposé dès le 27 février au Luxembourg et dès le 20 mars 2009 à la Belgique d’engager une renégociation de la convention liant nos États afin de la mettre en conformité avec les standards internationaux.

Ayant levé leurs réserves sur l’application des dispositions relatives à l’échange de renseignements figurant au modèle de convention de l’OCDE, ces deux États ont répondu favorablement à notre proposition en mars 2009.

Les discussions menées avec la Belgique et le Luxembourg ont ainsi permis d’aboutir à la conclusion d’avenants parfaitement conformes aux derniers standards du modèle de l’OCDE.

Dans les autres cas, nous avons proposé de ne signer qu’un accord d’échange de renseignements sans contrepartie, puisqu’il ne s’agit que de respecter un engagement pris devant la communauté internationale.

C’est ainsi que, depuis le mois de mars 2009, la France a signé six avenants et vingt et un accords d’échanges de renseignements. En outre, plus d’une demi-douzaine d’autres avenants ou accords ont d’ores et déjà été paraphés au niveau administratif.

Nous serons donc bientôt en mesure d’échanger des renseignements fiscaux sans restriction avec les juridictions présentées jusqu’à présent comme les moins coopératives du continent européen – la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, qui font l’objet de notre discussion d’aujourd’hui, et le Liechtenstein en particulier – et avec les plus importants centres financiers asiatiques – Hongkong et Singapour – ou ceux que nous appelons les paradis fiscaux – les îles Caïmans, les îles Vierges britanniques, Jersey, Guernesey ou les Bahamas.

Ces résultats placent véritablement la France en tête du palmarès des pays qui combattent en faveur de la transparence.

À la suite de la proposition du Gouvernement, vous avez inscrit dans la loi française une définition des juridictions non coopératives, assortie de critères précis et de sanctions fiscales pour les États concernés.

Un arrêté du 12 février a ainsi fixé, pour 2010, une liste de dix-huit États ou territoires non coopératifs au regard de la législation française.

Les sanctions prévues dans la loi de finances pour 2010 sont extrêmement lourdes : majoration à 50 % des retenues à la source sur les flux à destination des États de la liste, taxation des flux entrants – ce qui est une réelle nouveauté dans notre droit fiscal –, refus de déduire les charges payées dans ces territoires, durcissement des conditions de justification des prix de transfert.

Nous avons donc utilisé la panoplie complète des outils fiscaux pour décourager véritablement tout mouvement commercial et tout échange financier avec ces pays. À ces taux de taxation, il devient rédhibitoire d’engager des relations commerciales.

Au-delà de la ratification de ces avenants visant à éviter la double imposition et de la signature de ces accords d’échange de renseignements, notre préoccupation, désormais, consiste à nous assurer que ces textes seront respectés.

C’est dans ces conditions que le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales – qui regroupe les trente membres de l’OCDE et plus de soixante autres États ou territoires – a mis en place un mécanisme d’évaluation par les pairs. La France a été chargée de présider ce groupe d’évaluation ; François d’Aubert, délégué général à la lutte contre les paradis fiscaux, a été désigné à cet effet.

Les travaux du Forum ont progressé très vite, puisque les premières évaluations ont été lancées dès le mois de mars 2010. Elles portent à la fois sur le cadre légal – lois internes et accords internationaux –, pour vérifier que le dispositif législatif de chacun des États a été modifié, et sur l’application des textes, afin de s’assurer qu’ils sont effectivement appliqués.

Je souhaite qu’un premier bilan soit tiré lors du sommet du G20 qui se tiendra en France au mois de novembre 2011. Cela sous-tend une accélération du calendrier initialement prévu.

En troisième lieu, j’évoquerai plus spécifiquement le cas de la Suisse.

La convention actuellement en vigueur, comporte des dispositions permettant l’échange de renseignements, mais dans des conditions extrêmement restrictives, qui ne permettent notamment pas la levée du secret bancaire.

Mme Christine Lagarde, ministre. La Suisse a accepté d’adopter les normes les plus exigeantes en matière d’échange de renseignements. Cet engagement s’est concrétisé le 27 août 2009, jour de la signature de l’avenant à la convention fiscale franco-suisse. Celui-ci comporte des stipulations qui nous permettront d’obtenir, sans limitation, des renseignements de la part des autorités suisses.

Un tel avenant est très important, car, dorénavant, tous les impôts, toutes les personnes et tous les renseignements « vraisemblablement pertinents » pour l’application de notre législation fiscale sont concernés, sans que le secret bancaire puisse être opposé par les autorités et constituer ainsi un obstacle.

Les dispositifs anti-abus prévus dans la convention elle-même, dont l'objectif est de lutter contre les situations et transactions abusives entre nos deux États, ont également été simplifiés et sécurisés.

Mesdames, messieurs les sénateurs, à la fin de l’année 2009, la Suisse a décidé de suspendre le processus de ratification de cet avenant. Certains d’entre vous se souviennent d’ailleurs que le sujet a été longuement débattu lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2009. Les divergences ponctuelles ont été résolues et la Suisse a accepté la position française sur l’interprétation des standards de l’OCDE.

Aujourd’hui, les modalités d’application de cet avenant s’inscrivent dans un cadre pleinement conforme aux exigences de l’OCDE et de la France en matière d’échange de renseignements.

Dans ces conditions, la procédure de ratification a pu reprendre en Suisse. Le Conseil des États – l’équivalent du Sénat français – l’a adopté à l’unanimité le 17 mars dernier. J’espère que ce texte, qui renforcera nos relations bilatérales déjà riches, pourra entrer en vigueur très prochainement. Il nous reste évidemment à le ratifier nous-mêmes.

Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les raisons pour lesquelles je vous invite à voter les projets de loi autorisant l’approbation des avenants aux conventions négociées par la France avec la Belgique, le Luxembourg et la Suisse. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. le président de la commission des finances applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat qui s’ouvre a un double objet.

Il a bien entendu, d’une part, un objet législatif, c’est-à-dire la ratification d’avenants aux conventions fiscales liant la France à trois pays : la Suisse, la Belgique et le Luxembourg.

Mais il a aussi, d’autre part, un objet plus large, à savoir ouvrir un débat sur la politique française de lutte contre les juridictions non coopératives et les « paradis fiscaux ». En effet, comme vous vous en souvenez, madame la ministre, l’examen du projet de loi de régulation bancaire et financière, qui nous a occupés un long moment, ne nous a pas permis, le 14 septembre dernier, de tenir ce débat pourtant important au sein de notre commission.

Aujourd'hui, mes chers collègues, comment se caractérise la politique de lutte contre les juridictions non coopératives ?

Sur la question des États ou territoires non coopératifs, je sais bien que notre action, pour être la plus efficace possible, doit être menée au niveau international. Ce n’est pas en ayant raison tout seuls que nous ferons forcément avancer les dossiers.

À cet égard, la crise a peut-être eu un mérite, celui d’avoir ouvert les yeux des principaux dirigeants du monde quant aux risques que pouvaient faire courir les juridictions opaques et non coopératives, les « paradis bancaires et juridiques », au système financier dans son ensemble ainsi qu’aux finances des États.

Madame la ministre, vous l’avez rappelé, le G20 a agi et la France, sous l’impulsion du Président de la République et sous la vôtre, n’y est pas pour rien. Nous le verrons bientôt en étudiant le cas de la Suisse, la publication d’une liste de juridictions non coopératives et la menace de sanctions ont eu un effet d’entraînement réel pour un certain nombre de pays.

Peut-être pourrez-vous d’ailleurs nous détailler les effets de ce qui a déjà été entrepris et les efforts qui pourraient être poursuivis au niveau du G20.

Mais la France a aussi eu le courage d’agir de son côté, dans le cadre de la loi du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009. Son article 22 a ainsi entériné la création d’une liste française d’États ou territoires non coopératifs. Celle-ci a été publiée dans un arrêté en date du 12 février 2010, avec des conséquences concrètes, en particulier des prélèvements à la source sur les flux financiers à destination de ces juridictions.

Pour lancer notre débat, j’aurai simplement, madame la ministre, quelques questions à vous poser.

Tout d’abord, êtes-vous en mesure de nous dire si cette publication officielle a eu des conséquences tangibles en termes de lutte contre l’évasion fiscale ou le blanchiment ? Avez-vous constaté un effet incitatif pour provoquer ou accélérer la négociation de conventions avec les États ou territoires concernés ?

Ensuite, pouvez-vous nous donner des informations sur la composition de cette liste ? Nous nous souvenons des débats qu’avait entraînés l’exclusion d’office, au moins pour la première année, des États membres de l’Union européenne. Pour l’avenir, ces États respectent-ils tous les conditions pour ne pas figurer sur cette liste ? Dans le cas contraire, je n’ose y penser, le Gouvernement envisage-t-il la possibilité d’y inscrire un État membre ?

Enfin, y a-t-il des États ou territoires avec lesquels nous avons conclu une convention, mais pour lesquels l’application de ce texte n’est pas satisfaisante ? Rédiger des textes, c’est bien ; les appliquer, c’est encore mieux ! Dans l’affirmative, est-il envisagé d’inscrire ces juridictions sur notre « liste noire » ?

J’en arrive à présent aux conventions particulières signées avec la Suisse, la Belgique et le Luxembourg, et aux avenants y afférents.

Dans la « vague » de conventions fiscales dont nous sommes invités à autoriser la ratification, ces trois textes occupent, nul ne l’ignore, une place toute particulière, et ce à un triple titre.

En premier lieu, la Suisse, la Belgique et le Luxembourg sont des partenaires importants de la France, notamment sur le plan économique. N’oublions pas non plus les liens humains d’une grande intensité que nous avons avec ces pays voisins.

Ainsi, la communauté française en Suisse compte 200 000 membres et la communauté suisse en France, quelque 130 000 personnes. C’est considérable.

En deuxième lieu, il faut bien le dire, aux yeux de nombreux Français, des pays comme la Suisse ou le Luxembourg, voire la Belgique, mais à un degré moindre sans doute, ont une image particulièrement associée au secret bancaire et aux comportements pouvant en résulter.

En troisième lieu, au-delà du symbole, le poids des secteurs financiers luxembourgeois et, plus encore, suisse – la Suisse est au septième rang mondial en la matière – fait de ces avenants un maillon essentiel de la politique de lutte contre l’évasion fiscale.

À l’évidence, les conventions en vigueur liant, parfois de longue date, la France à ces trois pays n’étaient plus adaptées aux normes de notre époque.

Par exemple, pour répondre aux exigences de la partie suisse, l’échange d’informations fiscales figurant dans la convention franco-helvétique est strictement limité aux seules fins de bonne application de ladite convention.

Dans les trois cas que nous étudions, l’opposabilité du secret bancaire de ces pays interdit, en pratique, à la France de mener à bien une lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. En effet, les possibilités offertes d’échange de renseignements ne permettent pas à l’administration d’obtenir des informations de nature à conduire des opérations de contrôle fiscal et à s’assurer du bien-fondé des bases d’imposition.

Grâce à l’action du G20, les négociations dans ce domaine ont pu être relancées.

Comme pour d’autres conventions, il me faut souligner à cet instant le rôle déterminant du G20. Celui-ci a décidé, lors du sommet de Londres, au mois d’avril 2009, de publier une liste de juridictions non coopératives, puis, au cours du sommet de Pittsburgh, en septembre de la même année, de mettre en place des procédures d’évaluation par les pairs et un mécanisme de sanctions d’ici à deux ans.

Une telle détermination a fortement modifié l’attitude de nos partenaires. Ceux-ci ont en effet été incités à renégocier leurs conventions afin de les adapter aux standards de l’OCDE. La France s’est alors engagée dans des négociations avec eux et elle est parvenue à des accords, sur la base des textes que nous examinons aujourd’hui.

Les principales dispositions de ces trois avenants concernent l’échange d’informations. Ils vont permettre un progrès très important en la matière.

Il s’agit, à chaque fois, d’aligner les échanges d’informations entre la France et la Suisse, la Belgique et le Luxembourg sur les standards de l’OCDE.

Ainsi, s’agissant de la Suisse, sur laquelle j’insiste un peu, l’avenant prévoit : « Les autorités compétentes des États contractants échangent les renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la présente Convention » – la suite est essentielle – « ou pour l’administration ou l’application de la législation interne relative aux impôts de toute nature […] dans la mesure où l’imposition qu’elle prévoit n’est pas contraire à la convention. » De ce fait, l’échange d’information ne sera plus limité, comme auparavant, à la seule application de la convention.

Il est, par ailleurs, précisé dans ce même texte que les renseignements échangés pourront être utilisés à des fins non fiscales, notamment sociales.

De plus, il est clairement indiqué dans les trois avenants que les pays signataires ne peuvent refuser de communiquer des renseignements en invoquant uniquement leur secret bancaire.

L’avenant franco-suisse est le plus précis s’agissant des modalités de l’échange de renseignements. À cet égard, il est à relever que la « pêche aux renseignements », selon l’expression consacrée, est prohibée…

M. Adrien Gouteyron, rapporteur. … et que, de manière générale, il n’est pas prévu d’échange de renseignements spontané ou automatique.

Mme Nicole Bricq. C’est cela qui ne va pas !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur. Les États devront donc faire des demandes individuelles. Mais c’est un pas important, madame Bricq !

Mme Nicole Bricq. Un premier pas…

M. Adrien Gouteyron, rapporteur. Nous étudierons tout à l’heure une disposition nouvelle qui élargit encore cette possibilité.

Toutefois, je tiens à apporter une précision : sur la forme de la demande, un échange de lettres entre les administrations fiscales de nos deux pays, qui, évidemment, n’ont pu agir sans avoir reçu l’aval des pouvoirs politiques, ouvre la possibilité de communiquer des informations relatives à un contribuable dont le fisc français n’aurait pas déterminé la banque. Il s’agit là d’une réelle avancée.

Madame la ministre, mes chers collègues, je veux à présent traiter très brièvement des négociations avec nos partenaires allemands.

Il ressort des contacts que j’ai eus avec les éminents représentants de votre administration, madame la ministre, ainsi qu’avec le Quai d’Orsay, que l’Allemagne est, elle aussi, en train de renégocier ses conventions et qu’elle poursuit, du moins en ce qui concerne la Suisse, des objectifs apparemment plus ambitieux que les nôtres, ou, plus exactement, allant au-delà de ce que nous avons obtenu dans l’avenant dont nous traitons.

D’où ces questions, très simples, madame la ministre : ne gagnerions-nous pas à coordonner nos démarches avec des pays tels que l’Allemagne, qui poursuivent les mêmes buts que nous ? Dans le cas précis de la Suisse, que se passerait-il si l’Allemagne obtenait plus et mieux que nous ? Nous réengagerions-nous dans de nouvelles négociations ? Nous alignerions-nous – ou tenterions-nous de nous aligner – sur ce qu’auraient obtenu les Allemands ?

À propos de la convention franco-suisse, je souhaite relever un point qui n’est pas négligeable, parce que son incidence humaine et politique est importante : je veux parler de la double exonération de certaines pensions d’anciens travailleurs frontaliers. En effet, l’avenant franco-suisse ne se limite pas aux seules questions relatives aux échanges de renseignements.

Le texte actuel de la convention franco-hélvétique stipule que « les pensions et autres rémunérations similaires versées à un résident d’un État contractant au titre d’un emploi antérieur ne sont imposables que dans cet État. ».

Ce dispositif, relativement classique, crée cependant un vide pour une catégorie particulière de pensionnés. En effet, certaines pensions, correspondant aux prestations de retraite complémentaire, peuvent être versées en Suisse sous forme de capital, option qui n’existe pas en droit français pour ce type de pensions.

Il en résulte que, si des personnes résidant en France – par exemple, d’anciens travailleurs frontaliers – perçoivent de telles pensions, elles ne sont imposées à ce titre ni en France, le droit interne français ne prévoyant pas de mécanisme d’imposition pour les pensions versées en capital, ni en Suisse, du fait des dispositions de la convention, puisque la règle prévoit l’imposition de ces ressources en France.

L’article 4 de l’avenant prévoit qu’il soit précisé dans la convention que « ces pensions et autres rémunérations similaires sont également imposables, dans la limite de la fraction non imposée dans l’autre État contractant, dans l’État contractant d’où elles proviennent, si elles ne sont pas imposées, en tout ou partie, dans l’autre État contractant en vertu de son droit interne ». Le libellé n’est pas d’un français très léger, mais il est assez clair !

Même si j’ai été informé de l’opposition à ce dispositif de certaines associations de travailleurs frontaliers, je considère que la France ne pouvait valablement refuser de mettre un terme à cette anomalie fiscale, qui est d’ailleurs constitutive, il faut le dire, d’une rupture d’égalité devant l’impôt. En effet, les pensions versées sous forme de rente, quant à elles, sont bien entendu imposées.

Tant que la France n’impose pas elle-même les pensions en capital, il n’est pas anormal d’octroyer à la Suisse le droit de le faire. Cependant, madame la ministre, il serait beaucoup plus judicieux de le faire nous-mêmes… Peut-être pouvez-vous nous dire si le Gouvernement envisage une telle hypothèse, vouée à se concrétiser dans un prochain texte.

Mes chers collègues, permettez-moi de vous renvoyer aux deux rapports écrits pour les autres dispositions de ces avenants.

Pour conclure, je vous indique que la commission des finances a adopté les trois projets de loi, qui constituent une avancée indéniable dans la lutte contre l’évasion fiscale à destination de la Suisse, de la Belgique et du Luxembourg. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quand on pense à la Suisse, une image vient à l’esprit, emblématique, celle d’un paradis pour gens fortunés.

Ce paradis, protecteur d’un secret bancaire élevé au rang d’élément constitutionnel par les Suisses eux-mêmes, offre à ses résidents choisis un statut fiscal tout à fait particulier, favorisant notamment une très faible imposition de patrimoines importants grâce au dispositif du « forfait fiscal ».

Bien sûr, c’est cela qu’il faut combattre.

La modification de la convention fiscale franco-suisse procède naturellement du mouvement observé depuis le dernier G20, mouvement qui consiste à faire en sorte que les pays considérés jusqu’ici comme des paradis fiscaux, en particulier ceux qui pratiquent le secret bancaire, passent quelques accords avec des pays respectant les normes de l’OCDE en matière de transparence financière, afin d’éviter la mise à l’index que constitue l’inscription sur la « liste noire » des pays non coopératifs.

La convention a fait l’objet d’une longue négociation et porte sur plusieurs points assez différents. Je dois dire, après M. le rapporteur, que le cas des frontaliers pose problème, puisqu’il s’agit de 100 000 personnes. Bon an mal an, 2 000 de nos compatriotes s’installent chaque année en Suisse, souvent au seul motif qu’ils se sont mariés avec un Suisse ou une Suissesse.

En réalité, un tiers des immigrants qui s’établissent en Suisse le font pour exercer une activité professionnelle ; quatre sur dix par regroupement familial, et un sur sept pour y suivre des études ou une formation professionnelle.

Comment ne pas rappeler ici, monsieur le rapporteur, que des milliers de travailleurs frontaliers demeurant dans le Doubs, les départements alsaciens, l’Ain ou encore la Haute-Savoie, font « tourner » les entreprises suisses, alors que c’est souvent notre système éducatif qui les a formés ? Ces travailleurs frontaliers sont très majoritairement de jeunes hommes travaillant, comme c’est souvent le cas des immigrés, dans l’industrie.

Ce problème des frontaliers est abordé de manière discutable, puisque les intéressés se retrouvent confrontés à une nouvelle imposition : celle des pensions de retraite complémentaire d’origine suisse qui peuvent leur être versées au bénéfice de cotisations volontaires, non prises en compte dans l’assiette de l’impôt sur le revenu suisse.

Il convient de rappeler que cet impôt comporte aujourd’hui quatre parts : la première est destinée à la Confédération, la seconde au canton, la troisième à la commune de résidence et, la dernière, à l’Église d’affiliation. Peut-être cette dernière part explique-t-elle que quelques Suisses viennent goûter à nos impôts, plus laïques...

Toujours est-il que l’imposition des capitaux versés par les caisses de retraite suisses est à l’ordre du jour et qu’il me semble nécessaire de prévoir, dans la pratique, une prise en compte équilibrée de ce qui constituera, pour certains frontaliers, le moment venu, un revenu à caractère exceptionnel perçu en fin d’activité professionnelle.

Notons aussi que la convention fiscale entre la France et la Suisse – de manière, ma foi, assez surprenante – prévoit un allégement de la taxation des revenus de capitaux perçus en France par des organismes de placement suisses. On prétend lutter contre les paradis fiscaux, et voilà que l’on procède à un nivellement par le bas de la taxation d’une catégorie de revenus bien particulière !

Les dividendes perçus par des Suisses sur des activités en France seront désormais traités de la même manière que ceux d’un résident français, c’est-à-dire avec un taux d’imposition égal à zéro...

Certes, les stipulations de la convention relatives à la poursuite des évadés fiscaux s’étant manifestement soustraits à leurs obligations envers le Trésor public français sont mises en exergue. Je ne parlerai pas des artistes, de certains grands chefs d’entreprise, de sportifs experts de la petite balle jaune ou des voitures de course…

D’après l’étude d’impact du projet de loi, l’affaire porterait sur 56 millions d’euros de créances fiscales. Si l’on rapporte cette somme aux 3 000 Français dont les noms figurent sur la fameuse liste soustraite aux archives de la banque HSBC à Genève, ce sont des redressements moyens de 18 000 euros dont il sera question : autant dire une goutte d’eau dans l’océan de la fraude fiscale, ou quelques minutes d’émission du fameux jet d’eau de Genève dans le flot continuel des transactions financières de ses banques !

En somme, que contient donc cette convention ? Une taxation de revenus de remplacement, en l’occurrence, des retraites complémentaires versées en une fois en capital ; des dispositions d’allégement de la fiscalité de l’épargne dont il est dit dans l’étude d’impact qu’ « elles sont en tout état de cause de nature à favoriser les investissements des fonds de pension suisses en France » ; et une chasse à la fraude fiscale, somme toute très limitée, quoique fondée sur une mise en cause du secret bancaire suisse.

À ce sujet, nous pouvons nous délecter de ce que pensent les Suisses eux-mêmes, en tout cas leur gouvernement et leurs banquiers : « Du point de vue suisse, et en tenant compte des changements drastiques intervenus récemment sur la scène internationale, et ceux à venir pour les États évalués comme non coopératifs en matière d’assistance administrative, les solutions retenues dans le projet d’avenant peuvent être considérées dans l’ensemble comme favorables. »

On précise plus loin que « le niveau de l’entraide administrative convenu permettra en particulier d’éviter par ailleurs des contre-mesures qui seraient très dommageables pour la place économique suisse prise dans son ensemble. »

Traduit en français de tous les jours, cela signifie simplement que la Suisse coopérera, certes, avec l’administration française, mais dans des limites admises, sans profondément mettre en question ce qui fait que la Confédération est à la fois le quatre-vingt-douzième pays du monde par sa population, et le septième par l’importance de sa place financière.

Bref, compte tenu de l’équilibre de la convention ainsi modifiée, nous n’avons d’autre choix que de ne pas voter le texte de ce projet de loi, qui ne va pas assez loin dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la tenue de ce débat aujourd’hui, à l’occasion de l’approbation d’avenants à des conventions entre la France et un certain nombre de pays, dont la Suisse, est une très bonne occasion pour les parlementaires de rappeler le mandat que nous donnons au Gouvernement et au Président de la République, dans la droite ligne du G20 de Londres, pour lutter contre les trous noirs de la finance, plus communément appelés « paradis fiscaux ».

Je remercie le président Arthuis d’avoir pris cette initiative, anticipant la demande qui aurait pu lui être faite. Ce débat fait suite à celui que nous avons tenu le 12 juillet dernier ; je pense que c’est là une très bonne habitude que le Sénat a prise, et qu’il doit garder.

Madame la ministre, il est possible d’agir au plan national à partir de deux principes auxquels, je crois, nous pouvons tous souscrire : la transparence et le contrôle.

Tout d’abord, au sujet de la transparence, je voudrais dire un mot des États-Unis, qui nous précèdent depuis mars 2010.

En effet, les États-Unis ont fait un premier pas en direction de la levée du secret bancaire pour les acteurs financiers privés étrangers qui souhaitent investir sur leur territoire avec le vote de la loi dite « FATCA » – pour Foreign Account Tax Compliance Act –, qui oblige les établissements financiers étrangers souhaitant investir sur le territoire américain à révéler aux autorités l’identité de leurs clients quand ceux-ci sont ressortissants des États-Unis.

À partir du 1er janvier 2013, si les clients souhaitent conserver leur anonymat, les banques devront prélever une retenue à la source de 30 % sur le résultat des investissements, un niveau assez dissuasif. Avec cette loi, les États-Unis mettent en effet en place rien de moins qu’un échange automatique d’informations fiscales entre les établissements financiers étrangers et leur gouvernement, une obligation de déclarer les comptes.

La mesure a suscité un véritable tollé en Suisse, pays qui devra désormais s’assurer d’obtenir une dérogation, puisque sa loi bancaire lui interdit de fournir ce genre d’informations. Mais l’on voit mal les banques suisses se résoudre à ne plus investir aux États-Unis !

Ainsi, par le biais d’une locate rule, les États-Unis ont mis un pied dans la porte jusqu’ici fermée du secret bancaire, en attendant une révision des standards de l’OCDE, lesquels n’admettent pas, pour l’instant, l’automaticité dans les conventions que nous signons.

Cela signifie, je le dis en français pour ne pas paraphraser une formule devenue un lieu commun, que c’est possible : ce que les États-Unis ont fait, on peut le faire à un niveau national !

Les conventions soumises à notre approbation sont une mise en conformité avec les standards de l’OCDE, qui a permis aux paradis fiscaux de sortir de la liste noire en quelques mois sans changement de leurs pratiques.

L’article 26 du modèle de convention fiscale OCDE établit une obligation d’échanger des renseignements « qui sont vraisemblablement pertinents » pour l’application correcte d’une convention, ainsi que pour la gestion et l’application des législations fiscales nationales des États contractants. On est donc loin de l’automaticité des échanges d’informations introduite sur le territoire américain !

J’en viens à l’avenant du 27 août 2009 à la convention franco-suisse, avenant que vous avez signé pour le compte de la France, madame la ministre, avec le Président de la Confédération helvétique. Cet avenant est censé lever le secret bancaire entre les deux États en cas d’évasion fiscale.

Il y a quelques mois, à la suite de l’affaire du fichier HSBC et de l’utilisation des données par le fisc français, la Suisse avait suspendu avec fracas le processus de ratification. Les autorités helvétiques considéraient que cela revenait à une « pêche aux renseignements », à un fishing, qui ne s’inscrivait ni dans la convention OCDE ni même dans l’avenant en cours d’approbation.

L’enjeu est lourd, il est diplomatique et financier. En reprenant le processus de ratification de la convention avec la France, la Suisse souhaite, me semble-t-il, tenir ses engagements afin de respecter les standards OCDE qui lui ont permis de sortir de la liste grise des paradis fiscaux.

Sans doute nos amis suisses ont-ils mesuré le risque qu’il y aurait eu pour eux à se retrouver sur notre liste des États et territoires non coopératifs, puisque la France dispose de sa propre liste. Aux termes des dispositions – soutenues, je le rappelle, par le groupe socialiste - que nous avons prises dans la loi de finances rectificative de décembre 2009, cette liste devrait être révisée d’ici à la fin de l’année 2010.

Toutefois, cet avenant est limitatif. Pouvait-on faire plus ? Je reconnais, madame la ministre, que le pas diplomatique peut quelquefois l’emporter sur l’impératif financier et le but recherché.

J’y vois quand même une occasion manquée de mettre la France, qui va présider le G20, au premier rang, ô combien exemplaire, des pays qui, tirant vraiment la leçon de la crise financière, poussent, après les États-Unis, à la révision du standard OCDE et à la levée du secret bancaire.

D’autant que le débat politique sur le sujet a cessé d’être tabou en Suisse et y est désormais ouvert. Dans son édition du 30 avril 2010, le quotidien Le Temps a ainsi publié un article amenant à négocier le passage à l’échange automatique. Ce qui n’était ni possible ni même envisageable le devient ! Des hommes politiques locaux et des ONG soutiennent le projet.

Rappelons –  rappel utile parce que nous avons aussi des avenants aux conventions avec des pays de l’Union européenne et des pays de la zone euro –  que l’article 26 du modèle de convention OCDE avait suscité les réserves de l’Autriche, de la Belgique et du Luxembourg, qui, avant la crise des subprimes, ne consentaient à fournir des informations aux fiscs étrangers qu’en cas de fraude fiscale avérée.

Finalement, en mars 2009, tous ces pays ont indiqué à l’OCDE qu’ils retiraient leurs réserves et acceptaient donc le principe d’échanges d’informations dans le cas d’évasion fiscale.

Si cet avenant-ci est extrêmement important, c’est en raison de la place financière de leader qu’occupe la Confédération helvétique : faire évoluer la pratique de nos amis suisses permettrait d’accroître la pression sur les autres et, surtout, de faire évoluer le standard OCDE.

Un autre obstacle demeure, madame la ministre, et nous concerne nous particulièrement, nous, pays de l’Union européenne : je veux parler de la directive « Épargne » de 2003.

La Commission a proposé une révision de cette directive en novembre 2008 ; le Parlement européen l’a adoptée, amendée, en avril 2009. Force est cependant de constater que, actuellement, cette révision, qui est fondamentale pour l’objectif qui est le nôtre, est bloquée sur le bureau du Conseil européen.

Je voudrais rappeler – nouveau rappel historique utile – que cette directive était entrée en vigueur cinq ans après l’accord unanime intervenu à ECOFIN en 2000. Il a fallu cinq ans de négociations ! Elle a fait l’objet d’ajustements pour tenir compte de l’évolution des produits d’épargne, ainsi que des produits d’assurance vie, du comportement des investisseurs et des contournements réalisés par des paiements d’intérêts transitant par des structures intermédiaires non imposées, les fameux paradis fiscaux.

Or le Luxembourg, la Belgique et l’Autriche, pays membres de la zone euro, ont obtenu un sursis par rapport à l’obligation d’information. À titre de mesure transitoire, ces États doivent en effet opérer une retenue à la source de 20 %, qui devrait être portée à 35 % au 1er janvier 2011.

On comprend donc que, au sein du Conseil, les pays qui ne veulent pas abandonner leur avantage fassent de la résistance. Ils nous mettent, nous, Européens, en difficulté : comment souligner le retard pris dans les négociations internationales sans nous exposer à nous entendre dire qu’il faut d’abord faire le ménage chez nous !

Le retard pris par le Conseil dans la ratification définitive de cette directive « Épargne » empêche la clarification des orientations prises en Europe en matière de lutte contre la fraude fiscale.

Madame la ministre, je voudrais que le Gouvernement saisisse ce que l’on appelle en mauvais français une « fenêtre d’opportunité » pour le faire, parler fort, peser et obtenir des résultats afin de remédier à cet état de fait et réviser cette directive ; je pense que nous pouvons tous nous retrouver sur cet objectif.

J’en arrive au contrôle, ce qui nous intéresse directement, nous, parlementaires, dans notre mission de contrôle de l’exécutif. Car signer des conventions ne saurait nous exonérer de cette mission essentielle à laquelle je vous sais, monsieur le président de la commission des finances, fortement attaché.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !

Mme Nicole Bricq. Pour obtenir au niveau national la transparence des comptes de la part des banques et établissements financiers auxquels l’État fait appel, nous défendrons trois amendements. Je n’en dirai pas plus à cet instant, parce que nous devrions enfin enchaîner, à un moment ou à un autre, sur la discussion du projet de loi de régulation bancaire et financière prévue dans la suite de l’ordre du jour.

Madame la ministre, à ce jour, nous ne disposons, pour comprendre la pertinence du dispositif législatif français de lutte contre la fraude fiscale, que de chiffres épars. Ils proviennent, notamment, des travaux de notre rapporteur général, Philippe Marini, dans un rapport qu’il a rendu en 2008, ou de ceux de la mission d’information de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur les paradis fiscaux, présidée, à l’époque, en septembre 2009, par Didier Migaud.

Pour nous, l’enjeu d’une publication annuelle des contrôles sur la base de l’article 209 B est de pouvoir évaluer l’évolution de l’effort de contrôle fiscal et de ses moyens, ainsi que la pertinence des nouveaux outils dont s’est dotée la France en loi de finances rectificative pour 2009.

En conclusion, nous estimons que le Gouvernement ne peut arguer de la nécessité de s’en remettre aux décisions européennes et au G20 en matière de lutte contre la fraude fiscale. Les décisions européennes en suspens, la présidence française du G20 en 2011, la révision de la convention OCDE, sont autant de raisons pour la France, et ses parlementaires, d’être à l’avant-garde et de trouver ainsi les bons compromis avec ses partenaires.

Je vous y invite avec la conviction que vous me connaissez, madame la ministre. Je pense que c’est maintenant qu’il faut le faire. Nous avons peu de temps : comme vous le savez, les mauvaises habitudes reviennent très vite, une fois la crise passée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, applaudit également)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais faire une observation et poser deux questions à Mme la ministre.

Je veux souligner à quel point les textes que nous examinons ce soir – et peut-être cette nuit – sont importants.

La crise née pendant l’été 2007 aux États-Unis a mis en évidence les enjeux de la mondialisation et la nécessité de mieux coordonner les régulations.

Je regrette que les circonstances et l’agenda parlementaire nous amènent à discuter de ces thèmes fondamentaux aussi tard, un jeudi soir.

La session extraordinaire va prendre fin dans cinq heures et nous allons sans doute devoir débattre pendant la nuit, dans des conditions qui ne sont pas les meilleures.

Oui, la crise nous a fait prendre conscience des enjeux de la mondialisation. Jusqu’à une période récente, lorsque venaient devant le Parlement des textes relatifs à la régulation bancaire ou financière, le contenu étant éminemment technique, je ne suis pas certain que, en dehors de quelques spécialistes, dont le rapporteur général, chacun d’entre nous en mesurait bien les enjeux.

Depuis lors, sur l’initiative des présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, nous avons constitué un groupe de réflexion, le « G24 », composé de douze députés et douze sénateurs. Nous nous sommes promis de consacrer désormais le temps requis pour bien analyser de telles dispositions et être capables, lorsque nous revenons dans nos départements et nos circonscriptions, d’expliquer nos options, nos choix devant nos concitoyens.

Il s’agit, en effet, de faire comprendre ce qu’est la mondialisation et ce qu’elle implique en termes de régulation.

C’est vrai pour le texte qui va venir en discussion ce soir sur la régulation bancaire et financière. C’est vrai pour les conventions fiscales bilatérales. Nous avions opté pour un système d’approbation sans discussion. Or la crise a mis en évidence ce que représentaient ces trous noirs de l’économie.

J’apprécie que M. Adrien Gouteyron soit devenu expert en conventions fiscales bilatérales et je souhaite que ces ratifications soient autre chose qu’une simple formalité.

C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que nous ayons une discussion générale. Je remercie nos collègues du groupe CRC-SPG d’avoir voulu étendre la discussion générale de la Suisse vers le Luxembourg et la Belgique.

Je souhaite, madame la ministre, monsieur le président, que nous prenions désormais le temps d’analyser chacune de ces dispositions.

Il ne s’agit pas de tomber dans l’angélisme. On a vu les conventions bilatérales se multiplier. On a vu des espaces non coopératifs signer entre eux de ces conventions pour satisfaire à l’obligation quantitative, faute de quoi ils s’exposaient à la sanction que constitue l’inscription sur la liste noire ou sur la liste grise.

Ma première question rejoint l’une de celles d’Adrien Gouteyron.

Lorsque plusieurs États membres de l’Union européenne négocient avec un État extérieur, peut-on envisager que ceux des États membres qui satisfont, sans ambiguïté, aux exigences de la convention de l’OCDE, signent entre eux un pacte ?

Si l’Allemagne négocie avec la Suisse, ou si la France signe avec ce même pays, est-il imaginable, à l’heure où le Gouvernement évoque la convergence fiscale, que de telles négociations puissent être menées collectivement ? Cela permettrait d’exercer une pression plus forte sur ceux des États qui se montrent réticents quand il s’agit de satisfaire à leurs obligations en matière de levée du secret bancaire et d’information.

Ma seconde question concerne un tout autre sujet, qui intéresse la Suisse, le Luxembourg et la Belgique.

Je pensais que la consommation ne se délocalisait pas. Or il se trouve que les centrales d’achat des grands groupes de distribution qui opèrent en France ont ouvert des établissements à Genève, à Zurich et à Bruxelles, sans doute pour des raisons de stratégie économique et commerciale, et qu’elles soumettent leurs fournisseurs français au paiement de redevances variant, à ce que l’on dit, de 1 % à 2 %. Ces redevances s’apparentent à des marges arrière et donc contreviennent aux principes posés en matière de concurrence et de transparence entre les fournisseurs, quelquefois les agriculteurs, et la distribution.

Ces phénomènes me paraissent étranges. Je les avais évoqués ici même, à la tribune du Sénat, devant M. Chatel, qui était alors chargé de la concurrence ; il n’avait pas nié ces pratiques. Je voudrais être certain qu’elles ne contreviennent pas aux obligations fiscales mais aussi aux obligations de transparence dans la concurrence.

Je vous fais confiance, madame la ministre, pour mettre bon ordre à ces déviances, si elles étaient avérées. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...

La discussion générale commune est close.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. Je tiens tout d’abord à remercier M. Gouteyron de son excellent rapport et à le féliciter de l’expertise qu’il a acquise, comme l’a souligné M. le président de la commission, dans le domaine des négociations de conventions fiscales.

Cette matière est en effet éminemment complexe ; j’ai pu le constater à l’occasion des négociations menées avec nos amis suisses en vue d’aboutir – enfin ! - à un accord. Le ciselage d’un certain nombre de clauses, notamment sur la nature des informations échangées et même sur la nature des informations fournies à l’occasion de la demande d’information, a exigé de multiples rédactions de part et d’autre.

Vous m’avez interrogée, monsieur le rapporteur, sur les conséquences de la publication de chacune des deux listes.

La première liste a été publiée par l’OCDE au moment du G20 de Londres. Je peux vous assurer que, dès le lendemain du G20, tous les pays qui figuraient sur la liste grise sont venus frapper à notre porte, et probablement à celle des autres États participants, pour engager des négociations en vue de parvenir à des accords d’échange d’informations ou d’obtenir des avenants aux conventions existantes ; je pense notamment à la Suisse, à la Belgique et au Luxembourg, objet de la présente discussion, mais également aux îles Caïman et aux Bahamas, qui figuraient sur la liste grise, dont les représentants se sont précipités pour négocier avec nous. Cette liste de 38 États n’en compte plus que 14.

La seconde liste, publiée par la France en février 2010, a produit à peu près le même effet. J’ai ici le tableau retraçant les conventions signées, en cours de négociation ou paraphées. Parmi les conventions signées, on trouve Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Grenade et, parmi les conventions paraphées, le Costa Rica, le Libéria, Belize ; quelques autres conventions sont encore en cours de négociation.

L’effet a donc été radical !

Vous avez posé la question de l’inscription d’un État membre de la Communauté européenne sur la liste française des États non coopératifs, à laquelle je viens de faire référence, liste qui fera l’objet de modifications, comme l’a indiqué Mme Bricq.

Ce point a été débattu à l’époque. De mon point de vue, trois directives devraient avoir exactement le même effet au sein de l’Union européenne. L’une a été mentionnée par Mme Bricq : c’est la directive de 2003 en matière de fiscalité des revenus de l’épargne. Les deux autres directives sont celle de 1977, relative à l’assistance administrative, et celle de 1976, relative à l’assistance mutuelle en matière de recouvrement.

Pour mémoire, je rappelle que ces trois directives comportent des dispositifs fiscaux. Or toute modification, toute évolution en matière fiscale requiert, au sein de l’Union européenne, l’unanimité des États membres. Dans ce domaine, il est clair que la pression des pairs finit par avoir un impact y compris sur les États que vous avez mentionnés, madame Bricq, c’est-à-dire le Luxembourg, l’Autriche et la Belgique. On sent une évolution des positions, notamment un affaiblissement plus net de la Belgique et de l’Autriche.

J’ose espérer que nous parviendrons à trouver également un véritable accord d’échange d’informations avec le Luxembourg, nonobstant l’augmentation du prélèvement à la source, qui sera effective à partir du 1er janvier.

Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous maintenons une position extrêmement ferme sur le sujet, tant nos services fiscaux, nos représentants aux différents échelons, que moi-même, à l’occasion du conseil ECOFIN, en exigeant de façon impérative l’échange d’informations. Je puis vous assurer de ma détermination à obtenir cet échange, qui n’a d’égale que ma condamnation très ferme de situations qui ne me paraissent pas acceptables.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

Mme Christine Lagarde, ministre. Vous m’avez interrogée, monsieur le rapporteur, sur le point précis de l’imposition des pensions des travailleurs frontaliers versées en capital. Vous savez, car vous connaissez très bien cette matière, que les personnes résidant en France qui ont travaillé en Suisse et perçoivent, à ce titre, des pensions versées par l’État suisse, échappent, en l’état actuel des textes, à toute imposition, aussi bien en Suisse qu’en France.

La convention qui est soumise à votre examen met fin à cette double exonération et prévoit que la Suisse pourra taxer ces pensions aussi longtemps que la France ne les taxera pas.

Je vous confirme que mes services travaillent actuellement, en liaison avec les élus et les nombreuses associations concernées, à un dispositif permettant d’imposer ces pensions en France, de manière équitable. Nous préparons un texte pour le projet de loi de finances rectificative, et nous sommes sur le point d’aboutir.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela s’appliquera au président de société qui a placé sa retraite chapeau en Suisse ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Foucaud, vous avez évoqué la liste HSBC. Les 3 000 contribuables figurant sur cette liste font ou feront l’objet de contrôles fiscaux.

Je vous indique également que la cellule de régularisation qui a été mise en place n’a prononcé aucune amnistie. Elle a permis de rapatrier 7 milliards d’euros de capitaux, de collecter 1 milliard d’euros d’impôts et de régulariser la situation de 4 500 contribuables.

Vous avez eu raison de mentionner, madame Bricq, le nouveau dispositif législatif américain. Celui-ci présente cependant un inconvénient, que nous évoquerons à l’occasion de l’examen du projet de loi de régulation bancaire et financière : bien que la législation américaine soit extrêmement précise en la matière, ces dispositions particulières n’entreront en vigueur qu’à partir du 1er janvier 2013…

Pour ma part, j’ai pris un décret, dès le 30 août dernier, que j’ai adressé aux 360 banques établies en France, en vue de leur demander des informations sur la totalité des virements supérieurs à un montant déterminé et effectués vers d’autres États pendant une période donnée. Le décret permet une application immédiate de ce mécanisme. On peut toujours passer par la voie législative, car la loi prévaut ; mais si un décret permet d’obtenir les mêmes résultats, dans un délai plus court, il ne faut pas se priver d’y recourir ! (Mme Nicole Bricq s’exclame.)

Si j’ai bien compris, madame Bricq, vous allez défendre un certain nombre d’amendements à l’occasion de l’examen du projet de loi suivant. Je répondrai donc à ce moment-là aux questions que vous avez posées.

Vous avez fait référence, monsieur le président de la commission, aux « accords entre soi » que certains des États figurant sur la liste grise concluent entre eux, pour arriver au total requis des douze conventions sans pour autant s’obliger avec des États, eux, coopératifs.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Endogamie non coopérative...

Mme Christine Lagarde, ministre. Sur les 500 accords qui ont été signés, 10 % seulement relèvent de cette stratégie des « accords entre soi ».

Vous avez également évoqué la possibilité, pour les États membres de l’Union européenne qui négocient avec d’autres États, de conclure un pacte de négociation.

Pendant un temps très bref, nous avons mené les travaux de négociation avec la Suisse parallèlement à la négociation conduite entre la Suisse et les États-Unis. Soyez certains que nous avons pu tirer parti de la négociation qui avait eu lieu avec les États-Unis pour faire prévaloir notre point de vue et obtenir un certain nombre d’avancées, qui figurent dorénavant dans l’avenant à la convention entre la France et la Suisse.

Ces points d’accord sont, à mon sens, plus favorables à l’échange d’informations, sans tomber dans l’expédition découverte, et nous permettront de cibler plus efficacement les dispositifs auprès des banques concernées.

Avant de négocier avec l’Allemagne, nous nous étions concertés avec les représentants de ce pays et avions échangé nos « feuilles de route ». Mais il se trouve que, pour des raisons « diplomatiques », comme dirait Mme Bricq, nos négociations avec la Suisse ont abouti plus rapidement. Les négociations avec l’Allemagne ont repris, depuis lors. Elles ne sont pas achevées à ce jour, mais sont en voie de conclusion. Avec nos partenaires allemands, nous nous tenons mutuellement informés des progrès réalisés.

Mes interlocuteurs de la Confédération helvétique m’avait assurée, à l’époque, que la France pourrait profiter de tout dispositif plus favorable adopté à l’occasion d’une convention d’échange d’informations signée entre la Suisse et un autre État, sans que clause de la nation la plus favorisée figure expressis verbis dans cette convention. Mais l’accord diplomatique a été conclu à cet effet.

Enfin, vous m’avez interrogée sur les commissions prélevées par les centrales d’achat. Vous aviez évoqué cette question en 2008 avec Luc Chatel, qui était alors chargé de la consommation au sein du Gouvernement. L’article L. 462 du code de commerce nous permet de sanctionner, sur le fondement du droit de la concurrence, des commissions de référencement, qui ne sont plus tolérées en droit français.

Nous continuons à agir sur ce terrain : les transactions transfrontalières tomberaient désormais sous le coup de la loi. Par ailleurs, nous examinerons si des outils fiscaux à caractère international, à l’instar de l’examen des pratiques de prix de transfert, peuvent être utilisés pour remettre en cause de telles pratiques. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

convention fiscale avec la suisse

M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune.

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée à Paris le 9 septembre 1966 (et son protocole additionnel), modifiée par l'avenant signé à Paris le 3 décembre 1969 et par l'avenant signé à Paris le 22 juillet 1997, signé à Berne le 27 août 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Je vous rappelle que ce vote sur l’article unique à valeur de vote sur l’ensemble du projet de loi.

Y a-t-il des demandes d’explications de vote ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention fiscale avec la belgique

M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Belgique tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur les revenus.

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et la Belgique tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus (et son protocole additionnel), signée à Bruxelles le 10 mars 1964 et modifiée par les avenants signés à Bruxelles les 15 février 1971, 8 février 1999 et 12 décembre 2008, signé à Bruxelles le 7 juillet 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Je vous rappelle que ce vote sur l’article unique a valeur de vote sur l’ensemble du projet de loi.

Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention fiscale avec le luxembourg

M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune.

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris le 1er avril 1958, modifiée par un avenant signé à Paris le 8 septembre 1970 et par un avenant signé à Luxembourg le 24 novembre 2006, signé à Paris le 3 juin 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l’article unique.

M. Thierry Foucaud. Permettez-moi une citation :

« Depuis les dernières décennies, la place financière occupe une place prépondérante dans l’économie nationale. Les comptes économiques, les finances publiques et l’emploi national dépendent ainsi largement du développement de ses activités. Le Gouvernement poursuit une politique constante de diversification des activités – notamment dans le domaine des banques d’émission de lettres de gage, de la titrisation et du capital à risque –, ainsi que de développement de la compétitivité sur le plan international, en contribuant aux efforts visant à faire de la place financière un centre d’excellence dans des domaines de compétence spécifiques : activités bancaires proprement dites, du secteur des assurances, des fonds d’investissement et des fonds de pension, de la Bourse, ainsi que des autres professionnels du secteur financier. »

Cet extrait, mes chers collègues, ne provient pas d’une publication ordinaire.

Comme vous vous en êtes sans doute rendu compte, il s’agit tout simplement de la page d’accueil, figurant à la rubrique « place financière », sur le site internet du ministère des finances luxembourgeois !

Je veux bien vous croire, madame la ministre, mais peut-on réellement aboutir quand on traite avec ces gens-là ?

Luc Frieden, cosignataire de la convention fiscale dont nous débattons, est donc, en quelque sorte, l’animateur combatif de cette guerre économique que mène le Grand-Duché avec les autres places européennes s’agissant des activités financières.

Nul doute, et permettez-moi d’anticiper le débat sur la régulation bancaire et financière, que les mouvements financiers que continueront de connaître les fonds d’investissement grand-ducaux resteront vifs, tout en présumant de la transparence et de la clarté que l’on ne manquera certainement pas de leur accorder en leur délivrant le fameux passeport européen indispensable à tout placement sur les marchés de l’Union.

Mais, sur le même site du ministère des finances luxembourgeois, on peut lire également ceci:

« Pour les clients fortunés, de nombreuses banques proposent une approche globale qui permet de structurer sur le long terme la totalité du patrimoine – avoirs financiers et professionnels, assurances-vie et biens immobiliers – dans l’optique d’une planification fiscale et successorale optimales.

« À cet égard, la place financière de Luxembourg propose plusieurs techniques d’assistance à la planification et à la mise en œuvre des solutions de protection du patrimoine. Ainsi, des services de conseil et d’assistance sont offerts non seulement par les banques, mais aussi par des gestionnaires de fortune indépendants et par les sociétés de consultance de réputation internationale basées à Luxembourg. La protection du patrimoine des clients et la planification successorale font principalement appel à la constitution de sociétés patrimoniales éprouvées ainsi qu’à des opérations de fiducie. »

Au cas où nous n’aurions pas tout à fait compris, on peut encore lire sur ce même site :

« La gestion de portefeuille occupe une place centrale dans la gamme des services offerts à Luxembourg.

« Des gestionnaires expérimentés assistent les clients dans la structuration de leur portefeuille et leurs décisions d’investissement. La gestion discrétionnaire est offerte à des prix raisonnables qui sont généralement liés à la valeur des actifs sous gestion. L’évolution des portefeuilles fait l’objet d’un suivi permanent […]. »

Je pourrais encore multiplier les citations mais le temps de parole dont je dispose n’est pas illimité.

Comme on le constatera – ces textes sont parfaitement accessibles encore aujourd’hui sur le site du ministère des finances luxembourgeois -, on ne peut, d’ores et déjà, qu’accorder une faible efficacité à la convention fiscale dont nous débattons à l’instant.

Le Grand-Duché, ses banques, ses compagnies d’assurance, ses fiducies, ses filiales de banques françaises et internationales, ses fonds d’investissement, sont déjà en ordre de bataille pour permettre aux très riches Français exilés fiscaux au Luxembourg d’éviter les foudres du fisc français.

Vous l’aurez compris, nous ne voterons donc pas cette convention faux-nez, qui ne présente qu’un caractère d’affichage.

M. le président. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Je vous rappelle que ce vote sur l’article unique a valeur de vote sur l’ensemble du projet de loi.

Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

7

Conventions internationales

Adoption définitive de quatre projets de loi en procédure d'examen simplifié

(Textes de la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de quatre projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces quatre projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

convention fiscale avec le bahreïn

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn en vue d'éviter les doubles impositions, signé à Paris le 7 mai 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn en vue d’éviter les doubles impositions (projet n° 665, texte de la commission n° 707, rapport n° 705).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention fiscale avec la malaisie

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Malaisie tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signée à Paris le 24 avril 1975 (ensemble un protocole) et modifiée par l'avenant signé à Kuala Lumpur le 31 janvier 1991, signé à Putrajaya le 12 novembre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Malaisie tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôt sur le revenu (projet n° 667, texte de la commission n° 709, rapport n° 705).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention fiscale avec singapour

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus, signée à Paris le 9 septembre 1974, signé à Singapour le 13 novembre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur les revenus (projet n° 668, texte de la commission n° 710, rapport n° 705).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention douanière avec les pays-bas dans la région des caraïbes

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention entre la République française et le Royaume des Pays-Bas, relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d'appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l'île de Saint-Martin (ensemble une annexe et un échange de notes des 4 et 18 novembre 2008), signée à Philipsburg le 11 janvier 2002.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de la convention entre la République française et le Royaume des Pays-Bas, relative à l’assistance mutuelle et à la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d’appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l’île de Saint-Martin (projet n° 716, texte de la commission n° 731, rapport n° 730).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

8

Organisation des débats

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, nous sommes sous la pression du chronomètre : nous devrions suspendre la séance avant minuit, mais ce sera difficile.

Est-il imaginable que la suspension de deux heures soit réduite, compte tenu de ces circonstances exceptionnelles ?

M. le président. Non, monsieur le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je regrette qu’il n’y ait pas plus de souplesse possible dans l’organisation de notre travail…

Mme Nicole Bricq. Il faudrait mieux organiser le travail !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous n’avons pas besoin de deux heures pour dîner !

M. le président. Il s’agit d’un principe.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je propose donc, monsieur le président, que nous entamions dès maintenant la discussion générale du projet de loi de régulation bancaire et financière, pour interrompre nos travaux à vingt heures et les reprendre à vingt-deux heures, puisque l’on ne peut pas abréger la suspension.

M. le président. J’allais vous proposer de suspendre maintenant la séance pour la reprendre à vingt et une heures trente. Nous pouvions ainsi aborder l’examen du texte, en toute logique, après la suspension.

Mais, puisque, déjà une fois, j’ai dû vous être désagréable,…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Vous n’êtes jamais désagréable, monsieur le président ! (Sourires.)

M. le président. … je vous laisse juge, monsieur le président de la commission. (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, s’exclame.) Si j’écoutais M. Marini, nous ne dînerions pas ! (Nouveaux sourires.)

Mes chers collègues, nous allons donc faire droit à la demande de M. le président de la commission des finances.

9

Dépôt d'une question orale avec débat

M. le président. J’informe le Sénat que j’ai été saisi de la question orale avec débat suivante :

N° 63 - Le 7 octobre 2010 - Mme Catherine Morin-Dessailly attire l’attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur la situation discriminatoire que les femmes continuent de subir au cours de leur carrière professionnelle.

La réforme des retraites a mis en exergue la question structurelle de ces inégalités. Elles apparaissent dans le parcours professionnel – moindre progression, difficultés d’accès à des postes à responsabilité et temps partiel subi –, et dans les écarts de salaires. Cette double inégalité induit par voie de conséquence des écarts de pensions importants.

Elle rappelle que la loi n° 2006-340 du 23 mars 2006 sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes avait notamment accordé aux entreprises un délai de cinq ans pour atteindre l’objectif de suppression des écarts de rémunération. Or, des bilans font déjà apparaître l’inefficacité d’une loi qui aurait déjà dû comporter un dispositif de sanctions appropriées. Si la réforme des retraites a eu le mérite d’aborder les inégalités, elle ne saurait suffire à apporter une réponse efficace et pérenne.

L’échéance de l’objectif de suppression arrivant à terme le 31 décembre prochain, elle interroge le Gouvernement sur les dispositions qu’il compte prendre pour remédier à une situation d’inégalité persistante, très préjudiciable aux femmes. (Déposée et communiquée au Gouvernement le 30 septembre 2010 – annoncée en séance publique le 30 septembre 2010)

Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

10

 
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Discussion générale (suite)

Régulation bancaire et financière

Discussion d'un projet de loi

(Texte de la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de régulation bancaire et financière (projet n° 555, texte de la commission n° 704, rapport n° 703).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Discussion générale (interruption de la discussion)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, compte tenu de la qualité du texte issu des travaux de la commission des finances du Sénat, ainsi que des nombreux amendements que nous avons à examiner, je vais limiter mon propos à quelques observations rapides.

Dans la foulée des différentes réunions du G20, de très nombreux travaux ont été engagés et le mois de septembre 2010 a été particulièrement propice à une floraison de réglementations, de propositions et de textes issus des travaux effectués au niveau de l’Union européenne – aussi bien par le conseil ECOFIN que par la Commission.

Par ailleurs, le 12 septembre dernier, le Comité de Bâle a adopté une réforme sans précédent, destinée à renforcer les réserves des banques, dont il nous appartiendra de développer les dispositifs concernant les établissements systémiques ; l’entrée en vigueur en 2019 permettra sans doute à ces derniers de se préparer à une augmentation significative de leurs fonds propres.

Le 15 septembre dernier, la Commission européenne a proposé deux règlements afin d’encadrer les marchés dérivés. De même, nous sommes entrés dans la dernière ligne droite de la mise en place d’une régulation des fonds alternatifs dits « hedge funds », sur laquelle je m’arrêterai quelques instants afin de préciser la position française à cet égard.

La France est désireuse de parvenir à une réglementation et à une supervision appropriées des fonds alternatifs. Elle est évidemment favorable au passeport européen pour les fonds européens ; en revanche, elle sera extrêmement attentive à ne pas favoriser l’entrée, par le biais de ce dispositif ainsi que d’une inscription et d’un enregistrement auprès d’un superviseur, des fonds dits « off shore » qui, aujourd'hui, ne peuvent fonctionner sur le territoire européen que sur la base de ce que l’on appelle le « placement privé ».

Par ailleurs, la Commission européenne va examiner le second volet d’un dispositif de régulation des agences de notation, afin de parvenir à un texte qui permettra à la fois l’inscription, le contrôle, l’agrément et la conformité à un certain nombre de règles de conflit d’intérêt de ces agences.

Comme le montre en particulier l’exemple de l’Union européenne – pour ce qui est des États-Unis, la loi Dodd-Frank a bien été adoptée par le Congrès américain, mais elle n’entrera en vigueur que laborieusement et au terme de développements réglementaires et interprétatifs réalisés par les autorités de supervision –, la régulation et la supervision avancent, soutenues avec beaucoup de détermination dans l’ensemble des pays qui ont participé aux différentes réunions du G20.

En France, le Président de la République a souhaité une loi de régulation bancaire et financière, afin que notre pays reste à la pointe de l’engagement international en faveur d’une meilleure régulation financière, une cause qu’il a embrassée de façon manifeste.

Le présent texte comprend des mesures fortes pour mettre en œuvre les décisions du G20 en France. J’en veux pour preuve l’encadrement des agences de notation, le renforcement des pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers, l’AMF, la régulation des ventes à découvert en cas de circonstances exceptionnelles, la faculté pour l’AMF de sanctionner les abus de marché, ou encore la possibilité, à la fois pour l’AMF et pour l’Autorité de contrôle prudentiel, l’ACP, d’augmenter de manière tout à fait significative le montant des sanctions.

Je veux rendre hommage ici aux travaux de la commission des finances, tout particulièrement à ceux qui ont été réalisés par son rapporteur général. Ce dernier a contribué à enrichir considérablement le texte, notamment en y incluant la régulation applicable à la « finance carbone » et en prévoyant d’interdire les ventes à découvert quand le vendeur n’est pas en mesure de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer qu’il disposera effectivement du titre au dénouement de l’opération. M. le rapporteur général a aussi renforcé la sécurité des consommateurs en relation avec les intermédiaires bancaires et financiers.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte qui vous est présenté, dûment charpenté et renforcé par les travaux réalisés au sein de la commission des finances, en particulier grâce à l’ajout tout à fait pertinent d’un certain nombre des mesures proposées et discutées par M. le rapporteur général, permettra d’améliorer en profondeur la régulation et la supervision de nos marchés financiers, bancaires, assurantiels et mutualistes.

La place de Paris sera d’autant plus attractive, comme l’est celle de Luxembourg, tout simplement parce qu’elle sera mieux régulée et parce que ces mesures auront restauré un facteur de confiance indispensable aux investissements comme à l’exercice de bonnes transactions. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous abordons l’examen est, en effet, très important et substantiel. La commission des finances y a beaucoup travaillé. Le texte qu’elle soumet au Sénat nous semble équilibré. Il marque plusieurs avancées significatives dans le sens d’une meilleure régulation et d’une transparence encore plus grande. D'ailleurs, Mme la ministre vient de citer plusieurs de nos initiatives qui ont fait l’objet d’amendements désormais intégrés au texte de la commission.

Mes chers collègues, compte tenu de l’heure à laquelle nous abordons la discussion de ce texte et de la nécessité de consacrer toute notre énergie, ce soir et cette nuit, à l’examen de ses articles, j’en resterai là pour mon intervention dans la discussion générale.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, je vous remercie infiniment de votre coopération.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Discussion générale (suite)

11

Communication du conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé ce jour M. le président du Sénat qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel quatre décisions de renvoi de questions prioritaires de constitutionnalité (2010-72 QPC, 2010-74 QPC, 2010-75 QPC et 2010-76 QPC).

Les textes de ces décisions de renvoi sont disponibles au bureau de la distribution.

Acte est donné de ces communications.

12

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Discussion générale (suite)

Régulation bancaire et financière

Suite de la discussion d'un projet de loi

(Texte de la commission)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Articles additionnels avant le chapitre Ier

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de régulation bancaire et financière.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voici ce que l’on peut lire dans le préambule du rapport d’étape de novembre 2008 issu des travaux du groupe de travail Assemblée nationale-Sénat sur la crise financière internationale : « Il est nécessaire de revoir la ligne de partage entre autorégulation et régulation et de replacer les États et donc la politique au centre du jeu monétaire et financier international ».

Chacun se souvient également des déclarations du Président de la République sur la nécessité de moraliser et de refonder le capitalisme. Ainsi, en septembre 2008 : « Une certaine idée de la mondialisation s’achève avec la fin d’un capitalisme financier qui avait imposé sa logique à toute l’économie et avait contribué à la pervertir ». Et le Président de la République de conclure : « Alors, ou bien les professionnels se mettent d’accord sur des pratiques acceptables, ou bien nous réglerons le problème par la loi avant la fin de l’année ».

Si nous examinons le chemin parcouru depuis la crise systémique découlant, entre autres, des défauts de paiement sur les subprimes et de la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers, nous ne pouvons que constater que ces déclarations, purement incantatoires, n’ont pas été suivies d’effet.

Malheureusement, avec le projet de loi dit de régulation bancaire et financière qui nous est présenté aujourd'hui, nous sommes bien en deçà de ce qui est nécessaire afin de « réglementer les banques pour réguler le système », selon les propres termes de Nicolas Sarkozy.

Pour sa part, notre groupe considère que les dérèglements des marchés financiers par le développement d’outils et de supports de plus en plus sophistiqués et spécialisés sont l’un des vecteurs essentiels d’une mondialisation qui ne profite qu’à quelques-uns et qui, malgré le développement des échanges et l’émergence de nouvelles puissances économiques, ne permet pas de répondre aux attentes de la majorité de la population.

Les tensions de l’été et de l’automne 2008 nous ont d’ailleurs permis, à la suite de l’intervention massive des États dans le fonctionnement des marchés financiers, de constater une nouvelle forme de crise financière, à savoir une crise obligataire qui a affecté des pays comme l’Espagne ou la Grèce, notamment.

C’est ainsi que nous nous sommes trouvés confrontés au plan de sauvetage de la Grèce, que notre groupe a qualifié de « plan de sauvetage des créanciers de la Grèce », puisque l’argent public mobilisé, notamment en France, pour sauver ce pays de la banqueroute ne l’était que pour permettre aux banques de s’exonérer d’un risque supporté désormais par les États.

Depuis, ce furent deux ans de tensions, deux ans de sommets internationaux, deux ans de négociations.

Portant sur la régulation bancaire et financière, le texte qui nous est présenté aujourd’hui constitue un aboutissement, un point d’orgue, pour des dispositions déjà prises afin de prétendument « moraliser » et « refonder » le capitalisme en stabilisant les marchés.

Le projet de loi comporte deux volets essentiels.

Le premier volet porte sur la régulation des activités de bourse et des activités bancaires. Il s’agit de renforcer le rôle et les prérogatives de l’Autorité des marchés financiers, l’AMF, et de mettre en place les conditions d’un contrôle prudentiel renforcé des activités de banque, d’une part, en transposant une directive européenne et, d’autre part, en mettant en œuvre une partie des recommandations du Comité de Bâle sur les ratios de fonds propres des établissements de crédit.

Le texte comporte également des mesures relatives au financement par les marchés des grandes entreprises inscrites à la cote officielle. Ces mesures, à notre sens, n’apportent pas de modifications substantielles à la situation existante.

Le second volet du texte porte sur le financement de l’économie et organise la privatisation rampante de l’établissement public de crédit aux PME, OSEO, au motif affiché de lui donner une plus grande efficacité dans l’action qu’il mène en direction des entreprises.

De telles mesures, complétées par des opérations sur le crédit foncier et le crédit immobilier, ne permettent pas, en réalité, de tirer de conclusions fondamentales sur le travail accompli par les parlementaires depuis deux ans au regard de la situation, qui est celle d’une crise systémique.

Si ce projet de loi doit constituer un point d’orgue dans la série des textes consacrés à guérir, puis à prévenir les effets de la crise systémique, qu’il me soit permis de dire que nous sommes loin, très loin du compte.

Ainsi en est-il de l’activité des autorités de contrôle. Poussés par les directives communautaires dans des domaines fort divers, les pays de l’Union européenne ont tous été amenés à créer des autorités indépendantes de contrôle pour s’occuper des marchés financiers et pour réguler différents secteurs, l’énergie, les postes et télécommunications ou encore l’audiovisuel.

Ces autorités indépendantes sont conçues, de fait, dès le départ, comme des outils de démembrement de la puissance publique, puisque ce qui relevait de la compétence de l’État, légitimé par le suffrage universel, est confié à un aréopage sans autre légitimité que celle découlant de la désignation de ses membres par des autorités élues.

Chaque autorité indépendante devient de facto une instance de contrôle non démocratique puisqu’elle dicte à la fois la loi et le règlement à l’ensemble des acteurs intervenant dans son champ de compétence.

L’Autorité des marchés financiers n’échappe pas à cette règle. Elle est même dotée d’un impressionnant règlement intérieur qui participe de son intervention autonome.

Nous ne savons pas si les droits et pouvoirs de l’AMF se trouveront renforcés par l’éventuelle adoption de ce texte. Mais, ce que nous savons, c’est que le renforcement du rôle de l’autorité de contrôle n’a pas conduit l’Autorité des marchés financiers à intervenir dans une affaire de présumés délits d’initié comme celle d’EADS. Fixer un cadre aux sanctions susceptibles d’être prononcées par une autorité indépendante alors que de telles sanctions n’ont pas été prises dans cette affaire, bien qu’elles aient paru évidentes, prouve qu’il ne faut accorder qu’une confiance limitée aux prérogatives de telles structures.

Je ferai quelques observations sur les ratios de Bâle III, éléments importants du premier volet de ce texte.

La crise systémique a montré la nécessité qu’il y avait pour nos banques d’être en situation de disposer de fonds propres afin de faire face aux risques, d’autant que la diversification des implantations des banques et des entreprises d’investissement de notre pays est suffisamment large pour susciter des facteurs de risque.

Le renforcement des fonds propres, déjà éprouvé avec les récents stress tests que les banques françaises auraient passés avec succès, est sans doute une nécessité, mais il présente un caractère contradictoire. En effet, rien n’empêche nos établissements de crédit de répondre aux recommandations du Comité de Bâle en réservant leurs crédits aux entreprises comme aux particuliers les plus solvables et en relevant leurs marges commerciales.

Pour ne donner qu’un exemple hexagonal, n’oublions pas que les banques, depuis la banalisation du livret A, disposent d’un instrument financier rémunéré à moins de 2 points, alors qu’elles ont besoin d’instruments de refinancement à un taux deux fois plus élevé. N’oublions pas non plus que l’ouverture à la concurrence leur a rapporté 4,2 milliards d’euros tirés de l’épargne populaire. C’est autant d’argent qui manque aujourd'hui pour loger les sans-abri et les mal-logés.

Nous avons une proposition pour répondre aux exigences du Comité de Bâle : que l’État, par son intervention directe ou par celle d’un établissement spécialisé, acquière une partie du capital de nos grandes banques et imprime de nouvelles orientations dans l’attribution des crédits aux particuliers comme aux entreprises, en favorisant les crédits consacrés au développement réel de l’emploi et de la production ainsi qu’à la satisfaction effective des besoins des ménages, par exemple le logement.

Venons-en à la question du passeport européen et à sa diffusion auprès des entreprises d’investissement qui en feraient la demande.

Ce débat, évidemment, nous ramène à celui que nous venons d’avoir sur les enjeux des conventions fiscales concernant trois de nos voisins, la Suisse, la Belgique et le Luxembourg.

La France, par la voix de son Président de la République, s’enorgueillit d’avoir fait valoir au niveau international la nécessité de lutter contre les paradis fiscaux. Le fameux « listage » des territoires non coopératifs, tel qu’il résulte des initiatives prises depuis deux ans, tendra, dans les faits, à estomper de plus en plus les pratiques délictuelles en les parant de l’apparence de la légalité. Car là est bien l’enjeu !

Nous ne croyons pas même l’espace d’un instant que les efforts de moralisation du capitalisme feront disparaître comme par enchantement les produits dérivés, les ventes de gré à gré, les ventes à découvert ou la titrisation. Ces véhicules de l’industrie financière créent trop de richesses, même artificiellement, pour disparaître.

Au demeurant, lorsque la proposition de loi instituant la fiducie a été votée au Sénat, inspirée en cela des trusts ou des sociétés de patrimoine familial de la législation luxembourgeoise, on a bien donné le vernis de la légalité à une pratique qui aurait pu procéder du délit, en d’autres temps…

Je ne crois pas que l’évasion fiscale soit meilleure quand elle est pratiquée en France sur des supports fournis par le droit français. C’est toujours de l’évasion fiscale, c'est-à-dire un procédé qui permet à quelques contribuables, particuliers ou entreprises, de se délester légalement de leurs obligations à l’égard de la société.

Ce gouvernement s’est d’ailleurs fait une spécialité de donner le vernis de la légalité à des activités délictuelles. N’a-t-on pas opportunément, au printemps dernier, fait adopter la loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, qui a rendu légale et visible l’offre de jeux d’opérateurs privés jusqu’ici situés dans le non-droit ?

Cette ouverture du marché s’est faite au bénéfice de quelques opérateurs hier illégaux et devenus aujourd'hui légaux. L’autorité de régulation s’attache désormais à défendre les intérêts de ces derniers en faisant la chasse à quelques sites illégaux qui tentent de contourner les règles.

Je crains qu’il n’en aille de même avec le passeport européen.

Je doute que l’on finisse par interdire à certains opérateurs financiers, investis dans le produit risqué ou très risqué, dans le produit dérivé, d’agir sur les places financières européennes, à commencer par la France. En effet, ces pratiques sont la spécificité de l’industrie financière britannique, luxembourgeoise et, en partie aussi, française.

Par ailleurs, les velléités de certains pays désireux d’interdire de telles pratiques se heurteront, selon moi, très rapidement à des fins de non-recevoir de la part de la Commission de Bruxelles, attachée aux principes de libre circulation des capitaux.

Quand on pense que la taxe sur les transactions financières, proposée par le Président de la République, a été purement et simplement balayée du revers de la main par le président de la Commission européenne, M. José Manuel Barroso, prétextant la perte de compétitivité de l’économie européenne et des problèmes de caractère technique, on voit que beaucoup de chemin reste à faire ! À moins que le discours présidentiel n’ait été qu’une affaire de posture…

Enfin, sur le financement des entreprises, plutôt que de renforcer OSEO en lui donnant le statut de société anonyme, c’est-à-dire en laissant la porte ouverte aux cessions partielles de capital, et de lui permettre de soutenir la comparaison avec la Caisse de dépôts et consignation, ce projet de loi aurait dû mettre l’accent sur la nécessité de la constitution d’un véritable pôle public de financement des PME. Au lieu de quoi, le texte qui nous est soumis conforte dans une logique de concurrence des établissements poursuivant des objectifs proches.

Au cours de ce débat, nous aurons l’occasion de présenter et de défendre des propositions que nous pensons de nature à mettre un terme à la domination des marchés et à rétablir le primat du politique.

Vous l’aurez compris, chers collègues, nous ne voterons pas ce projet de loi, sauf modifications substantielles résultant de l’adoption des amendements que nous avons déposés. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la crise financière provoquée par la faillite de Lehman Brothers et l’effondrement d’American International Group, AIG, est sans doute la plus grave que le monde ait connue depuis les années trente. On sait les dérives – phénomènes spéculatifs, prises de risque excessives, titrisation – qui ont conduit à cet effondrement du système financier.

La crise financière de l’automne 2008 a même été aggravée par le système financier international lui-même, ses dysfonctionnements et ses déséquilibres structurels étant de plus en plus considérables. Elle a d’abord touché la finance, avant de se propager à l’ensemble de l’économie. Le temps où la finance était subordonnée à l’activité économique est bien révolu !

Pour sortir de la crise économique mondiale et renverser ce cycle de défiance, il faut reconstruire la finance et, pour cela, rétablir la confiance entre les acteurs économiques et les marchés financiers, changer les règles qui ont conduit à la catastrophe et retrouver l’ordre normal des choses, c’est-à-dire un ordre où la finance est un outil au service de l’économie.

Tout le monde a pris conscience – et les décisions prises lors des trois sommets du G20, de Washington, Londres et Pittsburgh l’ont montré – de la nécessité de rebâtir un système financier dont l’objectif principal soit le financement de l’économie réelle et la croissance à long terme et non, comme cela a été le cas ces dernières années, la recherche unique de profits immédiats.

Les opinions publiques ont pu avoir le sentiment, encore récemment avec le G20 de Toronto, dont les résultats ont été décevants, que les efforts visant à renforcer la régulation financière et à la coordonner au plan mondial ont rarement dépassé le stade des déclarations d’intention. Il est vrai que, depuis deux ans, nos concitoyens ont plus entendu parler de mesures d’urgence, de sauvetage d’institutions bancaires, de milliards injectés dans l’économie, de plans de relance et de mesures d’accompagnement de sortie de crise que de décisions concrètes en matière de régulation du capitalisme financier.

Pourtant, en même temps qu’ils géraient l’urgence, les grands pays du G20, conscients qu’une réforme structurelle était indispensable pour rétablir la confiance dans les mécanismes de régulation de l’économie mondiale, ont ouvert de vastes chantiers destinés à encadrer le pouvoir de la finance. La liste de ces chantiers ouverts par les gouvernements du G20 est impressionnante : banques, fonds spéculatifs, produits dérivés, agences de notation, règles comptables, paradis fiscaux…

Malgré cela, certains peuvent avoir le sentiment que la mise en œuvre des nouvelles politiques de régulation se fait attendre. Au point que beaucoup ont pu penser, faute de décisions concrètes, que le monde d’hier, la finance d’avant la crise, qui a conduit à cette crise économique, est en train de ressurgir et que la tentation du business as usual a repris le dessus.

Mais aujourd’hui, après le vote en juillet du Dodd-Frank Act aux États-Unis, l’adoption quasi unanime d’une vaste supervision financière européenne par le Parlement européen, le 22 septembre dernier, et la discussion du projet de loi français de régulation bancaire et financière, on peut légitimement affirmer que le renforcement de la régulation financière prend forme, certes laborieusement, mais prend forme.

Comme l’ont indiqué les chefs d’État lors de la réunion du G20 à Londres, en avril 2009, cette réforme structurelle doit concerner en priorité le renforcement des échelons internationaux de supervision, l’extension du champ de cette supervision et le durcissement des normes appliquées.

Le projet de loi français suit cette direction et je ne m’étendrai pas sur ses apports, ni sur les nombreux dispositifs techniques qu’il met en place, M. le rapporteur général les ayant parfaitement décrits et analysés. Au-delà de ces mesures, les enjeux de ce texte sont essentiels, puisqu’il tend à renforcer la supervision des acteurs de marché, dans une période capitale pour la régulation bancaire et financière.

Le projet de loi de régulation bancaire et financière s’inscrit en effet dans le mouvement mondial de réglementation, et il est important que notre pays montre qu’il est prêt à traduire sur le plan national les décisions européennes et mondiales en la matière.

La crise a ainsi mis en évidence la nécessité pour les régulateurs de disposer d’une vision de l’ensemble des risques, plus particulièrement ceux de nature systémique. Elle impose de mettre en place des structures transversales de surveillance aux niveaux national, européen et international, pour améliorer la capacité de prévention et d’évaluation des risques, comme la réactivité des régulateurs, par la mise en place des systèmes d’alerte. Elle implique également que les autorités de régulation des différents secteurs et des États coopèrent et échangent leurs informations.

Les autorités de régulation doivent également réduire le plus possible ce que l’on appelle les « angles morts », afin qu’aucun acteur ou produit financier, notamment les plus complexes et les plus dangereux, n’échappe à la surveillance ni à la réglementation. Cela passe par un renforcement de la transparence et de la traçabilité de ces produits – donc par des informations fiables sur leur nature, les parties et les risques inhérents aux opérations – et l’établissement d’une réglementation proportionnée à ces risques.

Il faut enfin responsabiliser les acteurs, en faisant apparaître et assumer clairement le coût du risque. C’est tout l’enjeu de Bâle III pour les banques : le Comité s’est engagé le 12 septembre dernier sur la voie d’un renforcement de leurs exigences prudentielles, en leur demandant d’augmenter, à terme, leurs fonds propres disponibles et leur ratio de solvabilité.

Si le projet de loi initial du Gouvernement pouvait être en deçà des attentes, nos collègues députés l’ont largement enrichi sur de nombreux aspects. Le texte ainsi renforcé prévoit désormais tout un arsenal de mesures de régulation et de supervision.

Le fonctionnement institutionnel de la régulation est ainsi considérablement amélioré par la création d’un conseil de régulation financière et du risque systémique et par la ratification de l’ordonnance portant création de l’Autorité de contrôle prudentiel qui rendra plus efficace la régulation.

Par ailleurs, le projet de loi étend et approfondit le champ de la réglementation financière en octroyant des pouvoirs d’urgence à l’Autorité des marchés financiers, dont les pouvoirs de sanction sont nettement étendus, en élargissant son champ de compétence aux produits dérivés et aux contrats sur échanges de défaut, les fameux CDS, en renforçant le régime de règlement et de livraison de titres, ou encore en rendant plus transparents les prêts de titres réalisés en période d’assemblée des actionnaires et en aménageant certaines procédures du droit boursier.

Le projet de loi prévoit également la création d’un comité des risques, dans les établissements financiers, et d’un comité des rémunérations, dans les établissements de crédit et les entreprises d’investissement, afin de responsabiliser les acteurs.

Enfin, de nombreux textes communautaires sont ou seront transposés grâce à ce véhicule législatif, notamment en ce qui concerne les collèges de superviseurs et les échanges d’informations entre régulateurs. Le Gouvernement pourra transposer plusieurs directives récentes sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières, les droits des actionnaires ou les établissements de monnaie électronique.

À ce propos, il faut signaler tout particulièrement les dispositions européennes transposées ici sur les agences de notation, agences dont on sait qu’elles ont été l’un des maillons faibles du système financier. Ces dispositions prévoient, notamment, leur agrément et leur contrôle par l’AMF et leur responsabilisation, éléments selon nous essentiels.

Les agences de notation doivent être sévèrement encadrées dans leurs méthodologies, les outils et modèles qu’elles utilisent, les risques qu’elles mesurent – ce que l’on appelle leurs « standards » –, à la façon des professions de comptabilité et d’audit, qui sont encadrées et contrôlées au niveau supranational. Il est indispensable que des institutions qui émettent des avis aussi importants que des comptes soient soumises à des règles aussi exigeantes.

Il faut en effet rappeler que la crise économique commencée en 2008 présente le paradoxe d’avoir débuté au sein d’un des secteurs apparemment les plus régulés de l’économie, le secteur bancaire. Ce constat montre bien les limites des règles normatives, si elles sont contournées ou dépassées par des produits innovants. C’est pourquoi le renforcement des pouvoirs des superviseurs et l’amélioration des mécanismes destinés à garantir la transparence sont nécessaires pour prévenir les crises futures. Le simple ajustement technique des règles actuelles n’est pas suffisant.

La mondialisation financière rend également indispensable l’élargissement du champ de la régulation aux entités et territoires actuellement encore peu ou pas couverts, les fameux « trous noirs » de la finance mondiale que sont les hedge funds ou les paradis fiscaux. Ce point est prioritaire, car toute faille dans le champ d’application de la régulation la rendrait inopérante.

La mise en œuvre du renforcement de la régulation financière est un processus lent et complexe, car elle nécessite la recherche d’accords, au niveau international et européen, de l’ensemble des acteurs et des États. Il faut d’ailleurs saluer les efforts en ce sens du gouvernement français sur la scène internationale. Il faut aussi se réjouir du récent accord sur la supervision financière européenne, dont j’ai parlé tout à l’heure. Malheureusement, cet événement n’a pas trouvé l’écho qu’il mérite auprès du grand public et n’a pas été salué comme il aurait dû l’être, vu son importance, alors que l’action de l’Union européenne est décisive en la matière.

Le renforcement de la régulation passe par la création de structures supplémentaires, l’affectation de moyens en rapport et l’ajustement technique des normes, mais il ne pourra être effectif que si les autorités nationales, européennes et mondiales qui seront chargées de mettre en œuvre la réforme de la régulation sont reconnues comme légitimes afin de pouvoir garantir son efficacité et donc prévenir et traiter les futures crises. Tel est l’enjeu du prochain sommet du G20 à Séoul, en novembre prochain : les chefs d’État et de gouvernement devront montrer leur détermination à poursuivre dans la voie de la régulation du système financier.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe de l’Union centriste considère que ce projet de loi va dans le bon sens et le votera. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP, ainsi que sur le banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, deux ans après la disparition de la banque d’affaires Lehman Brothers, nous devons nous prononcer sur un projet de loi annoncé et attendu, puisqu’il a été présenté en conseil des ministres le 16 décembre 2009.

Après avoir reçu le soutien de la Nation, les banques ont remboursé dans leur quasi-totalité les sommes qui leur avaient été prêtées. Elles ont passé haut la main l’épreuve, pas trop difficile il est vrai, des stress tests et la finalisation de Bâle III a été saluée par un rebond de la bourse. Pendant ce temps-là, bonus, stock options et dividendes sont toujours d’actualité. On serait donc tenté de conclure que rien n’a changé.

Rien ? Pas tout à fait ! L’Union européenne se dote d’institutions de supervision financière ; les G20, surtout celui de Londres, ont entamé la bataille contre les paradis fiscaux, ou ont tout au moins ouvert un chemin en ce sens ; les États-Unis ont adopté, en juillet 2010, la loi Dodd-Frank qui, malgré ses limites, tourne le dos à la période de la dérégulation, quand elle n’amorce pas une franche rupture.

Mais le temps des marchés n’est pas celui de la démocratie, et les marchés, il faut bien le dire, ont repris l’avantage sur la démocratie, sur la puissance publique.

Dans une phase que l’on pourra sans doute qualifier, au regard de l’histoire, de « grand tournant », la vraie question qui se pose est de savoir si nous sommes à la hauteur de la responsabilité qui est la nôtre. Il est permis d’en douter.

On ne peut durablement se réfugier dans l’attente d’accords mondiaux toujours hypothétiques ou de décisions européennes pour s’exonérer ainsi de toute action au niveau national, comme je l’ai dit tout à l’heure au cours de notre débat sur les paradis fiscaux, mais j’y reviendrai.

Si nous refusions d’agir au niveau national, ce serait à coup sûr la meilleure façon de ne pas peser sur les choix européens, comme sur les choix mondiaux. Or l’échelle européenne est bien celle qui est pertinente en la matière.

Nous avons donc, nous, législateurs, l’obligation de prendre nos marques, de réglementer, de réguler et de prévenir, car nous savons que l’État ne pourra plus jouer les pompiers et que les responsables politiques s’exposeront, s’ils n’agissent pas, à la terrible et légitime rancœur des peuples auxquels on demande de payer la crise, sans en avoir tiré toutes les leçons pour l’avenir.

Le texte de la commission ne se situe pas au niveau de responsabilité que nous souhaitons. On prétend renforcer la supervision des acteurs et des marchés financiers tout en soutenant le financement de l’économie, objectif louable, mais les discours ne correspondent pas à la réalité. Le texte assure un service minimum et la confiance dans l’autorégulation des acteurs continue à dominer le paysage.

En commission, le rapporteur général a eu un mot, assez vrai du reste : il a estimé que le texte qui nous arrivait de l’Assemblée nationale était une sorte de DDOEF, autrement dit un projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique et financier.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’était presque un compliment dans ma bouche !

Mme Nicole Bricq. Je vais m’efforcer de commenter ce projet de loi qui, effectivement, aborde beaucoup de sujets – après tout, pourquoi pas ? –, mais dont nous entamons la discussion à une heure bien extravagante, madame la ministre, pour un texte que vous considérez comme capital.

Mme Nicole Bricq. Voyez à quelle extrémité nous en sommes réduits… Dans cette affaire, le Parlement est à la portion congrue !

Je présenterai tout d’abord les critiques que nous formulons sur le texte de la commission. Puis je proposerai des amendements sur des sujets qui n’ont pas du tout été évoqués, ni par le Gouvernement dans son texte initial, ni par l’Assemblée nationale, ni par la commission.

Peut-on parler d’un « New Deal bancaire », comme le déclare M. Baudouin Prot après les conclusions de Bâle III ? Je rappelle que le même agite encore et toujours la menace d’une raréfaction du crédit à l’économie – la menace habituelle des banques –, tout en oubliant de dire que les engagements pris en 2008 par les banques en contrepartie de l’aide de la Nation n’ont pas été tenus. L’Observatoire de l’épargne réglementée a établi dans son rapport qu’il existe un écart de 4,2 milliards d’euros entre le total des encours du livret A centralisés dans les banques et le montant des prêts alloués aux PME.

Le groupe de travail de la commission des finances n’a pas vraiment réussi à faire le départ entre ce qui relève de la baisse de la demande des entreprises et ce qui relève de celle de l’offre des banques, qui, je le rappelle, ont bénéficié non seulement du soutien de l’État, mais aussi d’abondantes liquidités ouvertes par la Banque centrale européenne.

Je crois néanmoins que la commission a eu raison de renforcer, sur l’initiative de M. le rapporteur général, le fléchage des sommes non centralisées à la Caisse des dépôts et consignations vers le soutien à l’économie réelle, afin de respecter la loi de modernisation de l’économie votée en août 2008.

S’ensuit toute une série de dispositions concernant l’Autorité des marchés financiers, les agences de notation, les ventes à découvert, le marché carbone. Je les reprends l’une après l’autre.

Le renforcement des pouvoirs de l’AMF ne fait pas débat, il est nécessaire. En revanche, même si M. le rapporteur général a voulu encadrer cette procédure, nous ne pouvons soutenir la démarche, proposée par la commission, qui vise à accorder à l’AMF la faculté de transiger sur des infractions commises par des acteurs de marché.

Les exemples des États-Unis et du Royaume-Uni sont souvent cités pour justifier une telle proposition. Je rappelle cependant que le groupe Goldman Sachs a récemment transigé à hauteur de 7,5 millions de livres avec l’autorité de régulation financière britannique, la FSA., soit à peine le dixième de ce que cette banque génère chaque jour en chiffre d’affaires !

On ne peut pas à la fois renforcer les pouvoirs de l’AMF en lui conférant plus de moyens pour assurer ses missions – une décision juste – et lui en enlever en introduisant la transaction.

La protection des investisseurs de détail est une autre source d’inquiétude.

Aux États-Unis, une agence vient d’être créée pour assurer cette mission, qui, en France, revient à l’AMF. Toutefois, dans la réalité, l’Autorité de contrôle prudentiel, l’ACP, qui réunit banques et assurances, s’occupe depuis sa création des produits distribués, d’une part, par les banques et, d’autre part, par les assurances. Les deux institutions – AMF et ACP – coopèrent sans doute, mais la mission, confiée à l’AMF, de protection des investisseurs de détail, autrement dit des consommateurs, devrait pouvoir s’exercer quels que soient les circuits de distribution des produits financiers.

Nous sollicitons donc, par un amendement, un rapport dressant le bilan des actions menées en matière de protection des investisseurs de détail et du fonctionnement de cette coopération entre l’AMF et l’ACP.

Au demeurant, il est essentiel que la surveillance englobe l’ensemble des acteurs de marché. Nous ne pouvons laisser sur le côté les conseillers en gestion de patrimoine, comme le fait le texte de la commission après suppression de la référence introduite par les députés.

S’agissant des agences de notation, le texte de la commission revient, là aussi, sur une disposition votée par l’Assemblée nationale. Les députés ont voulu renforcer la responsabilité des agences de notation. Si le Sénat avalise la rédaction de la commission, il enverra un signal néfaste, en méconnaissance de la part de responsabilité qu’ont les agences de notation dans la crise financière et dans son emballement.

Je pense notamment aux notes attribuées aux produits que ces agences sont supposées évaluer et sur lesquelles il faudrait revenir. Les agences ont évalué des produits très sophistiqués comme si elles évaluaient un produit financier transparent !

La déconfiture d’Enron, au début des années deux mille, aurait pu nous éclairer sur ce rôle des agences de notation, rôle que l’on qualifie de procyclique quand on est gentil, mais de très néfaste quand on est simplement lucide…

Certes, ces agences doivent s’enregistrer auprès de l’AMF, et elles l’ont fait. Mais cela ne suffit pas à nous rassurer. Tout dépendra du niveau d’information que l’AMF exigera d’elles et, surtout, du contrôle qui sera exercé.

Le directeur général du FMI signalait tout récemment qu’il ne fallait pas trop écouter les agences de notation. Il est regrettable que le texte de la commission ne comporte pas d’injonctions concernant le développement de l’expertise interne. C’est ce que nous proposerons à travers plusieurs amendements. De la même manière, il nous paraît utile de disposer d’une pluralité d’expertises.

La question des ventes à découvert a beaucoup agité l’Assemblée nationale en juin, dans le contexte précisément de la décision unilatérale allemande. Ce n’est pas un sujet secondaire. Sur le marché de gré à gré, ces ventes à découvert représentent 90 % des transactions et entre 450 000 et 600 000 milliards d’euros à travers le monde.

L’Union européenne souhaite développer des centres de conservation des données, dits « référentiels centraux », ouverts aux autorités de régulation. Mais l’amendement introduit par la commission des finances au titre d’une « locate rule » nous conforte dans notre volonté d’agir au niveau national.

Je l’ai bien examiné, cet amendement et, à y regarder de près, il ne nous satisfait pas entièrement, notamment s’agissant de la date d’entrée en vigueur, le fameux délai de livraison. Je pense surtout à la dernière version, qui, me semble-t-il, fait état, après amendement du Gouvernement, d’une échéance à 2012. Mais je peux me tromper, car ces questions deviennent très complexes…

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est fait référence au texte européen.

Mme Nicole Bricq. Tout à fait, monsieur le rapporteur général, et c’est encore plus grave, car, du coup, il n’y a plus de date ! La date est en fait subordonnée à un accord européen dont on ne sait pas quand il interviendra.

Pour notre part, nous voulons que la France négocie avec le mandat d’aboutir au 1er janvier 2011. C’est exigeant. Je l’ai dit, le temps des marchés n’est pas celui de la démocratie : leur laisser du temps, c’est leur permettre de s’organiser et, en général, ils sont très bons pour le faire.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Le temps de l’Union européenne, c’est encore autre chose !

Mme Nicole Bricq. Quant aux produits titrisés, nous nous étonnons, madame la ministre, qu’un arrêté paru au Journal officiel du vendredi 24 septembre transpose une directive de 2009, avec une mise en œuvre au 31 décembre 2010. Pourquoi ne pas avoir inscrit cette transposition dans le présent véhicule législatif ? Le Parlement est, encore une fois, privé de ce débat. C’est regrettable, d’autant que l’arrêté a attendu un mois sur le bureau de je ne sais qui au sein du Gouvernement avant d’être publié !

M. Richard Yung. Très bien !

Mme Nicole Bricq. Outre que je trouve détestable cette attitude à l’égard du Parlement, je m’interroge sur le fait même que l’on transpose des directives de cette importance par simple arrêté ministériel.

Par ailleurs – je change encore de sujet, mais la nature du texte m’y contraint – la commission a repris l’une de nos propositions, contenue dans le rapport de Mme Fabienne Keller, en faisant du marché « carbone », le BlueNext, un marché réglementé.

En revanche, elle n’a pas reconnu le statut juridique de produits financiers aux quotas d’émission de gaz à effet de serre. Nous proposons un amendement qui vient consacrer cette définition, l’objectif étant de mandater le Gouvernement pour défendre ce statut dans les discussions européennes.

Enfin, la commission a amendé l’article 20 du projet de loi, qui introduit un nouveau produit financier dit « obligation à l’habitat ». Conformément aux souhaits du rapporteur général et de la commission, le contrôleur spécifique des sociétés de financement à l’habitat se voit conférer un rôle plus prépondérant.

Toutefois, mes chers collègues, pardonnez-nous de vous le dire, ce nouveau produit, introduit sur l’initiative du Gouvernement, suscite notre méfiance. M. le rapporteur général a lui-même souligné dans un entretien à la presse – vous confirmerez l’exactitude de ma citation, monsieur Marini, mais, a priori, je sais lire les articles des journaux – le « peu de distance entre cet outil et les subprimes ». Nous sommes donc extrêmement réservés sur l’introduction de cette nouvelle obligation.

J’en viens maintenant à ce qui ne figure pas dans le texte de la commission, à savoir les rémunérations, les frais bancaires et les paradis fiscaux.

S’agissant des rémunérations, dès octobre 2008, nous avions dénoncé le véritable pousse-au-crime que constituaient ces mécanismes dans le monde de la finance. Nous n’étions d’ailleurs pas les seuls à le faire, puisque ces critiques émanaient du G24, composé de députés et de sénateurs, réuni avant le premier sommet du G20.

Aujourd’hui, madame la ministre, l’arrêté que vous aviez pris le 3 novembre 2009 est obsolète, puisque l’Union européenne a adopté un « paquet de supervision financière », comprenant une directive dite CRD3. Il s’agit non d’un chemin départemental, comme le sigle pourrait le faire penser, mais d’un texte très important. Nous souhaitons transposer, par la voie législative, les dispositions communautaires et le texte que nous examinons nous permet de le faire.

À chaque fois que nous avons voulu traiter par la loi d’un encadrement nécessaire des rémunérations, nous nous sommes heurtés au veto du Gouvernement, appuyé par sa majorité, au motif qu’il ne faut pas nous affaiblir face aux autres places financières. Pourtant, dans son rapport de 2009, l’AMF, qui est chargée de contrôler l’application du code de bonne conduite de l’Association française des entreprises privées, l’AFEP, et du Mouvement des entreprises de France, le MEDEF, signale que ce code n’est souvent pas respecté.

En outre, madame la ministre, les orientations de la mission de contrôle des rémunérations des professionnels de marché, confiée à Michel Camdessus, nous conforte dans notre volonté d’agir par la voie législative. Plutôt que d’avoir recours, encore une fois, à un arrêté ministériel, nous voulons que la directive puisse être transposée à la fin de l’année 2010.

Ce texte est là, et il est pertinent. Il ne faut donc pas hésiter !

Un rapport a mis en lumière la cherté des services fournis par les banques françaises.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Nicole Bricq. J’entends votre impatience, monsieur le président, mais, si je prends la peine de présenter nos amendements maintenant, c’est parce que je ne le ferai pas plus tard.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bonne transition !

Mme Nicole Bricq. Donc, s’agissant de la cherté des services fournis par les banques françaises, dénoncée de longue date par les associations de consommateurs, faut-il rappeler que l’Autorité de la concurrence a sanctionné onze établissements bancaires pour entente illicite en matière de frais prélevés sur le transfert des chèques ? Cela renforce notre volonté, encore une fois, d’introduire un encadrement législatif des frais bancaires.

On ne peut se contenter des conclusions du rapport sur la tarification des services bancaires de Georges Pauget car, une fois encore, le Gouvernement fait confiance à la bonne conduite des banques à l’égard de leurs clients.

En matière de garanties accordées aux dépôts bancaires, l’Union européenne ayant décidé de porter le dépôt de garantie de 70 000 euros à 100 000 euros au 1er janvier 2011, nous demandons que cette évolution soit actée par la loi, sous la forme de l’adoption d’un amendement, et non par un arrêté ministériel. Comme cela, le problème sera réglé !

Je rappelle que la régulation et la supervision financière n’auront de portée pleine et durable que si l’on s’attaque résolument aux paradis fiscaux. La législation américaine de mars 2010, que j’ai évoquée tout à l’heure, nous montre la voie.

Nous défendrons donc des amendements répondant au principe de transparence et de contrôle. Je veux parler de la transparence de la part des établissements bancaires et financiers lorsqu’ils contractent avec l’État – si la région d’Île-de-France et de nombreuses régions à sa suite l’ont fait, l’État peut le faire – et de la transparence des acteurs financiers étrangers, qui ont l’obligation d’échanger leurs informations avec notre administration fiscale dès lors qu’ils souhaitent opérer en France.

Enfin, nous renforcerons le contrôle du Parlement sur le résultat des opérations menées par l’administration fiscale, pour vérifier l’application des dispositions votées dans la loi de finances rectificative pour 2009.

Nous souhaiterions que la loi soit le véhicule de toutes ces dispositions qui, de toute façon, devront être prises à un moment ou à un autre si l’on veut vraiment s’attaquer aux effets de la crise financière, tout en s’assurant, pour l’avenir, qu’une nouvelle bulle n’en chassera pas une autre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, rappelons-nous : c’était il y a tout juste deux ans, le 15 septembre 2008, Lehman Brothers faisait faillite.

Le capitalisme financier était ébranlé. Tous les dogmes sur lesquels le néolibéralisme avait prospéré, efficience des marchés et capacité à s’autoréguler, apparaissaient soudain comme des mythes. Or ces mythes avaient conduit à la déréglementation dans le monde anglo-saxon depuis l’élection de Mme Thatcher et M. Reagan, mais aussi en Europe et en France, par l’Acte unique et ses trois cents directives.

Rappelons-nous aussi les propos tenus à Toulon, le 25 septembre 2008, par M. Sarkozy : il faut moraliser le capitalisme, tordre le cou au capitalisme financier pour sauver le capitalisme lui-même, celui des entrepreneurs, acteurs de l’économie réelle. Et tout le monde de louer sa réactivité lorsque, après s’être envolé pour Washington, M. Sarkozy réussit à convaincre M. Bush de créer le G20.

Le contribuable est appelé à la rescousse et les plans de refinancement et de relance se succèdent. Le Parlement approuve. C’est le grand retour des États. De fait, la liquidité bancaire a pu être préservée. Mais cela a un prix : la substitution d’un endettement public gigantesque à l’endettement privé.

M. Marini nous rapporte que les régimes d’aide au secteur financier ont été approuvés à hauteur de 4 131 milliards d’euros par la Commission européenne. Adieu Maastricht ! À l’heure du sauve-qui-peut, l’urgence commandait. C’était l’an dernier.

Aujourd’hui, une timide reprise s’esquisse.

Après les mâles résolutions du sommet de Londres, en 2009, le sommet de Toronto, un an plus tard, est un fiasco. Vous ne parvenez pas à imposer une taxe spécifique au secteur financier.

Les bonnes résolutions s’évanouissent, le capitalisme financier repart comme avant. Les bonus s’envolent, le taux de profitabilité des banques n’a jamais été aussi élevé dans la zone euro qu’en 2009, aussi curieux que cela puisse paraître, et ce dans l’indifférence au coût réel de la crise. Ce sont cette fois les marchés financiers qui prennent en otages les États, en jouant sur les écarts de dette.

Et voilà que vous nous saisissez de ce projet de loi de régulation bancaire et financière.

Tout ce qui améliore la régulation de l’économie, après vingt-cinq ans de déréglementation à tout va, est bienvenu. Mais le renforcement de la régulation que le Gouvernement propose au Parlement d’adopter est-il en mesure d’enrayer de nouvelles crises ?

Voilà la question, madame la ministre.

Ce n’est pas s’avancer beaucoup que de le prédire, les mesures de régulation que vous proposez, tout comme les dispositions issues de Bâle III, échoueront comme celles de Bâle II à prévenir les crises financières, et ce pour une raison très simple : vous vous contentez d’agir à la marge du système, sans en altérer les fondements.

Qu’on en juge.

Les mesures de régulation annoncées à grand fracas l’an dernier se révèlent, à l’examen, dérisoires. La montagne a bien accouché d’une souris !

C’est ainsi que la restriction des ventes à découvert se résume au raccourcissement de trois à deux jours du délai de livraison des titres. De même, le seuil de déclenchement des OPA est abaissé de 33 % à 30 % - la belle affaire, c’est l’usage dans tous les pays européens -, alors que l’on attendait au moins 25 % et que M. Beffa, devant la délégation sénatoriale à la prospective présidée par M. Joël Bourdin, préconisait un seuil de 20 % pour éviter les prises de contrôles rampantes.

Les projets d’interdiction des dérivés de crédit sur dettes publiques se bornent à une simple extension aux crédits dérivés des délits d’initiés et de manipulation des cours. C’est dérisoire ! Quant aux pouvoirs de sanction accordés à l’Autorité des marchés financiers, ils s’exerceront par définition quand il sera trop tard.

M. Jouyet, président de l’AMF, a d’ailleurs avoué devant la commission des finances qu’il n’avait pas les moyens de suivre en temps réel toutes les transactions : il demande des investissements technologiques. Cela n’a pas de sens si l’on considère que l’on peut donner deux cents instructions à la seconde sur un même titre, avec une durée de validité de 25 microsecondes pour chaque ordre passé, 95 % à 99 % de ces ordres n’étant pas exécutés !

Pourquoi ne pas réglementer pour limiter l’exercice de ces activités proliférantes ? Madame la ministre de l’économie, vous avez répondu à M. de Montesquiou, en commission des finances, que « ces étranges animaux » que sont les CDS et les ventes à découvert ne sont pas en voie de disparition. Et vous vous interrogiez de manière significative : « La créativité financière est-elle un mal en soi ? ». C’est là toute l’ambigüité de votre position qui ne peut que favoriser la pression des lobbys financiers.

Il n’y a rien de sérieux sur les hedge funds et les paradis fiscaux. Le système bancaire sous-marin, le shadow banking system, a de beaux jours devant lui ! Toutes les propositions un peu fortes ont été rognées, rabotées, édulcorées. Le crédit restera détourné de sa fonction première de financement de l’économie réelle au profit des actifs financiers et patrimoniaux.

M. Jouyet, toujours devant la commission des finances, s’est interrogé sur la capacité du marché axé sur le court terme à financer les besoins à long terme dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement, de l’éducation, de l’alimentaire, bases de la future croissance. Ce ne sont pas les quelques mesurettes concernant OSEO, sans doute justifiées, ni les admonestations louables de M. Marini concernant la séquestration dans les bilans bancaires de plus de 4 milliards d’euros de fonds collectés au titre du livret A, qui mettront un terme à des pratiques déresponsabilisantes comme la titrisation, à l’origine de la crise des subprimes.

Au contraire, les mesures édictées par Bâle III conduiront à l’accentuation de ces transferts de risque. D’ailleurs M. Mario Draghi, président du nouveau conseil de stabilité financière, a appelé en mars dernier à une relance de la titrisation. J’ai même entendu le Président de la République dire que, après tout, la titrisation était bien nécessaire.

Le guichet de la subvention réglementaire aux activités de marché reste donc ouvert, les pondérations étant différentes selon qu’elles s’appliquent aux prêts des banques aux entreprises ou aux titres à l’actif des banques. Le résultat mécanique de cette différence de traitement sera évidemment d’encourager la titrisation.

En plus, Bâle III ne s’appliquera qu’à l’horizon 2019. D’ici là, nous avons le temps de connaître plusieurs nouvelles crises financières.

Le triplement des réserves de capitaux que les banques devront constituer pour se prémunir contre des pertes éventuelles risque d’être encore insuffisant, tant il est vrai, comme le déclare un éditorialiste du Financial Times, que « le fait de tripler presque rien ne change pas grand-chose au résultat » !

Les règles dites « Volker », qui vont dans le bon sens et qui n’ont été traduites que de manière édulcorée par la loi Dodd-Frank aux États-Unis, n’ont pas vraiment inspiré les timides essais de régulation initiés de ce côté de l’Atlantique. M. Mario Draghi a déclaré lundi à Paris que les mesures de Bâle III « ne sont pas suffisantes pour gérer le hasard moral porté par les plus importantes institutions financières systémiques ».

Voilà que nos superviseurs sont bien empêtrés dans leurs contradictions. M. Draghi insiste en effet sur la durée de la transition, jusqu’à 2019, pour « ne pas handicaper la reprise ». Ces contradictions ne font que traduire l’hésitation à s’attaquer aux problèmes de fond, en séparant les activités commerciales des activités de salles de marchés et en encadrant plus fortement la titrisation et les produits dérivés.

M. Jouyet a reconnu l’avance des États-Unis dans le domaine de l’organisation des marchés dérivés et les infrastructures de marché.

La source systémique des crises demeure, madame la ministre. Certes, l’émergence du concept de « risque systémique » peut permettre un retour, dans les politiques publiques, aux problématiques macro-économiques jusqu’ici négligées au bénéfice d’une simple régulation des acteurs.

Sachant que le comité européen du risque systémique verra ses prérogatives limitées à un simple pouvoir de recommandation, on voit bien que c’est peu de chose au regard d’un gouvernement économique de la zone euro dont l’absence ne saurait être palliée par des sanctions automatiques en cas de déficit budgétaire.

Vous vous êtes opposée à ces propositions d’automatismes avancées par l’Allemagne et relayées par M. Trichet. Je vous approuve, car c’est la négation même de l’appréciation politique.

La source systémique des crises repose en fait sur les déséquilibres macro-économiques qui n’ont pas été corrigés : stagnation des salaires favorisant l’endettement, envol de la dette privée grâce à des politiques monétaires laxistes, gonflement des déficits et de la dette publics, creusement des déficits commerciaux américains, désordre monétaire international.

Les réponses apportées ne sont pas à la hauteur.

Les États-Unis peuvent chercher à la fois à restaurer leur taux d’épargne et à diminuer leur déficit commercial, y compris en agitant la menace de mesures protectionnistes. Nous y sommes !

La Chine déclare vouloir augmenter sa demande intérieure, mais se refuse à toute réévaluation substantielle du yuan : 2 % seulement depuis l’annonce faite en juin dernier par les autorités chinoises !

L’Europe est incapable de mettre en œuvre une stratégie de croissance coordonnée et de prendre ainsi sa part de la résorption des déséquilibres mondiaux.

L’Allemagne, comme la Chine, exerce par ses excédents une pression déflationniste sur la conjoncture mondiale et européenne. À son instigation, les institutions européennes, Commission, Banque centrale au premier chef, couvrent la mise en route de plans d’austérité dans tous les pays membres, au prétexte d’une dette publique qui, comparée à celle des autres, États-Unis et Japon, est loin d’être la plus lourde.

La crise de l’euro était prévisible, étant donné l’hétérogénéité économique de la zone euro en l’absence d’un gouvernement économique harmonisant l’ensemble des politiques.

Les marchés financiers jouent sur les écarts de taux et la crise qui affectait hier la Grèce se polarisera demain sur d’autres pays, qui verront la spéculation fondre sur eux.

Le mécanisme européen de stabilisation financière est très imparfait : l’Allemagne et la France emprunteront séparément, et l’on peut déjà imaginer le creusement des écarts de taux entre pays emprunteurs...

Tout montre que, dans le grand désordre des monnaies, l’euro est la variable d’ajustement.

La Chine ne veut pas réévaluer son yuan. Les États-Unis laissent filer le dollar. C’est la politique du benign neglect. L’euro monte. Il a retrouvé, avec 1,36 dollar, sa parité d’avant la crise grecque.

On nous assurait, il y a trois mois, que celle-ci avait eu du bon, en rapprochant l’euro de son cours initial. La réalité se présente aujourd’hui tout autrement : l’euro est poussé vers le haut par la faiblesse du dollar. Les difficultés de l’économie américaine et les rivalités entre la Chine et les États-Unis ne laissent nullement augurer une amélioration à moyen et long terme.

Avec un euro à 1,50 dollar, voire davantage, c’est toute la zone euro qui sera asphyxiée, sauf peut-être, provisoirement, l’Allemagne. Mais c’est l’euro lui-même qui risque d’être emporté par l’exaspération des contradictions qui se manifestent en son sein.

L’intérêt de la France est de ne pas se laisser asphyxier par un euro trop cher, madame la ministre. C’est la zone euro tout entière qui doit être défendue. Autrement, c’est l’effet domino !

Ainsi la crise rebondit-elle constamment. Les certitudes se défont, à peine formulées. Hier, on saluait l’action des États. Aujourd’hui, la solution semble devenue problème. Hier, on vantait les vertus protectrices de l’euro. Aujourd’hui, celui-ci est devenu casse-tête.

Je ne comprends pas pourquoi, soit dit en passant, notre commission des finances propose de supprimer des demandes de rapport introduites par l’Assemblée nationale, au prétexte qu’elles lui paraissent « peu utiles », comme on peut le lire en page 53 du rapport de M. Marini.

Ce sont des sujets pourtant bien intéressants, monsieur le rapporteur général : la possibilité d’interdire les ventes de CDS portant sur des dettes souveraines dans la zone euro, ou encore la possibilité d’interdire les ventes à découvert par les filiales de fonds spéculatifs situées à l’étranger, ou enfin la possibilité de répercuter le coût de la crise sur les banques.

Ces rapports pourraient ne pas être inutiles s’il y avait une volonté politique, celle de mettre de gros grains de sable - par exemple, la taxation des mouvements financiers sur le marché des devises - dans les rouages d’un capitalisme financier devenu spéculatif.

Mais cette volonté de fermer l’économie casino n’existe pas !

Madame la ministre, il faut demander des « plans pilotes » à nos banques en cas de faillite rapide et de nationalisations, temporaires ou non – on ne sait pas de quoi l’avenir sera fait -, comme le fait le Royaume-Uni. La loi américaine inclut également ces plans dans la loi. Selon mes informations, la Commission européenne voudrait avancer sur ce sujet, mais la France s’y oppose. J’aimerais que vous confirmiez ou infirmiez cette information.

Une seule chose est sûre : les mesurettes que vous nous proposez ne nous permettront pas de dépasser l’horizon lourd de nuages d’un capitalisme financier qui se débat et se débattra encore longtemps comme un forcené pour ne pas mourir. Il est temps de le redire, les marchés financiers ne constituent pas l’horizon de l’humanité. Ce sont les peuples et les nations qui, en dernier ressort, écrivent l’histoire.

On attend de la France, qui présidera la G8 et le G20 cet automne, qu’elle fasse des propositions qui, concertées avec l’administration américaine – les autres ne sont pas d’accord - permettront aux États et donc à la démocratie de remettre au pas une finance aveugle par des mesures de régulation efficaces.

Par ailleurs, la réforme du système monétaire international doit enfin être mise à l’ordre du jour. Nous comptons sur vous pour le faire. L’intervention des États, si nécessaire soit-elle, n’y suffira d’ailleurs pas si elle n’est pas éclairée par la vision d’un autre modèle de développement et, pour tout dire, d’un autre modèle de société. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.

M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tirer les leçons de la crise financière, deux ans après son déclenchement, est un devoir pour les responsables politiques que nous sommes.

Tous les intervenants ont évoqué cette crise. Pour ma part, je me permettrai de renvoyer, pour l’historique, le constat et les considérations générales, à l’excellent rapport écrit de M. Marini, lequel a contribué à enrichir le texte issu de l’important travail du Gouvernement.

Nous sommes donc en présence d’un projet de loi qui, après son passage à l'Assemblée nationale, apporte un certain nombre d’éléments positifs. Ceux-ci me paraissent, contrairement à ce que mon prédécesseur vient d’affirmer, intéressants pour réformer notre système.

J’ai un regret, que je tiens à exprimer d’emblée : deux chantiers sont restés ouverts, et il faudra tout de même essayer de les relancer.

Le premier, c’est celui de la gouvernance économique et politique de la zone euro : nous nous sommes aperçus que, malgré tous nos efforts, nous n’allions ni très loin ni très vite dans ce domaine.

Le second, c’est celui de la stabilité du système monétaire international. Moi qui ai signé – il y a fort longtemps ! – les accords de la Jamaïque, qui consacraient le flottement des monnaies, je suis inquiet de constater aujourd’hui que les mouvements combinés du yen, du yuan, du dollar, de la livre sterling et d’autres monnaies risquent de créer des problèmes de plus en plus graves et par conséquent de faire réapparaître des risques systémiques importants.

Cela étant, ce texte nous paraît très abouti, et c’est pourquoi le groupe UMP le votera d’un seul cœur. Je me permettrai maintenant d’insister sur quatre points qui me paraissent importants.

Premièrement, la commission a décidé d’encadrer et de réguler le marché des quotas d’émission de gaz à effet de serre. Cette initiative est excellente, car ce marché est amené à prendre une importance considérable. Nous nous accordons tous sur ce point, me semble-t-il. L’assimilation des quotas d’émission de CO2 à des instruments financiers, en leur donnant une qualification juridique, est un progrès. Cette avancée pourrait permettre d’orienter l’Union européenne dans ce sens, comme l’a indiqué il y a quelques jours le commissaire européen Michel Barnier.

Deuxièmement, sur la base, précisément, d’un rapport de M. Barnier, a été introduite l’interdiction de certaines pratiques à risques, telles que les ventes à découvert à nu de produits dérivés. L’introduction de cette disposition a provoqué quelques tensions entre le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat. Certains estiment qu’il faudrait supprimer la notion même de produits dérivés.

Mais la France n’est plus une île, et nous sommes confrontés à des marchés financiers mondiaux, dans lesquels les décisions des Chinois, des Coréens ou des Indiens sont aussi importantes que celles que nous prenons ici.

Notre position est certes un peu en retrait par rapport à ce qu’ont décidé les Allemands, mais elle est conforme aux propositions du commissaire européen aux services financiers. En effet, le texte tend à prévoir non pas l’interdiction, mais la limitation des ventes à découvert à nu par des règles locales. Ces dernières autorisent ces opérations dans la mesure où le vendeur dispose du titre à vendre ou à livrer, mais aussi s’il présente des garanties de pouvoir le faire : cette précision apporte une correction importante à des mécanismes qui furent, avant la crise, quelque peu erratiques.

Troisièmement – j’aurais dû commencer par là ! –, un conseil de régulation financière et du risque systémique sera créé et de nouveaux pouvoirs seront octroyés à l’Autorité des marchés financiers. Ces mesures sont très importantes, car notre pays souffre d’un cloisonnement généralisé des autorités et du fait que chacun s’occupe dans son coin de ses petits problèmes. Disposer d’une autorité qui couvre la totalité des opérations sur les marchés financiers – banque et assurance – me paraît très positif, surtout dans le cadre de la mondialisation.

J’ajoute que l’Autorité des marchés financiers prévoit un encadrement de la rémunération des opérateurs sur les marchés, ceux que les Anglais appellent les traders, et rend obligatoire la mise en place d’un comité des risques et d’un comité des rémunérations dans chaque entreprise, afin de clarifier leur rémunération. C’est un réel progrès : pouvoir mettre en balance les niveaux de rémunération et l’activité permettra naturellement d’arriver à des résultats plus satisfaisants.

Enfin, quatrièmement, la question de la supervision des agences de notation est celle qui suscite le plus grand débat. Je ne fais pas partie de ceux qui s’offusquent de l’existence de ces agences. En tant que gestionnaire de collectivités locales, j’ai passé vingt ans à travailler avec elles. J’estime qu’il est bon, pour des autorités politiques, de pouvoir s’appuyer sur un examen approfondi des comptes, des résultats et des perspectives, effectué de manière systématique et sur la durée.

Évidemment, certaines opérations ont été un peu sanglantes, notamment dans l’affaire grecque. Par conséquent, accroître le contrôle de ces agences, comme cela avait déjà été envisagé en 2004, me paraît important. La crise n’a d’ailleurs fait qu’accélérer l’orientation vers un processus de contrôle amélioré, qui s’est concrétisée, au niveau communautaire, par l’adoption en septembre 2009 d’un règlement, et, au niveau français, par ce projet de loi.

M. le rapporteur général nous a fait part de certaines difficultés. Nous les avons évoquées en commission en votre présence, madame la ministre. Il a fallu trouver un compromis entre la position initiale du Gouvernement, celle de l'Assemblée nationale et ce que nous avions décidé.

Les agences auront l’obligation de publier un rapport de transparence annuel. Elles devront rendre publics les éléments et les méthodes sur lesquels elles fondent leur notation et fournir au Comité européen des régulateurs des marchés de valeurs mobilières les données relatives à leurs performances passées, lesquelles seront également rendues publiques. Cette surveillance, confiée en France à l’AMF par le présent projet de loi, est un élément positif.

Enfin, sur le point de savoir s’il pouvait exister des clauses contractuelles de dégagement de responsabilité, nous avons tranché.

Nous devons accepter, me semble-t-il, le rôle de ces agences. Au-delà de la transparence, il faut simplement mettre en place un système qui empêche la publication des avis de ces agences quelques heures avant la clôture des marchés boursiers européens, américains ou japonais, afin d’éviter des effondrements de cours. Je sais très bien que certains opérateurs des marchés financiers n’y sont pas favorables, car le système actuel leur permet de réaliser des plus-values tout à fait intéressantes… C’est sur ce point qu’il faudra bien contrôler les agences de notation.

Le groupe UMP se réjouit que la commission des finances du Sénat ait trouvé une position d’équilibre en réintroduisant la possibilité de clauses non pas exonératoires, mais limitatives de responsabilité. Cette disposition, qui est conforme à la réglementation européenne, va dans le bon sens.

Le projet de loi contient par ailleurs plusieurs dispositifs, que je ne vais pas détailler ici, visant à conforter et à sécuriser le financement des entreprises, notamment des PME. Je pense particulièrement aux mesures concernant OSEO.

Madame la ministre, vous avez pu mettre en évidence les aspérités de ce texte en discutant avec vos homologues européens, malgré les difficultés rencontrées avec la Grande-Bretagne et, surtout, les États-Unis.

Il est de bon ton en France, où nous sommes toujours atteints de sinistrose, de dire que les Américains sont allés beaucoup plus loin que nous et que nous nous contentons de mesurettes. Tel n’est pas mon avis. Nous voterons donc sans amertume ni regret ce texte tout à fait important.

Je vous fais confiance, madame la ministre, pour essayer de relancer, dans le cadre du G8 et du G20, le chantier de l’équilibre du système monétaire international, lequel est bien maltraité. Sur le plan européen, nous ne devons pas nous contenter de défendre l’euro, mais faire de cette monnaie l’arme efficace d’un gouvernement économique, qui nous fait aujourd'hui défaut. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. Jean-Pierre Chevènement applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà deux ans, le 25 septembre 2008, le Président de la République dressait, dans son discours de Toulon, un réquisitoire implacable contre les dérives insensées du capitalisme : il fallait, nous expliquait-il, « moraliser le capitalisme financier ». Il s’engageait à agir en urgence, en déclarant : « Le Gouvernement de la République réglera le problème par la loi avant la fin de l’année. »

Deux années se sont écoulées, et le projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis ne paraît nullement correspondre à la vigueur de cet engagement, comme en témoignent son contenu, bien trop modeste à nos yeux, et le faible degré d’urgence de son examen par le Parlement.

Dans ces conditions, nous sommes en droit de nous interroger : l’état d’esprit général aurait-il changé au cours de ces deux années ? Aux yeux de certains, le capitalisme financier serait-il à nouveau redevenu acceptable, sinon plus respectable ? Plusieurs indices conduisent à le penser.

Pour s’en convaincre, il suffit de se reporter à une chronique du journal Le Figaro du 21 septembre dernier. Que nous y explique-t-on en effet avec aplomb ? Selon le chroniqueur, « le capitalisme va bien », et « non seulement [il] ne s’est jamais aussi bien porté, mais les États sont aujourd’hui des victimes consentantes de cette crise ». Et d’interroger doctement, avec une belle et ostensible assurance retrouvée : « Pourquoi le capitalisme est-il autorisé à crier victoire, alors qu’il y a deux ans, on l’enterrait sans fleurs ni couronnes ? » Eh bien, mes chers collègues, la réponse apportée par l’apologiste du Figaro à sa question laisse sans voix : si le capitalisme peut crier victoire, c’est parce que « jamais on n’a dépensé tant d’argent public (plus de 5 000 milliards de dollars en dix-huit mois) pour venir à son secours ». Devant cette ahurissante analyse, on se demande s’il faut parler de cynisme, d’arrogance ou de provocation calculée !

Le rapport de M. Marini est, lui, empreint de réalisme. La question est néanmoins de savoir si les préconisations régulatrices du projet de loi sont à la hauteur des enjeux. On voit en effet aujourd’hui où les excès des marchés financiers nous ont conduits : les dégâts sont considérables ! Sachant que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets, il est essentiel, si l’on veut éviter d’autres catastrophes financières du même type, de prévoir des mesures législatives qui ciblent réellement les véritables causes de la dérive financière constatée. C’était là l’objet des nombreux amendements que nous avions présentés en commission.

Certains observateurs se sont accommodés de l’idée que la désignation de boucs émissaires suffirait à dédouaner toute la sphère financière de sa part de responsabilité dans la crise. À cet égard, que n’a-t-on entendu au sujet des agences de notation ! Certes, elles n’ont pas fait preuve d’habileté dans la gestion temporelle de la communication financière sur les firmes et les États.

Doit-on, pour autant, considérer que le thermomètre est responsable de la fièvre intense du malade ? Non, bien évidemment ! À mon sens, ce qui explique la fièvre de cheval du capitalisme financier, c’est bien moins les dérèglements des mécanismes de marché ou les manquements de telle ou telle catégorie d’acteurs que la dérive généralisée des comportements et de la hiérarchie des valeurs et des objectifs prévalant au sein de la sphère financière occidentale. « Une rentabilisation maximale à très faible risque pour soi au prix d’une maximisation du risque pour les autres » : tel semble être aujourd’hui le précepte majeur véhiculé par la socio-culture financière occidentale.

Devant ce constat, monsieur le rapporteur général, on peut s’accorder sur la nécessité d’un retour à la norme guidé par trois principes : transversalité, transparence, responsabilité. Nous vous suivons sur ce point.

Cependant, à nos yeux, le principe de responsabilité doit véritablement être la clé de voûte de tout le dispositif. Il doit conduire tout à la fois à une indispensable clarification de la mission des firmes bancaires et financières, à une approche plus collective et intégrée de la gestion du risque et à une plus juste perception de la place des profits et des rémunérations. À ce sujet, d’ailleurs, on ne peut qu’être inquiet de constater que les rémunérations des traders ou des administrateurs de sociétés s’envolent de plus belle depuis 2009.

Le projet de loi qui nous est soumis répond à l’idée qu’il faut s’efforcer de faire face et donner une suite à un diagnostic largement partagé. Dans le monde, les multiples déclarations des autorités publiques et les engagements du G20 témoignent qu’un processus lourd de régulation est souhaité, sinon enclenché.

Ce processus conduira-t-il à faire émerger un ensemble de garde-fous suffisamment robustes et à modifier durablement les comportements des acteurs de la finance ? C’est là toute la question ! Il en va en effet de l’addiction à la spéculation financière comme de l’addiction aux casinos : la fièvre du gain et des bonus gagne les esprits de façon aussi foudroyante que la fièvre du jeu. Si aucune mesure de dissuasion sérieuse n’empêche un joueur invétéré d’entrer au casino, il retourne très rapidement à ses vieilles habitudes…

Dans ce contexte, on ne peut que se féliciter du courage et de la détermination à agir du président Obama, qui cet été a doté les États-Unis d’une nouvelle réglementation contraignante, après une lutte sévère contre les lobbies très organisés de la banque et de la finance. Il est remarquable que les États-Unis aient décidé de remettre en cause l’architecture même de la fonction financière sous tous ses aspects. En ce sens, c’est une véritable réforme structurelle qui est en train de voir le jour.

Quant à l’Union européenne, elle a abordé les problèmes au travers d’approches parcellaires, dans la mesure où il est très vite apparu impossible d’élaborer un consensus sur une architecture nouvelle.

On peut regretter que la réforme institutionnelle des autorités européennes n’ait malheureusement pas transféré de compétences d’intervention à l’échelon européen. Cela étant, on peut se féliciter de l’adoption récente par le Parlement européen du paquet « supervision financière ». Ces textes instaurent trois autorités de supervision et un Comité européen du risque systémique. Ces progrès sont sans nul doute importants, mais pas encore à la hauteur des promesses faites en 2009, à l’occasion des sommets du G20.

On ne peut que regretter, et le rapport le souligne bien, que certains projets de régulation cristallisent en Europe des différences de philosophies, de traditions juridiques, de stratégies politiques ou d’approches économiques entre États membres. Je citerai à cet égard l’exemple du projet de directive sur les gérants de fonds alternatifs, dont l’adoption a été plusieurs fois reportée.

C’est donc dans ce contexte européen un peu flottant que s’inscrit le projet de loi de régulation bancaire et financière aujourd’hui soumis au Sénat. Si les dispositions présentées sont certes utiles, elles résultent, pour beaucoup d’entre elles, de la déclinaison ou de la transposition en droit français de réglementations européennes, telles que, par exemple, la directive du 16 septembre 2009 relative à la réglementation bancaire. Cependant, reste à nos yeux posée la question de l’entrée en application et surtout de la pleine efficacité des dispositifs introduits par ce projet de loi, tant ils paraissent modestes au regard de l’ampleur du chantier que le Président de la République lui-même s’était engagé à mener à bien dans l’urgence.

Pour illustrer les motifs de notre circonspection, j’évoquerai la façon dont la question des agences de notation financière est abordée. Mon collègue Jean-Pierre Fourcade vient d’en parler, mais j’irai plus loin que lui dans l’analyse sur ce point.

Le projet de loi vise à adapter le droit français aux dispositions du règlement n° 1060/2009 du 16 septembre 2009, tendant à mieux encadrer les agences de notation financière, ce qui est un objectif légitime. Or, malgré l’adoption somme toute récente de ce règlement, la Commission européenne a déjà présenté, le 2 juin 2010, une nouvelle proposition législative afin de le modifier. L’objet central du nouveau texte est de transférer à la future autorité européenne de supervision le pouvoir d’autoriser et de superviser les agences de notation, sans créer pour autant, du moins pour le moment, les conditions de l’instauration d’une agence européenne de notation, demandée par certains, notamment par le commissaire européen Michel Barnier. De nouvelles propositions doivent, semble-t-il, être faites dans les semaines à venir, et Jean-Pierre Jouyet, président de l’AMF, préconise, quant à lui, la création d’une agence mi-publique mi-privée, sous l’égide du FMI.

Si le présent projet de loi témoigne d’une véritable exigence en matière de transparence pour les agences de notation financière, il ne permet pas de progresser beaucoup dans la voie d’un accroissement de leur responsabilisation.

En effet, s’il est assez simple, pour des superviseurs, de contrôler les procédés d’évaluation utilisés, il est bien plus aléatoire de déterminer si une note émise est fiable ou non ! Sur quelles informations se fondent aujourd’hui les agences de notation financière dans leurs évaluations ? La réponse est simple : elles s’appuient sur les informations mises à leur disposition par les entreprises et les États. Or, depuis l’affaire Enron, sans oublier celle, plus récente, des statistiques trafiquées de la Grèce, chacun a conscience que les informations comptables et budgétaires, et même certaines données dites officielles des États, ne donnent pas une image fidèle et fiable de la réalité patrimoniale sous-jacente.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !

M. François Marc. On doit le reconnaître, la sphère financière internationale est, hélas ! gangrenée par le bluff, le camouflage des risques et les trucages de toutes sortes. Quelle confiance peut-on aujourd’hui accorder à certains produits structurés à haut risque ?

Dans un autre ordre d’idées, peut-on se satisfaire d’un dispositif de simple encadrement des ventes à découvert à nu d’actions ou de CDS ? Si l’on admet que l’information financière est souvent biaisée, les acteurs et spéculateurs souvent sans scrupules et les bilans comptables souvent insincères, ne doit-on pas dès à présent aller bien plus loin dans l’interdiction des produits financiers douteux et la mise en cause de la délinquance en col blanc ?

Ce projet de loi n’apporte pas, à nos yeux, les réformes attendues en la matière. C’est pourquoi les amendements que nous avons déposés visent à renforcer son dispositif. La détermination à agir affichée dans le discours de Toulon de septembre 2008 a fait place à un manque d’ambition dans les mesures présentées. La régulation financière doit certes s’inscrire dans une vision mondialisée, mais cela ne doit pas empêcher notre pays d’adresser un signal législatif qui soit à la mesure des exigences imposées par la douloureuse expérience de cette énorme crise financière.

Nous appelons de nos vœux un renforcement du dispositif, madame la ministre. Nous avons le sentiment que nos arguments n’ont pas été entendus en commission ; s’ils ne le sont pas davantage en séance publique, je crains que nous ne puissions approuver ce projet de loi, qui ne répond pas complètement aux attentes de nos concitoyens, et même de nombreux acteurs de la sphère financière. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Madame la ministre, votre projet de loi de régulation bancaire et financière s’adresse aussi aux outre-mer, puisqu’il est clairement indiqué, dans l’étude d’impact, que les dispositions du texte s’appliqueront, dans les mêmes conditions qu’en métropole et sans adaptation, aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ainsi qu’à Mayotte, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Pour les autres collectivités ultramarines – la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie –, il est proposé d’habiliter le Gouvernement à étendre et à adapter les dispositions de la loi par ordonnance.

L’examen de ce texte nous offre une excellente occasion de nous pencher sur les spécificités du système bancaire des départements et collectivités d’outre-mer, même si la convergence avec le système métropolitain va croissant.

En effet, le paysage bancaire des DOM-COM est désormais dominé par les cinq principaux réseaux bancaires nationaux – BNP Paribas, Banque populaire-Caisse d’épargne, Crédit agricole, Crédit mutuel, Société générale –, qui regroupent à eux seuls vingt-neuf des trente-neuf enseignes commerciales installées localement. Le mouvement de concentration observé sur le plan national n’a ainsi pas épargné les DOM-COM. La quasi-totalité des établissements locaux ont disparu, la banalisation des places financières des départements et des collectivités d’outre-mer s’accélérant.

Pourtant, malgré cette dynamique de convergence, les divergences demeurent fortes en matière de conditions d’exploitation. J’insisterai principalement sur deux points : les tarifs bancaires et l’octroi de crédits aux PME.

C’est un fait reconnu et trop facilement accepté que « les tarifs bancaires sont généralement significativement plus élevés qu’en métropole », pour reprendre les termes du rapport sur les frais bancaires d’Emmanuel Constant et de Georges Pauget. Une unanimité de vues existe sur ce point entre les sénateurs ultramarins. Vous pourrez aisément le constater à l’examen des amendements qu’ils présenteront, madame la ministre, ma collègue Anne-Marie Payet parlant même de « différence indécente ». (Mme Anne-Marie Payet opine.)

Il est vrai que la grande majorité des établissements bancaires continuent de pratiquer des tarifs élevés outre-mer, arguant du fait que, exerçant sur des marchés de faible taille, ils souffrent encore aujourd’hui du poids de leurs structures, ce qui leur laisse moins de marge de manœuvre pour couvrir leurs risques. Cet argument est cependant à relativiser, tant leur résultat brut d’exploitation se maintient à un niveau élevé.

En ce qui concerne l’octroi de crédits, si la situation paraît satisfaisante pour les crédits immobiliers ou à la consommation consentis aux ménages, elle l’est beaucoup moins pour les entreprises, malgré les mesures prises dans le cadre du plan de relance et de la politique de développement endogène préconisée par le chef de l’État.

En effet, si, pour la France métropolitaine, le Gouvernement a confié à OSEO la mission de mettre en place des dispositifs facilitant l’octroi de crédits bancaires à court et moyen terme aux entreprises, son choix s’est porté sur l’Agence française de développement, l’AFD, pour les outre-mer. Une convention-cadre a même été signée le 17 juin 2009 entre OSEO et l’AFD afin d’établir un partenariat renforcé étendant la gamme des produits financiers distribués par l’AFD à l’ensemble des produits conçus par OSEO.

Cependant, les entreprises ultramarines se plaignent du fait que bon nombre de ces produits ne sont néanmoins pas distribués ou mériteraient d’être mieux adaptés aux réalités locales. Je citerai à cet égard, par exemple, les prêts directs, les prêts en cofinancement ou complémentaires, les contrats de crédit-bail mobiliers et immobiliers, le contrat de développement participatif, lequel est proposé mais difficile à mettre en place en raison du seuil imposé.

Il convient de rappeler que la production bancaire de crédits en faveur des entreprises et de certaines filières est très insuffisante dans les DOM-COM. Aussi faut-il veiller, si l’on veut promouvoir un réel développement endogène dans les outre-mer, à ce que l’AFD dispose de tous les moyens nécessaires pour distribuer correctement l’ensemble des produits OSEO, à l’instar de ce qui se pratique en France métropolitaine et à l’échelle des collectivités d’outre-mer.

Madame la ministre, la mission Constant-Pauget a reconnu qu’elle n’avait pas eu suffisamment de temps pour réaliser une étude approfondie sur la tarification bancaire. Il est donc indispensable de diligenter une véritable mission d’information sur les banques outre-mer, comme l’a suggéré le président de la commission des finances du Sénat lors de l’audition, le 17 juin dernier, de Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer, à propos du règlement des comptes et du rapport de gestion pour l’année 2009. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Mon intervention anticipera sur la présentation des amendements du Gouvernement.

Monsieur Vera, nous avons soigneusement veillé à assurer la transparence de la fiducie. Nous avons, en particulier, mis en place un registre, accessible notamment aux autorités administratives et judiciaires de contrôle. Il convient en effet d’éviter que la fiducie ne serve de véhicule à des mécanismes d’optimisation fiscale.

En matière de régulation financière, il est certes tentant, madame Bricq, messieurs Fourcade et Marc, de considérer que, depuis que M. Barack Obama préside les États-Unis, la lumière vient de l’Ouest. Cependant, si l’on se donne la peine de se pencher sur les 1 200 pages de la régulation Dodd-Frank, de retracer la mise en œuvre de l’ensemble du dispositif et de prendre la mesure de la complexité de l’organisation de la supervision, caractérisée par une multiplicité d’agences et de sous-agences, une segmentation entre l’échelon fédéral et celui des États, entre les secteurs d’activité et entre les différents acteurs, on constate que la réglementation américaine constitue un maquis inextricable.

Vous avez donc raison de souligner, monsieur Fourcade, que nous pouvons être fiers du texte que nous sommes en train d’élaborer. Il nous permettra, dans le prolongement de la réglementation européenne que le Parlement a transposée dans notre droit national le 22 septembre dernier, de mettre en place une régulation simple et pratique, qui autorisera une identification très rapide des organismes compétents soit en matière bancaire, assurantielle et mutualiste, soit en matière de marchés financiers, tout en prenant en compte la problématique du consommateur, que j’ai pris soin d’intégrer dans la modification de la réglementation prudentielle.

De ce point de vue, mesdames, messieurs les sénateurs, l’œuvre que nous élaborons ensemble sera largement aussi utile que celle qui a été réalisée outre-Atlantique, sans être aussi volumineuse : grâce à la clarté rédactionnelle du législateur et aux vertus de notre droit civil, nous produisons des textes intelligibles, pouvant être appliqués dans des délais très courts.

En ce qui concerne la mise en œuvre de la directive CRD3, madame Bricq, la matière justifie l’application de l’article 37 de la Constitution, plutôt que celle de l’article 34. Il ne me semblerait en outre pas souhaitable de recourir à la voie législative et d’encombrer davantage encore l’ordre du jour des assemblées pour la simple transposition d’une directive dont l’élaboration à l’échelon communautaire a déjà pris beaucoup de temps.

Concernant la directive sur les produits alternatifs, évoquée par certains orateurs, je voudrais à nouveau clarifier les choses.

Des retards dans la mise en place de la réglementation européenne sont dénoncés çà et là, et souvent imputés à notre pays. Je tiens à l’affirmer avec force : la France veut une réglementation et une supervision en matière de produits alternatifs. Nous participons très activement aux négociations actuellement en cours à Bruxelles, et notre pays est également favorable à l’instauration d’un passeport européen pour les fonds et les gérants de fonds basés sur le territoire de l’Union. En revanche, la France ne souhaite pas qu’un tel passeport soit délivré à des fonds offshore. Pour ceux-ci, nous estimons qu’il n’y a aucune raison d’aller au-delà de la situation actuelle : il est parfaitement possible de privilégier l’option du placement privé, qui permet à un fonds offshore de commercialiser ses produits dans le pays où il est enregistré et supervisé, sans pour autant pouvoir le faire dans les vingt-six autres États membres de l’Union européenne. Sur ce point, nous avons des alliés, et je me flatte d’avoir rallié à notre position certains de nos grands voisins. Ce débat se poursuivra, car je n’ai pas l’intention de laisser faire n’importe quoi dans ce domaine : ce ne serait pas conforme à l’esprit qui a animé nos débats ni à la détermination dont a fait preuve le Président de la République sur ce dossier, notamment à l’occasion du G20. On ne peut pas, d’un côté, lutter contre les paradis fiscaux comme nous l’avons fait, et, de l’autre, laisser agir librement dans l’espace communautaire des fonds alternatifs localisés dans des territoires où la supervision n’est pas assurée dans les mêmes conditions. (Marques d’approbation au banc de la commission.)

Mme Bricq a évoqué la protection des consommateurs de produits financiers. Pour la première fois, nous plaçons le consommateur au cœur du système, y compris devant les organismes de supervision que sont l’AMF et l’autorité de contrôle prudentiel, l’ACP.

Monsieur Fourcade, vous pouvez compter sur le Gouvernement pour aborder en profondeur, sous l’autorité du Président de la République, toutes les questions relatives au système monétaire international.

Vous avez tout à fait raison de souligner que, depuis un certain temps, l’instabilité et la volatilité constituent des désordres auxquels il convient de porter remède, dans le cadre d’un dialogue international qui pourrait s’instaurer au sein du G20. En tout état de cause, des mouvements unilatéraux tels que ceux que l’on a pu observer tout récemment sur le yen nuisent à la nécessaire stabilité monétaire, de même que les déclarations de certains États.

Monsieur Chevènement, vous avez affirmé que la France s’opposait au développement d’outils de résolution des crises dans le domaine bancaire, préconisé par la Commission européenne. Il s’agit de mécanismes de réorganisation ou de ce que les Britanniques appellent les living wills.

Or il n’en est rien : la France est absolument déterminée à obtenir la mise en place de ce type de mécanismes. J’ai confié à M. Jean-François Lepetit une mission spécifique sur ce thème, pour que la France soit en mesure de faire à la Commission européenne des propositions visant à l’instauration de dispositifs organisés de résolution de crises prenant notamment en compte les intérêts des créanciers.

M. Jean-Pierre Chevènement. C’est une litote ! Parlons plutôt de « nationalisations temporaires » !

Mme Christine Lagarde, ministre. Toutes les étapes doivent être prises en considération, dans le respect des intérêts bien compris des créanciers, y compris celles auxquelles vous avez fait référence. Certaines de ces méthodes ont d’ailleurs été utilisées dans des États de l’Union européenne, et même pas plus tard qu’hier. Nous n’avons pas été contraints d’aller aussi loin que certains autres pays, puisqu’il a suffi, pour sauvegarder notre système bancaire, de lui accorder des prêts, qui ont rapporté à l’État quelque 2 milliards d’euros d’intérêts à ce jour.

Monsieur Marc, vous avez souligné la nécessité de dissocier la notation du risque « entreprise » de celle du risque « produits financiers ». Je suis parfaitement d’accord avec vous sur ce point. La réglementation européenne sur les agences de notation va connaître de nouveaux développements, puisque la Commission européenne a remis l’ouvrage sur le métier. La France a demandé que, à cette occasion, les standards et les modèles applicables à chacun des deux types de risque soient bien distingués.

En ce qui concerne les quotas d’émission de gaz à effet de serre, madame Bricq, je suis tout à fait favorable à ce que ce marché soit inclus dans le champ de la régulation prévue, comme le souhaite la commission. En revanche, aller jusqu’à qualifier ces quotas d’instruments financiers me paraîtrait comporter plus d’inconvénients que d’avantages. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen de vos amendements.

Monsieur Patient, vous avez souligné les disparités très fortes qui existent, en matière de frais bancaires, entre les différents territoires ultramarins. Afin de mesurer et de réduire ces disparités, j’ai mis en place un observatoire des frais bancaires dans ces territoires. Nous aurons l’occasion d’y revenir. Nous avons également prévu, dans le cadre des négociations sur ce thème des frais bancaires que nous avons menées tout au long du mois de septembre dernier, un certain nombre de dispositions qui s’appliqueront à l’ensemble du territoire français, y compris les outre-mer. L’observatoire nouvellement créé aura pour mission spécifique de vérifier si les excès manifestes constatés dans les territoires ultramarins se réduisent conformément aux engagements pris par les établissements bancaires. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

TITRE Ier

RENFORCER LA SUPERVISION DES ACTEURS ET DES MARCHÉS FINANCIERS

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Articles additionnels avant l'article 1er

Articles additionnels avant le chapitre Ier

M. le président. L'amendement n° 97, présenté par Mme Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer article additionnel ainsi rédigé :

La France promeut au niveau communautaire la création d'un marché destiné à échanger entre institutions et agents publics les obligations émises par tout opérateur public de l'Union Européenne.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Pour surmonter la crise de la dette privée que leurs politiques ont provoquée, les gouvernements néolibéraux, dont celui de la France, ont décidé d’en faire payer le prix non pas aux spéculateurs ou aux banques, mais aux salariés.

Tandis que les déficits publics explosent spontanément en raison de la récession provoquée par la crise financière, ces gouvernements ont transféré la charge des dettes « pourries » aux États. Ils ont donc transformé délibérément un surendettement privé en un surendettement public. Les spéculateurs, toujours parfaitement libres de jouer à leur guise, et dûment avertis que le risque de défaut pesait non plus sur la finance privée, mais sur les finances publiques, s’attaquent désormais aux bons du Trésor, en particulier à ceux qui sont émis par les petits États les plus fragiles, comme l’a montré la crise grecque.

Notre amendement vise donc à freiner les agissements des spéculateurs, et surtout à protéger les États membres de l’Union européenne contre les attaques provenant d’agents extérieurs à celle-ci, en créant, à terme, un marché européen destiné à promouvoir les échanges entre institutions et agents publics des obligations émises par tout opérateur public de l’Union européenne.

L’objectif est de faire en sorte que les obligations publiques ne puissent être émises qu’auprès d’agents résidents des pays membres de l’Union européenne et ne soient négociables qu’entre ces mêmes agents.

On l’aura compris, il s’agit d’en finir avec la tutelle exercée par les marchés financiers internationaux. Depuis le milieu des années quatre-vingt jusqu’au début des années 2000, les spéculateurs ont fait pression sur les États participant au système monétaire européen pour qu’ils alignent leurs politiques macroéconomiques sur celle de l’Allemagne. Sous l’impulsion des néolibéraux, les gouvernements de la zone euro ont été placés sous la tutelle potentielle du marché obligataire international au travers d’une série de dispositions : restrictions au financement monétaire de la dette publique, interdiction du sauvetage des États rencontrant des difficultés financières, libre circulation des capitaux entre l’Union européenne et le reste du monde. De potentielle, cette tutelle est devenue effective en 2008-2009 !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est pas favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 99, présenté par Mme Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La France promeut au niveau communautaire un Pacte européen de solidarité et de responsabilité financière permettant à ce que la dette publique des États membres soit solidairement garantie par l'Union Européenne.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Les finances publiques grecques ont certes été longtemps dégradées par les gouvernements du passé, ainsi que par l’évasion et la fraude fiscales, mais la situation financière du pays n’est pas, en soi, plus préoccupante que celle du Royaume-Uni, de l’Espagne ou de l’Italie. Peut-être est-elle même, à terme, moins inquiétante que celle des États-Unis, pays dépourvu d’épargne, totalement dépendant des bailleurs de fonds étrangers et assis sur une colossale montagne de créances douteuses.

La Grèce, et à sa suite l’ensemble de la zone euro, a d’abord été la cible d’un mouvement spéculatif autoréalisateur, sans risque pour ses instigateurs.

Ce mouvement remplit deux fonctions.

Primo, il permet aux banques de se « gaver », en creusant un gouffre entre le coût de refinancement et les taux payés sur les titres publics.

Secundo, il piège les pays cibles dans une spirale d’endettement toujours plus cher, ce qui peut les amener très vite au bord de la cessation de paiement, c’est-à-dire les obliger à se soumettre aux exigences du FMI et de l’Union européenne.

Plus que les spéculateurs, qui ne font que ce que la déréglementation et le libre-échange en vigueur les autorisent et les engagent à faire, ce sont les gouvernements et les traités de l’Union qui portent la responsabilité de cette situation. La crise grecque n’existerait pas si l’Union européenne avait institué la garantie solidaire des dettes publiques de ses membres et si elle avait contrôlé les mouvements de capitaux spéculatifs à ses frontières.

C’est pour faire face à ce genre de situations que notre amendement vise à créer un pacte européen de solidarité et de responsabilité financières permettant que la dette publique des États membres soit solidairement garantie par l’Union européenne. En contrepartie, les États s’engageraient à user de l’endettement public conformément aux principes suivants.

Premièrement, les déficits publics et la dette publique ne peuvent servir à éviter de prélever les ressources fiscales et sociales nécessaires au financement des biens publics et à en reporter la charge sur les générations futures. Ils servent à répartir rationnellement dans le temps la charge des investissements publics et celle des dépenses engagées pour lutter contre les chocs conjoncturels affectant l’économie.

Deuxièmement, en situation de crise financière, les États membres n’interviennent que pour sauvegarder l’intérêt général et les biens publics. Ils ne protègent pas les spéculateurs et les établissements financiers contre la perte de leurs capitaux et de leur patrimoine ; ils protègent la société et les économies nationales contre les dégâts collatéraux que pourrait engendrer la défaillance des opérateurs financiers.

Tout le contraire de ce que vous avez fait, en somme !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Instituer un pacte européen de solidarité et de responsabilité financières est une idée que l’on peut assurément défendre. Cela nous renvoie à toute la problématique de l’Union européenne. En matière de dette publique, doit-on considérer l’Union à vingt-sept ou la seule zone euro ? La question monétaire est évidemment au cœur du sujet.

En tout état de cause, je ne crois pas qu’il soit réaliste d’insérer dans le présent projet de loi un article purement déclaratoire, qui n’a aucun caractère normatif. Même si la commission reconnaît qu’une telle idée mérite d’être versée au débat, elle ne peut qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. L’avis est également défavorable, monsieur le président.

J’ajoute que le Fonds européen de stabilité financière qui a été mis en place à la suite de la crise grecque répond d’une certaine manière à la préoccupation des auteurs de l’amendement. La tendance actuelle, dans le cadre notamment des discussions en cours au sein du groupe de travail présidé par M. Van Rompuy, est précisément de rendre budgétairement responsables les États et de mettre en place un mécanisme assurant qu’aucun d’entre eux ne se trouve en situation de devoir être garanti.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 107, présenté par Mme Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement au plus tard à la fin de l'année 2010 un rapport sur l'interdiction des marchés de gré à gré et la réintégration de leurs opérations actuelles sur des marchés organisés et réglementés.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Face à la crise, l’enjeu principal réside dans la régulation et la réglementation des marchés financiers : sur ce plan, les banques ne se montrent vraiment pas enthousiastes, c’est le moins que l’on puisse dire, dans la mesure où toute réglementation limite mécaniquement leurs profits.

Dans ce domaine, le dossier des marchés de gré à gré est l’un des plus urgents à traiter. Ces marchés consistent en des transactions sur mesure, faisant appel à des produits financiers ultrasophistiqués, sans qu’aucune instance de régulation, ou presque, n’intervienne. C’est pourquoi nous proposons l’interdiction des marchés de gré à gré et la réintégration de leurs opérations actuelles dans des marchés organisés et réglementés.

Dans un marché de gré à gré, la transaction est conclue directement entre le vendeur et l’acheteur, contrairement à ce qui se passe sur un marché organisé ou à la bourse, où un tiers intervient. Les opérations y sont souvent moins standardisées et moins normalisées, ou s’inscrivent dans un cadre réglementaire plus souple. Par exemple, le marché des devises est essentiellement un marché de gré à gré : une entreprise ou une banque qui désire effectuer une opération de change se mettra en relation directe avec un autre acteur.

Cette déréglementation de pans entiers de l’économie est à l’origine de la crise actuelle. C’est pourquoi il faut très rapidement réorganiser tous les marchés de gré à gré de produits financiers, de manière qu’ils soient réglementés par l’intermédiaire de chambres de compensation. Grâce à des contreparties, ces dernières limitent en effet les risques systémiques en cas de faillite d’une des parties contractantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais rappeler à notre collègue qu’une proposition de règlement de la Commission européenne, présentée le 15 septembre 2010, prévoit précisément de réintégrer dans des chambres de compensation des contrats standardisés mais actuellement négociés de gré à gré.

De plus, selon ce texte, les transactions sur dérivés devront être déclarées dans des registres centraux de données.

Il s’agit là d’une évolution qui tient compte de certains des éléments que vous avez versés au débat. C’est pourquoi la commission considère que votre amendement n’est pas nécessaire et en souhaite le retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, monsieur le président.

Je précise que le Gouvernement soutient la proposition de règlement que vient d’évoquer M. le rapporteur général. Elle sera examinée par le Conseil et par le Parlement européen au début de l’année 2011.

M. le président. Madame Labarre, l'amendement n° 107 est-il maintenu ?

Mme Marie-Agnès Labarre. Le projet de règlement européen évoqué ne va pas aussi loin que notre amendement. Par conséquent, nous le maintenons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Chapitre Ier

Création d’un conseil de régulation financière et du risque systémique

Articles additionnels avant le chapitre Ier
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Article 1er

Articles additionnels avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 108, présenté par Mme Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer article additionnel ainsi rédigé :

La France promeut au niveau communautaire le principe selon lequel la Banque Centrale Européenne et les banques centrales nationales peuvent souscrire directement aux émissions de dette publique.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Si l’objectif visé par le Gouvernement était vraiment l’instauration d’une régulation bancaire et financière, c’est tout le cadre institutionnel de l’Union européenne qu’il faudrait changer.

En effet, ce cadre institutionnel est aujourd’hui inopérant pour casser les reins à la spéculation contre les États. Si tel était l’objectif de l’Union européenne et de ses États membres, la seule solution serait que la Banque centrale européenne prête directement au pays agressé par la spéculation, à un taux européen de 1 %.

Ce qui a été possible pour les banques il y a un an devrait l’être a fortiori pour un État, qui représente l’intérêt général. Pourtant, ce n’est pas le cas. Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne l’interdit dans son article 123, qui dispose qu’« il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres […] d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union […] ou des États membres ; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite. »

Par conséquent, contrairement à la Réserve fédérale des États-Unis, la BCE ne peut accorder de prêts directement aux États. La spéculation ne peut donc être stoppée rapidement. Au contraire, cette dernière peut utiliser les fonds mis à sa disposition par la BCE ! Un comble !

Vous nous répondrez sans doute qu’il existe, dans le traité, des dispositions pour les cas de crise majeure. Toutefois, elles comportent des conditions restrictives. En effet, il est possible d’y recourir, mais uniquement en cas d’« événements exceptionnels échappant au contrôle de l’État concerné ».

En réalité, la procédure d’aide qui a été mise en place pour la Grèce est celle qui est prévue à l’article 143 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne s’agissant d’une aide exceptionnelle à un État… non membre de la zone euro ! Cette procédure peut prendre la forme « d’une action concertée auprès d’autres organisations internationales, auxquelles les États membres faisant l’objet d’une dérogation peuvent avoir recours » et de l’« octroi de crédits limités de la part d’autres États membres, sous réserve de leur accord ». C’est exactement ce qui s’est passé avec la Grèce : appel au FMI et négociation avec les autres pays membres de l’Union européenne pour obtenir des crédits exceptionnels.

Nous proposons une solution bien plus simple, et surtout plus efficace : faire admettre à l’échelon communautaire que la BCE et les banques centrales nationales puissent souscrire directement aux émissions de dette publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Vera, Mmes Labarre et Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement au plus tard à la fin de l'année 2010 un rapport sur les modalités possibles de constitution d'un secteur public bancaire.

La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Nous prônons depuis plusieurs années – c’était déjà le cas à l’époque de l’élaboration de la loi relative à l’épargne et à la sécurité financière de MM. Fabius et Strauss-Kahn – la reconstitution d’un pôle financier public.

Certains nous objecteront que l’État n’a rien à voir avec la banque et qu’il vaut mieux tirer les conclusions de l’application de la loi bancaire de 1984 et des lois de privatisation, notamment, qui ont d’ailleurs largement démantelé le secteur financier public.

Les mêmes nous parleront aussi du plan de sauvetage du Crédit lyonnais, en oubliant simplement que les sommes que l’État français a mobilisées à l’automne 2008 pour sauver le secteur financier, sous la forme, discutable, de titres supersubordonnés n’ouvrant ni accès au capital ni droit de vote, étaient d’un niveau autrement plus élevé.

Après que vingt ans de libéralisation du secteur financier ont conduit à la crise systémique que l’on a connue et parce que la question de l’accès des PME au crédit n’est toujours pas résolue, il nous paraît nécessaire que le secteur financier s’inspire quelque peu du sens du service public qui anime l’action de l’État dans bien des domaines.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, l’État ne nous semble pas toujours être le plus vertueux ou le plus vigilant des actionnaires ; en tout cas, il n’y a pas de correspondance évidente entre la détention publique du capital et la maîtrise des risques au bilan d’un établissement. La situation très préoccupante des banques semi-publiques outre-Rhin au cours de la crise témoigne de cette vérité d’expérience.

Ces considérations amènent la commission à se déclarer défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le financement de l’économie est aujourd'hui assuré par des institutions privées et par des institutions publiques, telles que la Caisse des dépôts et consignations ou OSEO, par exemple, selon une répartition des rôles parfaitement appropriée.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 100 rectifié, présenté par Mme Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant la fin de l'année 2010, un rapport sur la séparation des activités de banque de dépôt et de banque d'investissement.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Notre amendement a pour objet la séparation, à terme, des activités de banque de dépôt et de banque d’investissement.

J’entends déjà s’exprimer l’indignation de toute l’élite économique et politique devant une telle proposition, qui est pourtant notamment reprise par des personnalités que l’on ne peut guère soupçonner de bolchévisme.

Au Royaume-Uni, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, M. Mervyn King, a, le 20 octobre 2009, jugé « indispensable » à l’économie une nouvelle division entre les activités bancaires pour les particuliers et le négoce spéculatif. Aux États-Unis, M. Paul Volcker, président de la Réserve fédérale de 1979 à 1987 et actuel conseiller du président Barack Obama, s’est fait le chantre du retour à cette séparation des métiers, en s’exprimant en ces termes : « Les banques sont vouées à servir le public, et elles doivent se focaliser sur ces activités. » Ainsi, M. Paul Volcker souhaite une nouvelle régulation selon les critères du Glass-Steagall Act, afin d’éviter toute nouvelle catastrophe bancaire.

En effet, au rebours du modèle de « banque universelle », cette loi, imposée en 1933 par Franklin Roosevelt, établissait une incompatibilité totale entre les métiers de banque de dépôt, de compagnie d’assurances et de banque d’affaires.

Elle interdisait notamment à toute banque de dépôt de posséder une banque d’affaires, d’acheter, de vendre des titres financiers ou d’y souscrire, ce domaine étant exclusivement réservé aux banques d’affaires. À l’inverse, il était interdit aux banques d’affaires d’accepter les dépôts de simples clients.

En bref, si les banques veulent spéculer, il faut que ce soit avec leur argent et non avec celui du citoyen-déposant.

En Europe aussi, l’idée fait son chemin. Ainsi, Jacques Attali, dont on sait que les conseils sont écoutés par M. Sarkozy, estime lui aussi qu’une stricte séparation des activités bancaires est « indispensable ». Pour éviter une nouvelle crise, « il faut que le métier de banquier redevienne triste et ennuyeux », souligne-t-il.

Les partisans d’un nouveau Glass-Steagall Act s’appuient sur l’hypothèse que la crise actuelle est un reflet fidèle de celle de 1929. À l’époque, la spéculation avait conduit des milliers de banques à la faillite.

Aujourd’hui, la situation est identique. La gravité de cette crise tient au fait que les banques de base, dont le rôle est de financer l’économie, ont aussi été affectées.

Pour éviter que l’histoire ne se répète, pour empêcher que les pertes sur les marchés ne contaminent les banques de détail, il est nécessaire de mettre en œuvre une telle séparation.

Isoler les deux métiers serait aussi un moyen de freiner, voire d’empêcher, la création de groupes dits « too big to fail » – trop gros pour sombrer –, dont la faillite menacerait la stabilité financière mondiale. Au plus fort de la tourmente, ces établissements géants, tels que AIG, Citigroup ou la Royal Bank of Scotland, ont eu besoin d’aides colossales de l’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Qu’il soit nécessaire de mieux identifier les métiers, de créer les conditions d’une plus grande transparence et d’un meilleur contrôle prudentiel des banques, cela est tout à fait certain. Pour autant, faut-il le faire selon les catégories des années trente ? Les métiers financiers sont aujourd’hui beaucoup plus complexes et diversifiés. Ainsi, la récente loi américaine ne reprend nullement les catégories du Glass-Steagall Act.

Dans ces conditions, il ne semble pas que le rapport que vous évoquez soit réaliste. La commission émet donc un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Madame le sénateur, j’ai écouté avec beaucoup d’attention vos arguments, mais je ne pense pas que la réponse que vous proposez soit la bonne. Les établissements qui sont véritablement à l’origine de la crise financière que nous traversons sont des banques d’affaires exclusivement. C’est ainsi le cas de Lehman Brothers, de Merrill Lynch et de Bear Stearns.

Par conséquent, établir une séparation entre banques de dépôt traditionnelles et banques d’affaires ne serait pas, de mon point de vue, de nature à nous protéger contre des risques systémiques.

Les pistes évoquées par M. le rapporteur général sont à mon avis les bonnes. Il faut de la transparence, de la supervision, de la régulation. Les banques doivent adapter le montant de leurs capitaux propres au niveau des risques qu’elles prennent, et il convient probablement d’édicter des dispositions particulières pour les activités de trading pour compte propre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 100 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Article additionnel avant l'article 2

Article 1er

I. - La section 2 du chapitre Ier du titre III du livre VI du code monétaire et financier est ainsi rédigée :

« Section 2

« Le conseil de régulation financière et du risque systémique

« Art. L. 631-2. - Le conseil de régulation financière et du risque systémique est composé de huit membres :

« 1° le ministre chargé de l’économie, président ;

« 2° le gouverneur de la Banque de France, président de l’Autorité de contrôle prudentiel, assisté du vice-président de cette autorité ;

« 3° le président de l’Autorité des marchés financiers ;

« 4° le président de l’Autorité des normes comptables ;

« 5° trois personnalités qualifiées, choisies en raison de leurs compétences dans les domaines monétaire, financier ou économique, nommées par le ministre chargé de l’économie pour une durée de cinq ans.

« Les membres mentionnés aux 1° à 4° peuvent se faire représenter.

« Sur convocation de son président, le conseil se réunit au minimum deux fois par an et en tant que de besoin.

« Art. L. 631-2-1. – (non modifié) Sans préjudice des compétences respectives des institutions que ses membres représentent, le conseil de régulation financière et du risque systémique exerce les missions suivantes :

« 1° Il veille à la coopération et à l’échange d’informations entre les institutions que ses membres représentent ;

« 2° Il examine les analyses de la situation du secteur et des marchés financiers et il évalue les risques systémiques qu’ils comportent, compte tenu des avis et recommandations du comité européen du risque systémique ;

« 3° Il facilite la coopération et la synthèse des travaux d’élaboration des normes internationales et européennes applicables au secteur financier et peut émettre tout avis ou prise de position qu’il estime nécessaire.

« Art. L. 631-2-2. - Pour l’accomplissement des missions définies à l’article L. 631-2-1, le conseil de régulation financière et du risque systémique peut entendre des représentants des établissements de crédit, des entreprises d’investissement, des entreprises d’assurance, des mutuelles et des institutions de prévoyance.

« Le conseil de régulation financière et du risque systémique établit un rapport public annuel remis au Parlement. »

II et III. - (Suppressions maintenues)

M. le président. L'amendement n° 54, présenté par M. Vera, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Compléter cet alinéa par les mots :

, qui fait l'objet d'un débat

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. L’article 1er du projet de loi met en place un conseil de régulation financière et du risque systémique, qui établira un rapport public annuel remis au Parlement.

La dernière révision constitutionnelle était censée renforcer les droits du Parlement, notamment en permettant à la représentation nationale de jouer pleinement son rôle en matière de contrôle de l’activité gouvernementale et de l’application des lois.

Dans cet esprit, notre amendement vise à faire du rapport du conseil de régulation financière et du risque systémique un élément ordinaire du débat parlementaire, présentant aux élus de la nation les éléments d’information nécessaires à leur réflexion collective et publique sur les évolutions souhaitables de la loi.

Même si le débat que nous proposons d’instaurer ne déboucherait pas sur un vote, il aurait au moins le mérite de nous maintenir en alerte sur des questions très importantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La mise en œuvre de votre préconisation, mon cher collègue, rendrait encore plus difficile la gestion déjà si complexe de notre ordre du jour ! (Sourires.)

En tout état de cause, le Parlement peut toujours se saisir d’une telle question et prendre l’initiative d’organiser un débat thématique, que ce soit en commission ou en séance plénière.

La commission n’est donc pas favorable à votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Chapitre II

Doter l’Autorité des marchés financiers de pouvoirs renforcés

Article 1er
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Article 2

Article additionnel avant l'article 2

M. le président. L'amendement n° 22 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Barbier, Baylet, Chevènement, de Montesquiou et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Plancade, Vendasi, Vall et Milhau, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la section 1 du chapitre Ier du titre V du livre IV du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 451-1-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 451-1-1 A. - L'information fournie aux investisseurs dans le prospectus distribué par l'Autorité des marchés financiers doit être claire et lisible. Elle précise si le produit n'a pas reçu l'agrément du régulateur. »

La parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. Le code monétaire et financier, dans son livre IV, prévoit un certain nombre de dispositifs légaux tendant à assurer la transparence des marchés.

Il existe notamment des mesures visant à donner diverses informations aux investisseurs et aux opérateurs financiers sur les comptes, les prises de participation et le rachat d’actions. L’AMF, dont le rôle est, entre autres, d’assurer le respect des règles de transparence, a pour mission de publier l’ensemble de ces informations.

Afin d’améliorer l’action de l’AMF dans ce domaine, notre amendement vise à prévoir que l’information fournie aux investisseurs dans les prospectus doive être claire et lisible. Ainsi, si le produit financier n’a pas reçu l’agrément du régulateur, cela devra être précisé.

Il s’agit de garantir la meilleure information possible aux investisseurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le sénateur, votre amendement me semble satisfait. Je vais essayer de vous le démontrer, afin que vous puissiez peut-être le retirer.

Vous demandez que l’information délivrée aux investisseurs soit claire et lisible. Or l’article L. 621-8-1 du code monétaire et financier prévoit que, pour délivrer son visa, l’AMF vérifie « si le document est complet et compréhensible, et si les informations qu’il contient sont cohérentes ».

En outre, l’article L. 412-1 du même code prévoit que le prospectus doit comporter un résumé et que toute information trompeuse ou inexacte engage la responsabilité civile de l’émetteur. Ce dernier est donc tenu de fournir une information qui soit, comme vous le souhaitez, claire et lisible.

M. le président. Monsieur Detcheverry, l'amendement n° 22 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Denis Detcheverry. Non, je le retire, monsieur le président. Je n’ai pas de raison de mettre en doute la parole de Mme la ministre !

M. le président. L'amendement n° 22 rectifié bis est retiré.

Article additionnel avant l'article 2
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Article 2 bis

Article 2

(Non modifié)

L’article L. 421-16 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est insérée la mention : « I. – » ;

2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – En cas de circonstances exceptionnelles menaçant la stabilité du système financier, le président de l’Autorité des marchés financiers ou son représentant peut prendre des dispositions restreignant les conditions de négociation des instruments financiers pour une durée n’excédant pas quinze jours. L’application de ces dispositions peut être prorogée et, le cas échéant, ses modalités peuvent être adaptées par le collège de l’Autorité des marchés financiers pour une durée n’excédant pas trois mois à compter de la décision du président de l’autorité. Au-delà de cette durée, l’application de ces dispositions peut être prorogée par arrêté du ministre chargé de l’économie, pris sur proposition du président de l’Autorité des marchés financiers. Ces décisions sont rendues publiques. »  – (Adopté.)

Article 2
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Article additionnel après l'article 2 bis

Article 2 bis

(Non modifié)

I. – Après le premier alinéa de l’article L. 621-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans l’accomplissement de ses missions, l’Autorité des marchés financiers prend en compte les objectifs de stabilité financière dans l’ensemble de l’Union européenne et de l’Espace économique européen et de mise en œuvre convergente des dispositions nationales et de l’Union européenne en tenant compte des bonnes pratiques et recommandations issues des dispositifs de supervision de l’Union européenne. Elle coopère avec les autorités compétentes des autres États. »

II. – L’avant-dernier alinéa de l’article L. 621-19 du même code est complété par la phrase suivante :

« Ce rapport présente, en particulier, les évolutions du cadre réglementaire de l’Union européenne applicable aux marchés financiers et dresse le bilan de la coopération avec les autorités de régulation de l’Union européenne et des autres États membres. »  – (Adopté.)

Article 2 bis
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Article 2 ter A

Article additionnel après l'article 2 bis

M. le président. L'amendement n° 112, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 621-9 du même code est ainsi modifié :

1° Le 10° du II est complété par les mots : « et en gestion du patrimoine » ;

2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Nul ne peut prétendre au titre de conseiller en gestion de patrimoine s'il ne satisfait aux conditions définies par un décret pris après avis du Conseil d'État. Ce décret arrête notamment :

« 1° La liste des diplômes donnant accès à la profession de conseiller en gestion de patrimoine ;

« 2° Les conditions de validation des acquis de l'expérience et les incompatibilités.

« Quiconque fait usage, sans remplir les conditions exigées pour le porter, d'un titre tendant à créer, dans l'esprit du public, une confusion avec le titre de conseiller en gestion de patrimoine ou conseiller en gestion de patrimoine indépendant et la profession réglementée par la présente loi, est puni des peines encourues pour le délit d'usurpation de titre prévu par l'article 433-17 du code pénal. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à rétablir un article qui avait été adopté par l'Assemblée nationale, afin de prévoir que la profession de conseiller en gestion de patrimoine soit placée sous la surveillance de l'Autorité des marchés financiers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ma chère collègue, nous craignons, comme vous le savez, qu’une telle disposition ne crée, si elle devait être adoptée, une confusion.

En effet, l’expression « conseiller en gestion du patrimoine » est une appellation commerciale. Elle ne désigne pas réellement une profession. Si votre amendement était adopté, les activités des conseillers en gestion de patrimoine n’en seraient pas précisées pour autant, non plus que leurs obligations déontologiques. En outre, la question de savoir si leurs services devraient être régulés par l’AMF ou par l’ACP se pose également.

Nous considérons qu’un professionnel qui revendique l’appellation « conseiller en gestion de patrimoine » peut exercer différents métiers, relever de divers statuts, en fonction des produits qu’il commercialise ou dont il conseille la commercialisation : conseiller en investissements financiers, intermédiaire en assurances, intermédiaire en opérations de banque ou agent immobilier, par exemple. En outre, si le conseiller en gestion de patrimoine recourt au démarchage, il doit respecter le cadre légal afférent à cette activité.

Cette analyse nous a conduits à modifier le texte de l’Assemblée nationale. La commission, dans sa majorité, reste sur cette position.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, monsieur le président.

Je signale que la rédaction actuelle du projet de loi incorpore déjà un certain nombre de modifications visant à une meilleure protection du consommateur de produits financiers.

Par ailleurs, mes services ont effectué, à ma demande, une consultation de place, afin d’étudier de quelle manière il serait possible de parvenir à une certaine harmonisation. Il apparaît que cela serait extrêmement difficile, puisqu’il existe déjà des statuts quasiment codifiés, certains étant même communautaires. Nous allons poursuivre ce travail de réflexion, mais, en l’état actuel des choses, il me paraîtrait tout à fait délicat de parvenir à une telle harmonisation par le biais de la mise en place d’un titre générique de « conseiller en gestion de patrimoine ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2 bis
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Article 2 ter

Article 2 ter A

Le même code est ainsi modifié :

1° Après le 15° du II de l’article L. 621-9, il est inséré un 16° ainsi rédigé :

« 16° Les associations professionnelles de conseillers en investissements financiers agréées mentionnées à l’article L. 541-4. » ;

2° L’article L. 621-9-2 est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Déléguer aux associations de conseillers en investissements financiers mentionnées à l’article L. 541-4 le contrôle de l’activité de leurs membres. Cette délégation fait l’objet d’un protocole d’accord et peut être retirée à tout moment. » ;

3° L’article L. 621-15 est ainsi modifié :

a) Aux a et b du II, la référence : « 15° » est remplacée par la référence : « 16° » ;

b) Aux a et b du III, les références : « 12° et 15° » sont remplacées par les références : « 12°, 15° et 16° ».

M. le président. L'amendement n° 161, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Alinéas 2, 3 et 7

Remplacer la référence :

16°

par la référence :

17°

II. Alinéa 8

Remplacer les mots :

15° et 16°

par les mots :

15° à 17°

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement technique de classification.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 161.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 ter A, modifié.

(L'article 2 ter A est adopté.)

Article 2 ter A
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Article 2 quater

Article 2 ter

(Non modifié)

Au premier alinéa de l’article L. 621-9-1 du même code, après le mot : « financiers », sont insérés les mots : «, ou le secrétaire général adjoint spécialement délégué à cet effet, ». – (Adopté.)

Article 2 ter
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Article additionnel après l'article 2 quater

Article 2 quater

I A (nouveau). – Les deux premières phrases du I de l’article L. 621-3 du même code sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

« Le directeur général du Trésor ou son représentant siège auprès de toutes les formations de l’Autorité des marchés financiers, sans voix délibérative. »

I. – L’article L. 621-15 du même code est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa du I, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Un membre du collège, ayant examiné le rapport d’enquête ou de contrôle et pris part à la décision d’ouverture d’une procédure de sanction, est convoqué à l’audience. Il y assiste sans voix délibérative. Il peut être assisté ou représenté par les services de l’Autorité des marchés financiers. Il peut présenter des observations au soutien des griefs notifiés et proposer une sanction.

« La commission des sanctions peut entendre tout agent des services de l’autorité. » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) Aux a et c, le montant : « 10 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 100 millions d’euros » ;

b) Au b, le montant : « 1,5 million d’euros » est remplacé par le montant : « 15 millions d’euros » ;

bis (nouveau). – Après le IV, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :

« IV bis. – Les séances de la commission des sanctions sont publiques.

« Toutefois, d’office ou sur la demande d’une personne mise en cause, le président de la formation saisie de l’affaire peut interdire au public l’accès de la salle pendant tout ou partie de l’audience dans l’intérêt de l’ordre public, de la sécurité nationale ou lorsque la protection des secrets d’affaires ou de tout autre secret protégé par la loi l’exige. »

3° Le V est ainsi rédigé :

« V. – La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. Toutefois, lorsque la publication risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause, la décision de la commission peut prévoir qu’elle ne sera pas publiée. »

II. – (Non modifié) Après le premier alinéa de l’article L. 621-30 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions prononcées par la commission des sanctions peuvent faire l’objet d’un recours par les personnes sanctionnées et par le président de l’Autorité des marchés financiers, après accord du collège. En cas de recours d’une personne sanctionnée, le président de l’autorité peut, dans les mêmes conditions, former un recours. »  – (Adopté.)

Article 2 quater
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Article 2 quinquies A (Nouveau)

Article additionnel après l'article 2 quater

M. le président. L'amendement n° 23 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Barbier, Baylet, Chevènement, de Montesquiou et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Plancade, Vendasi, Milhau et Vall, est ainsi libellé :

Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du 3° de l'article L. 621-4 du code monétaire et financier est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Aucun membre de l'Autorité des marchés financiers ne peut délibérer dans une affaire s'il a eu lui-même, son conjoint, ses parents ou alliés avec une des parties un lien direct ou indirect susceptible de faire peser une suspicion légitime de partialité. »

La parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. L’article 668 du code de procédure pénale dispose qu’un juge peut être récusé s’il est lié d’une quelconque manière avec une partie au contentieux.

De la même façon, l’article L. 621-4 du code monétaire et financier prévoit qu’« aucun membre de l’Autorité des marchés financiers ne peut délibérer dans une affaire dans laquelle lui-même ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat, a ou a eu un intérêt au cours de la même période. Il ne peut davantage participer à une délibération concernant une affaire dans laquelle lui-même ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat, a représenté une des parties intéressées au cours de la même période. »

Afin d’éviter toute suspicion, notre amendement vise à étendre aux membres de l’AMF l’impossibilité de juger ou d’arbitrer prévue pour les magistrats de l’ordre judiciaire en cas de lien de parenté ou d’alliance, direct ou indirect, avec l’une des parties intéressées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Votre amendement, mon cher collègue, est d’autant plus pertinent qu’il est doublement satisfait par le droit en vigueur.

En premier lieu, l’article L. 621-4 du code monétaire et financier prévoit un dispositif étoffé de prévention des conflits d’intérêts, avec un régime de déclaration et d’interdiction pour le collège de l’AMF comme pour sa commission des sanctions.

En second lieu, l’article L. 621-15, notamment, du même code prévoit un dispositif de récusation des membres de la commission des sanctions. Ce dernier, introduit en 2007, je le rappelle, sur l’initiative de la commission des finances du Sénat, s’inspirait des dispositions en vigueur pour les juridictions civiles et pénales.

En conséquence, je pense que vous pouvez être pleinement rassuré, mon cher collègue, et retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Detcheverry, l’amendement n° 23 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Denis Detcheverry. Une fois de plus, je suis rassuré par les explications qui m’ont été données. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 23 rectifié bis est retiré.

Article additionnel après l'article 2 quater
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Article 2 quinquies

Article 2 quinquies A (nouveau)

Après l’article L. 621-14 du même code, il est inséré une sous-section 4 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 4 bis

« Composition administrative

« Art. L. 621-14-1. – Lorsque le rapport d’enquête ou de contrôle établi par les services de l’Autorité des marchés financiers fait état de manquements commis par une personne mentionnée au II de l’article L. 621-15, à l’article L. 621-17 et au 9° du II de l’article L. 621-9, à l’exception des manquements définis au c) et d) du II de l’article L. 621-15, le collège de l’Autorité peut, en même temps qu’il notifie les griefs dans les conditions prévues à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 621-15, lui adresser une proposition d’entrée en voie de composition administrative.

« Cette proposition suspend le délai fixé au deuxième alinéa de l’article L. 621-15.

« Toute personne à qui il a été proposé d’entrer en voie de composition administrative s’engage, dans le cadre d’un accord arrêté avec le secrétaire général de l’Autorité des marchés financiers, à verser au Trésor public une somme dont le montant maximum est celui de la sanction pécuniaire encourue au titre du III de l’article L. 621-15. L’accord ne vaut pas reconnaissance du bien fondé du ou des griefs qui avaient été notifiés.

« L’accord est soumis au collège puis, s’il est validé par celui-ci, à la commission des sanctions, qui peut décider de l’homologuer. L’accord ainsi homologué est rendu public.

« En l’absence d’accord homologué ou en cas de non-respect de celui-ci, la notification de griefs est transmise à la commission des sanctions qui fait application des dispositions de l’article L. 621-15.

« En aucun cas, les éléments recueillis dans la cadre d’une procédure de composition administrative ne peuvent être invoqués dans le cadre d’une autre procédure.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

M. le président. L'amendement n° 113, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement a déjà été présenté dans le cadre de la discussion générale.

Il s’agit de supprimer la procédure de transaction que la commission des finances a introduite pour l’AMF. En effet, ce n’est pas à l’heure où l’on veut renforcer les pouvoirs de cette instance qu’il faut lui en ôter en instaurant une telle procédure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, si vous m’y autorisez, je m’exprimerai sur cet amendement en présentant l’amendement n° 162 rectifié de la commission, qui traite du même sujet.

M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 162 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, et qui est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

au II de l'article L. 621-15, à l'article L. 621-17 et au 9° du II de l'article L. 621-9, à l'exception des manquements définis aux c) et d) du II de l'article L. 621-15

par les mots :

au 9° du II de l'article L. 621-9, aux a) et b) du II de l'article L. 621-15, à l'exception des personnes mentionnées aux 3°, 5° et 6° du II de l'article L. 621-9, et aux obligations professionnelles mentionnées à l'article L. 621-17

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission estime que la procédure de transaction, si elle est correctement encadrée, peut constituer un facteur de modernisation et de progrès pour le traitement de certains contentieux boursiers. Naturellement, il convient de préciser très explicitement quel champ serait couvert par ce nouveau dispositif. Telle est la raison pour laquelle l’amendement n° 162 rectifié vise à exclure du champ de la procédure de transaction les infrastructures de marché, ainsi que la diffusion de fausses informations, et pas seulement les abus de marché.

Cet amendement tend donc à encadrer encore un peu plus le texte de la commission, dont la majorité des membres souhaite la mise en place, avec toute la prudence nécessaire, de la procédure de transaction. Cela conduit la commission à être défavorable à l’amendement n° 113.

M. le président. L'amendement n° 183, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 6, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

II. - Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

III. - Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions du collège et de la commission des sanctions mentionnées au présent article sont soumises aux voies de recours prévues à l'article L. 621-30.

La parole est à Mme la ministre, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 113 et 162 rectifié.

Mme Christine Lagarde, ministre. L’amendement n° 183 vient compléter, d'une certaine manière, l'amendement n° 162 rectifié présenté à l’instant par M. le rapporteur général.

Nous avions évoqué en commission cette question de la faculté de transaction. J'avais alors fait part de certains doutes et réserves ; la restriction du champ d'application de la procédure exposée par M. le rapporteur général m’apporte un certain nombre d’apaisements. L'amendement du Gouvernement vise, lui aussi, à modifier et à restreindre quelque peu le champ d'application du nouveau dispositif pour le rendre acceptable.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 113 et un avis favorable sur l’amendement n° 162 rectifié, sous réserve de l’adoption de son propre amendement, qui a pour objet d'introduire des modifications au dispositif de composition administrative devant l'AMF adopté par la commission des finances.

En l'état, ce dispositif présente plusieurs difficultés.

Tout d’abord, la dernière phrase du sixième alinéa pourrait donner lieu à des interprétations diverses. Elle pourrait en effet signifier que la personne visée ne reconnaît pas les faits reprochés et ne se considère pas responsable des griefs retenus contre elle. En l'absence de cette reconnaissance des griefs, le contrat de composition administrative pourrait être considéré comme dépourvu de cause juridique.

Dans cette hypothèse, le contrat ne serait tout simplement pas conforme aux principes généraux du droit et risquerait d'être invalidé.

Pour parer à cette difficulté, il est proposé de supprimer la dernière phrase du sixième alinéa. Il reviendra aux parties de prévoir dans quelle mesure elles reconnaissent la validité des griefs.

Le neuvième alinéa de la rédaction adoptée par la commission des finances prévoit que, « en aucun cas, les éléments recueillis dans le cadre d'une procédure de composition administrative ne peuvent être invoqués dans le cadre d'une autre procédure ».

Je propose, au contraire, que ces différents éléments de procédure puissent être utilisés dans le cadre d'une autre procédure. Tel est l’objet de la seconde partie de mon amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 183 ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission n'a pu se réunir pour examiner cet amendement, dont nous venons de prendre connaissance.

Cela étant, je ne crois pas trahir l'esprit de nos délibérations en disant, sous le contrôle de M. le président de la commission des finances, que l'amendement n° 183 vient compléter et renforcer juridiquement la procédure de transaction dont nous avons souhaité la création.

Ainsi, nous aboutissons à un dispositif solide, qui pourra prendre une place raisonnable dans les travaux de l'Autorité des marchés financiers. Il me semble d'ailleurs répondre à des vœux formulés depuis un certain temps déjà, notamment par le président de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers.

La commission, me semble-t-il, peut être favorable à l'amendement n° 183.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 113.

Mme Nicole Bricq. Les amendements de la commission et du Gouvernement prouvent que l'introduction d'une procédure de transaction pour l'AMF est problématique. C'est la raison pour laquelle je ne retire pas notre amendement de suppression de l’article.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 113.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 162 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 quinquies A, modifié.

(L'article 2 quinquies A est adopté.)

Article 2 quinquies A (Nouveau)
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Article additionnel après l'article 2 quinquies (début)

Article 2 quinquies

L’article L. 632-17 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 632-17. – Les infrastructures de marché qui diffusent ou tiennent à la disposition de l’Autorité des marchés financiers ou de l’Autorité de contrôle prudentiel des informations relatives aux transactions sur instruments financiers peuvent communiquer à leurs homologues étrangers ainsi qu’aux autorités homologues de l’Autorité des marchés financiers ou de l’Autorité de contrôle prudentiel les informations nécessaires à l’accomplissement de leurs missions à condition que ces organismes homologues soient eux-mêmes soumis au secret professionnel dans un cadre législatif offrant des garanties équivalentes à celles applicables en France et sous réserve de réciprocité.

« Lorsque ces échanges d’informations interviennent entre les infrastructures de marché et les autorités homologues de l’Autorité des marchés financiers ou de l’Autorité de contrôle prudentiel, ils sont effectués dans les conditions prévues par un accord de coopération mentionné à l’article L. 632-7.

« Dans le cadre de la surveillance des risques encourus par les membres, ces informations peuvent notamment recouvrir les positions prises sur le marché, les dépôts de garantie ou de couverture et leur composition ainsi que les appels de marge.

« Un décret définit les infrastructures de marché soumises aux présentes dispositions. »

M. le président. L'amendement n° 94 rectifié, présenté par M. Bourdin et Mme Procaccia, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

à l'accomplissement de leurs missions

insérer les mots :

, y compris les informations couvertes par le secret professionnel,

La parole est à M. Joël Bourdin.

M. Joël Bourdin. L'article 2 quinquies prévoit que les infrastructures de marché peuvent échanger des informations relatives aux transactions sur instruments financiers. L'amendement vise à préciser que cet échange pourra porter aussi sur des informations couvertes par le secret professionnel, à condition naturellement que les infrastructures de marché en cause soient liées par le secret professionnel dans les mêmes termes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 94 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 quinquies, modifié.

(L'article 2 quinquies est adopté.)

Article 2 quinquies
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Article additionnel après l'article 2 quinquies (interruption de la discussion)

Article additionnel après l'article 2 quinquies

M. le président. L'amendement n° 44 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 2 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 4. Les quotas d'émission de gaz à effet de serre définis à l'article L. 229-15 du code de l'environnement et les autres unités visées au chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Nous revenons ici sur un sujet important, sur lequel le groupe socialiste du Sénat a travaillé au printemps dernier.

Dans notre contribution au groupe de travail sur la fiscalité environnementale conduit par Mme Keller, nous nous étions prononcés en faveur d’une meilleure supervision et régulation du Système communautaire d’échange des quotas d’émission de gaz à effet de serre.

Nous avions proposé la fixation d’un prix plancher d’adjudication, une harmonisation européenne du statut juridique des quotas et la création d’une autorité européenne de supervision et de régulation.

La Commission européenne a adopté, le 14 juillet dernier, un projet de règlement visant à organiser la mise aux enchères de ces quotas. Malheureusement, elle a renoncé à instaurer une plate-forme unique de mise aux enchères, préférant opter pour une plate-forme commune, avec une dérogation possible pour les États qui le souhaitent.

Ce manque d’unité permettra à coup sûr aux nombreux petits génies de la finance et des produits dérivés de passer outre les tentatives de contrôle et de régulation pourtant nécessaires sur ce marché.

Nous souhaitons, bien entendu, que BlueNext puisse participer à l’appel d’offres de la Commission européenne. Pour cela, il était nécessaire d’instituer un marché régulé, ce que prévoit l’article 2 sexies adopté par la commission des finances. Dorénavant, Bluenext devra respecter des principes et des mécanismes de régulation identiques à ceux qui régissent les marchés d’instruments financiers et le marché des quotas sera placé sous la surveillance de l’Autorité des marchés financiers.

Cet article, dont l’adoption par la commission des finances est donc bienvenue, ne nous satisfait cependant qu’en partie, puisque vous avez choisi une nouvelle fois, monsieur le rapporteur général, de rester au milieu du gué, en refusant de proposer une réforme globale et cohérente destinée à clarifier le statut juridique des quotas d’émissions ; nous le regrettons.

Mme la ministre nous a dit par avance qu’une telle réforme était prématurée et qu’il convenait de s’en remettre aux négociations européennes.

Dès lors, une contradiction apparaît : on applique des règles de supervision et de régulation propres aux marchés d’instruments financiers, sans vouloir qualifier les quotas d’instruments financiers. À l’évidence, le statut juridique des quotas doit être harmonisé à l’échelon européen, et nous voulons donner, par cet amendement, un mandat très clair au Gouvernement à cette fin, pour qu’il soit mieux en mesure de défendre une position qu’il peut, je le sais, partager.

Nous proposons donc de préciser le statut juridique des quotas en leur donnant la qualification de titres financiers.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mon penchant naturel serait, ou plutôt était, d’aller dans votre sens, ma chère collègue, et de donner la qualification d'instruments financiers aux quotas d’émission de gaz à effet de serre.

Toutefois, j'ai réfréné ce penchant en lisant l'intéressant rapport de M. Michel Prada sur la régulation des marchés des quotas d’émission de CO2, en particulier l’analyse à la fois technique, concrète et fouillée figurant à la page 72, où il est écrit que « les conséquences juridiques et pratiques d'une requalification des quotas en instruments financiers doivent cependant conduire à exclure cette solution ».

M. Prada explique, notamment, qu’une assimilation des quotas aux instruments financiers imposerait de modifier d'assez nombreuses dispositions existantes de la législation et de la réglementation financières, et que cela mettrait à mal la cohérence d’ensemble de ce bloc juridique. Je n’entrerai pas davantage dans le détail de cette argumentation, mais elle est tout à fait digne d’être prise en considération.

Nous n’avons donc pas voulu qualifier les quotas d’émission de gaz à effet de serre, qui sont des biens d’une nature spécifique, d’un type nouveau en quelque sorte. La doctrine et la jurisprudence nous permettront, dans l’avenir, de mieux cerner leur nature juridique et économique.

Dans le dispositif que nous avons élaboré, nous avons défini un certain nombre de principes, des mécanismes de contrôle et de régulation du marché, de telle sorte que les parties prenantes et le public puissent bénéficier de la transparence et de toutes les garanties qui s’attachent à l’existence et au bon fonctionnement d’un marché organisé.

En l’état actuel des choses, cela nous semble suffisant. C’est la raison pour laquelle, malgré mon penchant initial, je ne peux être favorable à votre amendement, madame Bricq.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Ce débat sur la qualification juridique des quotas d’émission de CO2 est très important. Il va contribuer sinon à éclairer la doctrine, du moins à l’orienter.

L’adoption des amendements proposés par la commission des finances a permis de mieux définir la qualification juridique de ces quotas : on s’oriente vers la catégorie des biens meubles incorporels.

La commission a en outre prévu de les soumettre à un certain nombre de régulations spécifiques, ayant trait, notamment, au rôle de l’Autorité des marchés financiers et à l’application de la directive « abus de marché ».

Ce travail de définition et de qualification des quotas d’émission de gaz à effet de serre constitue véritablement une œuvre juridique qui fera date.

C’est la raison pour laquelle, madame Bricq, j’émets un avis défavorable sur votre proposition, tout en reconnaissant qu’elle a le grand mérite de viser à une meilleure formulation de la qualification de ces quotas. Cela étant, les qualifier d’instruments financiers présenterait l’inconvénient, outre celui qui a été relevé par M. Prada, dont les conclusions sont partagées par l’AMF, par l’ACP et par la CRE, que s’appliqueraient alors de plein droit les règles de publication des prospectus et, surtout, la norme IAS 9 : en l’état actuel de celle-ci, les entreprises détenant de tels éléments d’actif dans leur bilan seraient contraintes de procéder à des réévaluations constantes de ceux-ci, au fur et à mesure de l’évolution de la valeur de marché. Nous sommes nombreux à vouloir revenir sur cette norme, mais, pour l’heure, elle s’applique dans ces termes.

Ne serait-ce que pour ces raisons, il me paraît donc souhaitable d’écarter toute référence à la notion d’instruments financiers, pour se rapprocher de celle, que le texte vise à élaborer, de biens meubles incorporels soumis à des mécanismes de contrôle spécifiques.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 44 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.

Article additionnel après l'article 2 quinquies (début)
Dossier législatif : projet de loi de régulation bancaire et financière
Discussion générale

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Clôture de la session extraordinaire

M. le président. Mes chers collègues, les douze coups de minuit viennent de sonner !

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République portant clôture de la session extraordinaire du Parlement.

En conséquence, il est pris acte de la clôture de la session extraordinaire.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à minuit.)

Le Directeur adjoint

du service du compte rendu intégral,

FRANÇOISE WIART