PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Saisine de commissions sur des projets de nomination
M. le président. Par lettres en date des 6 et 7 septembre 2010, M. le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat, conformément aux articles 8 et 29 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, de bien vouloir saisir les commissions compétentes du Sénat sur les projets de nomination :
- de M. Pierre Veltz aux fonctions de président-directeur général de l’établissement public de Paris-Saclay ;
- et de M. Marc Véron aux fonctions de président du directoire de l’établissement public Société du Grand Paris.
Ces demandes d’auditions ont été transmises à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Acte est donné de ces communications.
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Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure
Suite de la discussion d’un projet de loi
(Texte de la commission)
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour un rappel au règlement.
M. Charles Gautier. Monsieur le président, mon intervention fait suite aux questions d’actualité au Gouvernement.
En effet, à cette occasion, M. le ministre de l’intérieur a une nouvelle fois vanté les mérites du président de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales et, surtout, fait état d’un ouvrage cosigné par cette personnalité et un parlementaire socialiste.
Or, à ma connaissance, un tel ouvrage n’existe pas. Je souhaiterais donc que vous nous donniez des précisions sur ce point, monsieur le ministre, afin que nous puissions régler cette question une bonne fois pour toutes !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, le livre en question s’intitule L’État, la peur et le citoyen. Il a été préfacé par MM. Alain Bauer et Manuel Valls.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Ce n’est qu’une préface !
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Monsieur le ministre, ces deux personnalités ne sont donc pas les auteurs de l’ouvrage ! Il s’agit, de votre part, d’une interprétation abusive, et je vous demande de bien vouloir nous en donner acte.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre. Monsieur le sénateur, je vous procurerai un exemplaire du livre de M. Arpagian. Ainsi, nous pourrons poursuivre ce débat !
M. le président. Acte est donné de ce rappel au règlement.
Dans la discussion des articles du projet de loi, nous en sommes parvenus à l’article 18.
Article 18
Après l’article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 précitée, il est inséré un article 10-2 ainsi rédigé :
« Art. 10-2. – La Commission nationale de la vidéoprotection exerce une mission de conseil et d’évaluation de l’efficacité de la vidéoprotection. Elle émet des recommandations destinées au ministre de l’intérieur en ce qui concerne les caractéristiques techniques, le fonctionnement ou l’emploi des systèmes de vidéoprotection.
« Elle peut être saisie par le ministre de l’intérieur, un député, un sénateur ou une commission départementale de vidéoprotection de toute question relative à la vidéoprotection.
« La Commission nationale de la vidéoprotection est composée :
« 1° De représentants des personnes publiques et privées autorisées à mettre en œuvre un système de vidéoprotection ;
« 2° De représentants des administrations chargées de contrôler les systèmes mis en œuvre ;
« 3° D’un membre de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ;
« 4° De deux députés et de deux sénateurs de manière à assurer une représentation pluraliste ;
« 5° De personnalités qualifiées, dont au moins un magistrat du siège et un magistrat du parquet désignés par le premier président de la Cour de cassation.
« La qualité de membre de la commission est incompatible avec la détention d’un intérêt direct ou indirect dans une entreprise exerçant des activités dans le domaine de la vidéoprotection.
« Un décret en Conseil d’État précise la composition et fixe les modalités de l’organisation et du fonctionnement de la commission. »
M. le président. L’amendement n° 232, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Ma position n’a pas varié depuis nos discussions préparatoires : j’ai toujours souhaité que la Commission nationale de l’informatique et des libertés soit chargée du contrôle en matière de vidéosurveillance, conformément à la recommandation n° 1 du rapport d’information que j’ai cosigné avec M. Courtois.
Ce n’est pas la solution qui a été retenue dans le texte, puisque c’est le préfet qui donnera les autorisations, après avis de la commission départementale de vidéosurveillance. Par la suite, la CNIL aura la possibilité d’effectuer des contrôles.
En conséquence, le rôle de la Commission nationale de la vidéosurveillance, présidée par qui vous savez (Sourires), perd beaucoup de son contenu, puisqu’elle n’interviendra ni en amont ni en aval. Dans ces conditions, à quoi bon donner un statut législatif à cette instance ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. La commission des lois a souhaité un dispositif équilibré, reposant sur trois piliers.
Le premier d’entre eux est la Commission nationale de la vidéoprotection, qui exercera une mission de conseil et d’évaluation. Elle adressera au ministre de l’intérieur des recommandations sur les nouvelles caractéristiques techniques, le fonctionnement ou l’emploi des systèmes de vidéoprotection.
Le deuxième pilier, ce sont les préfets, qui délivreront les autorisations.
Enfin, la CNIL, dont le rôle sera de veiller à ce que toutes les utilisations de la vidéoprotection soient conformes à la loi, est le troisième pilier.
Ces trois piliers sont nécessaires pour assurer l’équilibre du dispositif, monsieur Gautier, et il n’est pas possible d’en supprimer un. C’est pourquoi la commission des lois a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Le Gouvernement émet le même avis que la commission. Il convient de maintenir l’article 18, ne serait-ce que pour garantir par la loi la participation de l’opposition parlementaire aux travaux de la CNV.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 145, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
Commission nationale de la vidéoprotection
par les mots :
commission nationale de l’informatique et des libertés
II. - En conséquence, alinéas 4 à 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Mon intervention vaudra en même temps défense des amendements nos 146 et 147.
Il conviendrait à notre avis que les missions attribuées à la Commission nationale de la vidéosurveillance soient confiées à la CNIL. Au regard des compétences qui lui sont déjà dévolues, toutes articulées autour de la protection des données à caractère personnel, et de son statut d’autorité administrative indépendante, la CNIL nous semble en mesure d’assumer ce rôle.
Par ailleurs, il nous paraît tout à fait inutile de mettre en place une énième autorité administrative indépendante alors que nous nous accordons tous pour dénoncer la prolifération anarchique de ce type d’instances et le flou juridique dans lequel elles évoluent. Je vous renvoie sur ce point au rapport publié en 2006 par M. Gélard.
Du reste, l’adjectif « indépendante » ne siérait guère pour qualifier une instance comme la CNV, puisque celle-ci, outre qu’elle est étroitement liée au ministère de l’intérieur, ne compte que quatre parlementaires en son sein et fera sans doute la part belle à des personnalités qualifiées soigneusement choisies par l’exécutif.
Je le redis, nous sommes fermement, sur le principe, opposés au développement de la vidéosurveillance. En tout état de cause, nous souhaitons que les compétences en question soient exercées par la CNIL, sous le contrôle étroit des parlementaires.
M. le président. L’amendement n° 146, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
et privées
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 147, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer (deux fois) le mot :
deux
par le mot :
six
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement n° 145 étant en fait très proche de celui que vient de défendre M. Charles Gautier, je ferai la même réponse : il est nécessaire de maintenir la CNV pour assurer l’équilibre du dispositif.
L’amendement n° 146 étant un amendement de coordination, nous y sommes forcément opposés.
L’amendement n° 147 vise à porter à douze le nombre de parlementaires au sein de la CNV, ce qui obligerait à augmenter parallèlement l’effectif des personnalités qualifiées. L’instance serait alors trop nombreuse pour pouvoir travailler efficacement.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Madame Assassi, j’émets le même avis que M. le rapporteur, ce qui ne vous surprendra sans doute pas. Je précise que, de par son statut, une autorité administrative indépendante comme la CNIL ne peut se voir confier une mission de conseil du Gouvernement.
M. le président. L’amendement n° 324 rectifié, présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Detcheverry, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Après les mots :
des recommandations
insérer les mots :
qui font l’objet d’une publication
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 323 rectifié.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 323 rectifié, présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Detcheverry, Mme Laborde, MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, et ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Supprimer les mots :
destinées au ministre de l'intérieur
Veuillez poursuivre, madame Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. La rédaction actuelle du projet de loi prévoit que la CNV procède à une évaluation de l’efficacité de la vidéoprotection. Nous sommes tout à fait favorables à une telle disposition.
Pour autant, une mission d’évaluation doit être menée dans la transparence. Dans cette perspective, il nous paraît tout à fait nécessaire que les résultats de l’évaluation en question fassent l’objet d’une publication accessible à tous ceux qui auront à en connaître. Sans cela, l’évaluation perdrait beaucoup de son intérêt.
Tel est le sens de l’amendement n° 324 rectifié.
Par ailleurs, nous avons relevé que, aux termes de l’article 18, la Commission nationale de la vidéoprotection « émet des recommandations destinées au ministre de l’intérieur ». Pour notre part, nous souhaitons que les résultats des réflexions de cette instance soient plus largement accessibles, c’est pourquoi nous proposons, par l’amendement n° 323 rectifié, la suppression de la mention du seul ministre de l’intérieur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement n° 324 rectifié vise à rendre publiques les recommandations faites par la CNV au ministre de l’intérieur. Or ces dernières peuvent être assimilées à un rapport technique et, en tout état de cause, l’article 18 bis A prévoit que la CNIL remettra chaque année un rapport public sur la vidéosurveillance.
L’amendement n° 323 rectifié tend à supprimer l’information du ministre de l’intérieur par la Commission nationale de la vidéoprotection sur les caractéristiques techniques, le fonctionnement et l’emploi des systèmes de vidéoprotection, au motif que le contrôle doit être exercé par une autorité indépendante.
Le rôle de contrôle de la vidéoprotection confié à la CNIL par le texte de la commission est de nature à satisfaire la préoccupation des auteurs de l’amendement. En revanche, il entre bien dans le rôle de la CNV de fournir des informations au ministre de l’intérieur.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Si l’amendement n° 323 rectifié était adopté, la CNV ne pourrait fournir des avis au ministre de l’intérieur, ce qui priverait celui-ci d’éléments de réflexion extrêmement utiles. Je ne peux donc pas vous suivre sur ce point, madame Escoffier, et j’émets un avis défavorable.
Par ailleurs, concernant l’amendement n° 324 rectifié, la Commission nationale de la vidéoprotection n’a pas pour vocation de rédiger un rapport de portée générale sur l’utilisation de la vidéoprotection. D’autres rapports publics sont déjà prévus en la matière, notamment le rapport annuel sur l’activité des commissions départementales de la vidéoprotection, que le Gouvernement remet à la CNIL, ainsi que le rapport figurant au nouvel article 18 bis A, que la CNIL remettra chaque année au ministre de l’intérieur et à la CNV. L’avis est également défavorable.
M. le président. L'amendement n° 46, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elle peut également se saisir d'office de toute difficulté tenant au fonctionnement d'un système de vidéoprotection ou de toute situation susceptible de constituer un manquement.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Alors même que la Commission nationale de la vidéoprotection assure une mission générale de contrôle, l’exercice de ses prérogatives est conditionné par une saisine émanant du ministre de l’intérieur, d’un parlementaire ou d’une commission départementale de vidéoprotection. Contrairement aux commissions départementales, elle ne peut se saisir d’office d’une situation pouvant constituer un manquement.
À cet égard, il y a une contradiction frappante dans la rédaction du texte de cet article : d’un côté, il est précisé que la Commission nationale de la vidéoprotection peut exercer à tout moment sa mission de contrôle ; de l’autre, la faculté de saisine est réservée au ministre de l’intérieur, à un parlementaire ou à une commission départementale de vidéoprotection.
Par cet amendement, nous souhaitons donc corriger cette incohérence en offrant la faculté à la Commission nationale de la vidéoprotection de s’autosaisir lorsqu’elle constate un dysfonctionnement pour lequel elle n’aurait pas été saisie par l’une des autorités compétentes pour le faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à instaurer un pouvoir d’autosaisine de la Commission nationale de la vidéoprotection. Cette possibilité, non prévue par le texte initial, semble opportune.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. L’amendement proposé ne présente pas d’obstacle majeur, même si sa rédaction n’est pas d’une limpidité absolue.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.
(L'article 18 est adopté.)
Article 18 bis A (nouveau)
La Commission nationale de l’informatique et des libertés remet chaque année à la Commission nationale de la vidéoprotection et au ministre chargé de la sécurité un rapport public rendant compte de son activité de contrôle des systèmes de vidéoprotection et comprenant des recommandations pour remédier aux manquements qu’elle a constatés.
M. le président. L'amendement n° 148, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
à la Commission nationale de la vidéoprotection
par les mots :
au Parlement
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à ce que la CNIL remette au Parlement, et non à la Commission nationale de la vidéoprotection, le rapport annuel faisant le bilan de son activité de contrôle en matière de vidéoprotection.
Le nombre de rapports remis au Parlement ayant tendance à augmenter fortement, il semble préférable que le rapport concerné soit remis à une autorité spécifiquement chargée de la vidéoprotection. En tout état de cause, ce rapport est public.
En outre, la CNIL peut évoquer la vidéoprotection dans son rapport annuel au Parlement.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 18 bis A.
(L'article 18 bis A est adopté.)
Article additionnel après l'article 18 bis A
M. le président. L'amendement n° 48, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 18 bis A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La Commission nationale de vidéoprotection remet chaque année au Parlement un rapport public rendant compte de son activité de conseil et d'évaluation de l'efficacité de la vidéoprotection et comprenant les recommandations destinées au ministre de l'intérieur en ce qui concerne les caractéristiques techniques, le fonctionnement ou l'emploi des systèmes de vidéoprotection. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. La Commission nationale de la vidéoprotection, placée sous la responsabilité du ministre de l’intérieur, sera amenée à exercer un certain nombre de pouvoirs. Si ses missions principales consistent à fournir des conseils et à évaluer l’efficacité de la vidéosurveillance – à cet égard, reconnaissez qu’il nous manque des éléments –, il faut admettre que ses pouvoirs sont très restreints.
L’opacité de fonctionnement dans laquelle le projet de loi souhaite plonger la Commission nationale de la vidéoprotection est regrettable : aucun de ses travaux, aucune de ses recommandations, aucun de ses avis ne sera publié ou communiqué au Parlement. Or nous avons besoin de mieux connaître la vidéoprotection pour légiférer : quelle est son utilité ? Quel est son coût ? Ces questions sont importantes.
Nous devons en finir avec cette opacité en rendant publics les travaux de cette commission. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à ce que la CNV remette chaque année un rapport au Parlement sur ses missions de conseil et d’évaluation. Cela nous permettra de mieux connaître la manière dont elle exerce ses prérogatives.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Comme je l’ai déjà indiqué lors de l’examen de l’amendement n° 148, le rapport de la CNV sera remis à la CNIL, laquelle pourra l’évoquer dans son rapport public. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir la remise d’un autre rapport au Parlement.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. La tendance n’est pas d’ajouter des rapports aux rapports.
Cela étant, n’oubliez pas que des parlementaires de toutes tendances siégeront au sein de cette commission. C’est un gage de transparence.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 18 bis
I. – Le I de l’article L. 282-8 du code de l’aviation civile est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Ces fouilles et visites peuvent être réalisées, avec le consentement de la personne, au moyen d’un dispositif d’imagerie utilisant des ondes millimétriques dans les conditions visées à l’alinéa précédent. En cas de refus, la personne sera soumise à un autre dispositif de contrôle.
« L’analyse des images visualisées est effectuée par des opérateurs ne connaissant pas l’identité de la personne et ne pouvant visualiser simultanément celle-ci et son image produite par le scanner corporel. Aucun stockage ou enregistrement des images n’est autorisé.
« Un décret en Conseil d’État détermine les aéroports et destinations pour lesquels le recours au contrôle par dispositif d’imagerie utilisant les ondes millimétriques est autorisé. » ;
2° Au troisième alinéa, le mot : « précédent » est remplacé par le mot : « deuxième ».
II. – Les troisième à cinquième alinéas du même article L. 282-8 sont applicables durant une période de trois années à compter de la promulgation de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 47, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement de suppression traduit notre refus de la généralisation du scanner corporel tant qu’une étude d’impact précise et exhaustive ne sera pas publiée garantissant l’innocuité d’un tel dispositif non seulement sur la vie privée, mais également sur la santé des personnes qui y seront soumises.
En effet, le scanner corporel pose une série de problèmes au regard du respect des libertés individuelles et de la santé.
Tout d’abord, ce procédé porte atteinte au principe du respect de la vie privée et de l’intimité. En privilégiant une représentation réelle, au lieu d’une représentation schématique des corps, le scanner corporel constitue une atteinte potentielle à l’intimité des personnes contrôlées et peut constituer un procédé dégradant de mise à nue virtuelle, puisque leur morphologie complète pourra être observée.
Le consentement des personnes ne saurait constituer un motif suffisant pour valider la généralisation de tels procédés. Vous connaissez comme moi la jurisprudence du Conseil d’État sur l’indisponibilité du principe de la dignité humaine : il trouve ici à s’appliquer.
Ensuite, de sérieuses réserves peuvent être formulées quant à la non-dangerosité des ondes émises lors des contrôles. Or aucune étude d’impact n’a été effectuée concernant l’innocuité pour la santé des personnes de dispositifs recourant aux rayons X dans un contexte non médical. Je songe en particulier aux femmes enceintes.
Enfin, j’ajoute que le Gouvernement a complètement court-circuité le travail législatif en autorisant, sans débat et sans concertation, l’installation de scanners corporels à Roissy. Une telle méthode est intolérable dans un domaine aussi sensible que celui de la protection des libertés individuelles.
Au nom du respect du principe de précaution et de celui de l’intimité des personnes, nous nous opposons à une pérennisation du dispositif des scanners corporels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article autorisant l’utilisation dans les aéroports des scanners corporels.
Or la commission des lois a renforcé les garanties associées à l’utilisation de ces équipements utiles, conformément, notamment, aux préconisations de la CNIL. Ainsi l’article prévoit-il désormais expressément que les opérateurs ne pourront visualiser simultanément la personne et son image au scanner.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Madame Boumediene-Thiery, merci, trois fois merci, car vous nous donnez l’occasion de rappeler que nous n’avons décidément pas les mêmes conceptions.
Si je suis à la lettre vos explications, il n’aurait rien fallu faire après la tentative d’attentat du 25 décembre dernier…