Sommaire
Présidence de M. Bernard Frimat
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Noël Guérini.
2. Mises au point au sujet de votes
MM. Jean-Jacques Jégou, Jacques Gautier, le président.
MM. Jean-Pierre Michel, le président.
4. Candidature à un organisme extraparlementaire
5. Règlement des comptes pour l’année 2009. – Discussion d'un projet de loi
Discussion générale : MM. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
MM. Bernard Angels, François Fortassin.
Suspension et reprise de la séance
6. Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
7. Règlement des comptes pour l’année 2009 – Suite de la discussion et adoption définitive d'un projet de loi
Discussion générale (suite) : MM. Thierry Foucaud, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Jean-Jacques Jégou, Charles Guené.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.
Clôture de la discussion générale.
Adoption définitive, par scrutin public, de l’ensemble du projet de loi.
M. le ministre.
Suspension et reprise de la séance
8. Souhaits de bienvenue à M. Leonel Fernandez Reyna, Président de la République dominicaine
9. Orientations des finances publiques pour 2011. – Débat sur une déclaration du Gouvernement
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État ; Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales.
MM. Yvon Collin, Thierry Foucaud, Mme Nicole Bricq.
10. Demande de retour à la procédure normale pour l’examen d’un projet de loi
11. Orientations des finances publiques pour 2011. – Suite d'un débat sur une déclaration du Gouvernement
MM. Gérard Longuet, Jean-Pierre Fourcade, Guy Fischer, Mme Raymonde Le Texier, MM. Philippe Dominati, André Dulait.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État ; Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Approbation, par scrutin public, de la déclaration du Gouvernement.
12. Communication relative à des commissions mixtes paritaires
13. Modification de l'ordre du jour
14. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Bernard Frimat
vice-président
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux,
M. Jean-Noël Guérini.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Mises au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le président, je souhaite faire une mise au point au sujet d’un vote.
Une erreur matérielle a conduit à considérer que, cette nuit, je n’avais pas participé au vote sur l’ensemble du projet de loi de réforme des collectivités territoriales alors que je souhaitais m’abstenir.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Je souhaite à mon tour faire une mise au point au sujet d’un vote.
Lors du vote par scrutin public n° 259 sur l’ensemble du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, M. Louis Pinton a été déclaré comme votant pour, alors qu’il souhaitait s’abstenir.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
3
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Michel. Mon intervention se fonde sur les articles 2 et 3 du règlement du Sénat.
Hier, M. le Premier ministre – peu importe dans quelles circonstances, mais en tout cas devant les caméras de télévisions, conviées à cet effet – a fait une déclaration solennelle sur la situation politique actuelle qui, il faut le dire, est très délicate pour l’exécutif en raison notamment de son refus obstiné de dire la vérité et de reconnaître au moins l’existence de conflits d’intérêt.
J’espère que la justice fera la lumière sur cette affaire et qu’un juge d’instruction sera rapidement saisi, dans un tribunal autre que celui de Nanterre, seule condition pour qu’une justice sereine passe.
M. le Premier ministre était entouré des présidents des deux assemblées, et donc du président du Sénat, M. Gérard Larcher.
Je considère qu’il s’agit là d’une faute politique grave et je demande donc que le Bureau soit saisi de mon rappel au règlement. En effet, dès l’instant où il a été élu, certes par une majorité et non à l’unanimité des sénateurs, le président du Sénat est devenu le représentant de l’ensemble de l’institution. S’est-il rendu compte que, hier, il ne représentait que celles et ceux qui avaient voté pour lui – et encore… –, et que nos concitoyens assistaient sur leur écran à une regrettable confusion des genres ?
Plus grave encore, alors que notre système politique repose depuis Montesquieu sur la séparation des pouvoirs, en cette circonstance éminemment politique, et même politicienne, le pouvoir législatif n’aurait pas dû apparaître publiquement aux côtés du pouvoir exécutif, faisant corps avec lui, comme si le fait majoritaire était de nature constitutionnelle et prévalait sur la séparation des pouvoirs.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue. Il sera transmis au président du Sénat, qui aura l’occasion d’évoquer cette question lors de la réunion du Bureau le mardi 13 juillet.
4
Candidature à un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein de la Commission consultative des archives audiovisuelles de la justice.
La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a fait connaître qu’elle propose la candidature de M. Jean-Pierre Michel pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.
Cette candidature a été affichée. Elle sera ratifiée conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.
5
Règlement des comptes pour l’année 2009
Discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009 (projet de loi n° 585, rapport n° 587).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons vécu en 2009 la transmission de la crise financière à l’économie réelle. Le Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, a réagi avec rapidité et détermination pour relancer l’activité, en associant une aide à l’investissement et au financement des entreprises à des mesures de soutien spécifiques pour les ménages les plus modestes.
Cette action ciblée, précise et calibrée, a été déterminante. Les économistes, qu’il s’agisse de la Commission européenne, de l’Organisation de coopération et de développement économiques ou du Fonds monétaire international, ont d’ailleurs fait l’éloge du plan français, dont ils ont reconnu la qualité et l’efficacité.
Il était inévitable toutefois, et nous l’assumons entièrement, que la crise et la relance se reflètent dans le résultat de l’exécution du budget de l’État pour 2009, que je vous expose aujourd’hui en vous présentant le projet de loi de règlement pour 2009.
Au-delà des chiffres, je tiens à souligner que, malgré la crise, le Gouvernement a maintenu le cap de la maîtrise de la dépense publique. Il a respecté la norme des dépenses de l’État, il a poursuivi la révision générale des politiques publiques, la RGPP, notamment le « 1 sur 2 », et travaillé avec succès à réduire le nombre des réserves de la Cour des comptes dans sa certification des comptes de l’État.
Cet engagement et cette détermination n’ont d’ailleurs pas faibli. Nous avons tenu à les réaffirmer dans les orientations des finances publiques pour les trois années à venir, que j’aurai l’honneur de vous présenter cet après-midi dans ce même hémicycle.
Par ailleurs, je tiens à souligner que l’information du Parlement par le Gouvernement a été améliorée puisque les rapports annuels de performance, les RAP, ont été complétés.
L’exécution des trois programmes qui constituent la mission « Plan de relance de l’économie » relève d’une partie spécifique. En parallèle, tous les rapports annuels de performance identifient les dépenses de relance réalisées depuis les différents budgets ministériels.
Le premier point de mon intervention portera sur la certification des comptes de l’État, élément important dans le contexte singulier, agité et tourmenté, que nous traversons. La certification des comptes est la preuve des progrès accomplis en termes de transparence et de sincérité des comptes. Elle est évidemment regardée par l’ensemble des acteurs économiques.
Pour le quatrième exercice de certification, le Gouvernement a choisi de s’exprimer directement sur ses comptes, une fois qu’ils ont été rendus publics. C’est ainsi que cela se passe pour les entreprises privées, et c’est ainsi que, désormais, cela se passe pour l’État.
Je rappelle que la France compte parmi les rares pays dont les comptes sont certifiés par un auditeur extérieur, tels le Canada, la Nouvelle Zélande et l’Australie. Cela signifie que les comptes présentés ne souffrent évidemment aucune contestation.
Je me félicite que les comptes de l’année 2009 aient été certifiés par la Cour avec neuf réserves au lieu de douze l’année dernière. C’est une garantie de transparence donnée au Parlement et à nos concitoyens sur la santé financière de l’État. C’est aussi un élément positif dans le climat financier international actuel. C’est enfin, je tiens à le souligner, le résultat d’un travail important mené par l’administration, qui a su nouer un dialogue fructueux avec la Cour des comptes.
Permettez-moi de revenir sur la première des réserves de la Cour, qui porte sur les outils de gestion de la dépense et de la production des comptes.
Pour répondre à cette réserve, l’État, comme vous le savez, a engagé le programme Chorus. Il s’agit d’un projet important de transformation de la fonction financière de l’État. Il a pour but de doter l’État d’un système d’information financière, budgétaire et comptable permettant de mettre en œuvre la LOLF, sans réserves.
En janvier dernier, ce nouvel outil a été déployé auprès de 12 000 agents répartis dans plusieurs ministères. Depuis le mois de juin, Chorus a permis de payer environ 20 milliards d’euros de dépenses. Cependant, nous constatons des retards d’exécution par rapport à l’année dernière. Pour y remédier, un plan d’action est engagé. J’ai demandé que tous les retards soient rattrapés d’ici à la fin de l’été.
Par ailleurs, j’ai demandé que l’estimation du coût du projet soit actualisée et qu’elle soit communiquée à l’occasion du prochain projet de loi de finances, à l’automne prochain. Contrairement à ce que j’ai pu entendre, il n’y a pas, à ce stade, de dérive. En revanche, une correction doit être proposée.
Le calendrier de l’exécution et du paiement des dépenses sera respecté. Le déploiement dans l’ensemble des ministères doit être terminé le 1er janvier 2011, comme prévu. Quant à la tenue des comptes, elle interviendra en 2012, comme le Premier ministre l’a indiqué à la Cour des comptes dans le courrier qu’il lui a adressé voilà deux mois.
Le deuxième point de mon intervention portera sur la dégradation du déficit. J’insiste sur le fait qu’il n’y a pas de dégradation structurelle du déficit en 2009. La dégradation des déficits qui est visible dans les comptes de l’Etat est en effet, pour une très large part, liée à la crise.
Les comptes de l’Etat pour 2009 traduisent de façon prévisible les effets de la crise économique. Ils reflètent aussi notre engagement pour soutenir la croissance.
Le résultat budgétaire montre pour 2009 un déficit de 138 milliards d’euros, soit une dégradation de plus de 80 milliards d’euros par rapport à l’année dernière. Il s’agit d’une légère amélioration, d’environ 3 milliards d’euros, par rapport à ce qui était prévu dans la dernière loi de finances rectificative pour 2009. Cette amélioration s’explique par le décalage de certaines dépenses, ainsi que par une légère augmentation des recettes fiscales constatées par rapport au résultat prévisionnel.
Mais la tendance générale de l’année 2009 ne s’en trouve pas pour autant modifiée. Elle se caractérise par une baisse sans précédent des recettes fiscales. Je rappelle à la Haute Assemblée qu’il y a eu une chute de 60 % des recettes liées à l’impôt sur les sociétés, une chute de plus de 30 % des recettes liées aux droits de mutation, consécutive à la baisse du marché de l’immobilier. La TVA s’est également effondrée, preuve du ralentissement de la consommation.
Néanmoins, nous n’avons pas dévié de notre objectif en matière de dépenses ordinaires de l’État. La norme de dépenses a été respectée, hors plan de relance, malgré la situation très difficile liée à la crise, preuve, s’il en fallait une, que notre volonté de contrôler les dépenses est intacte.
Au-delà, nous avons voulu clarifier les relations entre l’État et la sécurité sociale. Pour ce faire, nous avons réalisé un apurement exceptionnel des dettes anciennes de l’État à l’égard des organismes sociaux, pour près de 3 milliards d’euros.
Le résultat comptable montre un déficit de 97,7 milliards d’euros, qui témoigne de l’effort de l’État en matière d’investissements.
Ce déficit reflète lui aussi, de façon prévisible, les conséquences de la crise sur les recettes – une perte de 35 milliards d’euros, que l’État a acceptée – et sur les dépenses, notamment les transferts opérés vers les ménages, les entreprises et les collectivités pour 13 milliards d’euros. Mais le résultat comptable est moins dégradé que le déficit budgétaire d’environ 40 milliards d’euros.
La raison en est que l’effort de l’État face à la crise s’est concrétisé, pour une très large part, par des investissements et par des opérations financières comme des prêts automobiles ou le fonds stratégique d’investissement. Ces investissements constituent à proprement parler la colonne vertébrale de notre plan de relance.
Ces dépenses entraînent, à terme, un enrichissement de l’actif de l’État. Elles n’ont donc pas d’impact sur le résultat comptable, alors que les décaissements correspondants ont une conséquence sur le résultat budgétaire.
Le troisième point de mon intervention portera sur les résultats de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui ont fait l’objet d’une analyse spécifique.
Nous avons créé une annexe spécifique consacrée au bilan de la RGPP afin de répondre à la demande du Parlement en la matière. Nous allons là encore dans le sens d’un renforcement de la transmission des informations, afin que le Parlement soit pleinement informé, avec le même niveau de précision que le Gouvernement et en temps réel. Seules les mesures entièrement achevées en 2009 font l’objet d’une présentation complète. Au total, cinquante-huit mesures vous sont présentées, soit 15 % d’entre elles.
Parmi ces mesures, la réduction des effectifs de l’État est évaluée à 24 592 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, en 2009. Ce résultat est inférieur de 2 878 ETPT au schéma d’emploi prévu en loi de finances initiale. Je vous rappelle que, en 2008, les suppressions d’effectifs avaient été supérieures de 5 300 ETPT aux prévisions de la loi de finances initiale. Par conséquent, sur deux ans, nous avons dépassé nos objectifs de 2 400 ETPT.
Je précise que la plupart des mesures de la RGPP s’étendent sur plusieurs années et généreront progressivement des économies. C’est la raison pour laquelle elles ne figurent pas dans le rapport.
Le rapport rappelle toutefois les principales économies d’ores et déjà réalisées grâce à la RGPP. Vous pouvez ainsi constater que nous avons réalisé en loi de finances initiale pour 2010 près d’un milliard d’euros d’économies sur les politiques d’intervention et environ cinq cents millions d’euros sur les dépenses de fonctionnement. Ce dernier résultat témoigne des premiers effets de la réduction en cours des fonctions support de l’État, comme, par exemple, la rationalisation de la politique des achats de l’État. À cela s’ajoutent les économies liées à la réduction du nombre d’emplois, que l’on peut estimer à environ 800 millions d’euros.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les sénateurs, tels sont les points que je souhaitais vous présenter. Le détail de l’ensemble des comptes se trouve dans les documents budgétaires.
Notre économie est aujourd’hui en convalescence. Cependant, certaines menaces récentes ont récemment pesé sur les pays de la zone euro dont les finances publiques étaient déséquilibrées. C’est pourquoi les exigences qui s’imposent à nous aujourd’hui sont tout aussi impérieuses qu’en 2009, bien que distinctes.
En 2009, l’État a agi de façon responsable pour limiter l’impact de la crise sur notre pays. Dès 2011, il devra faire preuve de responsabilité afin de réduire son déficit en maîtrisant non seulement ses dépenses, mais aussi l’ensemble des sources de dépenses publiques, tout en prenant soin d’accompagner la reprise de l’activité. Ce sera l’objet de mon propos de cet après-midi, lors du débat d’orientation des finances publiques. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons aujourd’hui, tout en tirant les conséquences de la gestion de l’année 2009, nous tourner vers l’avenir grâce au débat sur l’orientation des finances publiques qui nous occupera cet après-midi. Cela nous permettra assurément de réaliser une heureuse synthèse des enjeux essentiels auxquels nous sommes confrontés.
La commission des finances, comme chaque année, prend très au sérieux la loi de règlement. Je rappelle d’ailleurs que nous avons ajouté à son intitulé la mention « rapport de gestion » pour l’année écoulée, soit 2009.
Dans le cadre de ce rapport de gestion, nous avons procédé à l’audition de dix ministres et reçu par deux fois le Premier président de la Cour des comptes. Nous avons interrogé les ministres non seulement sur l’efficacité de leur gestion, en conformité avec les principes de la LOLF, mais également sur leur capacité à adapter les structures et les missions de leurs administrations et à faire face à la nécessaire discipline des finances publiques.
De ce point de vue, monsieur le ministre, je pense que nous avons fait tout notre possible pour appuyer vos efforts. Souvent d’ailleurs, au sein de notre système de gouvernement et d’administration, le ministre du budget me paraît trop seul.
M. François Fortassin. La solitude est l’apanage de cette fonction !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut en tout cas qu’il sache que la commission des finances du Sénat est à ses côtés dans ce travail de vérité qui est nécessairement le sien, comme il est le nôtre. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Voilà qui lui mettra du baume au cœur ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans ce cadre, il est possible que certains outils fassent encore défaut. Certes, il existe une loi de règlement portant sur la gestion passée, qui clôt l’exécution financière du budget de l’État. Mais jusqu’alors, aucune loi de règlement ne porte sur les engagements pris au titre du programme de stabilité. J’anticipe ici quelque peu sur le contenu de nos débats de cet après-midi.
D’ailleurs, il conviendra de résoudre certaines difficultés techniques pour comparer de façon plus directe et plus simple l’exécution budgétaire aux prévisions initiales. Trop souvent, on persiste à comparer des prévisions à des prévisions, des exécutions à des exécutions, alors que la vérité ne peut être approchée, qu’il s’agisse d’une année ou de plusieurs, qu’en rapprochant une exécution d’une prévision ! La direction du budget le sait pertinemment lorsqu’elle travaille avec les ministères dépensiers. Mais, vis-à-vis de la représentation nationale, l’État devrait s’astreindre de façon bien plus rigoureuse à cette discipline, en particulier lorsqu’il s’agit d’engagements pluriannuels.
Chacun connaît le contexte macroéconomique de l’année 2009, marqué en France par une récession de 2,6 %. Cela est sensiblement plus faible que pour la plupart des pays de la zone euro, pour n’évoquer qu’eux ; c’est néanmoins la plus profonde récession enregistrée depuis la Seconde Guerre mondiale. En 2009, le chômage a hélas ! dépassé le seuil des 10 %.
L’un des sujets qui nous mobiliseront bientôt est l’évaluation a posteriori de l’impact du plan de relance. Une quarantaine de milliards d’euros ont ainsi été dépensés, créant des effets d’entraînement sur les investissements publics, assurant le maintien de la solvabilité de nombreuses entreprises, limitant leurs défaillances, même si celles-ci demeurent trop nombreuses. En comparaison avec bien des pays européens, la France a soutenu utilement et au bon moment la trésorerie de ces entreprises, allant jusqu’à leur accorder, en 2010, une réforme extrêmement généreuse de la taxe professionnelle, qui s’est traduite par un abondement de leur trésorerie globale de 12 milliards d’euros.
Le déficit des administrations publiques est évalué par l’INSEE à 7,5 % du produit intérieur brut. Si l’on observe la ventilation par sous-ensembles, le besoin de financement de l’État a plus que doublé en une année. Il convient de garder cela en mémoire. Le besoin de financement des administrations sociales, jusqu’alors quasi inexistant et inférieur à un milliard d’euros, atteint désormais 24 milliards d’euros.
Il n’existe qu’une seule amélioration, que personne n’a réellement commentée, relative au besoin de financement des collectivités territoriales.
M. François Marc. C’est exact !
Mme Nicole Bricq. Mais nous l’avions remarqué !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ces pelées, ces galeuses qui font tant déraper la dépense ! Ce besoin de financement est passé de 8,7 milliards d’euros à 5,6 milliards d’euros. Reconnaissons qu’il ne s’agit pas là des conséquences d’un comportement vertueux. La Cour des comptes explique cela par un effet de trésorerie rendu possible par le plan de relance et l’anticipation des versements du fonds de compensation pour la TVA.
Notre situation budgétaire est donc caractérisée par un déficit sans précédent de 138 milliards d’euros. Autrement dit, le montant des recettes nettes du budget général n’a représenté en 2009 que 56 % des dépenses nettes, contre 80 % en 2008, année qui est pourtant loin d’être exemplaire en matière d’équilibre budgétaire. Le taux de couverture a donc diminué en 2009, passant de 80 % à 56 %.
Cela est imputable à l’effondrement des recettes, nous le savons. Mais comment expliquer cet effondrement ? Il est dû pour moitié à la conjoncture, pour 15 % à des mesures nouvelles, dont la baisse du taux de TVA dans le secteur de la restauration, et pour 35 % aux mesures fiscales du plan de relance. Ces dernières, monsieur le ministre, se sont révélées bien plus coûteuses que prévu !
Le coût définitif des mesures fiscales du plan de relance pour 2009 s’établit à 16,7 milliards d’euros, alors que la prévision fournie lors du vote de ce plan était de 10,3 milliards d’euros. Tant mieux pour la trésorerie des entreprises ! Mais il y a certainement des progrès à faire en matière de qualité de la prévision !
Au demeurant, nous savons aussi que l’année 2009 est caractérisée par une croissance de la dépense fiscale de près de 5 milliards d’euros par rapport à 2008.
M. François Marc. Mais pour qui ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais pour tout le monde, cher collègue ! Pour toutes les corporations et catégories d’activités qui ne cessent de vous solliciter, vous comme nous, et que vous défendez au quotidien, de même que nous ! Ce système ne fera qu’accroître la pression de la dépense fiscale, jusqu’au jour où, par vertu ou par nécessité, nous aurons le courage d’en sortir ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Voilà pour ce qui est des recettes. Qu’en est-il désormais des dépenses ? La dépense de l’État, d’exécution à exécution, progresse de 0,3 % en volume. On peut donc considérer que l’État est un peu au-dessus de la norme qu’il s’est fixé, mais que cette rubrique est dans l’ensemble tenue. Je regrette toutefois que les économies réalisées et constatées, soit 5 milliards de charges financières en moins, malgré un endettement qui a continué de déraper à vive allure, n’aient pas été consacrées à l’amortissement de la dette. Elles ont en effet été intégralement recyclées en nouvelles dépenses !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est exact !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous le comprenons fort bien, compte tenu de l’existence de sous-budgétisations, d’ailleurs signalées par notre commission. Au demeurant, les sous-budgétisations étaient plus nombreuses dans les budgets précédents qu’en 2009. Nous avons souvent eu ce débat avec votre prédécesseur, M. Éric Woerth.
En ce qui concerne l’utilisation de ces marges, nous pouvons comprendre et approuver que l’État ait préféré assainir sa situation financière à l’égard de la sécurité sociale. Il serait possible, monsieur le ministre, de faire encore mieux en matière de mise en œuvre de la loi de programmation des finances publiques – c’est une litote – notamment en utilisant davantage, pour piloter la dépense, les indicateurs de performance, sur lesquels nous reviendrons peut-être cet après-midi.
C’est là une remarque que je souhaitais faire. Nous avons consacré beaucoup de temps, d’argent et de réflexions à s’adapter à la présentation budgétaire par missions et programmes et à expliquer à l’ensemble des responsables que leurs actions devaient être mesurables à travers des indicateurs. Quand on examine en détail les documents budgétaires, ces indicateurs ne sont pas toujours renseignés comme ils devraient l’être. Ils ne sont pas suffisamment pris au sérieux.
Même dans le cas où ces indicateurs de performance sont correctement établis, qu’en faisons-nous ? Ne pourraient-ils pas constituer plutôt un guide, afin que la toise soit plus restrictive ou plus généreuse, si tant est qu’une toise puisse être « généreuse » (Sourires.), en fonction de la qualité obtenue, c'est-à-dire de l’atteinte des objectifs fixés par ces indicateurs dans le pilotage budgétaire et dans l’arbitrage des crédits ? Ce sont sans doute des éléments qu’il faudrait valoriser, ce qui conduirait à les prendre plus au sérieux.
Toujours au titre des dépenses, je relève que les dépenses de fonction publique continuent de progresser malgré les baisses d’effectifs. Celles-ci sont importantes, mais elles sont contrebalancées, et bien au-delà, par les effets structurels, par la progression des rémunérations. Alors qu’on économise 800 millions d’euros grâce à la diminution du total des équivalents temps plein travaillé en 2009, le surcoût de la masse salariale prise globalement est supérieur à cette somme.
Permettez-moi de terminer par quelques éléments relatifs à la dette. L’année 2009 illustre véritablement la formule que j’avais proposée à la commission et au Sénat l’an dernier,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. L’« insoutenable légèreté de la dette » !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … c'est-à-dire l’« insoutenable légèreté de la dette publique » !
« Insoutenable », car on ne peut pas continuer ainsi ! Dès lors que l’extérieur nous finance, nous subissons sa loi.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et plus l’extérieur, donc les marchés, nous financent, plus ils nous imposent leurs lois et leurs règles.
M. Roland du Luart. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et nul ne doit s’en étonner ni s’en indigner !
« Légèreté », car nous avons réalisé une économie de charges financières de 5 milliards d’euros en 2009. D’ailleurs, l’année 2009 se terminait par un large débat sur le grand emprunt, et le Gouvernement a, somme toute, été raisonnable.
Mais, mes chers collègues, souvenez-vous des signataires très allants pour un emprunt de 100 milliards d’euros voilà quelques mois seulement. À présent, c’est passé de mode. Heureusement que les modes sont fugaces et qu’un événement peut en chasser un autre assez rapidement.
En matière de dette, nous avons pu observer que l’encours des bons du trésor à moins d’un an a varié de 76 milliards d’euros, alors qu’on prévoyait 21 milliards d’euros. Jean-Pierre Fourcade analyse tout cela avec beaucoup de persévérance et de finesse pour la commission des finances et il serait encore mieux placé que moi pour vous interroger sur le pilotage politique de telles opérations, monsieur le ministre.
On peut en effet très bien comprendre que l’Agence France Trésor fasse de son mieux pour retenir les bonnes opportunités de marchés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Elle continue !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais la technique est-elle toujours au rendez-vous de la politique ? Accroissant de manière aussi importante la part du très court terme en 2009, n’avons-nous pas sensibilisé à l’excès notre dette ? Cela ne devrait-il pas être davantage sous contrôle ? Je me permets simplement de poser cette question.
Mme Nicole Bricq. Et la réponse est non !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Au-delà du bilan, il y a les engagements hors bilan, qui ont progressé de 182 milliards d’euros, soit une hausse de 13 %. Nous pouvons d’ailleurs le comprendre, puisqu’il s’agit de l’effet mécanique des décisions que nous avons prises au pire moment de la crise financière, et avec succès, du moins je l’espère. La publication prochaine des tests de résistance des institutions financières françaises nous montrera, j’en suis convaincu, que les dispositions prises à l’époque ont utilement soutenu la solvabilité, puis la croissance de ces groupes.
Au total, et à titre de transition pour nos débats de cet après-midi, retenons simplement qu’il est dangereux d’entretenir en permanence un déficit égal ou supérieur à 3 % du produit intérieur brut. Car, si tel est le niveau de déficit avant crise, il plonge nécessairement très fort en période de crise. C’est ce que nous avons vu s’opérer avec les effets de la conjoncture et du plan de relance.
Et, mes chers collègues, prenons garde de considérer que les 3 %, auxquels nous avons souscrit en toute liberté à un moment donné et qui sont un maximum, ne soient considérés par beaucoup d’entre nous comme un minimum ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’exercice 2009 présente un déficit abyssal. En effet, l’exécution budgétaire de 2009 s’est achevée par un déficit de 138 milliards d’euros, soit deux fois et demi celui qui a été constaté en 2008.
Certes, la crise y est, à l’évidence, pour beaucoup. Mais le Gouvernement ne peut pas s’exonérer de sa propre part de responsabilité dans cette situation.
Rappelons-le, la crise n’est pas responsable de tous nos maux. Des choix gouvernementaux antérieurs ont contribué à en aggraver l’ampleur. Disons-le clairement, en persistant à maintenir des mesures controversées votées avant la crise, là où il aurait fallu avoir la lucidité de reconnaître qu’elles n’étaient pas adaptées à la situation économique du pays, vous avez commis une erreur !
J’insiste sur ce point : non seulement certains de vos dispositifs sont injustes socialement et fiscalement, mais ils se sont révélés inefficaces, voire, pis encore, néfastes. Il en est ainsi des nombreux allégements fiscaux consentis en 2007 et 2008, ainsi que du « paquet fiscal », contenu dans la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, mesures que vous avez voulu à tout prix maintenir.
Résultat, un manque à gagner considérable, qui représente 5,2 milliards d’euros de recettes en moins du fait des allégements fiscaux et 9,7 milliards d’euros à mettre sur le compte du « paquet fiscal ». Au total, ce sont près de 15 milliards d’euros qui ont grevé, de manière injustifiée, le budget de l’État.
Pourtant, vous aviez l’occasion de dégager des marges de manœuvre en mettant à plat les niches fiscales et en supprimant le « paquet fiscal ». Cela vous aurait permis de limiter certainement la levée du grand emprunt national de cette année. Mais vous avez fait un autre choix, inspiré par votre volonté, jamais démentie, de préserver une petite minorité de Français aisés. C’est dommage !
Cette responsabilité, vous l’avez également prise au cœur de la crise, en votant de nouvelles mesures fiscales qui grèvent encore plus nos recettes fiscales. Tel est le cas de la baisse de la TVA dans la restauration, dont l’efficacité n’a, au passage, jamais été démontrée. Or ces mesures ont entraîné une baisse des recettes de 1,4 milliard d’euros. Ces chiffres apportent, à tout le moins, la preuve de votre responsabilité politique dans la dégradation de nos finances publiques, là où vous persistez à vous servir de la crise comme d’un paravent pour justifier tous nos mauvais résultats.
M. Roland du Luart. Il y a quand même un effondrement des recettes fiscales !
M. Bernard Angels. D’ailleurs, si la crise était seule responsable du déficit de 2009, comment expliquer son énorme part structurelle ?
En effet, si l’augmentation du déficit en 2009 est principalement due à la crise et aux mesures de relance, la part du déficit structurel est loin d’être négligeable, puisqu’elle s’élève à environ 5 % du PIB en 2009, expliquant ainsi les deux tiers du déficit constaté.
Cela tient non seulement à l’héritage des années d’avant crise, mais également à l’affaiblissement de la croissance potentielle, à la forte croissance des dépenses publiques, même hors plan de relance, et aux mesures de baisse durable des prélèvements obligatoires.
Qui plus est, si le facteur conjoncturel était au centre du problème, les finances publiques françaises devraient se porter mieux que celles des autres pays européens. Or tel n’est pas le cas. Car, alors que la France a bénéficié d’une conjoncture économique moins dégradée que nombre d’autres pays européens, la situation de ses finances publiques est pourtant nettement moins bonne.
En effet, le déficit français a presque autant augmenté en 2009 que le déficit moyen des autres pays européens. Mais cela le porte pourtant à un niveau plus élevé, en volume, que le déficit moyen européen, et ce malgré une récession moins forte et un plan de relance de moindre ampleur.
Dès lors, monsieur le ministre, compte tenu de tous ces éléments, il paraît difficile de continuer à nier les conséquences budgétaires de vos choix politiques.
Pourtant, c’est ce que vous faites lorsque vous affirmez, par exemple, en l’occurrence à tort, que, du fait de « ses qualités », le plan de relance n’aurait « pas eu d’impact » sur le compte de résultat de l’État.
Or la Cour des comptes ne s’y est pas trompée : elle a montré que le plan de relance a pesé tant sur les recettes que sur les dépenses, en réduisant les premières de 16,3 milliards d’euros et en augmentant les secondes de 15,7 milliards d’euros. Mais surtout, et j’y viens, si le plan de relance ne pèse pas, à vos yeux, sur le compte de résultat de l’État, c’est bien parce que vous l’avez expressément sorti du périmètre de la norme de dépenses.
En effet, par une interprétation biaisée de la fameuse « norme de dépenses », à l’aune de laquelle est mesurée la qualité d’exécution de nos comptes publics, vous entachez ce débat budgétaire d’insincérité.
Depuis maintenant six ans, l’augmentation des dépenses de l’État fait l’objet d’un dispositif d’encadrement, la « norme de dépenses ». L’État affiche ainsi un objectif de progression limité à l’inflation anticipée, afin de viser une stabilité en volume des dépenses publiques.
Or vous vous targuez d’avoir respecté cette norme. Mais c’est parce que vous avez pris de très nombreuses libertés quant aux dépenses entrant dans le cadre du « zéro volume ». Vous avez ainsi mesuré l’évolution des dépenses… hors plan de relance ! Or nous avons vu à quel point celui-ci avait pesé sur les dépenses publiques.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et vous vouliez un plan de relance beaucoup plus important !
M. Bernard Angels. Vous aviez fixé le plafond des dépenses à 348,2 milliards d’euros. En comptant les dépenses du plan de relance, vous l’avez largement dépassé.
L’accroissement des dépenses en volume, avec plan de relance, a été de plus 4,4 %, pour une prévision de 3,9 %.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous vouliez qu’on finance le pouvoir d'achat !
M. Bernard Angels. Nous voyons bien que, si la norme de dépenses est prétendument « respectée », c’est au prix de quelques contorsions.
Ces contorsions vous amènent, en outre, à exclure certaines dépenses du périmètre de la norme, à l’encontre du principe budgétaire d’universalité, auquel vous prétendez pourtant vous conformer.
Il s’agit notamment des dépenses des comptes spéciaux qui représentent 109 milliards d’euros en 2009. Si l’on tient compte du solde de ces comptes, fortement dégradé cette année 2009, les dépenses nettes de l’État ont largement dépassé la norme du « zéro volume » et progressent même de 7,7 % par rapport à 2008, soit une augmentation de 21,5 milliards d’euros.
J’en viens maintenant aux dépenses fiscales, également sorties de la norme de dépense. Qui ignore que certaines de ces niches fiscales jouent parfois le rôle de subventions directes de l’État, sans pour autant apparaître dans son budget ? Tel est le cas du prêt immobilier à taux zéro.
Vous n’avez d’ailleurs même pas respecté l’objectif fixé en loi de finances initiale pour ces dépenses fiscales. Le Gouvernement avait fait voter un plafond correspondant à une augmentation de 4,8 % par rapport à 2008. Mais ce dernier a largement été dépassé, car les dépenses fiscales ont augmenté de 6,2 % en un an. Or, quoi qu’on en dise, les dépenses fiscales sont assimilables à des dépenses budgétaires. Par conséquent, elles devraient être intégrées au périmètre de la norme de dépenses.
Il est une autre petite manipulation à laquelle le Gouvernement s’est livré : il utilise certains opérateurs de l’État pour financer des opérations budgétaires, ce qui permet de comptabiliser ces dépenses à l’extérieur du budget de l’État, rendant plus difficile l’appréciation que la Cour des comptes et le Parlement peuvent en faire.
De même, le financement des « primes épargne logement » – 700 millions d’euros en 2009 – est comptabilisé à l’extérieur du budget par le truchement d’une avance rémunérée souscrite auprès du Crédit foncier de France.
Peut-on parler encore de sincérité ? Je rappelle pour mémoire que les documents budgétaires et comptables de l’État sont censés retracer l’ensemble des financements mobilisés au cours de l’exercice, y compris ceux qui sont mis en œuvre par l’intermédiaire de dispositifs extrabudgétaires.
Il est difficile, dans ce contexte, d’appréhender correctement le solde budgétaire présenté dans ce projet de loi de règlement : nous en avons une vision partielle parce que vous en donnez une interprétation partiale.
Mme Nicole Bricq. Eh oui, dans l’ensemble !
M. Bernard Angels. À ces oublis, s’ajoutent les reports de charge sur l’exercice suivant : il s’agit des dépenses qui auraient dû être payées au titre de l’exercice 2009, mais qui sont reportées sur l’année suivante. Bien qu’en diminution par rapport à 2008, ces dépenses représentent tout de même un minimum de 2,6 milliards d’euros.
Pourtant, la pression sur les dépenses a été moins forte que les années précédentes.
En effet, l’inflation constatée de 0,1 % a été très inférieure à l’hypothèse en loi de finances initiale, soit 1,5 %. Par conséquent, contrairement à 2008, l’exécution de 2009 a connu une moindre pression sur les dépenses en valeur, ce qui constitue un environnement plutôt apaisé. Or les dépenses de l’État ont continué d’augmenter depuis la mise en place de cette norme en 2004.
C’est pourquoi nous déplorons le long chemin – les magistrats de la rue Cambon l’ont bien remarqué – qui nous sépare d’une procédure budgétaire enfin exemplaire. La Cour des comptes a en effet assorti la certification des comptes de la nation d’un certain nombre de réserves.
Je ne reviendrai pas sur l’impérieuse nécessité qu’il y a à redéfinir le périmètre de la norme de dépenses ou à mieux contrôler la prolifération des niches fiscales. Mais parmi les points soulevés par la Cour, j’en retiens trois qui me paraissent décisifs pour améliorer la qualité de l’action et du contrôle parlementaire.
Tout d’abord, l’examen de l’exécution des comptes de 2009 montre, une fois encore, l’importance des cas, pourtant prévisibles, de sous-budgétisation de certaines missions. Nous ne cessons de le déplorer : en persévérant dans la sous-estimation budgétaire, les principes d’unité et de sincérité budgétaires se voient remis en cause.
En effet, monsieur le ministre, vous êtes contraint, en raison de cette sous-budgétisation, de demander des ouvertures complémentaires de crédits au cours de l’année d’exécution de la loi de finances. Or cela ne permet pas un contrôle serein et transparent de la réalisation des comptes de l’État.
De nouveaux crédits ont ainsi été ouverts, soit par décret d’avance – 835 millions d’euros au moins en crédits de paiement –, soit dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2009 de fin d’année, à hauteur de 1,39 milliard d’euros. À cet égard, le nombre particulièrement élevé de collectifs budgétaires en 2009, mais aussi en 2010, témoigne d’une anticipation médiocre de la conjoncture économique, comme je le soulignais au début de mon propos.
Cela n’est pas tout. Le contrôle parlementaire reste entravé par un accès encore insuffisant aux informations financières et comptables de l’État. En régime LOLF, le parlementaire est autant législateur que contrôleur de l’action gouvernementale. Les sénateurs entendent jouer pleinement leur rôle irremplaçable de contrôle de l’action publique. Pour cela, nous avons besoin d’outils adaptés : la refonte et l’adaptation des systèmes d’information sont pour nous une exigence forte si l’on veut parvenir à une exécution plus juste et plus transparente des comptes de l’État.
Or, cette année encore, le Gouvernement ne nous donne pas les moyens de cette ambition. À cet égard, le calendrier de mise en œuvre du prologiciel Chorus, qui doit servir de cadre à la comptabilité générale de l’État, a déjà dû être reporté. Ce retard coûte cher et ne facilite pas le travail des parlementaires. Notre mission de vérification et d’appréciation des comptes reste limitée. Il en est de même des dispositifs ministériels de contrôle et d’audit internes qui sont aujourd’hui insuffisants.
Ces remarques peuvent paraître techniques. Elles répondent pourtant à un objectif essentiel : celui de redonner au parlementaire toute la place qui lui revient dans la procédure budgétaire.
Enfin, la dette publique, en raison de son poids considérable, doit faire l’objet d’une gestion plus responsable et de plus long terme.
Vous vous targuez, monsieur le ministre, d’avoir fait baisser la charge de la dette. Certes, elle a diminué grâce à la baisse des taux d’intérêt. Mais le Gouvernement s’est laissé aller à un choix dangereux : il a choisi d’emprunter de manière croissante à court terme et dans des proportions supérieures à la couverture des variations infra-annuelles du compte du Trésor. En effet, le besoin de financement sans précédent auquel l’État a dû faire face en 2009, à hauteur de 246,2 milliards d’euros, soit deux fois plus que la moyenne des années 2002 à 2007, a été couvert par l’endettement. Si, dans une pure vision de court terme, cette croissance de la dette a pu représenter un avantage en 2009, elle est dangereuse à plus long terme, car elle présente un double écueil : d’une part, elle renforce la sensibilité de la charge de la dette de l’État à une remontée des taux d’intérêt, qui est inévitable compte tenu de leur niveau actuel ; d’autre part, elle réduit pour partie la portée de l’autorisation parlementaire prévue par la LOLF, qui ne porte explicitement que sur la dette à moyen et long termes.
Je conclurai en rappelant l’éthique qu’exige la période particulière que nous traversons. L’attention portée aux critiques sur ce projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009 est d’autant plus nécessaire et attendue que le contexte économique actuel ne nous laisse pas le loisir de tâtonner encore davantage dans la gestion budgétaire et financière.
Dès lors, sans nier l’ampleur de la présente crise économique, la responsabilité qui vous incombe en tant que détenteurs du pouvoir exécutif voudrait que vous regardiez au-delà du seul facteur de la crise pour assumer les aspects biaisés, voire sciemment injustes, de votre gestion budgétaire et que vous en tiriez les conclusions qui s’imposent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – MM. François Fortassin et Jean-Pierre Fourcade applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, l’année 2009 fut une année particulièrement difficile, une annus horribilis selon la vieille expression romaine, tant pour la croissance française que pour nos finances publiques.
Le budget initial avait alors été bâti sur une prévision de croissance relativement irréaliste de 1,5 %. Trois lois de finances rectificatives ont été votées en cours d’exercice et elles ont sciemment majoré les prévisions de recettes alors que la crise économique se propageait dans le monde entier. À la même époque, la Cour des comptes soulignait le risque d’emballement de la dette et celui d’un mauvais positionnement de la France par rapport à ses partenaires européens. La caractéristique la plus importante de ce ralentissement économique a été la contraction de l’investissement des entreprises, qui a diminué de 7,7 % après avoir augmenté de 2,4 % en 2008, et la forte poussée du chômage à 9,6 % des actifs, soit 2,7 millions de personnes. Le chômage atteint ainsi un niveau record !
Le déficit public atteint 7,5 % du PIB en 2009, contre 3,4 % en 2008, soit plus du double ! Quant à la dette publique, elle a atteint 1 489 milliards d’euros en 2009, soit 77,6 % du PIB contre 67,5 % un an auparavant. L’année 2008 était pourtant déjà une année record. Une telle plongée en un an ne s’était encore jamais vue.
La situation est de plus en plus inquiétante. Non seulement la politique budgétaire et fiscale du Gouvernement a dégradé de façon historique les comptes publics, mais, en plus, elle s’est révélée totalement inefficace pour sortir le pays de la crise.
Selon la Cour des comptes, le déficit public et la dette ont augmenté dans les mêmes proportions que dans les autres pays européens, alors même que la récession a été un peu moins violente en France que dans le reste de l’Europe.
Loin de mettre en place des outils efficaces de redressement, le Gouvernement s’évertue à faire ce qu’il connaît le mieux, à savoir communiquer. Les effets d’annonce se multiplient ; les résultats ne sont toujours pas au rendez- vous. C’est ainsi qu’en septembre 2008 Mme Christine Lagarde annonçait qu’elle allait plafonner les niches fiscales pour que chaque Français contribue selon ses moyens à la couverture des charges publiques. Tout le monde devait adhérer à ce principe. Or, en juillet 2010, nul ne sait encore ce qu’il adviendra des dizaines de niches fiscales qui coûtent autant à la collectivité qu’elles rapportent aux quelques privilégiés qui en profitent.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien ! Supprimons-les toutes !
M. François Fortassin. Le mécanisme pervers des dépenses fiscales n’est toujours pas enrayé. Selon la Cour des comptes, les dépenses fiscales à périmètre constant et hors plan de relance ont encore augmenté de 4,7 milliards d’euros en 2009, soit 6,2 %, ce qui représente la même progression que celle constatée depuis six ou sept ans : grosso modo, elles augmentent de 5 milliards d’euros tous les ans.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très juste !
M. François Fortassin. Monsieur le ministre, depuis trop d’années, le Gouvernement et le Président de la République pratiquent de façon excessive la politique de l’effet d’annonce. Ce dernier n’avait-il pas appelé en 2008 à moraliser le capitalisme dès 2008 ?
M. François Marc. Ah oui !
M. François Fortassin. Aujourd’hui, les paradis fiscaux existent toujours…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faudrait les conquérir !
M. François Fortassin. … et les dernières révélations de la presse sur de supposés financements occultes via la Suisse ne donneront pas tort à tous ceux qui s’estiment déçus par les promesses politiques et fiscales non tenues depuis 2007.
M. François Fortassin. Pour déterminer sa stratégie budgétaire, le Gouvernement mise sur un taux de croissance de 2,5 % entre 2011 et 2013. À ce propos, je citerai un passage du tout récent rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques. Selon la Cour des comptes, « si l’on retient une évolution légèrement moins soutenue de la croissance, de l’ordre de 2,25 %, soit le scénario bas du Gouvernement, qui est déjà très favorable compte tenu d’une croissance potentielle qui est plutôt de 1,8 % ; et si l’on prolonge l’évolution tendancielle des dépenses constatées ces dernières années, le déficit public dépasserait en 2013 les 6 % du PIB et la dette atteindrait 93 % de la richesse nationale, soit plus de 2 000 milliards d’euros ».
Or c’est la crise économique et financière internationale qui a révélé les faiblesses structurelles des finances publiques françaises. La Cour des comptes estime que 24,3 milliards d’euros de pertes de recettes fiscales lui sont imputables, ainsi que 2,6 milliards d’euros de pertes de recettes non fiscales. Au total, ces 27 milliards d’euros représentent 20 % du déficit. On pourrait faire intelligemment et équitablement des économies : c’est dur, mais c’est possible. Par exemple, ne serait-il pas temps de remettre à plat tout notre système d’exonération sociale, notamment en réduisant, voire en supprimant celles qui sont payées par les industries qui font de gros profits ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ça, c’est plus difficile !
M. François Fortassin. Certes, mais il faudra s’y attaquer !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous allons faire des propositions sur le crédit d’impôt recherche !
M. François Fortassin. Sur 42 milliards d’euros de pertes sociales, il serait possible, à ce titre, d’économiser quelques milliards d’euros par an, ce qui serait entièrement compatible avec une politique active de l’emploi.
Enfin, l’opportunité du maintien du bouclier fiscal est de plus en plus contestée : à un moment où le chômage augmente de manière préoccupante, est-il concevable qu’une minorité de nos compatriotes, dont les revenus se situent très largement au-dessus du revenu moyen des Français, puissent bénéficier d’un tel avantage fiscal, ressenti comme une profonde injustice ? Au vu des circonstances économiques exceptionnelles que vivons, il serait sans doute bien venu de suspendre ce système, afin de réconcilier équité fiscale et justice sociale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Le suspendre ? Non, l’abroger !
M. François Fortassin. Il ne s’agit pas de s’engager sur une voie dangereuse, mais sur une voie audacieuse !
Dans ce contexte de récession généralisée, ce sont la réactivité et la capacité de proposition qui comptent et ce projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009 ne garantit absolument pas la relance économique ni la justice sociale : il confirme en revanche l’ampleur des dégâts.
À ce sujet, nous pouvons proposer quelques remèdes pour les années à venir, et cela en vertu d’une position politique beaucoup plus que technique. En effet, faut-il le rappeler, les radicaux de gauche – ou du moins leurs prédécesseurs ! – sont à l’origine de l’impôt progressif sur le revenu…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Joseph Caillaux fut aussi un éminent président de la commission des finances du Sénat !
M. François Fortassin. Quelques pistes de réflexion mériteraient d’être étudiées, car elles nous permettraient sans doute d’accroître les recettes.
Premièrement, nous constatons, depuis trente ans, que l’écart des revenus entre les Français les plus démunis et les plus riches, au lieu de se resserrer, s’est élargi. Ne conviendrait-il pas de se demander comment faire en sorte que l’éventail se referme quelque peu ? Et ce n’est pas qu’une question d’affichage : c’est aussi affaire de justice sociale !
Deuxièmement, il faut peut-être s’attaquer à ce que j’appellerai l’enrichissement sans cause. Prenons l’exemple d’un propriétaire foncier qui vend quelques hectares de terres : s’il les vend comme terrains agricoles, le mètre carré vaut 1 euro ; mais si, à la faveur de l’adoption d’un document d’urbanisme, ces terrains deviennent constructibles, ils pourront être vendus au prix de 60, 80 ou 100 euros le mètre carré, voire plus ! Qu’a fait ce propriétaire pour bénéficier d’une telle plus-value ? Rien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si, il est allé voir son maire ! (Sourires.)
M. François Fortassin. Voilà pourquoi je parle d’enrichissement sans cause. Ne serait-il pas judicieux, dans un tel cas, de prélever une surtaxe importante ?
Troisièmement, nous connaissons le cas de nombreux artistes, sportifs ou autres personnalités qui profitent des conditions de vie qu’offre notre pays – y compris de notre système de santé ! – tout en résidant à quelques kilomètres de nos frontières.
M. François Marc. Eh oui !
M. François Fortassin. Leurs ressources proviennent généralement de la France. Serait-il anormal d’envisager de les taxer ? Ouvrons au moins le dossier !
Enfin, beaucoup de Français, sont très diplômés, voire surdiplômés ; je pense notamment aux chercheurs.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Une taxe sur les diplômes… Il fallait y penser ! (Sourires.)
M. François Fortassin. Attendez que j’aie terminé, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je ne faisais que suivre votre pensée !
M. François Fortassin. Suivez-la, mais ne la précédez pas ! (Nouveaux sourires.)
Un certain nombre d’entre eux partent monnayer leurs talents à l’étranger, alors qu’ils ont reçu une formation longue et coûteuse, le plus souvent financée par les deniers publics. Il n’est pas question de les empêcher d’aller travailler à l’étranger, mais serait-il déraisonnable de considérer que, sur trente et quelques années de vie professionnelle, ils doivent en passer dix en France, sous peine de devoir rembourser la formation qu’ils ont reçue ? Une telle mesure n’aurait rien de révolutionnaire et serait assez bien perçue.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais elle serait contraire aux règles de l’Union européenne. Or vous êtes un grand Européen !
M. François Baroin, ministre. À ma connaissance, il n’y a que dans le foot qu’on applique ce système !
M. François Fortassin. Les centres de formation du football le font, ceux du rugby aussi, sans contrevenir aux règles européennes, monsieur le rapporteur général ! Mais peut-être n’êtes-vous pas familier du « paramètre rebondissant » et « aléatoire » s’agissant du ballon de rugby ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je ne suis pas un spécialiste, je le reconnais volontiers !
M. François Fortassin. Telles sont les pistes que je souhaitais vous indiquer et il en existe sans doute bien d’autres, qui permettraient certainement de restaurer, à la fois, nos finances publiques et, surtout, la confiance que nos concitoyens doivent avoir envers leurs gouvernants ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Jacques Jégou applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Pierre Michel membre de la Commission consultative des archives audiovisuelles de la justice.
7
Règlement des comptes pour l’année 2009
Suite de la discussion et adoption définitive d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009 (projet n° 585, rapport n° 587).
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à en croire un certain nombre d’orateurs et de porte-parole de la majorité – je me réfère notamment à la discussion de ce matin –, la France aurait traversé avec moins d’encombres que d’autres pays les turbulences de l’année 2009, année de la crise, selon la formule qui a été utilisée à compter de l’été 2008 et du krach des subprimes à Wall Street.
Une telle assertion, au moment où nous débattons de l’exécution budgétaire de 2009, appelle quelques observations liminaires.
Pouvons-nous faire croire à la population de notre pays, aux jeunes, aux familles, aux salariés et retraités, que la « crise » a débuté durant l’été 2008 et qu’elle est en voie de disparition, que nous serions entrés, selon le mot-valise de Mme Christine Lagarde, dans l’ère de la « ri-lance » ?
Outre qu’il faudrait s’interroger sur l’étymologie et le sens du mot « crise » – il ne signifie pas nécessairement que tout va mal, mais traduit plutôt une situation de trouble –, la majorité ne pourra pas faire admettre aux 2 millions de chômeurs comptabilisés avant l’été 2008, aux 4 millions de salariés à bas salaire et à temps partiel, aux millions de Français vivant sous le seuil de pauvreté qu’avant la tempête de l’été 2008, nous vivions sous un ciel était serein et sans nuages .
La crise, pour ceux qui auraient tendance à l’oublier ou à le cacher, dure en réalité depuis 1970. Elle a connu des phases d’aggravation, des rémissions plus ou moins nettes, de courtes phases de relance, parfois suivies de pics, mais surtout de creux particulièrement profonds, de l’activité et de l’emploi.
L’été 2008 n’a finalement constitué qu’un épisode particulier, lié à l’éclatement de la bulle des subprimes. Nous avons vécu d’autres épisodes similaires par le passé – bulles de l’immobilier, bulle de l’internet – ayant précipité, selon les cas, le Crédit Lyonnais ou le Nasdaq dans les abîmes.
Cette crise aiguë de l’été 2008 a connu quelques répliques au fil de l’année 2009 et depuis le début de la présente année, la moindre n’étant pas la crise obligataire qui a suivi l’intervention massive des états sur les marchés interbancaires pour assurer un niveau de liquidités susceptible de restaurer un semblant de confiance.
Prétendre aujourd’hui que tout va mieux qu’avant l’été 2008, c’est tout bonnement travestir la réalité !
M. Guy Fischer. C’est un mensonge !
M. Thierry Foucaud. Le nombre de chômeurs de première catégorie – c'est-à-dire ceux qui recherchent un emploi à temps complet et à durée indéterminée – est en effet le plus élevé que notre pays ait jamais connu : 2,8 millions !
La progression de l’activité économique semble faible, avec une croissance de 0,1 % pour le premier trimestre 2010 et le processus de destruction d’emplois et de productions se poursuit.
L’embellie, toute relative, de l’emploi intérimaire ne provient que d’un recours renforcé et temporaire des entreprises à ce type de contrats de travail, au moins pour reconstituer les stocks et, surtout, pour ajuster le coût de la main-d’œuvre aux normes de rendement et de rentabilité fixées par les conseils d’administration.
De plus, mine de rien, l’inflation revient peu à peu, sous la pression des coûts financiers des entreprises, qui se sont massivement désendettées et ont cherché à verser des dividendes confortables à leurs actionnaires. Au point que le Gouvernement s’est senti obligé d’annoncer le relèvement prochain de la rémunération du livret A !
S’il fallait d’ailleurs une preuve de cette logique inflationniste, le relèvement des tarifs du gaz et, bientôt, de l’électricité nous la fournirait. Ces tarifs n’ont rien à voir avec la qualité du service public et sont bien plus liés à l’exigence de rentabilité des actionnaires de GDF-Suez et, s’agissant de l’opérateur d’électricité, de l’État. Mais cette priorité accordée à la rémunération du capital, ce sont les usagers qui la paient sur leurs factures !
Considérons maintenant la situation économique générale.
La France a connu une récession importante en 2009, la baisse du PIB atteignant 2,2 %, si l’on se fie aux données du Fonds monétaire international, et 2,5 % selon M. le ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance, M. Patrick Devedjian.
Peut-on parler de relance réussie quand, de trimestre en trimestre, nous pouvons constater que la France produit moins de richesses qu’avant l’élection du Président Sarkozy ? Depuis le temps qu’il nettoie de fond en comble la « maison France » à coup de réformes et de mesures d’urgence, c’est la récession qu’il a trouvée, en lieu et place de la croissance, qu’il était prêt à aller chercher avec les dents…
Sans avoir la malignité d’insister sur le comportement des acteurs, j’observerai que le résultat obtenu après trois années de sarkozysme illustre assez bien le désastre patent des politiques et des réformes que vous avez soutenues sans sourciller, chers collègues de la majorité sénatoriale.
Qu’est devenue l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité ? Une alternative qui n’a séduit qu’une proportion ultra-minoritaire de la population – moins de 5 % des ménages ont quitté l’opérateur historique –, ce qui a démontré l’inanité des directives communautaires en matière de grands services publics !
À quoi a abouti la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ? À un plan social chez France 24, à une colère grandissante des artisans du bâtiment contre le régime des auto-entrepreneurs, qui semble leur faire une concurrence déloyale, et à une crise majeure pour les producteurs de lait, de fruits et légumes et de produits frais, affectant profondément le monde agricole !
Quant au 0,375 point de croissance attendu de la mise en œuvre de la loi de modernisation de l’économie, il est aux abonnés absents !
Qu’a donné l’ouverture des magasins le dimanche ? Pas grand-chose en termes de chiffre d’affaires du secteur du commerce, aujourd’hui plus porté par la dégradation de la parité euro/dollar que par l’extension des ouvertures dominicales !
Et que reste-t-il du slogan « travailler plus pour gagner plus » ? Le nombre d’heures supplémentaires aujourd’hui déclarées est inférieur à celui qui était estimé avant l’adoption de la loi TEPA !
C’est qu’avant de travailler plus, il faudrait déjà pouvoir travailler tous !
M. Guy Fischer. Bien dit !
M. Thierry Foucaud. Et nous ne serons pas, mes chers collègues, sortis de la crise tant que 5 millions de nos compatriotes seront victimes du chômage total ou partiel et de la précarisation des contrats de travail !
D’ailleurs, s’il fallait trouver un paramètre emblématique des difficultés du temps, il suffirait de regarder l’état de notre principal indice boursier, le CAC40 !
La France du Fouquet’s et du Palais Brongniart, la France des planches de Deauville et des châteaux en Sologne, celle qui a porté au pouvoir le Président Sarkozy attendait beaucoup de son accession au « trône présidentiel ». Elle n’a pas été déçue : bouclier fiscal renforcé, cadeaux divers, privatisation du gaz, bientôt réforme des retraites ; le moins que l’on puisse dire est que la feuille de route rédigée par le MEDEF est largement respectée !
Mais la bourse va mal…
Le 8 mai 2007, alors que le Président Sarkozy allait prendre l’avion pour Malte afin de se reposer de la campagne électorale, le CAC40 affichait une insolente santé, à 6 034,25 points. Or il était hier à moins de 3 500 points…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Quelles qualités d’analyste financier !
M. Guy Fischer. Ça, c’est l’hommage du vice à la vertu !
M. Thierry Foucaud. … et le journal Les Échos annonçait même que la capitalisation boursière du tiers des entreprises cotées à l’indice était inférieure à leurs fonds propres !
Autrement dit, monsieur le rapporteur général, en trois ans et deux mois, l’indice vedette de la bourse de Paris a chuté de plus de 40 % !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Alors, vous êtes heureux !
M. Thierry Foucaud. On comprend beaucoup mieux la discrétion du Gouvernement, au moment de présenter son plan de sauvetage des retraites, baptisé « réforme des retraites », quant à la valorisation de l’épargne retraite individuelle ! Nous ne sommes plus en 2003, où le plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, pouvait attirer quelques salariés inquiets pour le devenir de nos retraites collectives !
Venons-en à la situation réelle du budget de 2009.
Pour beaucoup – ils s’expriment du banc du Gouvernement ou des travées de la majorité –, le déficit de 2009 est certes important – 139 milliards d’euros, c’est tout de même du jamais vu –, mais il est profondément lié à la conjoncture de crise – nous avons dit ce qu’il fallait en penser ! – et devrait donc se réduire dès 2010 et, plus encore en 2011, une fois la relance devenue effective et la croissance revenue...
Mais voilà que la presse économique vient de donner un éclairage majeur sur l’un des facteurs de persistance d’un fort déficit des comptes publics : les pertes de recettes de l’État. Pas plus tard qu’il y a deux jours, un journal a même titré : « Depuis 2000, l’État a abandonné 100 milliards d’euros de recettes fiscales ! » Belle découverte que voilà ! C’est une situation que nous avons, pour notre part, dénoncée à de multiples reprises, au moins depuis que je suis parlementaire et que je participe à la discussion des lois de finances.
Oui, la course au moins-disant fiscal et social que mène la France, en grande partie sur la recommandation des institutions communautaires, a durablement, structurellement, creusé le déficit de l’État ! Et le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale de prôner d’en rajouter, en s’attaquant à la fois à la dépense publique – alors que celle-ci est comprimée depuis plus de dix ans – et aux baisses d’impôts, pour lesquelles il recommande un « changement de direction ».
Une hausse des impôts ? Mais lesquels donc ? Notre rapporteur général a des idées : il préconise d’augmenter la TVA sur les produits soumis au taux réduit et d’accroître encore les droits d’accise, si j’ai bien compris, en élargissant par exemple leur assiette à la fourniture d’électricité. C’est là une vision pour le moins déroutante ! Il semble oublier que ce sont encore une fois les plus modestes qui feraient les frais de ce type de mesures, les atteignant directement au porte-monnaie, un porte-monnaie déjà assurément allégé par le gel des allocations logement ou des aides sociales…
Changez donc de vision du monde, monsieur le rapporteur général !
Interrogez-vous quelques instants avec nous sur les fiducies dissimulées dans quelque canton suisse, dans la principauté du Liechtenstein, dans les îles Caïmans ou dans les rues tranquilles de Saint-Hélier, fiducies dont vous aviez, en un temps pas si lointain, souhaité assurer le développement en France par l’adoption d’une proposition de loi ad hoc.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Foucaud, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Thierry Foucaud. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur général, avec l’autorisation de l’orateur.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais faire remarquer que la loi de février 2007, qui crée la fiducie en droit français a complètement laissé de côté la fiducie-transmission.
La fiducie est, par ailleurs, un dispositif neutre sur le plan fiscal qui permet d’assurer la transparence du mécanisme.
Je ne peux donc pas vous laisser dire que la loi sur la fiducie de février 2007 encouragerait je ne sais quels montages ou opérations frauduleuses, car ce serait complètement contraire à la réalité.
Mme Nicole Bricq. Il faudrait parler des trusts !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Je suis tout à fait d’accord avec vous, chère collègue Nicole Bricq. Mais je ne développerai pas ce sujet aujourd'hui. Je répondrai simplement à M. le rapporteur général qu’il était peut-être informé de certaines situations nécessitant que le droit français intègre l’originalité juridique que nous venons d’évoquer.
Cela étant, chers collègues de la majorité, ce qui coûte cher depuis tant d’années au budget de l’État – l’affaire du moins-disant fiscal dure depuis 1985 et vous l’avez défendu depuis lors –, c’est la baisse de l’impôt sur les sociétés, porté de 50 % à 33,33 % – taux nominal et ô combien théorique –, c’est la suppression de la taxe professionnelle, c’est l’allégement des cotisations sociales sur les bas salaires, véritable trappe à sous-emploi, c’est l’abaissement continu des taux d’imposition du barème de l’impôt sur le revenu, c’est l’expansion et la prolifération de la dépense fiscale !
Et c’est bien entendu, aussi, ce choix de réduire l’impôt de solidarité sur la fortune, quand les inégalités de patrimoines n’ont jamais été aussi fortes en France, c’est cette aberration du bouclier fiscal, cerise sur l’écœurant gâteau des cadeaux aux riches, aux puissants, aux possédants et aux grands groupes !
Allez faire comprendre aux Françaises et aux Français le bien-fondé d’une initiative qui permet de rembourser 30 millions d’euros à une contribuable dont la particularité est d’être placée en tête des patrimoines personnels de notre pays et dont les revenus n’ont strictement rien à voir avec son activité ! Soyons clairs, ces 30 millions, elle peut s’en passer ! D’autant que cet argent est le produit du travail des autres et qu’il doit normalement être récupéré par ces « autres » sous forme de dépense publique !
C’est avec cette politique du moins-disant fiscal et social, qui ne nous a pas dispensés de subir en 2009 une récession quatre fois plus forte que la récession mondiale – voilà la vérité –, qui a conduit le budget de l’État à afficher 139 milliards d’euros de déficit !
Cette fuite en avant, qui fait porter à la collectivité, à ceux qui attendent légitimement de l’action publique qu’elle corrige les inégalités, les désordres et les souffrances que la vie leur impose et que va aggraver la réduction accrue de la dépense publique, nous n’avons cessé de la combattre.
Nous l’avons fait lors de la discussion du projet de loi de finances initiale, comme nous l’avons fait lors de la discussion des collectifs budgétaires qui ont suivi – en résumé, le plan de relance, c’est 28 milliards d’euros rendus aux entreprises au titre de l’impôt sur les sociétés – et nous continuons de le faire aujourd’hui.
C’est pourquoi nous ne voterons pas ce projet de loi de règlement des comptes de 2009 ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur le plan de nos comptes publics, l’année 2009 a été exceptionnelle : la récession de 2,25% et le plan de relance ont eu pour conséquence une dégradation historique de nos finances publiques. Ainsi, le déficit public s’est établi à la fin de 2009 à 144 milliards d’euros, soit une fois et demie le déficit en 2008. Il représente 7,5 % du PIB et est en augmentation de 4,2 points ; nous n’avons jamais connu, même en temps de guerre, un tel niveau de déficit !
S’il est lié en premier lieu à l’effondrement des recettes fiscales de l’État, notamment de l’impôt sur les sociétés, il est également dû aux mesures de relance prises par le Gouvernement. Mais il est aussi la conséquence de la progression de 3,7 % en volume des dépenses courantes, hors intérêts de la dette et hors mesures de relance, en raison d’un relâchement des efforts de maîtrise des dépenses publiques.
La Cour des comptes note par ailleurs que, si la baisse des recettes est majoritairement attribuable à la récession, elle est également la conséquence de baisses pérennes de prélèvements obligatoires décidées par l’État.
Comme l’expliquera tout à l'heure notre excellent collègue Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales, les comptes sociaux ont également connu des niveaux historiques. Les quatre branches du régime général sont dans le rouge, avec un déficit de plus de 20 milliards d’euros – l’assurance maladie avec un solde négatif de 10,2 milliards d’euros étant responsable de la moitié du déficit de l’ensemble des branches –, auxquels il faut ajouter les 3,2 milliards de déficit du Fonds de solidarité vieillesse.
M. Guy Fischer. C’est normal !
M. Jean-Jacques Jégou. La dette publique, quant à elle, s’est aggravée de plus de dix points de PIB – représentant plus de 200 milliards d’euros –, pour atteindre 78,1 % du PIB et frôler les 1 500 milliards d’euros. L’aggravation des déficits, notamment du déficit primaire, rend impossible à ce niveau la stabilisation de l’endettement en pourcentage du PIB, ce qui oblige notre pays à emprunter pour payer les intérêts de la dette et une partie des dépenses courantes.
Outre le risque d’emballement de la dette décrit en juin 2009 par le regretté Philippe Séguin, le recours à des prêts à court terme est particulièrement préoccupant, monsieur le ministre, puisque 36 % des dettes de l’État sont exigibles à moins de deux ans, ce qui expose notre pays à la remontée des taux et accroît donc notre vulnérabilité.
Un autre sujet d’inquiétude tient à ce que notre dette est détenue à 68 % par des non-résidents, ce qui rend notre pays dépendant à l’égard de créanciers extérieurs et pose, à terme, la question de l’exercice de notre souveraineté.
Si nos déficits publics ont connu un tel dérapage, c’est parce que nous n’avons pas suffisamment réduit le déficit structurel avant la crise. Il est à regretter que les périodes fastes – en gros, la décennie 1998-2008 – n’aient pas été utilisées pour assainir nos finances publiques, si bien qu’en 2009 les mesures pour faire face à la crise économique et financière ont conduit à une explosion des déficits budgétaires.
En effet, malgré une récession moins violente et un plan de relance d’une ampleur plus limitée, notre déficit et notre dette ont augmenté dans les mêmes proportions que ceux des autres pays européens. II ne faudrait pas que certains, avec les prémices d’un retour de la croissance, au demeurant certainement molle, retombent dans la facilité de l’endettement.
L’ampleur de la dégradation des finances publiques en 2009 a franchi, avec la crise économique, un nouveau stade. Les recettes de l’État sont retombées à un niveau proche de celui de 1996 en euros courants et au niveau de 1979 en euros constants. Mais cela ne doit pas masquer que le mal qui atteint nos finances est chronique. La crise économique n’a fait que confirmer les faiblesses structurelles de nos finances publiques.
En effet, la dégradation de la situation des finances publiques n’est pas uniquement attribuable à la crise économique et aux effets du plan de relance. Force est de constater, avec la Cour des comptes, que la crise n’explique qu’une partie de cette dégradation. D’après ses calculs, le déficit structurel atteint 5 % du PIB en 2009, contre 3,9 % en 2008, la crise et les mesures de relance expliquant seulement un tiers du déficit global.
Pour 2009, cette situation s’explique par l’insuffisante sécurisation des recettes de l’État : le Gouvernement a accumulé les dépenses fiscales qui ont provoqué une baisse des recettes de 1,4 milliard d’euros, liée en particulier à la baisse de la TVA dans la restauration. En réalité, ce sont plus de 3 milliards en année pleine. En outre, de nombreuses mesures prises avant la crise ont eu des effets sur 2009. Les allégements fiscaux liés à la loi TEPA consentis en 2007 et 2008 ont engendré ainsi un surcoût de 5,2 milliards d’euros en 2009.
Si l’on observe l’évolution des comptes publics sur une période plus longue, il apparaît que l’aggravation du déficit structurel est due au décalage permanent et ancien entre les dépenses et les recettes publiques : les dépenses ne sont couvertes qu’à hauteur de 86 % en 2009 et les recettes de l’État couvrent à peine plus de la moitié de ses dépenses nettes. Or, depuis 2000, ce sont plus de 100 milliards d’euros de recettes fiscales dont a été privé le budget de l’État, pour deux tiers en raison de mesures de baisses d’impôts, le tiers restant étant lié à des transferts de recettes aux autres administrations publiques.
Le rapporteur général de l’Assemblée nationale, mon collègue val-de-marnais Gilles Carrez, a montré que la décennie 2000 s’est caractérisée par un mouvement d’ampleur de diminution des ressources de l’État, à la fois par des baisses d’impôt sur le revenu et par la multiplication des dépenses fiscales. Depuis 2000, la France a accumulé les baisses d’impôts sans les gager par des réductions de dépenses, au point que le déficit structurel s’est progressivement accru pour atteindre 5 % du PIB en 2009.
Pour ne prendre que l’exemple des dépenses fiscales, qui sont un moyen facile pour les gouvernements de déroger à la norme budgétaire du « zéro volume », elles coûtaient 56 milliards d’euros en 2000, contre 73 milliards en 2009. Depuis dix ans, l’évolution de la dépense fiscale a été en moyenne de 5,2 % d’une année sur l’autre. Depuis 2004, cette évolution atteint chaque année 8,5 %. La dépense fiscale, dont le coût est difficilement maîtrisable, a deux effets : elle mine progressivement les recettes de l’État et elle est un facteur d’injustice fiscale en grignotant l’impôt sur le revenu.
Si, au cours de la période 2000-2009, les gouvernements successifs avaient gagé et compensé systématiquement les nouvelles mesures en matière fiscale par des économies sur la dépense ou par l’augmentation d’autres prélèvements, le déficit public et la dette publique se seraient établis respectivement à 3,7 % et 54,6 % du PIB en 2009, au lieu de 7,5 % et 78 %. Pendant trois années consécutives, de 2006 à 2008, le budget aurait même été excédentaire. La dette publique brute serait passée sous la barre des 50 % du PIB en 2007 et 2008. Mais ne rêvons pas !
Nous devons avoir conscience que nous ne pouvons plus accorder des baisses d’impôts non gagées : leur compensation systématique par des économies sur la dépense ou par des hausses d’autres prélèvements est une condition indispensable de la soutenabilité de l’endettement public. Mieux encore, il faudrait aussi revenir sur une partie des exonérations de charges patronales pour certains secteurs d’activité comme la grande distribution, car nous savons tous qu’elles ne servent à rien. Si les gouvernements s’étaient contraints à cette discipline, nous n’en serions pas là.
L’hémorragie doit être stoppée, l’État ne disposant pas de capacités financières illimitées. Comme le proposait le rapport Pébereau en 2005, les ressources des administrations publiques doivent rester à un niveau stable pour pouvoir désendetter le pays.
Le redressement de nos finances publiques est désormais un impératif, car la crédibilité financière de la France vis-à-vis de ses créanciers est en jeu, comme l’a montré la crise récente de la dette dans la zone euro. Il faut un traitement immédiat, dès 2011, continu et massif de nos déséquilibres financiers, car le seul retour de la croissance ne suffira pas. Voilà quelques jours, Didier Migaud expliquait devant la commission des finances qu’en 2013, dans l’hypothèse d’une croissance de 2,25 % et avec la seule évolution tendancielle des dépenses de ces dernières années, le déficit public et la dette publique dépasseraient respectivement 6 % du PIB et 93 % de la richesse nationale, soit plus de 2 000 milliards d’euros.
Les tensions sur le marché de la dette souveraine sont venues nous rappeler que les États ne peuvent s’endetter à l’infini et qu’ils peuvent aussi faire faillite. À chaque chose, malheur est bon ! Les marchés nous imposent désormais d’abandonner les facilités qui ont prévalu depuis dix ans. Nous prenons enfin conscience que la dépense publique ne peut plus être financée indéfiniment par l’emprunt, reportant son poids sur les générations futures.
La marche à suivre dans les prochaines années est simple : nous devons nous guérir de l’addiction aux dépenses publiques comme de la tentation de baisser les impôts.
Sans vouloir anticiper sur le débat d’orientation sur les finances publiques de cet après-midi, je ferai quelques remarques relatives aux perspectives de redressement des finances publiques.
Le programme de stabilité du Gouvernement, qui prévoit de ramener le déficit public de 8 % du PIB en 2010 à 3 % en 2013 est fondé sur une hypothèse de croissance de 2,5 % en moyenne sur trois années. Certains qualifient poliment ces prévisions d’optimistes ou d’ambitieuses, estimant que la croissance potentielle se situerait plutôt autour de 1,8 %. Je voudrais rappeler que plus le taux de croissance sera faible et inférieur à la prévision gouvernementale, plus l’effort à fournir pour maîtriser la dépense devra être important. Autrement dit, un taux de croissance prévisionnelle trop élevé conduirait à sous-estimer les efforts de redressement à fournir.
De même, afin de ne pas sous-estimer l’effort à accomplir en matière de réduction de la dépense, qui est de l’ordre de 20 milliards chaque année, ce qui est déjà très ambitieux, il ne faut pas surestimer l’évolution spontanée des recettes liées au retour de la croissance. Je parle sous le contrôle du président de la commission des finances, l’audition de certains ministres dans le cadre de l’examen en commission du projet de loi de règlement nous a laissés sceptiques quant à leur volonté de réduire réellement leurs dépenses de fonctionnement.
Le Gouvernement fait le pari que la reprise économique permettra de rattraper, sur trois ans, les pertes conjoncturelles de recettes dues à la crise,…
Mme Nicole Bricq. Impossible !
M. Jean-Jacques Jégou. … voire de faire entrer dans les caisses de l’État des recettes d’un niveau jusque-là jamais atteint. Est-ce bien raisonnable ?
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Jean-Jacques Jégou. Que retrouvera-t-on des quelque 500 000 emplois que nous avons perdus ? L’exemple de l’effondrement de la masse salariale, qui, après avoir crû de 4 %, a baissé de 1,3 %, plombe durablement le niveau des cotisations et accentue les déficits sociaux.
Par ailleurs, du fait de la forte dynamique des charges de pensions et des intérêts de la dette dans les prochaines années, il faudra que les autres dépenses de l’État fassent l’objet d’une maîtrise beaucoup plus drastique et de réformes structurelles.
Au passage, je note qu’en 2009, les dépenses de personnel ont augmenté de 800 millions d’euros par rapport à 2008, alors même qu’on aurait pu espérer les voir baisser dans la mesure où la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, sur laquelle le Gouvernement s’est montré cette fois rigoureux, a été à peu près respectée.
Comme le suggère depuis plusieurs années la Cour des comptes, il faut réexaminer l’ensemble des dépenses publiques, et notamment les plus coûteuses. Cela veut dire, concrètement, s’attaquer aux prestations sociales, qui représentent le tiers des dépenses publiques, aux rémunérations qui en constituent le quart, mais également aux dépenses d’assurance maladie, dont le déséquilibre reste très important.
Au-delà de la poursuite des efforts sur les dépenses de fonctionnement de l’État, notamment celles des opérateurs de l’État, qui échappent encore aujourd’hui à la norme d’évolution des dépenses, il faut dès à présent mettre l’accent sur les dépenses d’intervention. En effet, la diminution des dépenses publiques ne pourra s’appuyer sur la seule réduction du train de vie de l’État. Les dépenses d’intervention constituent un gisement d’économies et sont un secteur dans lequel il est possible d’améliorer l’efficacité de l’action publique tout en réduisant les coûts. L’insuffisante sélectivité des dépenses d’intervention conduit à un saupoudrage. Nous avons pris la mauvaise habitude dans notre pays de tenir un guichet ouvert pour des publics sans cesse plus nombreux.
Ce réexamen de l’ensemble des dépenses publiques ne peut se faire sans avoir au préalable réfléchi au bien-fondé et à l’efficacité de l’intervention publique. La rigueur, ou la « ri–lance » chère à Mme Lagarde,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est très inventif !
M. Jean-Jacques Jégou. … ne sera acceptée par les Français que si les efforts sont justement répartis. Et je ne vois pas, monsieur le ministre, comment cela sera possible en maintenant le bouclier fiscal ! (M. Guy Fischer applaudit.)
Mme Nicole Bricq. Ah !
M. Jean-Jacques Jégou. S’agissant des recettes, nous devons nous atteler à consolider les ressources publiques. Vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, à réduire dès 2011 de 8,5 milliards les niches fiscales et sociales. Nous devons aller plus loin et tendre vers les 10 milliards d’euros, notamment en relevant certains taux de TVA.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. Jean-Jacques Jégou. Au-delà du nécessaire « coup de rabot » des niches fiscales, il faudra en parallèle examiner chaque niche pour supprimer les moins efficaces, les moins justes et les plus coûteuses. (M. Adrien Gouteyron applaudit.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Excellent !
M. Jean-Jacques Jégou. Vous savez, monsieur le ministre, que vous pourrez compter sur nous, la commission des finances et le groupe centriste du Sénat, que je représente ici, pour vous aider à manier les rabots, passer la tondeuse et tenir les cisailles, pour reprendre les outils de notre rapporteur général, quand il s’agira à l’automne prochain de tailler dans les niches fiscales et sociales !
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous serons de bons artisans !
M. Jean-Jacques Jégou. Je ne reviens pas sur les débats qui nous ont amenés à approuver les dispositifs de garantie de la dette grecque et, plus généralement, des dettes souveraines des États de l’Eurogroupe. Je rappelle simplement que les efforts qu’exige l’état de notre déficit et de notre dette doivent être menés en étroite liaison avec notre partenaire allemand et dans le cadre de l’Union européenne. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et sur le banc de la commission, ainsi que sur plusieurs travées de l’UMP et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la quatrième année consécutive, nous allons examiner le projet de loi de règlement en « mode LOLF ».
Cet instrument de contrôle de l’exercice budgétaire écoulé et d’évaluation de la mise en œuvre des programmes votés en loi de finances initiale, au travers des rapports annuels de performance annexés au projet de loi, s’inscrit pleinement dans la fonction de contrôle du Parlement, que nous avons revalorisée.
Le Parlement a, cette année encore, pleinement utilisé ses prérogatives en matière de contrôle au travers de l’excellent travail du rapporteur général de la commission des finances, Philippe Marini, que je tiens à féliciter, mais aussi des quarante-sept rapporteurs spéciaux, dont j’ai l’honneur de faire partie en tant que co-rapporteur de la mission « Défense », avec mes collègues François Trucy et Jean-Pierre Masseret. Le groupe UMP tient à saluer la contribution très utile de l’ensemble de ces rapporteurs qui permet de rendre compte du détail de l’exécution budgétaire des missions.
Le présent projet de loi de règlement s’inscrit dans le contexte particulier de la crise économique, qui a continué d’affecter les finances de l’État en 2009, malgré des efforts notables de maîtrise des dépenses.
L’exercice 2009 s’achève sur un déficit budgétaire de 138 milliards d’euros, en augmentation de plus de 80 milliards d’euros par rapport à 2008. Cela a été dit, l’essentiel de cette dégradation est dû à la crise économique et financière. Elle a en effet entraîné une forte chute des recettes et a nécessité la mise en œuvre d’un plan de relance de l’économie.
Le déficit est néanmoins inférieur de près de 3 milliards d’euros à la prévision retenue dans la loi de finances rectificative de décembre 2009. En effet, les dépenses ont été inférieures de 1 milliard d’euros aux crédits votés, en raison non seulement de la maîtrise des dépenses courantes et du décalage du paiement de certaines dépenses du plan de relance, mais également des rentrées fiscales légèrement supérieures constatées en fin d’année.
Les dépenses de personnel restent stables entre 2008 et 2009, mais les dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention augmentent fortement, principalement sous l’effet du plan de relance de l’économie.
La crise a eu en 2009 un impact massif sur les moins-values spontanées de recettes fiscales nettes, qui ont diminué de 33 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, en raison d’une croissance inférieure à la prévision initiale : avec 2,5 points de décroissance en 2009, notre pays n’avait pas connu une telle récession depuis soixante ans.
Toutefois, la France a mieux résisté que ses voisins grâce à l’efficacité de son plan de relance, même si les mesures fiscales de ce plan ont eu un coût plus important que prévu : 37 milliards d’euros au lieu de 26 milliards.
Les recettes des impôts ont été moins importantes que prévu dans la loi de finances initiale pour 2009, avec une forte diminution par rapport à 2008 – de près de 20 % – et une baisse sans précédent du produit de l’impôt sur les sociétés et de la TVA.
Les recettes de l’impôt sur les sociétés ont diminué de plus de 20 milliards d’euros et celles de l’impôt sur le revenu de près de 6 milliards d’euros.
Enfin, dans le chapitre des mauvaises nouvelles, le poids des mesures nouvelles pérennes reste important en 2009 : il est comparable à celui constaté en 2008, soit plus de 7 milliards d’euros.
Malgré tout, nous avons pu relever en 2009 des signes encourageants.
Ainsi, une volonté sans précédent de ne plus laisser filer les déficits émerge en Europe, et même au-delà, la crise grecque n’y étant bien entendu pas étrangère.
Le groupe UMP se félicite ainsi que, dans le cadre du G20 qui s’est réuni à Toronto il y a deux semaines, les chefs d’État des nations industrialisées, à l’exception du Japon, se soient engagés à réduire de moitié leur déficit budgétaire d’ici à 2013, ainsi qu’à stabiliser, voire à réduire leur endettement public d’ici à 2016.
Le débat d’orientation de nos finances publiques qui va se dérouler ici cet après-midi, sera l’occasion d’indiquer plus précisément la feuille de route française.
Nous notons avec satisfaction que des efforts ont déjà été entrepris en France en 2009 : le plafond de dépenses a ainsi été respecté. Nous n’oublions pas, toutefois, la remarque de notre rapporteur général, qui estime que la norme « zéro volume » n’a pas été respectée si les dépenses du plan de relance sont réintégrées : cela fait en effet ressortir la progression en valeur à 4,4 % et la progression en volume à 4,3 %.
Un autre motif de satisfaction réside dans l’évolution des dépenses nettes du budget général par rapport à l’exécution budgétaire de 2008, ces dépenses ayant diminué en 2009 de 1 milliard d’euros.
En outre, la diminution des effectifs a continué en 2009. Elle est évaluée à près de 25 000 équivalents temps pleins travaillés, soit un résultat inférieur de près de 3 000 équivalents temps pleins travaillés par rapport à la loi de finances initiale pour 2009.
Notons que la RGPP a permis de réaliser des économies importantes : les politiques d’intervention ont diminué de 1 milliard d’euros et les dépenses de fonctionnement de 500 millions d’euros. Le groupe UMP se félicite d’ailleurs que, pour la première fois cette année, une annexe au projet de loi de règlement dresse un bilan des mesures de la RGPP.
Le creusement du déficit budgétaire n’a pas eu un impact équivalent sur la situation patrimoniale de l’État. La dégradation du résultat patrimonial est moins importante que celle du résultat budgétaire en raison des qualités du plan de relance français, axé sur des investissements et des opérations financières n’appauvrissant pas l’État. Cela n’affecte donc pas son compte de résultat.
Nous le voyons, malgré des difficultés conjoncturelles très importantes, de grands efforts ont été consentis, avec un souci de sincérité et de transparence que notre groupe tient à saluer.
Au terme du processus prévu par la LOLF, la Cour des comptes a d’ailleurs décidé de certifier les comptes avec neuf réserves, contre douze en 2008, dont huit qualifiées de « substantielles », contre neuf en 2008. En outre, trois réserves énoncées sur les comptes de 2008 ont été levées. La Cour des comptes a ainsi certifié pour la quatrième année consécutive les comptes de l’État, attestant ainsi le maintien d’un haut niveau de qualité. La diminution du nombre des réserves démontre les progrès significatifs réalisés dans la qualité de la gestion financière et comptable de l’État.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera le projet de loi de règlement des comptes pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où va s’achever la discussion générale, je tiens à remercier M. le rapporteur général et chacun des rapporteurs spéciaux de la commission des finances, qui ont préparé ce débat avec un soin extrême.
Monsieur le ministre, notre commission a auditionné sept de vos collègues à l’occasion de l’examen de ce projet de loi et nous avons tenté de tester auprès d’eux votre volonté de comprimer les crédits de fonctionnement et les crédits d’intervention. Si l’on prend au pied de la lettre leurs réactions, je peux vous dire qu’il vous reste encore un certain travail de persuasion et de pédagogie à effectuer…
J’exprime le souhait que le Gouvernement prenne totalement en compte l’exigence de revenir aussi rapidement que possible à l’équilibre des comptes publics et à une économie compétitive, sans laquelle nous n’aurons pas de croissance.
Puisque j’aperçois ici certains de nos collègues membres de la commission des affaires sociales, je forme le vœu que le projet de loi de règlement, qui ne traite que des comptes de l’État, puisse à l’avenir porter simultanément sur les comptes consolidés de l’État et de la protection sociale. Certes, nous allons aborder toutes ces questions dans un instant, lors du débat d’orientation des finances publiques pour 2011. Toutefois, il me semble qu’une telle présentation consolidée des comptes publics aurait une vertu pédagogique pour nos concitoyens et contribuerait à mettre fin à une certaine illusion collective. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
I. – Le résultat budgétaire de l’État en 2009 est arrêté à la somme de -138 028 685 126,34 €.
II. – Le montant définitif des recettes et des dépenses du budget de l’année 2009 est arrêté aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après :
(En euros) |
|||
Dépenses |
Recettes |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes |
|||
Recettes fiscales brutes |
325 918 979 840,20 |
||
À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts |
111 668 790 013,45 |
||
Recettes fiscales nettes (a) |
214 250 189 826,75 |
||
Recettes non fiscales (b) |
19 450 954 378,94 |
||
Montant net des recettes hors fonds de concours (c) = (a)+(b) |
233 701 144 205,69 |
||
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et des Communautés européennes (d) |
76 199 734 099,56 |
||
Total net des recettes, hors prélèvements sur recettes (e) = (c)-(d) |
157 501 410 106,13 |
||
Fonds de concours (f) |
3 517 638 335,79 |
||
Montant net des recettes, y compris fonds de concours (g) = (e)+(f) |
161 019 048 441,92 |
||
Dépenses |
|||
Dépenses brutes, hors fonds de concours |
399 077 261 509,82 |
||
À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts |
111 668 790 013,45 |
||
Montant net des dépenses (h) |
287 408 471 496,37 |
||
Fonds de concours (i) |
3 516 394 507,00 |
||
Montant net des dépenses, y compris fonds de concours (j) = (h) +(i) |
290 924 866 003,37 |
||
Total du budget général, y compris fonds de concours |
290 924 866 003,37 |
161 019 048 441,92 |
-129 905 817 561,45 |
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
1 944 837 753,75 |
1 944 837 753,75 |
|
Publications officielles et information administrative |
208 174 927,59 |
208 174 927,59 |
|
Montant des budgets annexes hors fonds de concours |
2 153 012 681,34 |
2 153 012 681,34 |
|
Fonds de concours |
18 581 521,99 |
18 581 521,99 |
|
Total des budgets annexes, y compris fonds de concours |
2 171 594 203,33 |
2 171 594 203,33 |
|
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
52 394 629 222,53 |
54 142 659 356,77 |
1 748 030 134,24 |
Comptes de concours financiers |
105 969 484 358,46 |
95 679 646 064,78 |
-10 289 838 293,68 |
Comptes de commerce (solde) |
-358 571 710,28 |
358 571 710,28 |
|
Comptes d’opérations monétaires hors Fonds monétaire international (solde) |
-60 368 884,27 |
60 368 884,27 |
|
Total des comptes spéciaux, hors Fonds monétaire international |
157 945 172 986,44 |
149 822 305 421,55 |
-8 122 867 564,89 |
Solde d’exécution des lois de finances, hors Fonds monétaire international |
-138 028 685 126,34 |
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
Le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l’équilibre financier de l’année 2009 est arrêté aux sommes présentées dans le tableau de financement ci-après :
(En milliards d’euros) |
|
Exécution 2009 |
|
Besoin de financement |
|
Amortissement de la dette à long terme (y compris rachats de titres d’échéance 2009 avant leur maturité) |
62,8 |
Amortissement de la dette à moyen terme (y compris rachats de titres d’échéance 2009 avant leur maturité) |
47,4 |
Amortissement de dettes reprises par l’État |
1,6 |
Variation des dépôts de garantie |
-0,3 |
Impact en trésorerie du solde de la gestion 2009 |
134,7 |
Total du besoin de financement |
246,2 |
Ressources de financement |
|
Émissions à moyen et long terme (obligations assimilables du Trésor et bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels), nettes des rachats en nominal |
164,9 |
Annulation de titres de l’État par la Caisse de la dette publique |
0 |
Variation des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés |
+75,8 |
Variation des dépôts des correspondants |
+0,8 |
Autres ressources de trésorerie |
5,3 |
Variation du solde du compte du Trésor |
-0,5 |
Total des ressources de financement (1) |
246,2 |
(1) Le total des ressources de financement (246,2 milliards d’euros) n’est pas égal à la somme des lignes correspondantes, présentées à la centaine de millions d’euros près, du fait des arrondis. |
– (Adopté.)
Article 3
I. – Le compte de résultat de l’exercice 2009 est approuvé tel que présenté dans le tableau ci-après. Le résultat comptable de l’exercice 2009 s’établit à - 97 709 902 235,04 € :
CHARGES NETTES
(En millions d’euros) |
|
2009 |
|
Charges de fonctionnement nettes |
|
Charges de personnel |
133 094 |
Achats, variations de stocks et prestations externes |
20 404 |
Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations |
54 315 |
Autres charges de fonctionnement |
14 339 |
Total des charges de fonctionnement direct (I) |
222 152 |
Subventions pour charges de service public |
20 144 |
Dotations aux provisions |
14 |
Total des charges de fonctionnement indirect (II) |
20 157 |
Total des charges de fonctionnement (III = I + II) |
242 309 |
Ventes de produits et prestations de service |
3 377 |
Production stockée et immobilisée |
89 |
Reprises sur provisions et sur dépréciations |
45 542 |
Autres produits de fonctionnement |
23 182 |
Total des produits de fonctionnement (IV) |
72 191 |
TOTAL DES CHARGES DE FONCTIONNEMENT NETTES (V = III - IV) |
170 118 |
Charges d’intervention nettes |
|
Transferts aux ménages |
29 713 |
Transferts aux entreprises |
14 289 |
Transferts aux collectivités territoriales |
82 123 |
Transferts aux autres collectivités |
22 325 |
Charges résultant de la mise en jeu de garanties |
29 |
Dotations aux provisions et aux dépréciations |
22 422 |
Total des charges d’intervention (VI) |
170 902 |
Contributions reçues de tiers |
6 076 |
Reprises sur provisions et sur dépréciations |
23 260 |
Total des produits d’intervention (VII) |
29 336 |
TOTAL DES CHARGES D’INTERVENTION NETTES (VIII = VI - VII) |
141 566 |
Charges financières nettes |
|
Intérêts |
39 009 |
Pertes de change liées aux opérations financières |
212 |
Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations |
4 464 |
Autres charges financières |
1 606 |
Total des charges financières (IX) |
45 292 |
Produits des créances de l’actif immobilisé |
8 502 |
Gains de change liés aux opérations financières |
195 |
Reprises sur provisions et sur dépréciations |
8 091 |
Autres intérêts et produits assimilés |
2 588 |
Total des produits financiers (X) |
19 376 |
TOTAL DES CHARGES FINANCIÈRES NETTES (XI = IX - X) |
25 916 |
TOTAL DES CHARGES NETTES (XII = V + VIII + XI) |
337 600 |
PRODUITS RÉGALIENS NETS
(En millions d’euros) |
|
2009 |
|
Impôt sur le revenu |
46 752 |
Impôt sur les sociétés |
31 593 |
Taxe sur les salaires |
0 |
Taxe intérieure sur les produits pétroliers |
14 431 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
127 331 |
Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
13 616 |
Autres produits de nature fiscale et assimilés |
17 300 |
TOTAL DES PRODUITS FISCAUX NETS (XIII) |
251 023 |
Amendes, prélèvements divers et autres pénalités |
7 194 |
TOTAL DES AUTRES PRODUITS RÉGALIENS NETS (XIV) |
7 194 |
Ressource propre de l’Union européenne basée sur le revenu national brut |
-14 697 |
Ressource propre de l’Union européenne basée sur la taxe sur la valeur ajoutée |
-3 630 |
TOTAL DES RESSOURCES PROPRES DU BUDGET DE L’UNION EUROPÉENNE BASÉES SUR LE REVENU NATIONAL BRUT ET LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE (XV) |
-18 327 |
SOLDE DES OPÉRATIONS DE L’EXERCICE
(En millions d’euros) |
|
2009 |
|
Charges de fonctionnement nettes (V) |
170 118 |
Charges d’intervention nettes (VIII) |
141 566 |
Charges financières nettes (XI) |
25 916 |
CHARGES NETTES (XII) |
337 600 |
Produits fiscaux nets (XIII) |
251 023 |
Autres produits régaliens nets (XIV) |
7 194 |
Ressources propres de l’Union européenne basées sur le revenu national brut et la taxe sur la valeur ajoutée (XV) |
-18 327 |
PRODUITS RÉGALIENS NETS (XVI) |
239 890 |
SOLDE DES OPÉRATIONS DE L’EXERCICE (XVI - XII) |
-97 710 |
II. – Le résultat comptable de l’exercice 2009 est affecté au bilan à la ligne « report des exercices antérieurs ».
III. – Le bilan, après affectation du résultat comptable, s’établit comme suit :
(En millions d’euros) |
|||
31 décembre 2009 |
|||
Brut |
Amortissements Dépréciations |
Net |
|
ACTIF IMMOBILISÉ |
|||
Immobilisations incorporelles |
48 213 |
14 186 |
34 027 |
Immobilisations corporelles |
443 805 |
66 282 |
377 523 |
Immobilisations financières |
236 605 |
25 472 |
211 133 |
Total actif immobilisé |
728 623 |
105 940 |
622 684 |
ACTIF CIRCULANT (hors trésorerie) |
|||
Stocks |
34 713 |
4 713 |
30 000 |
Créances |
95 128 |
36 936 |
58 192 |
Redevables |
80 280 |
35 707 |
44 573 |
Clients |
6 182 |
1 027 |
5 155 |
Autres créances |
8 666 |
202 |
8 463 |
Charges constatées d’avance |
21 |
21 |
|
Total actif circulant (hors trésorerie) |
129 862 |
41 649 |
88 213 |
TRÉSORERIE |
|||
Fonds bancaires et fonds en caisse |
18 136 |
18 136 |
|
Valeurs escomptées, en cours d’encaissement et de décaissement |
-2 033 |
-2 033 |
|
Autres composantes de trésorerie |
24 737 |
24 737 |
|
Équivalents de trésorerie |
5 302 |
5 302 |
|
Total trésorerie |
46 143 |
46 143 |
|
COMPTES DE RÉGULARISATION |
11 471 |
11 471 |
|
TOTAL ACTIF (I) |
916 098 |
147 588 |
768 510 |
DETTES FINANCIÈRES |
|||
Titres négociables |
1 164 309 |
||
Titres non négociables |
249 |
||
Autres emprunts |
10 708 |
||
Total dettes financières |
1 175 266 |
||
DETTES NON FINANCIÈRES (hors trésorerie) |
|||
Dettes de fonctionnement |
4 639 |
||
Dettes d’intervention |
9 443 |
||
Produits constatés d’avance |
9 710 |
||
Autres dettes non financières |
116 953 |
||
Total dettes non financières |
140 745 |
||
PROVISIONS POUR RISQUES ET CHARGES |
|||
Provisions pour risques |
10 694 |
||
Provisions pour charges |
66 851 |
||
Total provisions pour risques et charges |
77 545 |
||
AUTRES PASSIFS (hors trésorerie) |
12 117 |
||
TRÉSORERIE |
|||
Correspondants du Trésor et personnes habilitées |
66 739 |
||
Autres |
719 |
||
Total trésorerie |
67 458 |
||
COMPTES DE RÉGULARISATION |
18 027 |
||
TOTAL PASSIF (hors situation nette) (II) |
1 491 159 |
||
Report des exercices antérieurs |
-968 242 |
||
Écarts de réévaluation et d’intégration |
245 593 |
||
Solde des opérations de l’exercice |
|||
SITUATION NETTE (III = I - II) |
-722 649 |
IV. – L’annexe du compte général de l’État de l’exercice 2009 est approuvée. – (Adopté.)
Article 4
I. – Le montant des autorisations d’engagement engagées sur le budget général au titre de l’année 2009 est arrêté par missions et programmes aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce tableau.
(En euros) |
|||
Désignation des missions et des programmes |
Autorisations d’engagement engagées |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires |
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées |
||
Action extérieure de l’État |
2 713 270 354,80 |
10 762 420,20 |
|
– Action de la France en Europe et dans le monde |
1 806 198 856,49 |
|
9 804 027,51 |
– Rayonnement culturel et scientifique |
593 933 073,82 |
|
642 622,18 |
– Français à l’étranger et affaires consulaires |
313 138 424,49 |
|
315 770,51 |
Administration générale et territoriale de l’État |
2 552 127 039,91 |
|
66 405 559,09 |
– Administration territoriale |
1 618 686 508,39 |
|
41 677 460,61 |
– Administration territoriale : expérimentation Chorus |
105 149 620,87 |
|
2 562 253,13 |
– Vie politique, cultuelle et associative |
210 970 960,82 |
|
13 937 511,18 |
– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur |
617 319 949,83 |
|
8 228 334,17 |
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales |
4 089 219 340,05 |
27 879 684,95 |
|
– Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires |
2 159 930 225,58 |
|
7 086 271,42 |
– Forêt |
459 310 677,22 |
|
4 405 112,78 |
– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation |
647 861 164,73 |
|
7 539 629,27 |
– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture |
822 117 272,52 |
|
8 848 671,48 |
Aide publique au développement |
3 428 102 174,73 |
|
13 402 018,27 |
– Aide économique et financière au développement |
1 336 896 907,09 |
|
0,91 |
– Solidarité à l’égard des pays en développement |
2 066 228 162,77 |
|
12 143 002,23 |
– Développement solidaire et migrations |
24 977 104,87 |
|
1 259 015,13 |
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation |
3 485 646 669,44 |
3 550 643,56 |
|
– Liens entre la Nation et son armée |
172 344 804,50 |
|
2 314 656,50 |
– Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant |
3 187 672 515,83 |
|
1 130 414,17 |
– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale |
125 629 349,11 |
|
105 572,89 |
Conseil et contrôle de l’État |
529 666 819,20 |
9 282 899,80 |
|
– Conseil d’État et autres juridictions administratives |
300 843 272,76 |
|
4 131 837,24 |
– Conseil économique, social et environnemental |
36 732 097,00 |
|
212 224,00 |
– Cour des comptes et autres juridictions financières |
192 091 449,44 |
|
4 938 838,56 |
Culture |
2 782 445 241,12 |
178 584 215,88 |
|
– Patrimoines |
1 185 898 342,22 |
109 488 035,78 |
|
– Création |
820 321 340,09 |
7 751 303,91 |
|
– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
776 225 558,81 |
61 344 876,19 |
|
Défense |
49 106 643 210,37 |
257 467 813,63 |
|
– Environnement et prospective de la politique de défense |
1 883 511 740,04 |
|
48 237 891,96 |
– Préparation et emploi des forces |
23 343 667 564,99 |
|
139 934 311,01 |
– Soutien de la politique de la défense |
2 865 608 995,88 |
|
24 912 375,12 |
– Équipement des forces |
21 013 854 909,46 |
|
44 383 235,54 |
Direction de l’action du Gouvernement |
495 785 684,85 |
11 461 878,15 |
|
– Coordination du travail gouvernemental |
411 845 594,34 |
16 461,66 |
|
– Présidence française de l’Union européenne |
-6 667 596,55 |
9 339 596,55 |
|
– Protection des droits et libertés |
90 607 687,06 |
2 105 819,94 |
|
Écologie, développement et aménagement durables |
12 599 469 395,00 |
332 287 621,00 |
|
– Infrastructures et services de transports |
7 052 038 744,63 |
95 057 473,37 |
|
– Sécurité et circulation routières |
58 582 860,04 |
1 909 316,96 |
|
– Sécurité et affaires maritimes |
109 930 976,53 |
7 070 846,47 |
|
– Météorologie |
184 300 000,00 |
|
|
– Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
325 673 918,76 |
6 496 316,24 |
|
– Information géographique et cartographique |
79 940 035,57 |
24 628,43 |
|
– Prévention des risques |
165 925 194,64 |
99 551 089,36 |
|
– Énergie et après-mines |
765 699 103,79 |
67 333 402,21 |
|
– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire |
3 857 378 561,04 |
54 844 547,96 |
|
Économie |
2 147 404 172,28 |
52 349 420,72 |
|
– Développement des entreprises et de l’emploi |
1 293 974 913,60 |
31 596 363,40 |
|
– Tourisme |
63 363 814,87 |
0,13 |
|
– Statistiques et études économiques |
434 821 891,37 |
7 750 053,63 |
|
– Stratégie économique et fiscale |
355 243 552,44 |
13 003 003,56 |
|
Engagements financiers de l’État |
39 186 389 161,94 |
131 210 527,06 |
|
– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
37 625 022 255,82 |
42 238 501,18 |
|
– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
189 830 801,06 |
88 969 198,94 |
|
– Épargne |
1 162 500 000,00 |
|
|
– Majoration de rentes |
209 036 105,06 |
2 826,94 |
|
Enseignement scolaire |
59 923 425 274,62 |
82 408 625,38 |
|
– Enseignement scolaire public du premier degré |
17 244 710 037,92 |
|
3 045 174,08 |
– Enseignement scolaire public du second degré |
28 604 607 251,54 |
|
26 861 740,46 |
– Vie de l’élève |
3 721 645 931,32 |
|
1 601 597,68 |
– Enseignement privé du premier et du second degré |
7 004 425 630,60 |
|
855 293,40 |
– Soutien de la politique de l’éducation nationale |
2 110 734 385,34 |
|
1 903 527,66 |
– Enseignement technique agricole |
1 237 302 037,90 |
|
48 141 292,10 |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
11 576 215 065,37 |
108 337 110,63 |
|
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
8 228 797 742,42 |
25 933 367,58 |
|
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local : expérimentations Chorus |
15 988 047,77 |
0,23 |
|
– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
400 932 659,19 |
1 631 780,81 |
|
– Conduite et pilotage des politiques économique et financière |
921 727 872,65 |
54 064 378,35 |
|
– Facilitation et sécurisation des échanges |
1 525 509 807,01 |
17 430 558,99 |
|
– Fonction publique |
249 639 323,52 |
9 277 024,48 |
|
– Entretien des bâtiments de l’État |
233 619 612,81 |
0,19 |
|
Immigration, asile et intégration |
588 594 498,63 |
3 803 676,37 |
|
– Immigration et asile |
512 048 566,01 |
2 866 104,99 |
|
– Intégration et accès à la nationalité française |
76 545 932,62 |
937 571,38 |
|
Justice |
8 618 312 606,80 |
157 946 793,20 |
|
– Justice judiciaire |
2 861 218 598,36 |
97 688 901,64 |
|
– Administration pénitentiaire |
4 379 960 996,81 |
25 714 580,19 |
|
– Protection judiciaire de la jeunesse |
756 540 443,99 |
22 408 877,01 |
|
– Accès au droit et à la justice |
398 129 536,47 |
94 886,53 |
|
– Conduite et pilotage de la politique de la justice : expérimentations Chorus |
213 302 296,61 |
7 289 383,39 |
|
– Conduite et pilotage de la politique de la justice |
9 160 734,56 |
4 750 164,44 |
|
Médias |
1 173 742 996,69 |
3 000,31 |
|
– Presse |
441 197 885,93 |
0,07 |
|
– Soutien à l’expression radiophonique locale |
27 575 110,76 |
3 000,24 |
|
– Contribution au financement de l’audiovisuel public |
458 000 000,00 |
|
|
– Action audiovisuelle extérieure |
246 970 000,00 |
|
|
Outre-mer |
2 641 496 278,57 |
40 137 889,43 |
|
– Emploi outre-mer |
1 719 246 436,23 |
834 071,77 |
|
– Conditions de vie outre-mer |
922 249 842,34 |
39 303 817,66 |
|
Plan de relance de l’économie |
8 975 535 731,01 |
0,99 |
|
– Programme exceptionnel d’investissement public |
1 147 790 000,01 |
0,99 |
|
– Soutien exceptionnel à l’activité économique et à l’emploi |
5 668 002 431,00 |
|
|
– Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité |
2 159 743 300,00 |
|
|
Politique des territoires |
384 078 038,67 |
36 263 461,33 |
|
– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire |
313 177 761,19 |
31 804 385,81 |
|
– Interventions territoriales de l’État |
70 900 277,48 |
4 459 075,52 |
|
Pouvoirs publics |
1 022 650 720,00 |
75 000,00 |
|
– Présidence de la République |
112 335 666,00 |
|
|
– Assemblée nationale |
533 910 000,00 |
|
|
– Sénat |
327 694 000,00 |
|
|
– La Chaîne parlementaire |
30 735 000,00 |
|
|
– Indemnités des représentants français au Parlement européen |
4 745 974,00 |
|
|
– Conseil constitutionnel |
12 460 000,00 |
|
|
– Haute Cour |
|
|
|
– Cour de justice de la République |
770 080,00 |
|
75 000,00 |
Provisions |
|
13 899 000,00 |
|
– Provision relative aux rémunérations publiques |
|
|
|
– Dépenses accidentelles et imprévisibles |
|
13 899 000,00 |
|
Recherche et enseignement supérieur |
24 884 182 519,12 |
73 612 715,88 |
|
– Formations supérieures et recherche universitaire |
12 285 768 357,47 |
40 307 255,53 |
|
– Vie étudiante |
2 107 057 867,23 |
25 580,77 |
|
– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
5 045 161 751,99 |
4 659 900,01 |
|
– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
1 223 943 212,00 |
|
|
– Recherche spatiale |
1 270 016 621,00 |
|
|
– Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
283 907 321,03 |
12 918 260,97 |
|
– Recherche dans le domaine de l’énergie |
658 666 800,22 |
336 779,78 |
|
– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
983 494 622,66 |
3 431 123,34 |
|
– Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat |
380 725 910,93 |
9 067 753,07 |
|
– Recherche duale (civile et militaire) |
200 000 000,00 |
|
|
– Recherche culturelle et culture scientifique |
156 557 258,56 |
1 574 478,44 |
|
– Enseignement supérieur et recherche agricoles |
288 882 796,03 |
1 291 583,97 |
|
Régimes sociaux et de retraite |
5 087 578 732,36 |
25 852 267,64 |
|
– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres |
3 633 215 541,36 |
|
3 954 458,64 |
– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
739 999 228,00 |
|
772,00 |
– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers |
714 363 963,00 |
21 897 037,00 |
|
Relations avec les collectivités territoriales |
2 560 235 129,43 |
69 721 410,57 |
|
– Concours financiers aux communes et groupements de communes |
759 347 465,42 |
45 395 069,58 |
|
– Concours financiers aux départements |
487 963 601,15 |
11 108 583,85 |
|
– Concours financiers aux régions |
812 485 620,00 |
|
|
– Concours spécifiques et administration |
500 438 442,86 |
13 217 757,14 |
|
Remboursements et dégrèvements |
111 668 790 013,45 |
2 483 089 986,55 |
|
– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs) |
93 868 881 033,76 |
2 222 998 966,24 |
|
– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs) |
17 799 908 979,69 |
260 091 020,31 |
|
Santé |
1 844 341 228,21 |
106 163 041,79 |
|
– Prévention et sécurité sanitaire |
806 312 935,94 |
102 811 395,06 |
|
– Offre de soins et qualité du système de soins |
120 727 021,19 |
2 137 934,81 |
|
– Protection maladie |
917 301 271,08 |
1 213 711,92 |
|
Sécurité |
16 281 898 446,16 |
66 093 201,84 |
|
– Police nationale |
8 622 254 842,37 |
|
66 093 200,63 |
– Gendarmerie nationale |
7 659 643 603,79 |
|
1,21 |
Sécurité civile |
425 739 160,62 |
29 827 973,38 |
|
– Interventions des services opérationnels |
233 869 728,69 |
11 496 991,31 |
|
– Coordination des moyens de secours |
191 869 431,93 |
18 330 982,07 |
|
Solidarité, insertion et égalité des chances |
11 447 315 385,87 |
27 783 535,13 |
|
– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales |
444 674 351,35 |
0,65 |
|
– Actions en faveur des familles vulnérables |
910 622 787,19 |
116 459,81 |
|
– Handicap et dépendance |
8 994 134 924,39 |
17 899 698,61 |
|
– Égalité entre les hommes et les femmes |
26 474 081,37 |
389 942,63 |
|
– Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales |
1 071 409 241,57 |
9 377 433,43 |
|
Sport, jeunesse et vie associative |
853 554 453,36 |
8 616 809,64 |
|
– Sport |
245 743 793,82 |
2 361 599,18 |
|
– Jeunesse et vie associative |
143 760 227,23 |
1 064 300,77 |
|
– Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative |
464 050 432,31 |
5 190 909,69 |
|
Travail et emploi |
13 721 287 539,93 |
22 581 727,07 |
|
– Accès et retour à l’emploi |
6 252 870 763,23 |
0,77 |
|
– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi |
6 627 883 357,43 |
0,57 |
|
– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail |
49 367 701,79 |
5 393 847,21 |
|
– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail |
791 165 717,48 |
17 187 878,52 |
|
Ville et logement |
8 284 054 082,27 |
65 319 733,73 |
|
– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables |
1 293 831 992,84 |
898 796,16 |
|
– Politique de la ville |
757 672 651,24 |
14 392 559,76 |
|
– Aide à l’accès au logement |
5 504 060 624,00 |
|
|
– Développement et amélioration de l’offre de logement |
728 488 814,19 |
50 028 377,81 |
|
TOTAL |
415 079 197 164,83 |
4 516 181 663,17 |
II. – Le montant des dépenses relatives au budget général au titre de l’année 2009 est arrêté par missions et programmes aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les crédits de paiement ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce tableau.
(En euros) |
|||
Désignation des missions et des programmes |
Dépenses |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Ouvertures de crédits complémentaires |
Annulations de crédits non consommés et non reportés |
||
Action extérieure de l’État |
2 625 207 417,74 |
2 012 354,26 |
|
– Action de la France en Europe et dans le monde |
1 720 042 200,50 |
1,50 |
|
– Rayonnement culturel et scientifique |
592 596 547,90 |
909 044,10 |
|
– Français à l’étranger et affaires consulaires |
312 568 669,34 |
1 103 308,66 |
|
Administration générale et territoriale de l’État |
2 561 981 618,76 |
35 358 546,24 |
|
– Administration territoriale |
1 635 605 776,37 |
19 746 722,63 |
|
– Administration territoriale : expérimentation Chorus |
106 265 910,98 |
1 605 774,02 |
|
– Vie politique, cultuelle et associative |
205 242 191,85 |
12 612 007,15 |
|
– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur |
614 867 739,56 |
1 394 042,44 |
|
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales |
4 216 658 162,18 |
6 666 790,82 |
|
– Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires |
2 282 166 947,18 |
800 795,82 |
|
– Forêt |
397 192 529,87 |
0,13 |
|
– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation |
712 240 080,66 |
1 398 479,34 |
|
– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture |
825 058 604,47 |
4 467 515,53 |
|
Aide publique au développement |
3 218 173 419,74 |
9 351 716,26 |
|
– Aide économique et financière au développement |
1 024 694 708,26 |
7 291 715,74 |
|
– Solidarité à l’égard des pays en développement |
2 170 169 441,33 |
972 558,67 |
|
– Développement solidaire et migrations |
23 309 270,15 |
1 087 441,85 |
|
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation |
3 467 264 164,66 |
7 275 448,34 |
|
– Liens entre la Nation et son armée |
154 318 811,57 |
|
6 039 460,43 |
– Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant |
3 187 743 887,22 |
|
1 130 414,78 |
– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale |
125 201 465,87 |
|
105 573,13 |
Conseil et contrôle de l’État |
533 091 235,19 |
10 400 578,81 |
|
– Conseil d’État et autres juridictions administratives |
297 114 969,86 |
5 376 957,14 |
|
– Conseil économique, social et environnemental |
36 732 097,00 |
212 224,00 |
|
– Cour des comptes et autres juridictions financières |
199 244 168,33 |
4 811 397,67 |
|
Culture |
2 903 342 156,84 |
5 552 658,16 |
|
– Patrimoines |
1 260 747 095,12 |
|
2 748 555,88 |
– Création |
821 762 261,49 |
|
27 331,51 |
– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
820 832 800,23 |
|
2 776 770,77 |
Défense |
40 465 186 386,18 |
8 646 920,82 |
|
– Environnement et prospective de la politique de défense |
1 830 793 803,05 |
505 753,95 |
|
– Préparation et emploi des forces |
22 877 429 373,16 |
5 313 661,84 |
|
– Soutien de la politique de la défense |
2 188 275 783,29 |
1 845 596,71 |
|
– Équipement des forces |
13 568 687 426,68 |
981 908,32 |
|
Direction de l’action du Gouvernement |
508 700 131,93 |
15 727 797,07 |
|
– Coordination du travail gouvernemental |
396 497 766,28 |
7 410 945,72 |
|
– Présidence française de l’Union européenne |
35 987 065,37 |
6 544 704,63 |
|
– Protection des droits et libertés |
76 215 300,28 |
1 772 146,72 |
|
Écologie, développement et aménagement durables |
12 304 216 642,20 |
45 662 098,80 |
|
– Infrastructures et services de transports |
6 582 434 381,66 |
13 043 879,34 |
|
– Sécurité et circulation routières |
59 589 057,44 |
178 409,56 |
|
– Sécurité et affaires maritimes |
112 942 829,81 |
617 571,19 |
|
– Météorologie |
184 300 000,00 |
||
– Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
317 996 875,57 |
0,43 |
|
– Information géographique et cartographique |
80 304 012,48 |
129 151,52 |
|
– Prévention des risques |
245 273 176,54 |
775 537,46 |
|
– Énergie et après-mines |
838 919 733,08 |
205 414,92 |
|
– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire |
3 882 456 575,62 |
30 712 134,38 |
|
Économie |
2 163 659 332,29 |
7 292 449,71 |
|
– Développement des entreprises et de l’emploi |
1 297 200 580,84 |
4 062 789,16 |
|
– Tourisme |
65 700 424,09 |
0,91 |
|
– Statistiques et études économiques |
435 125 532,84 |
1,16 |
|
– Stratégie économique et fiscale |
365 632 794,52 |
3 229 658,48 |
|
Engagements financiers de l’État |
39 186 389 161,94 |
131 737 886,06 |
|
– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
37 625 022 255,82 |
42 238 501,18 |
|
– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
189 830 801,06 |
88 969 198,94 |
|
– Épargne |
1 162 500 000,00 |
||
– Majoration de rentes |
209 036 105,06 |
530 185,94 |
|
Enseignement scolaire |
59 958 319 197,93 |
43 482 550,07 |
|
– Enseignement scolaire public du premier degré |
17 244 087 575,29 |
|
3 667 527,71 |
– Enseignement scolaire public du second degré |
28 604 314 030,24 |
|
26 856 967,76 |
– Vie de l’élève |
3 717 074 342,99 |
|
5 120 207,01 |
– Enseignement privé du premier et du second degré |
7 004 835 622,65 |
|
855 293,35 |
– Soutien de la politique de l’éducation nationale |
2 109 279 821,11 |
|
1 903 527,89 |
– Enseignement technique agricole |
1 278 727 805,65 |
|
5 079 026,35 |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
11 373 191 879,05 |
37 945 039,95 |
|
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
8 293 408 497,79 |
23 919 780,21 |
|
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local : expérimentations Chorus |
15 892 472,92 |
0,08 |
|
– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
331 265 993,94 |
15 305,06 |
|
– Conduite et pilotage des politiques économique et financière |
885 115 204,03 |
0,97 |
|
– Facilitation et sécurisation des échanges |
1 532 899 819,71 |
1,29 |
|
– Fonction publique |
205 357 590,84 |
6 562 252,16 |
|
– Entretien des bâtiments de l’État |
109 252 299,82 |
7 447 700,18 |
|
Immigration, asile et intégration |
588 433 240,49 |
3 554 856,51 |
|
– Immigration et asile |
512 654 926,32 |
2 130 388,68 |
|
– Intégration et accès à la nationalité française |
75 778 314,17 |
|
1 424 467,83 |
Justice |
6 701 545 475,77 |
168 213,46 |
5 021 082,69 |
– Justice judiciaire |
2 865 180 795,85 |
|
3 121 203,15 |
– Administration pénitentiaire |
2 501 691 791,12 |
|
0,88 |
– Protection judiciaire de la jeunesse |
765 616 899,94 |
|
1,06 |
– Accès au droit et à la justice |
318 908 009,84 |
|
0,16 |
– Conduite et pilotage de la politique de la justice : expérimentations Chorus |
241 165 987,25 |
168 213,46 |
0,21 |
– Conduite et pilotage de la politique de la justice |
8 981 991,77 |
|
1 899 877,23 |
Médias |
1 168 261 658,70 |
3 000,30 |
|
– Presse |
435 716 547,94 |
0,06 |
|
– Soutien à l’expression radiophonique locale |
27 575 110,76 |
3 000,24 |
|
– Contribution au financement de l’audiovisuel public |
458 000 000,00 |
||
– Action audiovisuelle extérieure |
246 970 000,00 |
||
Outre-mer |
2 531 575 087,90 |
10 749 856,10 |
|
– Emploi outre-mer |
1 713 521 285,76 |
2 314 306,24 |
|
– Conditions de vie outre-mer |
818 053 802,14 |
8 435 549,86 |
|
Plan de relance de l’économie |
8 041 613 287,63 |
0,37 |
|
– Programme exceptionnel d’investissement public |
694 424 000,00 |
||
– Soutien exceptionnel à l’activité économique et à l’emploi |
5 432 158 802,63 |
0,37 |
|
– Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité |
1 915 030 485,00 |
||
Politique des territoires |
524 479 651,79 |
2 165 471,21 |
|
– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire |
420 672 215,32 |
618 173,68 |
|
– Interventions territoriales de l’État |
103 807 436,47 |
1 547 297,53 |
|
Pouvoirs publics |
1 017 200 374,00 |
5 525 346,00 |
|
– Présidence de la République |
112 335 666,00 |
|
|
– Assemblée nationale |
533 910 000,00 |
|
|
– Sénat |
322 282 151,11 |
|
5 411 848,89 |
– La Chaîne parlementaire |
30 735 000,00 |
|
|
– Indemnités des représentants français au Parlement européen |
4 745 974,00 |
|
|
– Conseil constitutionnel |
12 460 000,00 |
|
|
– Haute Cour |
|
|
|
– Cour de justice de la République |
731 582,89 |
|
113 497,11 |
Provisions |
13 899 000,00 |
||
– Provision relative aux rémunérations publiques |
|
|
|
– Dépenses accidentelles et imprévisibles |
|
|
13 899 000,00 |
Recherche et enseignement supérieur |
24 306 597 426,47 |
43 184 394,53 |
|
– Formations supérieures et recherche universitaire |
11 986 029 565,75 |
40 205 546,25 |
|
– Vie étudiante |
2 092 937 375,40 |
286 922,60 |
|
– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
4 994 169 839,52 |
0,48 |
|
– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
1 223 943 212,00 |
||
– Recherche spatiale |
1 270 016 621,00 |
||
– Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
295 392 692,97 |
0,03 |
|
– Recherche dans le domaine de l’énergie |
656 052 632,71 |
0,29 |
|
– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
832 496 142,10 |
681 937,90 |
|
– Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat |
308 841 394,30 |
0,70 |
|
– Recherche duale (civile et militaire) |
200 000 000,00 |
||
– Recherche culturelle et culture scientifique |
154 421 364,88 |
718 402,12 |
|
– Enseignement supérieur et recherche agricoles |
292 296 585,84 |
1 291 584,16 |
|
Régimes sociaux et de retraite |
5 087 578 732,36 |
25 952 267,64 |
|
– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres |
3 633 215 541,36 |
4 054 458,64 |
|
– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
739 999 228,00 |
|
772,00 |
– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers |
714 363 963,00 |
|
21 897 037,00 |
Relations avec les collectivités territoriales |
2 523 409 038,97 |
4 462 755,03 |
|
– Concours financiers aux communes et groupements de communes |
740 927 043,58 |
59,42 |
|
– Concours financiers aux départements |
488 792 355,60 |
4 298 574,40 |
|
– Concours financiers aux régions |
812 485 620,00 |
||
– Concours spécifiques et administration |
481 204 019,79 |
164 121,21 |
|
Remboursements et dégrèvements |
111 668 790 013,45 |
2 483 089 986,55 |
|
– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs) |
93 868 881 033,76 |
2 222 998 966,24 |
|
– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs) |
17 799 908 979,69 |
260 091 020,31 |
|
Santé |
1 954 862 160,10 |
100 391 717,90 |
|
– Prévention et sécurité sanitaire |
915 090 323,94 |
99 137 000,06 |
|
– Offre de soins et qualité du système de soins |
121 258 282,35 |
704,65 |
|
– Protection maladie |
918 513 553,81 |
1 254 013,19 |
|
Sécurité |
16 398 387 722,37 |
2 530 426,63 |
|
– Police nationale |
8 717 354 817,00 |
2 530 426,00 |
|
– Gendarmerie nationale |
7 681 032 905,37 |
0,63 |
|
Sécurité civile |
419 365 874,75 |
3 999 157,25 |
|
– Interventions des services opérationnels |
236 014 673,81 |
2 746 424,19 |
|
– Coordination des moyens de secours |
183 351 200,94 |
1 252 733,06 |
|
Solidarité, insertion et égalité des chances |
11 463 573 589,96 |
7 372 328,04 |
|
– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales |
441 167 020,09 |
733 648,91 |
|
– Actions en faveur des familles vulnérables |
910 725 526,90 |
0,10 |
|
– Handicap et dépendance |
9 036 208 588,55 |
24 125,45 |
|
– Égalité entre les hommes et les femmes |
26 524 075,54 |
384 432,46 |
|
– Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales |
1 048 948 378,88 |
6 230 121,12 |
|
Sport, jeunesse et vie associative |
825 513 650,48 |
4 530 728,52 |
|
– Sport |
246 668 315,11 |
0,89 |
|
– Jeunesse et vie associative |
144 919 459,78 |
|
207 694,22 |
– Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative |
433 925 875,59 |
|
4 323 033,41 |
Travail et emploi |
13 650 698 780,14 |
7 745 670,86 |
|
– Accès et retour à l’emploi |
6 182 063 901,84 |
0,16 |
|
– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi |
6 597 183 359,21 |
0,79 |
|
– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail |
84 457 834,47 |
3 661 300,53 |
|
– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail |
786 993 684,62 |
4 084 369,38 |
|
Ville et logement |
8 236 389 344,86 |
13 764 111,14 |
|
– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables |
1 295 230 365,89 |
|
1 513 196,11 |
– Politique de la ville |
788 398 417,47 |
|
2 457 823,53 |
– Aide à l’accès au logement |
5 504 060 624,00 |
|
|
– Développement et amélioration de l’offre de logement |
648 699 937,50 |
|
9 793 091,50 |
TOTAL |
402 593 656 016,82 |
168 213,46 |
3 105 054 992,64 |
– (Adopté.)
Article 5
I. – Le montant des autorisations d’engagement engagées sur les budgets annexes au titre de l’année 2009 est arrêté par missions et programmes aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce tableau.
(En euros) |
|||
Désignation des budgets annexes |
Autorisations d’engagement engagées |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires |
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées |
||
Contrôle et exploitation aériens |
1 836 359 392,61 |
67 718 190,92 |
|
– Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 228 556 858,53 |
38 275 562,47 |
|
– Navigation aérienne |
457 673 222,06 |
20 402 584,94 |
|
– Surveillance et certification |
79 796 968,00 |
5 868 885,04 |
|
– Formation aéronautique |
70 332 344,02 |
3 171 158,47 |
|
Publications officielles et information administrative |
177 638 766,95 |
17 478 381,05 |
|
– Accès au droit, publications officielles et annonces légales |
144 553 462,95 |
5 085 395,05 |
|
– Édition publique et information administrative |
33 085 304,00 |
12 392 986,00 |
|
TOTAL |
2 013 998 159,56 |
85 196 571,97 |
II. – Les résultats relatifs aux budgets annexes au titre de l’année 2009 sont arrêtés par missions et programmes aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les crédits de paiement ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce tableau.
(En euros) |
||||
Désignation des budgets annexes |
Dépenses |
Recettes |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Ouvertures de crédits complémentaires |
Annulations des crédits non consommés et non reportés |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
1 963 419 275,74 |
1 963 419 275,74 |
111 034 182,89 |
34 058 868,19 |
– Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 228 889 639,19 |
|
|
19 496 429,81 |
– Navigation aérienne |
474 970 309,15 |
|
|
1 950 592,85 |
– Surveillance et certification |
75 564 619,55 |
|
|
10 001 782,49 |
– Formation aéronautique |
72 960 524,96 |
|
|
2 610 063,04 |
Augmentation du fonds de roulement (ligne d’équilibre) |
111 034 182,89 |
|
111 034 182,89 |
|
Publications officielles et information administrative |
208 174 927,59 |
208 174 927,59 |
38 890 665,74 |
24 505 905,87 |
– Accès au droit, publications officielles et annonces légales |
135 257 897,91 |
|
|
13 590 980,09 |
– Édition publique et information administrative |
34 026 363,94 |
|
|
10 914 925,78 |
Augmentation du fonds de roulement (ligne d’équilibre) |
38 890 665,74 |
|
38 890 665,74 |
|
TOTAL |
2 171 594 203,33 |
2 171 594 203,33 |
149 924 848,63 |
58 564 774,06 |
– (Adopté.)
Article 6
I. – Le montant des autorisations d’engagement engagées sur les comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2010 est arrêté, au 31 décembre 2009, par missions et programmes aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce tableau.
(En euros) |
|||
Désignation des comptes spéciaux |
Autorisations d’engagement engagées |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires |
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées |
||
COMPTES À CRÉDITS |
|
|
|
Comptes d’affectation spéciale |
|
|
|
Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route |
223 438 212,19 |
2,81 |
|
– Radars |
212 878 194,75 |
1,25 |
|
– Fichier national du permis de conduire |
10 560 017,44 |
1,56 |
|
Développement agricole et rural |
116 854 115,51 |
2 943 221,49 |
|
– Développement et transfert en agriculture |
48 788 651,75 |
1 351 029,25 |
|
– Recherche appliquée et innovation en agriculture |
68 065 463,76 |
1 592 192,24 |
|
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
475 168 269,68 |
582 660 454,32 |
|
– Contribution au désendettement de l’État |
32 227 774,72 |
16 577 221,28 |
|
– Contributions aux dépenses immobilières |
442 940 494,96 |
566 083 233,04 |
|
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien |
|||
– Désendettement de l’État |
|
||
– Optimisation de l’usage du spectre hertzien |
|
||
Participations financières de l’État |
1 796 844 062,96 |
544 811 360,04 |
|
– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
1 796 844 062,96 |
382 123 063,04 |
|
– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
|
162 688 297,00 |
|
Pensions |
49 403 772 528,32 |
42 926 997,68 |
|
– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité |
44 937 016 352,55 |
5 549,45 |
|
– Ouvriers des établissements industriels de l’État |
1 785 252 401,47 |
19 979 860,53 |
|
– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
2 681 503 774,30 |
22 941 587,70 |
|
Total des comptes d’affectation spéciale |
52 016 077 188,66 |
1 173 342 036,34 |
|
Comptes de concours financiers |
|
|
|
Accords monétaires internationaux |
|||
– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine |
|||
– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale |
|||
– Relations avec l’Union des Comores |
|||
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
7 319 594 607,27 |
912 721 392,73 |
|
– Avances à l’Agence unique de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
6 587 278 607,27 |
|
912 721 392,73 |
– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
450 500 000,00 |
|
|
– Avances à des services de l’État |
281 816 000,00 |
|
|
Avances à l’audiovisuel public |
2 997 645 613,00 |
||
– France Télévisions |
2 039 141 200,00 |
|
|
– ARTE-France |
232 348 970,00 |
|
|
– Radio France |
559 694 843,00 |
|
|
– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure |
65 288 200,00 |
|
|
– Institut national de l’audiovisuel |
86 172 400,00 |
|
|
– Passage à la télévision tout numérique |
15 000 000,00 |
|
|
Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres |
680 937 597,37 |
47 062 402,63 |
|
– Avances au titre du paiement de l’aide à l’acquisition de véhicules propres |
694 192 190,96 |
|
28 807 809,04 |
– Avances au titre du paiement de la majoration de l’aide à l’acquisition de véhicules propres en cas de destruction simultanée d’un véhicule de plus de quinze ans |
-13 254 593,59 |
|
18 254 593,59 |
Avances aux collectivités territoriales |
86 254 828 656,00 |
566 971 344,00 |
|
– Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
|
|
6 800 000,00 |
– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
86 254 828 656,00 |
|
560 171 344,00 |
Prêts à des États étrangers |
3 091 892 979,06 |
32 375 203,68 |
28 962 224,62 |
– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures |
718 675 203,68 |
18 675 203,68 |
|
– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France |
1 989 517 775,38 |
|
28 962 224,62 |
– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers |
383 700 000,00 |
13 700 000,00 |
|
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
6 302 675 157,75 |
183 359,25 |
|
– Prêts et avances à des particuliers ou à des associations |
616 641,08 |
|
183 358,92 |
– Prêts pour le développement économique et social |
52 058 516,67 |
|
0,33 |
– Prêts à la filière automobile |
6 250 000 000,00 |
|
|
Total des comptes de concours financiers |
106 647 574 610,45 |
32 375 203,68 |
1 555 900 723,23 |
TOTAL COMPTES À CRÉDITS |
158 663 651 799,11 |
32 375 203,68 |
2 729 242 759,57 |
II. – Les résultats des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2010 sont arrêtés, au 31 décembre 2009, par missions et programmes aux sommes mentionnées dans les tableaux ci-après. Les crédits de paiement ouverts et les découverts autorisés sont modifiés comme indiqué dans ces tableaux.
(En euros) |
||||
Désignation des comptes spéciaux |
Opérations de l’année |
Ajustements de la loi de règlement |
||
Dépenses |
Recettes |
Ouvertures de crédits complémentaires |
Annulations de crédits non consommés et non reportés |
|
A. – COMPTES À CRÉDITS |
|
|
|
|
Comptes d’affectation spéciale |
|
|
|
|
Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route |
180 145 306,35 |
212 050 000,00 |
0,65 |
|
– Radars |
168 518 948,89 |
|
0,11 |
|
– Fichier national du permis de conduire |
11 626 357,46 |
|
0,54 |
|
Développement agricole et rural |
112 344 583,22 |
110 556 778,14 |
2 943 221,78 |
|
– Développement et transfert en agriculture |
49 191 437,56 |
|
1 351 029,44 |
|
– Recherche appliquée et innovation en agriculture |
63 153 145,66 |
|
1 592 192,34 |
|
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
900 529 499,38 |
615 531 723,86 |
225 294 428,62 |
|
– Contribution au désendettement de l’État |
32 227 774,72 |
|
16 577 221,28 |
|
– Contributions aux dépenses immobilières |
868 301 724,66 |
|
208 717 207,34 |
|
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien |
||||
– Désendettement de l’État |
|
|
|
|
– Optimisation de l’usage du spectre hertzien |
|
|
|
|
Participations financières de l’État |
1 797 815 322,96 |
3 455 188 640,31 |
544 811 360,04 |
|
– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
1 797 815 322,96 |
|
382 123 063,04 |
|
– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
|
|
|
162 688 297,00 |
Pensions |
49 403 794 510,62 |
49 749 332 214,46 |
5 278,58 |
43 085 297,96 |
– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité |
44 937 016 352,55 |
|
5 278,58 |
0,03 |
– Ouvriers des établissements industriels de l’État |
1 785 252 401,47 |
|
|
19 979 860,53 |
– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
2 681 525 756,60 |
|
|
23 105 437,40 |
Total des comptes d’affectation spéciale |
52 394 629 222,53 |
54 142 659 356,77 |
5 278,58 |
816 134 309,05 |
Comptes de concours financiers |
|
|
|
|
Accords monétaires internationaux |
||||
– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine |
||||
– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale |
||||
– Relations avec l’Union des Comores |
||||
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
7 319 594 607,27 |
6 852 798 085,71 |
912 721 392,73 |
|
– Avances à l’Agence unique de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
6 587 278 607,27 |
|
|
912 721 392,73 |
– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
450 500 000,00 |
|
|
|
– Avances à des services de l’État |
281 816 000,00 |
|
|
|
Avances à l’audiovisuel public |
2 997 645 613,00 |
2 997 739 578,48 |
||
– France Télévisions |
2 039 141 200,00 |
|
|
|
– ARTE-France |
232 348 970,00 |
|
|
|
– Radio France |
559 694 843,00 |
|
|
|
– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure |
65 288 200,00 |
|
|
|
– Institut national de l’audiovisuel |
86 172 400,00 |
|
|
|
– Passage à la télévision tout numérique |
15 000 000,00 |
|
|
|
Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres |
724 564 728,25 |
199 528 505,40 |
3 435 271,75 |
|
– Avances au titre du paiement de l’aide à l’acquisition de véhicules propres |
721 701 375,97 |
|
1 298 624,03 |
|
– Avances au titre du paiement de la majoration de l’aide à l’acquisition de véhicules propres en cas de destruction simultanée d’un véhicule de plus de quinze ans |
2 863 352,28 |
|
2 136 647,72 |
|
Avances aux collectivités territoriales |
86 332 992 697,98 |
84 879 033 972,50 |
488 807 302,02 |
|
– Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
|
|
6 800 000,00 |
|
– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
86 332 992 697,98 |
|
482 007 302,02 |
|
Prêts à des États étrangers |
2 300 710 652,37 |
745 877 467,73 |
56 769 347,63 |
|
– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures |
147 349 390,67 |
|
32 650 609,33 |
|
– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France |
1 994 361 261,70 |
|
24 118 738,30 |
|
– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers |
159 000 000,00 |
|
|
|
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
6 293 976 059,59 |
4 668 454,96 |
182 457,41 |
|
– Prêts et avances à des particuliers ou à des associations |
617 542,92 |
|
182 457,08 |
|
– Prêts pour le développement économique et social |
43 358 516,67 |
|
0,33 |
|
– Prêts à la filière automobile |
6 250 000 000,00 |
|
|
|
Total des comptes de concours financiers |
105 969 484 358,46 |
95 679 646 064,78 |
1 461 915 771,54 |
|
TOTAL COMPTES À CRÉDITS |
158 364 113 580,99 |
149 822 305 421,55 |
5 278,58 |
2 278 050 080,59 |
(En euros) |
|||
Désignation des comptes spéciaux |
Opérations de l’année |
Ajustements de la loi de règlement |
|
Dépenses |
Recettes |
Majorations du découvert |
|
B. – COMPTES À DÉCOUVERT |
|
|
|
Comptes de commerce |
|
|
|
– Approvisionnement des armées en produits pétroliers |
532 971 414,39 |
552 098 074,55 |
|
– Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire |
94 647 688,60 |
96 133 361,23 |
|
– Couverture des risques financiers de l’État |
1 589 770 420,09 |
1 589 770 420,09 |
|
– Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État |
496 833 951,13 |
663 574 105,61 |
|
– Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État |
41 950 867 280,18 |
42 091 208 028,32 |
|
– Gestion des actifs carbones de l’État |
|
|
|
– Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes |
9 158 750,00 |
9 139 931,18 |
|
– Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses |
2 813,06 |
974 107,46 |
|
– Opérations commerciales des domaines |
96 834 493,33 |
113 061 880,55 |
|
– Opérations industrielles et commerciales des directions départementales et régionales de l’Équipement |
829 917 140,61 |
842 243 686,49 |
|
– Régie industrielle des établissements pénitentiaires |
23 292 309,41 |
24 664 375,60 |
|
Total des comptes de commerce |
45 624 296 260,80 |
45 982 867 971,08 |
|
Comptes d’opérations monétaires |
|
|
|
– Émission des monnaies métalliques |
194 779 328,36 |
260 954 895,57 |
|
– Opérations avec le Fonds monétaire international |
10 806 980 706,30 |
11 323 786 337,69 |
9 058 435 752,65 |
– Pertes et bénéfices de change |
43 110 452,76 |
37 303 769,82 |
|
Total des comptes d’opérations monétaires |
11 044 870 487,42 |
11 622 045 003,08 |
9 058 435 752,65 |
TOTAL COMPTES À DÉCOUVERT |
56 669 166 748,22 |
57 604 912 974,16 |
9 058 435 752,65 |
III. – Les soldes des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2010 sont arrêtés, au 31 décembre 2009, aux sommes ci-après :
(En euros) |
||
Désignation des comptes spéciaux |
Soldes au 31 décembre 2009 |
|
Débiteurs |
Créditeurs |
|
A. – COMPTES À CRÉDITS |
||
Comptes d’affectation spéciale |
||
Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route |
|
155 184 420,30 |
Développement agricole et rural |
|
53 551 895,26 |
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
|
643 654 595,73 |
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien |
|
|
Participations financières de l’État |
|
5 869 759 359,53 |
Pensions |
|
1 146 203 583,79 |
Comptes de concours financiers |
||
Accords monétaires internationaux |
|
|
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
1 001 993 926,04 |
|
Avances à l’audiovisuel public |
|
2 526 724,68 |
Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres |
739 035 175,95 |
|
Avances aux collectivités territoriales |
14 541 663 452,14 |
|
Prêts à des États étrangers |
13 736 868 655,64 |
|
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
6 497 966 025,06 |
|
Total des comptes à crédits |
36 517 527 234,83 |
7 870 880 579,29 |
B. COMPTES À DÉCOUVERT |
||
Comptes de commerce |
||
Approvisionnement des armées en produits pétroliers |
|
10 738 737,14 |
Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire |
6 389 475,66 |
|
Couverture des risques financiers de l’État |
0,01 |
|
Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État |
|
405 522 794,02 |
Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État |
|
2 252 135 054,89 |
Gestion des actifs carbones de l’État |
|
|
Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes |
|
65 738 944,65 |
Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses |
|
17 465 796,94 |
Opérations commerciales des domaines |
|
149 189 342,92 |
Opérations industrielles et commerciales des directions départementales et régionales de l’Équipement |
|
52 356 723,08 |
Régie industrielle des établissements pénitentiaires |
|
19 762 753,29 |
Comptes d’opérations monétaires |
||
Émission des monnaies métalliques |
|
2 477 703 942,41 |
Opérations avec le Fonds monétaire international |
9 058 435 752,65 |
|
Pertes et bénéfices de change |
5 806 682,94 |
|
Total des comptes à découvert |
9 070 631 911,26 |
5 450 614 089,34 |
TOTAUX |
45 588 159 146,09 |
13 321 494 668,63 |
IV. – Les soldes arrêtés au III sont reportés à la gestion 2010 à l’exception :
– d’un solde débiteur global de 314 997 510,60 € concernant les comptes de concours financiers suivants : « Prêts à des États étrangers » (259 949 031,23 €), « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics » (32 500 000 €), « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » (22 548 479,37 €) ;
– d’un solde débiteur de 7 251 031,75 € relatif au compte de commerce « Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes» ;
– d’un solde débiteur de 5 806 682,94 € afférent au compte d’opérations monétaires « Pertes et bénéfices de change ». – (Adopté.)
Article 7
Après le 14° du I de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, sont insérés des 15° et 16° ainsi rédigés :
« 15° Défense et sécurité nationale ;
« 16° Justice des mineurs. » – (Adopté.)
Article 8 (nouveau)
Après l’article L. 351-10 du code des juridictions financières, il est inséré un article L. 351-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 351-10-1. – Les membres du Conseil des prélèvements obligatoires et les rapporteurs désignés en application de l’article L. 351-8 sont habilités à se faire communiquer tous documents, de quelque nature que ce soit, pour réaliser les études prévues à l’article L. 351-3.
« Les agents des services, établissements, institutions et organismes mentionnés à l’article L. 351-10 sont déliés du secret professionnel à l’égard des membres du Conseil des prélèvements obligatoires et des rapporteurs désignés en application de l’article L. 351-8, à l’occasion des études que ceux-ci réalisent en application de l’article L. 351-3.
« Pour les besoins des mêmes études, les membres du Conseil des prélèvements obligatoires et les rapporteurs désignés en application de l’article L. 351-8 peuvent exercer directement le droit de communication que les agents des services, établissements, institutions et organismes mentionnés à l’article L. 351-10 tiennent de la loi.
« Le fait de faire obstacle, de quelque façon que ce soit, à l’exercice des pouvoirs attribués par le présent article aux membres du Conseil des prélèvements obligatoires et aux rapporteurs désignés en application de l’article L. 351-8 est puni de 15 000 € d’amende. Le président du Conseil des prélèvements obligatoires peut saisir le parquet près la juridiction compétente en vue de déclencher l’action publique. » – (Adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Veillez attentivement, mes chers collègues, à ce que personne ne dérobe vos bulletins ! (Sourires.)
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 260 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 182 |
Contre | 153 |
Le Sénat a adopté.
Le projet de loi est donc définitivement adopté.
La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Je remercie la majorité de la Haute Assemblée d’avoir adopté le projet de loi.
Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance de cinq minutes.
M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le ministre.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
8
Souhaits de bienvenue à M. Leonel Fernandez Reyna, Président de la République dominicaine
M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de saluer la présence dans notre tribune officielle de M. Leonel Fernandez Reyna, Président de la République dominicaine. (Mme et M. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
Nous sommes très honorés de sa présence parmi nous, qui témoigne de l’intérêt qu’il porte à nos travaux, aux réformes institutionnelles en cours, ainsi qu’à l’entretien de relations toujours plus étroites entre nos deux pays et nos deux peuples.
J’ai le plaisir de souligner, mes chers collègues, que le parlement de Saint-Domingue est un parlement bicaméral et que les questions de décentralisation sont inscrites à l’agenda politique.
Je forme des vœux pour que cette visite contribue à renforcer encore les nécessaires liens politiques et économiques entre nos deux pays et entre nos deux cultures.
Nous lui souhaitons ainsi qu’à son épouse une très cordiale bienvenue et espérons qu’il gardera de ce séjour un excellent souvenir : il s’agit d’ores et déjà, monsieur le Président de la République, d’une invitation à revenir. (Applaudissements.)
9
Orientations des finances publiques pour 2011
Débat sur une déclaration du Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances publiques pour 2011, suivie d’un débat et d’un vote par scrutin public ordinaire sur cette déclaration.
Je vous précise que nous allons vivre la première application de l’article 50-1 de la Constitution, tel qu’il résulte de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Chacun appréciera ultérieurement le caractère historique de ce moment.
La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les sénateurs, le débat sur les orientations des finances publiques qui s’ouvre aujourd’hui dans votre assemblée est un nouveau jalon dans la conduite des finances publiques.
La crise économique a eu des répercussions violentes sur l’économie mondiale. Au-delà, elle a ravivé pour nombre de pays, dont le nôtre, cet impératif : l’indispensable maîtrise de nos comptes publics.
L’histoire de nos finances publiques sera, c’est indiscutable, marquée par le budget de 2011. Ce projet de loi de finances va inverser la tendance des années d’augmentation du budget de l’État. Les moyens de l’État, hormis la dette et les pensions, seront réduits en termes réels puisqu’ils seront stabilisés en valeur : la prévision d’inflation étant de 1,5 % en 2011, la baisse réelle du pouvoir d’achat de l’État sera de la même valeur dès la première année.
Un budget, au fond, ce sont des choix et, comme le disait André Gide, « choisir, c’est renoncer ». Ma volonté est de bâtir un cadre budgétaire équitable : nous ne renonçons pas à protéger les plus fragiles, nous ne renonçons pas à notre modèle social, mais nous renonçons au fait de vivre au-dessus de nos moyens.
Plus largement, je souhaite sincèrement un changement des mentalités. Le président Arthuis, à propos du projet de loi de règlement, a eu raison d’indiquer que cette évolution des mentalités devait d’abord concerner les ministres eux-mêmes. Les ministres auront la responsabilité de décliner leur « lettre plafond » mais, pour la première fois, à partir de l’année prochaine, il ne sera plus question pour eux de négocier une augmentation de leur enveloppe budgétaire. Un bon budget n’est pas un budget en augmentation, c’est un budget qui répond aux missions de service public qui lui sont assignées, dans un contexte d’effort général et donc partagé par tous.
On me demande de qualifier notre politique de « politique de rigueur ». Chacun l’appellera comme il voudra, mais nous assumons pleinement l’idée d’appliquer une politique rigoureuse, dans le sens de méthodique, précise, exigeante. Je préfère pour ma part qualifier le projet de budget et notre politique en matière de finances publiques de « responsables ».
Être rigoureux, c’est évidemment être attentif à la protection des plus fragiles, tout en respectant l’objectif intangible qui est le nôtre d’un déficit public ramené de 8 % à 6 % du PIB.
Pour en finir avec le débat qui anime les médias autour du thème de la rigueur, je rappellerai que celui-ci est connoté politiquement dans notre pays : cela nous ramène au début des années quatre-vingt, au moment où, sous l’impulsion de l’Union de la gauche, la retraite à soixante ans, une augmentation considérable des traitements ont débouché sur un plan de rigueur avec une baisse des salaires, un blocage des prix, une inflation à deux chiffres et trois dévaluations successives de notre monnaie !
Si l’on parle de rigueur à propos du plan français, que dire de celui de la Grèce, de l’Espagne ? Comment doit-on comprendre ce qui se passe en Italie ? Quel regard devons-nous porter sur la Grande-Bretagne, qui a décidé à la fois une diminution de 40 % des crédits alloués aux ministères, une baisse des traitements des fonctionnaires et une augmentation de la TVA de plus de deux points ?
Si les mots ont un sens, celui de responsable est le plus pertinent pour le plan français et pour les orientations des finances publiques pour l’année prochaine que j’ai l’honneur de vous présenter cet après-midi, au côté de Christine Lagarde.
Comme c’est l’usage, je commencerai par un rapide bilan de l’année 2010, année pour laquelle nous tiendrons les objectifs fixés concernant les finances publiques.
Pour accompagner la reprise, nous avons mis en œuvre les dispositions du plan de relance, puis leur arrêt progressif et, simultanément, le programme d’investissement d’avenir prévu par la première loi de finances rectificative pour 2010.
Pour être fidèles à nos objectifs de finances publiques, nous devons respecter trois engagements : il s’agit tout d’abord de respecter notre objectif d’un déficit public de 8 % du produit intérieur brut ; il s’agit ensuite de contenir la dépense de l’État au niveau prévu par la loi de finances, c’est-à-dire le « zéro volume » ; il s’agit enfin de respecter l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, tel qu’il a été voté par le Parlement, c’est-à-dire une croissance de 3 %.
Dans ces trois domaines, nous sommes fidèles à nos objectifs au vu de la situation actuelle des recettes et des dépenses. Cela ne signifie pas que nous pouvons relâcher notre attention : je resterai bien sûr très vigilant, ainsi que l’ensemble du Gouvernement, pour que, d’ici à la fin de l’année, nous soyons en mesure de respecter nos objectifs, en particulier le plus important d’entre eux, celui qui concerne le niveau du déficit public, limité à 8 % de notre richesse nationale cette année.
Il s’agit d’un élément indispensable pour nourrir la confiance des Français dans l’avenir, celle de nos partenaires européens et celle des investisseurs qui financent notre dette publique.
Pour 2011, notre stratégie est claire : elle vise à réduire les déficits publics.
Sur le long terme, la réforme des retraites que nous souhaitons réaliser vise déjà à une réduction des déficits. Cette réforme, permettez-moi de le rappeler, va engendrer un gain de 1,2 point sur le déficit structurel à l’horizon 2020 et d’environ 10 points de la richesse nationale sur la dette publique au même horizon.
Pour 2011-2013, c’est avant tout par la maîtrise de la dépense et le rattrapage des recettes fiscales que nous parviendrons à ramener le déficit à 3 % de notre richesse nationale.
Notre programme de stabilité prévoit une réduction du déficit public d’environ cinq points de PIB sur trois ans, soit environ 100 milliards d’euros.
J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’expliquer devant vous pourquoi nous choisissons de réduire les dépenses. Notre pays atteint déjà l’un des niveaux de prélèvements obligatoires les plus élevés au monde. La hausse généralisée des impôts nuirait incontestablement à la compétitivité de notre économie et compromettrait en profondeur la reprise.
Je vous donnerai tout d’abord quelques précisions sur la première marche de cette trajectoire, à savoir le passage à un déficit de 6 % dès l’année prochaine.
Je le répète – la répétition est probablement l’un des meilleurs instruments de la pédagogie –, cet objectif, au cœur de notre stratégie, est intangible.
Pour ramener le déficit de 8 % du PIB à 6 % dès l’année prochaine, il convient de réduire le déficit public de l’ordre de 40 milliards d’euros. Cela ne signifie pas que les dépenses doivent diminuer de 40 milliards d’euros sur une année : le solde correspond à la différence entre les recettes et les dépenses publiques. Ce qui compte avant tout, c’est que les recettes progressent plus vite que les dépenses pour que le déficit public puisse diminuer dans la durée.
Trois leviers vont nous permettre de respecter cette trajectoire.
Une partie de l’effort, représentant environ 15 milliards d’euros, correspond à la non-reconduction des mesures de 2010 qui n’avaient pas vocation à être pérennes, comme les mesures de relance et le surcoût de la taxe professionnelle.
En outre, 11 milliards d’euros proviendront du rattrapage des recettes fiscales après la crise, en lien avec le retour de la croissance.
Le reste, soit 14 milliards d’euros, proviendra d’un effort partagé par l’ensemble des acteurs de la dépense publique.
Le gel en valeur des dépenses de l’État rapportera environ 7 milliards d’euros : près de 1 milliard d’euros seront liés au gel des concours de l’État aux collectivités locales ; 1 milliard d’euros seront économisés sur le fonctionnement de l’État et des opérateurs ; la maîtrise de la masse salariale, notamment le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, permettra d’économiser 1 milliard d’euros supplémentaires ; enfin, un effort d’environ 4 milliards d’euros sera réalisé sur les dépenses d’intervention de l’État, conformément à la lettre de cadrage que le Premier ministre a adressée aux membres du Gouvernement.
La sphère sociale contribuera pour l’autre moitié à l’effort de redressement, soit 7 milliards d’euros : la réforme des retraites rapportera 4,5 milliards d’euros ; la reprise de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, permettra de contribuer à hauteur de 3,2 milliards d’euros à l’effort de consolidation ; enfin, la fixation de progression de l’ONDAM à 2,9 % devrait permettre de dégager environ 2,2 milliards d’euros d’économies.
Vous aurez remarqué que le total des mesures que j’annonce pour la sphère sociale est de l’ordre de 10 milliards d’euros. En effet, si l’on ne fait rien, les dépenses sociales évoluent selon une dynamique supérieure à la croissance de notre richesse nationale. Il faut donc un total supérieur à 7 milliards d’euros pour contrecarrer cette dynamique.
Nous souhaitons par ailleurs agir sans délai pour ce qui est des dépenses fiscales et des niches sociales, tout en inscrivant notre action dans la durée. La réduction des niches ne souffre pas de délai : nous entendons la mettre en œuvre dès les textes financiers de l’automne 2010.
J’ai évoqué un objectif de 8,5 milliards à 10 milliards d’euros de réduction des niches pour 2011 et 2012 : nous le respecterons. C’est un objectif très ambitieux ; c’est même du jamais vu ! Jamais on n’aura fixé une telle ambition au moment d’un débat d’orientation budgétaire – désormais « d’orientation des finances publiques » – en matière de réduction des niches fiscales et sociales.
Je sais pouvoir compter sur le concours du Parlement, en particulier de la Haute Assemblée, pour l’atteindre. Je prends régulièrement connaissances des réflexions de la commission des finances du Sénat et de son rapporteur général, très attachés à ce sujet. Je ne doute pas de la qualité vertueuse du débat qui nous animera à l’automne autour de la question des niches fiscales et sociales.
Il est évidemment encore trop tôt pour préciser quelles niches seront supprimées. La décision viendra au cours de l’été, conformément au calendrier habituel de la loi de finances.
Nous aurons également recours au « rabot ». Ne me demandez pas le nom du prix Nobel qui nous a conseillé cette mesure… Celle-ci n’est peut-être pas la plus spectaculaire sur le plan intellectuel, mais c’est celle qui nous permettra le plus facilement d’atteindre notre objectif ; c’est aussi celle qui apparaîtra, in fine, comme la plus juste parce que l’effort sera partagé par tous.
Naturellement, le coup de rabot sera plus ou moins appuyé selon les niches, ce qui nous permettra de protéger, à travers le levier fiscal, des politiques favorisant soit l’emploi, soit la protection des publics les plus fragiles : les personnes âgées ou handicapées, les bénéficiaires de minima sociaux, du RSA, etc.
Au-delà des choix budgétaires immédiats destinés à maîtriser une fois pour toutes les niches fiscales qui grèvent les recettes de l’État et de la sécurité sociale, seules deux voies sont possibles : la première est leur évaluation systématique, mission que Christine Lagarde et moi-même avons confiée à un comité présidé par Henri Guillaume, inspecteur général des finances ; la deuxième, que vous connaissez puisqu’elle a été évoquée lors de la conférence sur le déficit du 20 mai dernier, menée sous l’autorité du Président de la République, consiste à mettre en œuvre sans attendre – enfin ! oserai-je dire – le monopole de la loi de finances sur les dépenses fiscales et de la loi de financement de la sécurité sociale sur les dépenses de nature sociale, ainsi que le prévoit une circulaire du Premier ministre en date du 4 juin dernier.
L’effort de maîtrise de la dépense doit également concerner tous les acteurs de la dépense publique.
S’agissant tout d’abord de l’État, dans le cadre du budget pluriannuel, nous avons décidé d’infléchir réellement la croissance de la dépense, objectif là encore sans précédent. Les dépenses de l’État seront stabilisées en valeur pour les trois prochaines années, hors pensions et charges de la dette.
Avec l’enracinement de la reprise économique et la remontée inéluctable des taux d’intérêt, le poids de la « dette de crise » accumulée au cours de ces deux dernières années se fera sentir. Nous nous attendons à une progression de la charge de la dette d’environ 13 milliards d’euros entre le montant inscrit en loi de finances initiale en 2010 et le chiffre de 2013. Cette donnée conjuguée à la hausse des pensions des fonctionnaires de l’État ne nous laisse d’autres choix que de stabiliser en valeur les autres dépenses.
J’y insiste, une telle inflexion de la dépense n’a jamais été réalisée en France. Pour la construction des budgets des dernières années, notamment entre 2006 et 2010, mes prédécesseurs ont disposé en moyenne de près de 2 milliards d’euros à allouer à la croissance des dépenses hors dette et pensions. Pour les budgets des années 2011 à 2013, le chiffre correspondant sera simplement de zéro. Hors dette et pensions, en 2010, la dépense de l’État s’élève à 274,8 milliards d’euros. Ce montant restera identique jusqu’en 2013. C’est le signe que le Gouvernement a fait des choix ne remettant pas en cause la priorité intangible qu’est le redressement des finances publiques.
Cet effort inédit doit naturellement être partagé.
Premièrement, les concours de l’État destinés aux collectivités locales, hors le fonds de compensation pour la TVA, seront stabilisés en valeur.
Deuxièmement, l’effort doit affecter aussi notre contribution au budget de l’Union européenne. Les États européens mènent des politiques courageuses de maîtrise de leurs dépenses ; ils ont organisé eux-mêmes un mécanisme d’aide solidaire à l’égard des pays en difficulté, notamment la Grèce, et en assument les conséquences financières. Dans ce contexte, il ne me semble pas acceptable que la Commission demande une hausse de son budget de plus de 6 % pour 2011. La France, aux côtés des autres États membres soucieux de modération budgétaire, réaffirmera ce point de vue à Bruxelles. Les efforts demandés à nos concitoyens doivent permettre de réduire les déficits et non de financer une dépense européenne croissante, et dans de telles proportions.
Enfin, l’effort est partagé entre les différents ministères. Monsieur le président Arthuis, je tiens à vous rassurer : la main n’a pas tremblé ! Lors de la détermination de chacun des plafonds, nous sommes allés aussi loin que possible afin de maîtriser la dépense. Ainsi, près de la moitié des trente missions que comporte le budget général verront leurs crédits, hors pensions, baisser en valeur dès l’année prochaine.
Même les politiques publiques que nous avons voulu préserver autant que faire se peut feront l’objet d’efforts notables. Exiger un « zéro valeur » strict dans les secteurs de l’aide publique au développement ou de la culture revient à manifester notre souci de préserver ces domaines et, compte tenu des engagements pris, à leur demander de réels efforts d’économies pour respecter l’enveloppe qui leur est allouée.
Par ailleurs, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite sera appliqué sans faiblesse. Un seul ministère continuera à créer des emplois : celui de la justice. En raison de la priorité donnée au domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, le ministère chargé de ce secteur sera exonéré de suppression d’emplois, mais ses crédits progresseront nettement mois vite que ces dernières années.
Ainsi, même les ministères dont les crédits enregistrent une progression participeront à l’effort d’une façon significative. Par exemple, sur la période 2011-2013, les crédits du ministère de la défense enregistreront un écart de 1,5 milliard d’euros par rapport à ce qu’a prévu la loi de programmation militaire. Nous assumons pleinement ce choix, compte tenu du contexte budgétaire actuel, différent de celui de l’été 2008, moment où ont eu lieu les arbitrages concernant la programmation militaire : la crise est passée par là ! Les chiffres annoncés pour 2011-2013 montrent bien que la défense sera mise à contribution, à travers la réalisation décalée de certains programmes.
Le « zéro valeur » ne consiste donc pas simplement à réaliser quelques économies emblématiques sur des budgets tels que l’emploi et le logement, mais à demander un effort à tous et à chaque instant.
Pour y parvenir sur la période 2011-2013, nous avons fixé des règles transversales. Je me permets, mesdames messieurs les sénateurs, de vous renvoyer au document qui vous a été remis aujourd'hui et qui présente de façon détaillée le budget triennal et les économies qu’il comporte. C’est une première : au-delà des plafonds de dépenses par mission, le Gouvernement n’a jamais présenté au moment du débat sur les orientations des finances publiques, je le disais à l’instant, une vision aussi précise et aussi documentée du futur budget et de sa stratégie économique. Par conséquent, j’insisterai seulement sur les principaux points, liés à l’application des règles transversales précitées.
La première mesure est le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, qui a déjà permis de supprimer 100 000 emplois depuis le début de la législature. Ce sont encore environ 100 000 suppressions d’emplois supplémentaires interviendront jusqu’en 2013, parallèlement à des réformes d’implantations territoriales, de procédures et des fonctions supports.
En 2012, l’État aura ainsi retrouvé le nombre d’agents qu’il employait début des années quatre-vingt-dix. Or personne ne peut affirmer sérieusement que, à cette époque, la France était sous-administrée !
Notre politique de réduction du nombre de fonctionnaires vise aussi à mieux les rémunérer puisque, au cours des trois prochaines années, 50 % des économies réalisées par le non-remplacement d’un agent sur deux partant à la retraire continueront à leur être redistribuées sous forme de bonification indiciaire ou d’avantage budgétaire. En effet, l’État étant le premier employeur de notre pays, il doit progressivement devenir le meilleur employeur : ses agents doivent participer pleinement à la définition des modalités d’accomplissement des missions de service public dont ils ont la charge et donc être rémunérés en conséquence. La restitution de 50 % des gains liés au « 1 sur 2 » fait aussi partie de la matrice de la révision générale des politiques publiques pour les trois années à venir.
Plus précisément, en 2011, la réduction des effectifs sera de l’ordre de 31 000 emplois : 16 000 postes dans l’éducation nationale, 8 250 dans le secteur de la défense. Mon ministère rendra 3 127 postes. Ces données résultent de réformes qui s’appuient sur la révision générale des politiques publiques et qui permettent une meilleure efficacité conjuguée à une réduction des moyens. À titre d’exemple, si le ministère de l’intérieur contribue à cette réduction d’effectifs pour près de 1 600 emplois en 2011, son cœur de métier – la sécurité, la présence sur le terrain des forces de police et de gendarmerie – sera largement préservé.
Au total, avec le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, la masse salariale, hors pensions, sera, comme prévu, stabilisée en valeur en 2011-2013.
Notre deuxième règle transversale consiste en un effort d’économie de 10 %, sur trois ans, concernant les dépenses de fonctionnement et d’intervention. Nous prévoyons de réaliser la moitié de cet effort dès l’année prochaine. Cette volonté nous permettra de combattre la tendance spontanée des dépenses à croître fortement et de respecter le « zéro valeur ».
Précisément, à cette fin, nous souhaitons réduire le train de vie de l’État, grâce aux outils de la RGPP, comme les chantiers interministériels. Voilà quelque temps, j’ai évoqué devant le conseil des ministres ce train de 150 mesures, largement relayé par la presse. Ces chantiers comprennent, entre autres, la rationalisation des achats, le perfectionnement des systèmes d’information, la réorganisation des concours. Le gain potentiel résultant des seules économies liées aux achats pourrait atteindre jusqu’à 1 milliard d’euros les prochaines années.
De surcroît, pour la première fois, nous demanderons aux 655 opérateurs de l’État de fournir un effort égal à celui de l’État.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela n’ira pas sans mal !
M. François Baroin, ministre. Nous souhaitons également que toutes les dépenses d’intervention, qui représentent 66 milliards d’euros sur trois ans, soient réexaminées pour dégager des économies à hauteur de 10 %.
Le document qui vous a été distribué, mesdames, messieurs les sénateurs, vous montre le détail des réformes proposées. Je voudrais toutefois parer à d’éventuels procès d’intention : nous n’allons pas réduire les minima sociaux ni remettre en cause le RSA ; bien au contraire, il sera, comme prévu, étendu aux jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans sous condition d’activité et à l’outre-mer dès l’année prochaine. Car nous voulons aussi un budget juste, équitable. Mais cette équité doit être conciliée avec les impératifs de maîtrise des finances publiques.
Le deuxième acteur devant contribuer à la maîtrise de la dépense est la sécurité sociale. Dans ce domaine, nous procéderons de la même façon que pour l’État, en associant réformes et maîtrise serrée de la dépense.
Je concentrerai mon propos sur trois points : l’assurance maladie, la réforme des retraites, la dette sociale.
Pour ce qui concerne les dépenses de l’assurance maladie, nous ramènerons la progression de l’ONDAM à 2,9 % dès l’année prochaine.
Nous renforcerons l’efficacité de l’assurance maladie grâce à des innovations récentes. Je citerai, à titre d’exemple, la mise en place des agences régionales de santé, qui doivent permettre d’améliorer le lien entre ville, hôpital et secteur médico-social, ou bien encore les projets de performance des hôpitaux.
Parallèlement à des réformes structurelles, afin de trouver des outils permettant de respecter l’ONDAM, nous avons largement repris les conclusions du rapport Briet.
Le seuil d’alerte, fixé à 0,75 % aujourd’hui, sera progressivement abaissé à 0,5 % d’ici à 2012-2013. Le rôle du comité d’alerte sera étendu. Il se prononcera désormais ex ante sur la construction de l’ONDAM et son rôle de veille sur l’exécution de cet objectif sera renforcé. Ensuite, une fraction des dotations sera mise en réserve en début d’année.
Bien entendu, la réforme des retraites est un élément majeur de notre stratégie.
Cette réforme, nous l’avons voulue profonde et juste. Comme la solution démographique ne peut montrer tous ses effets à court terme, nous lui avons adjoint des mesures de recettes ciblées, qui permettent aussi de renforcer l’équité du système. L’augmentation des recettes destinées aux régimes de retraite s’élèverait, selon nos propositions, à 3,7 milliards d’euros l’année prochaine ; ces recettes supplémentaires proviendraient des hauts revenus, des revenus du capital et des entreprises. Ces mesures feront l’objet du débat qui se déroulera à la fin de cet été.
Cette réforme devrait permettre aux régimes de retraite d’atteindre l’équilibre dès 2018. Elle générera, je vous le rappelle, un gain de 1,2 point sur le déficit structurel et d’environ 10 points de PIB sur la dette publique à l’horizon 2020.
Le troisième aspect que je souhaite évoquer concerne la dette sociale. Bien que Jean-Jacques Jégou ne soit plus présent en cet instant dans l’hémicycle, je tiens à rappeler sa contribution en la matière : ses propositions aident le Gouvernement à trouver les réponses adéquates dans un contexte tout de même très difficile.
La dette sociale portée par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, pour l’ensemble du régime général et du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, représentera en 2011 environ 87 milliards d’euros : c’est considérable !
Pour remédier à ce problème, nous avons étudié, avec la Commission de la dette sociale, composée de parlementaires, les différentes pistes envisageables. Sans préjuger des arbitrages qui seront rendus cet été, nous avons essayé, avec l’aide de tous les participants de cette commission – je rappelle que les conclusions que le Gouvernement tire de leurs travaux ne les engagent en rien –, de tracer une ligne de crête, évitant les solutions de facilité, tels la reprise de la dette par l’État, l’allongement pur et simple, sans borne, de la durée de vie de la CADES, ou encore le statu quo.
On s’orienterait dès lors vers une reprise de la dette par la CADES, à laquelle devraient être affectées de nouvelles recettes pérennes, sans toutefois casser la reprise en opérant des prélèvements obligatoires trop élevés. Un allongement de la durée de vie de la CADES, mais limité à un strict minimum pourrait donc être envisagé, afin de reprendre la seule « dette de crise », qui représente environ 35 milliards d’euros sur les 87 milliards d’euros mentionnés précédemment. Ce système équilibré ne porterait pas atteinte au pacte de solidarité intergénérationnel. Certes, il n’est pas pleinement satisfaisant, mais force est de constater l’impact de la crise mondiale : ses effets sur l’économie réelle se traduisent par un grand nombre d’emplois détruits et donc par un chômage en augmentation, ce qui pèse inéluctablement, en recettes et en dépenses, sur notre système de solidarité. Nous n’avons d’autre choix que de prendre ce problème à bras-le-corps.
À la fin de l’été, bien entendu, nous évoquerons en détail les mesures d’affectation des fonds résultant de la remise en cause de certaines niches fiscales, ainsi que les perspectives à court terme – les deux prochaines années – et à moyen terme. Je ne doute pas de la qualité des débats qui se dérouleront alors.
Enfin, nous souhaitons que les collectivités locales – troisième acteur – prennent part à la maîtrise de la dépense publique. Ce n’est pas aux membres du Sénat, lieu par excellence de représentation des collectivités territoriales, que je ferai l’affront de rappeler leur rôle dans l’irrigation économique de notre pays de par le poids de leurs investissements dans la dépense publique. Mais le partage des efforts est inévitable et cela signifie, pour les collectivités locales, qu’elles doivent s’habituer à vivre avec des transferts de l’État qui, eux aussi, comme les dépenses des ministères, resteront stables en euros courants sur la période 2011-2013.
Nous tenterons d’y parvenir par le gel des dotations que nous avons évoqué. Toutefois, nous sommes lucides et nous souhaitons aussi accompagner les collectivités locales dans leur rôle d’acteurs économiques. C’est la raison pour laquelle un moratoire sur les normes réglementaires, hors normes européennes, que l’État impose aux collectivités locales, est aussi prévu.
M. Gérard Longuet. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Non, pas « très bien » !
M. François Baroin, ministre. Cela permettra d’éviter des dépenses supplémentaires qui pèsent sur les budgets locaux.
Pour renforcer, dans la durée, la maîtrise des dépenses, il doit être clair que le message français ne vaut pas pour un seul exercice budgétaire. Nous sommes dans l’esprit d’une programmation triennale ; je rappelle que le budget français doit franchir une marche importante l’année prochaine et que notre objectif pour 2013 est de revenir au niveau de déficit que nous connaissions avant la crise. Il n’est d’autre solution que d’inscrire cette maîtrise des finances publiques dans la durée. Christine Lagarde est très attachée à ce message et elle se bat énormément sur les fronts européen et international pour le faire valoir.
À cet égard, les conclusions de la commission présidée par M. Michel Camdessus et mise en place par la conférence nationale sur le déficit public méritent d’être rappelées. Le principe de cette règle constitutionnelle d’équilibre des finances publiques a été souhaité par le Président de la République le 20 mai dernier, à l’occasion de cette même conférence.
Nous avons d’ores déjà un certain nombre de motifs de satisfaction.
D’abord, il existe un large consensus à propos d’importantes mesures de gouvernance dont nos finances publiques ont aujourd’hui indiscutablement besoin. Je pense en particulier à la proposition visant à confier le monopole des dispositions relatives aux recettes fiscales et sociales aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale. Cette règle serait particulièrement utile pour garantir une approche cohérente de l’évolution des recettes de l’État et de la sécurité sociale.
La commission Camdessus propose également d’inscrire dans la Constitution le principe d’une loi-cadre de programmation des finances publiques. Cette loi s’imposerait juridiquement aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale, sous le contrôle du Conseil constitutionnel. Serait ainsi fixée une trajectoire impérative de réduction des déficits. La durée couverte par les lois-cadres et la date de retour à l’équilibre pourraient être arrêtées par le législateur.
Sur les bases de ce rapport, le Premier ministre engagera prochainement les consultations avec les forces politiques, pour déterminer plus précisément les contours d’une réforme consensuelle.
J’insisterai sur la partie politique de cette révision constitutionnelle. Il n’a échappé à personne qu’en 2012 doit avoir lieu un rendez-vous de respiration démocratique sur les grands choix qui engageront le pays, mais je suis absolument convaincu que, en prenant le temps nécessaire, d’ici à l’été prochain, nous pouvons trouver avec l’opposition les moyens de définir une révision constitutionnelle qui soit acceptable par tous. C’est en tout cas le chemin que le Gouvernement s’efforcera d’emprunter et de vous proposer à la rentrée.
Ainsi que vous l’avez annoncé tout à l'heure, monsieur le président, le présent débat sera suivi d’un vote au titre de l’article 50-1 de la Constitution.
Je le répète, notre objectif est de ramener en 2011 les déficits publics à 6 %. Peut-être l’ai-je trop dit, mais je ne le dirai probablement jamais assez. Cette détermination est solide. Il nous faut garder confiance en notre capacité de rebond, d’autant que la confiance est évidemment la racine de la croissance à long terme. Ce qui est fait là pour réduire notre endettement est aussi de nature à rassurer les Français, car nous leur montrons que nous nous saisissons très énergiquement de ce problème majeur qui est pour eux une source d’angoisse.
À terme, cela permettra de libérer une part de l’épargne pour la consommation et donc d’amener notre économie vers un rebond de croissance.
C’est l’esprit de responsabilité qui nous anime, Christine Lagarde et moi-même, dans les missions qui nous sont confiées. C’est également la responsabilité de l’État que d’œuvrer pour transmettre aux générations futures un système de redistribution à la française, qui est un modèle social absolument exceptionnel, mais aussi de préserver notre pays d’un endettement excessif, ennemi de la souveraineté, pour réussir cette inflexion vers la maîtrise de la dépense.
Je sais que je peux compter sur notre majorité. Je prends donc rendez-vous avec elle pour le vote, à l’automne, de la loi de finances pour 2011. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs généraux, mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai et je finirai mon propos par l’Europe.
En effet, ce débat d’orientation des finances publiques françaises s’inscrit dans un contexte grave concernant l’Union européenne.
Je vous rappelle que, au cours de la nuit du 9 mai, l’Union européenne a décidé de serrer les rangs, pour faire face aux attaques incessantes contre la zone euro, et de mettre en place un plan pour garantir la solidité de l’Union européenne et celle de la zone euro.
Ce plan est doté de 750 milliards d’euros, soit près de mille milliards de dollars. Vous y avez contribué à l’occasion des débats sur la récente loi de finances rectificative. Cela nous a permis d’apporter la garantie de l’État à un véhicule constitué sous l’empire du droit luxembourgeois. Grâce à la mobilisation de ces 750 milliards d’euros nous pourrons faire face à des attaques éventuelles contre l’Europe.
C’est dans ce contexte que notre politique économique et budgétaire s’inscrit, dans le cadre des accords passés avec l’ensemble de nos partenaires, et au regard de la responsabilité que nous prenons vis-à-vis des générations futures, pour maintenir cette souveraineté financière dont François Baroin faisait l’éloge à juste titre.
Le 20 mai dernier, vous vous en souvenez, le Président de la République a réuni pour la deuxième fois la conférence sur les déficits publics. Des engagements très importants ont été pris en matière de maîtrise des finances publiques. Cette maîtrise est partagée entre l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales, dont certaines étaient représentées.
Ce plan visant à redresser nos finances publiques est l’un des grands objectifs que nous poursuivons dans le cadre de notre politique économique.
J’ai perçu l’enthousiasme que suscite chez certains une politique volontaire de réduction des niches fiscales et, chez d’autres, dont nous ne sommes pas, une préférence marquée pour une hausse des prélèvements, au nom de la vertu budgétaire.
J’ai la conviction que nous ne devons pas substituer la hausse des recettes à la baisse des dépenses.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut faire les deux !
Mme Christine Lagarde, ministre. C’est une politique qui a été menée pendant longtemps : on négligeait toujours la baisse des dépenses, mais on cherchait systématiquement à augmenter les recettes.
En contrepartie, quels que soient le policy mix ou l’importance que nous accordons à la réduction des dépenses, nous devons être très attentifs à ne pas étouffer la croissance, qui reste très clairement le moteur principal de nos recettes fiscales et de leur augmentation.
Nous avons déjà annoncé un train de mesures fiscales équilibré de 3,7 milliards d’euros, dans le cadre de la réforme des retraites. Pour le financement de la dette sociale, nous avons prévu 3,2 milliards d’euros de réductions complémentaires. Cela représente déjà 6,9 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires.
Dans le cadre de la loi de finances qu’a évoquée François Baroin, d’autres pistes nous permettront d’atteindre un chiffre bien plus élevé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ça n’aura d’effet qu’en 2012 !
Mme Christine Lagarde, ministre. Outre la réduction des déficits publics et le redressement de nos finances, l’autre objectif que nous poursuivons et que nous devons poursuivre avec ardeur est celui de l’amélioration de la situation de l’emploi : elle reste une priorité absolue.
Je vous donne un exemple du travail accompli pour réduire la dépense de la manière la plus ciblée, graduée et efficace : les crédits de l’emploi progresseront légèrement en 2011 par rapport à 2010, se montant à 10,65 milliards d’euros contre 10,5 milliards. C’est là, vous l’aurez noté, une petite progression au regard de l’importance de l’objectif.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Oui !
Mme Christine Lagarde, ministre. Le maintien de ces moyens et leur décroissance, en revanche, sont prévus à partir de 2012.
Je vous entends déjà, monsieur le rapporteur général, considérer qu’une légère augmentation n’est probablement pas souhaitable.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est l’efficacité qui importe !
Mme Christine Lagarde, ministre. Ce que nous avons souhaité, monsieur le rapporteur général, c’est faire porter l’effort, et donc la réduction du budget approprié, sur 2012. Nous espérons en effet que les politiques que nous mettons en œuvre seront de nature à revigorer l’emploi et à réduire le chômage qui affecte actuellement notre économie.
Parallèlement, nous ne devons pas éviter le débat sur la pertinence et l’efficacité d’un certain nombre de mesures, de niches et de dépenses fiscales.
Nous avons d’abord visé les réductions ou les suppressions de dispositifs d’exonérations de cotisations sociales dont l’efficacité n’est pas pleinement démontrée. J’en suis sûre, vous en conviendrez, l’exonération de l’avantage en nature constitué par les repas des salariés du secteur des cafés, hôtels, restaurants doit probablement être supprimée.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Certainement !
Mme Christine Lagarde, ministre. Je pense également à la suppression de l’exonération de quinze points de charges sociales des particuliers employeurs et du régime spécifique des structures agréées dans le domaine des services à la personne.
Voilà un exemple de volontarisme en la matière.
S’agissant de cette mesure, j’insiste sur le fait que nous proposons, en revanche, de préserver les avantages pour les personnes fragiles et de maintenir l’avantage fiscal de 50 %.
J’ai utilisé volontairement l’exemple des services et des particuliers employeurs. Maîtriser la dépense publique ne doit pas nous empêcher de maintenir notre soutien ciblé à certains secteurs économiques, pour poursuivre l’autre objectif de notre politique économique : restaurer l’emploi.
Je souhaite maintenant tracer quelques perspectives économiques pour la France pour 2010 et 2011, en rappelant d’abord les grandes caractéristiques de l’environnement international, avent d’indiquer les trois grands principes de la stratégie économique que nous entendons suivre pour l’économie française de l’après-crise.
Le contexte international de l’année 2010 est très varié si l’on en juge par les études menées au sein de l’OCDE ou par le Fonds monétaire international, qui a institué un véritable observatoire des situations économiques à travers le monde.
Les États-Unis tireront profit, comme certains de leurs partenaires, de mesures budgétaires très lourdes qui ont été mises en place à la fin de 2009, alors que nous-mêmes avons fait porter l’effort sur le début de l’année 2009. Le plan américain, entré en vigueur assez tard en 2009, se poursuit en 2010. Le taux de chômage, anormalement élevé pour ce pays, entre 9 % et 10 %, restera ainsi stable cette année.
La croissance devrait s’accélérer un peu en fin d’année. L’INSEE prévoit, pour les États-Unis, un rythme de croissance trimestrielle de l’ordre de 0,4 %, comme au premier trimestre 2010. Cela correspond à un rythme de croissance annuelle de 2,9 %.
Les pays émergents, tirés en particulier par l’Inde et surtout par la Chine, compte tenu d’un plan de relance massif, mis en place dès le début de l’année 2009, mais aussi des pays auxquels on pense moins, comme l’Indonésie et le Mexique, qui font partie du deuxième groupe de pays émergents à croissance forte – je pense également à la Turquie – deviendront les moteurs de la croissance mondiale.
Dès 2011, voire dès la fin de 2010, la Chine passera au deuxième rang des puissances économiques. Bien entendu, compte tenu de l’« assiette », cela ne signifie pas pour autant que son produit intérieur brut par habitant avoisinera celui des pays développés, mais, sa puissance économique globale va se traduire désormais par cette deuxième place.
Dans la zone euro, la hausse de l’activité est plus contenue. Le rythme de croissance trimestriel de la zone euro se situe aux environs de 0,2 %. De l’aveu même du directeur général du FMI, il est difficile d’expliquer pourquoi la croissance de la zone euro est plus modérée que celle des pays à niveau de développement à peu près équivalent, tels les États-Unis.
L’activité en zone euro devrait se redresser un peu au deuxième trimestre, soutenue par le rebond du commerce mondial. Elle serait toujours caractérisée par une grande hétérogénéité entre les zones. Ainsi l’Allemagne et la France sont susceptibles de bénéficier d’un rebond plus important, alors que l’activité en Espagne, en raison de son modèle de développement économique, devrait stagner au cours de toute l’année 2010.
La demande intérieure hors stock de la zone euro se tasserait un peu après l’été, selon l’INSEE, contrairement à ce qui devrait se passer en France, où la demande intérieure est susceptible d’accélérer. Je me fie, en cela, aux chiffres publiés par l’INSEE au mois de juin.
L’examen de ces chiffres confirme donc que la France traverserait le début de l’après-crise plutôt mieux que le reste de la zone euro, tout comme elle avait plutôt mieux traversé la période de crise que l’ensemble de la zone euro, sortant de la récession dès le deuxième trimestre de 2009 et bénéficiant d’un taux moyen de croissance de l’économie de l’ordre de 0,3 % au cours de la dernière année, étant entendu que des variations sensibles peuvent être enregistrées d’un trimestre à l’autre : c’est ainsi que la croissance a été de 0,6 % au quatrième trimestre de 2009 et de 0,1 % au premier trimestre de 2010.
Quand on analyse en détail les différents postes de la croissance du produit intérieur brut français, on s’aperçoit que cette évolution s’explique, à l’évidence, par la décrue de la prime à la casse, d’autant que, si celle-ci a connu un grand succès en France, elle a aussi été appliquée dans un certain nombre d’autres pays.
En tout cas, pour ma part, je préfère retenir, pour déterminer la croissance tendancielle, que le PIB de la France a augmenté de 0,3 % par trimestre depuis un an.
Pour le reste de l’année 2010, le cadrage macroéconomique que nous avons retenu dans le programme de stabilité de février dernier a efficacement anticipé les prévisions de l’INSEE qui ont été rendues publiques en juin dernier.
Ainsi, l’investissement des entreprises serait en légère progression sur l’année, de l’ordre de 0,6 %. Cette hausse est modérée, me direz-vous, mais elle constitue un grand progrès par rapport à l’année dernière : vous vous en souvenez, l’investissement des entreprises avait été très affaibli pendant l’année de la crise – il avait diminué de 8 % –, ce qui avait considérablement « plombé » notre croissance.
L’investissement logement des ménages s’améliorerait tout particulièrement à la fin de l’année 2010, et cela avant tout pour deux raisons : d'une part, la politique du crédit est soutenue par des taux d’intérêt qui demeureront bas pendant le reste de l’année 2010 ; d'autre part, certains outils que nous avons mis à la disposition des ménages font sentir leurs effets, notamment le dispositif Scellier et le doublement du PTZ, le prêt à taux zéro, qui permet aux particuliers de s’endetter pour acquérir un bien immobilier.
En outre, la réduction du déstockage soutiendrait la croissance au cours des prochains trimestres.
Par ailleurs, mais, pour auditionner régulièrement des chefs d’entreprises, vous le savez aussi bien que moi, la baisse de l’euro, en particulier par rapport au dollar et au yen, sera de nature à stimuler les exportations. Elle bénéficiera à nos entreprises dont les bases de coûts se situent sur le territoire français.
Dans le domaine de l’emploi, nous constatons quelques éléments de stabilisation.
Le premier trimestre a vu la création de 23 900 nouveaux emplois, contre 7 300 destructions de postes au quatrième trimestre de 2009. Le taux de chômage est resté stable à 9,5 %. Ces résultats justifient parfaitement notre objectif de créer des emplois dans notre pays.
Sur l’ensemble de l’année 2010, le produit intérieur brut français est susceptible de croître de 1,4 %. Cette estimation est conforme à nos prévisions antérieures, mais aussi à celles, qui ont été révisées, du Fonds monétaire international, dont les derniers chiffres seront publiés aujourd'hui même, me semble-t-il. En revanche, elles sont légèrement inférieures aux prévisions de l’OCDE, qui s’établissent à 1,7 %.
En 2010, nous resterons donc dans le cadre des prévisions que nous avions formulées : l’économie française sera passée d’un recul du PIB de 2,6 % en 2009 à une croissance de 1,4 % en 2010.
Je le rappelle, les hypothèses d’inflation que nous avions retenues étaient de 1,2 % en moyenne annuelle. Quant aux prélèvements obligatoires, ils se stabiliseront à 41,5 % du produit intérieur brut, soit à peu près au même taux que l’année dernière, ce qui signifie que nous ne soutiendrons pas plus – mais pas moins ! – l’activité en 2010 qu’en 2009. D’ailleurs, le déficit structurel serait pratiquement le même, puisqu’il se réduirait seulement de 0,1 %.
Il s'agit là d’une décision délibérée : nous avons choisi de ne pas accélérer la politique de réduction des déficits à la fin de l’année 2010, mais d’engager celle-ci de manière extrêmement ferme et déterminée dès le début de l’année 2011.
J’en viens, justement, à l’année 2011. La poursuite du rebond cyclique amorcé en 2010 devrait nous permettre d’atteindre un rythme de croissance proche de la tendance de long terme de l’économie française.
Je sais parfaitement, et je comprends ce point de vue, que la prévision de croissance que nous formulons pour l’année 2011 est l’objet de doutes. Toutefois, je persiste à penser qu’elle n’est pas irréaliste, bien qu’elle soit ambitieuse et même audacieuse.
Premièrement, nous nous sommes efforcés de procéder par analogie, en observant ce qui s’était passé lors d’une autre crise grave, en 1993. Cette année-là, le PIB de la France recula de 0,9 %, mais l’année suivante fut marquée par un net rebond puisque l’augmentation de la richesse nationale, dont on prévoyait qu’elle serait de 1,4 %, fut de 2,2 %, l’économie française rejoignant son potentiel de croissance.
Traditionnellement, le rebond économique est aussi fort que le choc a été brutal. Il n’est donc pas totalement inepte de penser que, après une crise aussi grave que celle que nous avons subie pendant l’année 2009, nous puissions fortement rebondir et rejoindre, cette fois encore, notre potentiel de croissance.
M. Guy Fischer. Cela ne va pas être facile !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Le potentiel est aujourd'hui de 2 % !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et encore, c’est ambitieux !
Mme Christine Lagarde, ministre. Je sais que vous contesterez cette prévision, monsieur le rapporteur général. Toutefois, je développe mes arguments non pas pour vous convaincre, mais pour vous expliquer pourquoi, je le répète, cette proposition n’est pas irréaliste.
Deuxièmement, nous espérons favoriser une certaine stabilisation du marché du travail à travers des politiques de l’emploi ciblées, un renouveau de la formation professionnelle et la mise en place d’outils efficaces.
En outre, un certain rattrapage des salaires, que l’on ne peut exclure après le ralentissement que nous avons connu en 2009 et en 2010, tout simplement parce qu’une telle évolution est dans la nature des relations sociales, serait favorable à la croissance. (M. le rapporteur général de la commission des finances manifeste son scepticisme.)
Une certaine baisse du chômage et une éventuelle hausse des salaires seraient de nature à dynamiser les revenus d’activité, pour permettre au taux d’épargne de revenir à son niveau d’avant la crise, ce qui signifierait davantage de consommation.
Troisièmement, je le répète, nous observons la fin du déstockage.
Depuis le début de l’année, les rentrées fiscales, s'agissant de la TVA mais surtout de l’impôt sur les sociétés, sont conformes aux prévisions du Gouvernement et confirment que l’économie française entre dans une dynamique favorable.
Quatrièmement, l’activité économique devrait tirer partie des réformes que nous avons engagées depuis trois ans – telle était leur finalité, d'ailleurs ! –, surtout si elle est soutenue par un rebond de la demande mondiale adressée à notre pays, rebond qui serait, selon les prévisions du Fonds monétaire international, de 4,5 %. Ainsi, l’économie française devrait mieux réagir qu’elle ne le faisait avant ces réformes.
C’est bien pour cette raison que nous avons soumis au Parlement la loi de modernisation de l’économie, que nous avons pris des mesures pour soutenir l’investissement, que nous avons substitué à la taxe professionnelle la contribution économique territoriale, que nous avons réformé le crédit d’impôt recherche et que nous favorisons les dépenses d’avenir.
En outre, en 2011, la réforme des retraites sera évidemment un accélérateur de croissance, comme je le monterai dans un instant.
Cette prévision de croissance pour 2011, qui s’établit jusqu’ici à 2,5 %, est certes ambitieuse, mais je me suis efforcée de vous montrer sur quels arguments nous la fondions.
En outre, je le rappelle, le projet de loi de finances pour 2011 suivra son calendrier habituel. Les informations qui seront progressivement disponibles, comme le chiffre de la croissance du deuxième trimestre, que nous connaîtrons à la mi-août de cette année, et les indications dont nous disposerons sur la situation de nos partenaires, notamment l’Allemagne et la Grande-Bretagne, nous permettront de savoir si cette prévision de croissance était trop audacieuse, ou juste assez.
Pour mémoire, j’indique que nous avons utilisé comme paramètre de référence pour nos prévisions un taux de change de 1 euro pour 1,48 dollar, ce qui nous offre, là encore, une certaine marge de manœuvre. Nous le savons, la monnaie européenne s’est considérablement dépréciée au cours des dernières semaines, et nous n’avons aucune raison de penser que le rapport de change antérieur se rétablira de manière brutale dans les mois qui viennent.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est un élément positif !
Mme Christine Lagarde, ministre. J’en viens aux trois principes stratégiques sur lesquels nous souhaitons fonder le développement de l’économie française et permettre aux acteurs de remplir leur rôle en la matière.
Je précise d’abord une nouvelle fois que nous entendons mettre en œuvre un mélange de redressement des finances publiques, de réformes structurelles et de soutien aux investissements et à l’innovation.
Par boutade, j’ai évoqué la « rilance ». Ce mot-valise, que certains trouvent ridicule et dont d’autres discutent la pertinence, a au moins le mérite de rappeler que nous n’entendons pas nous consacrer au seul redressement des finances publiques, sans avoir le moindre égard pour les perspectives de croissance. Si nous voulons impérativement mettre en œuvre ce rétablissement financier, si celui-ci constitue bien notre objectif principal, nous souhaitons agir de manière suffisamment subtile, graduée et défensive pour que la croissance française ne soit pas étranglée et que nous ne nous retrouvions pas en récession.
Les réformes structurelles destinées à soutenir durablement la croissance et à accompagner la réduction du déficit sont plus que jamais nécessaires, d’autant que l’évolution de la population active et la situation démographique de notre pays nous amènent à nous interroger sur la productivité de l’économie française.
Si nous comparons les chiffres des vingt dernières années, nous voyons clairement que l’économie française a régressé dans ce domaine : les gains de productivité sont passés de 1,8 % par an au cours de la période 1991-2001 à 1,2 % par an dans les années 2003-2007.
Cette situation ne s’explique donc pas seulement par une baisse des investissements au cours de l’année 2009. Elle est bien plutôt le reflet du vieillissement de notre population, dont nous devons tenir compte.
Depuis trois ans, la politique économique du Gouvernement est inspirée par trois principes fondamentaux, qui continueront d’être déterminants.
Premièrement, nous avons agi sur le volume de travail dans l’économie.
Ainsi, nous avons libéré le temps de travail grâce à la détaxation des heures supplémentaires. Nous avons lutté pour l’emploi, notamment en créant le revenu de solidarité active, en transformant en profondeur le service public de l’emploi – grâce à la fusion des ASSEDIC et de l’ANPE, qui a donné naissance à Pôle emploi –, enfin en réformant la formation professionnelle, afin d’augmenter la quantité et la qualité du travail dans notre économie.
Nous avons aussi engagé la réforme des retraites, qui vise avant tout à préserver le système par répartition,…
M. Guy Fischer. Bien sûr ! (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Christine Lagarde, ministre. … mais qui doit également permettre de favoriser la croissance.
En effet, le relèvement graduel de l’âge de la retraite va augmenter mécaniquement l’effectif de la population active, donc la production de valeur. Cette réforme prouve que la maîtrise des dépenses publiques ne s’oppose nullement à la croissance.
En augmentant le nombre des actifs, nous tablons sur un supplément de croissance moyen d’environ 0,3 % par an pendant toute la décennie. En outre, nous obtiendrons, à partir de l’année 2013, une réduction du déficit public de 0,5 %.
Deuxièmement, nous agissons sur la compétitivité des entreprises.
Nous souhaitons renforcer l’investissement, notamment privé, dans la recherche et le développement. Nous estimons que ces mesures auront un effet favorable sur la croissance, de l’ordre de 0,1 % par an au cours des dix prochaines années.
Par ailleurs, nous investissons massivement dans l’enseignement supérieur et la recherche. Lorsque l’on examine la répartition des dépenses financées par ce que l’on a appelé le « grand emprunt », que pour ma part je préfère qualifier d’investissements d’avenir, on constate qu’un peu plus d’un tiers d’entre elles est consacré à l’enseignement supérieur et aux campus d’excellence.
Selon les ordres de grandeur avancés par le Conseil d’analyse économique, et en tenant compte des mécanismes de dotations en capital, qui favorisent les partenariats avec le secteur privé, l’effet de cette action représenterait près de 0,1 % de PIB par an en moyenne sur la décennie.
Comme vous vous en souvenez sans doute, mesdames, messieurs les sénateurs, puisque nous en avons longuement débattu dans cet hémicycle et que vous avez en profondeur modifié et adapté ce mécanisme, nous avons réformé la taxe professionnelle pour cibler davantage l’investissement sur le secteur industriel, au service des petites et moyennes entreprises, permettant ainsi une réduction du coût des investissements en équipements et biens mobiliers de l’ordre de 20 %.
Enfin – vous vous en souvenez également –, nous avons triplé le crédit impôt recherche, qui fait de la France une terre d’accueil des investissements et des centres de recherche.
M. Guy Fischer. Ce ne sont que des effets d’aubaine !
Mme Christine Lagarde, ministre. Je sais que vous aurez à cœur d’examiner la pertinence de ce mécanisme. Je vous rappellerai simplement que de nombreuses décisions de localisation en France des centres de recherche ont résulté, notamment, du régime particulièrement favorable que nous leur avons destiné, toutes entreprises confondues.
Nous avons mis en place des politiques favorables à la concurrence, au service des consommateurs. J’en veux pour preuve le dispositif adopté dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie : nous avons pu observer que celui-ci améliorait les rapports entre les distributeurs et les fournisseurs et qu’il permettait de gagner 0,3 % de croissance par an pendant les cinq années suivant sa mise en œuvre.
Troisièmement, enfin, nous agissons sur le secteur bancaire et financier.
La crise a rappelé combien la régulation bancaire et financière était importante pour favoriser une accumulation régulière et équilibrée du capital.
On le sait, la crise a détruit beaucoup de capital dans le monde entier. À en juger par les études menées sous l’égide de l’OCDE, cela représente, en moyenne, une perte d’environ 0,4 point par an de croissance potentielle sur la période 2009-2013, due, pour les deux tiers, au sous-investissement résultant de la difficulté de financement des entreprises dans notre pays.
Voilà pourquoi la France, sous l’autorité du Président de la République, se bat au sein de toutes les instances internationales – en particulier le G20 et le G8 – et européennes, pour permettre une meilleure régulation, un encadrement plus efficace et le respect de la discipline. Je pense aux dispositions issues des accords de Bâle 3, à celles qui sont prévues au sein du Conseil de stabilité financière, à la réglementation des fonds alternatifs, aux CDS, les credit default swaps, à la mise en place d’une taxe bancaire pour répondre aux risques systémiques, aux réformes des normes comptables pour parvenir à des principes de convergence indispensables ou aux mesures prises en faveur de la compétitivité de la Place de Paris, notamment avec la création de marchés obligataires pour les émissions primaires et secondaires, pour les PME et les entreprises de taille intermédiaire.
Toutes ces mesures ne sont pas prises pour le plaisir d’enserrer, de réguler, d’encadrer et de contraindre tel ou tel secteur d’activité. Elles visent à favoriser l’accumulation de capital au service de l’économie réelle et de nos entreprises.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en 2011, les efforts seront concentrés sur la dépense, y compris la dépense fiscale ; je sais que vous aurez à cœur de faciliter ce travail. L’enjeu, c’est la création de valeur et la création d’emplois dans l’économie française. Ne l’oublions pas : ces deux objectifs prioritaires tendent à préserver notre modèle économique et notre modèle social, qui, autrement, seraient menacés.
Je conclurai avec l’Europe. Si la Commission européenne et les partenaires de l’Union européenne ont décidé, dans le cadre du Conseil Ecofin, de lever la procédure pour déficit excessif à l’égard de la France – nous le ferons probablement mardi prochain à l’occasion du prochain Conseil Ecofin –, ...
M. Guy Fischer. Oui ! Pour satisfaire les marchés et les agences de notation !
Mme Christine Lagarde, ministre. ... c’est parce que la France a pris un certain nombre de mesures dont nos partenaires et la Commission européenne ont considéré qu’elles étaient suffisantes dans un premier temps. Toutefois, soyons assurés qu’ils feront preuve de vigilance, à l’instar de ceux qui nous observent et apprécient le « risque France » pour investir dans notre pays, acheter et refinancer la dette française. Tous seront extrêmement attentifs au sérieux avec lequel nous menons cette politique dont l’objectif est double : le redressement des finances publiques, la création de valeur et d’emplois. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu du temps de parole qui m’est imparti, je serai obligé d’être schématique et je ne pourrai pas trop faire dans la nuance.
M. Guy Fischer. Comme d’habitude ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je vous prie de ne pas m’en vouloir. Je vous renvoie aux développements du rapport écrit de la commission des finances, qui, sur plus de deux cents pages, propose une véritable analyse économique, ...
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. ... y compris sur des sujets que nous avons été contraints de reconstituer, parce que l’information du Gouvernement n’était pas arrivée en temps et en heure.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et toc ! (Nouveaux sourires.)
Mme Nicole Bricq. Information pour le moins lacunaire !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je partirai du titre que j’ai suggéré pour ce document : En finir avec le double langage.
Nous connaissons depuis plus de dix ans, c'est-à-dire depuis la création de l’euro, des programmes de stabilité et de croissance. Aucun d’entre eux n’a été élaboré pour être mis en œuvre, car le décalage avec la réalité était toujours très important.
Même si les rapports établis par la commission des finances du Sénat ne connaissent pas une très large diffusion, on y trouve, chaque année, le même tableau, qui se transpose. Désormais, permettez-moi de le souligner, ce n’est plus possible, pour les raisons que vous avez remarquablement développées, madame le ministre : cette année, notre crédibilité est en jeu. Ce n’est plus une affaire de discours : l’ajustement budgétaire est une réalité et une nécessité.
Pour le niveau du déficit, nous connaissons le point de départ – 8 % –, le point d’arrivée – 3 %, c’est l’hypothèse du Gouvernement – et l’échéance : 2013.
En chiffres, cela signifie qu’il faut procéder à un ajustement 100 milliards d'euros environ. Pour y parvenir, le Gouvernement envisage – et avec raison –, pour 60 %, des mesures structurelles en recettes et en dépenses. Nous pouvons en discuter, en particulier de la plausibilité du taux de croissance normatif de la dépense. J’y reviendrai dans un instant. Les 40 % restants seront des améliorations constatées, c'est-à-dire non volontaires, qui ne reflètent aucun effort particulier.
Mme Nicole Bricq. Qui vivra verra !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Elles seront par exemple constatées à partir de la fin du plan de relance – il va de soi qu’un tel plan n’est pas fait pour s’inscrire dans la durée – et à partir des espérances de recettes supplémentaires issues de la croissance, estimées à 30 milliards d'euros.
Les remarques que la commission des finances a formulées portent sur la proportionnalité entre les mesures annoncées et l’objectif visé. C’est presque une analyse juridique. Par ailleurs, elle exprime des doutes, comme c’est son devoir de le faire, sur deux points.
Le premier concerne le taux de croissance.
Nous sommes heureux de constater des signes encourageants dans l’économie. Ainsi, le taux de croissance trimestriel annoncé par l’INSEE est plutôt une bonne nouvelle. Nous aimerions bien croire à 100 % ce que vous avez dit, madame le ministre.
Cependant, observant les plans d’ajustement des différents États de la zone euro, nous constatons que le plan français est celui qui repose sur l’hypothèse de croissance la plus éloignée du taux de croissance potentielle de l’économie, avant la crise, qui est, nous dit-on, de 2 %. Avec 0,5 point d’écart, nous en sommes relativement éloignés.
Bien des économistes formulent des prévisions qui sont inférieures au taux de croissance potentielle. Nous qui sommes des conservateurs, du moins au sens économique (Sourires), nous considérons qu’il est préférable de prendre une hypothèse neutre, le taux de croissance potentielle à 2 %. Nous ne portons aucun jugement sur la vigueur plus ou moins forte du rebond ; il va de soi que nous souhaitons qu’elle soit considérable.
Il y a d’ailleurs un sujet, que vous-même avez évoqué, madame le ministre, et à propos duquel nous tirerions grand avantage à documenter, car cela peut être très positif : il s’agit de l’impact de la parité de l’euro sur la croissance. Pour ma part, je m’étonne qu’il n’ait pas fait l’objet de plus d’analyses de la part des spécialistes, ...
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. ... à commencer par les services du Gouvernement, par tous les économistes qui travaillent pour le Gouvernement ou qui sont rémunérés directement ou indirectement par lui, c’est-à-dire une grande majorité des économistes français. (Sourires.)
Apparemment, ce sujet n’est pas encore mûr pour que l’on puisse élaborer une réflexion approfondie, documenter et publier.
Le second point sur lequel je me dois également d’exprimer les doutes de la commission des finances concerne la prévision d’évolution des dépenses publiques.
Il y a trois sous-ensembles à considérer : l’État, la sécurité sociale, les collectivités territoriales.
Pour l’État, quelles que soient les difficultés de sa tâche, le ministre du budget tient les manettes. Faire des économies sur les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’intervention n’est pas simple ; nous avons pu l’observer en auditionnant les ministres dépensiers. Néanmoins, il est tout à fait vraisemblable que c’est cette dépense-là qui sera la mieux maîtrisée, en dépit des légères dérives auxquelles on peut s’attendre.
La sécurité sociale, c’est une autre affaire ! L’ONDAM n’est qu’une prévision. Certes, une procédure d’alerte existe, et c’est tant mieux. Mais elle ne se déclenche actuellement qu’en cas de dépassement de l’ONDAM de 0,75 %, seuil qui devrait être abaissé à 0,5 %. Il importe donc de tenir compte de ce dépassement minimum de 0,75 % avant le déclenchement de la procédure d’alerte et de l’intégrer dans l’évolution prévisionnelle des dépenses d’assurance maladie.
De la même façon, pour l’assurance chômage, il convient de prendre une hypothèse économique cohérente avec une hypothèse de croissance vraisemblable.
Mme Nicole Bricq. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. À ce sujet, pardonnez-moi de le dire, la commission est assez sceptique !
Il reste les dépenses des collectivités territoriales, qui, elles, ne sont pas décidées par le Gouvernement. Elles dépendent bien entendu des transferts. Nous avons compris que ces derniers seraient constants en valeur, mais nous voudrions avoir l’assurance que la réforme de la taxe professionnelle ne se traduira pas par des compensations qui deviendront des variables d’ajustement. Car il est évident que cette réforme coûtera en déficit structurel 5 milliards d’euros par an, en année pleine, à partir de l’année prochaine. C’est une certitude. Cette réforme est d’une extrême complexité et nous y travaillerons au mieux avec le Gouvernement dans les mois qui viennent. Mais la compensation, c’est la compensation : ce n’est pas une variable d’ajustement.
J’en viens maintenant aux objectifs.
Madame le ministre, monsieur le ministre, s’il s’agit vraiment atteindre 3 % en 2013, il faut faire davantage que ce que vous avez annoncé. Par rapport à vos prévisions, il faudrait une cinquantaine de milliards d’euros tirés d’augmentations de recettes ou de diminutions de dépenses supplémentaires. Ou alors, ne faites pas figurer l’objectif de 3 % en 2013.
En termes de crédibilité, peut-être est-il préférable d’annoncer des mesures que le Gouvernement s’engagerait à tenir scrupuleusement, plutôt que d’annoncer des objectifs que l’on sait hors d’atteinte et être ensuite jugé par l’écart entre les annonces et la réalité. Une fausse évidence arithmétique ne crée pas forcément, en tout cas pas longtemps, les conditions de la confiance.
C'est la raison pour laquelle la commission des finances a formulé plusieurs propositions, exposées dans son rapport. Bien entendu, nous soutiendrons de façon déterminée toute action sur les dépenses permettant à l’État de mieux assurer ses missions, mais nous pensons que, en matière de fonctionnement, les économies issues de la gestion des effectifs ne suffiront pas.
Tout d’abord, nous souhaitons que soient mieux utilisés les indicateurs de performance des programmes et des missions, pour dimensionner les efforts à réaliser au sein des enveloppes de dépenses de l’État.
Ensuite, il faut s’attacher à réduire la réduction de la dépense fiscale. Comme vous le savez, c’est notre combat, et nous souhaitons qu’il soit mené à la manière d’un artisan énergique, maniant son rabot avec détermination sur la surface la plus large possible. Il ne doit pas se limiter à raboter l’impôt sur le revenu. Il faut aussi s’attaquer aux niches de l’impôt sur les sociétés et, sans hésiter non plus, aux niches de l’impôt de solidarité sur la fortune. C’est un effort qui, pour être admis, doit s’appliquer à tous équitablement, selon un calcul arithmétique, et il ne doit pas être trop intelligent ! (Sourires.) Il importe de parvenir au résultat, il en va de notre crédibilité.
Enfin, nous avons le sentiment que de vrais ajustements ne pourront pas ne pas utiliser le meilleur outil, qui est la TVA. Nous avons formulé la proposition d’un relèvement du taux minoré de 5,5 % à 8 %, dans un contexte d’absence d’inflation, ou de quasi-déflation.
Sincèrement, cette mesure ne serait-elle pas presque indolore, avec un rendement annuel, dès le 1er janvier prochain si nous le voulons, de 7 milliards d'euros ? Elle compenserait presque la totalité de ce que nous avons sacrifié avec la réforme de la taxe professionnelle et la baisse récente du taux de TVA appliquée au seul secteur de l’hôtellerie et de la restauration.
M. Bernard Angels. Ce ne sont pas les mêmes qui paient !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On le voit, beaucoup d’efforts sont à faire, et la commission des finances sera toujours déterminée pour appuyer le Gouvernement en ce sens.
Il est clair que l’enjeu de notre crédibilité est le coût de notre dette. Les économies de dépenses que nous ne voudrions pas faire aujourd'hui risqueraient de nous être imposées, et dans une proportion bien supérieure, en fonction des réactions de ceux qui nous financent.
Madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, est-on un État indépendant quand on est financé par les autres ? Quand tel est le cas, comment faire pour ne pas être contraint par la loi des autres, c'est-à-dire par la loi des marchés, par celle des opérateurs, par des emportements et des enchaînements psychologiques impossibles à maîtriser ? Quand on est sous une telle emprise, l’indépendance est en péril ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu du peu de temps qui m’est imparti, je vais m’efforcer de traduire fidèlement le sentiment exprimé par la commission des affaires sociales du Sénat sur la situation particulièrement grave dans laquelle nous nous trouvons en raison du niveau des déficits constatés et de la dette.
J’ai entendu, à l’instant, M. le ministre François Baroin et Mme la ministre Christine Lagarde, ainsi que M. le rapporteur général de la commission des finances présenter, chacun, leur point de vue.
Il était plus que temps que nous prenions des dispositions pour essayer d’apporter une réponse à cette situation très préoccupante. Il est vrai que le Gouvernement n’a pas été aidé avec la crise qui nous est venue des États-Unis et que nous avons subie de plein fouet.
À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : ainsi, une série de propositions nous ont été présentées qui vont dans ce sens.
La situation actuelle nous rappelle celle que nous avions connue au début des années deux mille. En 2002, le déficit du régime général de la sécurité sociale était limité à 3,5 milliards d’euros : le ralentissement économique que nous avons alors subi a porté ce déficit à 10 milliards d’euros environ, niveau auquel il s’est stabilisé entre 2003 et 2008.
Ce qui nous menace aujourd’hui, c’est une nouvelle stabilisation du déficit de la sécurité sociale, mais cette fois à hauteur de 20 ou 25 milliards d’euros, soit plus du double. Une telle perspective, particulièrement préoccupante, conduirait tout simplement à la fin de notre système de protection sociale. Je ne pense pas que nos citoyens ou le Gouvernement y soient prêts.
En 2009, le déficit du régime général a atteint 20,3 milliards d’euros. En 2010, il s’élèvera à plus de 30 milliards d’euros, si l’on y ajoute celui du fonds de solidarité vieillesse, le FSV.
Nous devons donc engager très rapidement les actions nécessaires pour redresser le cap. Quelques économies ou quelques coupes ici et là n’y suffiront pas. Aussi, il importe de mettre en place une stratégie globale de retour à l’équilibre.
Notre prochain rendez-vous cet automne sera décisif à cet égard. Nous devons, en effet, engager trois chantiers essentiels, sur lesquels je souhaite insister aujourd’hui : la dette sociale, les retraites, l’assurance maladie.
En premier lieu, s’agissant de la dette sociale, vous nous avez livré, monsieur le ministre, la recette que le Gouvernement entendait mettre en œuvre.
L’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, les commissions des affaires sociales et des finances – notre collègue Jean-Jacques Jégou n’est pas là, mais M. le rapporteur général et M. le président de la commission des finances pourront infirmer ou confirmer mes propos – avaient proposé une hausse modérée, de 0,15 point, de la CRDS, pour transférer à la CADES environ 20 milliards d’euros.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On aurait bien voulu le faire l’année dernière !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le Gouvernement s’y était alors vigoureusement opposé, au motif qu’une telle augmentation affecterait de manière sensible la compétitivité de nos entreprises, notre économie et le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Selon les calculs que nous avons effectués nous-mêmes, la mesure aurait représenté, pour un smicard, une dépense supplémentaire d’environ un euro par mois. Je ne suis pas persuadé que cette somme aurait eu l’impact évoqué sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
En tout état de cause, reporter à plus tard l’effort rendra ce dernier d’autant plus douloureux
La preuve en est que, au lieu d’avoir à transférer 20 milliards d’euros, les déficits cumulés du régime général et du FSV atteindront 55 milliards d’euros, voire 87 milliards d’euros si l’on y ajoute les prévisions négatives pour 2011, que vous avez rappelées, monsieur le ministre. C’est là un montant que l’on n’a jamais connu et qui fait peur, s’agissant de la dette qui se sera constituée sur trois exercices pour l’ensemble des branches. Il n’est donc plus possible de différer la reprise de la dette.
Bien entendu, le Gouvernement n’avait pas eu d’autre solution que d’augmenter le plafond de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, qui est passé de 30 à 65 milliards d’euros. Dieu merci, il se situera à environ une dizaine de milliards d’euros au-dessous des besoins.
Mais l’ACOSS a-t-elle vocation à supporter la dette d’année en année ? N’a-t-elle pas uniquement pour objet d’assurer la trésorerie des branches et de jouer sur les fluctuations des entrées et des sorties, dans la limite, déjà relativement élevée, de 30 milliards d’euros ?
La Cour des comptes a émis une proposition, qui a été développée devant la commission des affaires sociales, afin que nous présentions une disposition, peut-être d’ordre organique, par laquelle le Gouvernement se verrait contraint de fixer un plafond annuel de 30 milliards d’euros à la dette de l’ACOSS pour ne pas la laisser filer, et d’en confier la gestion à l’Agence.
Je laisse ce point à votre réflexion, mes chers collègues. Pour ma part, je l’étudierai très sérieusement de façon à vous faire des propositions, peut-être dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Par ailleurs, nous nous posons une série de questions.
Quel sera le montant de la reprise de la dette ? J’ai cru comprendre qu’il concernerait seulement les déficits de 2009 et 2010. Quid de 2011 ?
Quel sera l’allongement de la durée de vie de la CADES ? Vous avez indiqué un report de quatre ans de son terme. Nous ne pourrons apprécier la crédibilité de cette durée que lorsque nous connaîtrons les conditions exactes de la reprise.
Quelles ressources affectera-t-on à la CADES ? J’ai noté que vous envisagiez de transférer des recettes de l’ordre d’environ 3,2 milliards d’euros, niches sociales ou fiscales incluses. Pourquoi pas ?
Cependant, je tiens à attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que c’est de la nature des recettes transférées à la CADES que dépendra la crédibilité de la Caisse au regard du marché. Soyons donc vigilants de ce point de vue. Autant la CSG et la CRDS sont des recettes sûres, autant les niches sociales que vous voulez transférer ne présentent pas pour l’instant de garanties suffisantes à cet égard. Je ne les connais pas aujourd'hui et vous-même n’avez pas été en mesure de nous en donner le détail. Nous verrons cela à l’automne. En tout état de cause, assurons-nous qu’elles sont suffisamment crédibles pour que la CADES ne rencontre pas de difficultés sur les marchés qui lui imposeraient des coûts supérieurs à ceux d’aujourd'hui.
Mes chers collègues, si l’on décidait de ne pas allonger la durée de vie de la CADES, il faudrait, pour qu’elle reprenne les déficits du régime général et du FSV des seules années 2009 et 2010, attribuer à la CADES 0,47 point de CRDS, et donc porter le taux de cette dernière de 0,5 % à 0,97 %. Y ajouter les déficits de 2011 impliquerait de le fixer à 1,24 %.
Plus nous retardons la prise en compte des déficits, plus nous nous rapprochons de la fin de durée de vie de la CADES et plus le montant progresse d’année en année ; de ce fait, plus l’effort que nous demanderons à nos concitoyens sera élevé.
Telle est la raison pour laquelle nous avions demandé d’amorcer déjà cette opération l’année dernière.
Mais ne parlons pas d’augmentation de la CRDS, puisque le Gouvernement n’en veut pas.
Cela étant, j’imagine difficilement que nous n’ayons pas à y procéder un jour ou l’autre, parce que, si nous sommes en voie de régler le problème concernant une partie de la dette, celle de la branche vieillesse, qui devrait parvenir à l’équilibre en 2018, le reste de la dette va continuer à courir. Il s’agit, je le rappelle, de celle de la branche maladie, de la branche famille et de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Il faudra donc bien que nous trouvions une solution également pour cette dette.
Pour que nous puissions apprécier avec pertinence les propositions que vous nous ferez, il est donc essentiel qu’au moment où nous examinerons la loi organique nous ayons connaissance des trois textes, en particulier le projet de loi portant réforme des retraites et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
En effet, comment pourrions-nous fixer la durée de vie de la CADES et nous déterminer sur la viabilité de ce que vous nous proposez si nous n’avons pas toutes les données pour ce faire ?
En deuxième lieu, j’aborderai, brièvement, le chantier des retraites.
Notre mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, a travaillé pendant plusieurs mois à la préparation du rendez-vous de 2010. Elle a présenté un rapport, après avoir procédé à une quarantaine d’auditions.
Nous avons pris note du fait que le Gouvernement souhaitait jouer sur les paramètres, sans s’engager pour le moment dans une réforme structurelle.
La commission des affaires sociales considère, pour sa part, que, outre le problème de la pénibilité et la question de l’emploi des seniors, on ne peut évacuer la nécessité de se pencher sur une éventuelle réforme structurelle du système de retraites. Plusieurs pistes doivent être explorées : l’harmonisation progressive des paramètres et des règles de calcul entre régimes, le rapprochement des gouvernances, le renforcement du droit à l’information des assurés, ainsi que l’organisation d’un large débat national. Ce dernier permettrait d’envisager le passage progressif à un système par points, dans lequel d’autres pays de l’Union européenne, comme la Suède et l’Allemagne, se sont engagés.
Pourquoi la France ne mènerait-elle pas une réflexion afin de rechercher une formule susceptible de convenir à l’ensemble de nos concitoyens ?
En troisième lieu, j’évoquerai le chantier de l’assurance maladie.
Une réflexion a été menée sur l’ONDAM. Dans le rapport qu’il a établi à la suite d’une demande du Président de la République formulée lors de la première Conférence nationale des finances publiques, en vue de trouver des solutions permettant de mieux contenir les dépenses de l’assurance maladie, M. Briet a livré plusieurs propositions intéressantes.
Elles sont d’ailleurs mises en œuvre dès cet exercice 2010, puisque, en 2009, les dépenses relevant de l’ONDAM ont progressé de 3,7 %, alors que l’objectif fixé dans la loi de financement de la sécurité sociale était de 3,3 %. Pour 2010, le comité d’alerte a déjà identifié un risque de dépassement de 600 millions d’euros. Le déficit de la branche, supérieur à 10 milliards d’euros en 2009, sera de l’ordre de 13 milliards d’euros en 2010. Il va donc falloir prendre des dispositions pour essayer de contenir l’ONDAM dans les années futures.
L’idée a été avancée de revoir le seuil d’alerte – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre –, en l’abaissant à 0,5 % de l’ONDAM, contre 0,75 % actuellement, et de faire appel à des experts afin de déterminer si les hypothèses présentées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 étaient crédibles.
Il a été également prévu de mettre en réserve, en début d’année, des dotations s’apparentant à des crédits budgétaires. C’est ce qui a été déjà proposé dans ce même projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.
Toutefois, pensez-vous, monsieur le ministre, que ces trois mesures proposées dans le rapport Briet seront suffisantes pour contenir l’évolution des dépenses d’assurance maladie ?
Un autre dossier important a été abordé, celui de l’hôpital, avec la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », dite loi HPST, et la création des agences régionales de santé, les ARS.
On le voit bien, la mise en route et le fonctionnement de ces dernières sont laborieux. Les missions qui leur ont été confiées sont si nombreuses et leur champ d’intervention si large qu’elles auront du mal, me semble-t-il, à faire face à ces compétences et à traduire en résultat concret les économies de dépenses que nous attendons au travers de la gestion du risque pour ce qui concerne l’assurance maladie.
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pour ma part, j’avais adopté une position assez frileuse quant à ce transfert d’une partie de la gestion du risque aux ARS. La Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, était déjà relativement impliquée, sans doute pas suffisamment à notre goût. Il nous appartenait peut-être, par des mesures législatives ou réglementaires, de booster encore un peu plus les choses. Je crains très fortement que nous ayons à attendre encore quelque temps avant d’obtenir des résultats.
Il faudra donc que nous essayions de « pousser un peu les feux » sur ce sujet. On peut en effet, comme le propose la Cour des comptes, agir sur le prix du médicament, sur les factures de radiologie et de biologie médicale, sur le volume des prescriptions et le ticket modérateur. Ce sont des leviers sur lesquels nous avons déjà agi plusieurs fois, mais les résultats obtenus ne sont pas du tout à la hauteur des déficits constatés.
Nous devrons nous investir davantage dans la mise en œuvre de l’ensemble de ces mesures. Il faudra surtout que nous nous penchions bien sur le cas de l’hôpital ; M. Jean-Pierre Fourcade, qui mène un travail d’expertise sur la mise en œuvre des ARS et le fonctionnement des hôpitaux, pourra nous faire part de son sentiment à cet égard.
Je tiens à insister sur la nécessité pour tous les établissements hospitaliers de bénéficier d’une véritable comptabilité analytique.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est un outil qui nous manque, que nous ne possédons pas, et sans lequel nous aurons toujours du mal à maîtriser l’évolution des dépenses de santé et à savoir où il convient d’agir.
Enfin, il serait souhaitable de ne pas retarder davantage la mise en œuvre de la convergence des tarifs entre hôpitaux publics et hôpitaux privés.
Mes chers collègues, j’espère que vous avez pris conscience les uns et les autres que, si nous n’agissons pas rapidement sur les dépenses structurelles, l’avenir de notre système de protection sociale pourrait bien être menacé. Or personne ne souhaite que celui-ci soit détruit ; bien au contraire, nous voulons tous qu’il soit conforté.
Je suis persuadé qu’ensemble, Gouvernement, Sénat et Assemblée nationale, nous parviendrons à trouver les réponses à l'ensemble des questions qui se posent ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bravo ! Vous êtes optimiste !
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France, comme la plupart des pays de la zone euro, est confrontée à un grave déficit de ses finances publiques. La situation catastrophique de l’économie grecque, révélée il y a quelques mois, a sonné l’alerte, puis donné le tempo : celui de la rigueur.
Ce mot de « rigueur », que le Gouvernement a pudiquement, ou plutôt tactiquement, évité de prononcer dans un premier temps, est devenu de plus en plus concret au fil des annonces de Bercy. Aujourd’hui, les ministres nous parlent d’un budget responsable, et nous nous réjouissons de ce réalisme salutaire.
Il est vrai que le tableau de nos finances publiques est sombre : le déficit public dépasse 8 % du PIB, du jamais vu depuis 1945 ; la dette publique avoisine 80 % du PIB, ce qui est un processus, comme chacun l’imagine, éminemment dangereux ; le déficit de l’État atteint 140 milliards d’euros, peut-être davantage ; et celui de la sécurité sociale sera de 27 milliards d’euros en 2010.
Mes chers collègues, comment en sommes-nous arrivés là ?
Vous le savez, la Cour des comptes a souligné deux causes essentielles du déficit budgétaire colossal de notre pays. Pour un tiers, il provient de la crise ; pour les deux tiers restants, ce sont bien les cadeaux fiscaux qui ont ponctionné les recettes de l’État et qui l’ont ainsi appauvri, je dirais même siphonné.
En dix ans, ces recettes auront reculé de 4,2 points de PIB. Le manque à gagner est estimé à plus de 80 milliards d’euros, alors que l’on attend toujours – impatiemment, d’ailleurs – les bénéfices de cette politique.
Aujourd’hui, malheureusement, l’heure est non plus au constat, mais plutôt au combat. La lutte contre les déficits nous est instamment demandée par la Cour des comptes, mais aussi, bien entendu, par nos partenaires européens et par le FMI.
Dans cette perspective, nous devrons agir à la fois sur les plans structurel et conjoncturel. C’est la figure imposée de la « ri-lance » – ce joli mot de votre invention, madame la ministre –, un exercice périlleux qui consiste, si j’ai bien compris, à appuyer à la fois sur l’accélérateur et sur le frein, au risque de déraper et de faire une embardée… (Sourires.) Je pense que l’expert en la matière serait Sébastien Loeb ! Même si je ne doute pas de vos qualités, l’exercice me semble difficile.
Il est en effet important de réduire et de supprimer les déficits structurels, estimés à plus de 5 % du PIB. Pour autant, peser sur la dépense ne nous exonérera pas de rechercher des recettes supplémentaires, avec, cette fois-ci, le double souci de l’équité et de l’efficacité économique.
La crise que nous connaissons depuis deux ans nous rappelle l’urgence d’établir une fiscalité progressive et juste sur le plan national.
Madame la ministre, monsieur le ministre, en ce qui concerne les correctifs budgétaires à apporter immédiatement, l’abrogation du bouclier fiscal doit être une priorité. Outre le fait que ce dernier symbolise l’injustice de la politique du Gouvernement, il restreint également – et je suis sûr que vous le regrettez tout les deux – la capacité d’action de l’État.
Tout d’abord, aux yeux des ménages les plus fragilisés par la crise, ce dispositif est de plus en plus insupportable. Le bouclier fiscal a été instauré en écho à l’ISF, et l’actualité nous démontre, non sans susciter d’effroi, les sommes indécentes que certains contribuables récupèrent à ce titre.
Ensuite, dans le contexte d’une crise dont on ne voit pas la fin, l’État doit pouvoir mobiliser des recettes. Or, depuis 2002, l’habitude a été prise de multiplier les niches fiscales. Et il aura fallu que nos finances publiques soient au bord du gouffre pour que le Gouvernement songe, enfin, à remettre en cause certaines d’entre elles ; mieux vaut tard que jamais, me direz-vous…
Actuellement, on en compte plus de quatre cents, pour un coût total d’environ 73 milliards d’euros. Une fois encore, nous savons que ces niches profitent aux contribuables disposant de patrimoine ou d’une forte épargne. La plupart de nos concitoyens ne sont donc pas, hélas ! en mesure d’en bénéficier.
Bien sûr, je vous l’accorde, la récupération des recettes passe aussi par la reprise économique. À cet égard, compte tenu de l’interdépendance des économies, des actions vigoureuses doivent être entreprises sur la scène internationale.
Je note que, lors des derniers sommets du G20, les gouvernements des principaux pays industriels se sont emparés du dossier complexe des paradis fiscaux pour mettre fin aux pratiques douteuses ayant cours dans ce domaine, et en particulier à l’opacité dont peuvent bénéficier individus et entreprises dans certains territoires non coopératifs.
Toutefois, pour être efficace, cet effort mérite d’être poursuivi – et amplifié – dans le temps avec une grande fermeté. Sur ce registre, la France doit bien entendu se donner les moyens de lutter plus efficacement contre l’évasion fiscale. Sans une volonté politique à long terme, il est vain d’espérer démanteler avec succès un système dont beaucoup – beaucoup trop ! – se sont arrangés par le passé et qui met en jeu les intérêts vitaux de certains États. Il est temps de mettre fin à ces ports de l’économie souterraine, ces havres de la spéculation ou ces blanchisseries d’argent sale !
L’action du G20 ne doit cependant pas s’arrêter à ce seul volet. Les réflexions sur la taxe bancaire sont en cours, et c’est aussi une bonne chose. Je regrette toutefois le sort réservé par notre assemblée à la proposition de loi déposée par l’ensemble des membres du groupe RDSE tendant à taxer les transactions financières. S’appuyant sur une réalité que nous condamnons tous – la prédominance des marchés et le règne de la spéculation –, cette proposition visait à remédier à cette situation par l’instauration d’une taxe « intelligente », dans l’esprit de la taxe Tobin, ayant pour objet la régulation des marchés et l’abondement des finances publiques.
J’ai cru comprendre que le Président de la République reprendrait peut-être à son compte cette idée lors du prochain G20. Elle deviendra alors immédiatement excellente, j’en suis persuadé. (Sourires.)
Madame la ministre, monsieur le ministre, le redressement des finances publiques suppose non seulement des mesures fortes, mais elle repose également sur la confiance de nos concitoyens. S’agissant des mesures fortes, nous les attendons, en particulier sur le plan national. Quant à la confiance des Français, elle semble vous échapper, hélas ! chaque jour un peu plus.
Aujourd’hui, nous sommes à la croisée des chemins : un autre système est à construire, un système économique efficace, juste et régulé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Yvon Collin. Tant que nous n’irons pas clairement dans cette voie, les radicaux de gauche et la majorité des membres du groupe RDSE ne pourront pas approuver la déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances publiques pour 2011. (Mme Nicole Bricq applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Madame la ministre, ainsi donc serait venu, selon votre propre mot, le temps de la « ri-lance », qui risque malheureusement d’aboutir à la « re-crise ».
La droite ne manque pas d’imagination dès lors qu’il s’agit de présenter la situation dans un sens qui arrange ses commanditaires, et nombreux sont les docteurs sentencieux à nous expliquer qu’aucune autre voie que celle de la réduction des niches fiscales et, surtout, des dépenses publiques n’est possible pour redresser les comptes publics.
La crise obligataire, réplique obligatoire des colossaux plans de sauvetage des banques menés par les États à l’automne 2008, a entraîné dans tous les pays de la zone euro, et même dans ceux qui ne sont pas encore partie prenante de la monnaie unique, une véritable épidémie d’austérité !
Nous avons dénoncé cette dernière lors de la discussion des deux textes par lesquels les États de la zone euro ont décidé, en accord avec le FMI, d’intervenir de nouveau pour sauver non pas la Grèce ou l’Espagne, mais plutôt les banques et les compagnies d’assurance créancières de titres de dettes publiques souveraines, inquiètes en effet de conserver dans leur portefeuille des créances douteuses.
Le doute est désormais levé : alors même que le Gouvernement n’est pas prêt à trouver 7 à 10 milliards d’euros pour équilibrer les comptes de l’assurance vieillesse, il s’est engagé à en débloquer 120, voire 130, pour opérer le sauvetage des banquiers et organismes financiers dont la rentabilité est fondée sur la détention de dette publique.
Le Gouvernement et le Président de la République manquent d’originalité dans l’examen concret de ce qui constitue la matrice essentielle du déficit structurel des comptes de l’État, et que beaucoup, à droite, s’emploient évidemment à masquer.
Plusieurs années de moins-disant sur les plans social et fiscal ont profondément entamé les recettes de l’État, sans pour autant que les baisses d’impôt successives aient eu le moindre impact réel et prouvé sur l’activité économique ou la croissance.
Permettez-moi de rappeler deux vérités simples.
Premièrement, les dépenses publiques de l’État n’ont pas profondément évolué depuis de longues années ; rapportées au PIB, elles ont même tendance à diminuer.
Deuxièmement, on a procédé, dans le même temps, à la réduction de nombreux impôts et à la baisse des cotisations sociales, provoquant un « effet ciseaux » qui a creusé structurellement le déficit des comptes publics.
Au final, la croissance moyenne de la dernière période s’est révélée plus faible que celle des périodes précédentes et les recettes fiscales qu’elle a engendrées n’ont aucunement compensé les pertes de départ !
Les inégalités sociales se sont accrues, les écarts de patrimoine ont atteint un niveau inégalé dans notre République, le chômage et le sous-emploi se sont généralisés et, pour faire bonne mesure, le commerce extérieur du pays continue de présenter un caractère déficitaire récurrent.
Faudrait-il en conclure que l’argent rendu aux contribuables – entreprises et particuliers – n’a pas été optimisé quant à son affectation ?
Faudrait-il aussi en conclure – sur ce point, je sais pertinemment que nous sommes dans l’hérésie – que « plus il y a de dépenses publiques directes, plus il y a de croissance » ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On devrait avoir beaucoup de croissance, alors !
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, 100 000 postes de fonctionnaires de moins – c’est ce que vous semblez avoir prévu pour 2011 –, c’est 100 000 jeunes diplômés, mères de famille ou demandeurs d’emploi qui se voient fermer une porte parmi d’autres sur le marché du travail !
Qu’est ce qui coûte vraiment le plus cher ? Avec le gel du salaire des agents du secteur public, ne risque-t-on pas de freiner la consommation populaire, puisque 20 % des salariés de ce pays travaillent précisément dans le secteur public ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Où sont produits les biens qu’ils achètent ?
M. Thierry Foucaud. Pour faire bonne mesure, les collectivités locales seront également mises à contribution.
À leur corps défendant, après la suppression de la taxe professionnelle, elles subiront en outre le gel des dotations, la remise en cause de la péréquation, le report de la clause de revoyure et l’extinction programmée des dotations de solidarité.
La semaine qui se termine a d’ailleurs été difficile pour le Gouvernement au regard des modifications apportées au projet de loi de réforme des collectivités territoriales. Cela ne saurait cependant nous faire oublier que l’année 2011 s’annonce comme celle du régime sec et de la participation obligée des élus locaux à la réduction de déficits publics dont ils ne sont nullement responsables, bien au contraire !
M. Guy Fischer. Et ce n’est que le début !
M. Thierry Foucaud. Encore heureux qu’il reste des élus locaux suffisamment inconscients pour investir, pour équiper leur territoire, pour rendre des services à leur population !
Sinon, la récession serait au rendez-vous. Quand l’État n’investit plus et que seules les collectivités font l’effort d’équiper la nation des infrastructures nécessaires à son développement, brider les moyens de ces collectivités devient tout simplement suicidaire du point de vue de la croissance économique et du développement social.
Bien entendu, un volet important de la programmation des finances publiques porte sur la mise en question de la dépense fiscale, devenue, au fil du temps, le véritable premier poste budgétaire.
Bien entendu, l’attention de nos concitoyens est polarisée, avec force déclarations, doctes discours et articles de presse sentencieux, sur l’impôt sur le revenu et la floraison continue de « niches fiscales ».
Il est vrai qu’un impôt qui ne rapporte que 60 milliards d’euros quand il devrait rapporter 40 milliards d’euros de mieux « fait désordre »…
Cependant, lorsque l’on braque le projecteur sur l’impôt sur le revenu – jusqu’à remettre en cause l’aide aux emplois à domicile, ce qui signifie que les choses vont vraiment mal –, on laisse dans l’ombre quelques perles de la dépense fiscale touchant les autres impositions.
Pas touche au report en arrière des déficits, pas touche au régime du bénéfice mondial consolidé, pas touche au régime d’imposition séparé des plus-values, pas touche au mode d’imposition des dividendes distribués, pas touche au régime d’imposition des groupes !
Si l’on concède qu’il faut quelque peu « recentrer le crédit d’impôt recherche », c’est que l’on a sans doute dépassé les limites admises avec la réforme mise en œuvre voilà peu et que nous avons d’ailleurs contestée.
Monsieur le ministre du budget, L’Oréal ne va tout de même pas pouvoir continuer à présenter comme dépenses de recherche des dépenses qui n’ont pour objet que de modifier l’emballage de ses crèmes amincissantes ou de ses parfums, comme Sanofi-Aventis ne va pas tirer plus longuement parti du crédit d’impôt recherche pour mettre vingt pilules dans une boîte de médicaments au lieu de vingt-cinq !
M. Guy Fischer. Sanofi-Aventis a supprimé 4 000 emplois !
M. Thierry Foucaud. Cependant, mes chers collègues, ce ne sont pas les seules réductions de l’impôt sur le revenu que vous devez révisées.
D’ailleurs, entre la fiscalisation des accidents du travail, la mise en cause de la demi-part supplémentaire pour les veuves et les divorcés ainsi que la réduction de la prime pour l’emploi, vous avez déjà su réduire les niches fiscales.
C’est l’ensemble de la dépense fiscale et des mesures décrites par le menu dans l’évaluation des voies et moyens de la loi de finances qu’il faut passer au révélateur du ratio coût-efficacité !
Seulement, si vous vous engagez dans cette voie, c’est du côté de l’impôt sur les sociétés, du côté de l’impôt de solidarité sur la fortune, du côté de ce qui reste de la taxe professionnelle qu’il va vous falloir aller voir ! Or, cela, vous ne le voulez pas, parce que vous ne le pouvez pas.
Plus libres que jamais, nous sommes, nous, prêts à mener l’exercice : oui à la hausse des impôts, bien sûr dans la justice et l’équité ; oui à la progression de la dépense publique, pour répondre aux attentes et aux besoins des populations ; non, une fois, dix fois, cent fois non aux orientations budgétaires et financières que le Gouvernement, avec cette déclaration, entend nous faire avaliser, en préemptant d’ailleurs le débat sur le projet de loi de finances pour 2011 ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat d’orientation budgétaire intervient plusieurs mois après que le Gouvernement a transmis à la Commission européenne le plan de stabilité qu’il entend conduire d’ici à 2013.
Il est temps que le Parlement débatte de ce plan de stabilité, même s’il le fait dans le cadre d’une procédure hybride, qui se clôturera, certes par un vote, mais sur un document encore lacunaire, dans lequel ce qui n’est pas dit est plus important que ce qui l’est.
Contre toute logique, nous ne devrions donc débattre ni des hausses d’impôts qui interviendront fatalement, ni des choix précis du Gouvernement s’agissant de la compression des dépenses.
Force est de constater que le Gouvernement utilise la même méthode de communication que pour les recettes : tous les jours, la lecture de la presse nous apprend que telle ou telle mesure pourrait être envisagée. Bref, on lance des formules et on les teste !
Heureusement, le rapporteur général nous a éclairés sur quelques-unes de ces formules et nous a fait des propositions, que nous ne pouvons bien sûr pas accepter ; mais au moins nous a-t-il présenté avec franchise une « boîte à outils ».
Certes, nous ne sommes pas accoutumés à le voir jouer le rôle de mécanicien ou de plombier,…
M. Guy Fischer. Non…
Mme Nicole Bricq. … mais nous avons constaté qu’il avait pu parfois être utile au Gouvernement quand celui-ci était en difficulté, par exemple à propos de la suppression de la taxe professionnelle lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010.
M. Guy Fischer. Notre rapporteur général est très inventif !
Mme Nicole Bricq. Nous ne sommes pas favorables, loin s’en faut, à toutes ses inventions,…
M. Guy Fischer. C’est certain !
Mme Nicole Bricq. …mais au moins a-t-il le mérite d’être inventif.
Mme la ministre a commencé son plaidoyer en faveur de ses orientations budgétaires par l’Europe, et j’estime que c’était avec raison, car, depuis le début de l’année, les inquiétudes des marchés se sont focalisées sur l’Europe, en mal de gouvernance et défaillante jusque dans son cœur, ainsi que sur la zone euro et sa promptitude à assurer la solidarité entre ses pays membres.
À cet égard, force est de reconnaître que le délai entre le 11 février et le 9 mai nous a coûté très cher et que tout n’est pas imputable à la dette publique.
La crise grecque a été le détonateur, alors que la dette publique mondiale atteignait son niveau le plus élevé en temps de paix.
C’est dans ce contexte qu’il nous faut apprécier la « trajectoire » des finances publiques.
Les perspectives en Europe sont très sombres. Il est question de revenir, en trois exercices, à 3 % du déficit, sachant que l’on part de 8 %.
Si l’on regarde dans le passé proche, on constate que les ajustements budgétaires qui ont réussi – je pense au Canada et à la Suède, assez souvent cités – reposaient sur une différence énorme : ils bénéficiaient d’un contexte macroéconomique favorable, contexte qui semble peu probable en Europe et en France, où le Gouvernement raisonne en fonction d’un taux de croissance encore estimé à 2,5 % en 2011, taux qui n’est pas crédible.
Le rapporteur général a raisonné sur une hypothèse proche de la croissance potentielle, qu’il estime à 2 % tout en reconnaissant que certains économistes sont plus pessimistes, le taux de 1,7 % étant évoqué.
La crise actuelle, en effet, n’est pas une crise ordinaire, et elle n’est notamment pas comparable à celle de 1993 : la destruction de richesses qu’entraîne une crise d’une telle profondeur ne sera jamais intégralement rattrapable.
Il faut prendre appui sur les leçons du passé, et en particulier se souvenir que le resserrement trop précoce de la politique économique aux États-Unis dans les années trente a entraîné une rechute de l’activité.
Les questions de calendrier et de rythme sont donc essentielles. Trop court et trop brutal, ils se révéleront dangereux.
Madame la ministre, je vous ai entendue : gardons-nous de tout miser sur la baisse de l’euro !
Celle-ci peut compenser une petite partie de la restriction budgétaire en 2011, mais, au-delà, les prévisions du pacte de stabilité n’étant qu’à trois ans, l’incertitude est totale.
Si en parlant de « ri-lance », vous avez voulu dire qu’il fallait réduire les déficits tout en assurant la croissance, cela pourrait signifier que vous avez conscience du danger qu’il y a à pratiquer avec zèle l’austérité aussi bien que de la nécessité d’une conduite de nos finances habile et menée dans un temps raisonnable.
Cependant, s’il ne s’agit que d’une astuce de communication pour « habiller » la réalité sans jamais l’assumer, c’est une bien mauvaise action !
Je vous le dis solennellement, agir ainsi vous condamne à achever de ruiner la confiance. Or la crise, la tourmente, le bouleversement du monde que nous traversons est d’abord marqué par la défiance.
Pour être efficace, une communication doit être crédible, pour les Français comme pour les marchés.
Ces derniers demeurent dubitatifs sur les chances de la reprise : il n’est que de voir leur réaction à l’annonce des mauvais chiffres aux États-Unis et du ralentissement du rythme de croissance en Chine.
Notre pays, du fait de sa moindre exposition à la baisse du commerce mondial et de ses stabilisateurs automatiques, a peut-être mieux traversé le choc brutal des deux années passées, mais ses finances sont structurellement atteintes.
J’ai bien entendu le ministre du budget : ce que vous refusiez d’admettre hier, quand le Premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, vous disait que le déficit structurel était de loin supérieur au déficit dû à la crise, vous l’admettez aujourd'hui.
C’est justement ce déficit structurel, supérieur à celui de l’Allemagne, qui nous vaut un écart de taux d’intérêt de 46 points de base avec ce pays.
Pour l’immense majorité des Français, la crédibilité est corrélée à la justice qui devrait marquer l’effort que l’on attend d’eux.
Or, porter un regard attentif sur les dernières années – et, n’étant pas sectaire, je parle là des dix dernières années – nous oblige à voir la réalité en face : ce sont 100 milliards d’euros de manque à gagner pour l’État qui ont été accumulés.
Avons-nous obtenu un regain de croissance pour autant ? Non !
Avons-nous « musclé » notre appareil productif ? Non !
Les baisses d’impôts, le bouclier fiscal, le paquet fiscal de 2007, la baisse des droits de succession – je m’arrête là… – ont-ils fait revenir les exilés fiscaux ? Non !
Vous n’avez pas sanctuarisé les recettes et, malgré une croissance supérieure à 2 % par an entre 2004 et 2007, les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas réduit la dette, alors qu’ils auraient pu le faire.
Comme le sujet d’une hausse générale des impôts est tabou, on multiplie les annonces ciblées côté recettes, et l’on fait grand bruit sur la chasse aux chiens qui sommeillent dans les niches, celles qui mitent l’impôt sur le revenu comme l’impôt sur les sociétés.
Je tiens à dire que la méthode du rabot n’est pas équitable, car elle exonère de l’effort ceux qui bénéficient du bouclier fiscal. C’est inévitable.
Quant à nous, nous avons toujours souhaité qu’une révision générale des dépenses fiscales ait lieu au regard de deux critères : l’efficacité économique et l’utilité sociale.
Ainsi, quand, en 2008, M. Woerth, alors ministre du budget, a proposé la suppression progressive de la demi-part supplémentaire essentiellement dévolue aux femmes seules ayant élevé un enfant, qu’il considérait comme une niche, nous nous sommes battus – hélas ! sans succès – pour qu’elle ne soit pas mise en œuvre.
À l’inverse, vous ne considérez pas l’exonération qui touche la plus-value de cession des titres de participation, pourtant connue sous le nom de « niche Copé », comme une niche. Nous, si, d’autant que sa suppression permettrait de trouver assez facilement quelques milliards d’euros.
Mme Raymonde Le Texier. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Quant à la baisse à 5,5 % du taux de TVA dans l’hôtellerie et la restauration, de gauche à droite, elle est jugée improductive et excessivement onéreuse, mais c’est une promesse du Président…
Côté dépenses, des annonces ont été faites. Je n’en citerai que deux, au hasard, car nous aurons le temps de revenir sur chacune d’elles.
Vous voulez réduire de 10 % les dépenses d’intervention et remettre en cause, alternativement, ou l’aide personnalisée au logement ou la demi-part supplémentaire pour enfant à charge.
C’est injuste socialement et inefficace économiquement,…
M. Guy Fischer. C’est vrai !
Mme Nicole Bricq. … car c’est tout de même un moteur de la consommation qui compte.
Vous n’augmenteriez pas l’allocation aux adultes handicapés, ses bénéficiaires seraient contents d’échapper au rabot, mais, là, je le répète, ce n’est ni juste socialement ni efficace pour soutenir la consommation.
J’en viens aux crédits des ministères.
J’ai entendu, monsieur le ministre du budget, que vous procédiez à une réduction sans précédent des effectifs de votre ministère. Dès lors, qu’il me soit permis de douter que les efforts annoncés dans la loi de finances rectificative pour 2009 en matière de contrôles fiscaux et de respect des conventions fiscales à la suite des G20 de Pittsburgh et de Londres reçoivent une traduction concrète.
De même, l’examen des crédits du ministère du travail nous conduit à vous mettre en garde : la baisse des emplois aidés empêchera la réduction du chômage. Si l’on se réfère aux chiffres les plus récents de l’OCDE, le taux de chômage s’établirait en France à 9,4 % en 2011-2012, ce qui rend vos propos peu crédibles. D’autant que, dans le cadre de la réforme des retraites, vous tablez sur un retour assez rapide à un taux de 4,7 %, soit le taux du chômage structurel, afin d’éponger le déficit des retraites grâce à un éventuel surplus de l’assurance chômage. Non seulement ce n’est pas crédible, mais c’est aussi fallacieux !
Autre exemple : le ministère du logement devrait considérablement diminuer les aides à la pierre. Pour compenser cette baisse, on nous annonce une taxe sur les organismes HLM. C’est tout de même extraordinaire !
M. Guy Fischer. C’est un comble ! Ce sont les plus démunis qui vont payer.
Mme Nicole Bricq. Cela signifie que l’on va substituer à la solidarité nationale la solidarité entre les ménages logés en HLM. Cela mérite d’être souligné !
M. Guy Fischer. C’est honteux !
Mme Raymonde Le Texier. Scandaleux !
Mme Nicole Bricq. Dans le domaine de la dette sociale, vous prolongez la durée de vie de la CADES en lui transférant les déficits de 2009 et de 2010, voire ceux de 2011. À cet égard, j’ai bien entendu M. Vasselle tout à l’heure. Autrement dit, vous reportez la charge de la dette sur les générations futures. Or vous ne pouvez ignorer que de tels transferts doivent être compensés par des recettes, à savoir par une augmentation de la CRDS, laquelle constituerait bien une hausse générale des prélèvements obligatoires.
M. Guy Fischer. Eh oui !
Mme Nicole Bricq. Par ailleurs, l’amélioration du déficit des collectivités territoriales en 2009 ne suffit pas à masquer la dégradation continue de leur situation financière, accentuée l’année prochaine par l’imprévisible rendement des nouveaux impôts se substituant à la taxe professionnelle et par le « dynamisme des dépenses sociales » des départements. Si l’on y ajoute l’incertitude qui pèse encore sur la répartition des compétences des collectivités locales, il est fort probable que l’année 2011 verra faiblir l’investissement local, investissement dont la diminution, je le rappelle, a déjà été constatée en 2009. Or il s’agit d’un moteur essentiel de l’économie.
Le moratoire sur les normes réglementaires ne permettra pas de compenser le gel en valeur des dotations de l’État. En effet, la circulaire du Premier ministre signée avant-hier, le 6 juillet, confirme que ce moratoire exclut les normes issues des règles internationales et européennes ou d’application des lois. Ce qui reste, c’est donc vraiment la portion congrue !
Sur la révision promise des bases, il a été dit au Comité des finances locales que, pour les locaux commerciaux, elle s’étalerait sur dix-huit mois, soit jusqu’en 2012, et que, pour les ménages, elle ne commencerait qu’à partir de 2013. Encore une fois, ce n’est ni juste ni crédible.
Pour conclure, il me faut dire un mot de la gouvernance des finances publiques. Le groupe Camdessus, qui a remis ses propositions au Premier ministre, suggère de modifier la Constitution et d’y inscrire une loi de programmation pluriannuelle sur trois ans qui s’imposerait aux lois de finances annuelles.
D’une part, aucune digue ne tient quand survient une crise systémique. Les Allemands, qui disposaient d’une règle constitutionnelle, l’ont appris à leurs dépens. D’autre part, une certaine flexibilité est nécessaire pour mener des politiques économiques contracycliques. Dans ce domaine – j’insiste sur ce point –, le passé ne plaide vraiment pas en votre faveur ! En effet, le Gouvernement s’est affranchi de la loi de programmation des finances publiques de 2009 dès qu’elle a été votée. Un transfert de déficit à la CADES sans apport de recettes exige une loi organique qui défera celle que vous aviez votée en 2005.
Madame la ministre, monsieur le ministre, ni crédibles, ni aptes à mobiliser le pays, vos orientations budgétaires sont à rejeter. Il n’y aura pas de redressement durable de nos finances publiques sans une profonde réforme fiscale. Nous en sommes convaincus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
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Demande de retour à la procédure normale pour l’examen d’un projet de loi
M. le président. J’informe le Sénat que, par lettre en date du jeudi 8 juillet, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, présidente du groupe CRC-SPG, a demandé le retour à la procédure normale pour l’examen du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth des Bahamas, relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale.
Acte est donné de cette demande, qui est communiquée immédiatement au Gouvernement.
11
Orientations des finances publiques pour 2011
Suite d'un débat sur une déclaration du Gouvernement
M. le président. Nous reprenons le débat sur la déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances publiques pour 2011, qui sera suivi d’un vote sur cette déclaration.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Madame le ministre, monsieur le ministre, je commencerai tout d’abord par mettre fin à un suspens insoutenable : le groupe UMP votera vos orientations budgétaires, avec détermination et confiance.
M. Guy Fischer. Ouf ! (Sourires.)
M. Gérard Longuet. Néanmoins, cela ne nous empêchera pas de vous faire part de notre analyse.
Ensuite, je tiens à vous présenter les excuses du groupe UMP, qui, s’il est bien représenté qualitativement, est un peu faible en termes d’effectifs aujourd'hui. Cela s’explique par le fait que le projet de loi de réforme des collectivités territoriales a nécessité une mobilisation intense de notre part depuis le début de la session extraordinaire et qu’il nous a retenus tard dans la nuit hier. Je serai d’ailleurs amené à évoquer ce sujet au cours de mon intervention.
Sachez toutefois que le groupe UMP est très attentif à votre action et qu’il la soutient.
Le groupe UMP souscrit en outre à l’analyse de MM. les rapporteurs généraux, Philippe Marini et Alain Vasselle. Cher Philippe Marini, je tiens à vous dire que, dans sa majorité, le groupe UMP partage vos interrogations sur les taux de croissance.
Nous avons bien compris votre réponse, madame le ministre, mais nous sommes très soucieux de voir tracer un cheminement de la croissance qui soit le plus rassurant possible pour l’opinion française et qui soit fondé sur les perspectives les plus crédibles. Vous nous avez rassurés pour 2010. Les prévisions pour 2011 semblent réalisables. Plus nous parviendrons à équilibrer notre budget grâce à nos propres efforts avant de compter sur la conjoncture internationale, plus nous sécuriserons nos objectifs.
Je ferai deux observations de nature politique au cours de mon intervention.
La première, c’est que la crise économique qui a démarré à l’automne 2008 n’est financière qu’en apparence – la réalité est, hélas ! autre –, même si les protagonistes sont des banquiers un peu irresponsables et des États sécurisants. Sans doute y a-t-il eu des comportements aberrants – l’économie de marché en a toujours suscité –, mais, pour l’essentiel, c’est la perte de compétitivité et de parts de marché des économies traditionnelles, en particulier, de l’Europe de l’Ouest et des États-Unis, qui, par l’accumulation des déficits, a conduit à la situation d’aujourd’hui et sur laquelle il convient de rendre des comptes.
Un second événement, plus récent, illustre bien la gravité de la crise, en particulier en Europe de l’Ouest. Les États qui se sont mobilisés très pertinemment à l’automne 2008, madame le ministre, afin de sauver le système bancaire ont rapidement montré, pour certains d’entre eux, les limites de leurs capacités d’intervention. D’une certaine façon, les difficultés de la Grèce et la solidarité européenne nous rappellent que les États ne peuvent pas, à long terme, s’exonérer d’un devoir de discipline.
Ainsi la solidarité européenne – elle a fonctionné en particulier grâce aux initiatives et à l’énergie du Président de la République et du gouvernement français – implique-t-elle, en contrepartie, un devoir de discipline autour de l’euro et une confiance mutuelle, fondée sur des chiffres et des comportements vertueux. C’est une affaire de gouvernement, de responsabilité et de finances publiques.
C’est la raison pour laquelle, et ce sera ma deuxième observation politique, le débat d’orientation budgétaire peut porter sur les hypothèses économiques qui soutiennent les grands agrégats que vous nous proposez.
En vérité, la crédibilité de notre pays repose bien plus sur le courage dont il fait preuve pour affronter les faiblesses économiques et structurelles qui sont notoirement les siennes depuis plus d’une génération, en tout cas depuis le dernier vote d’un budget à l’équilibre. C’était, me semble-t-il – je parle sous le contrôle de Jean-Pierre Fourcade –, en 1981…
M. Jean-Pierre Fourcade. En 1974, pour l’année 1975 !
M. Gérard Longuet. Eh bien, c’est pire encore ! (Sourires.) J’ai la mémoire qui flanche…
Les orientations structurelles que vous nous présentez, madame le ministre, monsieur le ministre, sont décisives. Le courage politique est certainement le meilleur investissement à court terme pour consolider, comme l’évoquait Philippe Marini, notre indépendance à l’égard des pays prêteurs. En effet, si nous sommes courageux, nous inspirons confiance. Et si nous inspirons confiance, nous pouvons emprunter, et à bon compte.
J’évoquerai maintenant très rapidement quatre réformes.
Première réforme : celle des dépenses publiques de l’État. Il faut savoir – je m’exprime sur un sujet dont j’ai la responsabilité et qui est exemplaire des difficultés de l’État – que le « 1 sur 2 » dans la fonction publique implique aujourd'hui des réformes structurelles. On ne peut pas indéfiniment diminuer les effectifs sans se poser la question de la finalité d’un certain nombre de services publics. Ainsi, je n’imagine pas que l’on puisse poursuivre cet effort dans l’éducation nationale sans se poser la question de l’offre scolaire dans notre pays.
En ce sens, la théorie du rabot évoquée – cet outil est à la mode ! – n’est intéressante que parce qu’elle nous oblige à réfléchir à une réforme structurelle et à l’engager.
Deuxième réforme, dans le domaine de la dépense sociale : celle du régime des retraites. Le projet qui devrait être présenté en conseil des ministres le 13 juillet prochain est très intéressant, car il prévoit un effort équilibré entre travail, d’une part, et impôt ou cotisation, d’autre part. Grosso modo, le rapport sera le suivant : 70 % du financement sera assuré par l’allongement de la durée de cotisation, 30 % par une hausse des prélèvements.
Je trouve cette réforme extrêmement vertueuse dans son esprit. Elle est de nature à sécuriser les observateurs extérieurs de la France et à leur donner confiance en nous, car le véritable réservoir de notre pays, c’est non pas l’impôt, mais la mobilisation des capacités de travail, trop longtemps sous-utilisées.
Troisième réforme : le coût du travail. Il nous faut désormais commencer à réfléchir sérieusement à la sortie, non pas réglementaire – elle a été assurée –, mais financière des 35 heures.
Avec la réforme des retraites, nous allons franchir un premier pas, si naturellement le Parlement suit les propositions du Gouvernement, qui est prêt à satisfaire une vieille revendication, messieurs les rapporteurs généraux, tant de la commission des finances que de la commission des affaires sociales, à savoir l’annualisation du calcul des allégements généraux de charges sociales patronales sur les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC.
Au fond, nous faisons figure de promoteur de projets nouveaux, de puissance innovante…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous sommes un laboratoire !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. De précurseur !
M. Gérard Longuet. … de précurseur, en effet !
Nous nous réjouissons que, contrairement à ce qui est dit parfois, le Parlement fasse preuve d’une grande créativité, et sa majorité d’une grande liberté face à l’exécutif. Alors que cette dernière propose depuis longtemps une telle annualisation, son obstination est aujourd'hui récompensée.
Il est intéressant que le chantier du coût relatif du travail soit enfin ouvert dans notre pays.
En matière d’orientation budgétaire, les mesures préconisées apportent une sécurité sans doute comparable, voire supérieure, aux prévisions statistiques ou à des agrégats projetés dans l’avenir parce qu’elles sont assurément vertueuses et parfaitement tangibles.
À cet égard, madame le ministre, j’attire votre attention sur le problème du financement de l’économie privée, en particulier des entreprises – cela relève directement de votre responsabilité –, financement qui, dans notre pays, repose très largement sur le crédit bancaire.
Vous avez pris des initiatives à l’échelon international afin de réguler les activités bancaires, de les « normer », voire de les taxer. C’est parfait, mais je tiens à souligner que, en France, les entreprises n’ont pas de fonds propres, en tout cas pas suffisamment, et qu’elles vivent très largement grâce au crédit bancaire. L’application stricte des recommandations de Bâle 3 nous inquiète, comme elle inquiète toutes les entreprises qui vivent du crédit bancaire. Si les banques sont amenées à renforcer leurs fonds propres et à devoir respecter des ratios plus contraignants, elles risquent de conduire les banques à prêter moins facilement.
Il est compréhensible d’exiger des banques qu’elles participent à l’effort de solidarité. Je rappelle, comme vous l’avez fait vous-même avec beaucoup d’autorité, qu’elles ont remboursé le prêt que l’État leur avait accordé afin de passer le cap difficile de l’automne 2008. Si les banques venaient à être taxées davantage, cela se traduirait par une moindre constitution de fonds propres et, par effet de levier, par une offre de crédit plus faible. C’est là une menace qu’il convient de ne pas négliger.
Nous évoquons, dans le cadre de ce débat d’orientation budgétaire, des idées quelque peu éloignées des agrégats que vous présentez et que Philippe Marini a parfaitement analysés. Mais ces réformes courageuses vaudront au Gouvernement le soutien du groupe UMP. Ces initiatives sont en effet à même, au travers du jugement que des professionnels extérieurs portent sur la France, de rassurer les Français sur la capacité de leur économie à surmonter ces difficultés.
Votre proposition est précise – les chiffres ont été évoqués, je n’y reviendrai pas – et cohérente. Elle s’appuie en effet pour l’essentiel sur une diminution de la dépense publique, ce qui est assurément la façon la plus courageuse de redresser les finances publiques.
Je voudrais aborder une quatrième réforme, avant de proposer, en guise de conclusion, une réflexion européenne. Il s’agit de celle qui concerne les collectivités locales, évoquées d’ailleurs par Philippe Marini.
Vous vous trouvez en effet, madame le ministre, au sein d’une assemblée particulièrement attentive aux collectivités locales ! Nous vous remercions d’avoir indiqué que l’article 76 de la loi de finances initiale pour 2010 prévoyant une clause de revoyure donnerait lieu à un rendez-vous particulier et distinct dès l’automne prochain.
Nous avons besoin de savoir de quelle façon le Gouvernement entend gérer l’équilibre entre le gel des aides et celui des normes et des transferts. Je le dis avec beaucoup de conviction et sans effet de manches, il serait insupportable pour les responsables des collectivités locales de voir leurs ressources stagner – ce qui, après tout, n’est pas anormal, l’effort de solidarité nationale doit peser sur les ministères comme sur les collectivités –, tout en continuant à devoir dépenser plus encore du fait de normes nouvelles ou de transferts que je qualifierais de « sournois » ! En effet, si les transferts officiels sont compensés, les transferts sournois ne le sont pas…
Nous attendons notamment du Gouvernement qu’il engage, dans les plus brefs délais, un débat sur la dépendance, car ce sujet commande l'équilibre des finances départementales, lesquelles influent sur le niveau de solidarité envers les petites communes sur l'ensemble du territoire national.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je suis bien de cet avis !
M. Gérard Longuet. Je souhaiterais enfin que votre intervention de l’automne prochain, à l’occasion de l’application de l’article 76 de la loi de finances pour 2010, fasse état du problème soulevé par la péréquation, au niveau tant national, entre les départements, que local, entre les communes. C’est manifestement le point faible du dispositif de contribution économique territoriale que nous avons adopté.
Madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien qu’attaché à l’indépendance de mon pays – ou, plutôt, parce que j’y suis attaché –, j’estime qu’il est parfaitement normal d’assurer une coopération budgétaire étroite avec l’Union européenne. Nous avons trop bénéficié de l’euro pour ne pas en accepter la discipline. Nous avons trop souvent la tentation de donner des leçons à l’ensemble des autres pays de l’Europe pour ne pas être nous-mêmes exemplaires. Je suis convaincu qu’une telle coopération nous permettra de nous exprimer plus librement encore ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame le ministre, monsieur le ministre, je commencerai par exprimer un regret : celui de constater que le Gouvernement n’a pas amorcé le redressement de nos finances publiques dès le budget 2010. J’avais fait des propositions en ce sens, comme vous vous en souvenez, portant à la fois sur les niches sociales et fiscales. J’avais formulé un certain nombre d’observations sur les actions entreprises par nos partenaires européens, notamment l’Allemagne. Nous avons en effet surpassé cette année notre voisin allemand en matière d’emprunts.
Mais je constate avec plaisir que le programme triennal que vous nous proposez comporte des orientations extrêmement nettes concernant la reprise en main de l'ensemble du secteur financier. La décision est moins aisée en matière de finances sociales. Cela est cependant parfaitement clair en ce qui concerne le budget général.
Comme l’a souligné le président Longuet, la majorité vous soutient dans l’effort courageux que vous allez mener. Votre action sera sans nul doute critiquée. D’aucuns vous accuseront vraisemblablement, si vous touchez à telle niche ou à tel crédit budgétaire, d’affaiblir la place de la France dans le monde ou de porter atteinte à des éléments fondamentaux de son développement.
Tout en approuvant l’ensemble de vos propos, je souhaiterais formuler deux observations.
La première porte sur l’objectif réel qui doit être visé par la reprise en main des finances publiques : il s’agit de la stabilisation de l’endettement, puis de sa réduction. Afin d’y parvenir, il faudra renouer dans les plus brefs délais non pas avec les 3 % de déficit public, seuil fatidique et mythique, mais avec l’équilibre du solde primaire entre les dépenses et les recettes de l’État. Il conviendra de n’avoir comme déficit que la charge de la dette.
Personne, ici, n’ignore que nous bénéficions à l’heure actuelle de taux d’intérêt extrêmement faibles. Si nous étions parvenus à l’équilibre du solde primaire en 2010, notre déficit budgétaire serait égal à 2 % du PIB, soit 40 milliards d’euros seulement. Mais nous devons nous préparer à l’augmentation inéluctable des taux d’intérêt dans les trois prochaines années.
C'est la raison pour laquelle l’objectif que nous devons rechercher est bien celui de l’équilibre du solde primaire, qui correspond à l’équilibre entre les dépenses et les recettes de l’État. Les mesures proposées au travers des lettres de cadrage budgétaire devraient permettre de remplir partiellement cet objectif. Monsieur le ministre du budget, s’il vous sera possible, la première année, de diminuer le déficit public puisque les mesures de relance arriveront à leur terme, cette option ne vous sera plus ouverte la deuxième année. Il vous faudra alors, pour passer de 6 % à 4,6 % de déficit, vous attaquer à l’ensemble des niches et au noyau dur des dépenses.
Vous avez dit, dans votre discours, que vous étiez prêt à cibler aussi bien les missions des ministères que les dépenses des opérateurs de l’État. Je me réjouis de ces propos, car ces dernières représentent, à mon avis, des sources d’économies importantes.
Madame le ministre, je regrette autant que vous que nous devions recourir de façon massive, compte tenu de la faiblesse des taux d’intérêt, aux bons du Trésor. J’entends que les taux des bons du Trésor à trois mois, six mois et un an sont, aujourd’hui encore, extrêmement faibles et qu’il serait absurde de se priver d’une telle ressource. Cela est vrai.
Cependant, il ne fait aucun doute qu’une augmentation de ces taux aura des conséquences directes et immédiates sur les bons du Trésor. Souvenons-nous qu’en 2008 le taux moyen des bons du Trésor à un an était de 3,65 % ; il est descendu aujourd’hui à 0,56 % ou 0,57 % seulement. Tant mieux ! Cela constitue néanmoins un risque budgétaire extrêmement important à l’égard duquel il nous faudra être très vigilants.
C’est pourquoi il convient d’envisager la création d’instruments d’épargne longue. Car ce qui nous distingue de nos partenaires britanniques, allemands et italiens, c’est la faiblesse de nos instruments en la matière et l’importance de l’épargne liquide. Il importe d’œuvrer au durcissement de l’épargne, en vue d’une affectation optimale.
À l’heure actuelle, d’après les indications fournies, quand nous empruntons sur les marchés à moyen et long termes, le financement provient pour un tiers, des résidents, pour un tiers, des particuliers, des banques et des entreprises de la zone euro, et enfin, pour un tiers, du reste du monde, dont l’Angleterre fait partie. Ce sont ainsi les deux tiers de notre dette qui se trouvent détenus par des non-résidents ! Cette dépendance constitue un risque non négligeable pour notre souveraineté comme pour l’équilibre de nos comptes, comme l’a souligné très justement M. Marini tout à l’heure.
Nous devons avoir pour objectif le rétablissement de l’équilibre budgétaire, le déficit ne devant être constitué que de la charge de la dette. Cela devrait nous permettre de stabiliser la dette dès 2013 et de la réduire à partir de 2014. Monsieur le ministre, ne suivez pas, je vous en prie, l’exemple de vos prédécesseurs qui ont prétendu consacrer en 2009 et 2010 5 milliards d’euros à la réduction de la dette via le compte d’affectation spéciale des participations financières de l’État ! Cela s’est réduit à peau de chagrin en 2009, et encore plus en 2010 ! Je souhaiterais par conséquent que vous nous présentiez des propositions honorables et cessiez d’entretenir ce mythe du remboursement de la dette au rythme de 5 milliards par an, que nous sommes bien incapables d’assumer !
Ma seconde observation sera nettement plus politique.
Nous sommes tous, ici, environnés de contribuables qui s’inquiètent de la réduction des niches fiscales. Il est clair que votre théorie du rabot, que je comprends parfaitement puisque je l’ai autrefois expérimentée, agite un certain nombre de personnes qui ont trouvé un moyen commode de diminuer leur contribution à l’impôt sur le revenu et reçoivent des conseils avisés et intéressés afin de réduire leur charge fiscale.
Le débat sur l’application du rabot et la désignation des niches s’annonce extrêmement difficile. La réforme concernera tant les emplois à domicile que les aides au logement, mais également l’outre-mer, littéralement suspendue à l’issue de ce débat, et certaines niches sociales. On entendra probablement, comme c’est le cas depuis dix ans, que la réduction des niches sociales entraînera nécessairement la montée du chômage et la baisse de l’emploi.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade. Cela fait dix ans que l’on entend cet argument. Or, à y regarder de plus près, les allégements de charges bénéficient bien plus aux entreprises commerciales, en particulier aux supermarchés, qu’aux entreprises industrielles. Il conviendra donc d’éclaircir ce point en précisant l’identité des bénéficiaires.
Je note cependant que vous entamez la procédure. Vous êtes sur le point de nous proposer, tant dans le budget que dans la loi de financement de la sécurité sociale, certaines opérations permettant de dégager quelques milliards d’euros de recettes supplémentaires en réduisant les niches sociales. Il est toutefois regrettable qu’aucun rapport sérieux permettant de connaître précisément les bénéficiaires de ces 30 milliards d’allégements de charges n’ait été publié. Or, il semble que les niches sociales bénéficient surtout au secteur protégé de l’économie française, au détriment du secteur exposé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il faudra y regarder de beaucoup plus près, afin d’anticiper correctement les bénéfices que nous pouvons attendre d’une telle mesure.
En conclusion, je voudrais souligner avec force qu’il sera impossible – je pèse mes mots – d’exiger des contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu qu’ils participent à la réduction de ces niches sans suspendre, en parallèle, l’application du bouclier fiscal.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Catherine Dumas. Pourquoi maintenir l’ISF ?
M. Jean-Pierre Fourcade. Je connais l’attachement du Président de la République au bouclier fiscal. Le concept d’un plafonnement de l’imposition me paraît par ailleurs tout à fait raisonnable. Je considère cependant qu’il n’est pas opportun d’engager un retour à l’équilibre de nos finances publiques sans suspendre – je dis bien « suspendre » – le bouclier fiscal.
M. Guy Fischer. Il faut même le supprimer !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il convient d’opérer cette suspension jusqu’au rétablissement de l’équilibre entre les dépenses et les recettes. Je déposerai, au moment de l’examen de loi de finances, un amendement pour en demander la suspension. J’ai bon espoir que la majorité et l’opposition parviennent à un accord sur le sujet. En tout cas, il me semble politiquement et socialement impossible de demander de tels efforts aux Français sans suspendre l’application du bouclier fiscal.
Mme Raymonde Le Texier. C’est l’évidence même !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La trilogie, sinon rien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La tétralogie, même !
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est ce message que je tenais à délivrer. Je pense que cette idée ralliera beaucoup de sympathisants d’ici à la discussion du budget.
M. Guy Fischer. La majorité s’insurge enfin !
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est là le corollaire absolu de la reprise en main de l’impôt sur le revenu et des dépenses publiques. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que l’ensemble des ministères sont actuellement en train de recevoir leurs lettres de cadrage budgétaire, dans la perspective du projet de loi de finances pour 2011, et que le Gouvernement prépare un véritable plan de « super-austérité » en matière sociale, ce débat est, pour moi et, au-delà, pour l’ensemble des membres de notre groupe, l’occasion de réaffirmer notre opposition aux mesures antisociales qui sont en cours d’élaboration et, pour certaines, déjà à l’œuvre.
Disant cela, je pense en particulier à la réforme des retraites, vouée à être à la fois injuste et inefficace, à la réforme de l’assurance maladie, qui s’applique déjà, ou encore à la réforme de la prise en charge de la dépendance.
Toutes ces mesures sont ou seront marquées du double sceau de la rigueur, une rigueur à l’application aveugle, et de l’injustice sociale. Comme toujours, vous préférez réduire les droits et les mesures de protection des plus faibles plutôt que de rechercher les moyens de trouver des ressources supplémentaires, notamment du côté des plus riches.
À ce titre, votre projet en matière de retraites est exemplaire. Comme vous constatez qu’il devrait manquer 100 milliards d’euros à l’horizon de 2050 pour financer les retraites, vos principales solutions résident en une importante réduction des droits, qui ferait de notre régime le plus rétrograde de l’Union européenne.
En fait, le report de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans et à 67 ans à taux plein est une mesure immédiate qui vous permettra d’économiser pas moins de 7 milliards d’euros, au détriment des salariés ayant commencé à travailler tôt. Et l’augmentation progressive des annuités exigées pour constituer une carrière complète en est une autre, à long terme cette fois-ci, pour repousser la période d’ouverture de droits. Il en va de même des mesures prises à l’encontre des fonctionnaires ou de celles qui tendent à réduire les effets de ce qu’il est convenu d’appeler les « avantages familiaux ».
Avec les mesures drastiques d’économie imposées à l’assurance maladie, on ne sait que trop quelles seront les orientations retenues ! Il s’agira, comme hier, de la hausse des forfaits et autres franchises médicales, et de la multiplication des déremboursements d’actes et de médicaments.
Et vous vous attaquerez naturellement au mécanisme particulier mis en place pour les patients atteints d’affections de longue durée – en général, ce sont des personnes âgées –, comme le diabète, le cancer, des problèmes cardiaques ou le sida, qui nécessitent des soins et des prises en charge médicales longues, voire permanentes.
Pour les 7 millions de personnes actuellement concernées, vous entendez, comme le préconise la Haute Autorité de santé, sortir de la logique du remboursement à 100 % pour instaurer un système dans lequel les dépenses de santé ne seraient intégralement prises en charge que dans la limite d’un plafond défini en fonction des revenus de chaque famille.
En d’autres termes, cela constituerait une rupture sans précédent avec le principe issu du Conseil national de la Résistance, selon lequel « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».
De la même manière, l’annonce faite lundi dernier, dans un grand quotidien de la presse économique, de revaloriser l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, non pas de 4,5 % comme s’y était engagé le Président de la République, mais de 3 % seulement, ce qui repousse à un an de plus la revalorisation globale de 25 % prévue pour cette allocation, est une nouvelle démonstration de cette politique de rigueur que nous n’avons de cesse de dénoncer.
Une fois de plus, ce sont les personnes les plus en difficulté qui auront à supporter les effets de votre politique. D’ailleurs, nos concitoyens en situation de handicap seront, eux aussi, sévèrement frappées par la réforme des retraites, puisqu’ils auront, à l’évidence, bien des difficultés à accéder à 62 ans à la retraite à taux plein, compte tenu du faible taux d’emploi des personnes handicapées.
Toutes ces mesures sont prises au nom d’une approche particulièrement cynique de la situation. Puisque vous refusez de trouver les ressources supplémentaires nécessaires au bon fonctionnement des comptes sociaux, par exemple en taxant le capital, en organisant une modulation de cotisations sociales sanctionnant les entreprises qui favorisent la spéculation, en supprimant les exonérations inefficaces et les exemptions de cotisations sociales ou fiscales qui grèvent l’emploi et les salaires, vous faites pression sur les dépenses sociales, et ce au moment même où la crise économique et financière qu’ont provoquée les spéculateurs appelle précisément au renforcement de nos solidarités.
Par ailleurs, vos annonces relatives aux exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires, notamment celles qui concernent les emplois à la personne, nous laissent pour le moins dubitatifs.
Pour notre part, nous sommes depuis toujours défavorables à de telles exonérations, qui, selon la Cour des comptes, n’ont que peu d’effets sur le niveau d’emploi, si ce n’est la création de trappes à bas salaires et la précarisation du salariat. Or vous ne cessez de les justifier, projet de loi de financement de la sécurité sociale après projet de loi de financement de la sécurité sociale, par leurs effets positifs sur l’emploi.
C’est d’ailleurs très simple. Les exonérations constituent désormais votre seule et unique politique en matière d’emplois ; c’est l’alpha et l’oméga de votre action. Il faut dire que vous avez renoncé à toute politique industrielle. Pour satisfaire aux exigences du MEDEF, vous vous refusez à sanctionner les pratiques scandaleuses que constituent les licenciements spéculatifs ou financiers.
Mais si vous revenez, même partiellement, sur ces exonérations de cotisations sociales, nous sommes en droit de nous demander ce qu’il restera demain de la politique du Gouvernement en faveur de l’emploi.
En outre, comment ne pas aborder la question de l’augmentation de la CSG et de la CRDS ?
Ces deux contributions sont principalement supportées par les familles. Elles participent, pour une part non négligeable, au financement de notre système de protection sociale, à tel point que celui-ci apparaît de plus en plus fiscalisé et, par voie de conséquence, de plus en plus supporté par les foyers, en lieu et place d’un financement issu du travail.
Au sein du groupe CRC-SPG, nous sommes opposés à une telle augmentation.
D'une part, son application serait injuste. Les contribuables les plus riches, ceux que le Gouvernement protège grâce au bouclier fiscal, ne seront mécaniquement pas concernés par une telle hausse. C’est pourquoi nous réaffirmons, comme nous l’avons déjà fait à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, la nécessité d’exclure la CSG et la CRDS du bouclier fiscal, qu’il faut en fait supprimer.
D'autre part, elle serait insupportable lorsque l’on sait que la part patronale de cotisations sociales n’a pas augmenté depuis près de trente ans. Elle ne ferait qu’amplifier le transfert de financement des entreprises vers les particuliers.
Madame le ministre, monsieur le ministre, tel est votre projet, comme l’atteste par ailleurs votre volonté de faire financer par des contrats de type assurantiel la prise en charge de la dépendance.
Après avoir asséché les comptes sociaux, vous entamez la seconde phase : la réduction des dépenses sociales, afin de discréditer notre modèle solidaire. Voilà votre objectif ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis l’après-guerre, jamais le déficit public n’avait atteint de tels sommets : 144 milliards d’euros pour l’année 2009, soit 7,5 % du PIB.
Ce douloureux constat est encore renforcé par un niveau d’endettement sans précédent, comme nous n’en avions jamais connu en temps de paix, de près de 1 500 milliards d’euros.
La situation de nos finances publiques est d’autant plus inquiétante que le déficit constaté n’est absolument pas lié à des dépenses d’avenir, ni à des investissements. Il finance essentiellement les intérêts de la dette, les remboursements et les dépenses courantes.
Dans un tel contexte, il n’est pas étonnant de voir le chômage exploser ! Quand à la mauvaise gestion budgétaire s’ajoute une vision politique réduite aux acquêts des ajustements comptables, c’est tout le pays qui entre dans une spirale récessive et tous les citoyens qui règlent la note, à commencer par les plus fragiles.
« Ce n’est pas nous, c’est la crise ! », répond, en substance, le Gouvernement face à la montée des périls. Dommage, car le rapport de la Cour des comptes montre que ce déficit est pour les deux tiers d’ordre structurel !
Le déficit budgétaire de l’État pour 2009 s’élève à un montant record de 138 milliards d’euros, alors que la loi de finance votée en 2008 l’avait évalué à 67 milliards d’euros. Une erreur de 145 %, pour un différentiel de 71 milliards d’euros ! Or, à l’époque déjà, la crise était installée, la dégradation de notre conjoncture était anticipée par toutes les institutions compétentes et le groupe socialiste alertait le Gouvernement sur les risques qu’il y avait à appuyer des choix stratégiques sur des hypothèses hautement fantaisistes.
À un tel degré d’approximation, on peut se demander si un débat d’orientation des finances publiques qui érige « pifométrie » et « doigt mouillé » comme outils de construction des politiques publiques…
M. Guy Fischer. A un sens !
Mme Raymonde Le Texier. … est vraiment indispensable !
Dans ce contexte, voter sur la trajectoire des finances publiques pour les trois années à venir a d’autant moins de sens que le Gouvernement ne se soucie manifestement même pas de sa crédibilité.
Quand le ministre du budget appuie ses prévisions sur une croissance de 2,5 % pour les années à venir et laisse entendre que ce niveau de croissance est atteignable, son collègue ministre du travail prévoit, quant à lui, une croissance très faible dès lors qu’il s’agit de justifier la réforme du système de retraites.
M. Guy Fischer. Très bien vu !
Mme Raymonde Le Texier. Ce manque de cohérence nuit gravement au sérieux des analyses gouvernementales.
Politiques désastreuses et prévisions insincères ont conduit à une situation critique.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, vos explications indiquant comment vous allez réaliser une économie de 40 milliards d’euros dès 2011 ont au moins le mérite de la clarté, monsieur le ministre. Ce sont les classes moyennes, les bas salaires et les chômeurs qui vont payer.
M. Guy Fischer. Et voilà !
Mme Raymonde Le Texier. Et ce même gouvernement, qui leur réclame de la sueur et des larmes, rembourse 30 millions d’euros à une milliardaire…
Que l’austérité soit à l’ordre du jour est un fait. Mais la question se pose de la justice sociale dans la répartition de l’effort. Quand la plus importante réforme fiscale du Gouvernement, la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, aboutit à faire payer aux plus pauvres l’extension des privilèges des plus riches, il est difficile de porter un message d’effort et de rigueur !
En outre, ces cadeaux fiscaux ont été financés à crédit. La baisse des recettes pour l’État et la sécurité sociale a été la sanction immédiate d’un tel choix.
Pour autant, il n’est toujours pas à l’ordre du jour de ce gouvernement de s’en prendre autrement qu’à la marge aux retraites « chapeau », stock-options et autres niches fiscales et allégements d’impôts. Pourtant, le coût des allégements d’impôts, de la baisse du taux de TVA dans la restauration – « un truc à plus de 3 milliards par an », dixit M. le ministre – et de la mise en œuvre de la loi TEPA s’élève à 5,2 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 111 milliards d’euros de remboursements, dégrèvements, niches fiscales, soit plus du quart du budget de l’État !
Les annonces médiatisées par le Gouvernement, au lieu de lancer une réflexion sur les niches fiscales, ne « tapent » réellement que sur les aides publiques. En l’occurrence, les publics visés sont les chômeurs, les étudiants, les handicapés et les employés à domicile. S’attaquer aux revenus des plus démunis est une démarche indécente quand la solidarité et la protection de notre modèle social devraient inspirer les réformes réelles que notre société mérite.
À ce titre, la situation des finances sociales réclame une attention particulière.
Le déficit de la sécurité sociale incluant l’ensemble des régimes de base et le fonds de solidarité vieillesse s’est fortement creusé en 2009, pour atteindre 21,3 milliards d’euros.
Les quatre branches du régime général ont toutes enregistré une dégradation de leur solde financier, de manière plus prononcée pour l’assurance maladie. Redevenue la branche la plus déficitaire, celle-ci représente un peu plus de la moitié du déficit global.
Le FSV a également renoué avec un déficit important, de plus de 3 milliards d’euros. L’assurance chômage souffre, elle aussi, d’un fort déficit, ses dépenses ayant augmenté de 21,7 %.
Enfin, la dette des organismes sociaux, somme de la dette brute portée par la CADES et de celle directement à la charge des administrations de sécurité sociale, a atteint 155,8 milliards d’euros à la fin de 2009, soit plus de 8 % du PIB.
Tous ces déficits continuent à se creuser en 2010.
L’ensemble du régime général et du FSV serait ainsi déficitaire de plus de 31 milliards d’euros, soit une dégradation de plus de 21 milliards d’euros en l’espace de deux ans. En l’absence de reprise de dette par la CADES, le découvert de trésorerie de l’ACOSS serait de l’ordre de 55 milliards d’euros à la fin de 2010.
Or l’ACOSS n’a pas vocation à supporter une dette durable : sa mission est seulement de couvrir les besoins de trésorerie du régime général. La transformer en « CADES bis », c’est faire supporter au régime général des frais financiers croissants et nier le caractère structurel de cette dette : voilà une double erreur qui devrait encore accentuer les difficultés du régime. Tout cela a déjà été fort bien exposé par le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle.
La solution prévue par la loi est une reprise de dette par la CADES, accompagnée d’un relèvement de la CRDS afin de ne pas allonger la durée de vie de cette caisse.
Cependant, le refus du Gouvernement de tenir ses engagements et d’augmenter la CRDS pose problème face aux déficits qui, déjà, s’annoncent. Au-delà des 87 milliards d’euros de déficits cumulés des années 2009, 2010 et 2011, susceptibles d’être transférés dès 2011 à la CADES, ce sont 75 milliards d’euros de dette supplémentaire qui, mécaniquement, devraient s’ajouter de 2012 à 2016.
Pour éviter de transférer les ressources correspondant à ces dettes, le Gouvernement a choisi de faire sauter le verrou de 2021 et de reporter l’échéance à 2025. D’ores et déjà, c’est l’horizon de 2030 qui apparaît comme le plus crédible.
C’est sans doute pourquoi le Gouvernement n’hésite pas à détourner, au profit de la CADES, le fonds de réserve des retraites, censé pourtant répondre à des dépenses d’avenir plus lointain. Tel ne sera pas le cas puisque ce fonds est à présent affecté au financement des dettes résultant des déficits de l’assurance vieillesse entre 2011 et 2018.
Néanmoins, cela ne suffit pas encore. Si l’urgence est donc posée, la question des ressources, elle, reste floue, les dispositifs peu lisibles, tandis que les réformes potentielles sont réduites au « rabot comptable ».
Autrement dit, le Gouvernement, faute d’agir sur le fond, choisit, au final, de faire financer par nos enfants et nos petits-enfants nos propres dépenses. C’est une charge indue alors que ceux-ci auront à faire face aux pleins effets du vieillissement de la population et de la dépendance.
Le rééquilibrage des comptes sociaux est une nécessité que ne nie pas la gauche – elle l’a prouvé en son temps –, consciente que l’ampleur des déficits annuels et cumulés remettrait en question, à terme, notre modèle de répartition.
Malheureusement, si nous pouvons éventuellement nous mettre d’accord sur les chiffres et sur l’évaluation de la situation actuelle, nous ne partageons ni votre analyse des causes ni les prévisions sur lesquelles vous fondez vos anticipations, encore moins vos objectifs et les moyens que vous mettez en œuvre pour les atteindre.
En 2007, dans le journal Challenges, Denis Kessler affirmait que la cohérence du projet sarkozyste était de « défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ». Nous nous approchons aujourd’hui de la réalisation de cette sale besogne. Laisser filer les déficits est encore le meilleur moyen d’arriver à ce résultat, sans en assumer la paternité.
Sous couvert de programmes de stabilité, les mêmes causes produisant les mêmes effets, le Gouvernement se livre à un exercice d’ajustements comptables dont les insuffisances de départ font les mauvais résultats à l’arrivée.
Prenons l’annonce d’un ONDAM fixé à 2,85 % par an de 2010 à 2013. Même dans ce cas, le déficit du régime général de sécurité sociale, dû pour moitié au déficit de l’assurance maladie, plus précisément au coût des pathologies lourdes, atteindrait encore 27 milliards d’euros en 2011 et 35 milliards d’euros en 2013.
Or les hypothèses qui ont amené à construire ces projections sont particulièrement optimistes : croissance de 2,5 % et augmentation de la masse salariale de 5 % par an de 2011 à 2013. Dommage que, une fois de plus, de la Commission européenne au FMI, en passant par l’OCDE, aucune institution ne prévoie une croissance de cet ordre. Au mieux, elle pourrait atteindre 2 %, au pire, elle se situerait autour de 1,5 %.
Si l’objectif des dépenses de l’ONDAM a été fixé à un peu plus de 2,8 %, alors que la croissance spontanée des dépenses d’assurance maladie est plus proche de 4,5 % par an, ce n’est pas, hélas ! parce que le Gouvernement a décidé de prendre à bras-le-corps la question du coût prohibitif de la tarification à l’acte ou du développement d’une médecine de prévention. C’est simplement parce qu’un tel chiffre permet de construire un scénario « vendable », à défaut d’être crédible.
C’est ainsi que les projets de loi de financement de la sécurité sociale successifs se sont souvent caractérisés par des annonces volontaristes que la réalité a toujours infirmées, des sous-budgétisations récurrentes et des mesures d’économie centrées sur les assurés sociaux : franchises, déremboursements, etc.
Pourtant, l’enjeu de la solidarité doit mériter que l’on change la forme du système si c’est pour mieux en préserver l’esprit. Mais chaque fois que la « droite décomplexée » s’attaque à ces questions, c’est la confiance des Français dans la préservation des acquis fondamentaux que sont l’accès généralisé aux soins et une retraite décente pour le plus grand nombre qui s’effrite.
N’aborder ce problème que sous l’angle de la baisse de la prise en charge de l’assurance maladie est délétère. Il y a maintenant des années que les projets de loi de financement de la sécurité sociale se réduisent à cela. Résultat : les dépenses continuent à augmenter, les injustices s’accroissent et le niveau de santé baisse.
Un certain nombre de pistes, néanmoins, restent à explorer. Le groupe socialiste, débat d’orientation budgétaire après débat d’orientation budgétaire, projet de loi de financement de la sécurité sociale après projet de loi de financement de la sécurité sociale, n’a cessé d’avancer des propositions. L’économie de la santé est socialisée, mais l’exercice de la médecine est principalement libéral. N’est-il pas temps de travailler à de vrais projets de maisons de santé, de réfléchir à une réforme de la rémunération des médecins en mettant en place une tarification forfaitaire ?
De même, la médecine du travail et la médecine scolaire peuvent jouer un grand rôle dans la prévention et l’éducation à la santé ; il est temps d’arrêter d’en faire les parents pauvres de la médecine. Voilà qui aurait une autre allure que la révision des critères d’entrée en affection de longue durée, engagée dans le but d’exclure le plus de malades du remboursement à 100 %, ou que la poursuite du déremboursement des médicaments.
Madame la ministre, monsieur le ministre, malheureusement, une fois de plus, les alertes des parlementaires de votre propre majorité, comme les propositions de l’opposition ne devraient pas infléchir votre politique.
Rapport sur la situation de nos finances sociales après rapport, la commission des affaires sociales du Sénat n’a pu que constater la triste réalité : malgré des signaux de plus en plus alarmants, le Gouvernement ne propose que des mesures inadaptées à la gravité de la situation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, être parlementaire, c’est être généraliste et s’occuper des affaires de la société.
Or, ces derniers temps, en matière économique, nous avons été servis ! Le contexte international, marqué par la récession, a engendré bien des difficultés sociales dans notre pays.
Cette année, au-delà de la situation exceptionnelle de notre déficit, le calendrier parlementaire a été chargé puisque nous avons eu à traiter du grand emprunt, des questions spécifiques liées au Grand Paris, du problème de la Grèce et de plusieurs collectifs budgétaires.
Le débat sur les orientations budgétaires est l’occasion pour le parlementaire de base, celui qui n’est pas spécialiste en la matière, de donner son sentiment. Je tiens donc à rendre hommage à M. le rapporteur général de la commission des finances, tant il est vrai que, cette année, son rapport d’information est extrêmement complet. Je regrette simplement que sa publication intervienne quelque peu tardivement, au milieu d’un débat difficile. Quoi qu’il en soit, ce document fait particulièrement ressortir le contexte international et la nécessaire crédibilité qui doit caractériser les plans d’ajustement.
Nous nous trouvons dans une situation paradoxale. Depuis des années, la crédibilité internationale de la France est grande grâce à l’action du Président de la République et à la vôtre, madame le ministre. Notre pays intervient d’une voix forte dans toutes les crises majeures, notamment depuis le début de la crise internationale.
Paradoxalement, dès qu’il s’agit des finances publiques et du budget de l’État, cette crédibilité, nous devons la retrouver : quelle que soit la méthode retenue, les ajustements opérés ou la conjoncture, cela fait maintenant trente ans que nous peinons à trouver des solutions.
Monsieur le ministre, vous avez de l’expérience, et même beaucoup, mais force est de constater que vous prenez vos fonctions à un moment où il faut sortir des sentiers battus. Le rapporteur général de la commission des finances l’a souligné : nous devons cette fois réussir, pour retrouver notre crédibilité.
Deux économistes de l’OCDE ont réalisé une étude sur tous les plans d’ajustement mis en œuvre au cours des trente-sept dernières années. Il apparaît que ceux d’entre eux qui ont échoué touchaient immodérément à la fiscalité, essayaient par transferts sociaux de protéger les ménages les plus modestes et taillaient dans les dépenses d’investissement. C’était, en réalité, la solution de facilité.
Le problème qui nous occupe ici est celui du juste équilibre entre les économies à réaliser sur la dépense et les recettes potentielles qui permettent d’accepter celle-ci. Sur ce point, il me semble que deux sujets ne font pas nécessairement l’objet d’un consensus au sein de la majorité.
Le premier sujet, je suis extrêmement surpris que nous n’en ayons pas encore parlé, est le périmètre de l’État. Pour moi, il y a beaucoup trop d’État, et de nombreux Français partagent ce sentiment. Au moment de la crise, il est apparu nécessaire que l’État redevienne plus protecteur, mais, automatiquement, ce retour en force a creusé les déficits.
Maintenant que notre pays commence à sortir peu à peu de la crise, du moins je l’espère, nul ne remet en cause l’ampleur beaucoup trop vaste du périmètre de l’État.
Les exemples sont multiples : récemment, en tant qu’élu parisien, j’ai suivi de près, avec Jean-Pierre Fourcade, le projet de Grand Paris, qui sera financé par les fonds publics alors que toutes les villes-monde optent pour une logique totalement différente.
Autre exemple parmi d’autres, le nombre de fonctionnaires. La réduction annoncée est effectivement une bonne chose puisque nous sommes le pays du G20 où la part salariale de la fonction publique est la plus importante. Cependant, pour motiver les fonctionnaires et s’afficher comme un employeur exemplaire, l’État reversera, et c’est naturel, la moitié du gain. L’effort, en réalité, ne portera budgétairement que sur 50 000 postes de fonctionnaires. Or la crédibilité d’un plan d’ajustement est établie sur la confiance.
À mes yeux, c’est un sujet qui n’a pas été assez sérieusement abordé. S’il est courant de s’interroger sur la taille des gouvernements successifs, on n’envisage jamais de réduire le nombre des directions dans l'administration, sauf parfois pour opérer un transfert sur des organismes extérieurs.
Madame le ministre, monsieur le ministre, une partie de votre majorité attend une délimitation plus précise quant à la réduction du périmètre de l’État, faute de quoi nous en resterons au classicisme que nous connaissons depuis trente ans, sans plus de succès.
Le deuxième sujet concerne les niches fiscales, que l’on considère généralement comme une réduction de la dépense.
Telle n’est pas ma vision des choses. Les niches fiscales, je m’inscris totalement en faux contre les propos de Jean-Pierre Fourcade, s’accompagnent d’une augmentation des prélèvements obligatoires. Le plan que vous nous annoncez prévoit 43 % de prélèvements obligatoires pour 2013, soit 1 % de moins qu’en 2007. Or, madame le ministre, vous l’avez souligné tout à l’heure, les pays émergents, notamment asiatiques, les États-Unis ou le Japon retrouvent une croissance plus rapidement que nous.
Nous partageons tous l’analyse du Président de la République : nous ne retrouverons la croissance que si nos prélèvements obligatoires baissent, car ils sont actuellement les plus élevés parmi ceux des pays du G20. Or, la réduction des niches fiscales représenterait une augmentation de 8 milliards d’euros de ces prélèvements obligatoires. Ces niches existent parce qu’elles étaient nécessaires pour rendre l’impôt acceptable,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Non !
M. Philippe Dominati. … ou parce qu’elles étaient indispensables pour stimuler un secteur d’activité. Si vous voulez supprimer des niches fiscales, qui, je le comprends bien, peuvent parfois paraître injustes, il faut réaliser plus d’économies par ailleurs. Je me distingue donc d’un certain nombre de mes collègues sur ces deux sujets.
Vous l’aurez compris, je suis un chaud partisan du maintien du bouclier fiscal, parce que je considère que la croissance de notre pays et la création d’emplois, qui vous est chère, sont à ce prix. Autrement, plus rien ne distinguera votre politique de programmes à peu près équivalents qui ont valu à la France une croissance atone depuis des années.
Dans votre intervention, madame le ministre, vous avez considéré que votre programme faisait preuve d’audace. Pour ma part, j’estime que vous pouvez encore faire un effort sur la réduction de la dépense publique, parce que, en ce domaine, il n’y a pas suffisamment d’audace ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. André Dulait.
M. André Dulait. Monsieur le président, madame et monsieur les ministres, mes chers collègues, ce débat sur les orientations des finances publiques intervient dans un contexte économique et financier sans précédent dans l’histoire économique mondiale. Nous subissons les effets d’une crise d’une ampleur jamais connue. Ces circonstances nous imposent des réductions budgétaires d’une importance vitale, non seulement pour les finances de l’État, mais surtout pour les générations d’actifs à venir qui devront assumer le poids d’une dette atteignant 80,3 % du PIB à la fin du premier trimestre de 2010.
Cependant, si nous appelons tous de nos vœux ces efforts et si nous approuvons cette politique de réduction des déficits publics, je souhaite attirer votre attention sur les mesures qui concernent la défense.
Depuis 2007, conformément à la volonté du Président de la République, nous avons engagé une réforme de notre politique de sécurité et de défense, afin de procéder à l’indispensable adaptation de notre outil de défense aux réalités stratégiques dictées par un contexte géopolitique mondial de plus en plus complexe.
Aujourd’hui, les circonstances nous conduisent à réduire nos dépenses et le ministère de la défense, comme les autres départements ministériels, n’y fera pas exception. Pour autant, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et la loi de programmation militaire ne sont pas morts.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si !
M. André Dulait. Il s’agit de faire preuve de flexibilité et de s’adapter à une situation financière profondément détériorée, mais nous devons également assumer nos responsabilités à l’égard des armées et de ceux qu’elles font vivre, au sens large. Aussi, je suis rassuré de constater que les coupes budgétaires ont été ramenées à 3,5 milliards d’euros par rapport aux 5 milliards d’euros initialement prévus. Les arbitrages rendus par le Président de la République démontrent que la défense ne sera pas la variable d’ajustement des restrictions budgétaires, comme cela a été si souvent le cas !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Pourtant, il le faudra bien !
M. André Dulait. Dans le passé, les exemples ont été trop nombreux, et nous avons alors été obligés d’acheter des missiles à l’étranger. Si nous n’avions pas réduit les crédits de recherche et développement à l’époque, nous achèterions aujourd’hui les Trigat-LR de MBDA !
Fort heureusement, le Gouvernement résiste à la tentation de faire de la défense la variable d’ajustement, contrairement à ses homologues européens qui, permettez-moi l’expression, « tranchent à vif », quitte à mettre en péril la souveraineté européenne.
Ainsi, l’Allemagne va supprimer 40 000 postes et devra faire des économies pour un montant de 8,3 milliards d’euros. Depuis le 30 juin 2010, la Suède a supprimé le service militaire, alors que ses soldats fournissent les forces de maintien de la paix au Kosovo et en Afrique. En Espagne, M. Zapatero vient de réduire le budget militaire de 9 %, soit plus de 600 millions d’euros, rien que pour l’année 2010. Au Royaume-Uni, la défense devra diminuer son budget de 15 % d’ici à 2014. Liam Fox, ministre britannique de la défense, parle lui-même de « coupes brutales ».
En effet, il y va de la crédibilité de l’Europe comme puissance militaire et comme partenaire des États-Unis, au moment où un nouveau concept stratégique voit le jour au sein de l’OTAN. Robert Gates, secrétaire d’État américain à la défense, s’est inquiété, le 23 février dernier, de la « démilitarisation de l’Europe ».
Mais il y va également de la souveraineté de la France et de sa capacité à assumer ses responsabilités internationales en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU et alors qu’elle a rejoint le commandement intégré de l’OTAN voilà un an et demi.
Or, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, nous pouvons parallèlement constater que, depuis l’année 2000, les États-Unis ont augmenté leur budget militaire de 75 %, la Chine de 217 % et la Russie de 105 % !
Alors que nous peinons à construire une véritable politique de sécurité et de défense commune, toutes ces réductions budgétaires sont des plus inquiétantes. La France est l’un des moteurs de cette construction : ces dernières années, elle n’a cessé d’appeler les Vingt-Sept à investir dans la défense européenne. C’est pour cette raison qu’il est primordial de ne pas hypothéquer les grands programmes en cours ! La politique européenne de sécurité et de défense ne pourra voir le jour sans une véritable base industrielle et technologique de défense.
En Espagne le projet de drone européen Talarion est menacé. Qu’en sera-t-il des frégates européennes multi-missions, les FREMM, et des véhicules blindés de combat d’infanterie, les VBCI, dont nos soldats ont besoin en Afghanistan ? Et surtout, il ne faut pas que le programme Scorpion fasse les frais de ces réductions, à l’heure où Thales, Safran et Nexter sont en passe de trouver des terrains d’entente ! De même, le programme de drone Watchkeeper connaît des résultats très prometteurs. Le partenariat de Thales tant avec les Britanniques qu’avec les Israéliens mérite que l’on s’y intéresse !
Je souhaite remercier M. le ministre de la défense de ne pas céder à cette surenchère en matière de réduction des crédits alloués à la défense, car aller au-delà de ce qui a été décidé serait suicidaire. Madame le ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, vous avez lancé le concept de « rilance » en évoquant le maintien de dépenses utiles ; vous l’avez même expliqué au Financial Times. Or, ce concept s’applique totalement au budget de la défense.
Les investissements en recherche et développement des industries de défense constituent les meilleurs remparts contre un décrochage technologique et capacitaire. Sachons préserver les domaines de haute technologie, tels que l’aéronautique et le spatial ! Sinon, à terme, nous serons encore contraints d’acheter sur étagères, quitte à le faire à l’étranger, et de mettre en place un crash program pour équiper nos soldats, avec lesquels nous avons passé un contrat moral : ils ont accepté les efforts de modernisation en vue de la revalorisation de leur condition et de l’amélioration de leurs équipements. Ne les trahissons pas ! Faire des économies sur ces équipements est par conséquent inenvisageable.
N’oublions pas que le secteur de la défense et les industries qui en relèvent sont des leviers fondamentaux de notre économie : cela représente 165 000 emplois directs et autant d’emplois indirects, donc des recettes fiscales et des cotisations sociales à due concurrence… La défense fait vivre environ 4 000 petites et moyennes entreprises, qui, avec la crise, n’ont pas de marge de manœuvre, car leur trésorerie ne leur en laisse pas le choix. C’est notamment le cas pour des PME telles que Realmeca, sous-traitante du programme de modernisation des Mirages 2000 D. Non seulement l’armée de l’air en a besoin, mais la productivité de notre industrie, le maintien de savoir-faire uniques et la survie de bassins d’emploi sont en jeu, madame le ministre.
La relance dont notre pays a besoin ne pourra se faire sans ces PME, qui sont des acteurs majeurs du tissu économique français. De plus, le report de commandes déjà signées et signifié aux industriels, et donc aux PME, a un coût et nous leur payons des indemnités.
La base industrielle et technologique de défense et les partenariats européens de défense sont aussi des clés pour la relance de l’économie et des solutions contre les délocalisations ! Les inaugurations des sites de Turbomeca en Aquitaine et de Safran Electronics à Massy sont des signes encourageants de la part de ces équipementiers. Sachons y répondre en étant visionnaires. La réduction des déficits ne doit pas paralyser l’investissement pour l’avenir, et je sais, madame le ministre, que vous en êtes parfaitement informée et consciente. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Conformément à la décision de la conférence des présidents, je vais maintenant inviter les présidents de la commission des finances et de la commission des affaires sociales à intervenir.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques mois, alors que nous nous employions à sortir notre voisin grec de la crise dans laquelle il était plongé, j’avais formé le vœu que nous disions enfin aux Français où en était notre pays : que nous leur disions qu’il n’était plus possible de flatter indéfiniment une addiction croissante à la dépense, tout en organisant les délocalisations d’activités et d’emplois par un système de prélèvements obligatoires aveugle à l’impératif de compétitivité ; que nous leur disions, enfin, qu’un endettement croissant n’était rien de moins qu’une abdication progressive de notre souveraineté nationale.
J’ai bien entendu notre collègue André Dulait plaider la cause de la défense nationale, mais je ne suis pas sûr qu’un pays qui s’équipe en empruntant réponde aux exigences de l’indépendance nationale.
Il me semble que nous avons entamé cet après-midi l’exercice de lucidité que j’appelais de mes vœux. Je donne acte au Gouvernement d’avoir pris la mesure des efforts à accomplir pour redresser nos finances publiques et, surtout, je lui donne acte de ne plus dissimuler que les ajustements seront douloureux. Nous avons entendu, ces dernières semaines, d’interminables gloses sur l’opportunité d’employer ou non le terme de « rigueur ». Ces exercices rhétoriques apparaissent bien dérisoires au regard des enjeux auxquels nous devons faire face.
Le diagnostic est donc posé, et il fait l’objet d’un consensus. Mais qu’en est-il du remède ? Quels doivent être sa nature, son dosage, et à quel rythme faut-il l’administrer ? Le Gouvernement a présenté à la Commission européenne un programme de stabilité ambitieux, assis sur une prévision de croissance tout aussi ambitieuse, convenons-en.
Dans son intervention, M. le rapporteur général de la commission des finances a approuvé vos objectifs, madame la ministre, monsieur le ministre, mais il vous a aussi fait part de nos interrogations et, pour tout dire, de nos doutes sur les hypothèses qui sous-tendent la trajectoire de retour à l’équilibre que vous nous présentez.
De nouveaux objectifs et de nouvelles normes nous sont proposés : la dépense fiscale sera « rabotée », le « zéro valeur » remplacera le « zéro volume », les dépenses d’intervention et de fonctionnement de l’État baisseront de 10 %, la révision générale des politiques publiques entrera dans une seconde phase, les concours aux collectivités territoriales seront gelés et la dépense sociale contenue... Tout cela est bel et bon, mais qu’en est-il, aujourd’hui, des mesures concrètes dans lesquelles vont s’incarner ces principes ?
Commençons par les dépenses. Vous l’avez vous-même reconnu, les objectifs d’économies que vous vous assignez seront hors de portée si l’effort n’est pas généralisé. (Mme Raymonde Le Texier opine.) Dans ces conditions, pourrons-nous nous abstenir de porter le fer dans certains domaines sensibles, dans des interventions à caractère éducatif, sanitaire ou social, en matière de logement ou d’emploi ? Pourrons-nous éviter de revoir certaines lois de programmation, y compris la loi de programmation militaire ?
De même, les dépenses de fonctionnement ne baisseront pas dans les proportions attendues si les opérateurs, ces 655 entités qui sont autant de points de fuite potentiels de la dépense publique, ne sont pas soumis à la même contrainte que l’État. Elles ne baisseront pas davantage si les gestionnaires ne sont pas mis sous tension.
À cet égard, Philippe Marini a invité le Gouvernement à moduler l’effort en fonction des performances réalisées par les responsables de programme. Voilà qui donnerait un peu de contenu aux objectifs et indicateurs de performance promus par la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, et qu’on s’est, pour l’heure, contenté d’utiliser formellement et, pour tout dire, stérilement. Je voudrais que les décisions qui ont été prises pour tenter d’infléchir la politique du Gouvernement sur la base de ces indicateurs soient identifiées.
Plus précisément et en dehors des économies de « constatation » liées à la fin du plan de relance ou aux suites de la réforme de la taxe professionnelle – afin d’évaluer l’effort réel pour 2011, il faut soustraire les 15 milliards d’euros dépensés en 2010 qu’on ne dépensera pas en 2011 –, quels dispositifs vont passer sous la toise, quand et pour quels montants ? À quel moment le Parlement disposera-t-il d’un inventaire précis et robuste des mesures arbitrées, afin de mesurer, ligne par ligne, l’ampleur des économies programmées ?
Ces interrogations ne sont pas que de méthode.
Elles sont nourries par l’expérience d’un président de commission des finances qui a passé de longues heures à débattre, année après année, des crédits des missions inscrits au projet de loi de finances. Elles sont nourries par le souvenir de querelles homériques, dès qu’il s’agissait d’arracher le moindre euro à un ministre qui, une fois qu’il avait gagné ses arbitrages à Matignon, considérait ses crédits comme sanctuarisés.
Plus récemment, la commission des finances a entendu sept ministres du Gouvernement. Naturellement, nous avons été intéressés par l’usage qu’ils avaient fait des crédits mis à disposition pour 2009. Mais, à la question de savoir comment ils mettraient en œuvre les mesures vigoureuses dont les contours viennent de nous être présentés, ils ont apporté des réponses pour le moins évasives.
Afin d’aider le Gouvernement à tenir le cap qui vient d’être fixé, nous aurons donc besoin de le traduire très rapidement en espèces sonnantes et trébuchantes. D’ailleurs, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, j’espère que vous mettrez tout votre talent de pédagogue au service de l’arbitrage budgétaire, ce qui ne sera pas simple… En effet, pour les ministres auditionnés, toutes les dépenses fiscales et tous les crédits dont ils disposaient étaient essentiels et donc sanctuarisés.
Le Gouvernement prévoit également de contenir fortement la dépense locale. L’objectif est louable autant qu’ambitieux, dans la mesure où l’État n’en maîtrise pas tous les déterminants, tant s’en faut.
Un bon début consisterait à enrayer la frénésie normative qui accable chaque jour les exécutifs locaux d’obligations nouvelles, qui sont autant de dépenses supplémentaires. De fait, à quoi sert-il de déployer une révision générale des politiques publiques pour l’État si, parallèlement, se reconstitue une bureaucratie territoriale chargée de mettre en œuvre une réglementation tatillonne au point de prescrire le contenu des assiettes dans les cantines scolaires ?
Je demande donc l’armistice des normes, étant précisé que certaines normes européennes que les gouvernements français ont, à un moment ou à un autre, acceptées sont encore dans les tuyaux et devront bientôt être appliquées.
J’en viens à présent aux recettes et, d’abord, aux méthodes tantôt artisanales, tantôt fleuries que le Gouvernement nous propose pour contenir la prolifération des dépenses fiscales.
La première est celle du « rabot », c’est-à-dire de l’écrêtement d’un grand nombre de crédits et autres réductions d’impôt. La systématicité du procédé est séduisante et a le mérite d’envoyer un message clair aux contribuables.
La seconde méthode, celle du « bouquet » de mesures ciblées, complète heureusement le passage du rabot. Ne doutez pas, madame la ministre, monsieur le ministre, de la détermination de la commission des finances à soutenir le Gouvernement et à faire preuve de créativité dans cet exercice délicat !
Pour autant, nous ne pourrons pas nous contenter d’élaguer la dépense fiscale afférente à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, sauf à attendre 2012, l’année où les dispositions relatives aux niches fiscales sur ces deux impôts commenceront à produire leurs effets, pour engranger des économies.
Dans ces conditions, la fiscalité indirecte devra, elle aussi, permettre de dégager des recettes supplémentaires dès la prochaine discussion budgétaire.
Je pense en particulier aux taux réduits de TVA. Le rapporteur général M. Marini a évoqué une évolution du taux réduit de 5,5 % à 8 %. Pour ma part, je propose une autre hypothèse, à savoir l’introduction, pour des activités de proximité telles que la restauration et la rénovation de logements, d’un taux intermédiaire fixé entre 10 % et 12 %. De telles dispositions auraient l’avantage d’accroître les ressources pour 2011 de 4 ou 5 milliards d’euros.
Au-delà de la réduction des dépenses fiscales, je maintiens qu’une refonte globale de notre système de prélèvements obligatoires demeure nécessaire, que l’instauration d’une TVA « sociale » constitue une mesure urgente de compétitivité et que la « trilogie » fondée sur la suppression du bouclier fiscal, la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune et l’instauration d’une tranche supplémentaire d’impôt sur le revenu irait dans le sens de l’équité et de l’efficacité. Il faudrait aussi revoir le barème d’imposition des plus-values mobilières et immobilières.
Mme Nicole Bricq. Ah ! Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Devant les efforts que nos compatriotes vont devoir accomplir, nous devons avoir à l’esprit l’exigence fondamentale de justice. Dans ces conditions, il serait bien imprudent de ne pas abroger rapidement le bouclier fiscal.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et l’ISF !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Effectivement ! La tétralogie que je viens d’évoquer doit être traitée. Nous déposerons en ce sens un amendement dans la prochaine loi de finances.
Nous avons un cap : un déficit public ramené à 3 % du PIB en 2013. Toutefois, n’oublions pas qu’il ne s’agit que d’une étape, notre objectif étant l’équilibre, le « zéro déficit ». Nous avons des outils, que sont la maîtrise des dépenses et la préservation des recettes. Il nous faut enfin des règles, qui garantissent que les objectifs que nous nous fixons aujourd’hui ne s’évanouiront pas au gré des événements.
Reconnaissons-le, nous avons eu une fâcheuse tendance, dans le passé, à exciper de circonstances exceptionnelles ou de l’absolue nécessité de nouvelles priorités qualifiées de nationales pour nous soustraire à des règles, alors même que l’encre qui avait servi à les écrire était à peine sèche... Il faut en finir avec une forme d’inconstance ou de « mémoire courte », qui porte gravement préjudice à la crédibilité de notre pays sur la scène internationale.
Nous devons saluer, à cet égard, les conclusions de la commission Camdessus. Ces conclusions, sur lesquelles je ne reviendrai pas dans le détail, vont dans le sens d’une plus grande cohérence du pilotage de nos finances publiques et d’une normativité renforcée des règles que nous nous donnons.
Qu’il me soit permis de saluer, en particulier, l’initiative tendant à consacrer le monopole des lois financières en matière de prélèvements obligatoires. Ce principe est de bon sens et sa mise en œuvre a été opportunément anticipée par une récente circulaire du Premier ministre. Il devrait mettre un terme à une forme de schizophrénie, imputable tant au Parlement qu’au Gouvernement et consistant à défaire consciencieusement, dès le mois de janvier, les équilibres votés dans les lois de finances et de financement de la sécurité sociale quelques semaines auparavant.
Madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons probablement devant nous la discussion budgétaire la plus cruciale de la législature, et sans doute même de toutes les législatures de la Ve République. Soyez-en sûrs, la commission des finances y prendra, comme chaque année, toutes ses responsabilités. Elle ira plus loin encore qu’à son habitude, en formulant des propositions précises.
Le Gouvernement comme le Parlement ne doivent pas s’égarer dans des projets superfétatoires. C’est la fin de l’illusionnisme collectif, la grande cause est bien l’équilibre de nos finances publiques ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – M. Denis Detcheverry applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ayant le privilège d’être la dernière intervenante dans notre débat d’orientation, je ne vais pas redire ce qu’ont très bien exprimé avant moi les différents orateurs, en particulier M. Alain Vasselle, le rapporteur général de notre commission des affaires sociales, mais aussi le rapporteur général et le président de la commission des finances, ainsi que les intervenants de tous les groupes qui se sont succédé à cette tribune.
Je voudrais néanmoins insister sur quelques sujets.
Le premier est relatif aux questions de méthode.
Alain Vasselle l’a rappelé, plusieurs projets de loi d’ordre financier vont nous occuper à l’automne : un projet de loi organique sur la dette sociale, la réforme des retraites, les projets de loi de financement de la sécurité sociale et de finances pour 2011, peut-être un projet de loi de programmation des finances publiques – Mme et M. les ministres nous le confirmeront –, sans parler du débat annuel, auquel nous tenons beaucoup au Sénat, sur les prélèvements obligatoires et leur évolution.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Et la réforme de la dépendance !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Tout à fait, mais je crois qu’elle sera examinée au mois de janvier prochain.
Nous serons très attentifs à la cohérence d’ensemble des mesures que ces projets de loi contiendront. Il serait en effet regrettable que l’éparpillement des choix législatifs, budgétaires, fiscaux et sociaux conduise à brouiller les messages et à rendre difficilement lisibles les réformes.
Je pense par exemple aux retraites. Il est impératif pour nos concitoyens, comme pour tous ceux qui observent les évolutions économiques de notre pays, que l’équilibre de la réforme soit réellement établi et, surtout, parfaitement clair.
Il serait très utile que vos services, madame et monsieur les ministres, nous fournissent, dès les premiers jours de septembre, un document de synthèse précis sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour chacun des textes que j’ai cités, avec des tableaux d’équilibre détaillés. Ce serait certainement de nature à faciliter notre travail et à mieux éclairer les choix que nous aurons à faire et dont nous devons répondre auprès de nos concitoyens.
Ma deuxième remarque concerne la dette sociale.
Vous le savez, ce sujet est pour nous essentiel. Cinq sénateurs de notre commission étaient d’ailleurs membres de la commission réunie sous votre présidence, monsieur le ministre, et dont l’objectif initial était d’expertiser toutes les solutions envisageables pour régler ce problème crucial. Je ne vous cacherai pas qu’ils ont regretté le peu de marge de manœuvre qui leur a été laissé sur cette question.
Nous partageons tous la conviction qu’il n’est plus possible de reporter sur nos enfants et petits-enfants la dette que nous alimentons aujourd’hui, en ne parvenant pas à financer nos dépenses de maladie et de retraite.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avions souhaité à l’automne dernier, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, traiter le problème – au moins partiellement – en augmentant légèrement la CRDS. Cela nous aurait permis de commencer, sans attendre, à rembourser ces milliards d’euros de dette reconstituée. M. Alain Vasselle a longuement évoqué cette question.
Le Gouvernement n’a pas voulu nous entendre, malgré les efforts conjoints et parfaitement unis de nos deux commissions.
Aujourd’hui, nous nous trouvons au pied du mur. Il est essentiel que nous prenions des mesures responsables, en dehors de tout a priori, pour régler la question. Il y va, me semble-t-il, de notre crédibilité, mais aussi de celle de la France.
J’en viens maintenant à une dernière série de remarques.
Comme nous avons été nombreux à le dire, le maintien d’une protection sociale de haut niveau dans notre pays nécessite non seulement une meilleure efficacité dans la gestion des dépenses, mais sans doute aussi la recherche de nouvelles recettes.
Parmi les mesures annoncées par le Gouvernement, figure la mobilisation de ce qu’on a pris l’habitude d’appeler « les niches fiscales et sociales ».
J’approuve globalement cette décision. En effet, les volumes financiers attachés à ces dispositifs n’ont fait que croître au cours des dernières années et il est légitime de s’interroger sur le coût et l’utilité de ces niches, comme l’ont très bien expliqué ceux qui m’ont précédée à cette tribune.
Je voudrais néanmoins attirer votre attention sur le fait que tous ces dispositifs ne sont pas équivalents. L’un d’entre eux en particulier – je suis en total désaccord avec vous sur ce point, madame le ministre – me paraît devoir être préservé car, loin de coûter à l’État, il est en fait à l’origine de substantielles recettes supplémentaires.
Je veux parler des mécanismes fiscaux et sociaux qui permettent l’embauche de salariés à domicile par les particuliers, par les familles.
Contrairement aux entreprises qui cumulent plusieurs dispositifs de soutien à l’emploi – allégements de cotisations, réductions et crédits d’impôt, contrats aidés, etc. –, les personnes physiques qui sont employeurs ne bénéficient que du dispositif de réduction ou crédit d’impôt et de l’allégement partiel de charges prévus pour l’emploi de salariés à domicile.
Or, l’efficacité de ces dispositifs est largement prouvée.
D’abord, en termes de création d’emplois : plus de 700 000 emplois ont été créés dans le champ des services à la personne au cours des quinze dernières années et 30 % des emplois créés dans l’économie française en 2008 l’ont été dans ce secteur.
Ensuite, au regard de la rentabilité pour les finances publiques : en permettant de lutter contre le travail non déclaré, ces dispositifs sont à l’origine de plus de 6 milliards d’euros de cotisations sociales. Même en tenant compte du coût de la réduction fiscale et de l’allégement partiel de charges, le secteur apporte plus de 3 milliards d’euros aux caisses de sécurité sociale. Si l’on y ajoute les recettes fiscales produites par les salaires des personnes employées, on mesure à quel point le modèle du particulier-employeur est vertueux.
Si l’on examine le régime fiscal actuel, avant même tout « coup de rabot », ses conditions d’application et son plafonnement font déjà que l’entreprise familiale est la seule à payer deux fois l’impôt sur le revenu : une première fois sur les revenus de l’employeur, une seconde sur les revenus du salarié. Peut-on vraiment considérer qu’il s’agit d’une niche fiscale ?
Enfin, je veux dire avec force que ce dispositif d’aide fiscale et sociale répond à un vrai besoin de la société, en facilitant la garde de jeunes enfants, l’accompagnement de parents âgés ou l’aide aux personnes handicapées.
Il permet le maintien des femmes sur le marché du travail et la conciliation des vies privée et professionnelle, notamment pour les ménages des classes moyennes, qui représentent plus de la moitié des 3,5 millions de particuliers-employeurs.
Il permet aussi l’intégration de publics éloignés du marché du travail ou à faible niveau de qualification, qui peuvent, grâce à ces dispositifs, obtenir un emploi et bénéficier d’une couverture sociale normale pour, en particulier, se constituer des droits à la retraite. Je dois rappeler également que ce sont des emplois non délocalisables.
Remettre en cause ce soutien aux emplois à domicile risquerait d’entraîner une destruction d’emplois. Un rapport de l’Assemblée nationale a récemment chiffré à plus de 200 000 le nombre de particuliers-employeurs qui pourraient licencier un salarié en cas de baisse de 10 % des aides fiscales et sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bonne remarque !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Cela conduirait aussi à diminuer le nombre d’heures déclarées et à développer le travail non déclaré, alors que celui-ci a connu un recul de vingt points sur la période 1995-2005,…
M. Guy Fischer. C’est vrai !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. … passant de 50 % à 30 % des emplois du champ des services à domicile. Est-ce vraiment ce que vous souhaitez ?
Au moment où les arbitrages sur les textes que nous aurons à examiner à l’automne sont en cours de préparation, je tenais à vous faire part de ma conviction sur la très grande utilité des aides fiscales et sociales pour l’emploi de salariés à domicile. (M. Jacques Gautier applaudit.)
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Bravo !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Je peux vous assurer qu’elle est partagée par un grand nombre de parlementaires et d’experts. On me dit aussi que plusieurs pays européens nous envient ces mécanismes, au regard de leur effet positif sur l’emploi et sur la protection sociale de publics fragiles. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – M. Denis Detcheverry applaudit également.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur général de la commission des finances, madame la présidente et monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, la vertu et l’intérêt d’un tel débat d’orientation est de faire connaître la position, les perspectives, les objectifs, le cap du Gouvernement et de favoriser l’expression sur l’ensemble des sujets que nous aurons à traiter à la sortie de l’été, sachant que nous ne parlons aujourd’hui, en cette fin de session extraordinaire, que de la partie « dépenses ».
Le document que nous avons transmis à la commission des finances atteint un degré de précision sans précédent, ce qui est d'ailleurs normal et logique, et je me permets d’attirer votre attention sur le détail des mesures prises.
L’échenillage auquel nous avons déjà procédé dans ce document s’agissant de toutes les sources de dépenses doit déjà, monsieur le président Arthuis, apporter beaucoup d’éléments de réponses aux questions que vous avez soulevées à la tribune voilà quelques instants.
Madame Bricq, pour répondre à votre intervention, notamment à propos de l’esprit de justice dont vous avez parlé, j’évoquerai trois mesures qui sont équilibrées et, ce faisant, je répondrai aussi à Mme la présidente Muguette Dini.
Je prendrai d’abord l’exemple de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH. Contrairement à ce qui a été dit, elle va continuer de croître.
Mme Nicole Bricq. Mais pas de ce qui avait été prévu !
M. François Baroin, ministre. Elle augmentera chaque année de 3 % au lieu de 4,5 %, sur six ans au lieu de cinq. Je me permets de souligner que le taux d’inflation à partir duquel l’engagement a été pris n’avait rien à voir avec celui auquel nous sommes parvenus. L’AAH sera donc supérieure de plus du double à l’évolution du coût de la vie ; c’est dire si cette mesure s’inscrit dans un plan général mais aussi dans la philosophie du Gouvernement d’épargner les publics fragiles.
Je prendrai un deuxième exemple : l’aide à la personne. Elle bénéficie d’un avantage fiscal et d’un avantage social. Dans le contexte de crise budgétaire, de finances publiques dans lequel nous nous trouvons, franchir cette marche de 2 % – ce qui n’a jamais été fait – est un objectif très ambitieux. En logique pure, le Gouvernement aurait pu aller plus loin. Il s’est arrêté, après avoir entendu les arguments développés par les uns et par les autres, à la suppression de l’exonération de quinze points de cotisations sociales, mais il maintient l’avantage fiscal et le niveau de plafond (Mme Nicole Bricq s’exclame.), ce qui permettra de continuer à favoriser l’emploi.
Je voudrais aussi rappeler que l’exonération des quinze points de cotisations sociales a été effectuée dans une logique d’amorçage. Il y a eu une augmentation de 40 % au titre de ce dispositif, qui représente un volume de 6 milliards d’euros. Donc, même si nous n’étions pas confrontés à la nécessité de réduire les déficits, même si nous n’avions pas à produire un effort considérable en termes d’économies, nous serions, de toute façon, dans l’obligation de « refroidir » un peu la mécanique tant elle est en expansion, et c’est, me semble-t-il, juste et équilibré.
J’évoquerai un troisième élément qui a trait à la question que vous avez soulevée concernant les HLM, madame Bricq, qui figure également dans les éléments de détail.
Personne ne peut sérieusement affirmer que le milieu des bailleurs sociaux ne s’est pas restructuré depuis de nombreuses années. Est-il besoin de vous dire à vous, madame, que le passage en société anonyme a permis une simplification et une transparence budgétaire et financière complète ? Cette clarification a mis en lumière une trésorerie sinon opulente du moins suffisante pour ne pas altérer les missions des bailleurs sociaux,…
Mme Nicole Bricq. Non, vous ne pouvez pas dire cela !
M. François Baroin, ministre. … qui accompagnent en particulier les politiques immobilières et sociales des collectivités territoriales et de l’État dans une logique de mutualisation, et ce pour le bénéfice des locataires.
Mme Nicole Bricq. On en reparlera !
M. François Baroin, ministre. Nous disposons donc de tous les arguments – nous pourrons les développer le moment venu, à la sortie de l’été – qui prouvent que ces mesures – et je pourrais toutes les énumérer les unes après les autres – sont justes et équilibrées. Nous avons véritablement travaillé de façon méthodique et précise. Ensuite viendra le débat.
Avant de céder la parole à Christine Lagarde, je tiens à vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous avons bien entendu les messages que vous nous avez adressés.
Je veux par avance remercier le président Gérard Longuet et, à travers lui, tous les membres du groupe UMP et de la majorité sénatoriale. Le Gouvernement aura besoin du soutien de tous les membres de la majorité sur l’architecture générale de son projet mais aussi sur chacune des mesures précises que nous serons appelés à vous proposer, car ce sont des mesures difficiles.
Dans le budget que nous vous soumettrons, il n’y a pas de mesures faciles, il n’y a que des mesures difficiles. Nous les assumons, parce que c’est la responsabilité du Gouvernement, c’est aussi celle de la représentation nationale, dans une logique de consensus – même si l’on peut débattre de telle ou telle mesure –, et c’est l’intérêt de tous, quoi qu’il arrive, d’atteindre l’objectif intangible de réduction de 8 % à 6 %.
Nous reviendrons devant vous au début du mois de septembre pour débattre de l’échenillage concernant les dépenses fiscales. Nous nous reverrons naturellement à l’automne pour discuter du projet de loi de financement de la sécurité sociale, du projet de loi de finances, de la programmation pluriannuelle des finances publiques et, je l’espère, le moment venu, pour débattre de la révision de notre loi fondamentale afin d’y inscrire dans la durée l’obligation d’un effort, et je sais, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, que c’est une volonté que vous partagez. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Denis Detcheverry applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur général de la commission des finances, madame la présidente et monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai brève puisque le débat qui vient d’avoir lieu nous a permis d’exposer nos ambitions et les perspectives que nous envisageons sur la base de paramètres et de données macroéconomiques que j’ai eu l’occasion de présenter.
Monsieur le rapporteur général, vous m’avez interrogée sur la taxe professionnelle. Il n’est évidemment pas question que le fonds national de garantie individuelle de ressources, le FNGIR, serve de variable d’ajustement. L’évolution de ce fonds est fixée par la loi et ne dépend pas des dotations de l’État aux collectivités territoriales. Le niveau de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, résulte de façon mécanique de l’article 2 de la loi de finances pour 2010 ; il n’est pas question d’opérer de compensation entre les deux.
Cela m’amène au point précis qui a été soulevé par Gérard Longuet.
La clause de réexamen que nous présenterons, prévue à l’article 76 de la loi de finances pour 2010 qui a défini les clauses de rendez-vous, fera l’objet, comme je m’y suis engagée, d’abord d’un débat général spécifique sur cette question du rendez-vous que nous nous sommes fixé en vertu de l’article 76 sur la seule question de la contribution économique territoriale et de sa pertinence.
Nous évoquerons à cet égard, bien sûr, les conclusions du rapport des parlementaires en mission, dont M. Charles Guené faisait partie pour votre Haute Assemblée.
Nous évoquerons aussi les conclusions du rapport Durieux, notamment en matière de péréquation au sein du bloc communal, sujet qui, je le sais, suscite des appréciations divergentes. Il me paraît toutefois utile que nous puissions y revenir.
J’ajoute, en ce qui concerne les départements, point également évoqué par Gérard Longuet, que la dérive des dépenses des départements, perceptible depuis des années, est maintenant une réalité. Le Premier ministre l’a très clairement reconnu lors d’une prise de parole le 1er juin dernier pour envisager d’y remédier, notamment à l’occasion de la réforme de la dépendance, qui posera très précisément le problème du financement de ladite dépendance.
Pour ce qui est des normes, par une circulaire en date du 6 juillet 2010, le Premier ministre a prévu un moratoire des normes, qui devrait donc répondre très précisément à la demande de Gérard Longuet. Le Premier ministre a par ailleurs renforcé les pouvoirs de la commission consultative d’évaluation des normes. C’est bien dans cet esprit que nous entendons poursuivre les débats, avec le souci que le moratoire s’applique, sauf, bien sûr, – vous avez évoqué ce point, monsieur le président Arthuis – en ce qui concerne les normes européennes, qui sont imposées sans nécessairement que nous ayons l’exclusivité de la décision.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y a encore des normes dans les tuyaux !
Mme Christine Lagarde, ministre. En tout cas, pour les normes d’origine strictement nationale, le moratoire s’applique de la manière la plus claire, comme l’a indiqué le Premier ministre.
Monsieur Fischer, vous avez évoqué les questions de politique industrielle. Le gouvernement de François Fillon, sous l’autorité et l’impulsion du Président de la République, continue, en matière de politique industrielle, telle qu’elle a été définie par Nicolas Sarkozy dans son discours de Marignane, auquel vous avez sûrement été sensible, de tenir ses promesses.
Ce matin, Christian Estrosi et moi-même avons ainsi lancé la conférence nationale de l’industrie, qui est un organisme pérenne institué pour trois ans sous la présidence de Jean-François Dehecq. Celui-ci aura notamment pour mission d’examiner si nous remplissons bien les vingt-trois engagements qui avaient été pris pour soutenir les onze filières industrielles que nous avons identifiées comme pertinentes et nécessaires pour la stratégie économique, industrielle et d’indépendance nationale française. Il devra également s’assurer que nous affectons bien les ressources financées par le grand emprunt au titre des stratégies d’avenir dans les secteurs industriels qui nous paraissent indispensables.
Nous joignons donc le geste à la parole et le financement aux investissements d’avenir dans le secteur industriel. C’est avec beaucoup de détermination et d’enthousiasme que l’ensemble de la conférence a été mise en place ce matin.
Je remercie tous les participants à ce débat et je suis sûre que nous reviendrons sur l’ensemble de ces points au cours de la discussion budgétaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Denis Detcheverry applaudit également.)
M. le président. À la demande du Gouvernement, le Sénat est appelé à se prononcer par un vote sur cette déclaration.
Conformément à l’article 39, alinéa 3 bis, du règlement, il va être procédé à un scrutin public ordinaire.
Aucune explication de vote n’est admise.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 261 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 182 |
Contre | 152 |
Le Sénat a approuvé la déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances publiques pour 2011.
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Communication relative à des commissions mixtes paritaires
M. le président. J’informe le Sénat que sont parvenues à l’adoption de textes communs la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ainsi que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État.
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Modification de l'ordre du jour
M. le président. J’informe le Sénat que, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a modifié l’ordre d’examen des points inscrits à l’ordre du jour du lundi 12 juillet pour donner suite à la demande de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat de retour à la procédure normale pour l’examen de la convention fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth des Bahamas.
En conséquence, l’ordre du jour de la séance du lundi 12 juillet s’établit comme suit :
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
- 3 conventions internationales en forme simplifiée ;
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État ;
- Deuxième lecture du projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services ;
- Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth des Bahamas sur l’échange de renseignements en matière fiscale ;
- 11 conventions fiscales en forme simplifiée.
14
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 12 juillet 2010, à quinze heures et, éventuellement, le soir :
1. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’adhésion à la convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute (n° 272, 2009-2010).
Rapport de M. André Vantomme, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 633, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 634, 2009-2010).
2. Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Roumanie relatif à l’assistance et à la coopération en matière de protection et de sécurité civiles dans les situations d’urgence (n° 438, 2008-2009).
Rapport de M. Christian Cambon, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 635, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 636, 2009-2010).
3. Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne concernant l’échange de renseignements sur les titulaires du certificat d’immatriculation de véhicules contenus dans les fichiers nationaux d’immatriculation des véhicules dans le but de sanctionner les infractions aux règles de la circulation (n° 488, 2007-2008).
Rapport de M. Marcel-Pierre Cléach, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 637, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 638, 2009-2010).
4. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État.
Rapport de M. Joseph Kerguéris, rapporteur pour le Sénat (n° 655, 2009-2010).
5. Projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services (n° 576, 2009-2010).
Rapport de M. Gérard Cornu, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (n° 594, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 595, 2009-2010).
6. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth des Bahamas relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 541, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 622, 2009-2010).
7. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Îles Turques et Caïques relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 542, 2009-2010) ;
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 623, 2009-2010).
8. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Bermudes relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 543, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 624, 2009-2010).
9. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Îles Caïmans relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 544, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 625, 2009-2010).
10. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Gibraltar relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 545, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 626, 2009-2010).
11. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Saint-Marin relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 546, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 627, 2009-2010).
12. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 548, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 629, 2009-2010).
13. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Guernesey relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 549, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 630, 2009-2010).
14. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’Île de Man relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 550, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 631, 2009-2010).
15. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Îles Vierges britanniques relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 551, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 632, 2009-2010).
16. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Liechtenstein relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 547, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 628, 2009-2010).
17. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Jersey relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale et à l’imposition des pensions (n° 540, 2009-2010).
Rapport de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances (n° 620, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 621, 2009-2010).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)
Le Directeur adjoint
du service du compte rendu intégral,
FRANÇOISE WIART