M. Pierre-Yves Collombat. On verra en tout cas si cela restera un détail jusqu’au bout !
Quoi qu’il en soit, je reconnais qu’il y a un réel problème. Nous sommes tous d’accord sur la nécessité de faire progresser l’intercommunalité. Or, il y a parfois des intérêts contradictoires, notamment en fonction de la taille des communes, et il faut donc trouver des accords. Je l’admets parfaitement.
Cependant, si, grâce notamment à Mme Gourault, le texte final est moins mauvais que s’il était pire (Sourires), certaines marges de manœuvre étant ménagées en cas d’accord, s’agissant en particulier des communautés de communes et des communautés d’agglomération, tout le dispositif n’en reste pas moins défavorable aux petites communes. C’est la réalité !
C’est pourquoi je ne peux, pour ma part, m’associer au vote conforme de cet article, même si, je le reconnais, il faut bien trouver une solution. Il me semble qu’il ne serait tout de même pas catastrophique de revenir sur certaines dispositions adoptées par l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je souhaiterais que M. le rapporteur motive un peu mieux sa demande de retrait de l’amendement n° 89. En effet, je ne pourrai retirer celui-ci que si l’on me garantit qu’aucune commune ne pourra détenir la majorité des sièges au sein du conseil de l’intercommunalité. Or la rédaction actuelle de l’alinéa 17 n’est vraiment pas satisfaisante à cet égard, car trop floue. Celle que nous proposons est tout de même plus claire et permettra d’écarter tout risque de mauvaise interprétation.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Lorsque le doyen Vedel leur demandait ce qu’était la majorité absolue, les étudiants en droit que nous étions lui répondaient toujours : la moitié des voix. Eh bien, c’est faux !
En effet, la majorité absolue, conformément d’ailleurs au code électoral, c’est l’entier supérieur à la moitié. Quand celle-ci est calculée sur un nombre impair, elle n’est pas un entier, non plus que la moitié moins un : dans ce cas, la rédaction que vous proposez ne convient pas, puisqu’un nombre de sièges est nécessairement entier.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Nous sommes tous d’accord ! Ne nous battons pas sur ce point !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je vous l’assure, madame David, la rédaction actuelle de l’alinéa 17 garantit qu’une commune ne pourra jamais détenir la majorité des sièges.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je ne voudrais pas être noyé dans l’entonnoir, monsieur le président de la commission. (Sourires.)
La rédaction adoptée par l’Assemblée nationale pour l’article 3 n’est pas la même que celle que le Sénat avait votée en première lecture.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. En effet.
M. Jacques Mézard. En définitive, on nous demande de nous aligner sur le système le plus favorable pour les métropoles et les grandes intercommunalités.
M. Pierre-Yves Collombat. Eh oui !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Non !
M. Jacques Mézard. Mais si ! Qu’on le regrette ou qu’on s’en réjouisse, telle est bien la réalité.
Sur le terrain, ce système rendra la gestion des communautés de communes et des communautés d’agglomération plus difficile.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Non !
M. Jacques Mézard. De plus, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de vous dire respectueusement que vous nous vendez du vent !
Ainsi, selon l’alinéa 14, « les sièges à pourvoir […] sont répartis entre les communes à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne sur la base de leur population municipale ». Cela paraît fort démocratique, mais il n’en reste pas moins que la grande majorité de nos communes auront un seul représentant au sein du conseil de leur communauté d’agglomération ou de leur communauté de communes, scrutin de liste ou pas. Tout le reste n’est que littérature.
En outre, les intercommunalités d’une population inférieure à 150 000 habitants ne pourront au mieux obtenir, au titre des 10 % de sièges supplémentaires, que quatre sièges, pas un de plus ! Je souhaite bon courage aux présidents de leurs exécutifs pour désigner les heureux bénéficiaires de ces sièges, car le combat sera féroce ! Ce n’est pas raisonnable…
Nous subissons le diktat d’un compromis qui est défavorable à l’immense majorité de nos communes. C’est cela, la réalité !
Je vous propose donc, monsieur le secrétaire d’État, de procéder comme vous le faites habituellement en cas de difficulté : renvoyez ce débat à l’examen du projet de loi n° 61. Car, en l’occurrence, il y a une difficulté !
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. À l’instar de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État, je considère que nous avons déjà beaucoup débattu de ces dispositions, qui ont en outre été approuvées par les associations d’élus ou de collectivités.
Cependant, le rôle des suppléants n’a pas du tout été évoqué jusqu’à présent.
Nous voulons tous des intercommunalités beaucoup plus importantes, au sein desquelles toutes les communes seraient représentées. Respecter ce principe risque cependant de poser des problèmes dans un département comme le mien, qui compte près de 600 communes : comment fera-t-on demain avec des intercommunalités d’une soixantaine de communes ?
Mme Éliane Assassi. Ce sera impossible !
M. Gérard Bailly. Toutes les communes auront au minimum un délégué, mais celui-ci aura-t-il un suppléant ? (M. le président de la commission des lois et M. le rapporteur opinent.) Ce suppléant pourra-t-il siéger ? Quel sera exactement son rôle ?
Dans ma communauté de communes, qui était à l’origine un syndicat intercommunal à vocation multiple, chaque commune a aujourd’hui au moins deux délégués, sans suppléants. Pour trente communes, le conseil communautaire compte soixante-trois membres ; avec le nouveau système et en l’absence de suppléants, cet effectif sera presque réduit de moitié.
Je voudrais maintenant revenir sur les propos tenus tout à l’heure par M. Maurey.
Un jour, une déléguée m’a annoncé qu’elle ne pouvait plus participer aux réunions du conseil communautaire, sa mère étant atteinte de la maladie d’Alzheimer, mais qu’elle souhaitait néanmoins rester conseillère municipale de sa commune. Monsieur Maurey, faut-il vraiment retirer leur mandat de conseiller municipal aux personnes qui se voient contraintes d’abandonner leurs fonctions de délégué communautaire, tout au moins dans le cas où elles n’ont pas été désignées au scrutin de liste ? Cela mérite réflexion ! Personnellement, j’y suis défavorable, car cela risque de décourager certains de s’engager dans la gestion de l’intercommunalité, alors que les volontaires ne sont déjà pas nombreux dans nos petits villages, eu égard aux contraintes de la fonction…
M. Charles Revet. Très juste !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous avez raison de poser des questions, mon cher collègue. Celle-ci est d’autant plus intéressante qu’elle est déjà résolue, à l’alinéa 4 de l’article 2, qui résulte de l’adoption d’un amendement présenté en première lecture par Michel Charasse, et maintenu par l’Assemblée nationale.
Mme Nathalie Goulet. Très bon amendement !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour inviter chacun à lire les rapports de la commission des lois ; ils sont très éclairants ! (Sourires.)
M. Charles Revet. C’est ce que nous faisons !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. On peut même les apprendre par cœur ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. En matière d’empêchement, quand un conseiller communautaire démissionnaire avait été désigné par le conseil municipal, il peut facilement être remplacé par un autre membre de celui-ci. En revanche, la situation sera tout à fait différente si l’on instaure le fléchage : les électeurs désigneront directement les conseillers communautaires parmi les conseillers municipaux. Les deux cas doivent-ils être traités de la même manière ? La réponse figure dans le projet de loi n° 61, que nous examinerons en septembre. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Guy Fischer. Voilà !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. L’article 3 répond tout de même à un vrai besoin. Pour inciter les communes rurales à adhérer à des intercommunalités, on a fait en sorte à l’origine qu’elles soient surreprésentées au sein du conseil communautaire, afin qu’elles ne se sentent pas écrasées par les communes plus importantes. Ainsi, pour reprendre un exemple souvent cité, La Ferté-Macé, commune-centre de 6 200 habitants, dispose de six sièges, et les quatorze communes rurales membres de l’intercommunalité de trente-six !
De telles situations posent un certain nombre de problèmes. Si les communes ne s’entendent pas pour revoir la répartition des sièges, il faut bien y parvenir par une autre voie. Cependant, le présent texte ne correspond pas tout à fait à la réalité des territoires ruraux, et je crains fort que l’application de son dispositif n’entraîne une marginalisation des communes rurales.
M. Guy Fischer. C’est le but !
Mme Nathalie Goulet. Cela étant, le problème de la représentation est véritable. Il importe de le régler, à l’occasion de l’examen de ce texte ou d’un autre, en maintenant qu’aucune commune ne pourra détenir plus de la moitié des sièges.
M. Pierre-Yves Collombat. Surtout dans les métropoles !
Mme Nathalie Goulet. Certes, mais je parlais surtout ici des intercommunalités rurales.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 et 90.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 53 et 91.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 92, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe Communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 35
Remplacer les mots :
n'est pas procédé
par les mots :
est procédé
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avons déjà longuement exposé les raisons de notre opposition aux dispositions de l’article 3 du projet de loi.
Cet article, qui détermine le nombre et la répartition des sièges dans les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre enfreint, à plusieurs égards, les exigences minimales de la démocratie locale.
En l’occurrence, il nous paraît équitable de permettre une nouvelle répartition des sièges lorsque une ou des communes se retirent d’un EPCI, afin de préserver une juste représentation des communes restantes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Procéder à une nouvelle répartition des sièges, en cas de retrait d’une commune membre d’un EPCI, risquerait de déstabiliser inutilement l’organe délibérant de ce dernier. De plus, une nouvelle répartition interviendra préalablement au renouvellement général des conseils municipaux suivant le retrait.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 93, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 36 et 37
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement a pour objet la suppression des alinéas 36 et 37, qui tendent à prévoir la création, dans le cadre d’un EPCI, d’une nouvelle commune en lieu et place de plusieurs communes membres. Dans ce cas, la commune nouvelle aurait autant de sièges que n’en détenaient ensemble les anciennes communes.
Tout d’abord, nous pensons que la création de communes nouvelles doit se faire sur la base du volontariat, avec l’accord de chacune des communes concernées par cette fusion, dans le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales. Or le projet de loi prévoit que des communes pourront être fusionnées sans leur accord ; nous y sommes opposés.
En outre, nous réaffirmons notre volonté que, à chaque changement de périmètre d’un EPCI, une nouvelle répartition des sièges soit effectuée après de nouvelles élections, afin que l’équilibre de la représentation soit respecté.
Mme la présidente. L’amendement n° 55, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :
Alinéa 36
I. - Première phrase
Après les mots :
fiscalité propre,
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
le nombre de sièges attribué à la commune nouvelle est celui correspondant à une commune de même strate démographique au sein de l'établissement public de coopération intercommunale.
II. - Seconde phrase
Remplacer les mots :
ces modalités
par les mots :
cette disposition
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Je tiens à insister encore une fois sur la confusion qui règne souvent, dans les esprits et dans les textes, entre collectivités territoriales et EPCI. Une commune nouvelle est une commune : je ne vois pas pourquoi elle aurait plus de sièges qu’une commune existante de même taille. Cela n’a rigoureusement aucun sens !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Si les communes nouvelles sont bel et bien des communes à part entière, il convient d’éviter de déstabiliser la composition de l’EPCI, et d’encourager les communes à fusionner en leur permettant de bénéficier d’un régime dérogatoire.
En outre, le régime prévu à l’alinéa 36 est transitoire : la commune nouvelle sera soumise aux règles de droit commun dès le prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant sa création.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Je partage l’avis de la commission. Il s’agit simplement d’une mesure transitoire.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 190 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Bernard-Reymond, Amoudry et J. Boyer, Mme Payet et MM. Pierre, Faure et Juilhard, est ainsi libellé :
Alinéa 38
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Art. L. 5211-6-3. - Chaque conseil communautaire, qui n'est pas composé intégralement de communes de montagne, constitue en son sein un collège spécifique regroupant ces communes qui bénéficient d'un classement en application de l'article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Pour les décisions concernant l’urbanisme, la voirie, l’assainissement, la collecte des ordures ménagères, les transports scolaires, le déneigement, l'accord du collège spécifique est recherché par un vote à la majorité qualifiée de la moitié des communes représentant les deux tiers de la population ou des deux tiers des communes représentant la moitié de la population qui le composent. »
La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Lors de la première lecture, le Sénat avait manifesté une réelle sensibilité aux problèmes de la montagne. Cela l’avait conduit à adopter une disposition qui a ensuite été supprimée par l’Assemblée nationale, mais que le présent amendement tend à reprendre.
Pour les intercommunalités non exclusivement composées de communes de montagne, il s’agit de prévoir la création, au sein du conseil communautaire, d'un collège spécifique regroupant les communes classées conformément à l'esprit et à la lettre de l'article 8 de la loi montagne de 1985. Pour mémoire, aux termes de cet article, les dispositions de portée générale sont adaptées, en tant que de besoin, à la spécificité de la montagne.
Les caractéristiques des communes de montagne – habitat dispersé, distances importantes, handicaps naturels permanents liés à l'altitude, au climat, à la pente – justifient la création d’un tel collège spécifique, instance d’expression et de concertation sur les décisions ayant une incidence sur la vie des populations de montagne.
Il s’agit non pas de créer une scission au sein du conseil communautaire, mais de permettre aux représentants des communes de montagne d’apporter leur concours éclairé.
Mme la présidente. L'amendement n° 249, présenté par Mme Bourzai, est ainsi libellé :
Alinéa 38
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Art. L. 5211-6-3. - Chaque conseil communautaire, qui n'est pas composé intégralement de communes de montagne, constitue en son sein un collège spécifique regroupant ces communes qui bénéficient d'un classement en application de l'article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Pour les décisions concernant l'urbanisme, la voirie, l'assainissement, la collecte des ordures ménagères, les transports scolaires ou le déneigement, l'avis du collège spécifique est sollicité. Il est valablement exprimé par un vote à la majorité qualifiée de la moitié des communes représentant les deux tiers de la population ou des deux tiers des communes représentant la moitié de la population qui le composent. »
La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. En première lecture, le Sénat avait adopté un amendement prévoyant, pour les intercommunalités non exclusivement composées de communes de montagne, la création, au sein du conseil communautaire, d'un collège spécifique regroupant les communes classées conformément à l'esprit et à la lettre de l'article 8 de la loi montagne de 1985.
Pour mémoire, cet article prévoit que les dispositions de portée générale sont adaptées, en tant que de besoin, à la spécificité de la montagne.
Le présent amendement vise à préciser la disposition qui avait été votée au Sénat avant d’être supprimée par l'Assemblée nationale. Il prévoit désormais un avis, et non plus un accord, pour tenir compte de l'observation formulée par le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui a considéré que l’on risquait de « donner à ce collège un large pouvoir de veto [qui] compliquerait singulièrement le fonctionnement de certains EPCI ».
Cet amendement précise en outre les domaines spécifiques où l'avis est requis et les conditions dans lesquelles il est recueilli.
Mme la présidente. L'amendement n° 264, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat, Beaufils et David, M. Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 38
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Art. L. 5211-6-3. - Chaque conseil communautaire, qui n'est pas composé intégralement de communes de montagne, constitue en son sein un collège spécifique regroupant ces communes qui bénéficient d'un classement en application de l'article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Pour toute décision ayant un impact sur la vie des populations de montagne, l'accord du collège spécifique est requis par un vote à la majorité qualifiée des membres qui le composent. » ;
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. En première lecture, nous avions adopté un amendement permettant la constitution, au sein du conseil communautaire, d’un collège spécifique regroupant les communes de montagne. Malheureusement, nos collègues députés n’ont pas jugé opportun de maintenir cette disposition. Par conséquent, nous proposons de réintroduire dans le projet de loi la création de ce collège spécifique, afin que les communes de montagne soient mieux prises en compte au sein de l’intercommunalité.
Cela étant, j’ai bien compris que l’article 3 serait voté conforme. Je regrette vivement que nous soyons ainsi obligés de nous plier à la volonté des députés…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Lors de la première lecture, tant le président de la commission que moi-même avions appelé l’attention de la Haute Assemblée sur le risque important de censure par le Conseil constitutionnel s’attachant à une telle disposition, qui rompt le principe d’égalité. Le Sénat avait néanmoins adopté l’amendement, mais l’Assemblée nationale, pour le motif que je viens d’évoquer, était revenue sur ce vote.
Je ne puis qu’invoquer à nouveau les mêmes arguments aujourd’hui et émettre un avis défavorable sur les amendements nos 190 rectifié, 249 et 264. Je souhaite que, cette fois-ci, la Haute Assemblée suive l’avis de la commission des lois.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement est évidemment sensible à la prise en compte des spécificités des zones de montagne. Celui qui le représente aujourd’hui est d’ailleurs membre du comité directeur de l’ANEM, l’Association nationale des élus de montagne.
Toutefois, il estime que la création d’un collège spécifique au sein du conseil communautaire n’est pas une mesure adaptée.
Surtout, l’aspect constitutionnel relevé par M. le rapporteur est important. Le droit de veto que les auteurs de ces amendements proposent d’accorder au collège spécifique permettrait aux communes de montagne d’imposer leur point de vue aux autres ou, à tout le moins, de bloquer les décisions de l’EPCI contre la volonté des autres communes. Ce serait bien entendu contraire tant à l’esprit qu’à la lettre de la Constitution.
Je profite de cette occasion pour rappeler qu’un certain nombre de dispositions concernant particulièrement les zones de montagne figurent d’ores et déjà dans le projet de loi qui vous est soumis, mesdames, messieurs les sénateurs.
Tout d’abord, il a été décidé que le seuil de 5 000 habitants pour la création d’un EPCI ne s’appliquerait pas dans les zones de montagne. En effet, les contraintes géographiques propres à ces territoires ne permettent pas toujours un regroupement cohérent de communes atteignant ce seuil de population. Il est donc préférable de privilégier la constitution d’une structure de moindre ampleur, autour d’un véritable projet de développement et d’intercommunalité.
Par ailleurs, au sein de la commission départementale de coopération intercommunale, un quota de sièges a été réservé aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale. Les élus de montagne pourront ainsi participer activement aux prises de décision de cette commission, dotée d’un véritable pouvoir de codécision avec le préfet en matière intercommunale.
Enfin, et c’est très important, le Gouvernement a fixé à quinze le nombre minimal de conseillers territoriaux pour les plus petits départements ; croyez-moi, ce n’était pas joué d’avance !
Comme vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, le cas particulier et sensible des zones de montagne a bien été pris en compte dans le cadre de l’élaboration du présent projet de loi.
Mme la présidente. Monsieur Jacques Blanc, maintenez-vous l'amendement n° 190 rectifié ?
M. Jacques Blanc. Oui, madame la présidente, en m’en remettant à la sagesse de la Haute Assemblée…
Le Conseil constitutionnel, pour lequel j’ai le plus grand respect, doit cependant apprendre à mieux connaître les réalités de la montagne ! Je regrette encore qu’il ait supprimé le seuil minimal de deux circonscriptions législatives par département…
Dans cet esprit, monsieur le secrétaire d’État, il était indispensable qu’un nombre minimal de conseillers territoriaux par département soit fixé. Je défendrai d’ailleurs avec M. Bernard-Reymond un amendement allant un petit peu plus loin. (Sourires.) En effet, nous considérons que, dans les deux départements exclusivement montagnards, il conviendrait que le nombre des conseillers territoriaux ne soit pas inférieur de plus de 20 % à celui des conseillers généraux. Ce serait un geste fort à l’égard des zones de montagne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour explication de vote.
Mme Bernadette Bourzai. En réalité, je propose que le collège spécifique regroupant les communes de montagne donne un avis, et non un accord. Les députés craignaient, semble-t-il, que l’on n’attribue à ce collège une sorte de droit de veto. Donner un avis lui permettra simplement d’exprimer une opinion, d’engager une négociation au sein du conseil communautaire. L’amendement n° 249 est un texte de repli à la suite de l’opposition, quelque peu abrupte, de l'Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Je suis moi aussi un ardent défenseur de la montagne, ainsi que de toutes les actions de l’ANEM, comme en témoignent nombre de mes interventions. Cependant, je ne suivrai pas mon collègue Jacques Blanc en l’espèce.
Treize des trente communes de ma communauté de communes sont situées en zone de montagne, au-delà de la limite des 600 mètres d’altitude, les autres se trouvant en zone de plaine. Sur le terrain, la différence n’est pas forcément évidente…
Personnellement, je suis partisan d’une simplification des dispositifs. Or je ne vois pas ce qu’apporterait la mesure présentée, sinon peut-être un motif de tensions supplémentaires au sein de communautés de communes où, à quelques dizaines de mètres d’altitude près, certaines communes bénéficient de l’ICHN, l’indemnité compensatoire de handicap naturel, ou d’avantages en matière de DGF, et d’autres non. Une telle disposition ne renforcerait en aucune façon la cohérence territoriale, au contraire.
Mon expérience de terrain m’amène donc à ne pas voter les amendements, d’autant que j’ai été sensible aux arguments développés par M. le rapporteur et par M. le secrétaire d’État. Pour une fois, je ne suivrai pas mon ami Jacques Blanc !