M. Jean-Pierre Sueur. J’ai écouté avec grand intérêt les explications avancées par M. le rapporteur et par M. le ministre.
Premièrement, s’agissant de l’affaire d’Outreau, vous savez que l’Assemblée nationale a dû se livrer à de grands efforts d’interprétation pour pouvoir mettre en œuvre la commission d’enquête, dont les travaux revêtent une importance que chacun mesure aujourd’hui. D’ailleurs, ses préconisations restent, pour une bonne part, devant nous !
Deuxièmement, il ne faut pas négliger le fait que la disposition en vigueur aujourd’hui peut donner lieu à un certain nombre de manipulations. En effet, pour échapper à une commission d’enquête parlementaire, il suffit de saisir la justice, ce qui est très facile. Cet élément doit donc être pris en compte.
Troisièmement, lorsque M. le rapporteur évoque l’indépendance et la séparation des pouvoirs, il est vrai que nous aimerions pouvoir constater l’existence d’une séparation réelle entre le parquet, d’une part, et le pouvoir exécutif, d’autre part. On ne peut pas employer un argument certains jours pour l’oublier d’autres jours !
Quatrièmement, enfin, notre collègue M. Collombat a fait preuve de beaucoup de perspicacité en nous rappelant que la disposition qui fait l’objet de cet amendement reprend la proposition n° 40 du comité présidé par M. Balladur – M. Collombat est très attaché aux articles 40 ! (Sourires.) –, formulée dans un paragraphe intitulé « Conforter la mission du Parlement en matière de contrôle et d’évaluation des politiques publiques »
Comment M. Édouard Balladur aurait-il pu avancer une proposition contraire au principe de séparation des pouvoirs ? Franchement, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, monsieur le ministre, une telle éventualité nous confondrait !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Pas nous !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La proposition n° 40 du comité présidé par M. Balladur n’était pas exactement formulée comme vous l’avez indiqué, monsieur Sueur, même si elle portait effectivement sur la constitution des commissions d’enquête.
Permettez-moi également de vous rappeler que, dans le cas de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’affaire d’Outreau, il n’y avait plus d’instance en cours. La justice avait statué définitivement et les travaux de la commission portaient uniquement sur les dysfonctionnements de la justice.
J’insiste, enfin, sur le principe de séparation des pouvoirs. Imaginez qu’un Parlement s’autorise à intervenir dans des instances judiciaires en cours : ce serait la négation de l’État de droit !
M. Jean-Pierre Sueur. Il ne s’agit pas de cela !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais si ! Si vous constituez une commission d’enquête sur des faits faisant l’objet d’une instruction judiciaire, vous ne pouvez pas prétendre que vous n’intervenez pas dans l’instance en cours ! À partir du moment où la commission enquête sur des faits soumis à une juridiction, il s’agit bien d’une atteinte à l’indépendance de la justice ! Et nous avons aussi parfois tendance à reprocher aux juges de s’occuper de ce qui ne les regarde pas. Conservons donc le principe de séparation des pouvoirs, qui est un principe fondamental général de toutes les démocraties, applicable même sans qu’il soit inscrit dans la Constitution.
Mes chers collègues, même si une instance judiciaire est en cours, nous savons comment délimiter la mission assignée à une commission d’enquête ! Récemment, le Sénat a créé, à la demande d’un groupe politique, une commission d’enquête sur le rôle des firmes pharmaceutiques dans la gestion par le Gouvernement de la grippe A/H1N1, alors que deux ou trois plaintes assez vagues ont été déposées. Nous n’avons pas tenu compte de ces dernières, parce que la commission d’enquête porte strictement sur l’organisation de la campagne de vaccination, sans aucun lien avec les plaintes, qui ont trait à la nocivité supposée des vaccins et à l’éventuelle mise en danger des personnes.
Il est donc tout à fait possible de définir le domaine d’intervention d’une commission d’enquête tout en respectant le principe de séparation des pouvoirs.
Veuillez m’excusez, mon cher collègue, mais si vous ne croyez même plus à ces principes, je suis quelque peu inquiet… pour vous !
M. Jean-Pierre Sueur. Que de sollicitude !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président de la commission des lois, je m’inquiète surtout pour vous, parce que vous seriez beaucoup plus crédible si, en même temps que vous défendez la séparation du pouvoir législatif et du pouvoir judiciaire, vous défendiez également la séparation entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire ! Dans une telle hypothèse, je vous approuverais.
Mais tous ces discours sont d’une totale hypocrisie ! Tant que l’on ne renoncera pas à la possibilité de saisir la justice par convenance, pour créer un contre-feu, nous rappellerons de manière systématique que quelque chose ne fonctionne pas dans nos institutions.
Encore une fois, oui à la séparation des pouvoirs, pourvu qu’elle s’applique entre les pouvoirs législatif et exécutif, les pouvoirs exécutif et judiciaire et les pouvoirs législatif et judiciaire. La séparation des pouvoirs ne doit pas fonctionner en sens unique !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous sommes d’accord !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 2
(Non modifié)
Après le premier alinéa du IV de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes entendues par une commission d’enquête sont admises à prendre connaissance du compte rendu de leur audition. Cette communication a lieu sur place lorsque l’audition a été effectuée sous le régime du secret. Aucune correction ne peut être apportée au compte rendu. Toutefois, l’intéressé peut faire part de ses observations par écrit. Ces observations sont soumises à la commission, qui peut décider d’en faire état dans son rapport. » – (Adopté.)
Article 3
Après l’article L. 132-4 du code des juridictions financières, il est inséré un article L. 132-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-5. – Au titre de l’assistance au Parlement dans le domaine de l’évaluation des politiques publiques prévue par l’article 47-2 de la Constitution, la Cour des comptes peut être saisie d’une demande d’évaluation d’une politique publique par le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat, de leur propre initiative ou sur proposition d’une commission permanente dans son domaine de compétence ou de toute instance permanente créée au sein d’une des deux assemblées parlementaires pour procéder à l’évaluation de politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d’une seule commission permanente.
« Les demandes formulées au titre de l’alinéa précédent ne peuvent porter ni sur le suivi et le contrôle de l’exécution des lois de finances ou de financement de la sécurité sociale, ni sur l’évaluation de toute question relative aux finances publiques ou aux finances de la sécurité sociale.
« La Cour des comptes assure en priorité le traitement des demandes d’assistance formulées en application de l’article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l’article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières.
« L’assistance de la Cour des comptes prend la forme d’un rapport. Ce rapport est communiqué à l’autorité qui est à l’origine de la demande, dans un délai qu’elle détermine après consultation du premier président de la Cour des comptes et qui ne peut excéder douze mois après la saisine de la Cour des comptes.
« Le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat, lorsqu’il est à l’initiative de la demande d’assistance de la Cour des comptes, et, dans les autres cas, la commission permanente ou l’instance permanente à l’origine de la demande d’assistance de la Cour des comptes statue sur la publication du rapport qui lui a été transmis. »
M. le président. L’amendement n° 8, présenté par M. Sueur, Mmes Bricq et Tasca, MM. Frécon, Frimat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
Président du Sénat
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
ou par une commission permanente dans son domaine de compétence ou par toute instance créée au sein du Parlement ou de l’une de ses deux assemblées pour procéder à l’évaluation des politiques publiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Comme vous l’aurez compris, cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je suis au désespoir de dire à M. Sueur que j’émets un avis défavorable sur cet amendement, pour une raison très simple : s’il n’y a plus de filtre, la Cour des comptes sera victime d’un embouteillage. Ce filtre est absolument nécessaire, ne serait-ce que pour écarter les demandes qui n’auraient pas de raison d’être.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Le Gouvernement est également très attaché au maintien du principe du filtre et à la réalité de son application.
Il faut faire confiance aux présidents des assemblées, quels qu’ils soient. Dans notre démocratie, depuis vingt, trente ou quarante ans, disons depuis le début de la Ve République, ces fonctions ont été exercées par des personnalités tout à fait éminentes, qui, chacune avec son caractère, ont manifesté le souci d’agir au nom de tous les députés ou de tous les sénateurs.
Je ne vois donc pas pourquoi il y aurait un inconvénient à maintenir ce filtre, même si les auteurs des demandes n’appartiennent pas à la même sensibilité que le président de leur assemblée. J’y vois plutôt une garantie qui évitera l’engorgement de la Cour des comptes.
Le Gouvernement fait donc entièrement confiance à la sagacité des présidents des assemblées et émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 9, présenté par M. Sueur, Mmes Bricq et Tasca, MM. Frécon, Frimat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement tend à supprimer un alinéa ajouté à la demande de M. le président de la commission des finances, afin de réserver une priorité aux demandes d’évaluation émanant de la commission des finances.
Premièrement, il me semble qu’il s’agit d’une question d’organisation qui relève plutôt du domaine réglementaire, voire de l’organisation interne de la Cour des comptes. Entrer dans le détail de telles considérations nous paraît donc un peu exagéré.
Deuxièmement, il aurait été plus simple de dire que, compte tenu de la charge de travail de la Cour des comptes, cette dernière ne traitera que les demandes de la commission des finances, puisque c’est à ce résultat qu’aboutiront, dans les faits, les dispositions adoptées par la commission des lois.
S’il faut prévoir des priorités dans l’examen des demandes pour éviter l’engorgement de la Cour des comptes, in fine, tout ce que nous venons de décider n’aura aucune portée, puisque seule l’une des commissions permanentes pourra véritablement bénéficier de l’appui de la Cour des comptes.
Certes, les missions et la charge de travail de cette dernière sont considérables et le contrôle des comptes est une activité majeure. Mais pourquoi élaborer un texte de loi si nous laissons les choses en l’état ?
M. le président. Il ne faut pas oublier la commission des affaires sociales, monsieur Collombat !
M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. Merci, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La priorité accordée aux demandes émanant de la commission des finances ou de la commission des affaires sociales découle directement de la loi organique et relève des missions de ces deux commissions, dont nous n’entendons pas paralyser l’action.
C’est pourquoi, là encore, je ne peux qu’exprimer un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je le répète, pourquoi passer son temps à délibérer sur un texte qui ne changera rien du tout ? Si nous partons du principe que la Cour des comptes n’a pas le temps de faire autre chose que d’examiner les demandes de la commission des finances et de la commission des affaires sociales, conformément aux prérogatives que ces commissions tiennent effectivement de la loi organique, il est inutile de nous fatiguer !
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
M. Jean-Pierre Sueur. Le groupe socialiste s’abstient.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Le groupe CRC-SPG également.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Arthuis, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° L'article L. 111-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, la Cour des comptes exerce, selon la procédure définie par le présent code, le contrôle de la gestion des collectivités territoriales et de leurs groupements, ainsi que des établissements publics locaux à caractère administratif. » ;
2° Après l'article L. 111-3, sont insérés trois articles ainsi rédigés :
« Art. L. 111-3-1. - La Cour des comptes contribue à l'évaluation des politiques publiques dans les conditions prévues par le présent code.
« Art. L. 111-3-2. - La Cour des comptes s'assure que les comptes des administrations publiques sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière, soit en certifiant elle-même les comptes, soit en rendant compte au Parlement de la qualité des comptes des administrations publiques dont elle n'assure pas la certification.
« Art. L. 111-3-3. - La Cour des comptes concourt au contrôle des actes budgétaires et de l'exécution du budget des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des établissements publics de santé. » ;
3° Après l'article L. 112-1, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 112-1-1. - La Cour des comptes est composée de chambres.
« Les chambres en région, dénommées chambres des comptes, ont un ressort interrégional, sauf si des particularités géographiques justifient un ressort différent. Leur ressort et leur siège sont fixés par décret.
« Sans préjudice des autres missions qui peuvent leur être confiées au sein de la Cour des comptes, et dans le respect du pouvoir d'organisation des travaux exercé par son premier président, elles exercent seules dans leur ressort la compétence de jugement des comptes des comptables publics des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et la mission de contrôle budgétaire de ces collectivités et établissements définie au chapitre II du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales et celle de contrôle de la gestion des collectivités territoriales régie par le second alinéa de l'article L. 111-3 du présent code.
« Leur président est un conseiller-maître qui ne peut simultanément présider une autre chambre de la Cour des comptes. »
4° L'intitulé du livre II est ainsi rédigé : « Les chambres territoriales des comptes » ;
5° La première partie du livre II est abrogée ;
6° L'article L. 120-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 120-1. - Les membres de la Cour des comptes ont la qualité de magistrats.
« Ils ont vocation à être affectés dans une des chambres de la Cour des comptes définies à l'article L. 112-1-1.
« Les magistrats du siège sont inamovibles. Ils ne peuvent, sans leur consentement, même en avancement, recevoir une affectation les faisant passer d'une chambre des comptes à une autre chambre ou inversement, non plus qu'une affectation entraînant un changement de résidence administrative. » ;
7° Après l'article L. 120-1, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 120-1-1. - Les grades des magistrats de la Cour des comptes sont : premier président, président de chambre, conseiller maître, conseiller référendaire et auditeur et, pendant la période de transition prévue à l'article... de la loi n° du tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques, président de section, premier conseiller et conseiller.
« Le grade de président de chambre est un grade fonctionnel. Ce grade peut comprendre plusieurs catégories dépendant des fonctions exercées, définies par décret en Conseil d'État. » ;
8° L'article L. 121-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les présidents de chambre sont nommés parmi les conseillers maîtres ayant au moins trois ans de services effectifs dans ce grade. Pour ces nominations, une liste comprenant plusieurs noms est transmise, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, par le premier président de la Cour des comptes.
« Le premier président affecte à la présidence d'une chambre de la Cour des comptes un président de chambre pour une durée de six ans, ou pour la durée restant à courir jusqu'à la limite d'âge qui lui est applicable si elle est inférieure. Au terme de la durée de six ans, ce magistrat a vocation à occuper un emploi de président d'une autre chambre de la Cour des comptes. A défaut, il peut, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, se voir confier par le premier président toute autre fonction d'encadrement ou de responsabilité ou les fonctions correspondant au grade de conseiller maître. »
II. - La Cour des comptes coordonne une expérimentation de dispositifs destinés à assurer la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes des collectivités et établissements territoriaux dont les produits de fonctionnement excèdent 200 millions d'euros pour l'exercice 2008. Cette expérimentation est ouverte pour une durée de cinq ans commençant trois ans après la publication de la présente loi.
Les collectivités territoriales peuvent se porter candidates à cette expérimentation auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. Le ministre chargé des collectivités territoriales se prononce sur les candidatures, après avoir pris l'avis du ministre chargé des comptes publics et du premier président de la Cour des comptes, dans le délai de quatre mois suivant leur dépôt.
Une convention est conclue entre le premier président de la Cour des comptes et l'exécutif de la collectivité territoriale participant à l'expérimentation, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales et de celui chargé des comptes publics. Elle en définit les modalités de mise en œuvre et précise les moyens en crédits, ou en personnels, ou à ce double titre, qui l'accompagnent. Elle précise également les normes comptables applicables.
L'expérimentation fait l'objet d'un bilan intermédiaire au terme des trois ans mentionnés ci-dessus, puis d'un bilan définitif au terme de huit ans. Ces bilans font l'objet d'un rapport du Gouvernement qui le transmet au Parlement, avec les observations des collectivités territoriales concernées et de la Cour des comptes.
III. - A l'issue d'un délai de quinze ans à compter de la publication de la présente loi, les présidents de section et premiers conseillers sont nommés dans un autre grade de la Cour des comptes dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Chaque année, à compter de l'entrée en vigueur du décret pris pour l'application de l'article L. 112-1-1 du code des juridictions financières issu de la présente loi, sont nommés conseillers référendaires cinq présidents de section ou premiers conseillers, âgés de trente-cinq ans au moins et justifiant, à la date de nomination, de dix ans au moins de services publics effectifs. Ces nominations sont prononcées sur proposition du premier président de la Cour des comptes, après avis du conseil supérieur de la Cour des comptes. La nomination dans le grade de conseiller référendaire ne peut intervenir dans la chambre des comptes dans laquelle le magistrat est affecté au moment de sa promotion.
Les conditions d'application des deux alinéas qui précèdent sont définies par décret en Conseil d'État.
Les procédures juridictionnelles engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi et qui n'ont pas été inscrites au rôle de ces chambres, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.
Les procédures administratives engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, et sur lesquelles une délibération n'est pas encore intervenue, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.
Il est délibéré sur les affaires qui ne sont pas transmises à la Cour des comptes en application des alinéas précédents selon les dispositions du code des juridictions financières applicables aux chambres régionales des comptes avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Les procédures relatives aux appels formés avant l'entrée en vigueur de la présente loi devant la Cour des comptes contre les décisions juridictionnelles des chambres régionales des comptes sont poursuivies jusqu'à leur terme selon les dispositions du code des juridictions financières applicables avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.
M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. Vous l’avez compris, mes chers collègues, il s’agit d’un amendement de conséquence. (Sourires.)
Le Sénat vient de voter les trois articles de cette excellente proposition de loi, visant à renforcer les prérogatives de contrôle et d’évaluation du Parlement. Je volerai au secours de notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui souhaite que la Cour des comptes soit en mesure de répondre à l’attente suscitée par ces trois articles.
M’inspirant du projet de loi portant réforme des juridictions financières, qui porte la signature de M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, j’ai cru de mon devoir de soumettre à la commission des finances un amendement tendant à insérer, dans la proposition de loi que nous examinons, les principales dispositions portant réforme des juridictions financières, ce qui permettrait de donner à la Cour des comptes le cadre juridique, les moyens et les méthodes propres à satisfaire l’attente du Parlement.
Monsieur le ministre, assumer vos responsabilités ne doit pas être aisé, tant l’agenda du Parlement est encombré.
Or nous sommes entrés dans une vraie crise des finances publiques, qui affecte aujourd’hui l’Union européenne. Face à cette crise, nous avons besoin d’instruments de visibilité, de lucidité, particulièrement pertinents.
Mes chers collègues, je vous rends attentifs au fait que, si nos travaux parlementaires nous donnent du temps, ce qui favorise la sérénité nécessaire à l’établissement de bonnes lois, la situation économique et financière pourrait nous imposer de hâter le pas dans les semaines et les mois à venir.
La semaine prochaine, le Gouvernement présentera un deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2010, afin que la France puisse apporter son soutien à la Grèce, aujourd’hui en difficulté. De plus, il ne serait pas surprenant que nous soyons confrontés demain à un problème de dettes souveraines.
De ce fait, nous avons l’obligation de prendre appui sur des corps d’experts indépendants. Les magistrats des juridictions financières ont cette qualité.
Monsieur le ministre, nous ressentons une véritable impatience quant à cette réforme des juridictions financières.
Ce n’est pas une innovation : je rappelle que cette réforme a été longuement préparée par l’ancien Premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin. La concertation a duré près de deux ans. Les dispositions de ce texte ont été vues, revues, discutées avec l’ensemble des représentants des différentes organisations professionnelles. Les magistrats concernés en sont tous imprégnés, et ils ne sont pas très nombreux, ce qui m’incite d’ailleurs à penser qu’il faudra peut-être prévoir des moyens supplémentaires pour les juridictions financières, afin qu’elles puissent assumer leurs fonctions.
Après cette concertation, le texte a été approuvé par le Conseil des ministres le 28 octobre 2009.
J’ai donc pris l’initiative de présenter cet amendement, voilà trois semaines, afin qu’il puisse être discuté ici et là. À cette fin, j’ai reçu les représentants des organisations professionnelles et je me suis assuré que le nouveau Premier président de la Cour des comptes était bien en phase avec cette orientation et reprenait à son compte ce que son prédécesseur avait conçu pour le progrès des juridictions financières.
Si le Sénat adoptait cet amendement, la navette parlementaire donnerait le temps, avant un nouvel examen du texte par l’Assemblée nationale, de mener les concertations souhaitées par plusieurs d’entre vous.
J’ai entendu des critiques qui me paraissent mal fondées. On a prétendu, par exemple, que les chambres régionales des comptes défendaient les collectivités territoriales contre l’État. Cela ne veut rien dire, car on ne peut pas être juge et partie !
Ce qui est demandé aux juridictions financières, c’est de certifier la sincérité des comptes publics, et rien d’autre ! Il s’agit de veiller à ce que les informations soumises par les gestionnaires publics aux contribuables, aux habitants de la commune, du département, de la région, soient suffisamment claires et lisibles pour que chacun puisse se forger une opinion sur la base de comptes certifiés, sincères et réguliers.
La commission des finances a donc pris l’initiative de cet amendement pour venir à votre secours, monsieur le ministre. Je souhaiterais néanmoins savoir comment vous envisagez l’avenir, s’agissant de l’agenda parlementaire et de l’échéance probable pour l’examen du projet de loi portant réforme des juridictions financières. Les magistrats financiers sont préoccupés par cette échéance, et je ne crois pas qu’il soit de bonne administration d’annoncer à un corps, quel qu’il soit, un projet de loi le concernant, sans pouvoir préciser quand le texte viendra en discussion et le moment où il entrera en vigueur.
La proposition de loi dont nous débattons ce soir est un texte fort important. J’espère ne pas avoir fait perdre de temps au Sénat et au Gouvernement en proposant cet amendement, qui, de mon point de vue, n’est pas un cavalier. C’est, en quelque sorte, le texte organique pour rendre possible l’ambition exprimée au travers des trois articles que le Sénat vient de voter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?