M. Bruno Le Maire, ministre. ... de même, 80 000 dossiers de demandes adressées au fonds d’allégement des charges ont été déposés et instruits ; 50 millions d’euros d’allégement de taxes sur le foncier non bâti ont été débloqués, à la demande du Premier ministre, afin de répondre à la préoccupation que vous venez d’exprimer.
La deuxième réponse que nous apporterons tous ensemble, c’est le projet de loi de modernisation de l’agriculture, qui sera un rendez-vous important pour tous les agriculteurs français. Ce texte sera examiné en première lecture à partir du 17 mai au Sénat. Il permettra de stabiliser le revenu des agriculteurs – c’est son objectif principal – grâce à la conclusion de contrats écrits, grâce au renforcement de l’Observatoire des prix et des marges et grâce à l’amélioration des dispositifs assurantiels.
M. Roland du Luart. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Je compte sur votre participation à tous lors de ce rendez-vous essentiel.
M. Roland du Luart. On vous soutiendra !
M. Bruno Le Maire, ministre. La troisième bataille que nous livrons est européenne. Le Président de la République a insisté, hier, sur cette dimension. Il n’y a pas d’avenir pour l’agriculture française, en effet, sans un soutien fort de la politique agricole commune.
L’agriculture doit redevenir une priorité absolue des responsables politiques européens, au plus haut niveau. Pour la première fois depuis des années, le Conseil européen se penchera demain sur cette question, à la demande de la France. Nous continuerons à défendre une politique agricole commune forte dans les années à venir ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
surcoût financier lié à la gestion de l'après-tempête
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour le groupe de l’Union centriste.
M. Jean-Claude Merceron. Ma question s’adresse à M. le ministre du budget, dont je salue l’arrivée au Gouvernement.
Touchée de plein fouet par le passage de la tempête Xynthia, la Vendée, comme d’autres départements du littoral atlantique, doit aujourd’hui faire face au défi de la reconstruction.
Permettez-moi, tout d’abord, de saluer le courage avec lequel les Vendéens, les bénévoles, les professionnels et les collectivités, se sont mobilisés pour secourir et aider les sinistrés lors d’une nuit d’angoisse et de mort, et de remercier l’ensemble des Français de la solidarité dont ils ont fait preuve.
Je salue aussi tout particulièrement notre assemblée qui, sur votre initiative, monsieur le président, a décidé d’apporter une aide exceptionnelle aux communes touchées en Charente-Maritime comme en Vendée.
Les difficultés rencontrées par les responsables locaux sont à la hauteur de ce drame. Rien n’est simple et tout est au-delà de la mesure commune, qu’il s’agisse de la désolation causée par les dégâts ou des réponses à apporter.
L’enjeu financier de ma question peut sembler assez dérisoire au regard des sommes aujourd’hui nécessaires à la reconstruction d’un littoral, d’un territoire et d’une économie à la fois agricole, ostréicole et touristique. Toutefois, pour nos collectivités, ce fardeau s’ajoute au poids de la douleur et à l’ampleur du défi.
Aux difficultés en cascade que les acteurs locaux découvrent encore chaque jour doivent correspondre des aides financières, qu’il faudra renouveler pendant plusieurs années, mais qu’il est prématuré d’évaluer définitivement. On n’en a pas fini avec cette tempête !
L’une de ces difficultés concerne la gestion des déchets qui se sont accumulés en raison de la tempête. En Vendée, au moins 6 000 tonnes supplémentaires de déchets ultimes, soit 20 % de la masse traitée normalement chaque année, vont devoir être enfouis.
En application de la loi de finances, et à la suite du Grenelle de l’environnement, la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, frappe ces déchets ultimes pour un montant de 20 euros la tonne. Les communes vendéennes vont ainsi devoir assumer, cette année, un surcoût d’au moins 120 000 euros. Il ne s’agit là que du surcoût fiscal, celui de l’ensemble des opérations de traitement des déchets n’ayant pas encore été évalué à ce jour.
À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Monsieur le ministre, au nom de l’ensemble des départements touchés par la tempête Xynthia, je fais appel à la solidarité nationale afin que nous soit épargné le paiement du surcoût de la TGAP engendré par le volume de déchets issus de cette catastrophe naturelle, soit par le biais d’une exonération en 2010, soit par la mise en place d’un dispositif imputable sur les paiements à effectuer jusqu’en 2015. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, auquel nous adressons tous nos vœux de réussite dans ses nouvelles fonctions. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous remercier de cet accueil chaleureux.
Monsieur le sénateur Merceron, je tiens à vous assurer que nous nous associons pleinement à la politique publique d’accompagnement des Vendéens sinistrés.
En tant que maire de Troyes, je n’oublie pas la tempête de 1999. Je n’oublie pas le degré d’implication de tous les agents territoriaux et des agents de l’État, qui se sont mobilisés très rapidement au service des populations. Je n’oublie pas non plus qu’une fois l’émotion passée, l’accompagnement, qui est un devoir et une exigence, fait partie des missions permettant d’atténuer la souffrance humaine et psychologique.
M. Jean-Louis Carrère. Nous, dans les Landes, nous attendons toujours ! M. Woerth n’a pas fait ce qu’il fallait !
M. François Baroin, ministre. Dans cet esprit, le ministère du budget a pris des engagements, sous l’impulsion du Premier ministre. Cette exigence de coordination s’applique à l’ensemble des secteurs.
Premièrement, un dispositif dérogatoire s’appliquera en cas de défaut de paiement de personnes physiques, d’entreprises, de commerçants, d’artisans et de professions libérales. Je m’engage personnellement à ce que cette ligne soit maintenue. Des directives ont ainsi été données à la direction générale des finances publiques. Si des incidents se produisaient, n’hésitez pas à solliciter directement mon intervention.
Deuxièmement, il a été demandé aux URSSAF des départements sinistrés d’examiner avec la plus grande souplesse les demandes de délai de paiement et de remise de majoration de retard émanant d’entreprises touchées par la tempête.
Sur la question des déchets que vous soulevez plus précisément, monsieur Merceron, je vais examiner la possibilité d’une dérogation au droit commun pour l’application de la TGAP. Mais vous comprendrez que seules pourront en bénéficier les communes membres du syndicat mixte départemental d’étude et de traitement des déchets ménagers et assimilés en Vendée, le fameux Trivalis.
Le cas échéant, nous pourrons envisager, pour des raisons d’équilibre et d’équité fiscale, un éventuel allongement des délais de paiement, selon un calendrier et des modalités plus souples que nous définirons ensemble. Tout sera mis en place pour que la Vendée ne soit pas pénalisée, sur le plan humain comme sur celui des finances des syndicats de communes et du département. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean-Louis Carrère. Tant mieux pour la Vendée, mais j’en doute !
politique du gouvernement après les régionales
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour le groupe socialiste.
M. Jean-Pierre Bel. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Permettez-moi de faire un simple rappel : les élections régionales ont donné une très large victoire à la gauche – on peut considérer que celle-ci a remporté près de vingt-trois régions sur vingt-six ! –…
Un sénateur de l’UMP. Vous comptez le Languedoc-Roussillon ?
M. Jean-Pierre Bel. … tandis que les candidats de la majorité se sont vu infliger une sévère défaite.
Mais je recommanderai à chacun, compte tenu de l’état du pays, de garder le sens de la mesure : pas de triomphalisme hors de propos pour les uns, pas de politique de l’autruche, d’arrogance ou de mépris pour les autres.
Au-delà du vote sanction, qui apparaît comme une évidence, chacun doit essayer de comprendre ce que les Français ont voulu signifier. En tout cas, nous nous y sommes efforcés, et nous avons été nombreux, par-delà les clivages politiques, à les entendre dire qu’ils étaient victimes d’une injustice permanente dans leur vie quotidienne : injustice sociale, injustice territoriale, injustice générationnelle, injustice devant la contribution que chacun doit apporter à la nation...
« C’est pas juste ! », disent ceux qui ne parviennent plus à boucler leurs fins de mois et qui n’ont plus d’espoir de voir leur situation s’améliorer.
« C’est pas juste ! », disent les élus et les citoyens des territoires qui voient les entreprises disparaître de leur paysage et les services publics se réduire peu à peu comme peau de chagrin.
« C’est pas juste ! », disent les jeunes, comprenant qu’ils devront payer l’addition de la situation actuelle et assumer la charge de déficits historiques pour l’avenir.
« C’est pas juste ! », disent les contribuables, qui voient les cadeaux massifs faits aux plus riches et le fardeau toujours plus lourd qui pèse sur les classes moyennes et populaires.
M. Gérard Longuet. Les impôts socialistes !
M. Jean-Pierre Bel. Nous sommes donc en droit de vous demander, monsieur le Premier ministre, si vous avez entendu, après ces résultats, le message qui vous était adressé, notamment celui qui concerne la responsabilité de l’État républicain en matière d’équité, après que vous avez instauré le fameux bouclier fiscal exonérant fortement les plus nantis.
Cette mesure, je vous assure que les Français la ressentent comme le symbole même de l’injustice qui leur est faite, et non pas, ainsi que vous l’expliquez, comme un soutien à l’investissement... Ils y verraient plutôt un soutien aux privilégiés, sur le dos de ceux qui font les frais de la crise.
Monsieur le Premier Ministre, si vous avez vraiment entendu ce message, pouvez-vous répondre à cette seule et simple question : au moment où les Français sont confrontés à la crise, allez-vous revoir votre politique, allez-vous revoir le bouclier fiscal ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Vous me demandez, monsieur le sénateur, si nous allons tenir compte du résultat des élections régionales. Ma réponse est oui !
Les listes de la coalition de gauche ont remporté un grand succès lors des élections régionales.
M. Gérard Longuet. Sauf en Alsace !
M. François Fillon, Premier ministre. Vous allez présider vingt-deux ou vingt-trois régions sur les vingt-six que compte notre pays. C’est une très grande responsabilité, et je voudrais saluer, dans un esprit républicain, ceux et celles qui vont l’exercer.
Cette responsabilité est d’autant plus grande qu’elle s’exercera dans un contexte de sortie de crise qui exige une meilleure coordination entre les politiques locales et les politiques nationales. J’espère donc que nous pourrons conduire cette coordination dans un esprit républicain. Je l’espère d’autant plus que les régions ne sont pas des contre-pouvoirs, mais des éléments constitutifs de la nation et de l’État. (Mme Catherine Procaccia et M. Nicolas About applaudissent.)
Mme Nicole Bricq. Et le Grand Paris ?
M. François Fillon, Premier ministre. Je prendrai dans les prochains jours des initiatives afin d’examiner, avec les présidents de conseil régional, le moyen de mieux assurer cette coopération entre l’État et les régions.
Cela étant dit, monsieur Bel, le vote de dimanche dernier n’a rien changé aux défis que notre pays doit relever, notamment celui de la compétitivité de l’économie française, qui n’est pas, nous devons le reconnaître, au niveau de celle de notre voisin allemand, pour ne prendre que cet exemple.
Il n’a rien changé au grave défi que, comme beaucoup d’autres pays européens, nous devons relever en matière d’endettement, et nous constatons chaque jour combien cette question est majeure pour l’avenir de notre pays et pour les générations futures.
Il n’a rien changé à la nécessité de protéger notre modèle social face à l’allongement de la durée de la vie.
Oui, monsieur Bel, nous allons amplifier nos efforts pour relever ces défis et protéger les Français.
M. Jean-Louis Carrère. Et le bouclier fiscal ?
M. François Fillon, Premier ministre. Mais vous, que proposez-vous, en dehors de votre rengaine sur le bouclier fiscal ? (Rires sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. C’est la rengaine des Français !
M. François Fillon, Premier ministre. Vous proposez soit de tout arrêter, ce qui aboutirait naturellement à la remise en cause de notre mode de vie, soit de mettre en œuvre un projet socialiste que je ne connais pas parce qu’il n’existe pas, en tout cas pas encore ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
J’ai bien entendu les critiques que vous formulez, ainsi que celles des Français. Mais au cours de cette campagne, monsieur Bel, je n’ai pas entendu les Français réclamer la fin de l’autonomie des universités, réclamer la fin du revenu de solidarité active ou encore la suppression de l’exonération des droits sur les petites et les moyennes successions !
M. Didier Boulaud. Continuez ! Surtout, ne changez rien !
M. Jean-Louis Carrère. Est-ce que vous allez revoir le bouclier fiscal ?
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Bel, si votre question est : « Le Gouvernement va-t-il faire demi-tour ? », eh bien, ma réponse est non ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. Jean-Louis Carrère. Vous l’avez déjà dit hier !
politique économique et sociale après les régionales
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour le groupe CRC-SPG.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Selon le Président de la République, avec lequel vous êtes d’accord, monsieur le Premier ministre – cela, je vous le concède ! –, « rien ne serait pire que de changer de cap ».
Il veut continuer à alléger les charges sur le travail et à refuser toute augmentation d’impôt pour les riches, accélérer des réformes contestées et stigmatiser encore plus les familles modestes et les étrangers. Curieuse analyse de la sanction par les électeurs de sa politique, de votre politique !
Ce que les électeurs ont sanctionné, c’est une politique pour les plus favorisés, au détriment de l’immense majorité : réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune, bouclier fiscal, exonération de l’impôt sur les sociétés, exonérations patronales sur les heures supplémentaires.
L’infime minorité qui en profite – les financiers et les pouvoirs qui les soutiennent, notamment le vôtre ! – a plongé la France et le monde dans une crise économique et sociale gravissime. Or ils en sortent indemnisés et même récompensés !
M. Roland du Luart. C’est une honte d’entendre cela !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’État a renfloué les banques sans contrepartie, et tout continue comme avant : retraites dorées, bonus des traders, dividendes du CAC 40, etc. Pendant ce temps, les populations payent le prix de la crise : baisse du pouvoir d’achat des salaires et des retraites, précarité, chômage en augmentation de 10 %, déstructuration des services publics... Ces populations vont aussi subir l’augmentation de 9,7 % du prix du gaz, alors que le long hiver a permis à l’entreprise privée GDF-Suez d’engranger d’énormes bénéfices. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, le message des Français est clair : ils en ont assez de l’injustice sociale, assez de payer une politique en faveur des plus riches. Ils veulent la justice sociale et fiscale. Ils veulent une réponse solidaire du pays à la crise. Ils veulent un changement de politique, changement que, à l’évidence, la droite n’est pas susceptible d’opérer.
Personne ne saurait toutefois comprendre que vous continuiez à provoquer le monde du travail, comme Mme Christine Lagarde sait le faire quand elle justifie le bouclier fiscal en disant que si c’est la partie la plus riche de la population qui en profite, c’est parce que c’est elle qui fait tourner l’économie ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Dominique Braye. Vous ne représentez plus rien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est une provocation pour le monde du travail ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.) Vous pouvez protester, c’est la réalité !
M. Dominique Braye. Un peu de respect !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous devez au moins entendre que la solidarité ne s’adresse qu’aux plus faibles et abroger le bouclier fiscal, cette mesure inique qui rapporte 150 millions d’euros à ses 150 plus gros bénéficiaires. C’est ce que nous vous demandons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Il y a une chose sur laquelle nous serons d’accord : l’importance de la valeur travail.
M. Jean-Pierre Godefroy. Tu parles !
Mme Christine Lagarde, ministre. Vous respectez le travail, je le respecte aussi, notre Gouvernement le respecte et il le démontre depuis 2007.
M. Jacques Mahéas. Baratin !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous nous accorderons également sur ce point : nous avons besoin des deux facteurs, le capital et le travail, pour faire tourner une économie.
M. Didier Boulaud. Et des hommes !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le monde du travail paie votre crise !
Mme Christine Lagarde, ministre. À vous entendre, notre gouvernement, sous l’autorité de François Fillon, aurait à rougir de sa politique. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. C’est la France qui rougit !
Mme Christine Lagarde, ministre. Eh bien, j’affirme que nous n’avons pas à rougir de la politique que nous avons mise en œuvre !
Premièrement, s’agissant de la croissance, observons la façon dont les autres nous regardent. Selon la Commission européenne, la France sortira plus vite de la crise actuelle que les autres pays de la zone euro.
M. Jean-Louis Carrère. Et l’Allemagne ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Les prévisions de la Commission pour l’année 2010 font apparaître une augmentation de 1,2 % du PIB de notre pays, soit exactement le même chiffre que pour l’Allemagne et bien plus que la moyenne au sein de la zone euro.
Deuxièmement, aurions-nous à rougir de notre politique fiscale ? Actuellement, alors que la croissance redémarre doucement et qu’elle est encore fragile, la pire des solutions serait de charger le pays avec des impôts supplémentaires.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Provocation !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous ne nous y résignerons pas. Nous n’augmenterons pas les prélèvements obligatoires : ce n’est certainement pas le moment de le faire ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
MM. Didier Boulaud et Jacques Mahéas. Mais le prix du gaz, oui !
Mme Christine Lagarde, ministre. Troisièmement, aurions-nous à rougir de la politique de l’emploi que nous mettons en œuvre ? Ma réponse est non ! Avons-nous des résultats parfaits ? Bien sûr que non ! Le chômage persiste, même si son augmentation est freinée et la situation stabilisée. Au mois de février, le nombre de demandeurs augmentait de 3 300, ce qui est infiniment moins qu’au mois de janvier.
M. Robert Hue. Une augmentation de 13 % en un an !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fait 5000 000 au total !
Mme Christine Lagarde, ministre. Comparons les chiffres : la moyenne mensuelle au premier trimestre 2009 s’élève à 64 000 ; au quatrième trimestre 2009, elle est quatre fois inférieure.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez rayé des chômeurs des statistiques !
M. Jean-Louis Carrère. C’est du Giscard dans le texte !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous enregistrons donc des résultats.
Sur tous les plans évoqués par M. le Premier ministre, qu’il s’agisse de la compétitivité, de la recherche et de l’innovation, de la politique de l’emploi ou de la réduction des déficits publics, je vous appelle, madame Borvo Cohen-Seat, à un effort collectif, parfaitement justifié en période de crise. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour le groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Bizet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Le Président de la République a mis l’agriculture et même la politique agricole commune, la PAC, au cœur de ses priorités. Ce n’est que justice, compte tenu des tragédies quotidiennes que vit le monde agricole.
La PAC donne un cadre et des moyens. Ce cadre comme ces moyens sont indispensables et ils sont à l’honneur de la construction européenne. Cependant, alors que le secteur connaît sa crise la plus grave depuis trente ans, il faut aussi explorer des voies nouvelles, en oubliant le temps et le mythe de la PAC administrée.
M. Jean-Pierre Godefroy. J’entends cela depuis deux ans !
M. Jean Bizet. C’est tout le sens de la régulation et de la contractualisation, évoquées depuis quelques mois. Mais comment réguler un secteur lorsque les parties – l’acheteur et le vendeur – sont dans des positions si différentes et, en vérité, si inégales ?
Pour le dire simplement, les agriculteurs ne sont pas en mesure de négocier les prix, ni leurs prix de production, face aux banques et aux fournisseurs d’engrais et de matériels, ni a fortiori leurs prix de vente, face à des industriels organisés ou à des centrales d’achat hyper concentrées.
Même sans la PAC, j’ose le dire, le marché convient aux agriculteurs, mais à condition que leurs partenaires n’abusent pas de leur position dominante !
Si l’on permet et même si l’on favorise le pouvoir de négociation des producteurs pour corriger l’asymétrie des filières, ce sont la Commission et les autorités de concurrence qui protestent !
Il y a toujours eu, concernant la PAC, des problèmes de cohérence. La PAC administrée générait des surplus. La PAC réformée crée des rentes agricoles sous forme d’aide aux revenus. Maintenant, la PAC régulée ne peut fonctionner parce qu’on lui oppose le droit de la concurrence !
Il est temps de faire cesser ces aberrations. Quelques pistes peuvent être envisagées : la massification de l’offre et le mandat de négociation collective doivent pouvoir être autorisés. L’égalité de traitement doit pouvoir être garantie.
Il appartient au politique de prendre ses responsabilités pour donner plus de souplesse au droit de la concurrence. Car la société ne peut demander au monde agricole d’évoluer sans lui donner les moyens, y compris juridiques, de le faire. Le monde agricole ne peut vivre dans ces contraintes et dans ces contradictions permanentes.
Le problème se pose évidemment avec acuité dans le secteur laitier et pour le niveau du prix du lait. Les producteurs demandent rééquilibrage et dignité. Que comptez-vous faire pour leur répondre ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Bizet, vous êtes un spécialiste du secteur laitier et du marché du lait en France. Vous savez quelles sont les réponses appropriées pour redonner du revenu et de la visibilité à tous les producteurs de lait.
La première solution consiste à fixer un prix permettant de couvrir les vrais coûts de revient de chaque producteur. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation de blocage liée à la définition du prix au deuxième trimestre. Je réunirai l’interprofession laitière mardi prochain pour que nous sortions de cette impasse.
Tous les producteurs de lait en France ont droit à un prix susceptible de leur fournir un revenu digne de leur travail ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. La deuxième solution consisterait à donner de la visibilité grâce aux contrats écrits entre producteurs et industriels.
Il faut mettre un terme à cette situation qui voit les producteurs de lait s’engager à rénover leurs installations pour 200 000, 250 000 ou 300 000 euros sans savoir ce qu’ils toucheront le mois suivant !
Je souhaite que, tous ensemble, nous mettions en place, à partir de la loi de modernisation, des contrats écrits entre producteurs et industriels…
M. Jean-Pierre Raffarin. Oui, une coopération !
M. Bruno Le Maire, ministre. … qui fixeront un volume, une durée – de quatre, cinq ou six ans – et un prix.
M. Jean-Louis Carrère. Agissez !
M. Bruno Le Maire, ministre. Aujourd’hui, cette définition du prix par l’interprofession n’est pas possible au titre du droit de la concurrence européenne.
M. Jean-François Voguet. Et les hypermarchés ?
M. Didier Boulaud. Quand la droite libérale retrouve les vertus de la planification…
M. Bruno Le Maire, ministre. Je souhaite obtenir, dans les meilleurs délais possibles, une modification du droit de la concurrence européenne avec le soutien du Premier ministre et du Président de la République. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Bizet. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Je présenterai lundi au Conseil des ministres européens la proposition française de modification du droit de la concurrence européen qui permettra aux producteurs de définir un indicateur de tendance de marché dans l’interprofession.
M. Jean-Louis Carrère. Vive les quotas !
M. Bruno Le Maire, ministre. Je présenterai cette proposition à Joaquin Almunia, commissaire européen à la concurrence, de façon que, enfin, les producteurs puissent avoir de la visibilité sur leurs revenus.
Enfin, la troisième solution, vous la connaissez : il s’agit du maintien d’outils d’intervention à l’échelle européenne. Lorsque le prix du lait s’est effondré en 2009, nous avons livré une bataille diplomatique déterminée, en réunissant vingt-deux États membres, afin d’obtenir que la Commission européenne, après trois mois de crise qui ont asphyxié les producteurs, dépense 300 millions d’euros sur le marché agricole du lait pour faire remonter les prix. Les prix ont ainsi remonté en janvier 2010 de 10 % par rapport à janvier 2009, grâce à l’intervention de la Commission et à la mobilisation française.
Il faut des instruments d’intervention et de régulation des marchés agricoles : c’est la condition de la survie et de la défense des agriculteurs français ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
réforme des collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger, pour le groupe socialiste.
M. Yves Krattinger. Monsieur le Premier ministre, pendant toute la campagne électorale, les ministres ont dressé contre les collectivités un violent réquisitoire. Ils appelaient à sanctionner les régions à majorité socialiste.
M. Didier Boulaud. Raté !
M. Yves Krattinger. Les électeurs ont apporté une tout autre réponse : ils ont préféré sanctionner le Gouvernement.
M. Jean-Louis Carrère. Très bien !
M. Yves Krattinger. Très majoritairement, ils ont approuvé les politiques conduites par les régions (On le conteste sur les travées de l’UMP.) : leur rôle dans l’aménagement du territoire, les politiques de transport, leur capacité à former les hommes, à encourager l’innovation et la recherche, à soutenir l’économie.
M. Christian Cambon. Leurs impôts ?