M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Oui, monsieur le président. Cela me permet de faire un geste de courtoisie à l’égard de mon collègue Xavier Pintat, à qui je laisse le soin de rectifier son amendement.
M. le président. L’amendement n° 5 est retiré.
Monsieur Pintat, acceptez-vous de modifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le rapporteur ?
M. Xavier Pintat. Ayant obtenu l’assurance de M. le ministre, c’est avec grand plaisir que j’accepte de rectifier mon amendement, et je remercie M. le rapporteur de m’avoir proposé cette solution.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Pintat, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, et la date : « 1er juillet 2010 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2010 »
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je suis prêt, à la limite, à accepter la date du 31 décembre 2010, et je prends acte de la courtoisie de l’échange qui a eu lieu entre M. le rapporteur et notre collègue Xavier Pintat.
Toutefois, j’espère que la loi NOME sera adoptée avant cette échéance. À en croire certaines déclarations que l’on a pu entendre depuis le début de la semaine, l’agenda de M. le ministre a été allégé… (Sourires.) Des créneaux devraient donc se libérer pour nous permettre d’examiner très certainement ce projet de loi avant la fin de cette année.
Mme Odette Terrade. C’est bien dit !
M. Daniel Raoul. Mais qu’adviendra-t-il si jamais la navette parlementaire n’est pas terminée ?
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Nous reconnaissons que la compétitivité de nos entreprises industrielles dépend de la stabilité des prix de l’énergie et d’une énergie à un faible coût.
Nous partageons le souci de M. Pintat et de M. le rapporteur, mais, vous le savez, nous sommes opposés à la fixation d’une date butoir, pour des raisons que nous avons déjà exposées.
L’amendement de M. Pintat constitue, une fois encore, une mesure transitoire. Décidément, nous n’en sortons pas…
Dans ces conditions, le groupe socialiste s’abstiendra.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'article unique de la proposition de loi, je donne la parole à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, ce texte a connu un parcours quelque peu délicat.
Je rappelle à nos collègues qui ne sont pas membres de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, que M. Poniatowski avait déposé une proposition de loi, sur laquelle nous avons déposé des amendements.
En vertu de la réforme constitutionnelle, nous voilà conduits à examiner, en séance publique, un texte qui a été profondément remanié, enrichi, dirai-je même, par nos amendements, mais qui devient le texte de la commission.
En termes de clarté, cela pose un sérieux problème, qu’il nous faut considérer. Même si vous en êtes le rapporteur, mon cher collègue, vous avez perdu la paternité de ce texte. Et qu’en aurait-il été si l’auteur de la proposition de loi initiale n’avait pas été le rapporteur du texte proposé ? Je pose là une question de forme.
Monsieur le président, je m’adresse à vous en tant que membre du groupe de travail sur l’organisation de nos travaux. Il faudrait réfléchir au processus d’examen des propositions de loi de façon à éviter que les auteurs n’en perdent la paternité.
M. Daniel Raoul. Voilà pour la forme ; j’en viens au fond.
Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, je crains fort que vous ne soyez affectés d’un TOC, un trouble obsessionnel de la concurrence. (Sourires.)
Comme l’a rappelé tout à l'heure Roland Courteau, tous les pays qui ont ouvert le marché à la concurrence ont connu une augmentation du prix de l’énergie. En effet, il faut bien que le prix de l’énergie soit considérablement augmenté pour que les opérateurs alternatifs et les actionnaires y trouvent leur compte et fassent des bénéfices, mais cela au détriment des consommateurs.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Daniel Raoul. C’est un véritable problème, car, comme je l’ai déjà indiqué à Mme Lagarde, l’électricité n’est pas un produit comme les autres. Il ne s’agit pas d’un produit stockable pouvant être traité comme n’importe quel autre. Ainsi que l’a souligné tout à l'heure notre collègue Xavier Pintat, il y a, en France, un service public de l’énergie.
Aussi, à la suite de Roland Courteau, je me demande quand nous allons en finir avec tous ces palliatifs. J’espère que, dans le cadre de la loi NOME, nous aurons enfin une discussion de fond sur les tarifs, y compris sur le TaRTAM, le tarif réglementé transitoire d’ajustement du marché, qui n’a été évoqué tout à l'heure que par Xavier Pintat. Il va bien falloir clarifier la situation pour nos industries.
Que va-t-il se passer ? Nous avons un parc électronucléaire que les consommateurs ont financé depuis les années Messmer.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Daniel Raoul. Or il faudrait tout de même que les habitants de notre pays aient un retour sur investissement et ne voient pas cette industrie bradée au profit de n’importe quel groupe privé. Ils doivent pouvoir bénéficier à un moment ou à un autre des investissements réalisés par ceux qui les ont précédés. Et je ne parle pas des problèmes de sécurité qui pourraient se poser…
Certes, nous avons le parc énergétique le plus sécurisé au monde, mais nous ne pouvons pas ignorer les incidents qui se sont produits dans d’autres pays.
Pour l’instant, nous sommes arrivés à un consensus dans l’intérêt des consommateurs, et non, comme certains de mes collègues l’ont affirmé tout à l'heure, dans le but de développer la concurrence.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Daniel Raoul. Dans tous les pays européens où elle a eu lieu, l’ouverture de ce marché à la concurrence s’est faite, je le répète, au détriment des consommateurs.
Nous sommes donc d’accord pour accepter cette date butoir du 31 décembre 2010, mais nous reviendrons sur cette échéance lors de l’examen de la loi NOME, y compris pour ce qui concerne le TaRTAM.
En conséquence, nous voterons ce texte, même s’il n’est qu’un palliatif juridique,…
M. Roland Courteau. Un de plus !
M. Daniel Raoul. … eu égard au calendrier, dans l’intérêt de nos concitoyens.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
M. Jean-Claude Danglot. La proposition de loi de M. Ladislas Poniatowski est le constat clair de l’incapacité de la libre concurrence à répondre à l’intérêt général. Il est fort regrettable que les membres de la majorité restent frileux et ne tirent pas les conséquences de cet échec en soutenant la maîtrise publique du secteur énergétique !
Contrairement à la droite, les sénateurs du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche ont une position claire et nette sur la question énergétique : l’énergie n’est pas une marchandise ; elle constitue un bien vital. À ce titre, elle ne peut être laissée à la spéculation de quelques grands groupes.
Il est essentiel d’assurer la péréquation tarifaire, d’aider les ménages les plus démunis à faire face à leurs dépenses énergétiques. Il est primordial de garantir l’indépendance énergétique de la France en renforçant les investissements dans la production et le transport de l’énergie sur l’ensemble du territoire, et de consolider les connexions des réseaux européens.
La politique énergétique menée aux niveaux européen et national ne répond pas à ces objectifs. Les Français ressentent aujourd’hui fortement les effets de la privatisation du secteur énergétique. Ils ont exprimé leur défiance au Gouvernement par les scrutins des dernières semaines. Face à cela, le Gouvernement annonce un projet de nouvelle organisation du marché électrique qui répond aux attentes des opérateurs privés !
Voilà quelques jours, on pouvait lire dans la presse que, « sans l’intervention de cette réforme, Poweo devrait rendre ses clients à EDF » ! Telles sont les préoccupations de la droite : assurer les intérêts privés et ignorer l’intérêt général.
Alors que Mme Lagarde présente une réforme du crédit à la consommation censée protéger les consommateurs, dans le même temps elle choisit de laisser entre les mains du privé le soin de déterminer le montant de la facture des Français.
En effet, la Commission de régulation de l’énergie a désormais un avis contraignant et non plus consultatif. Nous pensons, au contraire, que les tarifs réglementés du gaz pour les particuliers devraient baisser au 1er avril 2010 en raison de la forte baisse des prix du pétrole en 2009, conjuguée à celle du gaz sur les marchés. Faut-il rappeler que le baril de pétrole brut se situait autour de 60 dollars en 2009 contre 97 dollars en 2008 ?
Ces hausses de la facture énergétique justifient largement de revenir à une maîtrise de l’État sur la fixation de tarifs et d’assurer une plus grande transparence de la formule tarifaire. Nous proposerons des mesures allant dans ce sens lors de l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle organisation du marché de l’électricité.
Dans ce contexte, que penser de votre proposition, mon cher collègue, sinon qu’elle risque de ne pas peser bien lourd face au rouleur compresseur de la concurrence libre et quelque peu faussée en faveur des opérateurs privés ?
Pour toutes ces raisons, vous le comprendrez, nous nous abstiendrons sur cette proposition de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Monsieur le président, je souhaite simplement remercier M. le rapporteur ainsi que l’ensemble des sénatrices et des sénateurs qui ont travaillé sur cette proposition de loi.
Nous nous reverrons pour l’examen d’un texte fondamental, le projet de loi relatif à la nouvelle organisation du marché de l’électricité, lequel nous permettra de pérenniser, dans le cadre du système que nous connaissons, les éléments auxquels le Sénat est extrêmement attaché, à savoir la liberté, la compétitivité, la performance, la capacité d’investir et le libre choix.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir adopté cette proposition de loi, et ce sans aucun vote contre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
6
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je rappelle que l’auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente. Je veux croire que chacun s’appliquera à respecter scrupuleusement ce temps de parole.
calendrier des réformes
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour le groupe Union pour un mouvement populaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Louis Carrère. De moins en moins populaire !
M. Didier Boulaud. Il va nous parler de la HALDE ! (Sourires.)
M. Gérard Longuet. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
M. Jean-Louis Carrère. Est-ce qu’il est autorisé à vous répondre ?
M. Gérard Longuet. Même si…
M. Jean-Pierre Sueur. Même si…
M. Gérard Longuet. … les élections régionales sont, comme leur nom l’indique, des élections régionales (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.), même si…
M. Jean-Pierre Sueur. Même si…
M. Gérard Longuet. … tous les gouvernements depuis 1986 – et j’en parle d’expérience ! – ont perdu les élections régionales, même si…
M. Jean-Pierre Sueur. Même si…
M. Gérard Longuet. … les élections régionales de 2004, qui avaient déjà fait souffrir la majorité,…
M. Simon Sutour. Mais pas au point atteint cette fois-ci !
M. Jean-Louis Carrère. Et vous êtes bien placé pour le savoir !
M. Gérard Longuet. … ont préparé l’éclatante victoire de 2007, même si la crise économique et financière, doublée de la plus spectaculaire crise agricole, peut expliquer que la moitié de nos compatriotes ne se soient pas déplacés pour aller voter aux élections régionales et que ceux qui ont voté pour la majorité d’entre eux ont exprimé un vote d’inquiétude, d’une façon d’ailleurs parfaitement contradictoire, …
M. Didier Boulaud. Tout cela est bien emberlificoté !
M. Daniel Raoul. Il rame ! (Nouveaux rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Gérard Longuet. … force est de reconnaître, monsieur le Premier ministre,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que vous avez perdu !
M. Gérard Longuet. … que notre majorité a été défaite, alors que nous avons pris en charge avec cœur, sous l’autorité du Président de la République, avec votre engagement personnel reconnu, toutes les actions et tous les efforts…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Non, pas tous !
M. Gérard Longuet. … pour soutenir notre pays dans cet environnement de crise.
M. Yannick Bodin. La crise de l’UMP !
M. Gérard Longuet. Ma question est simple.
Je voudrais tout d’abord exprimer, au nom du groupe UMP, notre confiance dans la détermination à mener les réformes qui est celle du Président de la République, Nicolas Sarkozy.
M. Jean-Louis Carrère. Ce n’est pas une question !
M. Gérard Longuet. Je voudrais par ailleurs exprimer, là encore au nom du groupe UMP tout entier, la profonde confiance que nous inspire, monsieur le Premier ministre, votre comportement, le sens du dialogue de l’écoute dont vous témoignez depuis trois ans à la tête du Gouvernement et qui atteste votre respect du Parlement (La question ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG) et votre volonté de faire aboutir les réformes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Eh bien, mes chers collègues, ma question, la voici, et elle est double. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. Monsieur le président, le temps de parole est dépassé ! Vous vous étiez montré beaucoup moins libéral avec moi ! C’est incroyable !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Scandaleux !
M. Gérard Longuet. Après la crise économique et financière de 2008, quelles sont, parmi les réformes antérieures à cette crise, celles qui méritent selon vous d’être réexaminées, approfondies, ou abandonnées ? (Hourvari sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Longuet.
M. Gérard Longuet. Quelles sont, après cette crise et au lendemain de ce vote, les réformes prioritaires dont vous jugez la mise en œuvre nécessaire pour donner toutes ses chances à notre pays ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. David Assouline. C’est incroyable ! Ils ont tous les droits !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur Longuet, avant de répondre à votre question, je voudrais faire une mise au point solennelle devant le Sénat. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, tout ce que vous avez pu lire depuis dimanche soir sur mes relations avec le Président de la République est faux et relève de la manipulation. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
Toutes ces rumeurs n’ont d’ailleurs qu’un seul objectif : déstabiliser l’exécutif. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Un sénateur socialiste. Il n’a pas besoin de ça !
M. Didier Boulaud. C’est un château branlant ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.)
M. François Fillon, Premier ministre. Croyez-le bien, je ne laisserai pas cette manipulation produire ses effets ! (Très bien et applaudissements sur les travées de l’UMP.) Il n’y a pas de divergence, et encore moins de rivalité, entre le Président de la République et moi-même. Il ne peut pas y en avoir parce que ce qui est en cause, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est la cohérence du Gouvernement de la France, et donc l’intérêt national. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Didier Boulaud. Quel déballage !
M. Yannick Bodin. C’est un discours à usage interne !
M. François Fillon, Premier ministre. Depuis trois ans, j’ai été loyal envers le Président de la République, je le suis et je le resterai. (Applaudissements sur les mêmes travées. – Railleries sur les travées du groupe socialiste.)
Cette cohérence de l’exécutif est d’autant plus nécessaire que gouverner la France n’est pas facile.
M. Jean-Louis Carrère. Voilà une découverte !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous ne sommes pas les premiers à en avoir fait l’expérience.
Dimanche dernier, lors des élections régionales, nous avons subi une défaite. Celle-ci doit nous amener à faire, avec beaucoup d’humilité, l’analyse de la situation et à prendre les décisions nécessaires.
C’est ce à quoi nous allons nous employer avec la majorité, mais je souhaite dès maintenant souligner, comme l’a fait le Président de la République hier, que nous ne transigerons pas sur la nécessité de moderniser notre pays. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Nous sommes 65 millions de Français dans un monde de 6 milliards d’êtres humains, et notre devoir est de protéger le modèle de vie qui est le nôtre, de maintenir la prospérité de nos concitoyens. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le modèle de vie de qui ? Des chômeurs ?
M. Didier Boulaud. Qu’avez-vous fait pendant huit ans ?
M. Claude Domeizel. Cela fait huit ans que vous êtes au pouvoir !
M. François Fillon, Premier ministre. Et nous ne pouvons pas le faire sans réformer notre pays.
Monsieur Longuet, voici les trois priorités du Gouvernement pour les prochains mois.
La première, c’est évidemment l’emploi et la croissance. Nous allons poursuivre notre effort et ajuster les dispositifs de lutte contre le chômage, dont l’évolution devrait d’ailleurs s’inverser dans la deuxième partie de l’année 2010 compte tenu de la reprise de l’activité économique. (On se gausse sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On nous dit tous les jours que ça doit s’inverser !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous allons mettre en œuvre, après que vous en aurez débattu et que vous l’aurez votée, la loi de modernisation agricole, qui constitue une réponse à l’une des crises les plus graves que l’agriculture française et européenne ait rencontrée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
MM. Gérard Longuet et Alain Gournac. Très bien !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous allons mettre en œuvre le plus rapidement possible les investissements d’avenir, et je serai intransigeant sur l’affectation des 35 milliards d’euros que vous avez votés aux priorités et aux objectifs qui ont été décidés par le Gouvernement et par la majorité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous voilà rassurés !
M. Jean-Louis Carrère. Et le bouclier fiscal ?
M. François Fillon, Premier ministre. Nous continuerons d’améliorer les dispositifs permettant de renforcer la compétitivité de notre économie.
S’agissant de l’ensemble des mesures que nous devons prendre en matière de développement durable, nous les mettrons en œuvre en cherchant une meilleure coordination avec les autres pays européens parce que nous ne devons pas accroître le différentiel de croissance, notamment avec notre voisin allemand. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ça suffit !
M. François Fillon, Premier ministre. La deuxième priorité du Gouvernement sera la réduction des déficits, nécessaire dans un contexte financier européen dont chacun voit bien qu’il est préoccupant.
M. Jean-Pierre Bel. Ce n’est pas une déclaration de politique générale !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On n’est pas dans une émission de télévision !
M. François Fillon, Premier ministre. Cela signifie que les dépenses de l’État seront strictement maintenues,…
M. Jean-Louis Carrère. Et alors, monsieur le président ? Les deux minutes trente sont passées !
M. François Fillon, Premier ministre. … que nous continuerons à mettre en œuvre la révision générale des politiques publiques (Protestations et marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)…
Monsieur le président, j’interromps ma réponse une seconde parce que ce n’est pas la première fois que ce problème se pose au Sénat. Le Premier ministre, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, qu’il soit de gauche ou qu’il soit de droite, s’exprime autant qu’il le veut. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. Tout est permis, il n’y a plus de règles !
M. François Fillon, Premier ministre. C’est inscrit dans la Constitution de la République française ! Alors, si vous voulez que je vienne vous répondre, je le ferai, mais comme je l’entends.
M. le président. Je vous demande néanmoins de bien vouloir achever votre réponse, monsieur le Premier ministre, car le temps nous est compté.
M. François Fillon, Premier ministre. La troisième priorité du Gouvernement concernera le renforcement des deux grands piliers de notre pacte républicain que sont la sécurité et la laïcité.
Sur la sécurité, il est incontestable que nous devons inventer de nouvelles réponses parce que la violence s’adapte en permanence aux initiatives que nous prenons.
M. David Assouline. Si vous voulez, on peut partir !
M. François Fillon, Premier ministre. Sur la laïcité, nous allons trancher une question qui, même si elle ne concerne pas un grand nombre de nos concitoyens, est devenue un symbole important : il s’agit de la question du voile intégral. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Hourvari sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. C’est du jamais vu ! (Plusieurs sénateurs socialistes se lèvent et se préparent à quitter l’hémicycle.)
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur Longuet, avec le Président de la République, nous avons un engagement vis-à-vis des Français. Cet engagement, nous le tiendrons parce que l’honneur d’un homme politique réside dans le courage et le respect de la vérité. (Les sénateurs de l’UMP se lèvent et applaudissent vivement. – Applaudissements sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
agriculture et ruralité
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour le groupe du RDSE.
Je demanderai aux ministres de répondre de manière ramassée pour que puissent être posées les dix questions qui ont été inscrites.
M. Didier Boulaud. Il faut supprimer les autres questions de l’UMP pour rattraper le temps perdu !
M. Jean-Louis Carrère. Encore plus simple : qu’on supprime toutes les questions de l’UMP !
M. Aymeri de Montesquiou. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le ministre, vous avez conscience des grandes difficultés des agriculteurs, mais avez-vous pris en compte les disparités agricoles ?
La crise frappe plus fort les plus faibles. Lorsqu’une exploitation voit sa production moyenne de 100 quintaux de blé baisser de 30 %, elle souffre. Lorsqu’elle voit sa production moyenne de 50 quintaux de blé baisser de 30 %, elle meurt, monsieur le ministre !
Des gouvernements de toutes tendances ont créé des zones franches pour pallier les faiblesses industrielles des zones déshéritées. Le Gouvernement a sauvé les banques parce que leur chute aurait été désastreuse pour toute l’économie. Il a pris des mesures contre les gains très choquants des traders. Il se doit tout autant de prendre des mesures urgentes pour la survie des zones agricoles les plus fragiles et contre la misère qui frappe certaines exploitations.
Les agriculteurs ont l’impression que tout s’acharne contre eux : la nature, les marchés qui s’effondrent et une réglementation européenne qui, souvent, confine à l’absurde. Les administrations française et européenne doivent avoir à l’esprit que les agriculteurs sont les premiers à se préoccuper de la nature, car ils y vivent, et que le coût des intrants est tel qu’ils ne peuvent les gaspiller.
Ces dernières années, l’Europe a laissé se déliter les barrières réglementaires qui maintenaient une solidarité en faveur du monde agricole. Il faut inverser la tendance.
L’effondrement des revenus agricoles aura des conséquences dramatiques sur les régions fragiles et le monde rural. Le Gouvernement en a pris toute la mesure en créant un ministère de l’espace rural et de l’aménagement du territoire et en lançant des Assises des territoires ruraux. Vous savez qu’il ne peut y avoir de ruralité sans une agriculture forte. Ce sont les agriculteurs qui structurent l’environnement et animent la vie locale.
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le ministre, il y a urgence. Quelles mesures immédiates comptez-vous prendre, quelles dispositions allez-vous mettre en œuvre dans la loi de modernisation de l’agriculture sur le long terme ? Le dégrèvement foncier ne serait-il pas une façon de préserver les bas revenus et de sauver la ruralité là où sa survie est en jeu ? (M. Yvon Collin applaudit, de même que plusieurs sénateurs sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, le Président de la République, le Premier ministre et les membres du Gouvernement ont tous une conscience aiguë de la gravité de la crise que traverse le monde agricole,...
M. Simon Sutour. Mais vous ne faites rien !
M. Bruno Le Maire, ministre. ... et nous nous battons depuis des mois pour y donner des réponses concrètes.
Une réponse immédiate consiste à apporter de la trésorerie dans les campagnes françaises, à travers le plan d’urgence annoncé par le Président de la République à Poligny : 80 000 dossiers de demandes de prêt ont été déposés et instruits ;...
M. Jean-Louis Carrère. Et rien pour les sylviculteurs !