M. le président. L'amendement n° 267, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Remplacer les mots :
sur l'ensemble de son périmètre
par les mots :
dans les anciens périmètres où celles-ci s'exerçaient
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. La manière dont la fusion des EPCI est envisagée dans ce texte laisse tout de même penser qu’il s'agira davantage d’un accord entre ces établissements que de la création d’un nouvel EPCI composé de communes en nombre plus important, alors que celles-ci doivent pouvoir définir le mode de fonctionnement de l’intercommunalité.
Nous considérons que les communes qui composent le nouvel EPCI doivent rester prépondérantes. En adhérant à l’intercommunalité à laquelle elles appartenaient auparavant, elles n’ont pas renoncé à leur pouvoir de décision. Elles ne le feront pas davantage en entrant dans le nouvel EPCI.
Imposer des compétences issues de chacun des anciens EPCI dans l’intégralité du périmètre du nouvel établissement, c’est obliger une partie des communes à exercer des compétences dont elles ne se chargeaient pas jusqu’alors ; c’est aller au-delà de ce qui existait à la date de la création du nouvel EPCI.
Il n’est pas possible de considérer qu’il y a là un accord tacite des communes membres. Libre à ces dernières de prendre de nouvelles décisions en matière de compétences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les dispositions de cet amendement aboutiraient à une gestion différenciée du territoire pour l’exercice des compétences optionnelles et supplémentaires, ce qui est contraire à un développement cohérent et harmonieux dans l’ensemble du périmètre concerné.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 268, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 19, deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L’alinéa 19 de l’article 20 du projet de loi prévoit que l’exercice des compétences du nouvel EPCI résultant de la fusion exige la reconnaissance de l’intérêt communautaire de l’établissement ; cette dernière notion a d'ailleurs toujours posé problème, dès la création des EPCI.
L’intérêt communautaire doit permettre de définir clairement les axes d’intervention de la communauté : il précise la ligne de partage, au sein d’une compétence, entre les domaines d’action qui sont transférés à la communauté et ceux qui restent confiés aux communes.
Sa définition emporte donc des conséquences directes sur la répartition, le champ et l’étendue des compétences. Elle est un élément essentiel de l’accord qui fonde la constitution d’une intercommunalité, et qui doit donc être défini avec précision.
La loi du 12 juillet 1999 n’avait pas prévu de délai pour la définition de l’intérêt communautaire. Celle-ci a été précisée dans la loi du 13 août 2004 relative aux responsabilités locales.
Nous avions alors souligné que, tel qu’il était défini dans l’article 112 de cette loi, l’intérêt communautaire risquait d’entraîner un transfert de compétences massif et artificiel des communes vers les intercommunalités. Nous avions exprimé nos craintes que l’intérêt communautaire lui-même, ainsi que son corollaire, la construction d’un projet commun, ne soient à terme niés.
Nous éprouvons les mêmes sentiments à la lecture de l’alinéa 19 de l’article 20, puisque celui-ci conduit à définir l’intérêt communautaire au profit de la structure intercommunale, sans qu’il ait été clairement précisé et décidé.
Or il ne s’agit pas ici de compétences qui, de par la loi, doivent être obligatoirement transférées à l’intercommunalité. Par conséquent, il paraît beaucoup plus légitime de considérer que, faute de définition précise, les compétences pouvant ressortir à l’intérêt communautaire ne sauraient être transférées par défaut au nouvel EPCI.
Nous considérons que, pour porter dignement son nom, l’intérêt communautaire doit être expressément reconnu par le conseil communautaire, et non pas défini par abstention.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Nous avons déjà rencontré plusieurs fois ce problème : si cet amendement était adopté, le transfert des compétences de l’EPCI serait bloqué.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 662, présenté par MM. Bernard-Reymond, Doublet, Laurent, Gouteyron, Alduy, Milon, Dufaut et Laménie, Mme Sittler et MM. Leclerc et Vasselle, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La fonction de président d'une communauté de communes ou d'agglomération est incompatible avec celle de maire d'une commune de plus de 30 000 habitants. »
La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.
M. Pierre Bernard-Reymond. Cet amendement vise à limiter le cumul excessif de mandats. J’ai déjà eu l’occasion d’aborder ce sujet lors de l’examen des précédents articles. Autant le Gouvernement que la commission des lois m’ont fait valoir que cette question serait abordée à l’occasion de la discussion d’un prochain projet de loi.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Toujours plus tard !
M. Pierre Bernard-Reymond. C’est pourquoi, par cohérence, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 662 est retiré.
Je mets aux voix l'article 20, modifié.
(L'article 20 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 20
M. le président. L'amendement n° 499 rectifié bis, présenté par Mme Procaccia et MM. Cambon, Demuynck, Dallier, Vasselle et Pointereau, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 5214-26 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : «, par le représentant de l'État dans le département après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale réunie dans la formation prévue au second alinéa de l'article L. 5211-45, » sont supprimés ;
2° La seconde phrase est supprimée.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Depuis hier, il est beaucoup question de volontariat. Ainsi, M. Alain Fouché a évoqué le cas des communes contraintes d’intégrer des intercommunalités, ce qui est contraire au principe de libre adhésion des collectivités territoriales et au volontariat.
Cet amendement tend à accorder à ces communes la possibilité de sortir de l’intercommunalité, non pour être libres, mais pour en intégrer une autre, sans y être contraintes cette fois, c'est-à-dire sans l’avis du préfet et de la commission départementale de coopération intercommunale.
Je ne doute pas du sort qui sera réservé à cet amendement. Je souhaite toutefois attirer l’attention de mes collègues sur le fait qu’une deuxième lecture aura lieu. Il serait souhaitable qu’une solution soit trouvée à cette occasion pour ces communes.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je comprends la philosophie qui sous-tend cet amendement. Toutefois, s’il est adopté, le risque est grand que, tous les six ans, en cas de changement de majorité municipale, on se trouve face à une intercommunalité shopping !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Exactement !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est le problème !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. En fonction de la nouvelle étiquette politique du président de l’établissement public de coopération intercommunale, les communes pourraient décider de changer de structure sans l’avis du préfet. Au-delà de leurs implications politiques, de tels mouvements auraient des conséquences financières importantes pour l’un ou l’autre des EPCI.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est le copinage électoral !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il doit être possible de traiter le problème autrement. C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, pour explication de vote.
M. Ambroise Dupont. Je me suis toujours opposé au fait qu’une commune intègre une intercommunalité contre son gré.
Lorsque, dans mon département du Calvados, une commune a souhaité changer d’intercommunalité, nous avons eu à nous pencher à nouveau sur le problème. La commission départementale de coopération intercommunale a alors tenu compte du fait que la commune avait manifesté son refus dans le passé au moment où elle avait intégré l’établissement public de coopération intercommunale.
À mes yeux, il ne faut pas accorder systématiquement aux communes la possibilité de passer d’une intercommunalité à une autre, car cela modifierait tous les équilibres existants et obligerait à refaire les comptes en toutes circonstances. En outre, il n’est pas sûr que le nouveau choix de la commune soit le meilleur.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela changerait à chaque élection !
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Je rappelle que ce projet de loi a deux finalités : mener l’intercommunalité à son terme et rationaliser les périmètres. Il faut admettre que, si certains périmètres sont pertinents, d’autres le sont moins. Ne permettons pas à des communes d’aller à droite ou à gauche.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà ! À droite ou à gauche ! (Sourires.)
M. Dominique Braye. C’est à la commission départementale de coopération intercommunale de se prononcer sur la pertinence du périmètre. Nous savons que certaines communes prennent des décisions en fonction des circonstances.
Il arrive qu’une commune soit contrainte d’intégrer une intercommunalité et que ce choix ne se révèle pas pertinent. Mais ce n’est pas toujours le cas ! On a vu trop souvent des communes intégrer une intercommunalité en fonction de critères qui prêtaient à discussion. De grâce, ne favorisons pas ce genre de comportement !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Chevènement. Sans vouloir déplaire à Mme Procaccia, je pense qu’il faut assurer une certaine stabilité aux règles de l’intercommunalité. Je me réjouis d’ailleurs que, par le biais de l'amendement n° 77 rectifié ter, nous soyons revenus aux règles existantes.
Ne chamboulons pas tout. Surtout, ne permettons pas que des initiatives puissent être prises en dehors de l’avis de la commission départementale de coopération intercommunale. Il faut que cette procédure obéisse à des règles.
Certes, il peut y avoir des ajustements, mais, aujourd'hui, l’intercommunalité couvre plus de 90 % du territoire. Autoriser une scissiparité généralisée, un phénomène d’électron libre, des mouvements intervenant indépendamment de l’avis du préfet et de la commission départementale de coopération intercommunale, loin de permettre la rationalisation de l’intercommunalité, provoquerait l’effet contraire. Or ce n’est pas ce que, dans notre immense majorité, nous voulons.
Mme Nathalie Goulet. C’est exact !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J’ai cosigné cet amendement, dont l’objet me semblait confirmer le principe de libre administration des collectivités locales en accordant aux communes un droit d’appréciation.
Cependant, dans le cadre des dispositions que nous avons adoptées et qui ont fait l’objet de larges débats, nous avons manifesté le souhait de voir la commission départementale de coopération intercommunale jouer un rôle majeur. Il est vrai qu’une telle procédure alourdira le processus et qu’il serait préférable de privilégier les accords entre collectivités par rapport à des décisions qui seraient prises d’en haut.
Néanmoins, sans doute serait-il plus sage de retirer cet amendement. Nous pourrions alors profiter de la navette parlementaire pour tenter de concilier de façon pertinente, d’une part, la décision d’une commune de se retirer volontairement d’une intercommunalité en accord avec l’ensemble des autres communes et, d’autre part, la disposition permettant à la commission départementale de coopération intercommunale et au préfet de se prononcer pour que soit assurée la cohérence du schéma de coopération intercommunale au sein d’un département.
M. Dominique Braye. La navette va permettre de concilier l’inconciliable ! (Sourires.)
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° 499 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Non, monsieur le président, je le retire.
Pour avoir suivi les débats, je me doutais du sort qui serait réservé à cet amendement.
Sur l’ensemble du territoire, 90 % ou 93 % des communes sont membres d’une intercommunalité. Cependant, le taux est plus faible en région parisienne. Certaines communes ont pu intégrer d’office des intercommunalités isolées. Dans la mesure où de nouvelles intercommunalités vont se créer, il serait souhaitable de laisser les communes choisir d’en faire partie si elles en manifestent le désir précisément parce qu’elles se trouvaient dans un îlot.
J’espère que la navette parlementaire permettra d’avancer sur ce sujet.
M. le président. L'amendement n° 499 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 450 est présenté par MM. Sueur, Bel, Peyronnet et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy et Povinelli, Mme Alquier, MM. Andreoni, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet et Chastan, Mme Cartron, MM. Courteau, Daunis et Daudigny, Mme Durrieu, MM. Fichet et Jeannerot, Mme Ghali, MM. Guérini et Guillaume, Mmes Khiari et Klès, MM. Lagauche, Marc, Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Percheron, Rebsamen, Ries, Sergent, Signé, Teulade et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n° 474 rectifié est présenté par MM. Braye, Cornu, Laménie, Jarlier, P. André, Milon, Portelli et Vasselle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 5216-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « communes centre » sont remplacés par les mots : « unités urbaines ».
La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour présenter l'amendement n° 450.
Mme Bernadette Bourzai. La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale a redéfini à juste titre les critères statistiques et démographiques pris en compte pour définir les catégories juridiques des EPCI à fiscalité propre. Ce faisant, et en s’appuyant avant tout sur les découpages proposés par l’INSEE, ce dispositif législatif a permis un ordonnancement du territoire en trois strates : communautés de communes, communautés d’agglomération et communautés urbaines. La loi reconnaît ainsi une triple structuration de l’espace en communautés rurales, communautés rurales-périurbaines ou périurbaines-urbaines, et grandes aires urbaines.
Cette volonté de structuration permet de comprendre les conditions nécessaires à la mise en place d’une communauté d’agglomération.
Trois critères cumulatifs doivent être respectés. Premièrement, la communauté d’agglomération partage avec les deux autres types de communautés la nécessité d’avoir un périmètre d’un seul tenant et sans enclave. Deuxièmement, elle doit comprendre 50 000 habitants au minimum. Troisièmement, elle doit compter au moins une commune de plus de 15 000 habitants.
Ce dernier critère pose un certain nombre de problèmes. Si la fixation d’un seuil de 15 000 habitants se comprend pour définir le cœur urbain autour duquel doit s’organiser une agglomération, la référence à la notion de commune-centre constitue un réel problème.
En effet, cette définition restrictive ne rend pas compte des caractéristiques de certains espaces pour lesquels la population urbaine est polarisée sur plusieurs entités communales. De même, elle ne tient pas compte de la profonde diversité des découpages administratifs municipaux liés à l’histoire, découpages qui entraînent une très forte fragmentation dans certains territoires.
Ce faisant, la notion d’unité urbaine n’apparaît pas, alors qu’il s’agit de l’outil que l’INSEE utilise pour rendre compte du phénomène d’agglomération et définir le caractère urbain d’un territoire.
Une vingtaine de communautés de communes souhaitent atteindre un niveau d’intégration intercommunale plus important et devenir des communautés d’agglomération. Elles ne le peuvent pas, faute d’avoir une ville-centre.
Étant favorables à la progression de l’intégration intercommunale sur le territoire, nous souhaitons leur donner la faculté de se transformer.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour présenter l'amendement n° 474 rectifié.
M. Dominique Braye. Il s’agit d’un amendement très important qui concerne surtout les secteurs urbains.
Dans ces territoires, pour créer des communautés d’agglomération, il faut un pôle urbain central, une population d’au moins 50 000 habitants et une continuité territoriale.
Dans la plupart des cas, le pôle urbain central est constitué d’une seule commune. Mais il arrive qu’il soit formé de deux, voire trois communes ; on passe d’ailleurs de l’une à l’autre sans s’en rendre compte.
Certes, monsieur le secrétaire d'État, un certain nombre de communautés d’agglomération connaissent des difficultés. Toutefois, l’adoption de cet amendement n’entraînera aucune augmentation de charges ni dépense supplémentaire, car pratiquement toutes les communautés d’agglomération bénéficient déjà d’une dotation dont le montant correspond à celui qu’elles percevraient en termes de dotation globale de fonctionnement.
Il n’en reste pas moins que la définition de l’INSEE constitue un frein pour les communautés de communes. Cela les empêche de passer en communauté d’agglomération et d’engager la dynamique de développement qu’elles souhaitent pour leur territoire.
Prendre en compte la réalité du terrain serait faire preuve de bon sens. À partir du moment où le pôle urbain existe, au sens retenu par l’INSEE, peu importe qu’il soit constitué d’une, deux ou trois communes.
Une quinzaine de communautés de communes sont confrontées à ce problème. Elles comptent le plus souvent beaucoup plus que 50 000 habitants, mais, parce que leur pôle urbain est divisé en deux ou trois communes, elles ne peuvent devenir des communautés d’agglomération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ces amendements identiques sont très intéressants.
Il se peut que la commune-centre ne compte pas tout à fait 15 000 habitants et qu’il soit alors impossible de constituer une communauté d’agglomération. Or il arrive que la commune-centre et la commune voisine soient vraiment intégrées. C’est un sujet qui mérite réflexion.
Je rappelle que les critères de population sont en vigueur depuis 1999 et qu’un certain nombre de communautés d’agglomération se sont créées. Quel est l’intérêt de créer une communauté d’agglomération dans la mesure où rien n’empêche une communauté de communes d’acquérir les mêmes compétences ?
Ce qui est propre à la communauté d’agglomération, c’est son caractère obligatoire.
Une gradation des intercommunalités est prévue : communauté de communes, communauté d’agglomération, communauté urbaine. Ces intercommunalités se distinguent non seulement par leur taille, mais surtout par le degré d’intégration. L’intention du législateur, et je parle sous le contrôle de M. Chevènement, était de prévoir une intégration plus forte au fur et à mesure des seuils.
La communauté d’agglomération a un effet positif, notamment en termes de ressources.
M. Jean-Pierre Chevènement. Elles sont de moins en moins importantes !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Plus il y aura de communautés d’agglomération, moins les autres échelons de l’intercommunalité auront de ressources !
MM. Jean-Pierre Chevènement et Jacques Mézard. C’est vrai !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous avons déjà eu ce débat à plusieurs reprises. On m’a dit parfois que les incidences étaient tellement marginales que cela ne valait pas la peine d’en parler.
Aujourd'hui, la situation a évolué, et je ne voterai pas un dispositif qui peut avoir des effets sur l’ensemble de l’intercommunalité. C’est pour ces raisons que la commission a donné un avis défavorable à ces amendements.
Si nous avons pu mesurer, avec le Gouvernement, les incidences d’un grand nombre de dispositions de ce projet de loi, en l’occurrence, nous n’avons pas les éléments pour nous déterminer.
Je préfère donc que ces amendements soient retirés aujourd’hui, afin de nous permettre d’étudier leurs éventuels effets pervers, et que nous y revenions en deuxième lecture. L’Assemblée nationale, elle-même, prendra connaissance de nos travaux, je l’espère. Nous pourrons ainsi poursuivre le dialogue sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage les considérations que vient d’exprimer M. le président de la commission.
Sur le fond, nous pouvons envisager d’aller dans la direction qu’il propose, ce qui implique effectivement de procéder à une étude d’impact. Celle-ci doit être menée dans des délais courts par la Direction générale des collectivités locales, la DGCL, notamment en raison des effets qu’elle risque d’avoir sur la répartition de la dotation globale de fonctionnement d’intercommunalité.
Puis, dans le cadre de la navette parlementaire, nous réexaminerons, avec un a priori favorable, cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Chevènement. Je me tourne vers les auteurs de l’amendement, vers M. Braye en particulier : la loi doit être claire et lisible.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui !
M. Jean-Pierre Chevènement. La notion d’unité urbaine ne dépend que des dispositions prises par l’INSEE, qui sont éminemment variables. Or on ne peut pas mettre la loi à la remorque des catégories changeantes de l’INSEE.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Exact !
M. Jean-Pierre Chevènement. Si une unité urbaine rassemble deux villes dont la population approche 15 000 habitants, l’une des deux villes finira bien par atteindre ce chiffre. Une communauté de communes peut devenir une communauté d’agglomération, c’est prévu par la loi. Où est le mal ?
Je suis partisan de la stabilité de la règle, comme dans d’autres domaines. Si l’on multiplie les contraintes, le système deviendra de plus en plus difficile. D’ailleurs, il est déjà rendu plus difficile par les conditions de désignation des conseillers communautaires en application de règles démographiques assez strictes. Plus vous compliquez le système, plus vous le rendez…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Autobloquant !
M. Jean-Pierre Chevènement. … difficilement applicable et source de conflits.
Voilà une réflexion que je ne peux m’empêcher de confier à la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J’ai écouté avec intérêt la remarque de M. Chevènement. Mais faut-il s’enfermer dans des règles strictes et statistiques ou bien tenir compte de la réalité du terrain, du vécu, essayer de faire preuve de pragmatisme et d’adapter l’application de la loi à cette réalité ?
M. Dominique Braye. Voilà !
M. Alain Vasselle. Bien entendu, il ne faut pas faire n’importe quoi. Faut-il faire le choix d’un tissu très étalé représentant une population de 15 000 habitants ou d’un tissu beaucoup plus ramassé avec quelques espaces rassemblant au total 15 000 habitants ? C’est un point qui mérite réflexion. J’ai bien compris que le Gouvernement et la commission n’étaient pas fermés sur ce sujet, mais qu’ils avaient besoin d’une expertise et d’une analyse.
Monsieur le président de la commission, vous m’avez dit hier, au sujet d’un amendement, que nous avions eu largement le temps, depuis le 17 décembre, de prendre connaissance du texte amendé par la commission des lois et d’élaborer nos amendements. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.) Je vous retourne la politesse : nous avons nous-mêmes déposé nos amendements sur le texte du Gouvernement depuis cette même date, ce qui vous donnait le temps de les expertiser, de formuler un avis et éventuellement les intégrer dans le texte. Vous le voyez, il faut user de certains arguments avec prudence !
Je remercie M. le président du Sénat de s’être fixé une année d’application de la nouvelle Constitution pour que nous puissions en tirer des enseignements, au profit tant des commissions, s’agissant de la qualité de leur travail, que des sénateurs qui déposent des amendements extérieurs. Pourquoi ces derniers ne seraient-ils pas examinés en même temps que ceux des membres de la commission ? Cela permettrait à la commission de donner ses avis simultanément et d’éviter un processus en deux temps, des échanges parfois difficiles, générateurs de tensions.
Cela étant dit, je souhaite que nous fassions preuve de pragmatisme sur la question qui nous occupe. Pour ma part, je suis prêt à suivre M. le président de la commission des lois et M. le secrétaire d'État, si des engagements très clairs sont pris, pour que nous approfondissions l’idée de M. Braye, qui m’apparaît tout à fait pertinente et m’a incité à cosigner son amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Je tiens à dire à la Haute Assemblée que ce problème a été posé, il y a fort longtemps, par l’Assemblée des communautés de France, l’AdCF, et par la Direction générale des collectivités locales, la DGCL, …
M. Jean-Claude Peyronnet. Et voilà !