M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur spécial, vous me permettrez de voir une certaine contradiction entre votre amendement précédent, qui était censé me faire plaisir, et celui-ci, qui prend 1 million d’euros sur les crédits du sport pour les redonner à la jeunesse. (Sourires.)
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. On ne peut pas faire autrement : ainsi le veut la LOLF !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. L’évolution du coût du chantier de l’INSEP s’explique notamment par le grave incendie qui a détruit la piscine. En tout cas, le programme « Sport » a besoin de ce million d’euros. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Je veux dire notre accord avec l’objet et le contenu de cet amendement. Je crois que c’est à juste titre que notre collègue Michel Sergent parle d’une dérive des coûts du chantier de l’INSEP. Il faudra bien qu’un jour la représentation nationale dispose de l’ensemble des comptes, des prévisions et des résultats. Il faudra aussi que nous sachions précisément combien coûtera au final cette opération de partenariat public-privé. Il serait également intéressant que nous ayons un bilan de la perte d’emplois publics.
Nous aimerions en outre savoir combien le placement d’un athlète à l’INSEP coûte à sa fédération et à lui-même. En effet, cette partie de l’INSEP a été totalement privatisée, sans que la représentation nationale ait d’ailleurs eu l’occasion d’en débattre. Mais cette privatisation a forcément un coût : d’abord pour les finances publiques, puisque nous avons désormais un loyer important à payer, ensuite pour les athlètes et leurs fédérations qui, semble-t-il, doivent consentir des dépenses suffisamment élevées pour que cela pose des problèmes aux moins fortunées.
Dans l’attente de ces informations, nous voterons cet amendement, d’autant qu’il permet de renforcer les crédits du FONJEP et des projets éducatifs locaux, qui en ont bien besoin.
M. le président. Monsieur Sergent, maintenez-vous cet amendement ?
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Oui, monsieur le président.
Je comprends, madame la secrétaire d'État, que cela vous paraisse un peu bizarre, mais nous sommes obligés par la LOLF de passer d’un programme à un autre. Nous n’avons pas les moyens de faire autrement !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Je veux juste préciser une nouvelle fois que, si les crédits dévolus à l’INSEP augmentent, c’est d’abord à cause de l’incendie de la piscine, qui était grave. Cette augmentation s’explique aussi par le fait que le coût a été sous-estimé par rapport à la période où le premier devis a été réalisé.
Je rappellerai que de nombreux intervenants se sont tout à l’heure exprimés pour dire que le budget dévolu au sport pourrait être encore plus élevé. Or, là, monsieur le rapporteur spécial, vous entendez le priver d’une somme substantielle, qui permet en fait de financer tout un réseau, dont l’INSEP est la tête et dont l’ensemble des CREPS constitue la base. J’ajoute que les petites fédérations, dont vous vous souciiez tout à l’heure, bénéficient de ce dispositif.
L’INSEP ne peut plus être considéré uniquement pour lui-même : il est devenu la tête de pont d’un dispositif beaucoup plus large et qui se veut solidaire. Remettre en cause le financement de l’INSEP reviendrait donc à remettre en cause le financement de l’ensemble d’un dispositif qui touche jusqu’aux CREPS, c’est-à-dire à l’animation sportive territoriale.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » figurant à l’État B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les articles 60, 60 bis et 60 ter, ainsi que les amendements qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Sport, jeunesse et vie associative
Article 60
I. – Au sixième alinéa de l’article 302 bis ZE du code général des impôts, le taux : « 5 % » est remplacé par le taux : « 5,5 % ».
II. – Le II de l’article 59 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, une fraction de 10 % de cette contribution est affectée, dans la limite de 4 millions d’euros, à l’Agence française de lutte contre le dopage. »
III. – À la première phrase de l’article L. 411-2 du code du sport, après les mots : « est affectée », sont insérés les mots : «, pour partie, ».
IV. – Le présent article est applicable à compter du 1er janvier 2010.
M. le président. L'amendement n° II-305, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Au moment de l’élaboration du projet de loi de finances, le Gouvernement a prévu une mesure fiscale consistant à majorer la taxe qui frappe les droits de retransmission des compétitions sportives, couramment appelée taxe « Buffet ». Cette mesure figure à l’article 60 du projet de loi de finances.
Or, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il a été décidé, sur une initiative parlementaire, de supprimer dès le 30 juin prochain le régime du DIC, ou droit à l’image collective, des sportifs professionnels, qui réduit le montant des charges sociales versées par les clubs qui les emploient.
Le cumul de ces deux mesures – hausse de la taxe Buffet et suppression du DIC – résultant d’initiatives séparées du Gouvernement et du Parlement aurait donné l’impression d’un acharnement à l’encontre du sport professionnel, comme cela a été dit tout à l’heure. Cela aurait affecté l’équilibre économique de ce secteur, et jusqu’aux plus petits clubs, au moment où il souffre déjà, lui aussi, de la situation économique générale.
C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de renoncer à la mesure fiscale qu’il avait envisagée et de déposer un amendement de suppression de l’article 60. Les moyens tirés de la majoration de la taxe, évalués à 4 millions d’euros, devaient être affectés à l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD. En 2010, celle-ci sera donc intégralement financée par le budget du ministère de la santé et des sports, comme c’était le cas depuis sa création.
Le détail des mesures permettant de dégager ce financement supplémentaire pour l’AFLD sera arrêté prochainement. Je peux d’ors et déjà vous dire que l’une des solutions envisageables consiste à mobiliser, comme certains sénateurs l’ont proposé, une partie des ressources rendues disponibles par la suppression du DIC, qui s’élèvent à 26 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Madame la secrétaire d'État, vous nous indiquez que les choses ont changé entre l’élaboration du budget et le moment où nous l’examinons et que, le DIC ayant été supprimé, il ne serait pas opportun de trop « charger la barque » des clubs sportifs professionnels.
Mon inquiétude était double : elle concernait, d’une part, l’AFLD, mais vous venez de nous rassurer, d’autre part, le CNDS, mais vous avez dit tout à l’heure qu’un fonds de roulement de 56 millions d’euros était encore disponible.
Compte tenu de ces éléments, nous sommes favorables à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pierre Martin, pour explication de vote.
M. Pierre Martin. Madame la secrétaire d'État, vous n’avez pas voulu, après l’épisode du DIC, ajouter une nouvelle mesure pénalisante pour le sport professionnel, et je me réjouis du dépôt de cet amendement.
Je tiens à rappeler que, dans le sport professionnel, il n’y a pas que le football : il y a bien d’autres sports.
Il est vrai que 4 millions d’euros étaient nécessaires au fonctionnement de l’AFLD. Vu que la mesure ne devait être effective qu’à partir du mois de juillet, il manquait 2 millions d’euros. Vous venez, me semble-t-il, de donner des précisions, et j’aimerais être sûr de votre engagement sur ces 4 millions d’euros manquants, ce qui me permettrait de renoncer à l’amendement que j’ai moi-même déposé à l’article 60. (Mme la secrétaire d'État opine.)
M. le président. En conséquence, l’article 60 est supprimé et les amendements nos°II-169, II-27, II-223 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° II-169, présenté par M. Voguet, Mme Gonthier-Maurin et MM. Ralite et Renar, était ainsi libellé :
I. - Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
I. - Au sixième alinéa de l'article 302 bis ZE du code général des impôts, le pourcentage : « 5 % » est remplacé par le pourcentage : « 10 % ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° II-27, présenté par M. Sergent, au nom de la commission des finances, était ainsi libellé :
Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
I. - Le sixième alinéa de l'article 302 bis ZE du code général des impôts est ainsi rédigé : « Le taux de la contribution est fixé à 5,5 % du montant des encaissements. Pour l'année 2010, ce taux est fixé à 6 % ».
L'amendement n° II-223, présenté par M. Martin, était ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
IV. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er juillet 2010.
V. - Le III de l'article 53 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Un prélèvement complémentaire de 0,1 % est effectué en 2010 sur les sommes misées sur les jeux exploités en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer par la Française des jeux. Ce prélèvement complémentaire est plafonné à 2 millions d'euros. Son produit est affecté à l'Agence française de lutte contre le dopage. » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
VI. - Les pertes de recettes résultant pour l'État des deux paragraphes précédents sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Article 60 bis
Le 11° du I de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 est ainsi rédigé :
« 11° Politique en faveur de la jeunesse ; ». – (Adopté.)
Article 60 ter
Afin d’accroître l’autonomie des jeunes, le fonds d’appui aux expérimentations en faveur des jeunes mentionné à l’article 25 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion peut financer, à titre expérimental, pour une durée de trois ans, un revenu contractualisé d’autonomie et une dotation d’autonomie dans les conditions prévues au présent article.
Ces prestations sont attribuées à des jeunes volontaires âgés de dix-huit à vingt-cinq ans répondant à des conditions de ressources, de difficultés d’insertion et de situation familiale, sélectionnés de manière aléatoire et résidant dans des territoires présentant un intérêt particulier au regard de l’objet des expérimentations et de la situation des jeunes qui y résident, déterminés par décret.
Le revenu contractualisé d’autonomie est versé mensuellement pendant deux ans aux jeunes entrant dans l’expérimentation, sous réserve qu’ils s’engagent soit à rechercher activement un emploi, soit à suivre une formation.
La dotation d’autonomie est attribuée pendant deux ans aux jeunes entrant dans l’expérimentation, pour financer des dépenses favorisant l’accès à l’emploi ou à la formation. Chaque période d’emploi au cours de l’expérimentation donne lieu à une majoration de la dotation. À l’issue du délai de deux ans, les sommes non utilisées peuvent être mobilisées pour des dépenses dont la liste est fixée par décret.
Lorsqu’un enfant ouvrant droit aux allocations familiales participe à l’expérimentation de la dotation d’autonomie, le montant des allocations familiales dues à la famille est, pendant la durée de sa participation à l’expérimentation, réduit de manière forfaitaire. Dans ce cas, l’entrée dans l’expérimentation est subordonnée à l’accord de la famille.
Un décret fixe les modalités d’application du présent article ainsi que les conditions dans lesquelles les expérimentations sont évaluées à leur terme. – (Adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Organisation des débats
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, mes chers collègues, conformément à la décision prise par la conférence des présidents le 25 novembre dernier, nous examinerons demain après-midi, en séance publique, dans le cadre du débat sur les articles non rattachés du projet de loi de finances, les amendements de la commission des finances relatifs à la répartition des ressources des collectivités territoriales à partir de 2011.
Vous vous souvenez que nous avons voté, en première partie, un article 2 portant suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par une contribution économique territoriale. Nous étions convenus que ces dispositions applicables à 2010 relevaient de la première partie, mais qu’il était nécessaire de compléter l’exercice en seconde partie.
Les dispositions concernées consistent en trois amendements, nos II-199, II-200 et II-201, portant articles additionnels avant l’article 43, auxquels il faut ajouter l’amendement II-202, relatif aux ressources des chambres de commerce et d’industrie.
En application des dispositions de l’article 49, alinéa 2, du règlement du Sénat, je propose que la discussion commune des sous-amendements affectant ces quatre amendements ne concerne que ceux d’entre eux qui viendront en concurrence avec les amendements eux-mêmes.
Nous avions déjà appliqué cette méthode en première partie. Il s’agit de faire en sorte que notre discussion soit ordonnée et compréhensible, et que chacun puisse pleinement mesurer les enjeux des dispositions que nous présenterons.
M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Solidarité, insertion et égalité des chances
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (et articles 59 quater, 59 quinquies, 59 sexies et 59 septies).
La parole est à M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, comme l’année dernière, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » vous sera présentée à deux voix : la mienne et celle de mon ami et collègue Albéric de Montgolfier.
Cette mission rassemble près de 12,37 milliards d’euros en crédits de paiement et 12,36 milliards d’euros en autorisations d’engagement, en augmentation de près de 11 % par rapport aux crédits votés en 2009.
Les crédits de la mission sont répartis en cinq programmes de poids très différents.
Le plus modeste, consacré à l’égalité entre les hommes et les femmes, mobilise 29,5 millions d’euros de crédits, alors que le programme « Handicap et dépendance » pèse plus de 9,1 milliards d’euros.
Le périmètre de la mission n’évolue pratiquement pas entre 2009 et 2010. En revanche, d’importants mouvements de crédits affectent les différents programmes.
Le programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » voit ses crédits augmenter, de 555,4 millions d’euros en 2009 à 1 684,5 millions d’euros en 2010. Après examen par l’Assemblée nationale, cette dotation a certes été réduite de près de 76 millions d’euros. Pour autant, l’augmentation demeure substantielle et s’explique par la généralisation, en métropole, du revenu de solidarité active depuis le 1er juin 2009.
L’année 2010 constituera donc la première année pleine pour ce dispositif, ce qui implique nécessairement une hausse de crédits.
Pour la même raison, l’enveloppe du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » passe de 836 millions d’euros en 2009 à 407,6 millions d’euros en 2010. En effet, ce programme portait les crédits de l’allocation de parent isolé, ou API ; or celle-ci disparaît progressivement du fait de son intégration dans le RSA.
Compte tenu de ce nouvel équilibre des dotations à l’intérieur de la mission, nous nous interrogeons sur la pérennité de la maquette budgétaire à partir de 2011.
Par exemple, le libellé du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » est-il toujours justifié quand il porte désormais, à titre principal, les crédits de la protection juridique des majeurs ? Quels seront les effets budgétaires de la RGPP, notamment avec la création de la nouvelle direction générale de la cohésion sociale ? Nous souhaiterions que le Gouvernement nous apporte des éclaircissements sur ces points.
Je voudrais également signaler que le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », qui rassemble la quasi-totalité des crédits à la fois de personnel et de fonctionnement des autres programmes, se trouve profondément remodelé avec la création des agences régionales de santé, les ARS.
En effet, ces agences regrouperont à terme des services, notamment les DRASS, c'est-à-dire les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, les DDASS, ou directions départementales des affaires sanitaires et sociales, et les ARH, autrement dit les agences régionales de l’hospitalisation, dont les dotations sont aujourd’hui éclatées à travers le programme.
Au-delà des ARS et du RSA, l’autre priorité budgétaire est l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, qui fait l’objet d’une revalorisation de 25 % sur cinq ans, ainsi que l’a annoncé le Président de la République. En contrepartie, nous constatons une stagnation ou une diminution de crédits jugés moins essentiels.
Je voudrais enfin indiquer que les crédits budgétaires n’offrent pas une vision exhaustive de la politique de solidarité. En effet, les trente et une dépenses fiscales principalement associées à la mission sont presque de même ampleur que les crédits budgétaires : elles devraient atteindre 11,88 milliards d’euros en 2010. Il est toutefois regrettable que ces dépenses fiscales ne soient pas accompagnées d’une analyse plus fine de leurs effets au regard des objectifs initialement visés.
Pour conclure mon propos, je souhaiterais évoquer la sincérité des documents budgétaires transmis au Parlement.
En effet, le chiffrage du solde excédentaire du Fonds national des solidarités actives, le FNSA, pour 2009 est apparu plus qu’incertain.
À la page 38 du projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2010, il est indiqué que ce solde devrait atteindre 165 millions d’euros. Or la commission des finances a ensuite calculé qu’il s’élèverait, au minimum, à 750 millions d’euros. Devant nos collègues de la commission des affaires sociales, monsieur le haut-commissaire, vous avez admis que nos calculs étaient très proches de la réalité,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Quel aveu ! (Sourires.)
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. … soit un écart de près d’un demi-milliard d’euros par rapport au montant initialement mentionné dans le PAP !
Finalement, grâce au versement, tout à fait bienvenu, de la prime de Noël exceptionnelle, le solde du FNSA à la fin de l’année atteindrait environ 410 millions d’euros.
Nous souhaitons rappeler que l’autorisation budgétaire du Parlement n’a de sens que si elle se fonde sur des données exactes et précises, en un mot « sincères » !
Mes chers collègues, je laisse maintenant le soin à Albéric de Montgolfier de vous présenter plus en détail chacun des programmes de la mission.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, je vais effectivement, pour ma part, formuler quelques remarques concernant les différents programmes.
Tout d'abord, le programme « Actions en faveur des familles vulnérables » connaît une baisse sensible de ses crédits, pour les raisons que vient d’évoquer Auguste Cazalet. Ce programme a beaucoup perdu de sa cohérence avec la disparition, désormais actée, de l’API, puisque, je vous le rappelle, cette action est reprise à présent dans le RSA.
Ce programme rassemble de nombreuses actions sans pour autant que l’on puisse affirmer qu’émerge une véritable politique en faveur des familles.
En revanche, il convient de saluer l’effort budgétaire qui devrait permettre de résorber, d’ici à la fin de l’année, les dettes accumulées au fil des exercices, notamment au titre de l’API.
Par ailleurs, je souhaiterais m’attarder quelques instants sur la situation de l’enfance en danger. Depuis la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, les départements supportent la plus grande partie de cette politique. Le Fonds national de financement de la protection de l’enfance, prévu par cette loi, devait les soutenir financièrement dans cette tâche. Or le Premier ministre a clairement exprimé son souhait de ne pas doter ce fonds, sans pour autant proposer de solution de rechange.
En vertu de l’article 40 de la Constitution, il n’est pas possible à la représentation nationale de doter elle-même le fonds. Madame la secrétaire d'État, nous attendons par conséquent, de votre part, une action déterminée permettant de sortir d’une situation particulièrement critique et qui a sans doute trop duré. Soyez assurée que nous vous écouterons, sur ce point, avec la plus grande attention !
J’en viens au programme « Handicap et dépendance », qui porte les crédits de l’allocation aux adultes handicapés, soit plus de 6,2 milliards d’euros. En 2009, en cours d’exercice, nous constatons un fort dérapage de l’AAH. Le Gouvernement prévoit d’ailleurs de demander le vote d’une dotation complémentaire de l’ordre de 300 millions d’euros à l’occasion du collectif budgétaire de fin d’année.
Pour 2010, le Premier ministre a donné son accord pour que les crédits du programme soient supérieurs de 260 millions d’euros au montant qui avait été prévu par la loi de programmation des finances publiques.
Pour autant, nous restons sceptiques quant à la budgétisation de cette allocation. La raison en est simple : le Gouvernement semble ignorer les causes réelles du dérapage actuel. Dans ces conditions, toute prévision devient hasardeuse. Nous suivrons donc avec la plus grande vigilance l’exécution de ce programme au cours de l’année 2010.
Le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » est, de loin, le plus faible de la mission, avec 29,5 millions d’euros. Notre commission des finances s’est souvent interrogée sur l’efficacité et sur la valeur ajoutée de certaines dépenses, compte tenu de la faiblesse des sommes prévues par rapport aux enjeux.
Le document de politique transversale « Égalité entre les hommes et les femmes », dont nous disposons depuis cette année, montre que cette politique se trouve, en fait, éclatée entre plus de vingt programmes différents !
Pour la présente mission, les crédits d’intervention demeureront stables en 2010 ; néanmoins, comme les années précédentes, ils seront « saupoudrés » entre près de 1 150 associations. Celles-ci reçoivent, en moyenne, une subvention d’environ 12 500 euros, mais très souvent cette somme ne dépasse pas les 5 000 euros. Les associations d’envergure nationale voient, en revanche, leurs subventions maintenues à des niveaux élevés.
Quant au programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », il est quelque peu bouleversé par la création des agences régionales de santé.
En effet, les dotations de plusieurs services sont dorénavant regroupées au sein d’une nouvelle action, qui totalise près de 271 millions d’euros de crédits, dont 260 millions d’euros sont destinés au fonctionnement des ARS. Cette dotation permettra, notamment, de financer les charges des personnels transférés aux nouvelles agences, soit près de 7 500 équivalents temps plein en année pleine.
Je note, enfin, que grâce à la baisse nette des emplois, hors transferts de personnels vers les ARS, une économie de 6,6 millions d’euros sera réalisée.
Le programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » a, comme vient de le signaler Auguste Cazalet, tout particulièrement retenu notre attention.
En effet, il est constitué, à plus de 99 %, par la dotation de l’État au FNSA, qui gère l’enveloppe du RSA « activité ». À ce titre, les crédits demandés initialement s’élevaient à 1 674,5 millions d’euros. L’Assemblée nationale, vous le savez, a d’ores et déjà réduit ce montant de près de 76 millions d’euros.
Pour notre part, nous avons constaté que, au regard des prévisions retenues dans le projet de loi de finances pour 2009, le RSA « chapeau » avait connu une montée en charge plus lente que prévue, même si celle-ci est incontestablement rapide en comparaison d’autres prestations sociales.
Par conséquent, le FNSA dégage, à la fin de 2009, un solde bien supérieur à celui qui était prévu. Cet excédent est reporté sur 2010, et il permettra de réduire d’autant la contribution de l’État au FNSA.
Par ailleurs, la tendance actuelle de montée en charge du dispositif nous permet également de conclure à une moindre dépense du FNSA en 2010, toujours au regard des prévisions retenues dans les documents budgétaires.
L’un dans l’autre, ces deux effets nous ont conduits à estimer que la dotation de l’État au FNSA pourrait être réduite de plus de 800 millions d’euros. Sur la base de ce calcul, nous avions proposé un amendement de réduction des crédits du programme de 500 millions d’euros, qui avait été adopté, à l’unanimité, par la commission des finances.
Pourquoi avoir proposé une réduction de 500 millions d’euros alors que nous avions identifié un surplus de près de 812 millions d’euros ? Nous avions tout simplement retenu un impératif de prudence afin de ne pas risquer de mettre inutilement en péril le FNSA.
Cependant, depuis l’examen de ces crédits par la commission des finances, plusieurs éléments nouveaux ont été portés à notre connaissance.
Tout d’abord, monsieur le haut-commissaire, vous avez annoncé que, à la suite du versement d’une prime de Noël exceptionnelle, le solde excédentaire du FNSA ne serait plus que de 410 millions d’euros environ à la fin de l’année 2009.
Ensuite, vous avez indiqué à la commission des affaires sociales que le RSA jeunes n’entrerait en vigueur qu’au mois de juin 2010 au plus tôt et, plus probablement, au 1er septembre. Ce ne sont donc que 125 millions d’euros qui seront dépensés à ce titre.
Compte tenu de ces éléments nouveaux, la commission des finances a pu calculer que la dotation demandée pour 2010 était toujours supérieure de plus de 500 millions d’euros au montant des crédits nécessaires pour financer le RSA activité en 2010. Pour cette raison, elle a décidé de maintenir l’amendement de réduction des crédits.
Cependant, avant d’adopter un tel amendement, nous devons nous interroger sur le niveau prévisible des dépenses au titre du RSA durant l’année 2010.
Hors RSA jeunes, nous avions prévu une dépense d’environ 2,3 milliards d’euros sur la base d’un montant mensuel moyen de RSA activité de 109 euros, base qui avait d’ailleurs été utilisée pour la prévision du projet de loi de finances pour 2009.
Or les derniers chiffres font état d’un montant mensuel moyen versé par allocataire de 130 euros, au mois de juillet, de 157 euros pour les mois de juin et de septembre et, si l’on prend la base d’un montant de 150 euros, dégressif de 5 euros par mois, la dépense pourrait s’élever à environ 2,6 milliards d’euros, hors RSA jeunes.
Monsieur le haut-commissaire, il convient de nous éclairer sur ce point, car il faut estimer au mieux le solde. Il est évidemment souhaitable de laisser une certaine marge de sécurité pour un programme dont la montée en charge est encore très incertaine ou, en tout cas, n’est pas absolument prévisible.
De même, nous souhaitons avoir plus de précisions sur l’extension du RSA dans les départements d’outre-mer.
Enfin, l’article 59 quater, rattaché à la mission, permet d’étendre le bénéfice du RSA aux jeunes actifs de moins de vingt-cinq ans. Nous soutenons sans faille cette disposition qui permettra d’encourager les plus jeunes de nos travailleurs, qui sont aussi, bien souvent, les moins favorisés.
L’ouverture du bénéfice du RSA jeunes se fera sous réserve d’une condition d’activité préalable. C’est une condition fondamentale pour l’équilibre du dispositif. Nous notons simplement que la rédaction retenue par l'article renvoie aussi largement au pouvoir réglementaire pour définir les modalités de cette condition.
Si j’ai exposé quelques interrogations d’ordre strictement budgétaire, celles-ci ne tendent pas à remettre en cause le travail remarquable qui a été accompli. Auguste Cazalet et moi-même soutenons l’innovation majeure que constitue le RSA. Il s’agit, sans aucun doute, de l’avancée sociale la plus remarquable de ces dernières années.
En conclusion et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », tout en attendant beaucoup du dialogue qu’elle aura avec le Gouvernement sur l'amendement relatif au RSA.