M. le président. Je mets aux voix l'article 43.
(L'article 43 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 43
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 136 est présenté par MM. Godefroy et Cazeau, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Schillinger, Campion, Demontès, Printz, Ghali, Chevé, Alquier et San Vicente-Baudrin, MM. Daudigny, Le Menn, Teulade, Jeannerot, Desessard, Gillot, S. Larcher et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 387 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 47 de la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004 de financement de la sécurité sociale pour 2005 est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 47. - I. - Il est institué, au profit du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante créé par l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, une contribution, due pour chaque salarié ou ancien salarié à raison de son admission au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité. Cette contribution est à la charge de l'entreprise qui a supporté ou qui supporte, au titre de ses cotisations pour accidents du travail et maladies professionnelles, la charge des dépenses occasionnées par la maladie professionnelle provoquée par l'amiante dont est atteint le salarié ou ancien salarié. Lorsque le salarié n'est atteint par aucune maladie professionnelle provoquée par l'amiante, cette contribution est à la charge :
« 1° D'une ou plusieurs entreprises dont les établissements sont mentionnés au premier alinéa du I du même article 41 ;
« 2° D'une ou plusieurs entreprises de manutention ou d'un ou plusieurs organismes gestionnaires de port pour, respectivement, les dockers professionnels et les personnels portuaires assurant la manutention dans les ports mentionnés au sixième alinéa du I du même article 41.
« Pour la détermination de l'entreprise ou organisme redevable de la contribution au titre du 1°, les règles suivantes s'appliquent :
« a) Lorsque l'établissement est exploité successivement par plusieurs entreprises, la contribution est due par l'entreprise qui exploite l'établissement à la date d'admission du salarié à l'allocation ;
« b) Lorsqu'un salarié a travaillé au sein de plusieurs entreprises exploitant des établissements distincts, le montant de la contribution est réparti en fonction de la durée du travail effectué par le salarié au sein de ces établissements pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante.
« Pour l'application du 2°, lorsqu'un salarié a été employé par plusieurs entreprises ou organismes, le montant de la contribution est réparti au prorata de la période travaillée dans ces entreprises ou organismes. Lorsqu'un docker professionnel admis à l'allocation relève ou a relevé de la catégorie des dockers professionnels intermittents au sens du III de l'article L. 511-2 du code des ports maritimes, la contribution correspondant à la période d'intermittence est répartie entre tous les employeurs de main d'œuvre dans le port, au sens de l'article L. 521-6 du même code, au prorata des rémunérations totales brutes payées aux dockers professionnels intermittents pendant cette période d'intermittence.
« La contribution n'est pas due pour le premier bénéficiaire admis au cours d'une année civile.
« II. - Le montant de la contribution varie en fonction de l'âge du bénéficiaire au moment de son admission au bénéfice de l'allocation. Il est égal, par bénéficiaire de l'allocation, à 15 % du montant annuel brut de l'allocation majoré de 40 % au titre des cotisations d'assurance vieillesse et de retraite complémentaire à la charge du fonds, multiplié par le nombre d'années comprises entre l'âge mentionné ci-dessus et l'âge de soixante ans.
« Le montant de la contribution, qui ne peut dépasser deux millions d'euros par année civile pour chaque redevable, est plafonné, pour les entreprises redevables de la contribution au titre du I, à 2,5 % de la masse totale des salaires payés au personnel pour la dernière année connue.
« Les entreprises placées en redressement ou en liquidation judiciaire sont exonérées de la contribution.
« III. - La contribution est appelée, recouvrée et contrôlée, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général, par les organismes mentionnés à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désignés par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« Elle est exigible le premier jour du troisième mois de chaque trimestre civil pour les personnes entrant dans le dispositif au cours du trimestre précédent.
« Pour les salariés ou anciens salariés relevant ou ayant relevé du régime de protection sociale des personnes salariées des professions agricoles, la contribution due est appelée, recouvrée et contrôlée par les caisses de mutualité sociale agricole selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes salariées des professions agricoles. La date limite de paiement de la contribution est fixée au quinzième jour du deuxième mois de chaque trimestre civil pour les personnes entrant dans le dispositif au cours du trimestre précédent.
« IV. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article.
« V. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux admissions au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité prononcées à compter du 5 octobre 2004. »
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. L’amendement no 136 vise à rétablir la contribution à la charge des entreprises au financement des fonds au bénéfice des victimes de l’amiante.
Cette contribution visait à tenir compte de la responsabilité des entreprises à l’origine des dépenses du FCAATA. Elle avait été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée par la loi de finances pour 2009.
Il est donc proposé de la rétablir. Elle a en effet été supprimée au seul motif que son rendement était peu élevé depuis sa mise en œuvre – 34 millions d’euros au lieu des 120 millions d’euros attendus –, que son recouvrement était difficile en raison de la grande discrétion des entreprises redevables – on les comprend –, qu’elle générait de nombreux contentieux – ce qui me semble normal – et qu’elle était défavorable à la reprise de l’activité des entreprises en redressement ou liquidation judiciaire – cela demande à être démontré.
La décision de 2009 a pour effet de mettre à la charge de l’ensemble des entreprises de la branche AT-MP, et à la charge de l’État, puisque la contribution a été remplacée par une contribution de l’État, le financement de la réparation d’un préjudice dont l’origine est clairement identifiée.
Nous sommes à nouveau devant la déresponsabilisation demandée par les employeurs et assumée par le Gouvernement.
Cette contribution doit être rétablie à la fois en raison de la chute des recettes de la branche AT-MP et pour des raisons de justice. Plutôt que de la supprimer, il conviendrait d’en augmenter le produit en améliorant ses modalités de recouvrement. Dans notre pays, lorsque l’on veut recouvrir une contribution, on sait le faire.
J’ajoute que cela permettrait peut-être de maintenir l’allocation versée aux préretraités ayant été exposés à l’amiante plutôt que de bricoler une modification du décret de 1999 relatif à l’allocation de cessation anticipée d’activité.
Je rappelle que le Gouvernement prévoit une modification de ce décret afin de limiter la prise en compte des revenus salariaux pour calculer le montant de l’allocation. Le but est de limiter la prise en compte aux « revenus présentant un caractère régulier et habituel ». Cette formule a pour seul objectif de retirer du calcul le solde des congés payés, les RTT, les primes, ce qui permet de « gratter » quelques euros au détriment des salariés victimes.
Avec cette affaire, le Gouvernement, comme souvent en matière sociale, entreprend de modifier une réglementation afin de combattre une jurisprudence de la Cour de cassation qui ne lui convient pas.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, on ne sait plus quelle règle vous suivez. Si ses arrêts vous arrangent, vous les suivez, dans le cas contraire, vous faites voter une loi pour que la Cour de cassation n’ait plus rien à dire. Mais il y a toujours une constante. Lorsqu’il s’agit de gratter un peu d’argent au détriment des salariés, on légifère afin de passer outre les arrêts de la Cour de cassation.
Le Gouvernement revient même sur sa circulaire du 14 décembre 2000 et sur les dispositions déjà prises par plusieurs caisses régionales d’assurance maladie. Surtout, il modifie une réglementation au préjudice des salariés ayant été exposés à l’amiante.
Tout cela correspond à la trame de ce projet de loi qui, systématiquement, derrière les effets d’annonce, oublie de rechercher et de sanctionner les responsabilités – bien qu’elles soient identifiées –, renvoie les charges sur la collectivité et ajoute à la souffrance des victimes une pénalisation financière. C’est tout à fait inacceptable.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l’amendement no 387.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à rétablir la contribution au FCAATA des entreprises dont les salariés, ou anciens salariés, bénéficient de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante.
En effet, cette contribution avait été créée par l’article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, pour être supprimée, quatre années plus tard, par l’article 101 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
L’argument avancé pour supprimer cette contribution avait été de dire que le régime était d’une complexité excessive, que les sommes étaient d’un recouvrement difficile, qu’il était source de nombreux contentieux et enfin qu’il ne rapportait au final pas autant que prévu : 34 millions d’euros au lieu des 120 millions d’euros attendus.
Pourtant, nous pensons que, plutôt que de supprimer ce dispositif, il aurait été possible de l’amender pour le rendre plus efficient et ne pas se priver de ses ressources.
Les difficultés n’étaient pas insurmontables, même celles qui se présentaient lors de la reprise de sociétés – on a parlé notamment d’obstacle à la reprise de l’activité des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire.
Pourtant, il nous semble que la reprise des actifs et des passifs d’une société est un système qui fonctionne depuis longtemps dans bien d’autres domaines. Il est d’ailleurs intéressant de noter avec quelle rapidité un dispositif peut être mis de côté quand projets politique et économique s’accordent…
Aujourd’hui, pour refuser le rétablissement de cette contribution, on nous dit que les sommes perdues à la suite de son abandon sont entièrement compensées, puisque la loi de financement pour 2009 a augmenté de 30 millions d’euros la dotation de la branche AT-MP du régime général.
Certes, mais nous voulons vous faire remarquer que ce transfert n’est pas neutre : la charge des conséquences financières de ces maladies professionnelles passe des employeurs à la collectivité.
Alors que ces affections sont dues aux fautes, ou pour le moins ont été causées par des entreprises qui ont mis leurs salariés en danger, c’est la société dans son ensemble qui va payer la facture. C’est encore un triste exemple de socialisation des risques à sens unique qui est ici à l’œuvre, et non pas le principe pollueur-payeur.
Nous pensons donc que cette contribution devrait être rétablie et qu’il conviendrait aussi d’en augmenter le produit en améliorant les modalités de son recouvrement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les auteurs de ces amendements savent très bien pour quelles raisons M. Dériot avait proposé cette suppression. Trois motifs importants ont conduit à ce résultat. Je laisse le soin à M. le ministre de les décliner s’il le juge nécessaire, mais ils justifient que nous ne reprenions pas cette disposition.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Darcos, ministre. Comme vient de le dire M. le rapporteur général, nous savons ce qu’est le FCAATA, nous connaissons le dispositif qui avait été édicté, selon lequel les entreprises dont un seul de leurs salariés était admis dans le dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante étaient les financeurs.
La contribution s’est révélée tout à fait inférieure à nos attentes, puisque le rendement n’a été que de 30 millions d’euros par an sur les 100 millions d’euros attendus.
Comme vient de le dire M. Vasselle, il y avait des raisons à cela.
D’abord, il était très difficile d’identifier les entreprises qui étaient redevables, notamment en cas de reprise successive d’établissements qui avaient exposé les salariés à l’amiante. Des contentieux apparaissaient lorsque les entreprises étaient identifiées, elles discutaient la décision ; des obstacles empêchaient la reprise d’activité des sociétés en redressement ou en liquidation judiciaire, ce qui pénalisait l’activité et l’emploi. Évidemment, les gens ne voulaient pas reprendre les entreprises qui risquaient d’être ainsi exposées.
Toutes ces raisons ont conduit à la suppression de cette contribution au 1er janvier 2009.
Mais je voudrais dire à MM. Godefroy et Fischer que ce qui compte pour nous, c’est que le FCAATA soit alimenté et que, lorsque le dispositif a été interrompu le 1er janvier 2009, le montant ait été entièrement compensé par une dotation de la branche AT-MP au FCAATA.
Ce sont toutes les entreprises qui, aujourd’hui, y contribuent, à hauteur de 880 millions d’euros. Donc, le dispositif, me semble-t-il, fonctionne aujourd’hui. Il ne connaît pas de difficulté pour attribuer les légitimes compensations que méritent les salariés qui ont été exposés à ces risques.
C’est pourquoi je demande aux auteurs de ces amendements, qui sont sans objet, de bien vouloir les retirer. Personne ne considère que le FCAATA ne fonctionne pas correctement et qu’il ne rembourse pas les sommes comme il devrait le faire.
M. le président. Monsieur Godefroy, l'amendement n° 136 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Oui, monsieur le président.
Je voudrais juste faire une remarque à M. le ministre.
Vous dites que l’on ne parvient pas à retrouver les entreprises en France. C’est faux, quand on le veut vraiment, on peut les identifier. Les services fiscaux ont tout de même les moyens pour y parvenir. Ou alors, c’est à désespérer !
Ensuite, des problèmes peuvent se poser concernant les reprises d’entreprise. Rien n’empêche – ce serait même logique – que l’on prenne des mesures pour que les repreneurs d’une entreprise ne soient pas amenés à payer les errements de leurs prédécesseurs et pour qu’ils puissent se retourner contre eux si on les retrouve. Cela doit être possible, ils ne disparaissent pas dans la nature !
Ce que vous nous proposez ne me semble pas tout à fait logique. Je me demande comment on peut l’accepter. C’est comme si vous nous disiez que, lorsqu’une personne fait exploser une bombonne de gaz dans un immeuble, tous les propriétaires doivent payer la facture : c’est le principe de la mutualisation qui s’applique. J’estime au contraire que le responsable doit payer.
Je maintiens mon amendement, et je tiens à souligner que je n’ai pas obtenu de réponse sur vos intentions concernant la modification des bases de calcul de l’ACAATA.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 et 387.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 43 bis
Avant le 30 septembre 2010, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la faisabilité d’une voie d’accès individuelle au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante ainsi que le nombre de salariés potentiellement concernés par ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l'article.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, rassurez-vous, je n’utiliserai pas la totalité de mon temps de parole !
Cet article est symptomatique, premièrement, de l’impuissance des parlementaires, qui n’ont d’autre choix que de demander des rapports, étant donné que l’article 40 les empêche de proposer directement un dispositif d’accès individuel.
Nous avons déjà fait des tentatives les années précédentes afin de prévoir un accès individuel au FCAATA pour l’indemnisation des victimes de l’amiante et, bien évidemment, nos amendements ont été déclarés irrecevables. Chaque fois que je présente un amendement, qui est dans la logique du rapport de la mission du Sénat – je vous rappelle, monsieur le président, que j’ai eu l’honneur d’en être le co-rapporteur avec notre collègue Gérard Dériot, sous la présidence de M. Vanlerenberghe, et que nous avions préconisé ce recours individuel –, on nous oppose l’article 40.
Donc, il ne nous reste qu’une solution, celle de demander un rapport. C’est le seul moyen pour pouvoir évoquer cette question. Et, je vous l’ai dit tout à l’heure, monsieur le ministre, tout est dans le camp du Gouvernement. Si vous le voulez, vous pouvez ! Nous vous en parlerons tous les ans.
Deuxièmement, cet article est symptomatique du gel du dossier « Amiante », alors que le principe d’un accès individuel fait l’unanimité depuis 2005. Le rapport de la mission d’information du Sénat sur l’amiante avait formulé sa proposition, qui avait été reprise également par l’Assemblée nationale. Nous ne voyons pas pourquoi, aujourd’hui, il y a une volonté manifeste de ne pas s’engager dans cette direction.
Avec notre collègue Gérard Dériot, j’avais d’ailleurs proposé à cette époque de créer des comités de site, là où l’on a pu constater des expositions massives à l’amiante. Ce comité pourrait rassembler les représentants des entreprises, des salariés, de l’État et de la Caisse primaire d’assurance maladie, pour essayer de reconstituer le parcours des personnes qui ont été exposées à l’amiante et d’authentifier – on ne peut pas faire n’importe quoi – que ce parcours est bien juste.
Eh bien, nous ne pouvons pas demander cela avec l’article 40. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité m’exprimer sur l’article 43 bis, en espérant que nos demandes figurant dans le rapport du Sénat publié en 2005 ne resteront pas lettre morte.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Nous adoptons la même stratégie de contournement.
Le choix de faire établir un rapport sur la voie d’accès individuelle au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante proposée dans cet article nous paraît aller dans le bon sens. Oui, les voies d’accès au dispositif actuel sont insuffisantes et laissent de côté de nombreuses victimes. La voie d’accès individuelle pourrait être complétée par d’autres systèmes. Le rapport se prononcera.
Pour nourrir ce futur rapport, nous allons vous exposer certains problèmes et effets pervers dont nous avons été saisis. Ils plaideront pour la refonte du dispositif amiante.
À propos du suivi des malades de l’amiante, nous pensons que le scanner devrait être l’acte médical de référence pour le suivi professionnel et postprofessionnel. Cela éviterait bien des complications, la radiographie ne voyant pas tout.
Un autre constat est celui de la complexité du dispositif dans son ensemble. Sur ce point, le médiateur de la République s’est d’ailleurs ému : « L’hétérogénéité des règles de mise en œuvre par les différents régimes débouche sur une protection inégalitaire des travailleurs de l’amiante ».
En effet, il existe trop de régimes parallèles – chantiers navals, SNCF, etc. – qui n’ouvrent pas les mêmes droits et ne les ouvrent pas au même moment, tantôt lors de l’exposition avérée, tantôt quand la maladie est déclarée. Il est temps d’harmoniser ces dispositifs.
À cela s’ajoute le problème de la non-coordination entre entreprises publiques et entreprises privées quant à la computation des années d’exposition. Cette non-reprise des années passées dans le public, par le privé, pose de gros problèmes, notamment en cas de privatisation de l’entreprise.
Concrètement, aujourd’hui, à la suite de la privatisation d’une entreprise autrefois publique, comme certains chantiers navals, des salariés sont contraints de renoncer à des années « amiante » acquises dans le public, pour continuer à travailler dans le privé. Ils doivent y renoncer ou perdre leur emploi !
Concernant les attributaires de la pension de réversion aux ayants droit, nous voulions proposer, par amendement, d’étendre au concubin et à la personne liée par un pacte civil de solidarité, la majoration que l’article L.434-8 du code de la sécurité sociale prévoit au seul profit du conjoint survivant. La différence de traitement prévue dans ce texte semble obsolète, à l’heure où la notion de PACS acquiert partout des effets juridiques.
Un autre problème est celui de l’articulation de la perception de l’ACAATA avec d’autres avantages qui sont de droit pour tous les autres salariés. En effet, la loi Évin et les différentes extensions qu’elle a connues prévoient le maintien des couvertures complémentaires de santé aux salariés quand ils quittent l’entreprise. Cette « portabilité » des droits n’est pas prévue pour les victimes de l’amiante. Nous voulions la soumettre à votre vote. Mais l’article 40 de votre règlement nous en a empêchés !
De même, le salarié qui démissionne de son entreprise pour bénéficier de l’ACAATA perd les garanties décès et prévoyance qui étaient attachées à son contrat de travail.
Enfin, la question de la prescription des actions en justice des victimes de l’amiante, qui avait semblé être réglée par le vote d’un amendement lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, mais qui en réalité ne l’est pas, sera évoquée lors de l’examen d’un autre amendement.
Comme vous le voyez, les sujets ne manquent pas et, sur la plupart de ces questions, nous avions rédigé des amendements. Mais le couperet de l’article 40 empêche souvent les débats d’avoir lieu.
Conclusion, les problèmes demeurent, et il serait temps de remettre à plat le dispositif dans son entier, pour accorder à ce dossier sa juste place, car pour les victimes de l’amiante, comme vous le savez, malheureusement le temps presse !
M. le président. L'amendement n° 388, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Un rapport sur la situation des salariés des régimes spéciaux victimes de l'amiante qui ne peuvent plus intenter une action en reconnaissance du caractère professionnel de leur maladie, ni même une procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur du fait de la prescription de leur action et dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et le 28 décembre 1998 est déposé au plus tard le 30 juin 2010 sur le Bureau des assemblées.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L’article 43 bis du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit le dépôt d’un rapport sur la faisabilité d’une voie d’accès individuelle au dispositif de la cessation anticipée des travailleurs de l’amiante.
Notre amendement, lui, a également pour objet la constitution d’un rapport, mais il vise avant tout à nous permettre de vous exposer une situation concernant les victimes de l’amiante et qui mérite, selon nous, un correctif législatif destiné à faire cesser une situation injuste autant que « kafkaïenne ».
Notons que le Gouvernent avait lui-même proposé ce même amendement l’année dernière, et qu’il avait été adopté.
Pourtant, le problème n’était pas réglé, car l’amendement adopté avait laissé subsister une incertitude quant aux effets dans le temps de cette modification législative : pouvait-elle s’appliquer aux instances judiciaires en cours et non encore définitives ? Par un avis du 4 novembre 2009, la Cour de cassation vient d’apporter à cette question une réponse sans ambiguïté. Un bref historique s’impose.
Première étape : des victimes de l’amiante avaient voulu engager des actions en justice sur le fondement de la faute inexcusable de l’employeur. Mais leur action était prescrite.
Deuxième étape : en 1998, une disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale permet aux victimes dont les dossiers ont été médicalement constatés entre 1947 et 1998 de pouvoir agir en justice : la prescription est levée.
Mais comme à l’époque, le financement de ces dossiers rouverts ne pesait que sur le régime général, la Cour de cassation statua que cette non-prescription ne s’appliquait pas aux régimes spéciaux de l’amiante – la prescription était donc instaurée de nouveau.
Troisième étape : lors du vote du PLFSS 2009, le Gouvernement, sensible à cette question, dépose un amendement pour corriger cette injustice. L’amendement est adopté et la situation réglée, pense-t-on.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Fischer !
M. Guy Fischer. Cependant une cour d’appel, saisie de cette question de prescription, demande officiellement son avis à la Cour de cassation : « cette nouvelle disposition de loi adoptée en novembre 2008, s’applique-t-elle aux instances en cour » ?
Quatrième étape : la Cour de cassation hésite, puis finit par rendre un avis dénué de toute ambiguïté le 4 novembre 2009 en précisant que les dispositions du PLFSS 2009 s’appliquent immédiatement aux instances en cours non encore définitives.
Tout cela pour ça ?
Pour conforter cette jurisprudence, ne serait-il pas bon de faire inscrire dans la loi : « Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les dispositions de la loi n °8-1194 du 23 décembre 1998 modifiées par les lois n °2001-1246 du 21 décembre 2001 et n °2008-1330 du 17 décembre 2008, sont applicables aux procédures relatives au contentieux de la sécurité sociale en cours devant les juridictions. » Ce qui va s’en dire va mieux en le disant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gilbert Barbier. Cela vous amuse de faire traîner le débat, monsieur Fischer ?
M. Guy Fischer. Cela ne m’amuse pas du tout !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je vous propose de nous en remettre à l’avis du Gouvernement et je constate que M. Fischer a réussi un tour de force : il a bloqué les minuteurs. (Sourires.)
Mme Isabelle Debré. Oui !
M. Guy Fischer. J’avais demandé la parole sur l’article et je présentais en même temps mon amendement.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ah bon ?