compte rendu intégral
Présidence de M. Bernard Frimat
vice-président
Secrétaires :
Mme Michelle Demessine,
Mme Sylvie Desmarescaux.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Communication d’avis de conseils territoriaux
M. le président. En application des articles L.O. 6213-3 et L.O. 6313-3 du code général des collectivités territoriales, tels qu’ils résultent de la loi du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, j’ai saisi le 20 octobre 2009 le représentant de l’État dans les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, en vue de la consultation des conseils territoriaux de ces deux collectivités.
Par lettres en date du 12 novembre 2009, j’ai reçu de M. le représentant de l’État la délibération du 3 novembre 2009 du conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy portant avis sur la proposition de loi organique tendant à permettre à Saint-Barthélemy d’imposer les revenus de source locale des personnes établies depuis moins de cinq ans, et la délibération du 29 octobre 2009, du conseil territorial de la collectivité de Saint-Martin portant avis sur la proposition de loi organique tendant à modifier le livre III de la sixième partie du code général des collectivités territoriales relatif à Saint-Martin.
Acte est donné de ces communications sur deux propositions de loi qui seront examinées par le Sénat le lundi 16 novembre.
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financement de la sécurité sociale pour 2010
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2010 (nos 82, 90 et 91).
Rappel au règlement
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce matin, les radios et les télévisions se répandent sur le premier cas de syndrome de Guillain-Barré qui serait survenu à la suite d’une vaccination contre la grippe A. C’est une véritable publicité contre la vaccination !
Madame la ministre, nous avons déjà eu hier soir une assez longue discussion sur ce sujet. Vous nous avez promis toute la transparence sur l’évolution de la vaccination contre la grippe. Avez-vous des éléments nouveaux à nous apporter ce matin sur ce premier incident qui, d’après ce qui en a été dit, ne serait pas très grave ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le sénateur, j’ai déjà indiqué que la campagne de vaccination faisait l’objet de structures de pharmacovigilance très rigoureuses, que le moindre effet secondaire serait porté à la connaissance des autorités et du public et qu’il y avait une possibilité de saisine de ces structures tant par les professionnels de santé que par les personnes vaccinées.
Que s’est-il passé ? Six jours après l’injection d’un vaccin, une personne a ressenti des paresthésies, ce que les enfants appellent fourmis dans les jambes. Elle a été prise en charge par son médecin généraliste. Les signes du syndrome étaient extrêmement bénins et ont régressé spontanément.
Le lien de causalité n’est pas établi, et est même sérieusement contesté, entre la vaccination et le trouble développé, s’il s’agit bien du syndrome de Guillain-Barré, car ce syndrome survient en général plus tard, soit quinze jours à trois semaines après le fait causal. Il se trouve que cette personne avait la grippe avant d’être vaccinée. Or la principale cause du syndrome de Guillain-Barré est la grippe. La meilleure façon de se protéger contre ce syndrome est donc de se faire vacciner !
Mesdames, messieurs les sénateurs, si on fait la une des journaux à chaque rougeur ou mal de tête à la suite d’une vaccination, c’est qu’on est « mal barrés » dans nos techniques de communication ! (Rires.)
M. le président. Monsieur Barbier, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
troisième partie (suite)
M. le président. Nous poursuivons la discussion des articles de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous en étions parvenus à l’article 11.
Article 11
I. – Par dérogation au II de l’article 15 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009, le taux de 1 % est substitué au taux K mentionné dans les tableaux figurant à l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale pour le calcul des contributions dues au titre de l’année 2010.
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 165-4 est ainsi rédigée :
« Le produit des remises est recouvré par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 désignés pour le recouvrement des contributions mentionnées à l’article L. 138-20. » ;
2° À l’article L. 162-37, la référence : « et L. 162-18 » est remplacée par les références : «, L. 162-18 et L. 165-4 ».
III (nouveau). – Le deuxième alinéa de l’article L. 245-6 du même code est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « et des ventes ou reventes à destination de l’étranger. Les revendeurs indiquent à l’exploitant de l’autorisation de mise sur le marché les quantités revendues ou destinées à être revendues en dehors du territoire national. »
IV (nouveau). – Après la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 5121-17 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Les revendeurs indiquent au titulaire de l’autorisation de mise sur le marché les quantités revendues ou destinées à être revendues en dehors du territoire national. »
V (nouveau). – Après le deuxième alinéa de l’article L. 5123-1 du même code, il est inséré un alinéa rédigé :
« Les premier et deuxième alinéas ne s’appliquent pas aux médicaments et produits non consommés en France et destinés à l’exportation. »
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, sur l'article.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 11 fixe le taux K, qui détermine le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde à la charge des entreprises exploitant des médicaments remboursables. Si les laboratoires pharmaceutiques dépassent ce taux, ils sont tenus de verser des remises à l’assurance maladie. Ce taux, qui avait été fixé à 1,4 % pour la période 2008-2011 afin que les entreprises pharmaceutiques puissent avoir une certaine lisibilité, est abaissé aujourd’hui à 1 %.
À l’Assemblée nationale, M. Yves Bur a voulu par amendement maintenir le taux à 1,4 % afin de permettre aux laboratoires d’échapper à ladite remise. La situation étant très difficile, nous considérons qu’il convient d’abaisser ce taux à 0,5 % et non à 1 % afin que les laboratoires contribuent de manière significative au financement de notre système de protection sociale.
Il apparaît normal que tout le monde participe à ce financement. On ne peut pas toujours demander aux malades de supporter les déremboursements de médicaments ou les augmentations du forfait hospitalier. L’industrie pharmaceutique doit, elle aussi, apporter sa contribution.
Par ailleurs, nous recevons souvent des courriers de nos concitoyens dénonçant des pratiques irresponsables des laboratoires, concernant les médicaments génériques par exemple. Soit leurs prix sont très élevés et cela profite à certains laboratoires, mais au détriment de la sécurité sociale ; soit ils sont moins élevés, mais les boîtes contiennent beaucoup moins de médicaments.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Alors qu’une boîte de Spasfon contient trente comprimés de 80 mg et coûte 2,81 euros, son générique, le Phloroglucinol Merck, comprend seulement dix comprimés de 80 mg et coûte 2,13 euros. Il faut donc trois boîtes du générique pour avoir trente comprimés. Le coût de trente comprimés du générique est de 6,39 euros au lieu de 2,81 euros. En achetant le générique, on fait donc perdre 3,58 euros à la sécurité sociale.
La promotion des génériques a été une bonne initiative, mais les laboratoires sont en train de la récupérer à leur avantage. Les marges attribuées aux pharmaciens afin de les inciter à proposer des génériques gonflent le prix de ces médicaments. Pour conclure, les entreprises exploitant des médicaments génériques font des profits sur le dos des assurés et de l’État.
Madame la ministre, je me demande pourquoi le prix des génériques est plus élevé en France que la moyenne européenne et pèse donc sur les dépenses d’assurance maladie ?
L’objectif étant de ne pas aggraver les déficits de la sécurité sociale, des mesures doivent être prises au plus vite. Des économies sont notamment possibles en réduisant les prix des génériques et en recadrant les pratiques irresponsables des laboratoires.
Fixer le taux K à 0,5 % nous semble totalement légitime afin que les laboratoires participent à la sauvegarde de notre système de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.
M. Bernard Cazeau. Je profite de l’occasion pour revenir sur ce qu’a dit M. Barbier. En médecine, on sait que le syndrome de Guillain-Barré survient à la suite de l’injection de nombreux vaccins autres que le vaccin contre la grippe, notamment le vaccin contre l’hépatite C. Un certain nombre de personnes vaccinées déclenchent des maladies auto-immunes, …
M. Bernard Cazeau. … notamment des scléroses en plaques et d’autres maladies de ce type.
M. Nicolas About. Les Allemands vaccinent plus et ont moins de cas de scléroses en plaques !
M. Bernard Cazeau. Il n’y a donc pas lieu de faire toute une affaire du cas évoqué dans la presse. De telles complications sont connues. Il faut savoir que, en médecine, aucun traitement n’est inoffensif.
M. Nicolas About. C’est une contre-vérité !
M. Bernard Cazeau. J’en viens maintenant à l’article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il fixe à 1 %, et non plus à 1,4 %, le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde à la charge des entreprises exploitant des médicaments remboursables. En 2008, la clause de sauvegarde avait rapporté 260 millions d’euros.
En conférence de presse, madame la ministre, vous aviez déclaré : « Le ralentissement de la croissance économique et l’absence d’arrivée sur le marché de nouveaux médicaments innovants avec un chiffre d’affaires élevé justifient de retenir pour 2010 un niveau inférieur de 0,4 point à celui qui avait été déterminé dans une précédente loi de financement de la sécurité sociale pour les années 2008 à 2011. »
C’est curieux ! Alors que les comptes de la branche assurance maladie sont dans le rouge, pourquoi augmenter si timidement le taux de la contribution des laboratoires pharmaceutiques assise sur leur chiffre d’affaires ? Cette industrie n’est pourtant pas à plaindre. Largement avantagé par l’existence de la sécurité sociale, ce secteur n’est pas soumis à la crise. Tant mieux ! La taxation que vous prévoyez, madame la ministre, est homéopathique, alors que la pression sur les assurés sociaux tend à s’accentuer !
Par ailleurs, les précédentes lois de financement de la sécurité sociale que nous avions votées prévoient que les entreprises peuvent être exonérées du paiement de cette contribution si elles choisissent de signer une convention avec le Comité économique des produits de santé, le CEPS. Elles s’acquittent alors en contrepartie de remises conventionnelles. En réalité, la quasi-totalité des laboratoires pharmaceutiques ont choisi de conclure des conventions avec le CEPS plutôt que de se voir appliquer la clause de sauvegarde.
M. François Autain. Absolument !
M. Bernard Cazeau. Ainsi, en 2007, sur 178 laboratoires ayant commercialisé des médicaments remboursables en officine, 174 ont conclu une convention avec le CEPS.
Le fait que les industries du médicament choisissent la signature de remises conventionnelles plutôt que l’assujettissement à la clause de sauvegarde avait ainsi conduit la Commission des comptes de la Sécurité sociale, dans son rapport de septembre 2007, à qualifier ce dernier dispositif de « contribution théorique ». Il est donc grand temps d’agir, madame la ministre, et de prendre une direction opposée à celle dans laquelle vous vous engagez !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 48, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Sur mon initiative, la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 a fixé le taux K, qui conditionne le déclenchement de la clause de sauvegarde sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques, à 1,4 % pour les années 2009 à 2011.
Cette décision faisait directement suite à une proposition de mon rapport de contrôle sur la taxation de l'industrie du médicament, qui avait souligné la nécessité d'assurer une plus grande stabilité des règles fiscales applicables à l'industrie du médicament et d'éviter de recourir, comme chaque année, à des dispositifs de taxation prétendument « exceptionnels », mais en réalité devenus assez récurrents.
Le I de l’article 11 revient sur cette mesure et fixe le taux K à 1 %.
Pour ma part, je vous propose de supprimer cette disposition. Ce n’est pas le niveau du taux K qui pose problème. D’ailleurs, je crois que l’industrie pharmaceutique n’en a actuellement cure, puisqu’elle est à 0,8 %. Cette mesure serait donc totalement inopérante.
J’ai bien entendu votre souhait de trouver des ressources nouvelles, mais je crains que vous ne soyez déçus cette année. C’est simplement sur la question de la stabilité de l’environnement fiscal des entreprises du médicament que j’interpelle le Gouvernement.
Madame la ministre, comme vous l’avez, me semble-t-il, indiqué à mon collègue Yves Bur à l’Assemblée nationale, il est quelque peu contradictoire de donner d’un côté et de reprendre, ou de chercher à reprendre, de l’autre. Je rappelle que quelque 500 millions d’euros sont versés à l’industrie pharmaceutique au titre du crédit d’impôt recherche.
Le taux K et le crédit d’impôt recherche sont en contradiction. Or l’objectif de la commission des finances est d’avoir une fiscalité stable.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I. - Le II de l'article 15 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 est ainsi rédigé :
« II. - Pour le calcul des contributions dues au titre de l'année 2010 en application de l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, le taux de 1 % est substitué au taux K mentionné dans le tableau figurant au même article. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous ne sommes pas tout à fait sur la même ligne que mon collègue et ami Jean-Jacques Jégou.
M. François Autain. Ce n’est pas la première fois !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce n’est peut-être pas la première fois,…
M. Guy Fischer. Ni sans doute la dernière !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … mais nous arrivons tout de même heureusement à nous retrouver sur un certain nombre de sujets.
Je profite donc de la présentation de cet amendement n° 2 pour vous exposer en même temps notre léger désaccord avec la commission des finances.
Comme vous vous en souvenez, l’an dernier, nous avions suivi la proposition de M Jégou de fixer pour trois ans le taux K à 1,4 %, dans le souci d’accroître la visibilité pour les entreprises.
Cependant, la volonté du Gouvernement de ramener ce taux à 1 % pour 2010 nous paraît justifiée, en raison de la situation économique et des efforts de maîtrise des dépenses sociales qui s’imposent à tous.
Madame la ministre, nous pouvons, me semble-t-il, adhérer aux arguments que vous avez développés à l’Assemblée nationale. Mais, au-delà de la fixation du taux K, la modification proposée du texte adopté l’an dernier doit nous conduire à nous interroger sur l’opportunité d’établir un taux pluriannuel.
La clause de sauvegarde est un mécanisme de régulation qui permet de limiter les conséquences pour l’assurance maladie obligatoire de l’augmentation du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique réalisé au titre des spécialités remboursables.
La stabilisation du taux K est-elle compatible avec le fonctionnement d’un tel instrument de régulation ? Poser la question, c’est, me semble-t-il, déjà y répondre.
Par conséquent, à la lumière de l’expérience, nous nous demandons s’il ne conviendrait pas plutôt de prendre le parti de fixer annuellement le taux K en loi de financement de la sécurité sociale en fonction de la conjoncture et des efforts qui apparaîtraient nécessaires pour contenir l’évolution des dépenses du médicament.
C’est pourquoi nous avons déposé un amendement tendant à fixer à 1 % ce taux pour 2010 et à supprimer les dispositions adoptées l’année dernière qui le fixaient à 1,4 % pour 2011. Bien entendu, il appartiendra au prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale de retenir le niveau du taux K qui paraîtra le plus adapté.
En réalité, dans ce débat, il y a une logique économique et une logique sociale.
Certes, la logique économique m’amène à partager l’argumentation qui a été développée par Jean-Jacques Jégou en sa qualité de rapporteur pour avis de la commission des finances.
Mais il y a aussi la logique sociale. À cet égard, j’ai encore le souvenir des auditions auxquelles j’ai procédé avec le laboratoire d’éthique médicale, le LEM, qui se plaignait de l’augmentation de sa contribution au financement de la protection sociale. Selon ses représentants, cette évolution compromettait les investissements qu’il était prévu d’effectuer dans le domaine de la recherche.
M. François Autain. Justement ! Parlons-en de ces investissements !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pour eux, nous affaiblissions l’innovation et la recherche dans les entreprises françaises.
Pour ma part, j’avais fait valoir au LEM que leurs objections relevaient d’une autre logique, la logique économique. Je les ai donc incités à s’adresser à un autre interlocuteur, en l’occurrence le ministère chargé de la recherche, ce qu’ils ont fait, et ils ont obtenu satisfaction.
À l’époque, à entendre ses représentants, j’avais le sentiment que le LEM était au bord de l’asphyxie. (M. Guy Fischer manifeste son scepticisme.) D’ailleurs, le jour où je les ai auditionnés, j’ai même été tenté d’appeler le SAMU…
Toutefois, j’ai constaté qu’ils étaient plutôt dans une situation euphorique cette année. D’une part, ils ont obtenu des crédits de recherche non négligeables.
M. Guy Fischer. On leur a donné plus d’un milliard d’euros !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. D’autre part, M. le Président de la République – je parle sous le contrôle de Mme la ministre de la santé et des sports – leur a récemment accordé des fonds supplémentaires pour les conforter dans le domaine de la recherche et de l’innovation.
Par conséquent, nous devons sans doute trouver une cote mal taillée en la matière.
Mes chers collègues, je vous rappelle que les prix des médicaments sont des prix administrés. Et qui tire les ficelles sinon précisément ceux qui fixent ces prix ? Il est donc également possible de faire évoluer le taux K en fonction de la fixation des niveaux du prix du médicament. Ainsi, la responsabilité est au plus haut niveau, et Mme la ministre pourra nous en parler dans un instant.
M. le président. L'amendement n° 72, présenté par M. Cazeau, Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, MM. Daudigny et Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz, Chevé et Schillinger, MM. Le Menn, Jeannerot, Godefroy, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le taux :
1 %
par le taux :
0,5 %
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à fixer le taux K à 0,5 % pour 2010.
Quels que soient les critères retenus, les Français sont les plus gros consommateurs de médicaments d’Europe et se classent au troisième rang mondial, derrière les États-Unis et le Japon. Nous nous situons à 30 % au-dessus de la moyenne des pays riches de l’OCDE en valeur et même à 50 % au-dessus en volume, car les prix sont plus bas que chez nos principaux voisins.
Selon un rapport de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, de l’Assemblée nationale du mois de mai 2008, chaque Français consomme en moyenne une boîte de médicaments par semaine.
En 2007, les dépenses de médicaments ont représenté 17,76 milliards d’euros, soit un tiers des dépenses de soins de ville supportées par le régime général de sécurité sociale. Entre 2000 et 2007, les dépenses de médicaments sont passées de 10,5 milliards d’euros à 15,2 milliards d’euros, soit une augmentation de près de 50 % en moins de dix ans. En 2006, l’assurance maladie a ainsi contribué à hauteur de 67,5 % au financement des dépenses de médicaments.
Dans son rapport Industrie du médicament : mettre la fiscalité en perspective, remis au mois de juin 2008, notre collègue Jean-Jacques Jégou notait que les produits de l’industrie pharmaceutique étaient « largement solvabilisés par notre système de protection sociale ». Il dressait également un constat explicite du lobbying exercé par cette industrie sur la représentation nationale, au détriment de l’intérêt général. Il écrivait ainsi : « Si les industriels ont parfois pu préférer un accroissement des taxes à des baisses de prix, cette instabilité envoie toutefois un signal négatif et contribue à l’opacité du système de régulation des dépenses de médicament. » Il évoquait également le « chemin de Damas » (Exclamations ironiques) des pouvoirs publics en ce domaine et ses conséquences : « Les taxes affectées aux organismes de sécurité sociale, qui ont servi de variable d’ajustement budgétaire de court terme, ont connu des fluctuations importantes au cours des dernières années. »
Madame la ministre, de deux choses l’une : soit le taux K ne rapporte rien, et alors je ne vois vraiment pas pourquoi vous le fixez à 1 %, sa diminution étant susceptible de menacer l’industrie pharmaceutique ; soit il rapporte quelque chose, et alors dites clairement que vous voulez protéger certains secteurs industriels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme vous l’avez compris, nous souhaiterions que M. Jégou accepte de retirer l’amendement n° 48 au profit de celui de la commission des affaires sociales.
Certes, nous comprenons bien sa logique : les entreprises ont besoin de visibilité pour l’avenir. C’est une logique fiscale qui serait également souhaitable d’un point de vue social. Mais, comme vous l’avez noté, à la suite d’événements indépendants de la volonté du Gouvernement, nous sommes obligés de recaler un certain nombre d’indicateurs. C’est le cas cette année. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. J’espère que les entreprises le comprendront.
L’amendement n° 72, qui vient d’être défendu par M. Daudigny, vise à abaisser le taux K à 0,5 %. Et pourquoi pas 0,2 % ou 0,1 % ? Cela rapporterait encore un peu plus !
Mon cher collègue, vous comprendrez qu’à partir du moment où la commission des affaires sociales a fixé le taux K à 1 %, il paraît difficile de revenir sur son choix en séance publique. Au demeurant, les arguments que vous avez développés sont les mêmes que ceux que vous aviez présentés en commission des affaires sociales. Or cela n’avait pas entraîné de changement d’avis de la part des commissaires !
Par conséquent, la commission demande le retrait de l’amendement n° 72. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le président, je souhaiterais tout d’abord répondre brièvement à Mme Printz, qui a fait une confusion.
Madame la sénatrice, vous savez que la nature d’un médicament tient non seulement à son principe actif, mais également à sa forme galénique. Parfois, du point de vue de la biodisponibilité d’un produit, la forme galénique a plus d’importance que le principe actif.
Or vous avez confondu le Spasfon comprimé, pour lequel il n’y a pas de générique, et le Spasfon-Lyoc, présentation galénique qui permet une absorption beaucoup plus rapide du produit en forme sublinguale.
M. François Autain. C’est facile à comprendre !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Spasfon-Lyoc est bien moins cher dans sa forme générique que la spécialité Spasfon-Lyoc.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. C’est une véritable leçon de pharmacologie !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Eh oui ! Je suis docteur en pharmacie. Je pense avoir été suffisamment claire, et j’imagine que tout le monde est convaincu par mon explication. (Exclamations ironiques.)
Vous savez, monsieur Cazeau, moi, je ne suis pas médecin. Je ne me permettrais donc pas de m’élever au-dessus de ma condition. (Rires.)
Deux des trois amendements sur lesquels vous avez à vous prononcer sont des amendements maximalistes, qui vont d’ailleurs en sens contraire. Dans cette perspective, la position du Gouvernement est peut-être celle de la sagesse !
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement de M. Jégou, qui vise à fixer le taux K à 1,4 %. Cette année, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, est fixé à 3 %, contre 3,3 % l’an dernier. Cela signifie que tous les acteurs du système de soins, en particulier l’industrie pharmaceutique, doivent contribuer à son financement. L’an dernier, le taux K avait été fixé à 1,4 % dans un contexte économique favorable. Il est tout fait normal que l’industrie pharmaceutique participe à l’effort de la nation. Fixer le taux K à 1 % ne relève pas d’un simple affichage : les économies prévues sont de l’ordre de 50 millions d’euros.
En outre, et M. le rapporteur général vient de le souligner, le Gouvernement a annoncé des mesures en faveur de l’industrie pharmaceutique. Dans notre pays, nous avons la chance d’avoir de grandes entreprises pharmaceutiques, avec beaucoup d’emplois à la clé. D’ailleurs, le 26 octobre dernier, nous avons réuni le Conseil stratégique des industries de santé, sous la présidence effective de M. le Président de la République. Plusieurs décisions ont été prises à cette occasion, dont la création d’un fonds d’investissement dans le domaine des biotechnologies, la liberté des prix des médicaments à l’exportation et le doublement du crédit d’impôt recherche pour l’industrie pharmaceutique, qui atteindra 500 millions d’euros par an.
Vous le savez, les bioindustries et les industries liées à la santé sont un secteur porteur d’avenir et constituent un formidable gisement d’emplois. Néanmoins, même si nous essayons de créer le contexte le plus favorable à l’industrie pharmaceutique, nous souhaitons qu’elle participe à de tels efforts.
C’est la raison pour laquelle je vous demande de ne pas adopter l’amendement de M. Jégou.
Dans son amendement n° 2, M. Vasselle propose de fixer le taux K à 1 % pour 2010 et de ne pas le fixer pour 2011. J’y suis favorable. À mon sens, une telle évaluation annuelle nous permettra de mieux suivre des évolutions qu’il est effectivement très difficile de prévoir d’une année sur l’autre.
Enfin, M. Daudigny et les membres du groupe socialiste comprendront en creux pourquoi je ne suis pas favorable à l’amendement n° 72.