M. Roland Courteau. Et vous ?
M. Gérard Longuet. Il aurait mieux valu approfondir les défis de La Poste plutôt que de relayer inlassablement des angoisses que ne partage pas l’immense majorité de ceux qui font vivre La Poste et dont c’est le métier.
Je voudrais, à cet instant, adresser, au nom du groupe Union pour un mouvement populaire, nos remerciements très chaleureux à notre rapporteur, Pierre Hérisson, qui épouse une longue tradition de sénateurs impliqués dans la vie postale et dont Gérard Larcher a été, en son temps, l’une des illustrations les plus brillantes.
Je voudrais dire à Jean-Paul Emorine que sa patience, son assiduité, sa sagesse, son sens de la mesure, sont des valeurs bourguignonnes dans lesquelles je me retrouve totalement. Il a apporté de surcroît dans nos travaux cet accent rocailleux sans lequel le « terroir » de La Poste n’aurait pas été présent dans cet hémicycle ! (Sourires et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Monsieur le ministre, je salue votre passion de La Poste, votre compétence et votre engagement. Je vous ai beaucoup admiré de n’avoir donné pratiquement aucun signe de lassitude, d’autant que, je le sais, mon tempérament ne m’aurait jamais permis d’afficher la même sérénité au banc du Gouvernement ! Il est vrai que vous aviez le soutien d’une majorité, même si elle est plus difficile à mobiliser quand il s’agit d’approuver que quand il s’agit de combattre !
M. Jacques Mahéas. Le problème, c’est qu’ils n’étaient pas motivés !
M. Gérard Longuet. Nous le savons tous, un train qui arrive à l’heure, ce n’est pas un événement, alors qu’un train qui arrive en retard mobilise les journalistes !
M. Jean Desessard. Ce n’est plus vrai en Île-de-France ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Gérard Longuet. Il en va de même en politique : quand on est pour un projet, on considère que l’exécutif a bien fait son travail et, très souvent, on le laisse tout seul.
Je voudrais donc remercier Jean-Pierre Bel et Nicole Borvo Cohen-Seat qui, en mobilisant leurs troupes, ont suscité l’engagement des sénateurs de l’UMP. Et l’ami de La Poste que je suis se réjouit que les sénateurs de l’UMP non initiés aux vertus de ce grand projet postal aient ainsi eu l’occasion de les découvrir.
Je le dis à l’intention de Nicolas About, président du groupe de l’Union centriste, ce débat nous a aussi permis de mieux connaître certains membres de son groupe qui sont encore au début de leur premier mandat sénatorial. Je sais que beaucoup des membres de mon propre groupe aimeraient les avoir parmi nous, mais c’est leur liberté d’être dans leur propre famille ! (Sourires sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. –Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Nous aurons à cœur, je le crois, de nous retrouver sur des combats communs. En effet, nous avons pleinement apprécié, chers collègues du groupe de l’Union centriste, outre cette vertu importante qu’est l’assiduité, la force de votre engagement.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Gérard Longuet. Mon seul regret, c’est que l’opposition, qui a dit avec tant d’insistance son attachement envers La Poste, n’ait pas exprimé un peu plus de confiance dans un projet qui était d’abord une demande des postiers ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 61 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 183 |
Contre | 152 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. À cette heure tardive, je ne dirai que quelques mots pour m’associer aux propos tenus par notre président de groupe, Gérard Longuet. Je tiens à remercier le président de la commission et l’ensemble des fonctionnaires du Sénat qui nous ont accompagnés.
Je remercie également les élus de toutes les sensibilités qui ont participé aux différentes auditions et enrichi ce texte grâce à leurs questions à l’adresse des représentants des organismes que nous avons sollicités.
Monsieur le président, je suis arrivé dans cette assemblée en 1995. Ma passion pour cette grande entreprise publique qu’est La Poste et à laquelle nous tenons tous beaucoup, c’est auprès de vous et grâce à vous qu’elle s’est épanouie ! Ce que je sais aujourd’hui sur La Poste, c’est à vous que je le dois, monsieur le président ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voulais vous faire part de mon sentiment après ces huit jours passés au banc de la commission.
Observateur privilégié de tous les débats, j’ai entendu des propos parfois vifs, reflets de nos philosophies différentes sur l’évolution d’une grande entreprise.
D’aucuns l’ont régulièrement oublié, mais Jacques Blanc a su le leur rappeler tout à l’heure en évoquant le traité de Lisbonne, cette grande entreprise s’inscrit désormais dans un environnement européen auquel il lui faut s’adapter.
Sans refaire le débat, je voudrais rassurer nos collègues sur la transformation du statut de l’entreprise. Nous avons toutes et tous, à travers nos interventions, fait avancer le projet de loi tel qu’il avait été rédigé par le Gouvernement.
Nous avons discuté d’amendements importants, qu’il s’agisse de garantir l’origine publique des capitaux de cette entreprise ou de sécuriser son financement par des apports publics destinés à lui fournir les moyens de se moderniser.
Nous avons adopté des amendements visant à assurer, dans le cadre de l’aménagement du territoire, les 17 000 points de présence postale : bureaux principaux, agences postales ou relais poste.
Nous avons souligné la nécessité d’une autorité de régulation à l’échelon européen.
Dès lors, je crois que nous avons non seulement réuni les éléments pour faire avancer cette grande entreprise, mais aussi garanti l’avenir de ses salariés, y compris en ce qui concerne leurs retraites.
Nos travaux, en commission comme en séance publique, ainsi que les nombreuses auditions auxquelles nous avons procédé nous ont donc permis d’élaborer des dispositions adaptées au nouveau contexte.
Je remercie les ministres qui ont participé à nos débats, en particulier Christian Estrosi et Michel Mercier, ainsi qu’Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement, puisqu’il nous a fallu un peu modifier l’organisation de nos travaux.
Quant à Pierre Hérisson, s’il a appris auprès de vous, monsieur le président, je puis vous dire qu’il est aujourd’hui un expert : c’est tout simplement « la » référence en matière postale.
Nous avons eu de nombreux débats sur des sujets très sensibles. Toutes et tous, nous avons cherché à faire en sorte que La Poste s’adapte au contexte européen et j’ose espérer que les emplois continueront à prospérer dans cette grande entreprise ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’aime le débat parlementaire : c’est la vie de la démocratie, la respiration de notre République. Au terme de ce débat, je veux donc adresser à chacune et à chacun d’entre vous, sur quelque travée que vous siégiez, les remerciements du Gouvernement.
Et je vous remercie vous, monsieur le président du Sénat, ainsi que tous ceux qui, sous votre autorité, ont présidé, pendant soixante-dix heures maintenant, les séances qui viennent d’être consacrées au projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.
Je remercie également les administrateurs de votre Haute Assemblée, tous ceux qui ont été aux côtés de Jean-Paul Emorine et de Pierre Hérisson tout au long de l’examen de ce texte, ainsi que mes propres collaborateurs.
Je remercie le président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire ainsi que votre formidable rapporteur, dont nous connaissons tous l’implication.
Depuis des mois, Jean-Paul Emorine et Pierre Hérisson n’ont cessé l’un et l’autre d’aller au contact de l’entreprise et de celles et de ceux qui, sur le terrain, pouvaient apporter une contribution importante à une meilleure compréhension.
Au nom du Premier ministre, de Michel Mercier, d’Henri de Raincourt et d’Anne-Marie Idrac, je répondrai à ceux qui ont dit que le débat allait trop vite pour que l’on puisse aller vraiment au fond des choses, mais je ne leur parlerai pas ce soir d’obstruction…
Je ne leur rappellerai pas que 637 amendements ont été déposés, même si nombre de ces amendements étaient répétitifs et que leur présentation aurait pu être considérée comme une manœuvre dilatoire d’un groupe contre la majorité…
Je me contenterai de dire que, soixante-dix heures de débat, ce n’est tout de même pas rien et que le Sénat n’a pas eu souvent l’occasion de consacrer un débat aussi long, qui faisait suite à de très nombreuses réunions en commission, sur un texte comme celui-ci.
Je veux rappeler que, au-delà des très nombreux amendements qui ont été adoptés en commission, sous votre présidence, monsieur Emorine, et sous la baguette de Pierre Hérisson, quarante-quatre amendements ont été adoptés en séance publique, dont onze amendements émanant du groupe UMP, neuf amendements du groupe socialiste, cinq amendements du groupe de l’Union centriste, quatre amendements des Verts, trois amendements du groupe CRC-SPG, deux amendements du RDSE et un amendement déposé par un non-inscrit.
Sept de ces amendements ont été adoptés à l’unanimité. Je pense en particulier aux amendements relatifs à la lutte contre la contrefaçon ; à la gratuité des réclamations ; à la composition du conseil d’administration, au sein duquel on a veillé, sur proposition de l’opposition, d’ailleurs, à ce que siège un représentant des usagers ; à la création, au sein du Parlement, d’une commission chargée de dresser un bilan annuel sur la gestion du fonds de péréquation territoriale ; à l’accès à l’Internet à haut débit dans tous les bureaux de postes…
Tous ces amendements ont été adoptés à l’unanimité !
Au cours de ces huit jours de débat, ont en outre été examinées trois motions de procédure – exception d’irrecevabilité, question préalable, renvoi en commission – plus une motion référendaire !
Il y a eu cinquante-deux scrutins publics, dont un de droit sur la motion référendaire.
Je rappelle tous ces chiffres à l’intention de ceux qui seraient tentés de croire que l’exceptionnelle longueur du débat s’expliquerait par la résistance de l’opposition Non, derrière ces soixante-dix heures de débat, il y a tout simplement eu la volonté du Gouvernement, de la commission, de la majorité de laisser parfaitement respirer la démocratie dans cette enceinte, afin que nous puissions aller au fond des choses.
Depuis qu’à dix-sept heures, lundi dernier, nous avons commencé à débattre, à aucun moment nous n’avons posé des limites précises, et je tiens à vous remercier, monsieur le président du Sénat, d’avoir toujours accepté d’élargir les possibilités de siéger de manière que l’examen du texte se poursuive pendant tout le temps nécessaire. De la sorte, personne n’aura eu à ressentir la pression qu’aurait fait peser un délai limite et je crois que nous sommes allés vraiment au fond : chacun a disposé du temps nécessaire pour défendre chacun de ses amendements, dans le respect du règlement de la Haute Assemblée.
C’est cela que je voudrais que l’on retienne, car c’est important : c’était la volonté du Président de la République comme du Premier ministre que ce débat puisse se dérouler jusqu’à son terme sans qu’à aucun moment nous donnions le sentiment qu’une quelconque pression s’exerçait au risque de vous priver de votre droit d’amendement, de votre droit d’expression, de votre droit de parole.
Nous avons voulu cette confrontation des idées, qui a débouché parfois sur des compromis ou conduit au contraire à des positions tranchées entre une opposition et, conformément aux équilibres de votre assemblée, une majorité en mesure alors d’emporter le vote.
Que retiendra-t-on encore de ce débat ?
D’abord, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez voté un certain nombre de dispositions qui, bien sûr, bouleverseront profondément La Poste de demain. Mais, dans le même temps, nous avons veillé à ce que cette entreprise qui est une des institutions publiques les plus ancrées dans la conscience collective des Français conserve son caractère.
Je comprends bien que, depuis des mois, dans notre pays, cela ait pu être un sujet de confrontation idéologique, mais le Gouvernement n’a pas voulu qu’il en soit ainsi : comme la majorité, il a considéré que nous devions prendre ensemble l’engagement devant les Français que La Poste, quelle que soit la réforme statutaire dont elle ferait l’objet, resterait une grande entreprise publique, si ce n’est la principale entreprise publique de notre pays.
C’est ce que j’ai voulu signifier lorsque j’ai utilisé, à dessein, le néologisme « imprivatisable » et, en effet, après l’adoption de l’amendement de Bruno Retailleau faisant suite à l’affirmation en commission, sur l’initiative de votre rapporteur, du caractère à 100 % public de La Poste dans le texte, nous avons retenu le principe que La Poste était un service public à caractère national.
Je le réaffirme aujourd'hui, conformément au préambule de la Constitution de 1946, le seul fait que les quatre missions de service public de La Poste – service universel postal, aménagement du territoire, accessibilité bancaire et livret A, acheminement de la presse – aient été inscrites noir sur blanc dans la loi rend de facto La Poste « imprivatisable ».
Bien sûr, La Poste est « privatisable », mais les conditions de sa privatisation sont désormais si difficiles à réunir qu’elles garantissent qu’aucune majorité ne se risquera demain à la privatiser, car il faudrait en effet qu’elle supprime non pas seulement une mais les quatre missions de service public. Qui s’y risquera ?
Le débat a donc bien démontré que nous avons accordé à La Poste ce caractère « imprivatisable ».
On retiendra aussi que nous avons garanti un financement pérenne de la mission d’aménagement du territoire en même temps que nous avons accepté d’inscrire le principe du maintien des 17 000 points de contact.
On retiendra encore que nous avons maintenu les droits et statuts des postiers, qu’il s’agisse de leur mutuelle de santé, ce qui était une exigence exprimée par l’ensemble des délégations syndicales, ou des régimes de retraite, pour lesquels nous avons répondu aux attentes des salariés et des fonctionnaires de La Poste.
Ces droits les plus élémentaires que nous devions à chacun au sein de cette grande entreprise, nous les leur avons accordés dans ce texte.
D’aucuns ont pu soupçonner le Gouvernement à propos de cette modification statutaire, mais, qu’on le veuille ou non, c’était une nécessité et, à cet égard, il est inutile de s’envoyer des dates à la figure.
Certains considèrent que cette nécessité est imputable au Gouvernement actuel parce qu’en 2008 il a accepté la transposition de la troisième directive postale, mais d’autres pourraient dire que le processus qui a conduit à cette troisième directive a été engagé par le Gouvernement qui, en 1997, a accepté la première directive postale…
Cette polémique ne m’intéresse pas. La seule réalité, c’est que, le 1er janvier 2011, toutes les postes d’Europe seront confrontées à l’ouverture à la concurrence et qu’il fallait donner à la poste française les moyens nécessaires pour se moderniser tout en gardant son statut public et faire face à la concurrence.
À ceux qui doutent de nos intentions, je ferai simplement remarquer que le statut de société anonyme à caractère à 100 % public, qui permet à l’État et à la Caisse des dépôts et consignations d’entrer dans le capital, est le seul qui nous autorise à apporter à La Poste les 2,7 milliards d’euros qu’elle demande. Jamais d’ailleurs dans ce débat on ne nous a proposé de solution de nature à nous permettre de donner à La Poste les moyens nécessaires sans modifier son statut.
J’ai déjà posé cette question à l’ouverture du débat : quel est l’État au monde qui aurait l’intention de conduire une entreprise publique vers la privatisation tout en décidant de lui apporter 2,7 milliards d’euros d’argent public ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La France, avec GDF !
M. Christian Estrosi, ministre. On peut, d’un côté, comme certains d’entre vous l’ont fait, nous envoyer à la figure GDF…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je n’ai fait que répondre à votre question !
M. Christian Estrosi, ministre. De l’autre côté, et certains l’ont fait, on pourrait répliquer : France Télécom, Air France, Thomson, EADS, Autoroutes du Sud de la France et tant d’autres institutions qui étaient publiques ont été privatisées non pas par les gouvernements qui se sont succédé depuis 2002, mais par leurs prédécesseurs !
Eh bien, ce terrain polémique, je ne veux pas non plus y entrer au terme de ce débat. Je veux simplement vous dire qu’il y avait des réalités et que ces réalités vont maintenant nous conduire à relever ensemble un formidable défi : construire une grande entreprise qui, grâce à sa logistique, à ses infrastructures, aux transports ferroviaires, aux TGV, aux avions et aux plateformes intermodales, sera à la pointe pour la distribution des colis express, avec la modernisation de Chronopost, mais aussi une grande entreprise capable de moderniser la Banque postale.
Cette Banque postale, il faut lui donner les moyens de rester la banque des personnes plus vulnérables, tout en lui permettant de se hisser, en termes de performance, au niveau des plus grandes banques de notre pays.
Nous devons veiller aussi, alors que la sacoche du facteur ne cesse de s’alléger, à ce que La Poste devienne une grande entreprise concurrentielle en matière de courrier électronique.
Je ne cite là que quelques exemples des projets que nous avons eu l’occasion d’évoquer tout au long de ce débat. C’est ce défi qu’il nous appartient de relever, en donnant à La Poste les moyens nécessaires à la réalisation de ces objectifs.
En même temps, nous devons tous veiller au respect des principes d’équité et de justice.
Il y a eu un grand débat sur le prix unique du timbre. Certains ont défendu le principe d’une tarification spéciale pour les zones de montagne, pour les zones littorales, pour les zones rurales, ou encore pour les zones urbaines sensibles. (Signes de dénégation sur les travées du groupe socialiste.) Non ! La justice et l’équité doivent s’appliquer à tous les citoyens, quels que soient leur condition sociale, leur identité, le territoire où ils résident.
Je remercie à cet égard M. Adrien Giraud, sénateur de Mayotte, cette île qui a décidé à 95 %, lors d’un référendum, de devenir le cinquième département de notre outre-mer. Car la France ne se situe pas seulement entre les Alpes et les Pyrénées, entre Atlantique, Méditerranée et baie de Somme ! La France, c’est la France des quatre océans ! C’est une diversité de cultures que l’on retrouve en Amérique du Sud, dans la Caraïbe, depuis l’océan Indien, avec Mayotte, située au large de l’Afrique, au cœur du Pacifique sud avec la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna ou la Polynésie française.
Qu’il habite au cœur de la métropole ou à 26 000 kilomètres de Paris, chacun de nos concitoyens doit avoir conscience de ce que nous allons faire, après ce débat au sein de la Haute Assemblée, de cette grande entreprise publique qu’est La Poste, avec cette richesse extraordinaire que constitue le potentiel humain de ses salariés et de ses fonctionnaires.
Mme Michelle Demessine. Il n’a pas soif ? (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Christian Estrosi, ministre. Nous allons offrir un service de meilleure qualité à l’ensemble des usagers et de nos concitoyens sur tous les territoires de notre pays, quelles que soient leur histoire, leur culture et leur identité. Parce que c’est cela, la grandeur de la France !
Vous conviendrez, mesdames, messieurs les sénateurs, quelle qu’ait été votre position sur ce texte, que ces soixante-dix heures de débat...
M. Jean Desessard. Maintenant soixante et onze, grâce à vous ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Pas tout à fait ! (Sourires.)
M. Christian Estrosi, ministre. ... ont fait grandir, aux yeux de tous les Français, l’image de celles et ceux qui les représentent.
En conclusion, je souhaite remercier la majorité, si unie, si soudée, que ce soit sur les travées de l’UMP ou de l’Union centriste, de ne s’être à aucun moment désolidarisée, de ne jamais avoir fait défaut au Gouvernement...
Mme Michelle Demessine. Formidable !
M. Christian Estrosi, ministre. ... et d’avoir montré sa volonté, sa détermination à relever cet immense défi : faire de La Poste, demain, une grande entreprise conquérante et moderne qui permette à notre pays d’augmenter ses parts de marché, une entreprise capable de lutter contre les délocalisations et de gagner ces parts d’emploi dont nous avons tant besoin pour mettre en place un meilleur pacte économique et social. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
6
Dépôt d'une question orale avec débat
M. le président. J’informe le Sénat que j’ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
N° 51 - Le 12 novembre 2009 - M. Jack Ralite rappelle à M. le ministre de la culture et de la communication que depuis 2004, Google a commencé un programme international de numérisation de grandes bibliothèques. Il atteint à ce jour des millions de livres. Ce projet arrive en France, via le récent accord au contenu toujours secret de la bibliothèque de Lyon avec le moteur de recherche américain et les discussions non publiques entamées avec lui par les ministères domiciliés à Bercy et la Bibliothèque nationale de France.
Nous souhaitons bien sûr saisir l’immense et heureuse possibilité, aujourd’hui concrète, de permettre à tous et à chacun le libre accès au « livre de la famille humaine ». Il ne faut pas prendre de « retard d’avenir » mais pas à n’importe quel prix. Or, si Google, devenu un géant, diversifiant toujours plus ses interventions sur le livre notamment avec Google Edition, annonce offrir gracieusement aux institutions publiques les moyens de numérisation, cette gratuité est illusoire et dangereuse. On a pu parler de « pacte faustien » nous mettant d’abord et avant tout sous tutelle d’un véritable monopole, s’appropriant le patrimoine des bibliothèques publiques à des fins exclusivement commerciales, au mépris du droit d’auteur et du droit moral, au mépris du bien public de ses animateurs et de ses destinataires. Les auteurs américains ont déjà du recourir à la justice.
L’enjeu est fondamental pour le devenir du « grenier à mémoire » de nos sociétés, pour le livre, la lecture, les lecteurs, la librairie, l’édition, les bibliothèques et les initiatives à développer vite et fort que sont Gallica, vivement encouragé par la francophonie, Europeana et la très récente bibliothèque numérique universelle créée par l’UNESCO. Quelles mesures nationales, quelles propositions au plan européen et international entend prendre le Gouvernement français face à cette grave perspective dominée par l’esprit des affaires contre les affaires de l’esprit ? Il lui demande quel est le plan de numérisation du livre dans notre pays, ses priorités et son coût ? Quelles sont les possibilités industrielles existantes ou à créer en France ou en Europe pour la numérisation ? Quel est son avis sur la nécessité d’avoir un ou plusieurs « pôles de compétitivité » sur la numérisation, comprenant la recherche publique, la recherche privée et l’industrie ? Est-il admissible que l’entreprise Google exige le secret sur les accords qu’elle passe avec des services publics et sur la propriété des œuvres numériques qu’elle revendique pour un grand nombre d’années ? Que lui inspire l’incertitude sur la pérennité de la conservation numérique ? Quel montant du grand emprunt envisage-t-il de consacrer à la numérisation ?
La magnifique bibliothèque du Sénat mène actuellement une numérisation de son fond concernant d’abord les débats sous la Ve République dans le cadre d’un partenariat public-privé en France qui n’entache pas la responsabilité publique. Tout cela « bourdonne d’essentiel », dirait René Char.
Beaucoup de grandes bibliothèques dans le monde s’étaient félicitées de la réaction française face à Google en 2004. Elles ne comprendraient pas que la France renonce à cette attitude en adoptant une politique d’impuissance démissionnaire.
Comment dire non aux règles autoritaires du chiffre, de l’argent et oui à la liberté humaine de déchiffrer le monde ? « L’histoire n’est pas ce qu’on subit mais ce qu’on agit », dirait Boulez.
(Déposée le 9 novembre 2009 – annoncée en séance publique le 9 novembre 2009)
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.