M. Roland Courteau. Très bien ! Il fallait le rappeler !
M. Marc Daunis. Dans ce climat d’incrédulité, vous en êtes même, monsieur le ministre, à user de néologismes, tel le terme « imprivatisabilité » ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.)
M. Marc Daunis. Nous vous proposons de faire plus simple. La loi constitutionnelle du 4 août 1995 vous en donne la possibilité : nous vous invitons à consulter nos compatriotes !
Une votation citoyenne a été organisée. Mon collègue Jean Desessard l’a souligné, comme d’autres avant lui : vous ne pouvez pas balayer ce vote d’un revers de main méprisant, en criant à la tartufferie ainsi qu’à la manipulation ! Ce serait un peu court et manquerait singulièrement de lucidité.
Beaucoup de nos concitoyens ont compris que les bouleversements parfois silencieux d’un monde en proie à la globalisation nécessitaient de redonner de la puissance à l’intervention publique. Leur message devrait réjouir les républicains que nous sommes.
Effectivement, la République est une idée moderne. Ce débat doit être l’occasion non pas de diviser notre peuple, mais de le rassembler !
Monsieur le ministre, vous avez déclaré, lors des travaux en commission, être prêt à retenir toute proposition permettant de sceller définitivement le caractère public de l’activité postale.
Si votre parole est sincère, vous ne sauriez être opposé à vous entourer d’une précaution supplémentaire : donnez-vous aujourd'hui les moyens permettant d’éviter, conformément à votre engagement, que certains ne sombrent demain dans la tentation de la privatisation.
Je puis vous garantir que, pour notre part, nous n’y céderons pas !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous non plus !
M. Marc Daunis. Que le vote du peuple souverain apporte à votre projet de loi une légitimité supplémentaire à celle que lui conférera le débat parlementaire ! N’hésitez pas : les représentants de la nation n’ont pas peur du peuple ! Nos concitoyens ne comprendraient pas d’être exclus d’un processus de décision qui marquera aussi profondément leur vie quotidienne et leur avenir.
Permettez-moi d’oser un pronostic : si vous demandez l’accord du peuple pour interdire la privatisation du service public postal par référendum, le résultat dépassera toutes vos espérances ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le débat de ce matin, nous avons entendu l’intervention de M. Longuet.
M. Gérard Longuet. J’espère que ce n’était pas la seule !
M. David Assouline. Notre collègue nous a expliqué, en citant Robert Badinter, tout le mal qu’il pensait du référendum. Mais sa citation était tirée de son contexte. En effet, nous pouvons tous, au sein de cet hémicycle, souscrire à l’idée que l’utilisation du référendum sur des sujets démagogiques, passionnels – telle la question de la peine de mort, comme cela avait été envisagé par certains –, est bien entendu funeste à la démocratie.
Mais, s’agissant d’une question concrète, ciblée, qui concerne la vie quotidienne de nos concitoyens, et après avoir respecté toutes les modalités du débat démocratique – et nous disposons des moyens, dans cet hémicycle et dans l’espace public, pour que nos concitoyens se saisissent de l’enjeu –, il ne s’agira plus de voter pour ou contre la privatisation. La question posée aux électeurs portera sur le projet de loi du Gouvernement. À ce moment-là, monsieur le ministre, vous pourrez expliquer que votre projet de loi ne se résume pas à une privatisation. Nous expliquerons, quant à nous, pourquoi il nous paraît conduire à une telle privatisation. Ce débat rationnel et serein prendra le temps nécessaire, et les Français trancheront, car cette question est intimement liée à leur vie quotidienne.
Évidemment, bien des sujets exigent des expertises et méritent des débats plus approfondis. Mais la question qui nous occupe aujourd’hui touche à la vie quotidienne des citoyens, qu’ils habitent un village, un quartier urbain ou un ghetto, comme il en existe beaucoup, et quelle que soit leur classe d’âge. Tant de personnes ne conservent un rapport au service public que par l’intermédiaire de La Poste ! Lors de la votation citoyenne, j’ai vu beaucoup de monde : il s’agissait non pas de hordes de gauchistes – je puis vous l’assurer –, mais de gens dont le rapport à La Poste conserve une signification forte, notamment en ce qui concerne La Banque postale,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Beaucoup sont des électeurs de droite !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Souvenez-vous de ce que vous avez dit lors du débat sur la Banque postale !
M. David Assouline. … telles des personnes âgées. Pourquoi avoir peur d’un tel débat ? Il n’est pas dangereux pour la démocratie, il ne suscitera pas de passions qui peuvent nous faire basculer dans les extrêmes : il permettra simplement aux Français de se prononcer.
Monsieur Longuet, il est quand même paradoxal que vous opposiez au référendum la légitimité du débat parlementaire. Vous invoquez, à l’appui de votre argumentation, les quelque 600 amendements qui démontrent la réalité du débat parlementaire, alors que vous n’avez cessé de fustiger l’opposition lorsqu’elle déposait des amendements, justement pour nourrir ce débat…
M. Gérard Longuet. Il y en a peut-être 500 de trop !
M. David Assouline. Pourtant, dans cette discussion, nous n’obtenons jamais de réponse. Chaque fois que nous ouvrons un débat, la commission se contente d’émettre un avis défavorable, le ministre se range à son avis,…
M. Pierre Hérisson, rapporteur. C’est tout simplement de la lucidité !
M. David Assouline. … et, lorsqu’il s’agit de passer au vote, loin de consulter les sénateurs présents en séance, on recourt de façon mécanique au scrutin public !
D’un côté, vous éteignez le débat parlementaire que nous animons par notre présence et nos interventions, et, de l’autre, vous refusez le référendum !
En outre, monsieur Longuet, vous contredisez tous les arguments invoqués dans cet hémicycle pour « vendre » la révision constitutionnelle de 2008 ! Je me souviens de la place que l’UMP et Nicolas Sarkozy avaient accordée à la réforme du référendum, pour dire qu’il s’agissait d’un approfondissement de la démocratie, d’une avancée sans précédent – bien que ce droit au « référendum d’initiative à la fois parlementaire et populaire » soit très encadré, il faut le rappeler. Or vous nous avez dit que ce référendum n’avait plus rien de démocratique ! C’est sans doute la raison pour laquelle le projet loi organique qui doit permettre la mise en œuvre de ce nouveau droit, que vous aviez défendu, n’a toujours pas été soumis au Parlement !
Il me reste un reproche particulier à adresser à M. Longuet,…
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il n’y en a que pour lui !
M. David Assouline. … dont les propos ont semblé raviver l’attention sur les travées de l’UMP. D’un coup, le côté droit de l’hémicycle s’est senti des ailes, comme s’il avait été revigoré par cette intervention !
Quel toupet, monsieur Longuet, de nous accuser d’être des otages de l’extrême gauche quand, sur des sujets purement idéologiques, qui n’ont rien de précis ni de concret pour les citoyens mais créent une musique de fond – ces sujets que je qualifiais tout à l’heure de « passionnels » –, vous ne cessez de chercher à « draguer » l’électorat du Front national ! Que faites-vous d’autre, lorsque vous créez un « ministère de l’immigration et de l’identité nationale » ou prétendez lancer un débat sur l’identité nationale ? Qu’avez-vous fait d’autre tout au long de la campagne pour l’élection présidentielle ? Avant chaque échéance électorale nationale, comme pour les élections régionales à venir, vous brandissez une loi sur l’immigration ou sur la sécurité qui s’ajoute à tant d’autres ! Et vous venez nous dire que nous sommes les otages de l’extrême gauche !
M. Gérard Longuet. Eh oui ! C’est la vérité !
M. David Assouline. Quoi qu’il en soit, cette extrême gauche n’est absolument pas antirépublicaine ! En revanche, vous, vous chassez parfois sur les terres de gens qui refusent de se situer dans le cadre de la République ! (Protestations sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. C’est Mitterrand qui a relancé le Front national !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. David Assouline. J’en termine, monsieur le président.
La discussion que nous voulons ouvrir devant le peuple français doit porter non sur la privatisation en général, mais sur une question très simple : l’EPIC peut-il garantir la présence territoriale de La Poste et l’État peut-il abonder régulièrement son budget par des crédits dédiés aux missions de service public ?
M. Jackie Pierre. Temps de parole dépassé de trois minutes !
M. David Assouline. Oui, face aux défis de la mondialisation, nous apportons des réponses concrètes, car votre pente naturelle, quelle que soit la volonté que vous exprimez en cet instant dans cet hémicycle, mènera forcément à une privatisation rampante !
M. le président. Monsieur Assouline, il vous faut vraiment conclure !
M. David Assouline. Je terminerai donc d’une phrase : monsieur Hérisson, je ne vois pas pourquoi vous avez un problème avec l’EPIC !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Mais parce que je m’appelle Hérisson ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur le président, monsieur le président de la commission de l’économie, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais rassurer M. Assouline : le rapporteur n’a aucun problème avec l’EPIC, pas plus qu’aucun d’entre nous !
Le seul véritable problème tient au statut actuel de La Poste. Nous sommes tous attachés à La Poste – je veux croire que cette conviction est partagée sur toutes ces travées – et n’avons plus une minute à perdre si nous voulons lui donner sa chance au 1er janvier 2011 ; or l’EPIC ne nous le permet pas ! (C’est faux ! sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Je l’ai dit à plusieurs reprises et je le répète : La Poste réclame des moyens. Comment lui donner ces moyens sans réformer son statut, alors qu’elle a elle-même consenti un effort d’investissement considérable ces dernières années…
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Six milliards d’euros !
M. Christian Estrosi, ministre. … pour améliorer la qualité de son service public, ce qui la place d’ailleurs dans une situation difficile, avec six milliards d’euros de dettes et une baisse de son activité traditionnelle que la montée en puissance d’Internet ne réussira pas à enrayer, bien au contraire ? Nous préférons approuver la réforme du statut, pour donner à La Poste ces moyens et cette chance, tout en conservant son caractère public.
Je ne reviendrai donc plus sur cette question. Comme je l’ai dit hier, je ne parlerai plus du tout, dans ce débat, de privatisation, puisque ce problème a été réglé. Je réutilise, à dessein, le néologisme « imprivatisable », parce que toutes les dispositions ont été prises pour qu’il en soit ainsi !
J’aurais compris, à la limite, que vous déposiez cette motion référendaire pour demander aux Françaises et aux Français leur conception de l’avenir de La Poste. Après tout, pourquoi ne pas en débattre ?
M. David Assouline. Faites-le donc !
M. Jean-Pierre Bel. C’est vous qui déciderez de la question !
M. Christian Estrosi, ministre. Il ne s’agirait plus de savoir quel statut protégerait au mieux son caractère public, car la question ne se pose plus : ce caractère public est garanti ! Mais comment envisager l’avenir de La Poste quand on y est attaché, comme chacune et chacun d’entre nous, avec nos expériences partagées ?
Mme Mireille Schurch. Posez donc la bonne question !
M. Christian Estrosi, ministre. Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, on n’est ministre qu’un temps : je l’ai été, je ne l’ai plus été, je le suis, je ne le serai plus… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Mais j’ai un enracinement local.
Pour répondre aux reproches adressés par certains à ceux qui siègent sur les travées de l’UMP, en prédisant à ces derniers des réactions négatives dans leur village et dans leur canton, je peux affirmer que tous ceux que je vois ici bénéficient depuis longtemps de la confiance renouvelée de leurs électeurs dans les territoires ruraux les plus éloignés de ce pays, et que cet enracinement leur permettra d’obtenir longtemps encore la confiance de leurs administrés, parce qu’ils ont toujours été fidèles au rendez-vous pour défendre cette notion de service public à laquelle nous sommes si attachés.
Mme Michelle Demessine. La langue de bois…
M. Christian Estrosi, ministre. Pour avoir inauguré, en tant que ministre de l’outre-mer, des bureaux de poste à Saint-Georges de l’Oyapock au fin fond de l’Amazonie, au bord du Maroni, à la frontière du Surinam ou du Brésil, je sais ce que signifient la présence d’un facteur et un bureau de poste pour nos concitoyens les plus éloignés – j’aurais pu également citer les îles Marquise ou Wallis-et-Futuna. Mais eux aussi, qui comptent parmi les plus éloignés des plus éloignés de nos concitoyens, à 26 000 kilomètres de Paris, attendent que nous donnions à La Poste les moyens de faire face, en métropole ou sur nos trois océans, à la concurrence qu’elle devra affronter demain ! Tel est bien le sujet de ce débat.
Je regrette donc l’attitude de l’opposition, qui s’est concentrée sur une seule et même question, la privatisation, alors que ce débat est évacué (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. –M. Jackie Pierre applaudit.), au lieu de se tourner vers l’avenir !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous refusez de nous entendre !
M. Christian Estrosi, ministre. Pourquoi cette motion référendaire se concentre-t-elle uniquement sur la question de la privatisation ? L’explication est simple, et un certain nombre d’entre vous, notamment Gérard Longuet, l’ont d’ailleurs déjà donnée.
Premièrement, dans le prolongement de l’attitude adoptée lors des deux premières journées consacrées à ce projet de loi, l’opposition utilise cette motion pour conforter sa démarche d’obstruction (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les citoyens apprécieront !
M. Guy Fischer. Nous prolongeons la votation citoyenne !
M. Christian Estrosi, ministre. … afin que la discussion n’aille pas plus vite ni plus loin sur le vrai sujet qui devrait être au cœur de notre débat : la modernisation de La Poste ! Les auteurs de cette motion effectuent une manœuvre d’obstruction supplémentaire pour « pourrir la semaine », comme ils l’ont annoncé dès dimanche dernier ! Telle était bien leur intention : cette motion était un outil de plus pour « pourrir » le débat parlementaire ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. –Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Deuxièmement, c’est devenu depuis quelque temps une habitude de la gauche, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, faute d’idée et de projet,…
M. Gérard Cornu. Eh oui !
M. Christian Estrosi, ministre. … elle propose un référendum ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Vous êtes aujourd'hui les représentants d’une frange de la représentation parlementaire sans idée ni projet. (M. Roland Courteau s’exclame.) On n’a pas d’idée, alors, on propose un référendum !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les citoyens apprécieront !
M. Christian Estrosi, ministre. Eh bien, moi, je dis que La Poste mérite mieux que cette fuite en avant qui est la vôtre !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est une fuite en arrière !
M. Guy Fischer. On en reparlera, de votre projet !
M. Christian Estrosi, ministre. C’est une simple fuite en avant que de proposer systématiquement, faute d’idée, d’organiser un référendum !
En réalité, comme d’autres l’ont dit ici, notamment Gérard Longuet qui s’est exprimé de manière remarquable, aujourd'hui, nous voyons bien que la gauche n’a plus de repère, que la gauche ne sait plus où elle se situe (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez les repères de l’argent, et la gauche a les repères du service public !
M. Christian Estrosi, ministre. … que la gauche essaie de rattraper une extrême gauche qui ne cesse de la déborder. Je le dis aux représentants du groupe socialiste ici présents : vous devriez être plus prudents et faire attention, parce qu’un facteur à vélo ira toujours plus vite qu’un parti socialiste en panne ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. –Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Telle est la réalité !
M. Guy Fischer. C’est vraiment le degré zéro du débat !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les citoyens apprécieront, même ceux qui vont à pied !
M. Martial Bourquin. Je vous donne zéro !
M. le président. Laissez le ministre terminer !
M. Daniel Raoul. Il révèle sa vraie nature !
M. Christian Estrosi, ministre. … vous avez, à de nombreuses reprises, évoqué le référendum d’initiative populaire. Vous avez sous-entendu que, si le Gouvernement ne prenait pas les dispositions pour faire voter la loi organique nécessaire, c’est parce que nous ne souhaitions pas permettre l’organisation de ce référendum dans les délais les plus rapprochés possible.
Eh bien, je vais vous apporter un certain nombre de réponses et de précisions, y compris en termes de calendrier !
M. Daniel Raoul. Cela nous changera !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça, c’est bien !
M. Daniel Raoul. Où est-elle, la majorité ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Dans les urnes !
M. Christian Estrosi, ministre. … pressés, depuis tant d’années, notamment par la gauche, d’inscrire dans la Constitution la possibilité d’organiser un référendum d’initiative populaire, que d’avoir, au mois de juillet dernier, fait inscrire dans la Constitution la possibilité d’organiser des référendums d’initiative parlementaire et populaire. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. David Assouline. Non ! Il n’y a pas de loi organique !
M. Christian Estrosi, ministre. Et nous n’avons pas traîné ! (Oh ! sur les travées du groupe socialiste.) Encore fallait-il se donner les moyens de l’organiser dans les délais les plus rapprochés possible. Mais il y a des aspects techniques à travailler, sur lesquels nous nous sommes penchés. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Roland Courteau. C’est tiré par les cheveux ! En fait, vous jouez la montre !
M. Christian Estrosi, ministre. Je vous annonce à cette occasion que sera déposé devant le Parlement, avant la fin de l’année, le projet de loi organique permettant d’organiser un référendum d’initiative parlementaire et populaire. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait avant ? Pour faire passer cette loi sur La Poste !
M. Christian Estrosi, ministre. Mais je me dois d’en rappeler les règles : il s’agit d’un référendum d’initiative parlementaire et populaire.
M. David Assouline. Je l’ai dit !
M. Christian Estrosi, ministre. Le préalable, c’est qu’un cinquième des parlementaires rédige une proposition de loi.
M. Martial Bourquin. C’est le cas !
M. Christian Estrosi, ministre. Après quoi, celle-ci doit recueillir la signature d’un dixième du corps électoral de notre pays,…
M. Martial Bourquin. C’est fait !
M. Christian Estrosi, ministre. … c'est-à-dire environ 4,5 millions de Français.
Un référendum d’initiative parlementaire et populaire peut être utilisé dans deux hypothèses.
M. David Assouline. Je l’ai dit !
M. Christian Estrosi, ministre. Premièrement, il peut s’agir de proposer un texte pour le cas où le Gouvernement aurait décidé de ne pas légiférer sur un sujet. Ce n’est clairement pas le cas aujourd’hui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est la raison pour laquelle il faut utiliser l’article 11 actuel de la Constitution !
M. Roland Courteau. Rendez-vous dans un an !
M. Christian Estrosi, ministre. … un texte dont nos concitoyens considéreraient qu’il n’aurait pas atteint ses objectifs ou ne donnerait pas satisfaction. Eh bien, c’est simple ! Après tout, comme d’autres l’ont dit, les parlementaires ont la légitimité, au nom du peuple, pour voter la loi, et ils vont le faire.
Supposons que, dans un an, un cinquième des parlementaires considèrent que cette loi n’a pas atteint les objectifs attendus de la population : il leur appartiendra de rédiger un texte visant à abroger celui qui vous est aujourd’hui soumis.
M. Gérard Longuet. Il n’y a pas de problème !
M. Christian Estrosi, ministre. Supposons que ce nouveau texte recueille l’approbation de 4,5 millions de Français considérant que les 2,7 milliards d'euros injectés en vue de moderniser le service postal ne donnent pas satisfaction et qu’il vaut mieux en revenir à la situation antérieure. À ce moment-là, puisque la loi organique sera déposée devant le Parlement dès le mois de décembre, vous aurez tout le loisir d’utiliser le référendum d’initiative parlementaire et populaire !
Soyez des démocrates ! Acceptez que nous mettions en œuvre cette réforme ! Demandez aux Françaises et aux Français, dans un an, de se prononcer et de dire si, selon eux, cette loi a porté ses fruits et a permis à La Poste d’être une grande entreprise, prête à l’ouverture de la concurrence au 1er janvier 2011 !
Permettez-moi, à cet égard, de citer Arnaud Montebourg…
M. Jean-Pierre Bel. On va vous citer Henri Guaino !
M. Christian Estrosi, ministre. … lors du débat constitutionnel : « Nous avons suggéré que la proposition de loi soumise à un référendum d’initiative populaire ne puisse avoir exclusivement pour objet l’abrogation d’une disposition sans contenir aussi une contre-proposition constructive. »
Alors, je dis : « chiche » à ceux qui proposent aujourd'hui un référendum pour masquer le fait qu’ils n’ont pas de projet alternatif sur La Poste ! À eux de réunir les signatures pour demander d’abroger le texte de loi dans un an !
Mais, comme l’a rappelé M. Montebourg lui-même, s’ils arrivent avec une contre-proposition constructive, ce sera encore mieux !
Je le dis très clairement : désormais, il s’agit d’avancer, il s’agit de donner sa chance à La Poste. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) Il s’agit de permettre à La Poste de devenir demain cette grande entreprise européenne de logistique grâce aux TGV, aux avions,…
M. Guy Fischer. Les avions, vous allez les supprimer !
M. Christian Estrosi, ministre. … aux moyens d’aménagement du territoire que nous allons mettre à sa disposition pour renforcer sa présence dans les territoires. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Nous avons la volonté de faire de La Poste l’entreprise la plus concurrentielle qui soit dans le domaine des communications électroniques. Nous avons conscience de la nécessité de rendre encore plus performante la Banque postale, qui s’adresse déjà aux personnes les plus vulnérables de notre pays.
Il est désormais temps de passer à la seule partie du débat qu’attendent en réalité les Françaises et les Français et de délaisser la manœuvre de diversion que constitue le faux prétexte de la privatisation. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Exactement !
M. Christian Estrosi, ministre. Voilà pourquoi le Gouvernement appelle le Sénat à rejeter cette motion référendaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. –Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Explications de vote
M. le président. Avant de mettre aux voix la motion tendant à proposer au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, je donne la parole à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous assistons à quelque chose d’assez curieux, voire de surréaliste !
La majorité nous dit – et elle est dans son rôle – que ce projet de loi est excellent. En même temps, tous muscles tendus, elle est arc-boutée pour refuser de façon systématique le référendum. Si elle était tellement certaine de l’excellence de ce projet de loi, sachant comme les Français sont avisés, elle accepterait de grand cœur ce référendum, car elle réussirait un coup politique extraordinaire : elle gagnerait un référendum initié par l’opposition ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC-SPG.)
M. Jean Desessard. Bravo !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Cela n’arrive qu’à Lourdes !
M. François Fortassin. Mais en réalité, elle craint, à l’évidence, le résultat. Et au-delà du résultat, ce qui serait extraordinaire, c’est qu’elle pourrait lancer à l’adresse de nos concitoyens une campagne reposant sur un slogan très simple : « Pour sauver La Poste, utilisez ses services ! »
Mais vous n’allez pas jusqu’au bout de cette logique !
De même, vous savez très bien que votre projet comporte une lacune fondamentale : aujourd’hui, l’ensemble des salariés de La Poste font très bien leur travail, mais ils attendent l’usager. Or, pour être prêts à l’ouverture à la concurrence, ils ont besoin d’une formation que vous n’êtes actuellement pas en mesure de leur proposer !
C’est donc l’existence même de votre projet qui est en péril. Dès lors, quel que ce soit le gouvernement en place – et je ne mets pas en doute votre sincérité intellectuelle –, dès l’instant que la situation ne sera pas aussi favorable qu’on le voudra, on ira immanquablement vers une privatisation. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean Desessard. Absolument !
M. François Fortassin. Et cela, vous le savez !
J’ai apprécié les arguments très charpentés avancés par le rapporteur et par Bruno Retailleau, même si je ne partage pas les points de vue de ces derniers. En revanche, monsieur le ministre, monsieur Longuet, vos attaques contre l’opposition et contre les 2 millions de citoyens qui se sont déplacés, sans la moindre épée dans les reins, témoignent d’une argumentation relativement invertébrée. (Mmes Raymonde Le Texier et Gisèle Printz applaudissent.)
Nous voterons bien entendu dans le sens développé par le président de notre groupe, Yvon Collin. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)