compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Romani
vice-président
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux,
M. Jean-Noël Guérini.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Démissions de membres de commissions et candidatures
M. le président. M. le président du Sénat a reçu avis de la démission :
- de M. Jean Boyer comme membre de la commission des affaires sociales ;
- et de M. Adrien Giraud comme membre de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
3
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse. Je demande à chacun des orateurs de bien vouloir respecter ce temps de parole.
enseignement agricole
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le ministre, l’enseignement agricole public est une voie de réussite, comme en attestent les taux de succès aux examens et les statistiques de l’insertion professionnelle. Il offre d’excellents résultats pour la remédiation des élèves en situation d’échec ; c’est un atout précieux quand on prétend lutter contre les inégalités !
Sa force, sa qualité reposent sur ses spécificités pédagogiques, en lien avec les territoires. C’est une clef fort utile à l’heure où l’on doit agir pour un développement durable.
Pourtant, du fait d’une insécurité budgétaire insupportable, cet enseignement se trouve aujourd'hui en état de choc.
Arbitrages et pratiques budgétaires successifs ont instauré la pénurie, du fait des suppressions de postes et d’une sous-évaluation dramatique du plafond des emplois, tant administratifs qu’enseignants.
Le non-remplacement de deux départs à la retraite sur trois parmi les personnels de l’administration fait craindre aux équipes un véritable abandon administratif des établissements. Ceux-ci, qui perdent des classes, voient leurs dotations globales horaires baisser dramatiquement et leurs spécificités pédagogiques être sacrifiées.
Pour les familles et leurs enfants, c’est la disparition de filières complètes, la suppression des options facultatives, y compris en cours de formation, et le refus de nombreux élèves.
L’état des lieux est donc consternant. Monsieur le ministre, vous avez vous-même parlé à ce sujet, lundi dernier, devant l’intersyndicale de l’enseignement agricole public, de « négligence politique ».
L’inquiétude de la communauté éducative agricole est extrême. Elle se manifeste, depuis le mois septembre dernier, par un mouvement de rétention administrative des notes, suivi par la moitié des établissements publics. Ces jours derniers, devant la surdité du Gouvernement, elle se traduit aussi – fait inédit ! – par des blocages de centres de correction des examens.
La question posée est celle de la survie du service public de l’éducation et de l’égalité entre les élèves. Le Sénat avait pris des engagements. Dans l’enseignement public, ils n’ont pas été respectés !
Le compte n’y est donc pas, et vous le savez, monsieur le ministre ; sinon, pourquoi injecter 90 000 heures supplémentaires, qui, d’ailleurs, ne sont toujours pas ventilées ? C’est du vrai bricolage !
L’enseignement agricole public a besoin de moyens pérennes, donc de véritables emplois.
Quelles mesures comptez-vous adopter ? Vous avez pris des engagements devant l’intersyndicale, mais quelles sont vos marges de manœuvre avec un budget pour 2010 qui prévoirait plus de 700 suppressions de postes, dans un ministère ou l’enseignement agricole représente 46 % des effectifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Madame la sénatrice, je partage pleinement votre appréciation sur le rôle de l’enseignement public agricole, qui est de grande qualité …
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Bruno Le Maire, ministre. … et qui a obtenu des résultats tout à fait remarquables l’année dernière.
En effet, pour ne citer que cet exemple, le taux de réussite au baccalauréat s’est élevé, dans cette filière, à 89 %. Surtout, le taux d’entrée dans la vie professionnelle, qui est encore plus important à mes yeux, était supérieur à 80 %, ce qui signifie que presque tous les élèves qui passent par l’enseignement public agricole trouvent un emploi à l’issue de cette formation.
Comme j’ai eu l’occasion de le préciser aux membres de l’intersyndicale, mon intention est donc de tout faire pour garantir l’identité et la force de l’enseignement public agricole dans les années à venir.
Dans cette perspective, j’ai reçu en une semaine l’ensemble des syndicats représentatifs de cette filière, pour faire avec eux le point sur la situation actuelle.
J’ai constaté – j’ai déjà employé le mot et je le répète aujourd'hui devant le Sénat – un désarroi de la profession, qu’il s’agisse des enseignants ou du corps administratif, et je souhaite y répondre de la manière la plus concrète possible.
J’ai donc proposé à l’ensemble des acteurs concernés de nous retrouver au début du mois d’octobre prochain pour des assises de l’enseignement public agricole.
M. Charles Revet. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. En effet, il faut à présent mettre les choses à plat, sereinement, et évaluer les missions de l’enseignement public agricole. Qu’attendons-nous de lui ? Quels objectifs de long terme pouvons-nous lui assigner ? C’est grâce à cette confrontation entre les missions et les objectifs de la filière que nous pourrons déterminer les moyens nécessaires à son bon fonctionnement.
Voilà le plan de campagne que je me suis tracé. Je souhaite que l’identité de cet enseignement soit préservée, que sa qualité soit maintenue, au service de tous ses élèves, conformément à sa vocation fondamentale, et aussi que sa fonction d’aménagement du territoire, qui lui a été reconnue de longue date, soit garantie.
Bien entendu, dans tous les travaux de réflexion qui seront menés à cet égard, je ne manquerai pas de m’appuyer sur les études tout à fait remarquables qui ont été réalisées par la Haute Assemblée, qu’il s’agisse de l’examen du budget de l’enseignement public agricole par la commission de la culture du Sénat, dont vous faites d'ailleurs partie, madame Gonthier-Maurin, des rapports de grande valeur rédigés sur ce sujet par M. Longuet (Applaudissements sur les travées de l’UMP) ou des travaux de votre collègue Mme Françoise Férat, qui m’ont été signalés et dont j’ai commencé à prendre connaissance avec le plus vif intérêt.
En joignant nos efforts pour œuvrer dans cette direction, nous garantirons un enseignement public agricole de qualité, qui préserve son identité et qui dispose des moyens nécessaires à son bon fonctionnement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Guy Fischer et Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Et les suppressions de postes ?
prix de l'électricité
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Madame la ministre, j’imagine que vous avez été aussi surprise que nous, les parlementaires, par l’annonce du président d’EDF, qui souhaite augmenter ses tarifs d’électricité de 20 %.
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
M. David Assouline. C’est un sale coup !
M. Ladislas Poniatowski. Bien sûr, cette hausse ne serait pas brutale puisqu’il vous est demandé de l’étaler sur trois ou quatre ans. Toutefois, dans la conjoncture qui est la nôtre, même une augmentation de 4 % par an des tarifs d’électricité serait durement vécue par un grand nombre de familles.
Ce qui a surpris, et même choqué, c’est le moment où a été formulée cette demande, c'est-à-dire quelques jours après le succès qu’a remporté l’emprunt obligataire lancé par EDF auprès des particuliers.
M. Didier Boulaud. C’est de la provocation !
M. Ladislas Poniatowski. La réussite de cette opération est incontestable : le président d’EDF, qui escomptait un milliard d'euros, en a obtenu 3,2 milliards, ce qui montre au passage que les Français ont une bonne image de cette entreprise et lui accordent leur confiance.
M. Guy Fischer. C’est le pillage de l’épargne populaire ! C’est du racket !
M. Paul Raoult. Les Français ne seront pas payés de retour…
M. Ladislas Poniatowski. Que nous demande aujourd'hui le président d’EDF ? Lorsqu’il a été entendu il y a quelques jours par le groupe d’études de l’énergie du Sénat, en présence du président Gérard Larcher, il a souligné trois points : tout d'abord, qu’EDF est lourdement endettée ; ensuite, que l’électricité est, en France, de 30 % à 40 % moins chère que dans les autres pays européens, et il a ainsi laissé entendre qu’il existait une marge de manœuvre ; enfin, que d’importants investissements sont nécessaires puisqu’il faut à la fois prolonger la durée de vie des centrales et en construire de nouvelles.
Conclusion du président d’EDF : « Je souhaite une augmentation des tarifs de l’électricité ».
Madame la ministre, ma question sera triple.
Premièrement, avez-vous été informée au préalable de cette demande ?
Deuxièmement, avez-vous l’intention d’y répondre favorablement, sinon à hauteur de ce qui vous est demandé, du moins d’une manière moins brutale, c'est-à-dire plus supportable pour le portefeuille des Français ?
Troisièmement, les sénateurs du groupe UMP, au nom desquels je m’exprime, souhaitent que soit lancé un débat national. En effet, nous voulons savoir si les Français sont prêts à accepter une hausse des tarifs pour répondre aux différents besoins en matière énergétique, c'est-à-dire renouveler les centrales nucléaires et en construire de nouvelles, moderniser les réseaux de transport et de distribution d’électricité,…
M. Paul Raoult. Ils sont bien défaillants, ces réseaux !
M. Ladislas Poniatowski. … accélérer le développement des énergies renouvelables, qu’il s’agisse de l’hydraulique, de la biomasse, de l’éolien ou du photovoltaïque,…
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Ladislas Poniatowski. … enfin développer ce que j’appellerai les « autres besoins », notamment la construction des ports méthaniers qui sont nécessaires à la France, avec des installations permettant de regazéifier le gaz liquéfié. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Hervé Maurey applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, particulièrement d’actualité compte tenu de l’annonce dont nous avons tous pris connaissance avec beaucoup de surprise et par voie de presse, ce qui ne me satisfait guère, non plus que le ministre chargé de l’industrie, Christian Estrosi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. Ils ne maîtrisent plus rien !
M. David Assouline. À l’Élysée, ils devaient savoir…
Mme Christine Lagarde, ministre. J’en profite pour rappeler que la variation des tarifs d’électricité résulte d’une décision conjointe du ministre de l’économie et du ministre chargé de l’énergie, après avis de la commission de régulation de l’énergie. Or celle-ci n’a pas été saisie d’une demande du Gouvernement concernant une quelconque augmentation des tarifs. (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Pierre Sueur. On est donc en pleine anarchie !
M. Jacques Mahéas. C’est le grand bazar !
M. Paul Raoult. C’est le renard libre dans le poulailler libre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Quant au fond, vous avez très bien posé les termes du débat, monsieur le sénateur.
Les tarifs de l’électricité dont bénéficient les consommateurs français sont effectivement, aujourd'hui, inférieurs de 15 % à 30 % à ceux qui sont pratiqués dans les autres pays d’Europe. Pourquoi cet écart ? Tout simplement parce que les consommateurs français bénéficient, et c’est légitime, de l’avance de compétitivité que la France a acquise grâce à des investissements massifs dans son parc électronucléaire, en particulier pendant les années 1980. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Jean Bizet. Il ne faut pas l’oublier !
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement entend qu’ils continuent de profiter de cette avance, dans le respect du partage des gains de compétitivité résultant des investissements massifs de cette époque.
Cela étant, et vous avez eu raison de le souligner, monsieur le sénateur, EDF devra réaliser des investissements importants pour répondre aux exigences du Grenelle de l’environnement, notamment en développant des énergies renouvelables, mais aussi pour investir dans le parc électronucléaire, dont il convient d’allonger la durée de vie dans des conditions de sureté absolue. (Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jacques Mahéas. Répondez plutôt à la question !
M. David Assouline. Vous ne respectez pas votre temps de parole, madame la ministre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Comment financer ces investissements ? Nous pouvons envisager des hausses tarifaires, certes, mais je crois bien préférable de dégager des gains de productivité internes à l’entreprise. C’est d'ailleurs déjà, me semble-t-il, une priorité pour la direction d’EDF, à laquelle Christian Estrosi et moi-même demanderons de persévérer dans cette voie.
M. Guy Fischer. C'est-à-dire des suppressions d’emplois !
Mme Christine Lagarde, ministre. Les gains de productivité ne se traduisent pas nécessairement par des suppressions d’emplois ; ils passent aussi par une meilleure organisation du cycle de production.
Le rapport Champsaur, à la rédaction duquel vous avez participé, monsieur Poniatowski, avec le talent que l’on sait,…
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. … a d'ailleurs souligné que ces investissements devaient être réalisés grâce à des gains de productivité, et nous aurons l’occasion de le rappeler.
Tout cela s’inscrit dans une politique parfaitement claire (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.),…
M. Didier Boulaud. Pour être clair, c’est clair ! En fait, c’est plutôt un clair-obscur !
Mme Christine Lagarde, ministre. … qui consiste, d'une part, à faire en sorte que les consommateurs les moins privilégiés bénéficient de tarifs sociaux particuliers et, d'autre part, à garantir la clarté et la vérité des prix. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. Didier Boulaud. « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
emploi des jeunes
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre.
Nous connaissons depuis mardi les résultats du baccalauréat : le taux de réussite, avant les oraux de rattrapage, est de 78 % cette année, soit trois points de mieux que l’an dernier ; on ne peut que s’en réjouir.
Ces chiffres sont pourtant à relativiser car, après le bac, commence un parcours vers l’emploi semé d’embûches.
M. Paul Raoult. C’est vrai !
Mme Françoise Laborde. Il convient d’abord de rappeler que plus de 150 000 des jeunes âgés de seize à vingt-quatre ans sortent chaque année du système scolaire sans diplôme. En outre, on annonce d'ores et déjà pour 2009 un taux de chômage de 20 % chez les jeunes. Quant à ceux qui ont un travail, ils occupent trop souvent des emplois précaires, 49 % d’entre eux ne bénéficiant que de contrats à durée déterminée ou à temps partiel.
La pilule est amère pour ces jeunes, qu’ils soient diplômés ou moins qualifiés, apprentis ou étudiants. Ils s’investissent et s’impliquent, pour se retrouver finalement sur un marché de l’emploi en pleine dépression. Cette situation est très alarmante.
Dans son Livre vert qui vient d’être rendu public, M. le haut-commissaire à la jeunesse tente de trouver des solutions. Ses propositions, enrichies des travaux de la commission du Sénat sur la politique en faveur des jeunes, sont pleines de bonnes intentions : interdiction des stages hors cursus, lutte contre la précarité des contrats, revalorisation de l’enseignement professionnel, recherche d’une meilleure orientation professionnelle.
Ces préconisations vont dans le bon sens, mais ne répondent pas à la question des moyens alloués, ni à celle de la création d’emplois.
J’ouvre une parenthèse pour regretter que, dans ce contexte de paupérisation, le RSA ne puisse s’appliquer ni aux moins de vingt-cinq ans ni aux jeunes chômeurs n’ayant jamais travaillé auparavant.
M. Paul Raoult. C’est vrai !
M. Yvon Collin. Hélas !
Mme Françoise Laborde. J’ajoute que le premier bilan qui peut être dressé de son application est pour le moins décevant.
Quelles mesures d’urgence le Gouvernement entend-il prendre pour les milliers de jeunes qui rechercheront un emploi en septembre prochain ?
M. Bernard Frimat. Aucune !
Mme Françoise Laborde. Pourquoi ne demanderait-on pas à Pôle emploi de traiter en priorité le cas des plus jeunes chômeurs ?
Enfin, pourquoi les jeunes de notre pays devraient-ils continuer à payer au prix fort les effets de la crise auxquels la politique du Gouvernement n’apporte pas de réponse ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Bel. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Madame la sénatrice, nous savons tous que le problème de l’emploi des jeunes de moins de vingt-cinq ans ne date pas de la crise.
M. Jacques Mahéas. Mais c’est de pire en pire !
M. Christian Estrosi, ministre. Cependant, il est indéniable que les jeunes sont les premières victimes de la crise : en un an, le chômage des jeunes a augmenté de plus de 35 %.
Face à cette situation, nous ne pouvons pas nous contenter de mesures ponctuelles : nous devons prendre des mesures à long terme.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà une fameuse découverte ! Il serait temps de les prendre, ces mesures !
M. Didier Boulaud. Cela fera bientôt huit ans que la droite gouverne !
M. Christian Estrosi, ministre. C’est dans cet esprit que, le 25 avril dernier, le Président de la République a proposé un plan contre le chômage des jeunes, qui fait une large place à la formation en alternance.
L’alternance est, comme vous le savez, un véritable passeport pour l’emploi.
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Christian Estrosi, ministre. Ensuite, nous devons veiller à encadrer la première expérience professionnelle.
C’est pourquoi nous avons décidé d’ouvrir, pour les collectivités locales, 30 000 contrats d’accompagnement vers l’emploi, ou CAE- passerelles, contrats qui seront, je tiens à le rappeler, financés à 90 % par l’État.
M. Jacques Mahéas. Cela ne marche pas !
M. Christian Estrosi, ministre. Je salue, d’ailleurs, l’ensemble des collectivités qui se sont engagées dans de tels contrats.
D’un point de vue stratégique, nous nous efforçons de cibler des compétences susceptibles d’être recherchées dans le secteur privé : comptabilité, informatique, communication, etc. À cet effet, sous l’impulsion de Mme Christine Lagarde, de manière à mobiliser toutes les énergies, M. Laurent Wauquiez a entrepris un tour de France.
M. Didier Boulaud. Il a bien choisi son moment ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Christian Estrosi, ministre. Mais nous devons aussi tracer des perspectives à moyen terme.
À cet égard, M. Martin Hirsch vient de présenter un Livre vert contenant cinquante-quatre propositions issues d’une véritable concertation. Il nous faut maintenant engager auprès de tous les partenaires une vaste consultation nationale sur ces propositions.
Alors que la crise est à son paroxysme, l’État ne peut pas tout : chacun, ici, en est certainement conscient. Collectivités et partenaires sociaux doivent se mobiliser.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça, on l’a déjà entendu !
M. Christian Estrosi, ministre. En tout cas, j’en suis convaincu, sur toutes les travées de cet hémicycle, chacun est prêt à relever ce défi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur quelques travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Les Français subissent de plein fouet les conséquences de la crise économique mondiale, notamment en matière d’emploi. Vous n’en voudrez pas à la sénatrice de Normandie que je suis d’avoir une pensée pour les producteurs de lait, qui sont en ce moment si durement touchés.
M. Yvon Collin. Pas seulement en Normandie !
M. Paul Raoult. Ce sera encore pire quand il n’y aura plus de quotas !
M. Didier Boulaud. Parlez-en à M. Barnier !
Mme Nathalie Goulet. Dans ce contexte, nos concitoyens attendent des entreprises et de leurs dirigeants un comportement exemplaire en matière de rémunération. C’est à la fois une question de justice et de cohésion sociale.
Les dix patrons les mieux payés du CAC 40 gagnent entre 2,4 millions et 4,7 millions d’euros par an. Et de telles rémunérations concernent même des patrons d’entreprises ayant reçu des aides de l’État, voire du Fonds stratégique d’investissement.
Ce sujet a été maintes fois évoqué dans notre hémicycle.
Le Gouvernement a demandé aux entreprises de définir des règles du jeu. L’Association française des entreprises privées, l’AFEP, et le MEDEF se sont donné jusqu’au mois d’octobre pour arrêter un code de bonne conduite. L’Autorité des marchés financiers, l’AMF, a publié ce matin un rapport sur cette question. Il s’agit donc bien d’un point majeur de notre actualité économique et sociale.
C’est la raison pour laquelle, madame la ministre, je m’autorise à vous demander quelle est votre position sur cet important dossier de la rémunération des dirigeants et sur ce code de bonne conduite des dirigeants des entreprises françaises. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste.)
M. Yvon Collin. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Madame la sénatrice, vous avez raison : nous attendons tous des entreprises qu’elles se comportent de manière irréprochable en matière de rémunération des dirigeants.
J’ai demandé aux entreprises qu’elles se conforment au code AFEP-MEDEF que vous avez évoqué, code qui a été publié au début de l’année 2009, voilà donc tout juste six mois.
Pour être sûre que l’on pourrait mesurer les progrès accomplis, j’avais demandé à l’Autorité des marchés financiers de suivre la manière dont les entreprises respectaient ce code et de nous remettre un rapport : c’est chose faite depuis ce matin.
Dans ses conclusions, il est indiqué : en premier lieu, que la transparence, en matière de rémunération, est nettement meilleure depuis la mise en œuvre par les entreprises du code AFEP-MEDEF ; en deuxième lieu, que toutes les entreprises appliquent le code ; mais, en troisième lieu, qu’elles ne l’appliquent pas parfaitement.
Mme Nicole Bricq. Il faut faire une loi !
Mme Christine Lagarde, ministre. Sur un certain nombre de mesures – notamment le non-cumul entre un emploi salarié et un mandat social, le plafonnement des indemnités de départ, la mise en place du comité des rémunérations –, l’application est imparfaite et varie de 70 % à 88 %, selon les entreprises.
À la lecture de ces conclusions, j’ai immédiatement demandé à M. Jean-Pierre Jouyet, président de l’AMF, de prier chacune des entreprises qui n’appliquent pas aujourd’hui parfaitement le code de s’y soumettre.
J’ai également écrit à la présidente du MEDEF et au président de l’AFEP pour qu’ils enjoignent à leurs membres de se conformer au dispositif du code AFEP-MEDEF.
Enfin, j’ai demandé à M. Jean-Pierre Jouyet de me remettre un nouveau rapport dans six mois, de sorte que nous puissions apprécier les progrès qui auront été accomplis par les entreprises au regard du respect de ce code de bonne conduite. Je rappelle que la mise en œuvre du dispositif suppose évidemment qu’un certain nombre de conseils d’administration ou d’assemblées générales se tiennent.
Il me paraît prématuré, à ce stade, de faire une loi, pour la raison très simple qu’un code existe désormais, qu’il est en voie de mise en œuvre et que, dans six mois, nous serons en mesure de déterminer si, oui ou non, il a été appliqué. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Vous le disiez déjà l’année dernière !
M. Bernard Frimat. En octobre, vous direz encore que c’est prématuré !
Mme Christine Lagarde, ministre. S’il se révèle que tel n’a pas été le cas, il sera temps de décider si, par la voie législative, nous devons envisager d’autres dispositifs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean-Pierre Sueur. Il sera grand temps !