Sommaire
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Noël Guérini.
2. Démissions de membres de commissions et candidatures
3. Questions d'actualité au Gouvernement
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. Ladislas Poniatowski ; Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Françoise Laborde, M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.
rémunération des dirigeants des grandes entreprises
Mme Nathalie Goulet, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
tva à 5,5 % dans la restauration
M. Jean-Jacques Mirassou, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Jean-René Lecerf, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
effectifs de l'éducation nationale
MM. Yannick Bodin, Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
affaire des moines de tibéhirine
Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
MM. Jean-Luc Fichet, Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
MM. Laurent Béteille, Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
4. Cessation du mandat d'un sénateur élu au Parlement européen
5. Nomination de membres de commissions
6. Dépôt de documents parlementaires
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Romani
vice-président
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux,
M. Jean-Noël Guérini.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Démissions de membres de commissions et candidatures
M. le président. M. le président du Sénat a reçu avis de la démission :
- de M. Jean Boyer comme membre de la commission des affaires sociales ;
- et de M. Adrien Giraud comme membre de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
3
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse. Je demande à chacun des orateurs de bien vouloir respecter ce temps de parole.
enseignement agricole
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le ministre, l’enseignement agricole public est une voie de réussite, comme en attestent les taux de succès aux examens et les statistiques de l’insertion professionnelle. Il offre d’excellents résultats pour la remédiation des élèves en situation d’échec ; c’est un atout précieux quand on prétend lutter contre les inégalités !
Sa force, sa qualité reposent sur ses spécificités pédagogiques, en lien avec les territoires. C’est une clef fort utile à l’heure où l’on doit agir pour un développement durable.
Pourtant, du fait d’une insécurité budgétaire insupportable, cet enseignement se trouve aujourd'hui en état de choc.
Arbitrages et pratiques budgétaires successifs ont instauré la pénurie, du fait des suppressions de postes et d’une sous-évaluation dramatique du plafond des emplois, tant administratifs qu’enseignants.
Le non-remplacement de deux départs à la retraite sur trois parmi les personnels de l’administration fait craindre aux équipes un véritable abandon administratif des établissements. Ceux-ci, qui perdent des classes, voient leurs dotations globales horaires baisser dramatiquement et leurs spécificités pédagogiques être sacrifiées.
Pour les familles et leurs enfants, c’est la disparition de filières complètes, la suppression des options facultatives, y compris en cours de formation, et le refus de nombreux élèves.
L’état des lieux est donc consternant. Monsieur le ministre, vous avez vous-même parlé à ce sujet, lundi dernier, devant l’intersyndicale de l’enseignement agricole public, de « négligence politique ».
L’inquiétude de la communauté éducative agricole est extrême. Elle se manifeste, depuis le mois septembre dernier, par un mouvement de rétention administrative des notes, suivi par la moitié des établissements publics. Ces jours derniers, devant la surdité du Gouvernement, elle se traduit aussi – fait inédit ! – par des blocages de centres de correction des examens.
La question posée est celle de la survie du service public de l’éducation et de l’égalité entre les élèves. Le Sénat avait pris des engagements. Dans l’enseignement public, ils n’ont pas été respectés !
Le compte n’y est donc pas, et vous le savez, monsieur le ministre ; sinon, pourquoi injecter 90 000 heures supplémentaires, qui, d’ailleurs, ne sont toujours pas ventilées ? C’est du vrai bricolage !
L’enseignement agricole public a besoin de moyens pérennes, donc de véritables emplois.
Quelles mesures comptez-vous adopter ? Vous avez pris des engagements devant l’intersyndicale, mais quelles sont vos marges de manœuvre avec un budget pour 2010 qui prévoirait plus de 700 suppressions de postes, dans un ministère ou l’enseignement agricole représente 46 % des effectifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Madame la sénatrice, je partage pleinement votre appréciation sur le rôle de l’enseignement public agricole, qui est de grande qualité …
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Bruno Le Maire, ministre. … et qui a obtenu des résultats tout à fait remarquables l’année dernière.
En effet, pour ne citer que cet exemple, le taux de réussite au baccalauréat s’est élevé, dans cette filière, à 89 %. Surtout, le taux d’entrée dans la vie professionnelle, qui est encore plus important à mes yeux, était supérieur à 80 %, ce qui signifie que presque tous les élèves qui passent par l’enseignement public agricole trouvent un emploi à l’issue de cette formation.
Comme j’ai eu l’occasion de le préciser aux membres de l’intersyndicale, mon intention est donc de tout faire pour garantir l’identité et la force de l’enseignement public agricole dans les années à venir.
Dans cette perspective, j’ai reçu en une semaine l’ensemble des syndicats représentatifs de cette filière, pour faire avec eux le point sur la situation actuelle.
J’ai constaté – j’ai déjà employé le mot et je le répète aujourd'hui devant le Sénat – un désarroi de la profession, qu’il s’agisse des enseignants ou du corps administratif, et je souhaite y répondre de la manière la plus concrète possible.
J’ai donc proposé à l’ensemble des acteurs concernés de nous retrouver au début du mois d’octobre prochain pour des assises de l’enseignement public agricole.
M. Charles Revet. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. En effet, il faut à présent mettre les choses à plat, sereinement, et évaluer les missions de l’enseignement public agricole. Qu’attendons-nous de lui ? Quels objectifs de long terme pouvons-nous lui assigner ? C’est grâce à cette confrontation entre les missions et les objectifs de la filière que nous pourrons déterminer les moyens nécessaires à son bon fonctionnement.
Voilà le plan de campagne que je me suis tracé. Je souhaite que l’identité de cet enseignement soit préservée, que sa qualité soit maintenue, au service de tous ses élèves, conformément à sa vocation fondamentale, et aussi que sa fonction d’aménagement du territoire, qui lui a été reconnue de longue date, soit garantie.
Bien entendu, dans tous les travaux de réflexion qui seront menés à cet égard, je ne manquerai pas de m’appuyer sur les études tout à fait remarquables qui ont été réalisées par la Haute Assemblée, qu’il s’agisse de l’examen du budget de l’enseignement public agricole par la commission de la culture du Sénat, dont vous faites d'ailleurs partie, madame Gonthier-Maurin, des rapports de grande valeur rédigés sur ce sujet par M. Longuet (Applaudissements sur les travées de l’UMP) ou des travaux de votre collègue Mme Françoise Férat, qui m’ont été signalés et dont j’ai commencé à prendre connaissance avec le plus vif intérêt.
En joignant nos efforts pour œuvrer dans cette direction, nous garantirons un enseignement public agricole de qualité, qui préserve son identité et qui dispose des moyens nécessaires à son bon fonctionnement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Guy Fischer et Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Et les suppressions de postes ?
prix de l'électricité
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Madame la ministre, j’imagine que vous avez été aussi surprise que nous, les parlementaires, par l’annonce du président d’EDF, qui souhaite augmenter ses tarifs d’électricité de 20 %.
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
M. David Assouline. C’est un sale coup !
M. Ladislas Poniatowski. Bien sûr, cette hausse ne serait pas brutale puisqu’il vous est demandé de l’étaler sur trois ou quatre ans. Toutefois, dans la conjoncture qui est la nôtre, même une augmentation de 4 % par an des tarifs d’électricité serait durement vécue par un grand nombre de familles.
Ce qui a surpris, et même choqué, c’est le moment où a été formulée cette demande, c'est-à-dire quelques jours après le succès qu’a remporté l’emprunt obligataire lancé par EDF auprès des particuliers.
M. Didier Boulaud. C’est de la provocation !
M. Ladislas Poniatowski. La réussite de cette opération est incontestable : le président d’EDF, qui escomptait un milliard d'euros, en a obtenu 3,2 milliards, ce qui montre au passage que les Français ont une bonne image de cette entreprise et lui accordent leur confiance.
M. Guy Fischer. C’est le pillage de l’épargne populaire ! C’est du racket !
M. Paul Raoult. Les Français ne seront pas payés de retour…
M. Ladislas Poniatowski. Que nous demande aujourd'hui le président d’EDF ? Lorsqu’il a été entendu il y a quelques jours par le groupe d’études de l’énergie du Sénat, en présence du président Gérard Larcher, il a souligné trois points : tout d'abord, qu’EDF est lourdement endettée ; ensuite, que l’électricité est, en France, de 30 % à 40 % moins chère que dans les autres pays européens, et il a ainsi laissé entendre qu’il existait une marge de manœuvre ; enfin, que d’importants investissements sont nécessaires puisqu’il faut à la fois prolonger la durée de vie des centrales et en construire de nouvelles.
Conclusion du président d’EDF : « Je souhaite une augmentation des tarifs de l’électricité ».
Madame la ministre, ma question sera triple.
Premièrement, avez-vous été informée au préalable de cette demande ?
Deuxièmement, avez-vous l’intention d’y répondre favorablement, sinon à hauteur de ce qui vous est demandé, du moins d’une manière moins brutale, c'est-à-dire plus supportable pour le portefeuille des Français ?
Troisièmement, les sénateurs du groupe UMP, au nom desquels je m’exprime, souhaitent que soit lancé un débat national. En effet, nous voulons savoir si les Français sont prêts à accepter une hausse des tarifs pour répondre aux différents besoins en matière énergétique, c'est-à-dire renouveler les centrales nucléaires et en construire de nouvelles, moderniser les réseaux de transport et de distribution d’électricité,…
M. Paul Raoult. Ils sont bien défaillants, ces réseaux !
M. Ladislas Poniatowski. … accélérer le développement des énergies renouvelables, qu’il s’agisse de l’hydraulique, de la biomasse, de l’éolien ou du photovoltaïque,…
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Ladislas Poniatowski. … enfin développer ce que j’appellerai les « autres besoins », notamment la construction des ports méthaniers qui sont nécessaires à la France, avec des installations permettant de regazéifier le gaz liquéfié. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Hervé Maurey applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, particulièrement d’actualité compte tenu de l’annonce dont nous avons tous pris connaissance avec beaucoup de surprise et par voie de presse, ce qui ne me satisfait guère, non plus que le ministre chargé de l’industrie, Christian Estrosi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. Ils ne maîtrisent plus rien !
M. David Assouline. À l’Élysée, ils devaient savoir…
Mme Christine Lagarde, ministre. J’en profite pour rappeler que la variation des tarifs d’électricité résulte d’une décision conjointe du ministre de l’économie et du ministre chargé de l’énergie, après avis de la commission de régulation de l’énergie. Or celle-ci n’a pas été saisie d’une demande du Gouvernement concernant une quelconque augmentation des tarifs. (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Pierre Sueur. On est donc en pleine anarchie !
M. Jacques Mahéas. C’est le grand bazar !
M. Paul Raoult. C’est le renard libre dans le poulailler libre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Quant au fond, vous avez très bien posé les termes du débat, monsieur le sénateur.
Les tarifs de l’électricité dont bénéficient les consommateurs français sont effectivement, aujourd'hui, inférieurs de 15 % à 30 % à ceux qui sont pratiqués dans les autres pays d’Europe. Pourquoi cet écart ? Tout simplement parce que les consommateurs français bénéficient, et c’est légitime, de l’avance de compétitivité que la France a acquise grâce à des investissements massifs dans son parc électronucléaire, en particulier pendant les années 1980. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Jean Bizet. Il ne faut pas l’oublier !
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement entend qu’ils continuent de profiter de cette avance, dans le respect du partage des gains de compétitivité résultant des investissements massifs de cette époque.
Cela étant, et vous avez eu raison de le souligner, monsieur le sénateur, EDF devra réaliser des investissements importants pour répondre aux exigences du Grenelle de l’environnement, notamment en développant des énergies renouvelables, mais aussi pour investir dans le parc électronucléaire, dont il convient d’allonger la durée de vie dans des conditions de sureté absolue. (Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jacques Mahéas. Répondez plutôt à la question !
M. David Assouline. Vous ne respectez pas votre temps de parole, madame la ministre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Comment financer ces investissements ? Nous pouvons envisager des hausses tarifaires, certes, mais je crois bien préférable de dégager des gains de productivité internes à l’entreprise. C’est d'ailleurs déjà, me semble-t-il, une priorité pour la direction d’EDF, à laquelle Christian Estrosi et moi-même demanderons de persévérer dans cette voie.
M. Guy Fischer. C'est-à-dire des suppressions d’emplois !
Mme Christine Lagarde, ministre. Les gains de productivité ne se traduisent pas nécessairement par des suppressions d’emplois ; ils passent aussi par une meilleure organisation du cycle de production.
Le rapport Champsaur, à la rédaction duquel vous avez participé, monsieur Poniatowski, avec le talent que l’on sait,…
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. … a d'ailleurs souligné que ces investissements devaient être réalisés grâce à des gains de productivité, et nous aurons l’occasion de le rappeler.
Tout cela s’inscrit dans une politique parfaitement claire (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.),…
M. Didier Boulaud. Pour être clair, c’est clair ! En fait, c’est plutôt un clair-obscur !
Mme Christine Lagarde, ministre. … qui consiste, d'une part, à faire en sorte que les consommateurs les moins privilégiés bénéficient de tarifs sociaux particuliers et, d'autre part, à garantir la clarté et la vérité des prix. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. Didier Boulaud. « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
emploi des jeunes
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre.
Nous connaissons depuis mardi les résultats du baccalauréat : le taux de réussite, avant les oraux de rattrapage, est de 78 % cette année, soit trois points de mieux que l’an dernier ; on ne peut que s’en réjouir.
Ces chiffres sont pourtant à relativiser car, après le bac, commence un parcours vers l’emploi semé d’embûches.
M. Paul Raoult. C’est vrai !
Mme Françoise Laborde. Il convient d’abord de rappeler que plus de 150 000 des jeunes âgés de seize à vingt-quatre ans sortent chaque année du système scolaire sans diplôme. En outre, on annonce d'ores et déjà pour 2009 un taux de chômage de 20 % chez les jeunes. Quant à ceux qui ont un travail, ils occupent trop souvent des emplois précaires, 49 % d’entre eux ne bénéficiant que de contrats à durée déterminée ou à temps partiel.
La pilule est amère pour ces jeunes, qu’ils soient diplômés ou moins qualifiés, apprentis ou étudiants. Ils s’investissent et s’impliquent, pour se retrouver finalement sur un marché de l’emploi en pleine dépression. Cette situation est très alarmante.
Dans son Livre vert qui vient d’être rendu public, M. le haut-commissaire à la jeunesse tente de trouver des solutions. Ses propositions, enrichies des travaux de la commission du Sénat sur la politique en faveur des jeunes, sont pleines de bonnes intentions : interdiction des stages hors cursus, lutte contre la précarité des contrats, revalorisation de l’enseignement professionnel, recherche d’une meilleure orientation professionnelle.
Ces préconisations vont dans le bon sens, mais ne répondent pas à la question des moyens alloués, ni à celle de la création d’emplois.
J’ouvre une parenthèse pour regretter que, dans ce contexte de paupérisation, le RSA ne puisse s’appliquer ni aux moins de vingt-cinq ans ni aux jeunes chômeurs n’ayant jamais travaillé auparavant.
M. Paul Raoult. C’est vrai !
M. Yvon Collin. Hélas !
Mme Françoise Laborde. J’ajoute que le premier bilan qui peut être dressé de son application est pour le moins décevant.
Quelles mesures d’urgence le Gouvernement entend-il prendre pour les milliers de jeunes qui rechercheront un emploi en septembre prochain ?
M. Bernard Frimat. Aucune !
Mme Françoise Laborde. Pourquoi ne demanderait-on pas à Pôle emploi de traiter en priorité le cas des plus jeunes chômeurs ?
Enfin, pourquoi les jeunes de notre pays devraient-ils continuer à payer au prix fort les effets de la crise auxquels la politique du Gouvernement n’apporte pas de réponse ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Bel. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Madame la sénatrice, nous savons tous que le problème de l’emploi des jeunes de moins de vingt-cinq ans ne date pas de la crise.
M. Jacques Mahéas. Mais c’est de pire en pire !
M. Christian Estrosi, ministre. Cependant, il est indéniable que les jeunes sont les premières victimes de la crise : en un an, le chômage des jeunes a augmenté de plus de 35 %.
Face à cette situation, nous ne pouvons pas nous contenter de mesures ponctuelles : nous devons prendre des mesures à long terme.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà une fameuse découverte ! Il serait temps de les prendre, ces mesures !
M. Didier Boulaud. Cela fera bientôt huit ans que la droite gouverne !
M. Christian Estrosi, ministre. C’est dans cet esprit que, le 25 avril dernier, le Président de la République a proposé un plan contre le chômage des jeunes, qui fait une large place à la formation en alternance.
L’alternance est, comme vous le savez, un véritable passeport pour l’emploi.
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Christian Estrosi, ministre. Ensuite, nous devons veiller à encadrer la première expérience professionnelle.
C’est pourquoi nous avons décidé d’ouvrir, pour les collectivités locales, 30 000 contrats d’accompagnement vers l’emploi, ou CAE- passerelles, contrats qui seront, je tiens à le rappeler, financés à 90 % par l’État.
M. Jacques Mahéas. Cela ne marche pas !
M. Christian Estrosi, ministre. Je salue, d’ailleurs, l’ensemble des collectivités qui se sont engagées dans de tels contrats.
D’un point de vue stratégique, nous nous efforçons de cibler des compétences susceptibles d’être recherchées dans le secteur privé : comptabilité, informatique, communication, etc. À cet effet, sous l’impulsion de Mme Christine Lagarde, de manière à mobiliser toutes les énergies, M. Laurent Wauquiez a entrepris un tour de France.
M. Didier Boulaud. Il a bien choisi son moment ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Christian Estrosi, ministre. Mais nous devons aussi tracer des perspectives à moyen terme.
À cet égard, M. Martin Hirsch vient de présenter un Livre vert contenant cinquante-quatre propositions issues d’une véritable concertation. Il nous faut maintenant engager auprès de tous les partenaires une vaste consultation nationale sur ces propositions.
Alors que la crise est à son paroxysme, l’État ne peut pas tout : chacun, ici, en est certainement conscient. Collectivités et partenaires sociaux doivent se mobiliser.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça, on l’a déjà entendu !
M. Christian Estrosi, ministre. En tout cas, j’en suis convaincu, sur toutes les travées de cet hémicycle, chacun est prêt à relever ce défi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur quelques travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Les Français subissent de plein fouet les conséquences de la crise économique mondiale, notamment en matière d’emploi. Vous n’en voudrez pas à la sénatrice de Normandie que je suis d’avoir une pensée pour les producteurs de lait, qui sont en ce moment si durement touchés.
M. Yvon Collin. Pas seulement en Normandie !
M. Paul Raoult. Ce sera encore pire quand il n’y aura plus de quotas !
M. Didier Boulaud. Parlez-en à M. Barnier !
Mme Nathalie Goulet. Dans ce contexte, nos concitoyens attendent des entreprises et de leurs dirigeants un comportement exemplaire en matière de rémunération. C’est à la fois une question de justice et de cohésion sociale.
Les dix patrons les mieux payés du CAC 40 gagnent entre 2,4 millions et 4,7 millions d’euros par an. Et de telles rémunérations concernent même des patrons d’entreprises ayant reçu des aides de l’État, voire du Fonds stratégique d’investissement.
Ce sujet a été maintes fois évoqué dans notre hémicycle.
Le Gouvernement a demandé aux entreprises de définir des règles du jeu. L’Association française des entreprises privées, l’AFEP, et le MEDEF se sont donné jusqu’au mois d’octobre pour arrêter un code de bonne conduite. L’Autorité des marchés financiers, l’AMF, a publié ce matin un rapport sur cette question. Il s’agit donc bien d’un point majeur de notre actualité économique et sociale.
C’est la raison pour laquelle, madame la ministre, je m’autorise à vous demander quelle est votre position sur cet important dossier de la rémunération des dirigeants et sur ce code de bonne conduite des dirigeants des entreprises françaises. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste.)
M. Yvon Collin. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Madame la sénatrice, vous avez raison : nous attendons tous des entreprises qu’elles se comportent de manière irréprochable en matière de rémunération des dirigeants.
J’ai demandé aux entreprises qu’elles se conforment au code AFEP-MEDEF que vous avez évoqué, code qui a été publié au début de l’année 2009, voilà donc tout juste six mois.
Pour être sûre que l’on pourrait mesurer les progrès accomplis, j’avais demandé à l’Autorité des marchés financiers de suivre la manière dont les entreprises respectaient ce code et de nous remettre un rapport : c’est chose faite depuis ce matin.
Dans ses conclusions, il est indiqué : en premier lieu, que la transparence, en matière de rémunération, est nettement meilleure depuis la mise en œuvre par les entreprises du code AFEP-MEDEF ; en deuxième lieu, que toutes les entreprises appliquent le code ; mais, en troisième lieu, qu’elles ne l’appliquent pas parfaitement.
Mme Nicole Bricq. Il faut faire une loi !
Mme Christine Lagarde, ministre. Sur un certain nombre de mesures – notamment le non-cumul entre un emploi salarié et un mandat social, le plafonnement des indemnités de départ, la mise en place du comité des rémunérations –, l’application est imparfaite et varie de 70 % à 88 %, selon les entreprises.
À la lecture de ces conclusions, j’ai immédiatement demandé à M. Jean-Pierre Jouyet, président de l’AMF, de prier chacune des entreprises qui n’appliquent pas aujourd’hui parfaitement le code de s’y soumettre.
J’ai également écrit à la présidente du MEDEF et au président de l’AFEP pour qu’ils enjoignent à leurs membres de se conformer au dispositif du code AFEP-MEDEF.
Enfin, j’ai demandé à M. Jean-Pierre Jouyet de me remettre un nouveau rapport dans six mois, de sorte que nous puissions apprécier les progrès qui auront été accomplis par les entreprises au regard du respect de ce code de bonne conduite. Je rappelle que la mise en œuvre du dispositif suppose évidemment qu’un certain nombre de conseils d’administration ou d’assemblées générales se tiennent.
Il me paraît prématuré, à ce stade, de faire une loi, pour la raison très simple qu’un code existe désormais, qu’il est en voie de mise en œuvre et que, dans six mois, nous serons en mesure de déterminer si, oui ou non, il a été appliqué. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Vous le disiez déjà l’année dernière !
M. Bernard Frimat. En octobre, vous direz encore que c’est prématuré !
Mme Christine Lagarde, ministre. S’il se révèle que tel n’a pas été le cas, il sera temps de décider si, par la voie législative, nous devons envisager d’autres dispositifs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Depuis la fin du mois de juin et le début de ce mois, les dirigeants de l’UMP n’ont pas hésité à adresser à chacun des 120 000 professionnels de la restauration de France un document vantant l’avènement de la TVA à 5,5 %, décision présentée – les auteurs n’ont pas peur des mots ! – comme « historique ». Et pour faire bonne mesure, ce document est assorti d’un bulletin d’adhésion à l’UMP ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Paul Raoult. C’est scandaleux !
M. Josselin de Rohan. Parce que, bien sûr, les socialistes, eux, ne font pas la même chose ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. David Assouline. Si on l’avait fait pour les 35 heures, il y aurait eu du monde !
M. Jean-Jacques Mirassou. On comprendra facilement l’émoi qu’a suscité, non seulement chez les destinataires de ce document, mais également auprès de ceux des Français qui ont encore quelques réflexes citoyens, l’emploi d’une telle méthode, qui invite sans détour les professionnels de la restauration à pratiquer, en quelque sorte, un retour électoral sur investissement au profit de l’UMP.
M. Josselin de Rohan. En démocratie, c’est comme cela !
M. Jean-Jacques Mirassou. Remarquons que cet « investissement » – j’imagine que vous y êtes sensible, madame la ministre ! – représente une perte de recettes fiscales de près de 2,5 milliards d’euros, qui sera, bien sûr, payée in fine par le contribuable.
En fait, ce qui est historique, pour reprendre l’adjectif utilisé dans le tract de l’UMP, c’est le montant de la dépense consentie par le Gouvernement, qui escompte la création de 20 000 emplois, création que rien ne garantit puisque aucune contrepartie n’a été exigée et encore moins formalisée.
Le caractère non contraignant de l’accord passé avec la filière laisse également dubitatif quant à ses retombées positives pour les consommateurs, que l’on voudrait au passage, et d’une manière un peu cavalière, ériger en sentinelles chargées de vérifier les prix pratiqués par les professionnels en question.
On s’étonnera, enfin, que l’appareil de l’UMP dispose, à propos des restaurateurs français, d’un fichier remarquablement complet, dont la précision rappelle celle des fichiers de l’administration ou des syndicats professionnels. C’est la raison pour laquelle nous nous interrogeons sur sa provenance.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Saisissons la CNIL !
M. Jean-Jacques Mirassou. Il y a donc là une confusion des genres, au service d’une opération électoraliste.
Ma question est simple : sachant que le Gouvernement lui-même a largement communiqué sur cette mesure, à grand renfort d’encarts dans la presse écrite, notamment, condamnez-vous, madame la ministre, l’initiative de l’UMP (Non ! sur les travées de l’UMP.) et pouvez-vous nous donner l’assurance que les fichiers de l’administration n’ont pas été utilisés pour la servir ? (Protestations sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela va être dur !
M. Alain Gournac. Il n’y a que les socialistes pour faire cela !
M. Jean-Jacques Mirassou. Il faudrait que la majorité silencieuse le reste !
Enfin, puisque, au mépris de l’éthique républicaine, vous persistez à assimiler le Gouvernement au parti majoritaire, ou inversement, envisagez-vous de demander à M. Xavier Bertrand, secrétaire général de l’UMP et ancien ministre du travail, d’inciter les quelques restaurateurs ayant adhéré à l’UMP à montrer l’exemple et à saisir l’opportunité fournie par la baisse de la TVA pour embaucher, augmenter les salaires, investir dans l’amélioration des conditions de travail, ce dans un secteur perpétuellement sous tension ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. Que pense le Nouveau Centre de cette pratique ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, pratique électoraliste ou pas, là n’est pas la question.
La baisse de la TVA à 5,5 % était une promesse électorale du Président de la République, prise solennellement devant les Français.
M. Didier Boulaud. C’était une promesse de Chirac !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nicolas Sarkozy s’était engagé dans ce sens vis-à-vis de tous les restaurateurs, et le pays tout entier va en tirer un bénéfice. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Vous avez parlé de retour sur investissement. Eh bien oui, de cette mesure, on peut attendre un véritable retour sur investissement, au sens économique s’entend ! (Brouhaha sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. Qu’en pensent les amis de l’UMP ?
M. David Assouline. Scandaleux !
M. le président. Monsieur Assouline, veuillez laisser Mme la ministre s’exprimer !
Un sénateur de l’UMP. Ils sont vraiment mal élevés !
Mme Christine Lagarde, ministre. Je rappelle, par ailleurs, que l’ensemble du Gouvernement s’est mobilisé pour défendre cette cause auprès de l’ensemble de nos partenaires européens et parvenir, au sein de l’Union européenne, à une harmonie sur cette question d’une TVA à taux réduit dans le secteur de la restauration. (M. David Assouline proteste.)
Le retour sur investissement est de trois ordres.
Il s’agit tout d’abord d’une baisse des tarifs pratiqués : il faut en effet que les consommateurs s’y retrouvent. Cette baisse est de 11,8 % sur sept produits composant les dix produits habituels d’un repas complet dans un restaurant.
M. Paul Raoult. Ce n’était pas l’objet de la question !
Mme Christine Lagarde, ministre. Il s’agit par ailleurs de la promesse de la création de 40 000 d’emplois – et non pas 20 000 – dans l’ensemble du secteur.
M. Paul Raoult. On a parlé de 40 000 en deux ans !
Mme Christine Lagarde, ministre. Il s’agit enfin de l’engagement pris par les restaurateurs d’investir pour améliorer l’attractivité de leurs établissements.
M. Guy Fischer. Mensonges !
Mme Christine Lagarde, ministre. Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, il est bien ici question d’investissement, mais au service du pays : les clients vont profiter des baisses de prix, les employés vont voir leurs salaires augmenter, le secteur va bénéficier de créations d’emplois, le territoire va voir son attractivité renforcée. (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Non moins vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Bravo !
M. David Assouline. Et le bulletin d’adhésion, c’est un retour sur investissement ?
alternatives à la détention
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-René Lecerf. Ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Madame la ministre, j’ai visité la semaine dernière l’une des prisons de notre République.
M. Thierry Repentin. Il découvre la vérité !
M. Jean-René Lecerf. Ayant demandé au hasard l’ouverture d’une cellule, je me suis retrouvé face à trois hommes d’une cinquantaine d’années, codétenus dans un espace de neuf mètres carrés, doté d’un coin toilette dépourvu de toute protection.
M. Didier Boulaud. Et sans eau chaude !
M. Jean-René Lecerf. Il faisait très chaud et ils n’avaient droit qu’à une douche tous les trois jours.
En outre, considérés comme délinquants sexuels et confrontés aux brimades et à la violence des autres détenus, ils ne quittaient plus leur cellule et avaient renoncé à toute promenade et à toute activité.
M. Guy Fischer. De peur d’être violés !
M. Jean-René Lecerf. Après quelques minutes de conversation, l’un d’eux a éclaté en sanglots, tandis qu’un autre m’a confié qu’il avait été violé lors d’une douche quelques semaines auparavant,...
M. Guy Fischer. Voilà!
M. Nicolas About. C’est scandaleux !
M. Jean-René Lecerf. ... ce que m’a confirmé la direction de la prison.
Permettez-moi de citer le Président de la République dans son récent discours devant le Congrès (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame) : « La détention est une épreuve dure, elle ne doit pas être dégradante. Comment espérer réinsérer dans la société ceux qu’on aura privés pendant des années de toute dignité ? »
M. Guy Fischer. Ce ne sont que des paroles !
M. Jean-René Lecerf. Madame la ministre, ne pensez-vous pas que la surpopulation carcérale anéantit tous les efforts accomplis par l’administration pénitentiaire pour faire de la prison une école de la réinsertion plutôt qu’une école de la récidive ?
M. Jacques Mahéas. Nous sommes d’accord !
M. Jean-René Lecerf. Lorsque sera achevé l’actuel programme de construction, nous disposerons de 64 000 places, ce qui nous permettra d’atteindre un ratio satisfaisant de 100 places de détention pour 100 000 habitants. Faut-il accroître encore au-delà les capacités de détention, au risque de devoir consacrer au seul recrutement des personnels de surveillance l’essentiel des moyens financiers disponibles ?
En tout état de cause, il faudra bien sûr poursuivre la rénovation des établissements pénitentiaires et parfois en construire de nouveaux, ne serait-ce que pour remplacer ceux que l’on aurait dû fermer depuis longtemps.
M. David Assouline. Bien sûr !
M. Jean-René Lecerf. Cependant, madame la ministre, ne croyez-vous pas qu’il est aujourd'hui urgent de voter définitivement le projet de loi pénitentiaire,...
M. Bernard Frimat. Absolument !
M. Jean-René Lecerf. ... de donner la priorité aux alternatives à l’incarcération, aux aménagements de peines, au développement du bracelet électronique...
M. Guy Fischer. C’est le bon sens, c’est bien !
M. Jean-René Lecerf. ... et donc à l’indispensable recrutement d’un grand nombre de conseillers d’insertion et de probation,...
Mme Michèle André. Tout à fait !
M. Jacques Mahéas. Enfin !
M. Jean-René Lecerf. ... sans lesquels nous ne pourrons mener à bien cette nouvelle politique ? (Applaudissements sur l’ensemble des travées.)
M. Didier Boulaud. À force d’enfermer, voilà le résultat !
M. le président. La parole est à Mme la ministre d'État.
M. Didier Boulaud. Qu’a fait Dati ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur Lecerf, lorsqu’il m’a confié les fonctions de garde des sceaux, le Président de la République a rappelé l’importance qu’il attachait à la question pénitentiaire.
Vous avez raison, l’état de nos prisons est déplorable. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)
M. Paul Raoult. Indigne !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. C’est vrai d’un point de vue tant qualitatif que quantitatif.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fait dix ans que vous êtes au pouvoir !
M. Guy Fischer. Ce n’est pas faute de disposer de rapports !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Pour remédier à cette situation, des réponses existent, elles sont multiples. Bien entendu, et c’est une priorité, il faut construire des établissements, notamment pour lutter contre la surpopulation carcérale.
Il faut également lutter contre la vétusté et procéder à des travaux de rénovation, afin que soit préservée la dignité humaine, y compris en détention.
M. Jacques Mahéas. Oui.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Il faut également un meilleur éventail des conditions d’enfermement pour tenir compte de la diversité de la population carcérale. Celle-ci est en effet composée à la fois de cas psychiatriques lourds, qui représentent près de 20 % de cette population,...
Mme Évelyne Didier. Oui !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. ... de cas psychiatriques plus légers, mais souffrant d’atteintes psychologiques graves, qui représentent près de 50 %, d’un certain nombre de jeunes et de primo-délinquants.
Il convient donc d’assurer une diversification des conditions d’enfermement.
Il y a aussi, vous l’avez dit, les peines substitutives.
M. Jacques Mahéas. Oui !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Celles-ci constituent un élément important, à la fois parce qu’elles peuvent être mises en œuvre rapidement et parce qu’elles sont sans doute la réponse la plus adéquate à certains types de délinquance.
M. Jacques Mahéas. Tout à fait !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Pour éviter d’avoir à choisir entre l’enfermement, dont les conséquences sont souvent dramatiques pour la personne détenue, et la non-incarcération, la peine substitutive peut être une bonne réponse.
M. Guy Fischer. C’est évident !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Elle doit être considérée comme un élément complémentaire. (M. Jacques Mahéas s’exclame.) C'est la raison pour laquelle j’ai parlé tout à l’heure d’éventail des modes de réponse.
Ce qui est essentiel, c’est que la peine prononcée soit exécutée.
M. Alain Gournac. Oui !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Sinon, elle n’a pas le caractère d’exemplarité qui est souhaité.
M. Alain Gournac. Bien sûr !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Le projet de loi pénitentiaire a été adopté au mois de mars dernier par la Haute Assemblée.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En urgence, est-ce normal ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je souhaite qu’il soit inscrit le plus rapidement possible à l’ordre du jour de l'Assemblée nationale, qui doit désormais l’examiner,...
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. ... pour apporter des réponses qui n’ont que trop tardé...
M. Paul Raoult. Oui, c’est le problème ! Cela a un peu trop tardé !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. ... à cette situation préoccupante, mais essentielle. Il nous faut en effet concilier deux préoccupations : la protection de nos concitoyens contre la délinquance, c’est une priorité, la protection de la dignité humaine et la capacité de réinsertion des détenus, car c’est capital pour l’avenir de notre société. (Applaudissements sur les travées de l’UMP ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
effectifs de l'éducation nationale
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Monsieur le ministre, après l’annonce de 16 000 postes en moins dans votre budget pour 2010, les coupes franches dans les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, où 3 000 postes devaient être supprimés, ce sont aujourd’hui les emplois de vie scolaire, les EVS, qui sont touchés. Pas moins de 30 000 personnes ont perdu leur emploi le 30 juin dernier. Elles ont pourtant rempli leur mission, à la satisfaction des enseignants et des directeurs d’établissement, comme à celle des parents et des élèves eux-mêmes.
Ces EVS avaient été recrutés en contrats aidés en 2006, dans le cadre du plan Borloo de cohésion sociale. Il leur avait été promis qu’ils bénéficieraient d’une formation et d’une aide à la réinsertion. Ces engagements n’ont pas été respectés : aucune aide à la formation ni à la réinsertion ne leur a été proposée. Aujourd’hui, ils se retrouvent à leur point de départ, c’est-à-dire au chômage. À ma connaissance, M. Xavier Bertrand ne leur a pas adressé de bulletin d’adhésion à l’UMP ! (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Boulaud. Très bien !
M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, la question essentielle n’est pas de savoir si ces emplois seront plus ou moins compensés : il s’agit de reconduire les contrats, le temps de donner à ces personnels une véritable orientation vers l’emploi, la valorisation de leurs expériences et un accueil spécifique au Pôle emploi, comme cela avait été prévu.
Vous avez tenté de minimiser la situation en évoquant les emplois d’auxiliaires de vie scolaire, les AVS, maintenus auprès des élèves handicapés. Permettez-moi de vous dire que vous confondez les différents contrats qui sont utilisés par votre ministère !
Les emplois de vie scolaire sont des contrats de droit privé : 42 500 personnes bénéficiaient cette année d’un contrat de ce type, 30 000 contrats sont arrivés à terme le 30 juin dernier. Si 12 500 personnes ont pu bénéficier d’une reconduction de leur contrat, ce sont bien 30 000 individus qui sont au chômage depuis le 1er juillet !
Devant le Parlement réuni en Congrès, le Président de la République a qualifié l’investissement dans l’éducation d’« incontournable ». Qui peut imaginer que les objectifs fixés pourraient être atteints, alors que le taux d’encadrement par des adultes diminue d’année en année ? Ce sont 50 000 postes qui auront été supprimés à l’éducation nationale entre 2007 et 2010 ! C’est une véritable hémorragie !
Vous-même, monsieur le ministre, avez affirmé qu’« un pays qui croit en l’avenir est un pays qui investit dans l’éducation ». Que comptez-vous faire pour permettre aux 30 000 personnes qui ont perdu leur emploi de ne pas retomber dans le chômage de longue durée et de valoriser leurs expériences, et pour leur trouver un emploi durable, comme cela leur avait été promis en 2006 au moment de leur embauche ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également.)
M. Didier Boulaud. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Bodin, la vraie question, c’est de savoir si la politique que vous prônez depuis des années, à savoir « toujours plus de moyens »,…
M. Jacques Mahéas. Vous, c’est toujours moins !
M. Bernard Frimat. Répondez à la question !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Sur les EVS, c’est sûr ! La question est mal à propos !
M. Yannick Bodin. Ce n’est pas la question ! Je vous parle du chômage !
M. Luc Chatel, ministre. À examiner la situation sur la durée, qu’il s’agisse du nombre de jeunes qui sortent chaque année du système éducatif sans qualification, de la proportion de jeunes par classe d’âge qui obtiennent le baccalauréat, force est de constater que, malheureusement, la réponse est non !
M. Didier Boulaud. Que faites-vous depuis sept ans dans l’éducation nationale ?
M. Luc Chatel, ministre. À la question que vous posez, vous répondez par toujours plus de moyens (Exclamations sur les travées du groupe socialiste), alors que nous répondons par plus de services et par une revalorisation de la condition de l’enseignement.
M. Yannick Bodin. C’est vous qui avez créé les EVS !
M. Didier Boulaud. C’est votre création !
M. Paul Raoult. Ce sont vos emplois !
M. Bernard Frimat. Vous êtes vraiment gêné pour répondre !
M. Luc Chatel, ministre. Ainsi, nous mettons en œuvre une politique d’accompagnement éducatif individualisé, qui est une réponse aux orphelins de seize heures.
M. Didier Boulaud. C’était celle de Ferry, de Fillon, de Robien, de Darcos et maintenant c’est la vôtre !
M. Yannick Bodin. Et les chômeurs, qu’en faites-vous ?
M. Luc Chatel, ministre. Les deux heures de soutien scolaire dans le primaire, c'est-à-dire l’aide personnalisée, sont une autre réponse aux problèmes rencontrés par les enfants et leurs parents.
M. Yannick Bodin. Ce n’est pas la question. Je vous parle des chômeurs !
M. Yannick Bodin. Voilà !
M. Luc Chatel, ministre. … je souhaite rappeler une vérité, c’est que le Gouvernement croit en ces emplois, puisqu’il les a pérennisés.
M. Yannick Bodin. Ils sont au chômage !
M. Jacques Mahéas. C’est scandaleux !
M. Luc Chatel, ministre. Vous ne pouvez pas prétendre qu’il y aura moins d’emplois de vie scolaire à la rentrée,...
Mme Michèle André. 30 000 !
M. Jacques Mahéas. Et les enfants qu’ils suivaient ?
M. Luc Chatel, ministre. ... car c’est une contrevérité ! (M. Yannick Bodin s’exclame.)
Le Gouvernement a décidé de reconduire ces dispositifs. Il s’agit de contrats à durée déterminée (Ah ! sur les travées du groupe socialiste),...
M. Jean-Jacques Mirassou. Voilà !
M. Didier Boulaud. On y est !
M. David Assouline. C’est le plus grand plan social de la rentrée et c’est vous qui le faites !
M. Luc Chatel, ministre. Nous avons mis en place des outils de formation et ouvert un certain nombre de concours de la fonction publique internes à ces contrats. J’ai demandé à l’inspection générale d’engager une mission d’évaluation…
M. Didier Boulaud. Ça va être vite évalué !
M. Luc Chatel, ministre. … pour déterminer si ces missions de formation et d’insertion avaient été retenues.
Monsieur le sénateur, à la rentrée prochaine, il y aura toujours le même nombre d’emplois de vie scolaire et d’auxiliaires de vie scolaire individualisée devant les élèves qu’avant.
M. Yannick Bodin. Et les chômeurs, ils sont où ?
M. Paul Raoult. De nombreux RASED ont disparu !
M. Luc Chatel, ministre. Le Gouvernement a déposé la semaine dernière un amendement qui a été adopté par l'Assemblée nationale et qui permettra au monde associatif de prendre le relais de ces emplois, de manière que la continuité soit assurée.
M. Yannick Bodin. Ce n’est pas le sujet !
M. Paul Raoult. Ce sera la catastrophe à la rentrée !
M. Luc Chatel, ministre. Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour améliorer la qualité de service de l’enseignement et il a décidé de pérenniser ces emplois de vie scolaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Nicolas About et Jean Boyer applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Ma question s'adresse à Mme le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Madame le ministre, dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, sept moines trappistes ont été enlevés à Tibéhirine, en Algérie, dans des circonstances non encore élucidées. Un mois plus tard, le GIA – groupe islamiste armé – algérien revendiquait cet enlèvement et demandait des négociations afin d’obtenir la libération de certains des leurs qui étaient emprisonnés.
À la fin du mois de mai 1996, la mort de ces moines a suscité dans le monde entier une vive émotion et une immense indignation.
L’Algérie, rappelons-le, s’était enfoncée, dès le début des années quatre-vingt-dix, dans une spirale de violence. Les moines de Tibéhirine ont toujours refusé de partir et ont continué à prodiguer des soins à la population locale. Jusqu’au bout, ils ont délivré un message de paix et de fraternité entre musulmans et chrétiens, entre Algériens et Français.
M. Charles Revet. C’est vrai !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. À la même période, le territoire français a connu de multiples attentats et tentatives d’attentats revendiqués par le GIA, qui ont entraîné la création et la mise en place du dispositif Vigipirate, encore en vigueur aujourd’hui.
L’information judiciaire ouverte en 2003 a permis de mener des investigations et de mettre en place une coopération internationale. Treize ans après les faits, la déposition faite auprès du juge antiterroriste Trévidic par le général Buchwalter, qui était à l’époque attaché de défense à l’ambassade de France à Alger, relance l’enquête.
Madame le ministre, je ne peux que me féliciter de la décision du Président de la République de lever le secret-défense sur les documents relatifs à cette affaire et je regrette que, de l’autre côté de la Méditerranée, certains aient parfois qualifié cela de provocation. Il est important que l’enquête progresse en toute transparence, mais aussi qu’elle ne porte pas atteinte aux actions de coopération menées par nos compatriotes en Algérie, dans les domaines économiques, sociaux et culturels. En tant que représentante des Français établis hors de France, vous comprendrez que j’aie eu à cœur de relayer ici leurs inquiétudes.
Madame le ministre, pouvez-vous nous éclairer quant aux progrès de l’enquête et à la coopération judiciaire franco-algérienne ? Il ne s’agit pas de rouvrir de vieilles blessures, nous ne devons pas polémiquer, mais nos compatriotes, tout comme le peuple algérien, ont le droit de savoir. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Jean Boyer et Hervé Maurey applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre d’État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Madame Garriaud-Maylam, l’émotion qu’a suscitée l’assassinat des moines de Tibéhirine a été considérable en France,…
M. Charles Revet. C’est vrai !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. … mais aussi en Algérie et dans de nombreux autres pays. Cette émotion n’est toujours pas retombée.
Vous l’avez rappelé, de nombreuses investigations ont été menées par les magistrats instructeurs depuis l’ouverture de l’information judiciaire. Des témoignages ont été recueillis, et ceux qui viennent d’être reçus feront, bien entendu, l’objet d’investigations supplémentaires.
L’important dans cette affaire, c’est d’arriver à connaître la vérité. C’est pourquoi les magistrats chargés du dossier bénéficient et continueront de bénéficier de tous les moyens qui leur seront nécessaires, y compris dans le cadre de la coopération internationale.
Un certain nombre de commissions rogatoires internationales ont été adressées aux autorités algériennes, qui coopèrent avec les magistrats français. Le Président de la République a eu l’occasion de le dire, tous les moyens seront mis en œuvre afin que la lumière soit faite sur ce qui s’est passé, y compris par la levée du secret-défense si cela est nécessaire.
Nous ferons tout, j’y suis déterminée, pour connaître les conditions dans lesquelles les moines de Tibéhirine ont été assassinés.
Toutes les pistes doivent être exploitées. Ce n’est pas une question de défiance ou de provocation à l’égard d’un pays ami. Nous avons un devoir de transparence et de vérité,…
M. Alain Gournac. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. … à l’égard des victimes, de leurs familles et de l’ensemble du peuple français ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Jean Boyer et Hervé Maurey applaudissent également.)
crise de l’ostréiculture
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Ma question, qui s’adresse à M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, concerne la situation plus qu’alarmante de l’ostréiculture sur l’ensemble du littoral atlantique, du bassin d’Arcachon aux côtes normandes, et tout particulièrement en Bretagne.
Des centaines d’ostréiculteurs ont manifesté dès le mois de juin dernier, à Nantes, puis à la Trinité-sur-Mer et, aujourd’hui, à Caen, pour alerter l’opinion et les pouvoirs publics.
En Bretagne, la conchyliculture représente environ 10 000 hectares de concessions, 70 000 tonnes de production et 150 millions d’euros de chiffre d’affaires.
La production d’huîtres, spécialement la production d’huîtres creuses, est essentielle pour l’économie française en général et pour l’économie bretonne en particulier. L’huître est une production d’avenir, qui fait vivre toute la façade maritime de notre pays, laquelle représente 11 millions de kilomètres carrés, ce qui est loin d’être négligeable.
Or l’ostréiculture française connaît, depuis plusieurs années, une mortalité excessive d’huîtres creuses. Au cours de l’été 2008, c’est plus de 60 % de la production de juvéniles qui a été décimée. Cette crise est la plus importante depuis leur introduction en France, à la fin des années soixante.
Cette année encore, les ostréiculteurs craignent de nouvelles pertes de cette ampleur. Ils réclament des actions collectives, associant l’État, les collectivités territoriales, les scientifiques et les professionnels, et exigent des réponses sur le long terme.
Cette crise de l’ostréiculture, combinée à une politique gouvernementale qui se traduit par une baisse du pouvoir d’achat, nous fait craindre que les huîtres, à Noël, soient bientôt remplacées par des oranges ! (Sourires ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. David Assouline. Oh là là !
M. Jean-Luc Fichet. Au niveau national, en 2007, une charte de coordination a été signée entre le ministère, l’IFREMER – l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer – et le Comité national de la conchyliculture.
L’IFREMER est un pôle de recherche d’excellence, qui ne doit pas être remis en cause. Malgré la qualité de ses travaux, aucune réponse n’est aujourd’hui apportée aux producteurs, qui, désireux de comprendre ce qui se passe, se désespèrent, et aucune solution adéquate n’a été trouvée. Or, il est urgent et vital que tout soit mis en œuvre pour que cesse la surmortalité constatée.
La question est prégnante et cruciale au moment où l’on débat du Grenelle de la mer, qui s’apparente d’ailleurs à une session de rattrapage, la mer ayant été « zappée » dans le Grenelle de l’environnement.
Monsieur le ministre, quelles solutions allez-vous proposer pour éviter une nouvelle année noire ? Comment comptez-vous aider les chercheurs ? Quelles sont les réponses adéquates et rapides que vous entendez apporter aux professionnels ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Robert Tropeano et Raymond Vall applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, je veux vous rassurer : nous ferons tout pour qu’à Noël vous puissiez avoir à la fois des oranges et des huîtres ! (Sourires. – Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Didier Boulaud. Attention aux coupures d’électricité si EDF et Gadonneix n’obtiennent pas satisfaction !
M. David Assouline. En tout cas, les oranges ne viendront pas de France !
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous sommes fermement attachés à la défense et à la promotion de l’ostréiculture en France, et ce sur l’ensemble du littoral.
Aujourd’hui, ce secteur est confronté à deux difficultés de nature bien différente.
La première, que vous avez largement évoquée, est la surmortalité des huîtres creuses juvéniles de moins d’un an, notamment en Bretagne. J’ai demandé aux préfets de me remettre un rapport dans les jours à venir sur la situation exacte dans l’ensemble des bassins et sur les conséquences économiques pour les ostréiculteurs. L’année dernière, vous le savez, ceux-ci avaient déjà reçu une aide financière de l’État pour faire face à leurs difficultés.
J’ai également saisi l’IFREMER, dont je tiens à saluer, à mon tour, la qualité des travaux scientifiques. Je lui ai demandé de faire une étude sur les causes susceptibles d’expliquer la surmortalité des huîtres creuses juvéniles sur le littoral atlantique, notamment en Bretagne, de façon à pouvoir introduire dans les parcs des variétés de coquillages davantage résistantes aux maladies qui pourraient être ainsi détectées.
La seconde difficulté est tout aussi importante que la première, mais plus spécifique, puisqu’elle concerne le bassin d’Arcachon.
J’ai reçu hier pendant plus de deux heures, en compagnie des autorités locales, le président du syndicat ostréicole d’Arcachon, pour faire ensemble un point exact de la situation.
En tant que ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, il est de ma responsabilité de garantir aux consommateurs une sécurité sanitaire totale et de permettre aux ostréiculteurs d’accéder à un développement économique serein, notamment dans le bassin d’Arcachon.
En accord avec mes interlocuteurs, j’ai donc pris un certain nombre de décisions.
J’ai ainsi saisi la Commission européenne – la lettre est partie aujourd’hui – pour lui demander de définir un test sanitaire qui soit plus lisible, plus compréhensible pour le grand public, mais tout aussi efficace et strict que l’actuel test dit « de la souris ».
M. Charles Revet. Très bien ! C’est nécessaire !
M. Bruno Le Maire, ministre. J’ai également suggéré l'organisation, le 1er septembre prochain, d’une conférence réunissant l’ensemble des scientifiques européens et chargée d’élaborer un test alternatif au test de la souris, qui serait utilisé non seulement sur tout le littoral français, mais aussi dans les autres pays européens. Chacun doit en effet être soumis à la même réglementation et aux mêmes exigences sanitaires,…
M. Charles Revet. Voilà !
M. Bruno Le Maire, ministre. … sur la base d’un test qui, je le répète, soit plus compréhensible et plus accessible au grand public.
M. Charles Revet. Parfait !
M. Bruno Le Maire, ministre. Dans l’intervalle, j’ai décidé, pour les semaines à venir, puisque la campagne ostréicole est toujours ouverte, que le délai séparant les prélèvements et les résultats des examens, actuellement de soixante-douze heures, soit réduit à quarante-huit heures. Cela permettra aux ostréiculteurs de réagir plus rapidement en cas de test positif et de fermeture du bassin.
Je veux le redire avec force, le Gouvernement attache beaucoup d’attention aux préoccupations du milieu ostréicole français et apportera des solutions concrètes à chacune des difficultés rencontrées sur l'ensemble du littoral, notamment en Bretagne et dans le bassin d’Arcachon. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
passeports biométriques
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille. (Très bien ! et applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. Laurent Béteille. Ma question s’adresse à M. Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, mais je ne doute pas que M. Marleix pourra m’apporter une réponse satisfaisante.
M. David Assouline. C’est le spécialiste du charcutage électoral, qui, lui, est millimétrique et pas biométrique ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Laurent Béteille. Elle porte sur les difficultés que rencontrent un certain nombre de mairies pour la délivrance des passeports biométriques, plus encore dans la période où de nombreuses familles s’apprêtaient à partir en vacances.
En effet, le délai d’instruction des demandes et de constitution des dossiers est passé, dans le meilleur des cas, à vingt minutes, contre dix minutes avec les anciens passeports. Il est, dans la plupart des cas, très largement dépassé, au regard des problèmes liés à la prise des photographies et des empreintes, spécialement des enfants.
À cette attente vient s’ajouter celle de la réception des passeports, puisque la préfecture met en moyenne six semaines à les retourner dans les mairies avec souvent – et plus qu’on ne le souhaiterait – des rejets de dossiers, dus notamment à des photographies jugées non conformes.
La liste des problèmes rencontrés n’est pas close, le matériel n’étant pas toujours opérationnel et se révélant même parfois défectueux. Dans la mairie que je gère, une machine est ainsi restée en panne pendant une semaine.
M. Didier Boulaud. Chez moi, c’est pareil ! C’est un bazar sans nom !
M. Laurent Béteille. Le personnel municipal n’a pas reçu la formation complète qui aurait pourtant été nécessaire.
Pour les Français établis hors de France, ces problèmes sont en général décuplés par l’éloignement et les coûts induits.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous m’indiquer les mesures concrètes que vous comptez prendre pour améliorer ce dispositif et permettre aux services de l’état civil de travailler sereinement pour nos administrés ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet et M. Jean Boyer applaudissent également.)
MM. Didier Boulaud et Paul Raoult. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. David Assouline. C’est un spécialiste du découpage électoral ! Sortez la calculette ! Avec le nouveau découpage, il nous faut 52,2 % des voix pour avoir la majorité !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur Béteille, vous avez bien voulu interroger M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur le problème récurrent des délivrances des passeports biométriques. M. Hortefeux vous prie de l’excuser, il est actuellement en déplacement dans la région Provence-Alpes-Côte d’azur.
La France, vous le savez, monsieur le sénateur, a mené à bien, dans les délais prescrits, le programme de mise en œuvre des passeports biométriques. Le nouveau dispositif a permis de réaliser de réels progrès de trois types.
M. Yannick Bodin. Cela fait des économies pour l’État !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Premier progrès, les délais, vous en conviendrez, ont été considérablement réduits, sauf dans l’Essonne, cas sur lequel je reviendrai.
M. Didier Boulaud. Il paraît qu’il faut dix minutes pour faire une demande de passeport ! En fait, c’est au moins une demi-heure ! Vous devriez essayer !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Il n’est désormais plus nécessaire d’acheminer par courrier des dossiers en préfecture grâce au lien télématique entre la mairie, la préfecture, l’Agence nationale des titres sécurisés et l’imprimerie.
Mme Michèle André. Ce n’est pas la question !
M. Didier Boulaud. Cela ne fonctionne pas !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Installé dans les 212 consulats et consulats généraux de France à l’étranger, ce dispositif permet, en outre, de relier les mairies de métropole et celles de l’outre-mer.
M. Didier Boulaud. Cela ne fonctionne pas !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Deuxième progrès important, les contraintes ont été allégées. L’usager n’est plus lié à sa commune de résidence ou son département ; il peut aller dans n’importe laquelle des 2 072 communes équipées de France pour se faire établir un passeport.
M. Didier Boulaud. Je vais mettre la machine dans un carton et la rapporter au préfet !
M. Paul Raoult. M. le secrétaire d’État nous tourne le dos !
M. Didier Boulaud. Il ne nous aime pas !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Troisième progrès, sur le plan technique, le taux de rejet des photos avoisine désormais moins de 1 %, contre 2 %, voire 3 %, avec les passeports électroniques.
Le centre de support national qui a été mis en place permet, en outre, le remplacement de tout matériel défectueux dans les douze heures en moyenne.
J’ajoute, pour terminer, que dans la très grande majorité des départements, la mise en place s’est extrêmement bien passée, car seuls neuf d’entre eux éprouvent des difficultés,…
M. Paul Raoult. C’est la moitié de la France, tout de même !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. … dont le vôtre, l’Essonne, j’en conviens, monsieur le sénateur.
M. Didier Boulaud. Il a sorti les ciseaux pour découper les circonscriptions !
M. David Assouline. C’est un spécialiste du découpage millimétrique, pas du passeport biométrique !
M. Paul Raoult. M. le secrétaire d’État continue de nous tourner le dos !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Dans ce département, la situation est effectivement délicate pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que le nombre de demandes est très important en cette période de départs en vacances. Ensuite, parce que le nombre de renouvellement des cartes nationales d’identité arrivées à échéance est très élevé. Enfin, parce que beaucoup d’usagers ont préféré attendre l’ouverture du programme pour demander un passeport biométrique.
M. Paul Raoult. Des gogos !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Pour faire face à ces contraintes, deux mesures urgentes ont été décidées.
M. Paul Raoult. Il ne nous a pas regardés une fois !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Premièrement, une enveloppe spécifique a été allouée pour permettre aux préfectures les plus en difficulté, dont la vôtre, de recourir temporairement à des vacataires ou de rémunérer des heures supplémentaires. La préfecture de l’Essonne a ainsi renforcé très sensiblement les personnels affectés à cette tâche.
Deuxièmement, des formations techniques des personnels municipaux ont été effectuées sur place et dans chaque mairie de l’Essonne pour réduire les délais de constitution des dossiers.
Comme vous le voyez donc, monsieur le sénateur, s’il est vrai que certaines difficultés ont pu être enregistrées, comme dans votre département, où le nouveau dispositif n’a été mis en fonction que depuis deux mois, tous les moyens ont été mobilisés par le Gouvernement afin d’y remédier dans les plus brefs délais, pour améliorer encore le service rendu à nos concitoyens.
M. Didier Boulaud. Encore un succès du ministère de l’intérieur ! Il n’y a pas de mystère, c’est comme pour les nouvelles plaques minéralogiques !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement va veiller, avec M. le préfet de l’Essonne, à ce que la situation se normalise dans les meilleurs délais dans votre département. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Jean Boyer et Hervé Maurey applaudissent également.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité.
4
Cessation du mandat d'un sénateur élu au Parlement européen
M. le président. Mes chers collègues, M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales a informé M. le Président du Sénat que notre collègue M. Jean-Luc Mélenchon, sénateur de l’Essonne, deviendra membre du Parlement européen à compter du mardi 14 juillet 2009, à zéro heure.
M. Didier Boulaud. Ils en ont de la chance à Strasbourg !
M. Jean Bizet. Vous devriez vous en réjouir !
M. le président. En application des articles L.O. 297 et L.O. 137-1 du code électoral, M. Jean-Luc Mélenchon cessera de ce fait d’exercer son mandat de sénateur le lundi 13 juillet 2009 à minuit.
M. Jean Bizet. Quelle perte !
M. le président. Le Conseil d’État a fait connaître au ministère de l’intérieur que les opérations électorales dans la circonscription du Sud-Ouest du 7 juin 2009 ont fait l’objet de plusieurs requêtes.
La vacance du siège de notre collègue et son remplacement par son suivant de liste ne pourront être proclamés, le cas échéant, qu’après la décision juridictionnelle confirmant l’élection au Parlement européen.
Jusqu’à la fin de l’instance juridictionnelle, M. Jean-Luc Mélenchon exercera son mandat de député européen sans pouvoir participer aux travaux du Sénat.
5
Nomination de membres de commissions
M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe de l’Union centriste a présenté une candidature pour la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire et une candidature pour la commission des affaires sociales.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
- M. Adrien Giraud, pour siéger à la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean Boyer, démissionnaire ;
- M. Jean Boyer, pour siéger à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, en remplacement de M. Adrien Giraud, démissionnaire.
6
Dépôt de documents parlementaires
M. le président. Le jeudi 9 juillet 2009, M. le président du Sénat a reçu :
dépôt d’un rapport et d’un texte de commission
- n° 552, 2008-2009. – Rapport de MM. Dominique Braye, Louis Nègre, Bruno Sido et Daniel Dubois, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, sur le projet de loi portant engagement national pour l’environnement (urgence déclarée) (n° 155, 2008-2009) ;
- n° 553, 2008-2009. – Texte de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire sur le projet de loi portant engagement national pour l’environnement (urgence déclarée) (n° 155, 2008-2009) ;
Le document suivant est rattaché à la séance du mardi 16 juin 2009 :
- n° 554, 2008-2009. – Rapport d’information de M. Joël Bourdin, fait au nom de la Délégation du Sénat pour la planification, sur l’évaluation des politiques publiques concernant les zones humides.
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 15 juillet 2009, à quatorze heures trente et le soir :
1. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2008 (n° 502, 2008-2009).
Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances (n° 542, 2008-2009).
2. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense (n° 462, 2008-2009).
Rapport de M. Josselin de Rohan, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 513, 2008-2009).
Texte de la commission (n° 514, 2008-2009).
Avis de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (n° 493, 2008-2009).
Avis de M. François Trucy, M. Jean-Pierre Masseret et M. Charles Guené, fait au nom de la commission des finances (n° 548, 2008-2009).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à seize heures cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD