M. Guy Fischer. Eh oui !
Mme Mireille Schurch. Ainsi, une personne venant consulter dans un centre de santé se verra fortement conseiller d’être soignée dans l’établissement gestionnaire, où les tarifs seront bien plus élevés.
Afin d’éviter que les centres de santé ne deviennent des vitrines commerciales d’établissements privés, nous voulons garantir aux patients que leur prise en charge dans un établissement de santé gestionnaire d’un centre de santé sera assurée aux tarifs opposables et sans avances de frais. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Nous avons admis, à l’article L. 6112-3 du code de la santé publique, la continuité de la prise en charge au titre des missions de service public, en cas de réhospitalisation dans l’établissement ou pour d’autres soins consécutifs à cette prise en charge. Mais il ne me paraît guère raisonnable – et peu justifié – d’étendre cette continuité à une prise en charge dans un autre établissement qui, d’ailleurs, peut très bien n’être pas lui-même chargé d’une mission de service public. On ne voit pas non plus jusqu’où devrait s’étendre cette continuité.
La commission a donc émis un avis défavorable aux amendements nos 305 et 388.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Chacun saluera ici la possibilité ouverte par la loi aux établissements de santé de créer des centres de santé. Cette disposition a pour objectif de permettre l’accès aux soins sur des territoires mal couverts. Ces créations n’interviendront pas de manière désordonnée, mais seront prévues par le volet ambulatoire des schémas régionaux d’organisation des soins. Il s’agit non pas, comme vous le dites, de créer une vitrine pour appâter les malades, mais d’assurer un maillage territorial.
Les créations de centres de santé feront l’objet de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, en ce qui concerne tant l’établissement gestionnaire que le centre de santé lui-même. Bien entendu, ce dispositif contractuel visera à préciser les modalités financières d’accès aux soins, notamment pour les personnes adressées par un centre de santé.
Il n’est donc ni utile, ni même souhaitable, de légiférer dans ce domaine, d’autant que la disposition que ces amendements tendent à introduire comporte un risque de dérive manifeste, dans la mesure où elle s’appliquerait à tout type de pathologie ou de prise en charge. Le simple fait d’avoir débuté un parcours de soins dans un centre de santé ne peut suffire à déterminer le mode de facturation et de prise en charge, sans limitation dans le temps et sans prise en compte de la nature de la pathologie en question : ce serait instaurer un régime « hors norme ».
Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celles qu’a excellemment exposées M. le rapporteur, j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur l’amendement n° 305.
M. François Autain. Nous devons être très vigilants sur les risques de dérive résultant de l’utilisation que les établissements de santé privés pourraient faire des centres de santé. L’instrumentalisation de ces centres de soins à des fins purement lucratives représente un très grave danger.
C’est la raison pour laquelle nous demanderons, plus tard dans la discussion, la suppression de la possibilité ouverte aux établissements de santé privés de créer des centres de santé. On ne peut pas accepter qu’un malade traité dans un centre de santé, qui a bénéficié du tiers-payant, sorte de ce centre pour être adressé à l’établissement privé créateur du centre et subisse des dépassements d’honoraires. Une telle éventualité n’est pas concevable, car elle signifierait que le centre de santé, comme l’a dit Mme Schurch, perd l’essentiel de sa vocation.
Il est indispensable d’adopter cet amendement pour éviter les dérives qui interviendront fatalement, quelles que soient les dispositions que comporte le projet de loi. Il s’agit d’une précaution indispensable.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur l’amendement n° 388.
M. Bernard Cazeau. Une fois de plus, nous vivons un paradoxe. Chaque fois que nous prenons la parole, Mme la ministre nous reproche de ne pas présenter de propositions constructives. Pourtant, nous en avons formulées sur l’ensemble du texte et bien peu ont été retenues, malheureusement !
Dans le cas présent, ces deux amendements permettaient de faire évoluer le projet de loi dans le bon sens. Je ne suis pas opposé à la création de centres de santé par des établissements privés, car cela permettra aux centres de santé de recourir à d’autres méthodes.
Mais il aurait été logique d’orienter la loi dans le sens de l’opposabilité des tarifs conventionnés, car les centres de santé sont souvent implantés dans des secteurs géographiques sensibles, voire en grande difficulté. Il me semble d’ailleurs que les médecins du secteur privé ne sont pas hostiles à une telle disposition, du moins pour la majorité de ceux auxquels j’ai posé la question.
Je regrette donc que la commission et le Gouvernement soient défavorables à ces amendements : une fois de plus, l’opposition subit un ostracisme, dès qu’elle veut faire avancer le texte. Or Mme la ministre a dit, devant la commission, qu’elle avait elle-même voulu engager une évolution en ce sens, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il aurait donc été de bon aloi de commencer à le faire dès aujourd’hui.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 306 est présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 389 est présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le XIII de cet article.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Cet amendement vise à rétablir l’instance nationale de concertation des centres de santé.
En effet, en supprimant cette instance, le projet de loi prive les centres de santé du seul organe spécifique de concertation les concernant, alors qu’ils ne sont pas associés, à ce jour, au Comité national de l’organisation sanitaire et sociale ni à la Conférence nationale de santé. Il en est de même au niveau local : la représentation expresse des gestionnaires des centres de santé dans les conférences régionales de santé doit donc être prévue dans un collège ad hoc.
Selon nous, un organe national de concertation doit également être conservé. En conséquence, nous demandons le maintien de l’article du L. 6323-2 du code de la santé publique qui porte création de l’instance nationale de concertation et la suppression du XIII de l’article 1er.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 389.
Mme Annie David. Cet amendement est identique au précédent. Il tend donc à revenir sur la suppression de l’article L. 6323-2 du code de la santé publique, qui a créé cette instance nationale de concertation des centres de santé, « présidée par le ministre chargé de la santé, regroupant notamment les représentants de l’État, des caisses nationales d’assurance maladie, des gestionnaires et des professionnels soignants des centres de santé ».
Comme vous le savez, madame la ministre, cette instance doit permettre une concertation sur toutes les dispositions réglementaires qui peuvent concerner les centres de santé, ainsi qu’une réflexion sur les projets sanitaires et sociaux innovants qu’ils pourraient mettre en place.
Prévue par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé – loi qui, visiblement, vous mécontente, car texte après texte vous la détricotez –, cette instance, pourtant conçue par votre collègue Bernard Kouchner, ne s’est jamais réunie à ce jour. Vous prenez d’ailleurs prétexte de cette absence de réunion pour tenter de la supprimer.
En réalité, cette absence de réunion est le révélateur, au mieux, du manque d’intérêt du Gouvernement pour les centres de santé, au pire, d’une hostilité du Gouvernement à leur encontre, car, sauf à me méprendre, il appartient à la personne qui préside ce comité de le convoquer. Or, madame la ministre, vous avez la charge de cette présidence, en vertu de cet article L. 6323-2 du code de la santé publique.
Cette suppression s’apparente donc à une double peine pour des acteurs qui espèrent précisément être plus et mieux associés aux réflexions relatives à l’évolution du système de santé.
Pourtant, les centres de santé, malgré les difficultés qui sont les leurs, notamment en raison du manque de financements gouvernementaux, ou résultant de la séparation des deux livres imposés par une Europe hostile à toute forme de solidarité en matière de santé, participent, de manière ô combien importante, à la santé des Français, notamment de celles et ceux qui sont le plus en difficulté.
À titre d’exemple, les centres de santé dentaires sont les seuls à ne pas pratiquer de dépassements d’honoraires ou, quand ils en pratiquent, ces dépassements restent à un niveau raisonnable, de telle sorte qu’ils ne constituent pas une entrave aux soins. Reconnaissez que cet apport particulier, pour une profession médicale où il est très difficile de trouver un praticien conventionné en secteur 1, devrait être encouragé plus que méprisé.
Je voudrais vous faire remarquer, mes chers collègues, que les centres de santé ne sont pas associés au Comité national de l’organisation sanitaire et sociale ni à la Conférence nationale de santé. C’est dire qu’avec la suppression de cette instance on leur interdirait de participer au plan national à la définition de la politique de santé.
Cela nous semble dommageable, particulièrement lorsqu’on annonce vouloir trouver des formes de rémunérations autres que celle à l’activité. C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. François Autain. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. S’il ne nous paraît pas utile de maintenir en vigueur les dispositions relatives à l’instance nationale de concertation des centres de santé, ce n’est pas uniquement parce que cette instance n’a jamais été constituée.
M. François Autain. Et pour quelle raison n’a-t-elle pas été créée ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il nous semble que le projet de loi donnera une nouvelle impulsion à la réflexion sur le rôle et la coordination des différentes structures de soin.
À notre avis, il sera beaucoup plus intéressant, pour les centres de santé, d’être associés à l’organisation des soins de premier recours, des parcours de soin ou des formations que de disposer d’une instance nationale de concertation.
La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 306 et 389.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je ne peux vraiment pas laisser dire, comme je l’entends, que je m’oppose aux centres de santé.
M. François Autain. Il faut nous en convaincre !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Au contraire, dans le cadre des projets de loi de financement de la sécurité sociale, j’ai donné des prérogatives supplémentaires aux centres de santé. J’ouvre aujourd’hui la possibilité, pour des établissements de santé, de créer de telles structures, dont j’ai reconnu, à de nombreuses reprises, l’apport irremplaçable dans la prise en charge des populations les plus fragiles et même, au-delà, dans le maillage territorial de quartiers en difficulté.
Rien dans les décisions que j’ai prises ne peut laisser supposer la moindre opposition aux centres de santé ! Bien au contraire ! J’en apporte encore la preuve dans ce projet de loi.
Le sujet, ici, est tout autre : l’instance nationale de concertation des centres de santé, non seulement ne s’est jamais réunie, mais n’a jamais été créée. Vos amis politiques n’ont d’ailleurs pas plus trouvé d’intérêt à la mettre en place.
M. François Autain. Ils n’ont pas eu le temps !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il faut également préciser que, bien qu’une même philosophie les réunisse, les centres de santé ont des cultures assez différentes du fait de leur origine, ce qui crée une difficulté. De plus, les acteurs des centres de santé préfèrent se réunir en fédérations et, à ce titre, ils ont été complètement associés à nos travaux, qui ont été menés dans un esprit d’ouverture.
Cette approche est de nature à éviter un cloisonnement entre une catégorie de structures, regroupées dans une instance nationale, et le reste des acteurs de santé. Cela explique ma position sur cet amendement, dont l’objet serait, non pas le maintien, mais la création d’une instance nationale de concertation des centres de santé, puisque cette instance n’a jamais existé.
Mme Annie David. La loi a été votée en mars 2002 !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le décret qui aurait permis la création de l’instance nationale de concertation des centres de santé n’a jamais été pris.
Pour toutes ces raisons, mon avis est défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Madame la ministre, pour quelles raisons l’instance nationale de concertation des centres de santé n’a-t-elle jamais été réunie ?
M. François Autain. Il y a une autre raison : vous n’aimez pas beaucoup la loi du 4 mars 2002 !
Vous avez supprimé de nombreux articles et tardé considérablement à prendre les décrets se rapportant à un certain nombre de dispositions contenues dans cette loi. Environ 50 % de ces décrets ne sont toujours pas promulgués à ce jour.
Je parle sous le contrôle de M. le président de la commission des affaires sociales, qui a récemment effectué un recensement et a constaté que cette loi faisait partie des lois ayant reçu le moins de décrets d’application. (M. le président de la commission des affaires sociales acquiesce.)
Il est vrai que la loi du 4 mars 2002 traite des droits des malades, et non des droits des médecins. Par conséquent, le Gouvernement actuel est réticent pour en accélérer l’application. Si l’instance nationale de concertation des centres de santé ne s’est pas réunie, c’est parce qu’il ne le voulait pas.
Madame la ministre, vous indiquez également que les acteurs de ce secteur préfèrent se réunir au sein de leur fédération.
Vous avez peut-être quelque raison de vous exprimer en leur nom. Mais les professionnels que j’ai reçus ne m’ont pas semblé tenir ce langage. Au contraire, ils déploraient que l’instance ne se soit jamais réunie et en imputaient la responsabilité, si ce n’est à vous, madame la ministre, en tout cas au Gouvernement.
Vous prétendez que l’instance n’a été réunie par aucun gouvernement, quelle que soit sa tendance.
Mais le gouvernement de gauche n’a pas eu beaucoup de temps, en 2002, pour prendre cette décision. La loi a été votée le 4 mars 2002 et la droite est arrivée au pouvoir en mai 2002 : c’était tout de même beaucoup demander au gouvernement en place que de prendre une telle décision en un si court délai.
M. François Autain. Je ne suis pas convaincu par vos arguments, madame la ministre.
M. François Autain. Vous auriez pu faire en sorte qu’elle le soit, mais vous ne l’avez pas fait et je le regrette ! Ce n’est pas innocent !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La réflexion a néanmoins été menée.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 306 et 389.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 390, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après le XIII de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 6323-3 du code de la santé publique, il est inséré un chapitre III ter ainsi rédigé :
« Chapitre III ter
« Dispositions communes
« Art. L. ... - Afin de permettre une concertation sur toutes les dispositions réglementaires qui peuvent concerner les centres de santé, les maisons de santé et les pôles de santé, ainsi qu'une réflexion sur les projets innovants sanitaires et sociaux qu'ils pourraient mettre en place, il est créé une instance nationale présidée par le ministre chargé de la santé, regroupant notamment les représentants de l'État, des caisses nationales d'assurance maladie, des gestionnaires et des professionnels soignants des centres de santé, ainsi que des professionnels de santé des maisons de santé et des pôles de santé.
« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions de fonctionnement ainsi que la liste des membres admis à participer aux travaux de cette instance nationale. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Le précédent amendement n’ayant pas été adopté, nous présentons cet amendement de repli.
Dans la mesure où vous n’avez pas souhaité conserver l’instance nationale de concertation des centres de santé, dont vous aviez la présidence, madame la ministre, et qui, comme vous l’avez-vous-même indiqué, ne s’est jamais réunie – cela vous sert d’ailleurs de prétexte pour la supprimer – nous vous proposons de créer une nouvelle instance de concertation.
Cette structure intègrerait les centres de santé, les maisons de santé pluridisciplinaires, les pôles de santé, soit toutes les formes d’exercice collectif de la médecine de proximité et de premiers recours.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est exactement le texte de 2002 !
Mme Isabelle Pasquet. Visiblement – nous l’avons constaté en commission – le groupe UMP du Sénat, tout au moins une partie de ce groupe, est plutôt hostile aux centres de santé,…
M. Alain Gournac. C’est faux !
Mme Isabelle Pasquet. …au seul motif que les médecins qui y exercent ont fait le choix du salariat.
Je tiens à rappeler que ce choix n’a pas d’incidences négatives sur le nombre de patients accueillis dans une journée. Ces médecins salariés ne font pas moins ni plus d’actes que les médecins libéraux exerçant en cabinet.
Ils ont opté pour un exercice collectif, ce que l’on peut comprendre et même encourager, et pluridisciplinaire de la médecine. Cette démarche est, me semble-t-il, identique à celle des médecins exerçant en maison de santé, à ceci près que les médecins des centres de santé ont choisi de ne pas être soumis à une rémunération à l’acte, préférant un forfait qui revêt la forme d’un salaire.
Notre amendement tend donc à permettre, sans différence de forme, de nature ou de mode de rémunération des personnes concernées, l’instauration d’une nouvelle instance de concertation qui aurait pour spécificité d’intégrer tous les professionnels ayant opté pour un mode collectif d’exercice de la médecine de ville.
Si l’on tient compte de l’importance que notre Haute Assemblée accorde à ces expérimentations, notamment au travers des maisons de santé, cet amendement va dans le bon sens. C’est pourquoi nous vous invitons à l’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Nous ne sommes pas plus favorables à l’instance de concertation proposée par cet amendement que nous ne l’étions à celle qui concernait les seuls centres de santé.
La mise en place des agences régionales de santé, les moyens que ces structures mettront en œuvre pour organiser l’offre et les parcours de soins et pour promouvoir les différentes formes d’exercice groupé, qui sont d’ailleurs très complémentaires, seront beaucoup plus utiles, selon nous, qu’une instance de concertation nationale.
Nous préférons donc faire confiance à la concertation, sur le terrain et dans l’action, et nous avons, en conséquence, émis un avis défavorable sur cet amendement n° 390.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pour les mêmes raisons que celles que nous avons développées sur les amendements précédents, notre avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, pour explication de vote.
M. Alain Gournac. Je ne peux pas accepter d’entendre nos collègues communistes prétendre, dans une de leurs déclarations, que nous sommes contre les centres de santé. C’est faux ! Si c’était vrai, je ne prendrai pas la parole !
Nous sommes favorables aux centres de santé !
L’analyse selon laquelle une partie du groupe UMP s’opposerait à ces dispositifs est inexacte et je tenais à faire cette rectification. Bien évidemment, comme nous l’avons déjà expliqué précédemment, le groupe UMP votera contre cet amendement, mais je ne peux pas laisser passer ces propos, qui ne correspondent pas à la vérité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. L'amendement n° 391, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le XIV de cet article pour l'article L. 6111-3 du code de la santé publique, remplacer les mots :
de santé
par les mots :
publics de santé ou privés d'intérêt collectif
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Cet amendement donnera peut-être à nos collègues de la majorité l’occasion de préciser leur conception des centres de santé.
L’article L.6111-3 du code de la santé publique, dans la rédaction proposée par cet article 1er du projet de loi, vise à autoriser les établissements de santé à créer et gérer des centres de santé.
Nous ne sommes pas opposés à cette mesure, dont on comprend qu’elle vise notamment à désengorger les services des urgences des hôpitaux. Elle permet effectivement aux établissements de santé de disposer, au plus près des populations, d’un lieu d’accueil pluridisciplinaire pour distribuer des soins aux patients dont les pathologies ne relèvent pas de l’hôpital.
Cette disposition vise également – c’est en tout cas ce que nous espérons ! – à prendre en compte les difficultés financières d’une partie de nos concitoyens, qui choisissent parfois de se rendre au service des urgences afin d’éviter d’avancer les frais exigés dans les consultations libérales. Je dois avouer que le rejet d’un certain nombre d’amendements a quelque peu émoussé notre espoir à ce stade du débat.
Toutefois, même si nous sommes favorables à cette disposition, nous souhaiterions aussi être rassurés sur la nature des centres de santé, qui ne peuvent se limiter à être un service extérieur à l’hôpital. Ils doivent avoir un projet médical propre, afin de satisfaire au mieux les besoins des populations. En ce sens, permettre aux élus locaux de participer à la concertation qui fixe ce projet médical aurait été très intéressant.
Notre amendement, quant à lui, tend à limiter la possibilité offerte par cet article aux seuls établissements publics de santé ou établissements privés à but non lucratif, afin d’éviter que des centres de santé créés et gérés par des cliniques commerciales ne servent à ces dernières d’aspirateur à clients. Vous savez, madame la ministre, que ces pratiques sont déjà très utilisées et votre loi tend à les développer davantage.
Nous voyons déjà comment les services d’urgence sont profitables aux établissements commerciaux, dont les objectifs résident moins dans la satisfaction des besoins en santé que dans les exigences de rentabilité imposées par les actionnaires.
L’adoption de cet amendement permettrait, tout à la fois, d’aller dans le sens du droit des malades et de lever une partie des nombreux reproches faits à ce projet de loi, notamment celui de développer à tout prix la médecine très lucrative. (Applaudissements sur quelques travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Interdire à des établissements privés à but lucratif de créer ou de gérer des centres de santé serait contraire au droit européen de la concurrence. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
La commission ne pouvait donc qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement, dont l’adoption risquerait de nous causer des difficultés avec la Commission européenne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je remercie M. le rapporteur de son explication juridique, mais je souhaite aller plus loin sur ce sujet.
Les centres de santé offrent des soins de premier recours à tarif opposable. Je crois que nos concitoyens ne comprendraient pas que l’on puisse écarter des projets de centres de santé, fussent-ils portés par des établissements de santé privés.
M. Alain Gournac. Bien sûr !
M. François Autain. Il faudrait leur expliquer !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cela contribuerait, dans les zones périurbaines, à créer un défaut d’accès aux soins de premier recours.
Véritablement, les craintes exprimées ne me paraissent pas fondées…
M. François Autain. Vous êtes naïve, madame la ministre !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … et la notion de produits d’appel ne me paraît pas correspondre aux réalités du terrain.
Loin d’être des structures légères et lucratives, les centres de santé nécessitent un investissement et le recrutement de professionnels de santé salariés. Leur rentabilité est faible, pour ne pas dire négative.
Ils nécessitent un véritable engagement de la structure porteuse. On ne peut pas à la fois accuser les établissements lucratifs de ne penser qu’à l’argent et leur reprocher de créer des centres de santé qui sont presque toujours déficitaires !
Par ailleurs, la patientèle n’est jamais captive. Dans notre système de soins, le patient garde la possibilité de changer à tout moment de médecin, de choisir son lieu d’hospitalisation. Le malade qui est suivi par un centre de santé n’est pas obligé d’aller dans l’établissement privé qui aura créé ce centre.
M. François Autain. Et s’il n’y a pas d’autre choix ?