M. Guy Fischer. Bravo !
M. Yves Daudigny. À lire ce projet de réforme, que le Président de la République veut mettre en œuvre à tout prix, obsédé comme il l’est par l’image d’un patron tout-puissant et miraculeux, ainsi qu’il l’a réaffirmé hier publiquement, réforme que vous portez, madame la ministre, on ne peut tirer qu’une seule conclusion : les soignants, ceux grâce auxquels l’hôpital vit et souvent survit au quotidien, sont écartés au profit des gestionnaires ! Et c’est bien ainsi que l’ont compris les professionnels de santé.
Certes, le texte adopté par notre commission, qui est celui dont nous débattons – et il faut le redire constamment tant cette procédure est nouvelle –, redonne un peu de place aux médecins s’agissant des nominations et de la définition du projet médical, tandis que réapparaissent, bien timidement, les élus locaux au sein du conseil de surveillance.
Vous nous annonciez également en commission, madame la ministre, le 8 février dernier, que vous seriez favorable à l’ajout de deux vice-présidents au sein de la commission médicale d’établissement des CHU. Dans ses conclusions, la commission présidée par le professeur Marescaux se prononce comme vous.
M. Yves Daudigny. Mais ces maigres avancées, dont vous obtiendrez peut-être la suppression partielle lors de leur examen, ne suffiront pas à rétablir une « gouvernance équilibrée », pas plus que la « démocratie sanitaire », auxquelles vous vous référez pourtant à profusion.
Entre « l’ère du mandarin et celle du PDG », il y a pourtant une marge, mais vous l’ignorez !
De nombreuses questions se posent et devront être évoquées au cours de ce débat, notamment au sujet des communautés hospitalières de territoire, des groupements de coopération sanitaire, des reconversions.
Mais je veux encore souligner deux réalités majeures :
La première concerne l’usager malade ou en perte d’autonomie, qui, malgré tous vos efforts, ne sera jamais rentable ! Il n’a pas sa place dans la configuration sanitaire que vous proposez.
La seconde réalité est celle du corps soignant : l’éthique et le sens de son exercice professionnel contredisent absolument les grilles d’évaluation et de performance dont vous vous acharnez à ériger partout le culte, y compris au sein des hôpitaux.
Pouvez-vous comprendre que la maladie et la perte d’autonomie forment autant de ruptures, dérangeant bien des ordres établis dans nos existences humaines ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous pensez être le seul à savoir cela ? C’est incroyable ! Quelle arrogance !
M. Yves Daudigny. C’est ce vrai changement de paradigme auquel nous confrontent toutes les épreuves de la vie ; c’est cette rupture-là qui nous conduit à vouloir penser autrement la politique publique que vous nous proposez.
J’en viens à la réorganisation territoriale de notre système de santé.
Le principe même du pilotage régional proposé n’est pas en cause. C’est même une idée maintenant assez ancienne, car la territorialisation s’inscrit de longue date dans les réformes engagées.
Mais le consensus s’arrête là !
L’objectif, l’organisation et les moyens des agences régionales de la santé et de l’autonomie qui seront mises en place subissent pareillement les conséquences de l’approche comptable appliquée à la gouvernance de l’hôpital : la régionalisation est simplement mise au service d’une recentralisation dont l’objectif est la maîtrise des dépenses de santé.
Ces agences régionales seront l’étage intermédiaire dans une véritable hiérarchie pyramidale, allant du Conseil des ministres au directeur de l’hôpital.
Notre assemblée décidera s’il doit ou non entrer dans la mission des Agences de « déterminer la politique régionale de santé » ou de « mettre en œuvre à l’échelon régional les objectifs de la politique nationale de santé ». L’enjeu est d’importance.
Je l’ai dit tout à l’heure, hormis l’obligation de résultats budgétaires à laquelle les directeurs généraux des agences régionales seront tenus, une grande liberté leur est laissée.
Leur structuration reproduit le schéma appliqué à l’hôpital, qui réduit tout autre acteur au rôle de figurant au sein d’un conseil de surveillance, lequel ne surveille plus grand-chose.
Nous reparlerons, madame la ministre, de cette phrase anodine, glissée à l’article L. 1432-3 du code de la santé publique, qui autoriserait « des membres » du conseil de surveillance à disposer de plusieurs voix.
M. François Autain. C’est scandaleux !
M. Yves Daudigny. Une autre question majeure se pose, celle du plus large périmètre de compétences retenu pour ces agences régionales. Pourvu qu’elles ne meurent pas d’indigestion, a-t-on parfois entendu dire ! Une telle disposition nécessite que les articulations entre les ARS et l’assurance maladie soient d’ores et déjà clairement déterminées. Or tel n’est pas le cas, s’agissant notamment de la gestion du risque.
Une seconde nécessité de coordination des compétences s’impose entre les agences régionales à l’égard, cette fois, des conseils généraux : les termes de « pilotage », « en association », « conjointement » ou « en collaboration » ne sont pas équivalents.
Nous vous proposerons, à l’évidence, de clarifier l’articulation de l’architecture de la planification et de la programmation médico-sociale en confirmant la position de chef de file du département en la matière.
Alors même que d’aucuns ont également réussi à faire planer l’incertitude sur l’avenir de l’organisation territoriale départementale, il n’en faut pas moins tabler sur l’expérience et l’expertise acquise par les départements dans ce domaine difficile qu’ils gèrent maintenant parfaitement.
Une modification positive adoptée par l’Assemblée nationale et maintenue, à juste titre, par la commission des affaires sociales du Sénat doit être saluée. Je pense, bien sûr, au mécanisme de fongibilité asymétrique, et même dynamique.
D’autres questions restent non résolues, telle celle de l’accueil temporaire.
Qu’en sera-t-il demain de la spécificité du secteur médico-social ? Prendre soin – le médico-social – et accompagner – le social – ne sont pas « soigner ». Faut-il nier le risque de voir, demain, le sanitaire supplanter et effacer le médico-social et le social ? La mise en place de l’agence nationale d’appui à la performance illustre ce risque.
Permettez-moi d’achever ce rapide survol du projet de loi en évoquant l’un des aspects qui me tient le plus à cœur, celui du droit fondamental à la santé, que le cumul des franchises, des déremboursements et des dépassements, et, pour beaucoup, la perte de leur emploi, remet en cause.
L’accès aux soins est, selon vous, l’objectif premier du projet de loi, alors qu’il devrait être le seul, le reste ne concernant que les moyens ! Vous affirmiez avec la plus grande fermeté, le 8 février dernier, devant notre commission, que, « en ce qui concerne l’accès aux soins, il faut combattre avec force les discriminations financières qui y feront obstacle, tant pour la médecine de ville que pour les établissements de santé ». De quels moyens armez-vous l’agence régionale pour mettre en œuvre ces solides intentions ?
M. François Autain. Il n’y aura rien !
M. Yves Daudigny. Aucune, en effet !
L’Assemblée nationale et notre commission ont ajouté la prise en compte par les schémas régionaux d’organisation des soins, les SROS, aux côtés de l’exigence d’efficience, celle d’accessibilité, de maintien de tarifs « sécurité sociale », ainsi que, sur notre proposition, les temps de parcours. Mais rien qui ne soit opposable dans tout cela ! Disparaît même du texte adopté par nos collègues députés la maigre possibilité qu’avait l’agence régionale de fixer une proportion d’actes sans dépassements aux cliniques privées en situation de monopole, alors que, pour la majorité de nos concitoyens, selon le constat qui a été dressé, l’inégalité est avant tout financière. Ainsi, 32 % des Français reculent les prises de rendez-vous avec un médecin et 17 % l’excluent totalement par manque d’argent.
L’affichage des tarifs dans les salles d’attente rendu obligatoire, si tant est qu’il soit respecté, paraît bien dérisoire au regard des enjeux de santé dont ce projet de réforme prétendait se saisir.
De même, l’agence régionale de santé reste dénuée d’outils de régulation pour la médecine de ville, alors que l’agence aura à charge de coordonner les parcours de soins dont la segmentation génère des coûts supplémentaires et que toutes les mesures incitatives déjà expérimentées ont prouvé leur inefficacité.
S’agissant de la discrimination et du refus de soins, force est de constater là encore que les moyens propres à faire de l’accès aux soins une réalité sont refusés. Les pratiques, dites du testing, pourtant efficaces, car dissuasives, ont été supprimées, tandis que l’établissement de la preuve d’une discrimination ou d’un refus de soins injustifié est maintenue à charge du patient, ce qui, dans les faits et de manière certaine, met les médecins fautifs à l’abri de toute plainte.
Il est pour le moins malheureux d’être tenu de redire aujourd’hui que reconnaître un droit n’est rien s’il n’est pas assorti de moyens procéduraux pour y accéder. Prétendre vouloir lutter contre les discriminations fautives et les refus de soins injustifiés suppose de s’en donner les moyens.
Sur la forme, madame la ministre, trois raisons au moins justifiaient de remettre votre ouvrage sur le métier.
Les « amendements CHU », emblématiques d’une frénésie de réformes dont l’utilité est trop souvent démentie par la suite et, en tous cas, symptomatiques du peu de considération que le Gouvernement porte à la représentation nationale, constituent l’une des premières raisons, et non la moindre.
La deuxième raison réside dans le « saucissonnage » que vous opérez sur les questions de santé, en présentant des réformes successives, avec, notamment, l’annonce de textes distincts sur la santé mentale, la bioéthique, ou encore la santé publique.
L’ampleur que l’intitulé de votre projet de loi annonçait aurait mérité une vision d’ensemble, ce qu’un projet de loi d’orientation aurait permis.
La troisième raison tient à la réforme de la procédure législative dont votre projet fait les frais. Peut-être l’avez-vous d’ailleurs brièvement regrettée, madame la ministre !
Mais le plus grave, l’inacceptable, ce qui n’est pas négociable, se situe sur le fond de ce projet. La logique n’en est pas inversée.
Madame la ministre, vous faites constamment état de la très large concertation qui a précédé le dépôt du projet de loi. Vous arguez de votre volonté de « préserver et renforcer les valeurs de service public », celles « qui fondent notre système de santé » ; vos discours résonnent de « démocratie sanitaire », de « principes de qualité, de solidarité et de justice ».
Mes chers collègues, laisserons-nous disparaître les principes fondamentaux et les mécanismes de solidarité que l’État abandonne sous nos yeux ? Accepterons-nous d’être les fossoyeurs du service public hospitalier (Non ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.), reconnu par ailleurs comme étant l’un des meilleurs au monde, mais qui ne rapporte pas, ou pas assez d’argent ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il ne rapporte pas du tout ; il coûte, c’est tout ! C’est normal d’ailleurs ! Pourquoi voulez-vous qu’il rapporte de l’argent ?
M. Yves Daudigny. Un système de santé livre une image de la solidarité d’une société. La santé, touchant chaque individu jusque dans son intégrité et sa dignité, est le miroir de la société. L’image de la société que votre projet de loi laisse transparaître n’est pas la nôtre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Dériot.
M. Gérard Dériot. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un projet de loi portant l’ambition de réformer l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires est forcément un texte très attendu, suscitant beaucoup d’espoir et, inévitablement, un certain nombre de craintes.
La santé demeure, en effet, l’une des premières préoccupations de nos concitoyens. Ils sont très attachés à notre système « à la française » que nous envient beaucoup de pays étrangers.
Réformer le système de santé demande donc du courage, madame la ministre, car vouloir le réorganiser, c’est immédiatement se retrouver au cœur d’une contradiction majeure, une contradiction entre, d’une part, l’idée partagée par l’ensemble de nos concitoyens que la vie n’a pas de prix et, d’autre part, la responsabilité d’assumer le coût de la santé. Or notre pays vieillit et voit naturellement ses dépenses de santé augmenter.
D’ailleurs, la progression des dépenses d’assurance maladie pour les hôpitaux et les cliniques de plus 50 % depuis 1998 comme les moyens consacrés au plan « Hôpital 2007 » et au plan « Hôpital 2012 » montrent combien la collectivité nationale ne ménage pas ses efforts budgétaires en la matière.
Pour autant, nous ne pouvons nous permettre de suivre la seule logique du « toujours plus de moyens ».
Ce courage, nous le devons à nos enfants. Selon un mot bien connu de Saint-Exupéry, « nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Gérard Dériot. En matière de santé, c’est à nos enfants que nous empruntons le règlement de nos dépenses actuelles de santé …
M. Gérard Dériot. … en leur léguant, via la CADES, la charge du remboursement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Gérard Dériot. Une telle attitude, injuste et désinvolte envers les générations futures, ne saurait perdurer.
Elle nous interpelle sur les modes de financement – c’est l’objet du projet de loi de financement de la sécurité sociale –, mais aussi sur l’efficience de nos dépenses, et donc sur l’organisation du système. C’est bien l’objet du présent projet de loi.
Ce courage, nous le devons également à nos concitoyens, car les crédits supplémentaires, tout comme les nombreuses réformes et les plans successifs n’ont pas permis jusqu’alors de garantir un égal accès de tous à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire et l’accueil dans les hôpitaux ne répond pas toujours aux attentes.
Sur le terrain, il n’est pas simple de trouver un médecin le soir ou la nuit, sans parler de certains territoires ruraux qui pourraient devenir de véritables déserts médicaux.
Ce courage, nous le devons enfin aux professionnels de santé, aux médecins, aux personnels soignants, en particulier dans nos hôpitaux, dont les personnels méritent toute notre reconnaissance, car ils ne ménagent pas leur peine.
Au quotidien, ils font preuve de beaucoup de compétences, de dévouement, d’attachement à leur travail, de résistance à la fatigue et au stress, et ce malgré des conditions d’exercice parfois difficiles.
Toute évolution du système ne saurait être possible sans leur motivation et leur adhésion.
Eh bien, ce courage, madame la ministre, vous l’avez en nous présentant un projet de loi ambitieux, cohérent et volontaire.
À nos yeux, il a le grand mérite de rendre notre système de santé plus efficace en réorganisant globalement la prise en charge des malades par les différents acteurs, qu’il s’agisse des établissements hospitaliers ou des professionnels de santé.
Le décloisonnement de son organisation, le développement des coopérations entre médecine de ville et médecine hospitalière, le renforcement de la coopération entre secteur public et secteur privé, sont indispensables.
De plus, le texte donne toute sa place à la prévention, restée le parent pauvre de notre système de santé.
Bien sûr, le texte initial a beaucoup évolué à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale. À son tour, la commission des affaires sociales du Sénat l’a amendé.
Qu’il me soit permis d’en profiter pour dire quelques mots sur les conditions dans lesquelles nous avons étudié ce projet de loi en commission, conformément à la nouvelle procédure prévue par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Reconnaissons que les désagréments rencontrés ces derniers jours nous font espérer un certain nombre d’ajustements futurs susceptibles de rendre nos travaux plus sereins.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Certes !
M. Gérard Dériot. Quoi qu’il en soit, ces difficultés d’adaptation ne sauraient affaiblir l’intérêt que nous procure désormais la possibilité d’examiner en séance le texte résultant de nos travaux en commission.
En cet instant, je salue naturellement le travail extraordinaire réalisé par M. le rapporteur, notre collègue Alain Milon, …
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est vrai !
M. Gérard Dériot. … qui s’est totalement investi pour rester à l’écoute du terrain, des patients et des professionnels, mais aussi pour rapprocher nos points de vue, et ce afin de proposer un texte enrichi, amendé et certainement plus équilibré.
Je remercie également le président de la commission, qui a su organiser au mieux notre travail. Je n’oublie pas tous les services de la commission, qui ont travaillé dans des conditions extrêmement délicates, et qui ont toute notre gratitude.
Sans revenir sur l’ensemble du texte et sur toutes les modifications que nous avons soutenues en commission, puisque les orateurs précédents viennent de le faire, j’évoquerai cinq points qui me tiennent à cœur.
Tout d’abord, je parlerai de la gouvernance hospitalière.
Les rapports Larcher et Couanau ont bien diagnostiqué le problème de la gouvernance à l’hôpital. Vous nous proposez donc de dynamiser son fonctionnement en réformant le conseil d’administration, en renforçant le pouvoir et l’autonomie du directeur, qui devra faire tandem avec le président de la commission médicale d’établissement, la CME, qui devient vice-président du directoire.
Cette relation entre le directeur et le président de la CME nous semble tout à fait essentielle afin qu’aux impératifs de saine gestion observés par le directeur soit associée la compétence des praticiens. Cette relation a d’ailleurs été renforcée et clarifiée dans la nouvelle version du texte.
Je vous rejoins tout à fait, madame la ministre, lorsque vous rappelez que le pouvoir du directeur « est à l’aune de sa responsabilité, qui est forte. » Mais pourquoi penser qu’il ne pourrait pas y avoir de parfaite relation entre un directeur et un président de CME ?
M. Gérard Dériot. Comment, d’ailleurs, un directeur pourrait-il mettre en application un projet médical d’établissement sans l’accord de son corps médical ?
M. Gérard Dériot. Ce cas de figure est tellement aberrant que la question ne se pose même pas !
M. Gérard Dériot. Sur d’autres points, la commission des affaires sociales a également remanié les règles de la gouvernance des établissements.
Les nouveaux pouvoirs donnés au conseil de surveillance me semblent tout à fait légitimes : délibération sur la participation à toute opération de coopération ou de communauté hospitalière de territoire ; consultation sur le budget prévisionnel de l’établissement ainsi que sur le programme d’investissements, les opérations immobilières et le règlement intérieur de l’établissement ; renforcement de ses moyens de contrôle.
Je note également avec satisfaction que la nomination des personnalités qualifiées membres du troisième collège sera assurée par les exécutifs des collectivités territoriales pour trois d’entre eux et par le représentant de l’État pour les deux autres.
Néanmoins, je regrette un peu la suppression de la présidence de droit du maire.
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
M. Gérard Dériot. L’hôpital est, en général, le premier employeur de la ville ou de l’agglomération sur laquelle il est implanté. C’est un enjeu majeur pour les élus parce que c’est un enjeu majeur pour les populations.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Guy Fischer. On est d’accord !
M. Gérard Dériot. Il me paraît évident que le maire doive être impliqué.
Madame la ministre, je ne serai pas étonné que, dans quelques années, beaucoup, y compris dans votre ministère, ne regrettent le rôle que jouait le maire à la tête du conseil d’administration, en tandem avec son directeur, pour apaiser les tensions et faciliter les évolutions nécessaires. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. Guy Fischer. Voilà des propos de bon sens !
M. Gérard Dériot. Enfin, en ce qui concerne l’organisation des communautés hospitalières de territoire, les CHT, je me réjouis, là aussi, des modifications de la commission, qui a affirmé, suivant l’inspiration du rapport Larcher, la nature conventionnelle de la CHT, au nom du principe de volontariat qui interdit d’imposer la création d’une CHT.
M. Guy Fischer. Vous y croyez, vous ?
M. Gérard Dériot. La deuxième remarque particulière de ma part porte sur la création des agences régionales de santé, les ARS.
Le pilotage trop fragmenté et mal coordonné de notre organisation sanitaire constituait une faiblesse manifeste de notre système de santé.
L’objectif consistant à décloisonner à l’échelon régional les compétences relevant des différents aspects de la politique de santé et à déconcentrer le pilotage à l’échelon des régions et des territoires nous semble donc louable.
Nous espérons que chaque agence régionale de santé va ainsi permettre d’additionner les forces.
Bien évidemment, la politique de la santé est et doit rester une politique nationale. Les ARS n’en seront qu’un échelon déconcentré.
Cependant, là aussi, nous attendons que cette nouvelle gouvernance instaurée par les ARS nous offre une vraie démocratie sanitaire, à même de susciter les échanges entre l’État, les professionnels de santé, les représentants des associations et des usagers, et les collectivités territoriales, qui se sont déjà très largement investies dans ce domaine, souvent pour pallier certaines insuffisances.
Ma troisième remarque porte sur la lutte nécessaire contre les déserts médicaux.
Ce texte vise aussi à offrir à tous les Français, sur tout le territoire, un égal accès aux soins. Il s’agit là d’une réelle préoccupation à l’heure où nombre de territoires voient les praticiens partir en retraite sans être remplacés.
Le conseil général de l’Allier dont je fais partie a été l’un des tout premiers à proposer des bourses d’études pour des étudiants en médecine qui s’engagent à s’installer dans les zones déficitaires.
Servie par une campagne de promotion assez musclée, cette initiative visant à enrayer la désertification médicale porte ses fruits aujourd'hui. Les contrats que nous avons signés il y a quelques années sont remplis et commencent petit à petit à favoriser l’installation de jeunes médecins dans les zones en déficit.
Je me réjouis donc de voir notre exemple suivi au niveau national, avec l’instauration du contrat d’engagement de service public pour les étudiants en médecine, créé à l’article 15 bis du projet de loi.
Comme d’autres mesures, tel le développement de maisons de santé pluridisciplinaires, cette allocation mensuelle ne peut que renforcer l’attractivité du métier de médecin généraliste, même en zone rurale où l’exercice de ce métier est peut-être le plus intéressant.
Je suis bien d’accord avec vous, madame la ministre, toutes les mesures coercitives que nous pourrions imaginer ne feront que détourner un peu plus les médecins de cette spécialité.
Ma quatrième remarque concerne la lutte contre l’obésité et le titre III, « Prévention et santé publique », du projet de loi. Le problème de l’obésité m’est particulièrement cher pour avoir rédigé un rapport sur le sujet avec l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, l’OPEPS. Nous en reparlerons, bien sûr, lors de l’examen d’un projet de loi ultérieur qui sera spécifiquement consacré à la santé publique.
Enfin, le dernier sujet qui me tient particulièrement à cœur est la réforme par ordonnance de la biologie médicale, que j’ai pratiquée pendant vingt-cinq ans.
Aux termes de l’article 20, le projet de loi autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à une réforme d’ensemble de la biologie médicale en France.
Cette réforme, particulièrement complexe et technique, a été préparée grâce à des consultations larges et fructueuses menées par le ministère auprès des professionnels, et après un processus d’expertise de grande qualité, je pense notamment au rapport Ballereau.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Gérard Dériot. Ces travaux ont permis de préparer la rédaction de l’ordonnance sous le signe de l’amélioration de la qualité et de la sécurité pour les patients.
Afin de lever toute ambiguïté, vous avez, madame la ministre, remis à la commission des affaires sociales le projet d’ordonnance qui paraît tout à fait correspondre à nos attentes.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Gérard Dériot. Il permettra ainsi de répondre aux progrès techniques importants que le secteur a accomplis, en même temps qu’il rejette l’ouverture du capital des laboratoires à des organismes financiers. Il recueille donc tout notre soutien.
C’est donc bien, madame la ministre, le courage et l’opportunité de ce projet de loi que nous soutenons aujourd’hui, mais aussi le courage et l’intelligence que vous avez eus d’accepter un certain nombre d’ouvertures et d’améliorations.
Ainsi, espérons-nous garantir à nos concitoyens de continuer à bénéficier du meilleur système de santé au monde, avec une meilleure permanence des soins, moins d’attente aux urgences, une meilleure prise en charge thérapeutique des malades et davantage de prévention.
Tels sont, en tous les cas les vœux que je forme aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ce fut une première : à l’occasion de ce projet de loi, nous avons expérimenté la réforme du fonctionnement du Parlement qui permet aux ministres de participer aux débats de la commission.
Pendant quatre jours, installée derrière une petite table, dans la petite salle de la commission des affaires sociales, Mme la ministre a donc participé aux débats et a donné son avis lorsque cela semblait nécessaire. (Sourires.)
Il paraît que cela renforce le pouvoir du Parlement ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Pour ce qui est des droits de l’opposition, nous n’avons pas l’impression qu’ils aient été renforcés : les réponses positives du rapporteur ont toujours été aussi rares, les débats ne sont pas publics, nous parlons dans le vide !