M. Hubert Haenel. Cette construction inédite ne réglera pas les problèmes récurrents issus de la loi de 1997. Sera-t-elle même de nature à satisfaire la Commission européenne ? Je suppose que vous avez obtenu quelques garanties en ce sens, monsieur le secrétaire d’État… À défaut, vous n’auriez pas déposé un tel amendement.
Le service spécialisé que cet amendement entend créer au sein de la SNCF a-t-il vocation à être filialisé ou transféré à RFF ? Ce n’est pas à exclure, même si personne ne peut dire aujourd’hui ce qu’il adviendra. M. le rapporteur vient d’affirmer que cette séparation interne à la SNCF, qui devrait être effective d’ici un ou deux ans, présente quelques avantages, sans plus de précisions.
À juste titre, notre rapporteur s’est bien gardé de sous-amender votre texte, monsieur le secrétaire d’État. Cela n’aurait fait qu’ajouter de la complexité à un système qu’il faudra sans doute prochainement corriger. Je suis d’ailleurs persuadé que le premier rapport de l’autorité de régulation proposera de corriger le système que nous allons très certainement adopter aujourd’hui.
On aurait pu également se contenter de créer une autorité de régulation robuste, à charge pour elle de proposer, d’ici à dix-huit mois ou deux ans, le système qui lui permettrait d’exercer correctement sa mission de contrôle. La Commission européenne ne demande rien de plus.
Monsieur le secrétaire d’État, l’ARAF sera-t-elle mise en place immédiatement après la publication de la loi au Journal officiel ou au terme d’un délai supplémentaire ?
Vous avez également confié une mission de préfiguration à un brillant ingénieur général des ponts et chaussées, M. Ourliac – tous les ingénieurs des ponts et chaussées sont brillants, d’ailleurs ! Où en sont ses travaux ?
Si l’expérimentation ne semble pas encore à l’ordre du jour, il me semble toutefois que votre discours ne l’a pas exclue. Quand on fait de la politique correctement, on ne peut pas partir du postulat qu’il ne se passera rien au cours des dix prochaines années. Ce n’est pas réaliste de raisonner ainsi !
Tout à l’heure, M. le rapporteur nous a confié, avec son sourire habituel, que l’on ne pourrait sans doute pas attendre 2019 avant d’ouvrir les lignes TER à la concurrence.
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Hubert Haenel. Si je me fie pourtant à la réponse que m’avait faite Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, l’ouverture à la concurrence n’est pas pour demain. Il est vrai qu’il faudra, au préalable, amender la loi d’orientation sur les transports intérieurs, la LOTI. Mais la politique n’a sans doute pas dit son dernier mot. En tout état de cause, la question se posera nécessairement le jour où le règlement sur les obligations de service public, le règlement OSP, s’appliquera pleinement, c’est-à-dire, au plus tard, en 2019.
Faut-il d’ici là adopter la politique de l’autruche et attendre ? Je ne le crois pas, car la concurrence est à nos portes. Si nous n’avons pas réussi à le faire au Sénat, je suis persuadé que des amendements relatifs à l’expérimentation seront déposés à l'Assemblée nationale.
Ne serait-il pas souhaitable de mener dès à présent une réflexion sur l’ouverture des lignes TER à la concurrence ? Monsieur le secrétaire d’État, envisagez-vous de procéder à une évaluation des conséquences d’une telle ouverture ?
Vous avez évoqué la création d’un groupe de travail pour procéder à cette évaluation, comme je l’avais moi-même proposé dans un précédent rapport.
M. Hubert Haenel. Ce groupe de travail pourrait être constitué à l’image de celui qui avait été mis en place par l’un de vos prédécesseurs, M. Bernard Bosson, pour préparer l’expérimentation de la régionalisation ferroviaire. Sa présidence avait été alors confiée à un parlementaire, en l’occurrence votre serviteur. Aujourd’hui, je pense que notre excellent collègue Francis Grignon pourrait assumer cette fonction. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Philippe Richert. Tout à fait ! Bravo !
M. Hubert Haenel. Le secrétariat était assuré par la directrice des transports terrestres de l’époque, Mme Anne-Marie Idrac. Ce groupe de travail pluraliste comprenait des représentants tant des régions concernées – élus et services – que de l’État, dans sa diversité – de la direction du budget à la direction générale des collectivités locales en passant par celle de l’aménagement du territoire… – et de la SNCF, au niveau central et régional.
Il conviendrait sans doute, monsieur le secrétaire d’État, d’élargir la composition de ce groupe de travail à l’ensemble des partenaires intéressés par le développement de la régionalisation.
M. Charles Revet. Le travail est préparé !
M. Hubert Haenel. Nous sommes là pour ça !
M. Charles Revet. Absolument !
M. Hubert Haenel. C’est le sens de la coproduction législative, n’est-ce pas, monsieur Mercier ?
Au bénéfice de ces observations, et à condition que les amendements du rapporteur, et quelques autres provenant d’horizons politiques différents, soient adoptés, le groupe UMP du Sénat votera ce projet de loi. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un texte dont la plupart des volets sont, convenons-en, très techniques. Cependant, derrière les apparences, se cachent, comme toujours, de véritables enjeux qu’il faut savoir décoder.
Le train est à l’origine de la plus grande révolution industrielle en Europe. Aujourd’hui, bien que concurrencé par d’autres modes de transport, le transport ferroviaire demeure un outil fondamental du développement économique et du désenclavement de nos territoires, a fortiori des territoires ruraux.
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, il est bien regrettable que le Gouvernement ait déclaré l’urgence sur le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaire. Et je ne parlerai pas des reports et autres décalages de ce texte dans l’ordre du jour, qui expliquent que nous soyons si peu nombreux en séance et que ne soient présents, si je puis dire, que les plus motivés d’entre nous, voire les seuls spécialistes des questions ferroviaires et, plus largement, des transports.
Je comprends que nos engagements européens nous obligent à répondre aux griefs formulés par la Commission européenne contre la France. Mais il ne faut jamais confondre vitesse et précipitation, surtout quand on évoque les transports. Si la vitesse, à l’image de notre TGV, permet un réel gain de temps, la précipitation, quant à elle, est un facteur aggravant de risques, voire d’accidents, y compris dans le travail parlementaire !
Par exemple, l’introduction par voie d’amendements d’un certain nombre de dispositions destinées à réparer les transpositions imparfaites du deuxième paquet ferroviaire risque à l’évidence de brouiller la visibilité que l’on est en droit d’attendre pour l’organisation des transports dans notre pays.
Nous connaissons tous la capacité de mobilisation et de blocage des cheminots. Pourtant, vous n’avez pas hésité à prévoir brutalement la séparation entre la SNCF et ses agents chargés de la gestion des capacités de circulation. Sur ce point, j’imagine qu’un débat va s’engager.
Quant à la création de la nouvelle autorité, la Commission de régulation des activités ferroviaires, peut-être bientôt rebaptisée « Autorité de régulation des activités ferroviaires » si la proposition de la commission est adoptée, ne suffisait-elle pas à satisfaire la mise en demeure de la Commission européenne ?
Ce sujet suscite des inquiétudes, ce qui est bien normal. Je le répète, mes chers collèges, la question des transports est vaste, car elle a trait non seulement à la mobilité, mais aussi à l’accessibilité, à la fracture territoriale et aux enjeux environnementaux.
Le secteur des transports mobilise des moyens publics colossaux, et les efforts en sa faveur devront être amplifiés, même dans un cadre libéralisé. En effet, si cette libéralisation est tant redoutée, ce n’est pas pour des raisons idéologiques. On peut en effet souhaiter la concurrence lorsque celle-ci contribue à diversifier l’offre et à faire baisser les tarifs pour les usagers. Mais ne nous leurrons pas : aucun partenaire privé ne s’occupera des lignes peu rentables, qui ont pour seule vocation de répondre aux soucis légitimes d’aménagement du territoire.
Mme Nathalie Goulet et M. Michel Mercier. La ligne Paris-Granville, par exemple ! (Sourires.)
M. Yvon Collin. L’État et les collectivités locales seront toujours sollicités dans leur rôle de régulateur. C’est la raison pour laquelle, c’est vrai, notre pays a transposé les directives européennes a minima. Il fallait que les pouvoirs publics conservent une certaine mainmise sur les transports. De fait, nous nous retrouvons avec deux entités juridiques distinctes, RFF et la SNCF, qui, en réalité, restent très liées.
La commission des affaires économiques semble déterminée à remettre de l’ordre dans cette situation,…
M. Pierre Hérisson, vice-président de la commission des affaires économiques. Absolument !
M. Yvon Collin. …avec, à mon sens, un zèle un peu trop affirmé en ce qui concerne le cabotage.
Soit ! Prenons acte de l’horizon désormais incontournable de l’ouverture à la concurrence des services ferroviaires de transport international de voyageurs le 1er janvier 2010.
Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'État, il serait souhaitable que des engagements soient pris quant à l’avenir du maillage ferroviaire de notre territoire. En effet, ces temps-ci, on entend surtout parler des lignes à grande vitesse. Certes, il est vital que celles-ci se développent ; d’ailleurs, les chantiers programmés dans le cadre du plan de relance témoignent d’un certain volontarisme à cet égard. Cependant, qu’en est-il des réseaux secondaires ? Car si les LGV contribuent au développement économique des régions, elles ne sont pas les meilleurs vecteurs du désenclavement, notamment parce qu’elles ne sont pas suffisamment reliées au réseau secondaire qui, lui, s’affaiblit et se dégrade de plus en plus.
Il ne sert à rien de développer des arrêts de TGV s’il est de plus en plus compliqué pour les usagers de les atteindre !
Sur le terrain, nous ressentons un décalage entre un discours national qui valorise une politique ferroviaire dynamique et une réalité locale, qui est celle de la suppression de lignes et d’arrêts en gare.
Dois-je vous rappeler, monsieur le secrétaire d'État, le dossier sensible de la ligne Paris-Limoges-Toulouse, dite « ligne PALITO » ? Soutenus par les élus, les habitants des bassins de vie de Gourdon, de Souillac, de Caussade et de Montauban se sont battus pour conserver leurs trains, leurs gares et leurs arrêts, parce que le désengagement de la SNCF et de son principal actionnaire, l’État, était vécu comme une vraie menace d’isolement territorial.
Mes collègues parlementaires lotois le savent mieux que quiconque, puisqu’ils ont enfin obtenu, voilà peu, le rétablissement d’arrêts en gares de Gourdon et de Souillac, au prix d’une longue mobilisation des habitants et des élus.
Mme Nathalie Goulet. Bravo !
M. Yvon Collin. Alors que la région Midi-Pyrénées s’emploie à améliorer le réseau ferré, elle doit supporter en même temps les suppressions de lignes. Le Paris-Carmaux, le train de nuit Paris-Rodez, la déclassification de la gare de Cahors sont d’autres sujets brûlants dans la région.
Je n’évoquerai pas un cas que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d'État, celui du Cantal, département particulièrement enclavé. Mon collègue Jacques Mézard a attiré votre attention à de nombreuses reprises sur ce dossier. D’ailleurs, je sais que vous le recevrez très prochainement, à sa demande, pour vous entretenir avec lui de ce dramatique problème.
M. Yvon Collin. J’imagine aisément que cette réalité est transposable à d’autres départements.
Dans ces conditions, comment ne pas appréhender, une fois de plus, les conséquences que pourrait avoir le présent projet de loi ? Comment, dans un cadre totalement concurrentiel, la survie de lignes dédiées au principe d’aménagement du territoire sera-t-elle garantie ? Le règlement européen sur les obligations de services publics est-il en mesure de permettre le maintien d’un service ferroviaire de proximité ?
Beaucoup de questions agitent les élus, car la mobilisation des usagers contre les fermetures de gares n’est pas un mince combat. Pour beaucoup, c’est le combat d’une vie, car, pour de nombreuses villes, la gare est un symbole de l’enracinement des hommes sur un territoire.
C’est pourquoi, mes chers collègues, notre vigilance de législateur avisé et soucieux des territoires ruraux, mais aussi d’élus de terrain, doit nous conduire à la plus grande prudence. Nous devons rechercher l’excellence pour nos territoires ; celle-ci passe par le désenclavement et l’accessibilité sans lesquels il n’y a pas d’attractivité touristique et économique possible.
Les territoires ruraux, ainsi que les Français qui ont fait le choix de plus en plus difficile d’y résider, ne doivent pas être les oubliés des politiques gouvernementales.
Monsieur le secrétaire d'État, je voulais ici vous le rappeler très solennellement. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous ferai part de trois réflexions.
Premièrement, je tiens à rendre hommage à la commission et à son rapporteur, qui a produit un travail d’une qualité exceptionnelle,…
M. Charles Revet. Cela a été dit, et c’est mérité !
Mme Isabelle Debré. Et reconnu !
M. Jacques Blanc. …et à saluer les réflexions conduites par Hubert Haenel !
La transposition des directives européennes en droit interne, loin de bloquer les processus, nous permet au contraire d’aller de l’avant et permettra à notre secteur ferroviaire d’être régulé et sécurisé. C’est une chance supplémentaire pour lui.
Le rôle de l’État, quant à lui, est appelé à évoluer. Aux termes de cette nouvelle gouvernance, il n’exercera plus la tutelle directe sur l’entreprise SNCF.
Pour ces raisons, je me réjouis pour notre pays que nous soyons aujourd’hui appelés à transposer ces différentes directives.
Deuxièmement, ainsi que l’a souligné notre collègue Yvon Collin, la question des liaisons internationales – je n’oublie pas le cabotage : il faut le maîtriser – ne doit pas occulter la situation des lignes du réseau secondaire. En effet, il est essentiel de maintenir et de développer un certain nombre de liaisons.
En tant que sénateur de la Lozère, vous me permettrez, monsieur le secrétaire d'État, d’évoquer le cas de la ligne Clermont-Ferrand–Nîmes, sur laquelle le maintien des gares de Langogne et de Mende apparaît comme une nécessité, ou celui de la ligne de fret Neussargues–Saint-Chély d’Apcher–Béziers. L’une et l’autre sont des artères de vie.
Troisièmement, monsieur le secrétaire d'État, vous qui avez été ministre de l’agriculture, vous comprendrez que l’examen de ce texte relatif aux transports me donne l’occasion de proposer une modification de l’article 54 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, aux termes duquel les départements peuvent faire appel, sous certaines conditions, à des particuliers ou à des associations pour exécuter des prestations de transport scolaire en zone rurale.
En effet, cet article, dans sa rédaction actuelle, se révèle ambigu. D’ailleurs, le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, l’avait fait observer lors de son examen en séance publique. Mon intention est non pas d’écarter les organismes professionnels de transport ou les modes concurrents de transport, mais de permettre aux départements ruraux de faire appel à des particuliers pour le transport scolaire des enfants habitant dans des zones reculées, notamment lorsque les offres classiques de transport sont trop onéreuses.
Je vais donc, avec l’aide de mes collègues Pierre Hérisson et Jacques Gautier, rectifier l’amendement déposé à cet égard afin que la commission puisse émettre un avis favorable.
Rendons hommage à l’Europe qui nous oblige à préparer l’avenir et voyons comment nous pouvons développer les TER, les liaisons ferroviaires dans les zones rurales, et nous engager dans différentes formes d’expérimentation. Enfin, laissons la possibilité aux départements très ruraux qui le souhaitent d’apporter des réponses efficaces…
M. Charles Revet. Et adaptées !
M. Jacques Blanc. … pour le transport scolaire, à un coût modéré. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
6
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur d’une question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.
Je demande à chacun d’être attentif au respect de ce temps de parole.
suites du sommet social
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Gérard Longuet. Monsieur le Premier ministre, le dialogue social n’est pas simplement une nécessité : c’est un devoir impérieux dans une crise dont on ne connaît ni l’ampleur ni la durée.
Ce dialogue social est indispensable dans un pays qui ne peut seul régler les problèmes du monde : nous pesons moins de 1 % de la population mondiale et moins de 4 % de l’économie mondiale.
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh là là !
M. Gérard Longuet. Nous avons besoin d’un dialogue social pour assurer notre cohésion et renforcer la solidarité des Français autour d’un projet commun.
Ce dialogue social doit reposer sur un diagnostic partagé. Or, de ce point de vue, monsieur le Premier ministre, nous avons le sentiment qu’il y a un immense chemin à parcourir.
Ce chemin, votre gouvernement et le Président de la République s’y sont d’ores et déjà engagés. Ainsi, hier soir, le Président de la République a annoncé qu’une mission allait être confiée à M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l’INSEE, portant sur le partage de la valeur ajoutée. Est également envisagée la création d’un Conseil de suivi de la crise économique et des politiques économiques et sociales.
Vous avez inscrit, sur l’agenda social 2009, une nouvelle gouvernance de l’entreprise pour assurer une transparence et, donc, une éducation économique.
Monsieur le Premier ministre, puisque vous avez choisi d’intituler un livre la France peut supporter la vérité, je me permets de vous poser cette question : quelle politique allez-vous demander à votre gouvernement de suivre pour faire de cette vérité un bien commun, fondé sur un diagnostic accepté par les uns et par les autres ? Ainsi pourrions-nous, dans ce pays, partager enfin une même vérité !
En effet, au-delà du jeu de rôles des partenaires sociaux,…
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas un jeu de rôles !
M. Gérard Longuet. … l’opinion doit avoir une pleine conscience de la réalité de la situation.
En outre, monsieur le Premier ministre, ce diagnostic partagé doit avoir de la profondeur dans le temps. Nous ne pouvons pas nous arrêter aux quelques derniers mois.
M. Jean-Louis Carrère. Deux minutes trente ! La question !
M. Gérard Longuet. Et nous devons avoir le courage de reconnaître ce qui a été fait en bien et en mal par les uns et par les autres.
M. Charles Gautier. La question !
M. Gérard Longuet. Ce diagnostic partagé doit, enfin, avoir la dimension internationale et européenne nécessaire pour nous situer face à des partenaires qui sont, hélas, aussi nos concurrents.
Je répète ma question, monsieur le Premier ministre : quelle sera la politique du Gouvernement…
M. René-Pierre Signé. Il n’en a pas !
M. Gérard Longuet. … pour que la France soit lucide sur elle-même, cette lucidité étant le préalable à un dialogue social qui confortera notre cohésion ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées UMP et de l’Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Question téléphonée !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le sénateur, depuis le début de cette crise, avec le Président de la République, dans des circonstances en effet inédites et pour lesquelles nous manquons donc de référence, nous essayons d’apporter, de la manière la plus réactive qui soit, des réponses à des réalités. Il ne s’agit donc pas de réagir à des sentiments, à des émotions, à des fantasmes, ni même à des prévisions qui ne sont au mieux que des prémonitions !
Nous avons d’abord dû faire face à une crise financière. Nous avons relevé ce défi et force est aujourd'hui de constater que les établissements financiers se portent globalement mieux dans notre pays que chez la plupart de nos voisins.
Nous avons ensuite dû faire face à une crise économique qui est liée à une baisse des investissements, à un ralentissement de l’activité et à un fléchissement des exportations. Mais, pour le moment, la consommation se maintient dans notre pays : elle a augmenté de 0,3 % au troisième trimestre de 2008 et de 0,5 % au quatrième trimestre. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté des mesures de relance de l’activité économique destinées notamment à soutenir les investissements.
Nous faisons maintenant face à un troisième volet de la crise : les conséquences du ralentissement économique sur l’activité, et donc sur l’emploi. Les vraies victimes de la crise, ce sont les Français qui perdent leur emploi ou voient leur temps de travail et leur salaire diminuer.
C’est ce qui motive les décisions que nous avons prises hier, d’un commun accord avec les partenaires sociaux. Nous avons décidé de porter à 75 % du salaire brut, soit 90 % du salaire net, l’indemnisation du chômage partiel, ou de l’activité partielle. Nous allons compléter le dispositif de l’assurance chômage en y ajoutant une mesure en faveur de ceux qui n’ont pas droit à cette assurance parce qu’ils ont travaillé au moins deux mois mais moins de quatre mois. Nous aiderons également les familles les plus modestes.
Enfin, dans un souci de justice pour ceux qui n’ont jamais droit à rien, c'est-à-dire ceux dont les revenus se situent grosso modo – même s’il faut naturellement prendre en compte la dimension familiale – entre 1 200 et 3 500 euros, nous allons mettre en place une mesure très ambitieuse de réduction d’impôt. Je veux d’ailleurs faire remarquer à ceux qui réclament à cor et à cri une relance par la consommation qu’elle est bien plus juste qu’une baisse uniforme de la TVA qui profiterait à tous les Français, quel que soit leur niveau de revenu !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut baisser la TVA sur les produits de première nécessité !
M. François Fillon, Premier ministre. Voilà, monsieur le sénateur, dans quel esprit le Gouvernement agit.
Naturellement, si cette crise devait connaître des évolutions, nous adapterions, comme nous venons de le faire pour le secteur automobile, notre réponse.
Pour être parfois rude, le dialogue social dans notre pays n’en est pas moins bien réel. J’en veux pour preuve le fait que nous avons enregistré depuis un an un véritable record de signatures d’accords conventionnels, les deux derniers en date portant sur l’assurance chômage et sur la formation professionnelle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas aussi brillant que cela !