M. Roland Courteau. Et voilà !

M. Jean-Jacques Mirassou. …qui peuvent donc poser des problèmes de contrôle, de certification, d’étiquetage et d’impact écologique liés à leur transport.

J’observe d’ailleurs au passage qu’une réorientation de ce type de production vers une production nationale aurait bien évidemment une incidence économique qui ne serait pas négligeable.

M. Jean-Jacques Mirassou. De notre point de vue, il serait donc logique et urgent, pour se mettre en conformité avec les engagements du Grenelle de l’environnement, que notre pays soit très ambitieux dans la réorientation des aides publiques liées aux financements nationaux et européens vers toutes les formes d’agriculture respectueuses de l’environnement.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Jacques Mirassou. Cet amendement, vous l’aurez compris, n’a donc pas d’autre objet que de faire clairement figurer cette ambition dans le texte dont nous débattons aujourd’hui. (M. Roland Courteau applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Je ferai la même remarque que pour l’amendement n° 748, qui se rapproche très fortement de celui-ci.

Le principe d’éco-conditionnalité des aides accordées au titre de la PAC permet déjà de les distribuer au regard du respect des normes environnementales, et il n’y a pas lieu d’y substituer un nouveau principe de répartition dont la mise en place serait longue, compliquée et coûteuse et les effets incertains.

J’ajouterai que le bilan de santé de la politique agricole commune permettra probablement d’opérer des réorientations, notamment un rééquilibrage entre le premier et le deuxième piliers. Comme cela, M. Muller sera content ! (M. Jacques Muller proteste.)

Cela étant dit, il ne faut pas se méprendre sur les difficultés que connaissent aujourd’hui les agriculteurs. Vous le savez, lorsqu’un médecin rédige une ordonnance, il est seulement obligé d’inscrire la substance active et son dosage. Dans le domaine de l’agriculture, il nous est interdit d’écrire uniquement la substance active dans les registres parcellaires que nous remplissons. Nous devons déclarer le nom précis du produit commercial : l’information est donc plus complète, puisqu’elle comporte à la fois le dosage et la formulation.

On voit bien que l’agriculture est de plus en plus respectueuse de l’environnement, et je crois qu’il ne faut pas trop charger la barque !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. J’ai bien entendu qu’il s’agissait là d’un amendement d’appel. Mon collègue Michel Barnier et moi-même travaillons sur le bilan de santé de la PAC pour intégrer dans le dispositif les objectifs que nous nous fixons aujourd’hui. L’appel a bien été entendu. Aussi, monsieur le sénateur, je vous propose de retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Mirassou, l'amendement n° 425 est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Mirassou. Nous entrons dans le subjectif. De notre point de vue, l’amendement, s’il a été écouté, n’a pas été entendu. C’est la raison pour laquelle nous le maintenons.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

M. Jacques Muller. Je profiterai de cette explication de vote pour répondre à M. le rapporteur, qui m’a posé plusieurs questions.

Favoriser les élevages sur paille ne veut pas dire les imposer. Nous avons voté tout à l’heure l’excellent amendement de notre collègue François Fortassin visant à favoriser l’élevage sur herbe. Il n’était question d’aucune obligation. Je ne comprends pas cette lecture réductrice de l’amendement que j’ai proposé.

Monsieur le rapporteur, puisque vous m’avez interrogé sur ce sujet, je vous répondrai qu’un lisier contenant de l’azote minéral migre plus facilement dans les nappes. C’est une donnée objective. Un lisier composté avec de la paille devient de l’azote organique, qui est libéré progressivement dans le milieu. Je ne donne pas de leçons, je rappelle simplement une réalité.

Mon objectif était de favoriser des pratiques. Je rappelle que, dans ma région, l’Alsace, des éleveurs essaient aujourd’hui de développer des élevages porcins sur paille. Je souhaitais simplement que cela soit reconnu dans la loi. Je comprends parfaitement l’argument de Mme la secrétaire d’État, selon lequel ces dispositions relèvent plutôt du Grenelle II et j’aurais retiré mon sous-amendement, mais la réponse qui m’a été donnée n’était pas satisfaisante.

Pour terminer, je dirai que je préférerais un débat plus scientifique à des allégations ou des observations sur ma capacité à charger des bottes de foin sur des remorques ! J’aimerais que l’on élève un peu le débat.

J’en viens à l’amendement en discussion. Sur le fond, c’est un excellent amendement Il ne vise pas à inscrire dans la loi des détails trop précis, par exemple sur le premier ou le deuxième pilier. Il prône juste une réorientation des aides publiques.

C’est extrêmement important, parce que les aides publiques d’autrefois ont été calculées dans un contexte où l’Europe était déficitaire alors qu’aujourd’hui le contexte est celui du Grenelle, où il s’agit de favoriser une transformation de l’agriculture.

Il est essentiel de pouvoir écrire cela dans la loi. Sinon, nous nous serions payés de mots par rapport à ce que nous écrivions au début.

Il ne s’agit pas de refaire la politique agricole commune : il s’agit, dans le cadre de la PAC actuelle, de réorienter les aides dans un sens plus favorable à l’environnement. Riverain de l’Allemagne, j’entends régulièrement les plaintes des producteurs de fruits et légumes français au sujet des règles de la concurrence, qui permettent à leurs homologues allemands de bénéficier de la prime unique à l’hectare alors qu’eux-mêmes n’y ont pas droit.

Cette réorientation, c’est aujourd’hui qu’il faut l’inscrire dans la loi. Sinon, nous ne le ferons jamais !

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est le sens de la loi, il a raison !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 425.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement no 557, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase de l’avant-dernier alinéa de cet article, après les mots :

d’identification

remplacer le mot :

ou

par le mot :

et

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement porte sur un alinéa très intéressant dans lequel il est question de la vente, de la prescription et même de l’application des produits phytopharmaceutiques. J’observe en passant que la dénomination de ces produits évolue au fil des années : de « pesticides », ils sont d’abord devenus « phytosanitaires » pour être aujourd’hui « phytopharmaceutiques », et j’imagine que bientôt ce seront…

M. Bruno Sido, rapporteur. … des médicaments !

Mme Marie-Christine Blandin. … des tisanes. Il faudra faire très attention à ce que l’on boit ! (Sourires.)

J’en reviens aux choses sérieuses. Il est nécessaire de créer la confiance afin que les conseils que reçoivent les agriculteurs ne soient pas systématiquement entachés de l’intérêt du vendeur. Il s’agit d’un principe très simple : celui de la séparation du conseil et de la vente, séparation comparable à celle qui existe entre la prescription par le médecin et la vente par le pharmacien.

Est également évoqué dans cet alinéa l’encadrement, en particulier grâce à la formation, des professions de distributeur et d’applicateur, qui est indispensable, et ce disant je pense aussi aux jardiniers de nos collectivités, qui sont des applicateurs.

Nous sommes tout à fait en accord avec les deux propositions formulées dans cette phrase, mais nous considérons que ce n’est pas soit l’une, soit l’autre, mais bien les deux. En conséquence, notre amendement a pour objet d’écrire « et » à la place de « ou ».

D’ailleurs, l’alinéa en question commence par la préconisation d’« une combinaison d’actions ». Il n’y a donc pas lieu de présenter cela comme une alternative !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. La séparation des activités de conseil et de vente de produits phytosanitaires, ou phytopharmaceutiques, n’a pas fait l’objet d’un débat particulier dans le cadre des COMOP mandatés pour traiter de ces questions.

L’adoption de cet amendement conduirait, me semble-t-il, à l’inverse du but recherché, car elle ouvrirait le champ à la vente « sauvage » non justifiée et au conseil non encadré. En effet, n’importe qui pourrait s’installer comme « conseiller » sans avoir à justifier de la formation ou de l’expérience spécifique actuellement requise.

De plus, il ne serait pas demandé d’assurance en responsabilité civile au conseiller indépendant. Or, la responsabilité civile professionnelle du conseilleur-vendeur qui existe aujourd’hui devrait également être prévue pour le simple conseilleur.

Enfin, l’exploitant agricole est un professionnel maître de ses décisions, et il reste entièrement libre d’accepter ou non les produits qui lui sont préconisés.

Pour toutes ces raisons, la commission demande à Mme Blandin de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État. La question de la séparation des activités de conseil et de vente était à l’origine un sujet hautement difficile.

À l’issue du Grenelle de l’environnement, où, effectivement, des engagements ont été pris – et l’engagement 123 a été cité à juste titre –, un COMOP a travaillé sur ce dossier et a abouti à un accord sur le principe d’une alternative entre, d’une part, la séparation des activités de vente et de conseil et, d’autre part, l’offre de conseil indépendant. Cet accord traduit un réel équilibre entre les parties. Il est donc extrêmement important, car il est essentiel que les professionnels eux-mêmes adhèrent aux dispositions proposées dans la loi.

Aussi, je ne suis pas du tout favorable à ce que l’on revienne dans le projet de loi sur l’équilibre issu des travaux du COMOP.

M. le président. Madame Blandin, l’amendement no 557 est-il maintenu ?

Mme Marie-Christine Blandin. J’avais vraiment cru que la présence du « et » était une erreur. Je n’avais pas compris qu’il s’agissait d’une alternative, que je considère comme très dommageable.

En conséquence, nous maintenons l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 557.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement no 424, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase de l’avant-dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :

des aides budgétaires pour aider les agriculteurs à développer l’agriculture biologique

par les mots :

surtout une réorientation des aides budgétaires pour aider à la fois les agriculteurs à développer l’agriculture biologique et les structures qui œuvrent au développement de l’agriculture biologique et de l’agriculture durable pour assurer pleinement leur mission

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer en défendant un précédent amendement, en matière d’agriculture biologique, la France accuse un retard très important sur les autres pays de l’Union européenne : en 2005, l’Autriche était en tête avec 11,0 % de la surface agricole utilisée, suivie de l’Italie avec 8,4 % ; la moyenne européenne se situait aux alentours de 4 %, soit le double du taux français…

Face aux enjeux environnementaux, sanitaires et sociaux, je considère que, pour répondre à la demande croissante des consommateurs et structurer concrètement la filière de l’agriculture biologique – éléments déjà évoqués hier dans la nuit, lors de la défense de l’amendement no 421 portant sur la restauration collective, et que je souhaite compléter –, il faut réorienter les financements de façon à aider à la fois les agriculteurs à développer l’agriculture biologique et les structures qui œuvrent au développement de l’agriculture biologique et de l’agriculture durable à assurer pleinement leur mission.

Cette réorientation, nécessaire et rendue possible par la révision de l’article 68 du règlement sur les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la PAC, doit s’opérer en étroite cohérence avec les orientations de l’engagement 124 du Grenelle, qui, je le rappelle, vise à promouvoir une meilleure organisation de l’ensemble des acteurs pour des pratiques agricoles plus durables.

Bref, il convient de soutenir non pas uniquement la production biologique, mais aussi les associations et les structures qui permettent le développement de ce mode d’agriculture. Ce double appui sera gage d’une organisation efficace de la filière biologique, de la production à la distribution, et contribuera à fixer des prix à la fois rémunérateurs pour l’agriculteur et accessibles au plus grand nombre de consommateurs.

Ne l’oublions pas, les attentes sont très fortes. Selon le cinquième baromètre de l’Agence de promotion de l’agriculture biologique, l’Agence Bio, 42 % des Français consomment un produit bio au moins une fois par mois, et 84 % souhaitent que ce type de production se développe.

Ce n’est qu’à cette double condition – une approche intégrée et une réorientation de nos aides en faveur d’un soutien à l’ensemble de la filière – que nous permettrons à l’agriculture biologique de sortir de la relative marginalité économique qui la caractérise et que nous serons capables de répondre aux objectifs fixés en la matière par le Grenelle de l’environnement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Puis-je faire remarquer à notre collègue que son amendement est satisfait au moins partiellement par le présent texte, qui prévoit un soutien accru aux structures et aux mécanismes de soutien à une agriculture biologique et durable ?

Aussi, la commission a pensé qu’il serait préférable que cet amendement soit retiré. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, car ces dispositions sont effectivement déjà intégrées au texte.

Je rappelle en outre que, parmi les nouvelles mesures présentées par Michel Barnier dans le cadre du plan d'action « Agriculture biologique : horizon 2012 » figurent des financements supplémentaires : 15 millions d’euros sur cinq ans pour la structuration de la filière, c’est-à-dire à l’Agence Bio ; 36 millions d’euros sur trois ans dans le cadre des mesures agroenvironnementales « conversion à l’agriculture biologique », qui ont d’ailleurs été déplafonnées ; 2 millions d’euros en 2009 pour l’innovation. Enfin, le crédit d’impôt pour la conversion des agriculteurs bio a été doublé.

J’ose espérer, monsieur le sénateur, que tout cela satisfait votre ambition.

M. le président. Monsieur Courteau, l’amendement no 424 est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Nous maintenons cet amendement parce que, comme nous avons déjà eu hier soir l’occasion de le souligner, il faut donner des signes.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Ils y sont déjà, les signes !

M. Didier Guillaume. Il nous semble que cet amendement donne des signes encore plus forts que la rédaction actuelle de l’article 28 : il s’agit de traiter non pas uniquement les agriculteurs biologiques, mais la filière, les circuits, les entreprises.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Didier Guillaume. Ce projet de loi est un texte d’orientation. La phrase que nous proposons d’y ajouter mettrait en exergue la volonté du Gouvernement et de la commission d’aller dans cette direction. Ce n’est pas une fois de plus montrer du doigt, ce n’est pas une fois de plus ne jurer que par le bio, bien au contraire !

L’amendement excellemment présenté par Roland Courteau est équilibré et vise à ajouter du sens, à ajouter des objectifs, bref, à démontrer que le Gouvernement et notre assemblée sont déterminés à développer l’agriculture biologique, certes, mais aussi à contribuer au soutien et au développement de la filière tout entière : nous constatons tous les jours que, si les conversions, si l’agriculture bio fonctionnent plutôt bien et progressent, les difficultés viennent de l’ensemble de la chaîne.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. La présence de cette disposition dans le texte démontre que le Gouvernement reconnaît la nécessité de mobiliser des moyens budgétaires et fiscaux pour favoriser le développement de l’agriculture biologique.

Je regrette que l’on n’invoque pas cette même nécessité pour favoriser le développement d’une agriculture plus acceptable sur le plan environnemental. En effet, la réduction des intrants aura inévitablement pour conséquence d’abaisser le niveau de la production agricole et de diminuer le revenu des agriculteurs ; or, pour l’heure, aucune compensation financière n’est prévue hormis pour l’agriculture biologique.

L’agriculture française doit-elle être une agriculture à deux vitesses, avec une agriculture biologique qui serait aidée, soutenue financièrement par la collectivité nationale, et une agriculture traditionnelle à laquelle nous demanderions de faire des efforts qui auront des conséquences économiques pour les entreprises sans les accompagner de mesures fiscales ou de mesures budgétaires ?

Mme Blandin le sait bien, ce serait méconnaître la situation et le fonctionnement des exploitations que de croire que l’économie induite par la diminution des intrants compensera la baisse de la production, donc des revenus des agriculteurs. C’est entièrement faux ! Quand vous faites une économie de 10 et que vous perdez 30, au bout du compte vous perdez quand même 20 ! L’agriculture traditionnelle se trouvera donc dans une situation économique beaucoup plus fragilisée. (Mme Marie-Christine Blandin manifeste son approbation.)

M. Didier Guillaume. Il n’a pas tort !

M. Alain Vasselle. Je tenais à appeler l’attention du Gouvernement sur ce point : les études d’impact économique ne doivent pas se limiter aux effets positifs, elles doivent mesurer également les effets négatifs sur la profession en termes de viabilité économique des entreprises.

M. Bruno Sido, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

M. Jacques Muller. Au risque de vous surprendre, mes chers collègues, je dois dire que je partage totalement le point de vue qu’a développé notre collègue Vasselle sur la nécessité d’accompagner l’évolution de l’agriculture conventionnelle vers une agriculture intégrée. Parce que les produits issus d’une agriculture intégrée ne sont pas valorisés sur le marché, il est important que la collectivité soutienne ce mouvement.

Pour autant, lorsqu’on parle d’agriculture biologique, il ne faut pas oublier quelle est la réalité du terrain ! Lorsqu’un agriculteur veut passer d’une agriculture intégrée à l’agriculture biologique, il doit réussir un saut technique difficile, parce que les itinéraires techniques changent, parce que le système de production agricole n’est pas le même, parce que les produits plus doux pour l’environnement peuvent induire des coûts plus élevés, parce que cela consomme plus de travail… Et ce n’est pas là une vue de l’esprit : la ferme expérimentale du lycée agricole de Rouffach, où j’ai passé vingt-cinq ans, travaillait sur ces concepts !

Nous avons travaillé en suivant la méthode IDEA, nous situant dans le cadre de la culture intégrée. Nous ne sommes jamais passés à la culture biologique, car les conséquences techniques en sont très importantes. Il faut donc prévoir un soutien financier spécifique pour pouvoir atteindre les objectifs fixés pour développer cette filière.

J’ai écouté avec attention les chiffres que Mme la secrétaire d'État nous a communiqués, car ils concernent non seulement l’agriculture, mais également toute la filière. Si l’on additionne tous ces chiffres, ce sont 100 millions d’euros qui seront accordés à la filière bio. Certes, c’est bien, mais, dans le projet de loi de finances adopté en fin d’année dernière, c’est 1 milliard d’euros qui a été attribué aux agrocarburants. Cherchez l’erreur !

Pour éviter ce genre de désagrément, il serait souhaitable de mentionner dans la loi que l’agriculture biologique bénéficie d’un soutien qui s’appuie sur une réorientation des aides budgétaires déjà accordées.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 424.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 427, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase de  l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer le taux :

20 %

Par le taux :

30 %

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Cet amendement peut être considéré comme étant d’une exigence excessive, mais je crois à la vertu de l’exemple et, depuis dix ou quinze ans, la formation initiale ou continue a été une courroie de transmission importante.

Dans notre région, depuis dix ou quinze ans, les mentalités ont évolué, et donc les pratiques. Toutes ces considérations ont été reprises et développées dans le Grenelle de l’environnement, mais cette révolution, lente, des mentalités ne deviendra réalité qu’à condition de se donner plus encore les moyens de changer.

Le premier d’entre eux concerne la formation de l’ensemble des acteurs de la filière agricole, des producteurs jusqu’aux consommateurs. J’en veux pour preuve le salon international de l’élevage, le SPACE, qui se tient à Rennes, où nombre de professionnels, et autres d’ailleurs, viennent s’enquérir des nouveautés sur l’espace réservé à la recherche appliquée. Les jeunes, mais aussi l’ensemble de la profession, expriment une demande d’information qui doit être valorisée et passer par la formation.

D’ailleurs, les engagements du Grenelle tiennent compte de cet impératif et insistent sur l’enjeu de coordonner la formation et la recherche.

Au demeurant, de nombreuses avancées doivent être d’ores et déjà saluées. Il en va ainsi du lancement, dès 2008, d’un grand programme de recherche appliquée et de formation sur l’ensemble de l’agriculture mobilisant toute la diversité des organismes de recherche, techniques et de coopération et un très large réseau d’agriculteurs, prévu par l’engagement 125, et de son financement grâce à l’affectation de 9 millions d’euros à un programme spécifique de l’Agence nationale de la recherche pour le développement des pratiques respectueuses de l’environnement.

L’engagement 208 prévoit, quant à lui, différentes mesures pour garantir une généralisation rapide des méthodes mises au point de façon expérimentale non seulement pour réduire fortement la consommation d’intrants, mais aussi pour économiser l’énergie, notamment grâce à la mise en place de modules « agriculture et biodiversité » dans les filières agricoles et agronomiques d’enseignement, ainsi que dans celles des jardins et espaces verts.

D’autres pistes de réflexion proposées par le groupe de travail n° 4 du Grenelle de l’environnement dont la thématique s’intitule : « Adopter des modes de production et de consommation durables » mériteraient d’être concrètement étudiées, telles que le remplacement des sanctions réglementaires par des formations alternatives grâce à une adaptation des règles de la conditionnalité sur le plan européen ou encore la mise en place d’une formation en matière de pratiques respectueuses de l’environnement lors de l’accompagnement à l’installation des jeunes ou d’octroi d’aides au développement.

L’objectif fixé par cet engagement concernait 20 % des agriculteurs ayant participé d’ici à 2012 à une formation liée aux nouvelles techniques environnementales. Il me semble nécessaire de revoir nos ambitions à la hausse pour envoyer un message clair en direction du monde agricole et des consommateurs, afin d’accélérer le développement d’autres solutions de formation et d’encourager la diffusion rapide des bonnes pratiques. Au vu de l’évolution, cela me semble possible et réaliste.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Prévoir de former un agriculteur sur cinq, soit 20 %, en moins de trois ans, sur les enjeux de l’agriculture durable est déjà très ambitieux ; passer à 30 %, soit un sur trois, semble peu réaliste.

Le projet de loi prévoit non pas de s’arrêter à 20 %, mais d’aller jusqu’à 20 % en deux ans et demi, ce qui est déjà un bel objectif, le but étant de parvenir un jour à 100 % d’exploitants formés.

Autrement dit, la commission vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Ce dispositif de formation est lourd à mettre en place. L’objectif de 20 %, qui n’est qu’une première étape, est déjà ambitieux. Le porter dès à présent à 30 % ne nous semble pas réaliste.

M. le président. Madame Herviaux, l'amendement n° 427 est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. Effectivement, c’est la lourdeur de la mise en place de la formation qui pose problème. Je suggérais de fixer l’objectif à 30 % pour valoriser les formations qui sont déjà proposées aux agriculteurs ainsi que l’ensemble des actions qui sont déjà menées en ce sens.

Je comprends bien qu’il faille procéder par étape. En conséquence, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 427 est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 373, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :

Après les mots :

formation en 2012

supprimer la fin de l'avant-dernier alinéa de cet article.

 

La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. De même que M. le rapporteur a proposé tout à l'heure de supprimer certaines dispositions prévues dans ce texte considérant qu’elles étaient déjà en application, j’estime que la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article 28 est quelque peu superfétatoire.

Vous le savez parfaitement, mes chers collègues, l’éco-conditionnalité mise en place dans le cadre de la PAC exige aujourd'hui que des bandes enherbées de cinq mètres de large soient mises en place sur l’ensemble du territoire national. Je ne vois donc pas la nécessité d’alourdir le texte en prévoyant une disposition qui est déjà en vigueur.

De plus, préciser la largeur me semble plus relever du domaine réglementaire.

Telles sont les raisons qui motivent la demande de suppression de cette disposition.

D’ailleurs, d’une manière générale, j’estime que de nombreux éléments et considérants ont été ajoutés dans ce texte en vue de préparer le Grenelle II alors que nous aurions pu en faire l’économie, car ils sont évidents. Ainsi, le débat sur ce texte aurait pu être beaucoup plus bref qu’il ne l’est.