M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Les propos tenus par Mme le rapporteur vont, pour l’essentiel, dans le sens de ce que nous pensons.
Tous les débats qui ont eu lieu jusqu’à présent à propos de la diversité garantissent que cette préoccupation, sur laquelle nous avons tous insisté, figure dans le projet de loi.
Mais un débat est soulevé, pas uniquement d’ailleurs dans le cadre de ce projet de loi – et Mme Bariza Khiari y a fait allusion tout à l'heure –, sur la discrimination appelée positive, ou encore affirmative action aux États-Unis, et visant à introduire dans la loi une notion qui est incompatible avec nos principes républicains, à savoir la reconnaissance de quotas communautaires, y compris dans les recrutements.
Quand nous parlons de diversité, à nos yeux, c’est l’ensemble de la société qui doit se sentir concernée par les œuvres audiovisuelles, indépendamment de la couleur de peau ou des origines, notamment de leurs auteurs. Et la diversité ne doit pas se cantonner aux questions de communautés.
Or l’article 1er quater, qui ne figurait pas dans le projet de loi initial, a été introduit à la suite de l’adoption d’un amendement du député Frédéric Lefebvre qui a théorisé la discrimination positive dans l’ensemble de la société, allant jusqu’à engager une polémique avec ceux qui ont une autre conception de la République, de la laïcité et de l’égalité des citoyens.
C’est pour cette raison que nous soutenons l’amendement n° 10 visant à supprimer l’article.
M. le président. En conséquence, l'article 1er quater est supprimé.
Article additionnel après l'article 1er quater
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par M. Antoinette, est ainsi libellé :
Après l'article 1er quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le cahier des charges de France Télévisions précise les indicateurs de résultats à atteindre en matière d'évolution de la représentativité de la diversité de la société française, notamment ethnoculturelle, tant dans les programmes que dans la création et dans la politique de ressources humaines de France Télévisions.
La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette.
M. Jean-Etienne Antoinette. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 95 est retiré.
Article 2
Le IV de l'article 44 de la même loi est ainsi rédigé :
« IV. - La société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, société nationale de programme, a pour mission de contribuer à la diffusion et à la promotion de la langue française, des cultures française et francophone, ainsi qu'au rayonnement de la France dans le monde, notamment par la fourniture d'informations relatives à l'actualité française, francophone, européenne et internationale.
« À cette fin, elle définit ou contribue à définir les orientations stratégiques et la coordination des services de communication audiovisuelle, en français ou en langue étrangère, destinés en particulier au public français résidant à l'étranger et au public étranger, édités par des sociétés dont elle détient tout ou partie du capital. Elle peut les financer. Elle peut également concevoir et programmer elle-même de tels services.
« Le cahier des charges de la société nationale de programme en charge de l'audiovisuel extérieur de la France établi en application de l'article 48 définit les obligations de service public auxquelles sont soumis, le cas échéant, les services mentionnés à l'alinéa précédent et les conditions dans lesquelles la société assure, par l'ensemble de ces services, la diversité et le pluralisme des programmes. »
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, sur l'article.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’objet de l’article 2, qui crée une société holding regroupant les participations publiques dans nos sociétés de l’audiovisuel extérieur en lieu et place de Radio France internationale, semble a priori éloigné du sujet principal de ce projet de loi.
En effet, l’essentiel de votre projet vise, en supprimant la publicité sur les chaînes de la télévision publique, à réserver cette manne financière aux seules chaînes privées.
L’actualité récente a révélé que vous pouviez même vous dispenser d’un texte de loi pour atteindre cet objectif.
L’objet de cet article n’a donc pas de rapport direct avec le sujet principal du projet de loi, puisque la suppression de la publicité ne concernant que le territoire national, elle ne s’applique pas, par définition, à l’audiovisuel extérieur.
Mais ce que prévoit cet article n’en est pas moins important, car il est révélateur de l’esprit de votre texte qui a pour but inavoué d’affaiblir l’audiovisuel public et de le placer dans une dépendance financière, éditoriale et politique à l’égard du pouvoir.
Que l’on nous comprenne bien : nous ne sommes pas du tout hostiles au principe d’un regroupement des différentes sociétés composant l’audiovisuel extérieur pour leur permettre de bénéficier de davantage de cohérence et de lisibilité.
Nous ne refusons pas non plus un renforcement des synergies et un encouragement des mutualisations entre les opérateurs.
Non, ce que nous critiquons et redoutons, ce sont les conditions dans lesquelles les choses se font.
Elles masquent mal un affaiblissement programmé de l’audiovisuel public et une incontestable volonté de contrôle politique.
En premier lieu, le regroupement qui s’opère avec la société holding, déjà créée – notons-le au passage – depuis le 4 avril 2008 et qui aura un statut non plus de société publique, mais de société anonyme, s’effectuera d’abord au détriment de RFI.
En effet, six rédactions seront supprimées, car la direction a décidé de mettre fin à ses programmes en six langues : l’allemand – ce qui, n’en doutons pas, facilitera des relations qui ne sont malheureusement plus privilégiées avec ce pilier de la construction européenne qu’est l’Allemagne –, le polonais, le serbo-croate, le turc, le laotien et l’albanais.
Les organisations syndicales estiment ainsi que trois cents à quatre cents postes sur un millier seraient supprimés.
Au-delà de l’emploi, c’est aussi l’influence et le rayonnement de la France dans les pays concernés qui est menacée avec cet affaiblissement de l’un des deux piliers historiques de notre audiovisuel extérieur.
En deuxième lieu, ce service public risque également d’être affaibli par sa trop grande dépendance au regard du budget de l’État et par le fait que les dotations, si l’on en croit la programmation budgétaire triennale, seraient en forte diminution en 2010 et en 2011.
Après, tout dépendra du bon vouloir du Gouvernement en place.
Ce système ne garantit donc pas un financement pérenne et risque, à terme, de compromettre sérieusement les objectifs affichés.
En troisième et dernier lieu, la volonté de contrôle politique de l’audiovisuel est patente.
Le président d’AEF sera, comme les autres présidents de chaîne, nommé, et éventuellement révoqué, par le Président de la République.
Certes, vous vous êtes entouré de quelques garde-fous démocratiques du côté du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, et des commissions compétentes des deux assemblées. Mais cela sera de peu de poids face au pouvoir quasi absolu du Président de la République en la matière.
En ce qui concerne AEF, il y a donc tout lieu d’être inquiet de cette reprise en main politique.
Outre la concentration du pouvoir qui s’opère, puisque M. de Pouzilhac, secondé par une directrice générale déléguée, cumule le poste de président-directeur général de la holding avec celui de président du directoire de France 24, de président-directeur général de RFI et de président du conseil d’administration de TV 5 Monde, c’est aussi la proximité de ces responsables avec le pouvoir en place qui inquiète.
Leurs compétences professionnelles ne sont nullement en cause.
Mais il est, pour tout dire, malsain et peu démocratique que, s’agissant de l’audiovisuel extérieur, les relations avec le ministère des affaires étrangères soient aussi étroites.
Les syndicats de journalistes de RFI ont, par exemple, eu quelques raisons de s’en émouvoir lors du licenciement de l’un de leurs collègues qui avait réalisé sur TV 5 Monde une interview contestée du président syrien.
Il y a eu aussi le cas de ce journaliste connu de France 24, dont le contrat n’a pas été renouvelé pour avoir déplu.
Ainsi, l’article 2 recèle des dangers sur lesquels je voulais, mes chers collègues, attirer votre attention.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 2 est l’occasion pour nous de parler d’une entreprise parfois sous-estimée et, en tout cas, insuffisamment connue de nos concitoyens et même de ceux que l’on appelle les leaders d’opinion, je veux parler de Radio France Internationale.
L’article 2 du projet de loi prévoit une réécriture de la loi du 30 septembre 1986 pour substituer à la société Radio France Internationale la holding « Audiovisuel extérieur de la France », qui devient, elle, une société nationale de programme, ayant pour mission de « contribuer à la diffusion et à la promotion de la langue française, des cultures française et francophone, ainsi qu’au rayonnement de la France dans le monde, notamment par la fourniture d’informations relatives à l’actualité française, francophone, européenne et internationale ».
En conséquence, RFI n’existera plus comme société nationale de programme.
Depuis plusieurs années déjà, particulièrement depuis la création de France 24, son identité, son indépendance éditoriale, son cahier des charges, ses emplois sont mis en cause, au mépris d’un bilan incontestable acquis sur des années d’effort et sans qu’y soit substitué un projet stratégique clair tourné vers l’avenir.
Les personnels de RFI craignent 300 à 400 suppressions de postes, voire plus, sur un total d’un millier d’emplois. On sait déjà que des antennes vont disparaître, ainsi que plusieurs rédactions de langues jugées « trop confidentielles ».
Le 24 octobre dernier, la direction de la holding a confirmé ces craintes en annonçant la fermeture de six rédactions, comme vient de l’évoquer notre collègue Ivan Renar, tandis que trois autres seraient cantonnées à internet – le persan, le chinois et le russe – et s’éteindront sur les ondes.
La plupart des filiales de RFI à l’étranger devraient également fermer. L’exemple de la suppression de l’allemand, parallèlement à la réduction draconienne de notre réseau culturel en Allemagne, doit nous amener à nous interroger, mes chers collègues, sur la cohérence de notre politique étrangère, en particulier européenne.
Au moment où les médias, même publics, programment de moins en moins de films en version originale, ce que je déplore, il est encore plus regrettable de restreindre l’expression de l’audiovisuel extérieur dans les langues étrangères.
Vous feriez mieux, madame la ministre, d’assurer une plus large diffusion de RFI dans l’Hexagone, où seuls les Franciliens peuvent actuellement bénéficier de ses programmes.
Comment ne pas s’inquiéter de cette « chronique d’une mort annoncée » pour RFI ?
En matière de financement, c’est l’incertitude la plus totale. Du fait de la réforme de l’audiovisuel extérieur, les dotations publiques ne sont plus attribuées société par société dans le cadre de la loi de finances. Elles seront regroupées dans une enveloppe globale qui fera l’objet d’une répartition par les dirigeants de la holding Audiovisuel extérieur de la France, entre les différentes entreprises, sans qu’aucun mécanisme ne garantisse un partage équitable.
Or, et ce point vient d’être évoqué, du fait des responsabilités précédentes du président-directeur général de France 24, dont il reste président du directoire, on peut craindre que la répartition des dotations ne favorise cette chaîne au détriment de TV5 Monde et de RFI. TV5 Monde est un peu protégée par son statut multilatéral, mais RFI ne l’est pas.
En outre, par voie d’amendement, la commission des affaires culturelles envisage de prélever les ressources issues de la redevance audiovisuelle destinées à l’audiovisuel extérieur, soit 65 millions d’euros, pour les attribuer à France Télévisions afin de compenser la perte des recettes publicitaires.
Ainsi, l’audiovisuel extérieur apparaît comme une variable d’ajustement. Il se trouvera de plus en plus dépendant des décisions budgétaires et sera dans la main de l’exécutif.
Une réforme de l’audiovisuel public doit faire avancer l’audiovisuel extérieur et non le faire régresser. RFI est un des atouts de la France à l’étranger. Elle mérite un meilleur traitement. Son ministère d’origine, le ministère des affaires étrangères, devrait s’en préoccuper, veiller à la coordination et non à l’absorption ! (M. David Assouline applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, sur l'article.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. L’article 2 est l’épilogue d’une aventure commencée en 2001.
Trois ans après le lancement de France 24, je tiens à souligner les errances de la politique audiovisuelle internationale de la France à compter de cet événement.
Le mal résulte d’une conception présidentialiste, pour ne pas dire bonapartiste, de la prise de décision politique, qui fait encore plus de ravage sous le règne du prince actuel que sous celui de son prédécesseur.
Le candidat Jacques Chirac avait annoncé en 2001 son désir d’avoir une « CNN à la française ». Toute la cour, après son élection, a feint d’oublier que nous avions TV5 Monde, chaîne dont les informations sont reconnues et font autorité face au bulldozer américain pendant les périodes de crise.
Toute la cour a oublié l’existence de RFI, seule radio française à donner réellement de l’information internationale et à disposer de rédactions multilingues.
Après mille et un rapports, au lieu de muscler les deux bras de l’audiovisuel extérieur, on en greffe un troisième, qui s’appelle d’abord CFII – ça fait très branché ! –, puis France 24. Cette chaîne est très jeune, très bien équipée, mais, inévitablement, elle pompe les ressources publiques au détriment de RFI et de TV5 Monde.
M. Yves Pozzo di Borgo. C’est une très bonne chaîne !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Certes, monsieur, mais elle coûte très cher – je voudrais d’ailleurs savoir où passe une partie de l’argent ! – et elle est très peu regardée : elle est donc onéreuse au vu du nombre de téléspectateurs !
RFI passe mal et difficilement au numérique ; le climat social s’y alourdit. TV5 Monde est bridée, conquiert d’abord péniblement de nouveaux publics, faute de sous-titrer, comme cela était prévu, suffisamment d’émissions dans les langues des auditeurs en Amérique latine ou en Europe du Nord.
Aujourd’hui, RFI et TV5 Monde perdent du terrain. C’est l’argument avancé par le nouveau président de toutes ces chaînes pour affirmer qu’elles ne valent pas grand-chose et qu’elles doivent être rabaissées par rapport à la nouvelle chaîne.
Pour faire cesser les soubresauts de notre audiovisuel extérieur gêné de ses trois bras, et après un rapport de MM. Benamou et Lévitte dont on ne suit pas les préconisations, on décide de maquiller en holding la fusion des trois chaînes : c’est le mystère de la Sainte Trinité !
Le seul problème, c’est que les trois pays francophones qui conjuguent leurs efforts avec la France pour développer TV5 Monde depuis vingt-cinq ans refusent de s’incliner devant le tabernacle et se rebiffent !
Après leur avoir fait raconter des mensonges pendant six mois par des ministres dociles, il faut leur céder, pour l’instant. TV5 Monde gardera son autonomie grâce à un directeur général francophone – il se trouve qu’il s’agit d’une Française –, nommé avec leur accord.
Pour autant, cet article vise à ce qu’un seul et même président soit nommé à la tête de TV5 Monde et de RFI. Il restera président de France 24 et il sera également président de la holding.
Ce qui est formellement interdit pour une holding privée devient possible dans une holding publique. (Mme Catherine Tasca opine.) Pouvez-vous nous éclairer sur ce point, madame la ministre ?
Par ailleurs, quelle que soit la qualité des hommes et quelle que soit la qualité de l’homme, il faudra qu’une seule personne négocie avec elle-même à la fois la stratégie des trois antennes et la répartition des crédits publics.
Nous avions un omniprésident de la République, nous avons maintenant un omniprésident de l’audiovisuel extérieur, ce qui n’est peut-être pas tout à fait l’idéal pour exprimer la diversité de notre beau pays !
Je souhaite enfin dire un mot du gaspillage des deniers publics engendré par des choix clientélistes.
En 2005-2006, nous avons protesté contre l’attelage baroque que constituait la société France 24, propriété à 50 % de France Télévisions et à 50 % de TF1. Comme nous avions raison !
Chacun sait qu’une chaîne d’information continue est déficitaire. Soit elle est adossée à un consortium, comme la BBC ou CNN, soit elle a un mécène, comme Al-Jazira. TF1 n’a donc jamais financé France 24. Elle a seulement mis au pot 17 500 euros. Quelle somme !
Le principal rôle du groupe Bouygues aura été pendant trois ans de s’opposer à la diffusion de France 24 en France, comme si les Français n’avaient pas sérieusement besoin de s’ouvrir au monde. Mais il fallait surtout éviter de concurrencer LCI. Aussi, France 24 n’a été diffusée ni par l’ADSL ni par la TNT.
En récompense de son obstruction, TF1, qui réclamait initialement 90 millions d’euros pour sortir du capital de France 24, contre les 17 500 euros qu’elle avait mis au pot, a fait un geste et se contente aujourd'hui de 2 millions d’euros !
M. Robert del Picchia. C’est la même chose pour France Télévisions !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. En ces temps de désastre boursier, M. Bouygues, bien placé à la cour, a réalisé un placement magnifique aux dépens du contribuable. Pour lui, finalement, c’est peu. Quand on est un ami du Président de la République, tout va bien !
Par conséquent, à Dieu vat l’audiovisuel extérieur de la France !
M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 119 est présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 252 est présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l’amendement n° 119.
M. Ivan Renar. Cet article 2 vise à réécrire la loi du 30 septembre 1986 pour substituer à la société Radio France internationale, ou RFI, une holding dénommée « Audiovisuel extérieur de la France ».
Elle devient une société nationale de programme regroupant les participations publiques dans les différentes sociétés de l’audiovisuel extérieur. Ainsi, RFI disparaîtra et n’aura plus d’existence juridique propre.
Malheureusement, cette décision n’est que l’aboutissement d’un long processus : depuis quelques années, en fait, depuis la création de France 24, l’identité de RFI, son indépendance éditoriale, son cahier des charges et ses emplois sont menacés. Son financement est également désormais très incertain.
En effet, avec cette réforme de l’audiovisuel extérieur, les dotations publiques ne seraient plus attribuées à chaque société, mais seraient regroupées au sein d’une enveloppe globale répartie par la holding entre les différentes entreprises.
La pérennité de l’emploi au sein de l’entreprise est compromise puisque les personnels craignent entre 300 et 400 suppressions de postes.
Des antennes vont disparaître, ainsi que plusieurs rédactions en langues jugées, paraît-il, trop confidentielles.
Je ne fais pas de la désinformation, car il s’agit de projets confirmés à la fin de l’année dernière par la direction de la holding. Celle-ci envisage la fermeture de rédactions importantes : en allemand, en polonais, en serbo-croate, en turc, en laotien ou bien encore en albanais.
L’une des principales conséquences de l’article 2 sera non pas de redéployer des moyens, mais de répartir des budgets insuffisants en affaiblissant RFI. C’est pourquoi nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 252.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement de suppression concerne le projet d’audiovisuel extérieur de la France, celui qui concentre le pire conjugué de l’amateurisme et du libéralisme sans scrupule.
Nous savions le Gouvernement friand de confusions entre le public et le privé : les partenariats public-privé, ou PPP, qui endettent pour longtemps les collectivités, leur font perdre la maîtrise des projets et éloignent de ceux-ci les hommes de l’art que sont les architectes.
Nous savions le Gouvernement peu regardant sur le service public : l’objet « bâtard » qu’est France 24 va, après son bref voyage autonome, regagner le giron, mais TF1 se fera payer très cher pour sa sortie.
Voilà que vous nous proposez de nouveau un attelage mixte, sous forme d’une holding. Faudra-t-il que nous explorions toute la terminologie du monde des affaires pour donner à voir ce que vous préparez dans les codes de la loi ?
En effet, vous juxtaposez dans votre projet des structures aux intérêts contradictoires. La victime sans doute programmée est RFI, dont l’exercice sensible et complexe des missions ne résistera pas à la course aux résultats.
Parler juste aux Français de l’étranger, parler juste de territoires lointains, culturellement différents, certains sous tensions internes, certains ayant des liens obscurs ou des contentieux avec notre pays, n’est pas une mission facile.
Certains journalistes l’ont payé de leur sérénité, d’autres de leur liberté. Certains, même, y ont perdu la vie.
On ne saurait nier la complexité de produire et de diffuser en Françafrique, par exemple. On ne peut nier les forces croisées d’intérêts au milieu desquelles travaillent de façon précarisée les journalistes. Même un secrétaire d'État a obtenu une rapide mutation faute d’avoir prononcé les mots qui plaisent aux dirigeants africains !
Prenons l’exemple de RFI au Niger, où le gouvernement signe à Niamey les concessions d’exploitation de l’uranium de l’Aïr, à 1 000 kilomètres de là, où vivent les Touaregs, où AREVA, entreprise française, exploite des mines polluantes pour les Touaregs et enrichissantes pour la France. Mettez au milieu de cela quelques journalistes qui veulent faire leur métier et raconter les motifs de ce que l’on nomme « la rébellion touareg ». Vous obtiendrez deux journalistes de RFI en prison, finalement libérés et renvoyés en France, plus un journaliste nigérien de RFI longtemps gardé derrière les barreaux, et finalement libéré grâce à la solidarité de ses collègues !
Vous voudriez, en plus, que ces délicates missions soient menées par des structures d’intérêt mixtes ? Gageons, si cela était le cas, que le délicat processus de récolte et de mise en forme de l’information serait vite altéré par des pressions exogènes et par le souci des résultats.
Dans le monde, des centaines de postes, des dizaines de bureaux sont menacés : Berlin a vacillé, les autres aussi. C’est un bien mauvais coup que vous préparez à notre outil audiovisuel extérieur, à mille lieues de toute revitalisation intelligente ! J’appelle donc à la suppression de cet article.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 11 rectifié est présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles.
L’amendement n° 79 rectifié est présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
fourniture d’informations relatives
par les mots :
programmation et la diffusion d’émissions de télévision et de radio ou de services de communication au public en ligne relatifs
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 11 rectifié.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement entend respecter la mission fondamentale des filiales et partenaires de la future société nationale de programme en charge de l’audiovisuel extérieur de la France – TV5 Monde, France 24 et Radio France Internationale –, à savoir la création de documents audiovisuels propres.
En outre, la formulation du deuxième alinéa de l’article 2 du projet de loi, aux termes duquel la société en charge de l’audiovisuel extérieur contribue au rayonnement international de notre pays « notamment par la fourniture d’informations relatives à l’actualité française, francophone, européenne et internationale », peut apparaître potentiellement réductrice. En effet, l’expression « fourniture d’informations », par son imprécision, néglige la mission fondamentale des sociétés éditrices de l’audiovisuel extérieur : la production autonome de documents audiovisuels propres.
Il convient de trouver une formulation qui permette de mieux rendre compte de la notion de « média global », applicable à notre audiovisuel extérieur, qui suppose la création de documents audiovisuels, et pas seulement de programmes à caractère informatif, sur tout type de support : radio, télévision et internet.
À cet égard, les auteurs de cet amendement relèvent que, dans sa rédaction en vigueur, l’article 44 de la loi du 30 septembre 1986 charge la société nationale de programme RFI, à laquelle se substitue la société AEF, de « contribuer à la diffusion de la culture française par la conception et la programmation d’émissions de radio ».
Par ailleurs, les statuts mêmes de la société AEF mis à jour le 4 avril 2008 ont pris soin de rappeler que la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France contribue à la diffusion des cultures française et francophone « par la conception, la programmation et la diffusion d’émissions de télévision et de radio ou de sites et portails internet ». Cette formulation est, selon vos rapporteurs, plus satisfaisante.
En conséquence, cet amendement tend à substituer à l’expression « fourniture d’informations » celle de « programmation et diffusion d’émissions de télévision et de radio ou de services de communication au public en ligne relatifs à l’actualité française, francophone, européenne et internationale », formulation inspirée des statuts de la société Audiovisuel extérieur de la France. Par ces précisions, c’est la dimension de « média global », applicable à notre audiovisuel extérieur, qui est réaffirmée.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, vice-président de la commission des affaires étrangères, en remplacement de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 79 rectifié.