Mme Nathalie Goulet. M. le ministre s’étant engagé à me communiquer la liste des ambassadeurs thématiques missionnés par le ministère des affaires étrangères, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-234 est retiré.

L'amendement n° II-235, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé au sein du ministère des affaires étrangères une direction des ressources humaines chargée de valider les candidatures des fonctionnaires et agents servant dans les postes diplomatiques et d'apprécier notamment leurs compétences linguistiques.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, que j’avais déjà déposé lors de l’examen du texte qui est devenu la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, vise à créer une direction des ressources humaines au sein du ministère des affaires étrangères.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Mme Goulet fait une proposition de bon sens, mais celle-ci ne relève pas du domaine législatif. Je lui demande donc de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Kouchner, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur spécial. De surcroît, permettez-moi de vous signaler, madame la sénatrice, qu’il existe déjà une direction des ressources humaines au sein du ministère.

M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° II-35 est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.

Cela dit, je serais heureuse de pouvoir effectuer un stage au sein de cette direction, afin de savoir comment elle fonctionne. (Sourires.)

M. Bernard Kouchner, ministre. Très volontiers, madame !

M. le président. L’amendement n° II-235 est retiré.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures quarante, est reprise à quinze heures cinquante, sous la présidence de M. Roland du Luart.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

Article additionnel avant l'article 56
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 35 et état B

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale.

Administration générale et territoriale de l’État

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (et articles 56 à 58).

La parole est à Mme le rapporteur spécial.

Mme Michèle André, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » bénéficie, pour 2009, de 2,604 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une baisse de 1,3 % par rapport à 2008.

M. Jean-Pierre Sueur. Ça commence mal !

Mme Michèle André, rapporteur spécial. Cette mission se situe au cœur des dispositions de la révision générale des politiques publiques, avec notamment une centralisation au sein des préfectures du contrôle de légalité, une redéfinition du rôle des sous-préfectures, ces dernières étant davantage centrées sur les missions de conseil aux collectivités territoriales et de coordination de l’action de l’État, ainsi qu’une réorganisation des services de l’État à l’échelon régional et départemental.

Le nouveau système d’immatriculation des véhicules entrera également en application en 2009, avec une nouvelle plaque d’immatriculation sur laquelle figureront, sur un espace toutefois très réduit, le numéro d’un département et le logo d’une région, laissés au choix du propriétaire du véhicule.

L’ensemble de ces réformes se traduit, pour 2009, par une réduction des effectifs de la mission de 733 emplois équivalents temps plein travaillé.

Au regard de ces perspectives d’évolution, je tiens à souligner les importantes mutations qui devraient, dans les années à venir, caractériser cette administration de mission qu’est l’administration territoriale. Les métiers au sein des préfectures et des sous-préfectures connaîtront aussi de profonds bouleversements.

Dans un tel contexte, il conviendra d’attacher une grande attention aux missions d’accueil qui doivent être remplies dans ces lieux publics, notamment dans les services réservés aux étrangers. Il faut tout spécialement rappeler l’importance, d’une part, du choix des personnels devant assurer cet accueil et, d’autre part, de la qualification et de la formation de ces personnels, souvent amenés à prendre en charge des publics connaissant de grandes difficultés.

Le programme « Administration territoriale » enregistre une hausse de 1,2 % de ses crédits de paiement, lesquels s’élèvent à 1,673 milliard d’euros.

Le premier enjeu de ce programme, en 2009, porte sur l’entrée en application des titres sécurisés, le règlement européen du 13 décembre 2004 imposant le passage au passeport biométrique avant le 28 juin 2009. L’entrée en vigueur de ces titres, fabriqués par l’Imprimerie nationale, est placée sous la responsabilité de l’Agence nationale des titres sécurisés, située à Charleville-Mézières. Le décret du 13 avril 2008 a délégué aux mairies l’enregistrement des demandes de passeports biométriques ainsi que la prise de photos et d’empreintes digitales.

Je reviendrai d’ailleurs sur ce point, d’autant plus épineux qu’il s’inscrit dans un contexte de contentieux entre l’État et les mairies en matière de délivrance de titres depuis 2001, lors de la présentation des deux amendements que propose au Sénat la commission des finances.

Le second enjeu de ce programme réside dans une éventuelle reconfiguration de la carte préfectorale. À cet égard, il faut rappeler que l’adaptation envisagée du réseau des sous-préfectures doit préserver la qualité du service public, assurer la présence de l’État au plus près des attentes des élus et des citoyens et se dérouler selon une méthode privilégiant le pragmatisme et les réalités locales.

Le programme « Administration territoriale : expérimentations Chorus », doté de 106,9 millions d’euros en crédits de paiement comme en autorisations d’engagement, permettra de tester l’outil de gestion budgétaire et comptable Chorus dans deux régions, la Haute-Normandie et les Pays de la Loire. À cet égard, on ne peut que regretter le retard pris dans le déploiement de Chorus au sein des administrations, l’aboutissement de ce projet n’étant désormais prévu qu’en 2010 au plus tôt.

Le programme « Vie politique, cultuelle et associative » enregistre une chute de 49,3 % de ses crédits de paiement, ceux-ci passant à 240 millions d’euros pour 2009. Toutefois, cette très forte baisse ne fait que refléter l’évolution du cycle électoral.

L’analyse de la performance de ce programme permet d’établir un classement des opérations électorales en fonction de leur coût. Ainsi, le coût moyen par électeur inscrit s’élève à 4,60 euros pour l’élection présidentielle, à 3,73 euros pour les élections cantonales, à 3,37 euros pour les élections législatives, à 2,98 euros pour les élections européennes, à 2,86 euros pour les élections municipales et à 0,11 euro pour les élections sénatoriales.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est donné ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas cher ! (Nouveaux sourires.)

Mme Michèle André, rapporteur spécial. Effectivement !

Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » voit ses crédits de paiement croître de 11,8 %, pour atteindre 584,3 millions d’euros.

Une ombre plane toutefois sur ce programme. En effet, au 31 juillet 2008, le rythme des dépenses liées aux frais de contentieux était en hausse de 65 % par rapport à 2008. On peut donc s’inquiéter, d’une part, du respect de l’autorisation budgétaire accordée sur l’exercice 2008 pour l’action n° 6 « Conseil juridique et traitement du contentieux », dotée de 82,3 millions d’euros, dont une enveloppe de 75,2 millions d’euros pour les frais de contentieux, et, d’autre part, d’une éventuelle sous-évaluation de ce poste de dépenses pour 2009.

Au-delà, il est également permis de s’interroger sur le devenir du contentieux indemnitaire concernant la gestion des cartes nationales d’identité et des passeports par les communes : 336 requêtes étaient en cours au 1er septembre 2008, pour un montant total de 118,2 millions d’euros.

En conclusion, et sous ces réserves, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits de cette mission et de chacun de ses programmes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et de lUMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. le président. Madame le rapporteur spécial, je vous remercie de ne pas avoir dépassé le temps de parole qui vous était imparti.

Mme Michèle André, rapporteur spécial. J’ai été vice-présidente : je sais ce que c’est ! (Sourires.)

M. le président. Il est vrai que vous avez de l’expérience en la matière ! (Nouveaux sourires.)

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je limiterai mes observations à quatre points qui ont fait débat en commission.

Premièrement, vous souhaitez, madame la ministre, une réorganisation rationalisée des services déconcentrés de l’État, ce que nous ne pouvons qu’approuver.

Une question se pose toutefois. Pourquoi avoir une vision aussi jacobine de la réorganisation des services déconcentrés de l’État ? Est-il pertinent de prévoir un schéma unique d’organisation des services, qui s’appliquera à la fois dans la région Île-de-France et dans une zone de montagne ? N’aurait-il pas été préférable de laisser au préfet de région, dont la réforme consacre l’autorité, le pouvoir de décider de la meilleure organisation de ses services ?

Deuxièmement, la commission des lois a noté avec beaucoup de satisfaction votre engagement de ne pas supprimer les sous-préfectures dans les zones fragiles, qu’elles soient rurales ou de montagne, c'est-à-dire là où la densité de service public n’est pas suffisante, pour reprendre vos propres termes, madame la ministre. Une telle décision ne peut que rassurer les élus locaux.

Si la sous-préfecture est maintenue, la fonction de sous-préfet est quant à elle supprimée au profit de celle de conseiller d’administration. À vous entendre, madame la ministre, c’est une bonne chose, la capacité des conseillers d’administration ne faisant aucun doute et leur expérience leur permettant d’apporter autant, sinon plus dans certaines circonstances. Je comprends tout cela.

Pour autant, une autre solution n’aurait-elle pu être envisagée, par exemple faire en sorte que le conseiller d’administration fasse partie intégrante du corps préfectoral ? Pourquoi en faire, si vous m’autorisez l’expression et sans que je sois animé d’un quelconque esprit polémique, une sorte de sous-préfet, mais en moins cher ? (Mme la ministre manifeste sa surprise.)

En effet, si nous pouvons comprendre que le conseiller d’administration ne bénéficie pas d’un certain nombre des attributs liés à la fonction, par exemple une voiture de fonction, en revanche le fait qu’il ne dispose pas d’un logement de fonction pose problème. Si un accident ou des intempéries surviennent dans une zone de montagne, est-on certain que la présence de l’État, donc la mission de service public, sera alors bien assurée ?

Troisièmement, le contrôle de légalité va être centralisé dans les préfectures de département. C’est une bonne chose. Il faut sans doute améliorer l’expertise juridique de l’État. N’oublions pas toutefois que le bon contrôle de légalité est celui qui s’accompagne d’un dialogue constant avec l’élu local. Le fait de centraliser à la préfecture, au chef-lieu du département le contrôle de légalité ne va-t-il pas nuire à la qualité du dialogue entre le service de légalité et l’élu local ? En effet, le sous-préfet a également un rôle de conseil auprès des collectivités locales.

Quatrièmement, les passeports biométriques appellent de la part de la commission trois observations.

D’abord, nous comprenons le souci de proximité qui vous conduit à transférer en mairie l’accueil des personnes voulant un tel passeport. Cet accueil aurait aussi bien pu être assuré par les sous-préfectures, ce qui aurait également répondu à votre préoccupation.

Ensuite, alors que nous sommes dans un État de droit, il est surprenant de constater que depuis trois ans, c’est-à-dire depuis l’arrêt du Conseil d’État « Commune de Versailles », le transfert de cette compétence est privé de tout fondement légal. De ce fait, de multiples contentieux sont apparus et l’État est aujourd’hui amené à payer des indemnités aux communes. N’aurions-nous pas pu régler cette question au cours de ces trois années ?

Enfin, j’aborderai la dotation de 3 200 euros attribuée aux communes et qui a été évoquée par Mme André. Certes, madame la ministre, à Chantilly, vous avez mis huit minutes pour obtenir un passeport biométrique. Je suis certainement moins doué que vous puisque la même expérience dans ma ville de Mérignac a requis plus de vingt minutes. Il est vrai que mon passeport n’était pas préemballé, si je puis dire. J’ai dû remplir le formulaire avec l’aide de l’agent municipal ; la reconnaissance optique de caractères n’est pas fiable à 100 % et nécessite des corrections sur ordinateur. Un certain nombre de manœuvres doivent être effectuées, ce qui amène à dépasser le temps pris en considération pour calculer le montant de la dotation susvisée. D’ailleurs, la commission des finances a déposé un amendement tendant à doubler ce montant ; la commission des lois le soutiendra.

Pour conclure, je formulerai une observation générale. En réalité, toutes les mesures que vous proposez vont vers un repli de l’État sur les territoires. Ce repli, qui intervient après la réforme de la carte judiciaire, celle de la défense nationale, après la disparition de services publics, notamment de La Poste, ne peut qu’inquiéter.

Alors que vous annoncez, par ailleurs, une réorganisation des collectivités locales, n’aurait-il pas été plus cohérent de lier la réforme des services déconcentrés de l’État à celle des collectivités locales ? Nous aurions alors pu avoir une vision globale de nos territoires et réfléchir à d’autres modes d’organisation. À titre personnel, je considère que la question la plus délicate est non pas celle des relations entre les différentes collectivités locales mais celle des relations entre les collectivités locales et l’État.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois propose d’adopter les crédits de la mission. Pour ma part, à titre personnel, je m’y refuserai. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Bernard Saugey applaudit également.)

M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

J’informe le Sénat que je veillerai strictement au respect de ces temps de parole.

Mme Nathalie Goulet. Bonne nouvelle !

M. le président. Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Comme vous le savez fort bien, madame la ministre, et comme l’ont dit excellemment tant Mme le rapporteur spécial que M. le rapporteur pour avis – je les salue tous deux –, ce budget se traduit par une diminution très importante des effectifs. Vous en conviendrez, monsieur le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est vertueux !

M. Jean-Pierre Sueur. En réalité, si une fraction de cette diminution s’explique par un transfert de 93 équivalents temps plein travaillé vers l’Agence nationale des titres sécurisés, en raison des nouvelles missions qui lui sont confiées, le solde de cette baisse, soit tout de même 2,1 % des effectifs, s’inscrit dans l’objectif général de non-remplacement des personnels partant à la retraite.

Le taux de suppression lors des départs à la retraite est de 70 % pour la mission que nous examinons. Ce fait sera bien vu par les autorités qui veillent au respect de la règle des 50 % de non-remplacement. Madame la ministre, vous faites du zèle ! Quel score ! Ainsi, 733 personnes faisant valoir leur droit à la retraite ne seront pas remplacées. Au total, 800 emplois seront supprimés.

Est-il réaliste de faire fonctionner les préfectures et les sous-préfectures avec de telles diminutions d’effectifs ? Les 800 agents qui ne seront pas remplacés assument des tâches utiles. Au nom du groupe socialiste, je tiens à rendre hommage à l’ensemble des personnels des préfectures et des sous-préfectures, qui accomplissent un travail tout à fait remarquable. Leurs tâches sont même plus compliquées depuis quelques années. Ils font face à une charge de travail toujours plus importante.

Permettez-moi d’aborder un sujet que Mme Michèle André a évoqué dans son rapport écrit. Il s’agit des services qui gèrent les populations étrangères, qui accueillent donc les étrangers venant dans notre pays et devant accomplir de nombreuses formalités, notamment solliciter des titres de séjour.

Vous le savez, madame la ministre, dans nombre de préfectures, les conditions dans lesquelles travaillent ces personnels sont au-delà du point de rupture. Pour accéder à certains services, des files d’attente se forment dès cinq heures du matin devant des préfectures de la région Île-de-France. Comment vous paraît-il possible d’améliorer la situation eu égard aux effectifs qui vous restent ? Or une telle amélioration est nécessaire. C’est d’ailleurs souvent une question de dignité et de respect à l’égard des personnes que nous recevons.

Ma seconde question portera sur la réorganisation des services de l’État. J’ai un peu le sentiment que l’on cède à la mode selon laquelle il faut moins de directions.

Si j’ai bien compris, sera instaurée une direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Certes, l’environnement est une priorité essentielle. Personne ne dira le contraire.

Dans cette direction, l’aménagement se trouve en deuxième position. Pour ce qui me concerne, je n’ai aucun problème à l’égard de l’aménagement, voire de l’équipement, qui a complètement disparu, comme s’il ne fallait plus parler de direction de l’équipement. Pour ma part, j’aime bien que l’on équipe et que l’on aménage mon pays.

Le logement est cité en dernier alors que chacun connaît l’impérieuse nécessité liée à la politique du logement.

Enfin, je ne comprends pas très bien l’organisation départementale.

Ainsi serait créée une direction départementale des territoires. Fort bien ! Mais cette direction regroupe tellement de choses que l’on finit par se demander si vous n’auriez pas pu pousser la simplification un peu plus loin et créer une seule direction dans chaque préfecture. Vous auriez alors été la championne de la révision générale des politiques publiques, la fameuse RGPP ! Cette direction départementale des territoires va regrouper les directions départementales de l’équipement et de l’agriculture auxquelles s’adjoindraient les subdivisions départementales des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, les DRIRE, et des directions régionales des affaires culturelles, les DRAC. On associerait ainsi la culture, l’équipement, les transports dans les territoires.

Je ne comprends pas pourquoi on ne fait pas figurer la culture au sein de la direction vouée aux populations qui, elle, va comprendre, me semble-t-il, la police et les services vétérinaires, qui se trouvent séparés de l’agriculture… Tout cela est très arbitraire !

Une direction serait facultative, celle de la cohésion sociale. Pour quelle raison ?

Mme Nicole Bricq. Personne ne l’a compris !

M. Jean-Pierre Sueur. Dans certains départements, la cohésion sociale serait particulièrement nécessaire, comme si tel n’était pas le cas sur l’ensemble du territoire. Quel préfet pourrait soutenir qu’il n’est pas opportun, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines, de mettre en place une direction de la cohésion sociale ?

Je crains que l’on ne crée, en fin de compte, une confusion générale et que l’on ne génère beaucoup d’abstraction. Il y a là beaucoup d’effets de mode et je me demande si le bénéfice sera vraiment celui qui est escompté.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Sueur. En définitive, mon propos se résume en deux questions. Quelle est la justification profonde de cette organisation qui semble très critiquable ? Comment mener toutes les missions avec 800 personnes en moins, notamment l’accueil des étrangers ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » bénéficie, dans ce projet de loi de finances pour 2009, de 2,604 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une baisse de 1,3 % par rapport à 2008.

Cette baisse des crédits est due, comme l’a souligné la commission des finances, à la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques ou RGPP. Les missions incombant aux préfectures et aux sous-préfectures vont être profondément modifiées. La RGPP prévoit une centralisation, au sein des préfectures, du contrôle de légalité mais également une réorganisation des services de l’État au niveau régional prépondérant et au niveau départemental. Cela conduit le Gouvernement à réduire les effectifs de la mission en supprimant 733 emplois équivalents temps plein travaillé, afin de satisfaire son objectif de réduction des dépenses publiques. La RGPP est son atout maître pour l’atteindre, avec une présence amoindrie de l’État dans nos départements.

La carte judiciaire a programmé la fermeture de tribunaux d’instance et de grande instance, de conseils de prud’hommes. La carte militaire prévoit la fermeture de casernes. Le nombre de trésoreries a déjà fortement diminué et le projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires » comporte également des regroupements d’hôpitaux et des fermetures de services. À cette disparition progressive des services publics et des administrations de l’État, il faut ajouter aujourd’hui la réforme des sous-préfectures.

Ainsi, l’arrêté du 20 mai 2008 prévoit le remplacement de 115 sous-préfets par des conseillers d’administration, en attendant la suppression progressive de certaines sous-préfectures. Ces conseillers d’administration ne seront pas tout à fait tenus aux mêmes obligations que les sous-préfets. En effet, ils ne seront pas soumis à des astreintes en fin de semaine : mais que se passera-t-il si une catastrophe naturelle se produit durant cette période ?

Il est difficilement acceptable de réduire la présence des représentants de l’État dans nos départements pour offrir aux attachés principaux du ministère de l’intérieur des perspectives élargies de promotion professionnelle et d’accès à des postes de responsabilité supérieure, l’un des objets de la création des conseillers d’administration.

En revanche, il est incontestable que leur création a bien pour second objet de faire évoluer les modalités de représentation de l’État sur le territoire. Or le risque existe bel et bien de voir des territoires où les administrations de l’État seront amenées à exercer des missions de service public réduites à leur strict minimum, au détriment des populations qui subissent déjà un désengagement visible de l’État.

Mme le rapporteur spécial s’inquiète également de cette situation. Elle rappelle dans son rapport que « dans les lieux où les services publics sont moins nombreux et la circulation plus difficile, notamment dans les zones rurales, montagneuses ou isolées, cette présence de proximité, de conseil et de contrôle assurée par les sous-préfectures demeure nécessaire et doit absolument être garantie ». Je souscris à cette analyse

Néanmoins, je doute que le Gouvernement suive ce conseil. Nous ne sommes pas crédules quant aux motivations qui le poussent à choisir une telle orientation.

En effet, la RGPP accompagne la réforme territoriale amorcée en 2007 et lancée avec le rapport Attali qui proposait de supprimer le département ; l’Assemblée nationale s’est également emparée du sujet, sa commission des lois proposant dans un rapport intitulé « Pour un big bang territorial » de fusionner le département avec les régions. Enfin, nous attendons les conclusions de notre propre mission d’information sénatoriale sur la question ainsi, bien sûr, que les conclusions de la commission Balladur.

Or la RGPP prévoit une réorganisation des services de l’État à l'échelon régional et départemental, avec un recentrage autour du préfet.

Le Gouvernement procède ainsi, par anticipation, à une réorganisation administrative de l’État, alors que des missions parlementaires et extraparlementaires sont en train de réfléchir à une réforme des collectivités territoriales et que de nombreux élus, maires ou conseillers généraux, sont extrêmement sceptiques quant à la réforme envisagée.

Avant de conclure, j’évoquerai le contrôle de légalité.

Il est envisagé de ne plus assurer le contrôle de légalité dans les sous-préfectures, où les titres ne seraient plus délivrés. La RGPP prévoit de centraliser au sein des préfectures ce contrôle, qui serait de surcroît recentré sur les actes les plus importants.

Le rôle des sous-préfectures serait alors redéfini et réorienté vers les missions de conseil aux collectivités territoriales.

Madame la ministre, cette réforme pose tout de même la question de l’efficacité et de l’utilité du contrôle de légalité, en raison des conseils délivrés aux élus grâce aux lettres d’observations adressées par les services préfectoraux, et parce qu’il intervient en amont des actes, ce qui permet aux collectivités d’édicter ensuite des textes juridiquement solides. Enfin, le contrôle exercé sur les budgets locaux permet de prévenir les risques financiers pesant sur les collectivités.

Le recentrage du contrôle de légalité sur les seules préfectures ne nous semble pas de nature à assurer un service d’un niveau équivalant à celui qui est rendu aujourd’hui par les agents des sous-préfectures. La mission de conseil aux collectivités locales risque de s’estomper, au profit d'ailleurs d’un contrôle essentiellement répressif.

Les orientations budgétaires de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » pour 2009 et les choix politiques opérés par le Gouvernement dans le cadre de la RGPP ne nous inspirent qu’inquiétude. C’est pourquoi nous voterons contre ces crédits.