M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement no II-98.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis. Bien que les transfèrements et les extractions judiciaires relèvent des missions de sécurité incombant aux forces de sécurité intérieure, ces tâches détournent les policiers et les gendarmes de leurs principales missions que sont la surveillance de la voie publique et l’investigation. En outre, elles sont peu valorisantes pour les personnels et très consommatrices d’équivalents temps plein travaillé.
Enfin, les concours apportés à la justice sont à l’origine d’un agacement des personnels à l’encontre des magistrats qui n’ont pas toujours conscience de désorganiser les brigades de gendarmerie ou les services de police.
Cette charge de travail va particulièrement peser sur la police et la gendarmerie, alors que leurs moyens vont être durablement contraints.
Pourtant, des solutions existent ; je pense notamment à la vidéoconférence. L’ensemble des établissements pénitentiaires et des tribunaux en sont désormais équipés, mais personne ne s’en sert.
En outre, il pourrait être utile de revoir la liste des actes qui doivent être notifiés en présence d’un magistrat.
Enfin, des économies pourraient être réalisées grâce à une meilleure organisation des transfèrements et extractions. Cela supposerait un minimum de coordination entre les magistrats d’un même tribunal.
Pour toutes ces raisons, le principe prescripteur-payeur devrait être appliqué en l’espèce, conformément à l’esprit de la LOLF. Une responsabilisation financière des magistrats serait le levier le plus sûr pour obtenir enfin des résultats significatifs.
Sur le modèle de la réforme des frais de justice, et après conclusion d’une convention entre le ministère de la justice et celui de l’intérieur, un droit de tirage pourrait être défini au profit du ministère de la justice, lequel le répartirait ensuite entre les juridictions. En cas de dépassement, chaque juridiction rembourserait au ministère de l’intérieur tout ou partie des frais correspondants pour responsabiliser les magistrats.
J’avais initialement envisagé avec Jean Faure de présenter un amendement prévoyant que le ministère de l’intérieur et celui de la justice concluraient une convention pour définir les modalités de ce remboursement en cas de dépassement. Toutefois, la commission des finances a rejeté un amendement similaire présenté par mon collègue Jean Faure, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Selon la commission des finances, un tel amendement serait équivalent à un transfert de crédits entre deux missions, ce que la LOLF interdit. Cette interprétation est très stricte, mais j’en prends acte.
En conséquence, en concertation avec Jean Faure, je vous propose d’adopter le présent amendement qui a simplement pour objet de demander au Gouvernement un rapport sur le sujet. Il n’a naturellement pas la même portée que l’amendement envisagé initialement, mais il obligera le Gouvernement, notamment le ministère de la justice, à réfléchir enfin sérieusement à un mécanisme de responsabilisation financière du ministère de la justice et des magistrats.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial. Le sous-amendement no II-178 est trop imprécis en ce qui concerne les services consommateurs.
Par ailleurs, il recèle un vrai risque de confusion entre les gardes statiques, d’une part, les transfèrements et extractions judiciaires, d’autre part.
La commission des finances a donc émis un avis défavorable sur ce sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur Rebsamen, nous avons commencé à réduire sensiblement le nombre des gardes statiques de plusieurs ministères.
Des ministères nouveaux présentant une certaine sensibilité avaient demandé des gardes statiques. Nous leur avons proposé une autre formule.
Je n’ai pas les chiffres sous les yeux, mais je pourrai vous les transmettre rapidement.
Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de demander un rapport sur ce point dans la mesure où je peux vous fournir les informations que vous demandez. Fort de ces éléments, vous pourrez vous forger une opinion avant la discussion de la LOPPSI ou de la loi relative à la gendarmerie. Ce sera, me semble-t-il, le bon moment de revenir sur ces sujets.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre sous-amendement. Vous aurez toute latitude de le déposer à nouveau lors de la discussion de l’un des deux textes que je viens d’évoquer.
M. le président. Monsieur Rebsamen, le sous-amendement no II-178 est-il maintenu.
M. François Rebsamen. Non, je le retire, monsieur le président. Nous le redéposerons éventuellement lors de la discussion des textes qu’a mentionnés Mme la ministre.
M. le président. Le sous-amendement no II-178 est retiré.
La parole est à M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
M. Jean Faure, rapporteur pour avis. Je comprends le souci de nos collègues de faire le point sur l’ensemble des tâches abusives. Dans son rapport sur le futur texte de loi, la commission a dénombré une quinzaine de tâches indues ou abusives.
Nous nous sommes intéressés aux transfèrements et aux extractions judiciaires, parce qu’il s’agit des tâches les plus importantes et que celles-ci présentent un caractère spécifique.
Sur une liste de quinze tâches, on risque de n’en retenir que deux. Je souhaite que les transfèrements et les évaluations judiciaires fassent l’objet d’une évaluation chiffrée publiée dans un rapport.
Les deux assemblées du Parlement bénéficient de gardes statiques. Mais elles ne dépendent d’aucun ministère et n’ont pas les moyens de se protéger.
Pour toutes ces raisons, je suis hostile au sous-amendement no II-178.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je remercie M. Rebsamen d’avoir retiré son sous-amendement.
Je puis vous assurer que M. le rapporteur spécial est particulièrement attentif à la richesse des informations qui nous sont transmises par le ministère.
Madame la ministre, nous souhaitons que vous puissiez mettre à notre disposition tous renseignements utiles, notamment le nombre d’heures consacrées aux gardes statiques.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est la mission de la garde républicaine !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous disposerons ainsi d’une évaluation réaliste.
Ce travail doit pouvoir être l’objet de discussions à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement. C’est alors que nous sollicitons Mme la ministre pour qu’elle nous confirme qu’il a été fait bon usage des crédits mis à sa disposition.
Je voudrais remercier nos collègues Jean-Patrick Courtois et Jean Faure d’avoir manifesté autant de bienveillance et de compréhension à l’égard de la commission des finances. Ils avaient initialement prévu des transferts de crédits d’une mission vers l’autre, ce qui n’entre pas dans les prérogatives du Parlement : nous pouvons amender; nous pouvons, au sein d’une mission, affecter à un programme des crédits attribués à un autre, mais nous ne pouvons pas les transférer d’une mission vers une autre. Le risque était donc que nous amputions la mission « Sécurité » d’une partie de ses moyens sans pouvoir restituer ceux-ci à la mission « Justice ». C’est pourquoi j’ai souhaité, mes chers collègues, que vous renonciez à la rédaction initiale de votre amendement.
Cela étant, je tiens à indiquer que la commission des finances est totalement solidaire de votre préoccupation. Nous voudrions maintenant, madame la ministre, entrer dans une démarche active. D’après l’évaluation très sommaire à laquelle nous nous sommes livrés, le coût du transfèrement dépasse probablement 150 millions d’euros par an. Si nous voulons aller jusqu’au bout de la logique, cette somme doit être mise à la disposition de la justice, de telle sorte que ce soient les magistrats qui gèrent ce budget de transfèrement et tirent le profit des économies qu’ils pourraient réaliser : ils feront des économies s’ils mettent en place des équipements de visioconférence, s’ils gèrent autrement les transfèrements, car il peut arriver que tel transfèrement ait un caractère quelque peu formel alors qu’il est extrêmement coûteux. C’est donc à eux qu’il revient de gérer ces 150 millions d’euros, dont l’évaluation reste bien sûr à parfaire.
Cela ne sera pas sans conséquence sur votre propre budget, madame la ministre, car il se peut que, dans ces conditions, les magistrats recourent moins souvent à vos services et vous versent des sommes moindres ! (Mme le ministre approuve.) Tout cela devrait donc faire l’objet d’une convention entre les deux ministères, et il est urgent que celle-ci soit conclue.
Nous savons que les magistrats sont des gestionnaires ; ils en ont fait la brillante démonstration à propos des frais de justice. Nous attendons qu’ils relèvent ce nouveau défi que représentent les transfèrements.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais cela suppose que nous passions rapidement à l’acte, madame la ministre ! Nous nous sommes lancés sur cette piste des transfèrements depuis quelque temps déjà ; il nous faut maintenant aller jusqu’au bout.
La logique de la LOLF voudrait que les crédits concernés soient retirés à votre ministère et mis à la disposition de la justice, cette dernière s’acquittant auprès de vous, au titre des transfèrements qu’elle vous demanderait, de sommes qui seraient inscrites dans vos recettes. Il faut bien entendu s’attendre à ce que, dans ces conditions, elle essaie de payer le moins possible en organisant les transfèrements différemment.
Le système actuel n’est pas piloté : les magistrats vous demandent des transfèrements qui ne leur coûtent rien et que vous devez exécuter sans aucune régulation possible. C’est la négation de la gestion et de la maîtrise de la dépense publique !
Il est impératif d’en sortir, et nous comptons sur vous, madame la ministre, pour qu’il en soit ainsi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Raffarin. J’approuve tout à fait la démarche que traduisent les amendements de nos collègues Jean Faure et Jean-Patrick Courtois. Elle n’est pas l’expression, au détour de la session budgétaire, d’une volonté politique : elle reflète une réflexion issue de travaux ayant abouti à la présentation d’un rapport. La procédure me semble être de bonne méthode, et je partage les propos qu’a tenus à l’instant le président de la commission des finances au sujet de cette incitation à la vertu qui permettrait à la fois que ceux qui réalisent des économies bénéficient des crédits et que le budget de la sécurité ne se trouve pas, par une forme de gaspillage, amputé. C’est là un point clef, et la commission des affaires étrangères en a discuté.
Je voudrais néanmoins vous expliquer, madame la ministre, pourquoi, tout en approuvant ces amendements, j’ai voté contre en commission.
Je vous ai entendue, et vous savez que vous pouvez compter sur ma confiance et mon amitié. Je vous ai vue au ministère de la défense, je vous vois au ministère de l’intérieur, et je connais vos convictions : je ne doute en rien de la sincérité de vos propos sur les deux programmes de la mission « Sécurité » et sur leur indépendance.
Cependant, au-delà de votre personne, au-delà de votre politique, je reste inquiet sur les systèmes. À un moment ou à un autre, de procédure de gestion en procédure de gestion, on finira par rapprocher la police et la gendarmerie pour, finalement, aboutir à terme à n’avoir qu’une seule force de sécurité. De mon point de vue, compte tenu des responsabilités qui ont été les miennes, je vous le dis : ce serait, pour la République, dangereux. Je suis très attaché à l’existence de deux forces de sécurité et, quel que soit le goût des hauts responsables à écrire ici ou là des petits carnets et à faire quelquefois de la politique, il est heureux que cette séparation soit un fait.
M. Jean-Louis Carrère. Nous sommes d’accord ! Nous verrons comment vous voterez !
M. Jean-Pierre Raffarin. Pour l’équilibre de notre République, il nous faut veiller avec la plus grande attention à ce que la gendarmerie, avec ses qualités propres, avec l’ensemble de sa formation, de son orientation, et la police, avec également toutes ses qualités spécifiques, continuent de coexister.
Je vous fais confiance, madame la ministre, parce que je sais qui vous êtes, parce que je sais que vous portez cette conviction au plus profond de vous-même, une conviction de professionnelle sur la sécurité, une conviction de républicaine sur la protection de nos équilibres. Pour cette raison, je vous suivrai. Pour autant, le sujet est très important, et j’attire l’attention de nos collègues sur l’orientation que nous sommes en train de prendre.
Ce qui me paraît le plus malheureux, c’est la suppression, ou tout au moins le ralentissement de l’effort de formation de la gendarmerie. Car, mes chers collègues, où se crée la culture des deux forces de sécurité ? Dans la formation !
Et ne croyez pas, mes chers collègues, que c’est à cause de la suppression de l’école de Châtellerault que je monte au créneau avec tant d’énergie ! Oui, la suppression de l’école de Châtellerault est une erreur ! Mais c’est une erreur plus grande encore que de diviser par deux le nombre des écoles de gendarmerie, car c’est affaiblir la formation de la gendarmerie ! À terme, quand les écoles se rassembleront, les corps se rassembleront, et la République sera affaiblie.
Restons conscients de ce qu’il faut faire pour l’avenir. Croyez-moi, c’est un travail permanent !
M. Jean-Louis Carrère. C’est la fronde !
M. Jean-Pierre Raffarin. Mais cela dépasse tous les clivages, monsieur Carrère ! Nous devons, nous politiques, faire en sorte que les systèmes ne nous dominent pas. Or les systèmes de rapprochement et de parité pourraient finir par nous dominer.
Aujourd’hui, dans cette assemblée, la volonté politique est claire. Je l’approuve, je m’en félicite, et je remercie la ministre. Mais je voudrais vraiment que nous restions très vigilants, car il se pourrait qu’un jour les procédures l’emportent sur les convictions. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je me limiterai à une très brève observation : quand le général Gilles a été auditionné par la commission des affaires étrangères, il a tenu à souligner, abondant dans le sens de la vertu recommandée par la commission des finances, que le Conseil constitutionnel prenait déjà en charge ses propres gardes statiques. C’est assurément un exemple que les autres institutions pourraient suivre pour entrer dans ce cercle vertueux, et Mme Rachida Dati, hier, était parfaitement d’accord.
Je voterai les deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. J’ai longtemps été avocat – je l’étais encore il y a peu –, ce qui me conduit à penser que la réforme proposée est indispensable. Les magistrats immobilisent des heures entières les forces de police ou de gendarmerie pour des tâches qui pourraient fort bien être assumées par le budget de la justice. Au demeurant, si les juges les géraient, sans doute y seraient-ils beaucoup plus attentifs, et ce serait beaucoup mieux.
Par ailleurs, je pense moi aussi nécessaire que coexistent dans notre pays deux forces de sécurité importantes, avec chacune un système de formation fort.
Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, que je suis moi aussi un élu du département de la Vienne. L’école de gendarmerie de Châtellerault a été supprimée alors que le Premier ministre s’était formellement engagé à la maintenir. C’est la raison pour laquelle, tout à l’heure, je n’ai pas voté les crédits. Mes chers collègues, il nous faut donc à l’avenir être très vigilants pour ce qui concerne les formations. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Carrère. Nous voterons ces amendements, mais nous avons un problème d’entendement dans cet hémicycle.
Nous sommes très sensibles aux arguments de M. Raffarin et, comme lui, nous souhaitons conserver deux forces distinctes. Concrètement, cela signifie que nous irons jusqu’à voter contre la loi d’annexion de la gendarmerie par le ministère de l’intérieur ! La question que je pose à mes collègues de l’UMP est donc de savoir s’ils iront eux aussi au bout de la logique, comme je les y invite vivement.
Monsieur Raffarin, je partage vos craintes. Vous avez fort bien décrit le risque que court cette force républicaine qu’est la gendarmerie de ne plus irriguer les territoires ruraux, ce qui posera un problème à la République. La logique voudrait que, par nos votes, nous nous opposions à cette fusion-annexion avec le ministère de l’intérieur : je vous demande, mes chers collègues, de suivre cette logique et je vous invite à vous joindre à nous pour que, ensemble, nous mettions un terme à cette loi qui n’est pas une bonne loi pour la République.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-84 et II-98.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 73.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sécurité ».
5
Nomination de membres d’organismes extraparlementaires
M. le président. Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé plusieurs candidatures pour deux organismes extraparlementaires.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Pierre Hérisson, Bruno Sido, Michel Teston et Philippe Darniche membres de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques ; MM. Ladislas Poniatowski et Roland Courteau, membres titulaires, et MM. Jean-Claude Merceron et Daniel Raoul, membres suppléants du Conseil supérieur de l’énergie.
6
Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
Sécurité civile
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à féliciter l’ensemble des acteurs de la sécurité civile. En 2007, la saison des feux n’a touché qu’une superficie de 6 440 hectares, ce qui est inférieur au quart de la moyenne établie sur les dix dernières années.
Je relève également l’efficacité de la sécurité civile lors de ses nombreuses interventions à l’étranger, qu’il s’agisse des missions d’évacuation au Tchad ou encore de l’envoi de détachements en Inde et en Chine à la suite de catastrophes naturelles.
Je me félicite par ailleurs de la mise en place d’indicateurs nationaux des SDIS, les services d’incendie et de secours, au cours de l’année 2007. Ils permettront la mise en place, à partir de 2009, d’une stratégie transversale de la performance au sein des SDIS.
Cependant, je regrette une fois de plus que le périmètre de la mission « Sécurité civile » reste inchangé malgré la révision générale des politiques publiques. La mission continue d’être artificiellement divisée en deux programmes très imbriqués, et son périmètre budgétaire reste étroit, avec moins de 500 millions d’euros de crédits.
Le montant des crédits de la mission doit être comparé avec les dépenses des SDIS, qui s’élèvent à 5,3 milliards d’euros dans les budgets prévisionnels pour l’année 2008. En hausse prévisionnelle de 6,15 % en 2008, le budget des SDIS représente ainsi plus de dix fois celui de la mission.
La part relative des départements dans les recettes de fonctionnement des SDIS tend à s’accroître pour représenter, en 2008, un peu plus de 2 milliards d’euros, soit 53,4 % du total, ce qui correspond à près de 5 % des dépenses totales de fonctionnement des départements.
Ce constat me conduit à regretter très vivement la nouvelle diminution des crédits du Fonds d’aide à l’investissement, le FAI, des SDIS : 24,4 millions d’euros en 2009, soit moins 12,8 %. Le FAI est censé matérialiser l’aide de l’État aux dépenses d’investissements des SDIS, actuellement largement prises en charge par les collectivités territoriales. Je regrette d’autant plus vivement cette baisse continue – en trois ans, les crédits du FAI ont été divisés par trois – que les SDIS sont demandeurs de plus d’aides à l’investissement, notamment pour la mise en place du réseau ANTARES.
Les arguments présentés par le Gouvernement, selon lesquels les SDIS ne consomment pas la totalité des crédits du FAI, ne me paraissent donc pas recevables et ne sauraient justifier cette diminution. Il convient, au contraire, de modifier les règles d’utilisation des crédits du FAI afin de faire en sorte qu’ils profitent réellement aux SDIS, dans un moment où ceux-ci en ont réellement besoin.
En ce qui concerne les crédits de la mission pour 2009, si on constate une diminution de 38,4 % des autorisations d’engagement et une augmentation de 1,6 % des crédits de paiement, cela résulte d’un « retour à la normale », les autorisations d’engagement pour 2008 ayant été augmentées en vue de la passation de nouveaux marchés pluriannuels de maintenance des aéronefs en 2008. Les marchés concernant les deux derniers lots ont été passés le 31 octobre dernier, comme me l’a indiqué le directeur de la défense et de la sécurité civile.
Par ailleurs, je me félicite de la vente de l’ancien site de l’École nationale des officiers de sapeurs-pompiers à Nainville-les-Roches. Là aussi, le feuilleton s’est terminé récemment.
J’avais souligné, à l’occasion d’un contrôle sur pièces et sur place, les difficultés rencontrées dans le processus de cession de ce site eu égard aux coûts de maintenance particulièrement élevés et j’avais préconisé la vente rapide du site. Nous y sommes aujourd'hui et même si le produit de la vente – 3,5 millions d’euros – peut sembler satisfaisant, on aurait peut-être pu réaliser une meilleure vente si cette cession était intervenue plus tôt.
Madame la ministre, j’aimerais savoir dans quelle mesure cette cession pourrait contribuer à résoudre les problèmes fonciers rencontrés par l’ENSOSP à Aix-les-Milles, car de véritables questions se posent aujourd'hui pour cette école.
Je signalerai également que la programmation triennale 2009-2011 prévoit une rationalisation des flottes d’hélicoptères de la sécurité civile. Les objectifs poursuivis sont, conjointement avec la gendarmerie et la police nationales, de rationaliser leurs fonctions support et d’optimiser l’implantation des bases d’hélicoptères. C’est une très bonne chose et cette mutualisation pourrait d’ailleurs être élargie au SAMU.
Mes chers collègues, sous réserve des réponses aux questions que j’ai formulées, notamment sur les crédits du FAI, la commission des finances vous propose l’adoption des crédits de la mission « Sécurité civile ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, en introduction à mes propos relatifs à la mission « Sécurité civile », je voudrais rendre hommage à l’ensemble des personnels de la sécurité civile, aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, à tous les secouristes, des acteurs incontournables, fortement sollicités et qui paient encore, chaque année, un tribut trop lourd dans l’exercice de leurs missions ; je pense tout particulièrement aux six sapeurs-pompiers qui ont perdu la vie au cours de l’année 2008.
Madame le ministre, je ne reviendrai pas sur les éléments strictement budgétaires qui ont été très précisément exposés par l’excellent rapporteur spécial, notre collègue Claude Haut. Mon intervention portera plus particulièrement sur deux problématiques qui méritent, à mon sens, une attention toute particulière. Enfin, deux remarques compléteront mon intervention.
Le premier sujet portera sur l’encadrement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris.
Madame le ministre, je souhaiterais attirer votre attention et celle de l’ensemble de mes collègues sur le taux d’encadrement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Mais permettez-moi au préalable de rendre hommage à cette brigade exceptionnelle à statut militaire, créée en 1811, dont l’activité en matière de secours à personnes est, à l’heure actuelle, cinq fois plus importante que celle des SDIS de première catégorie : pour la première fois, le cap des 500 000 interventions annuelles globales, toutes interventions confondues, va être dépassé.
J’en viens à la structure de l’encadrement de la brigade : elle a peu évolué depuis 1967, date à laquelle les trois départements de la petite couronne ont été intégrés dans sa zone d’intervention. Or, à l’heure où l’activité opérationnelle de la brigade « explose » et où les tâches administratives telles que l’élaboration des marchés publics mobilisent des effectifs toujours plus nombreux, son taux d’encadrement, qui compte 3,98 % d’officiers et 18,32 % de sous-officiers, semble aujourd’hui trop faible pour lui permettre d’assurer sereinement ses missions.
Si, durant de nombreuses années, ce taux d’encadrement ne posait pas trop de problèmes, les nouveaux concepts opérationnels ont fondamentalement changé la donne.
En effet, à la suite des attentats de Madrid et de Londres, le préfet de police de Paris a demandé à la brigade de quadrupler sa capacité dans les contextes d’attentats terroristes, afin d’assurer une capacité opérationnelle des secours dans l’hypothèse de quatre attentats simultanés touchant la capitale, avec une capacité supplémentaire de gérer au moins un site touché par un risque NRBC, nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique.
Si la brigade est en mesure de répondre à ces contraintes, grâce au recrutement, notamment, de spécialistes qui constitueront une compagnie NRBC spécifique, la partie commandement ne peut être assurée, faute de moyens financiers.
Compte tenu de ces éléments, madame le ministre, la problématique du taux d’encadrement de cette brigade mériterait une attention toute particulière. Assurer l’efficacité des interventions doit être notre priorité.
La seconde problématique est relative à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale pour les métiers soumis à des conditions d’aptitudes physiques particulières, dont les sapeurs-pompiers.
La loi du 11 février 2005 relative à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale instaure une différence de traitement entre les entreprises privées et publiques dans l’application de cette disposition.
Ainsi, selon l’article L.323-1 du code du travail, tout employeur occupant au moins vingt salariés est tenu d’employer, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de l’effectif total de ses salariés. Cet article est applicable aux SDIS.
Compte tenu du critère d’aptitude physique particulière exigée pour exercer les missions des sapeurs-pompiers, les SDIS ne pourront atteindre ce taux de 6 % et sont, par conséquent, assujettis au versement d’une contribution annuelle au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
Or les entreprises privées peuvent, elles, bénéficier d’un régime modérateur spécifique, à savoir un coefficient de minoration au titre de certains métiers exercés au sein de leurs établissements. C’est ainsi lorsqu’elles comptent des sapeurs-pompiers dans leurs effectifs.
Exclure les SDIS de ce dispositif crée une réelle distorsion et les cotisations compensatoires grèvent lourdement le budget de nombreux SDIS.
En décembre 2006, dans une réponse à une question écrite de M. Pierre Bordier, M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique, avait souligné l’opportunité de dresser un tel bilan. Deux ans après cette annonce, est-on en mesure de juger de ce bilan qui pourrait conduire, le cas échéant, à des modifications de la loi du 11 février 2005 ?
Enfin, je formulerai deux remarques.
La première portera sur l’École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers.
Pour avoir accompagné le rapporteur spécial, M. Claude Haut, lors d’une visite de cette école implantée sur son nouveau site à Aix-les-Milles, je ne peux que partager les inquiétudes de mon collègue sur les difficultés de l’école pour attirer des formateurs et lancer la construction de ses bâtiments de formation et d’hébergement.
Cette école mérite tous nos encouragements, car elle doit devenir incontournable dans le futur réseau européen des instituts de formation de sécurité civile qui va regrouper l’ensemble des écoles nationales de formation des acteurs des secours.
Madame le ministre, dans ce contexte, la France doit promouvoir cette école.
La seconde remarque porte sur le thème de la culture et de la sécurité civile. Pour avoir abordé ce sujet plus explicitement dans le contexte du projet de loi de finances de 2008, je m’en tiendrai, comme convenu, à une simple remarque.
La loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile a imposé une obligation claire de formation scolaire à la prévention des risques et aux missions des services de secours.
Madame le ministre, vous connaissez mon attachement au principe de cette formation scolaire. Je dois constater, quatre ans après le vote de la loi précitée, que l’application de l’obligation scolaire n’est toujours pas effective dans l’ensemble des établissements scolaires du territoire national.
Vous allez me dire qu’elle dépend de la bonne volonté et de l’engagement des acteurs locaux des secours et de l’éducation nationale. Pourtant, il me semble urgent, madame le ministre, de rendre effective cette obligation au plus vite, en particulier dans les établissements scolaires situés dans des bassins à risques.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, ces observations formulées, je vous indique que la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Sécurité civile » pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)