Sommaire
Présidence de Mme Monique Papon
3. Fin de mission d’un sénateur
M. Serge Lagauche, Mme la présidente.
5. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.
Recherche et enseignement supérieur
MM. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances ; Christian Gaudin, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Philippe Dominati, en remplacement de M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
MM. Ivan Renar, Jean-Claude Etienne, Mme Françoise Laborde, MM. Serge Lagauche, Jean-François Voguet, Christian Demuynck, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Yannick Bodin, David Assouline.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.
Amendement n° II-43 de la commission. – MM. Christian Gaudin, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-129 rectifié du Gouvernement. – Mme la ministre, Philippe Adnot, rapporteur spécial. – Adoption.
Amendement n° II-140 du Gouvernement. – Mme la ministre, Philippe Adnot, rapporteur spécial ; Mme Marie-Christine Blandin. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Amendements identiques nos II-44 de la commission et II-57 de M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. – MM. Philippe Adnot, rapporteur spécial ; Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis ; Mme la ministre. – Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 66 ter
Amendement n° II-113 rectifié de M. Philippe Adnot. – M. Philippe Adnot. – Retrait.
Amendement n° II-95 de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Christian Gaudin, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Serge Lagauche. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance
MM. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances ; Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Adoption des crédits.
Direction de l’action du Gouvernement
MM. Yves Krattinger, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Roger Romani, Gilbert Barbier, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Amendement no II-130 du Gouvernement. – MM. le secrétaire d'État, le rapporteur spécial. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Article additionnel après l'article 59 duodecies
Amendement no II-46 de M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis. – MM. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances, en remplacement de M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial ; Mme Jacqueline Gourault, en remplacement de M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Bernard Vera, Jacques Gautier.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Amendement no II-117 de M. Gérard Larcher, président du Sénat. – MM. Philippe Richert, Premier questeur ; le rapporteur spécial, le secrétaire d'État. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
MM. Bernard Vera, rapporteur spécial de la commission des finances ; Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Adoption des crédits.
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mmes Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Gisèle Printz, MM. Guy Fischer, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Robert Tropeano.
MM. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.
Amendements nos II-87, II-93 de Mme Gisèle Printz et II-120 de M. Guy Fischer. – Mme Gisèle Printz, MM. Guy Fischer, le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet des trois amendements.
Amendements nos II-119 de M. Guy Fischer et II-86 de Mme Gisèle Printz. – M. Guy Fischer, Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet des deux amendements.
Amendement no II-88 de Mme Gisèle Printz. – Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet.
Amendement no II-91 de Mme Gisèle Printz. – Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet.
Amendement no II-90 de Mme Gisèle Printz. – Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet.
Amendement no II-89 de Mme Gisèle Printz. – Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet.
Adoption des crédits.
Article 59 septies. – Adoption
Article additionnel après l'article 59 septies
Amendement no II-92 de Mme Gisèle Printz. – Mme Gisèle Printz, MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d’État. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
MM. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial de la commission des finances ; Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Mme Muguette Dini, MM. Guy Fischer, Jean-Claude Etienne, Gilbert Barbier, René Teulade, André Vantomme.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Amendement no II-51 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement no II-33 de la commission. – M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Amendements nos II-142 du Gouvernement, II-35 et II-34 de la commission. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Retrait des amendements nos II-35 et II-34 ; adoption de l’amendement no II-142.
Adoption des crédits modifiés.
Mme Annie David.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 73
Amendement no II-151 du Gouvernement. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mmes Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Marie-France Beaufils, M. Jacques Mahéas.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Amendement no II-7 de la commission. – MM. le rapporteur spécial, le ministre, Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Adoption des crédits des deux comptes spéciaux.
MM. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances ; Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Adoption des crédits.
Régimes sociaux et de retraite
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances, en remplacement de M. Bertrand Auban, rapporteur spécial ; Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Mme Isabelle Pasquet.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Amendement no II-141 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur spécial. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Amendement no II-143 du Gouvernement. – Adoption
Adoption des crédits modifiés du compte spécial.
Articles additionnels après l’article 66 ter
Amendements nos II-114 rectifié et II-115 rectifié bis de Mme Catherine Procaccia. – MM. Jacques Gautier, le rapporteur spécial, le ministre, Mme Isabelle Pasquet. – Retrait de l’amendement no II-114 rectifié ; adoption de l'amendement no II-115 rectifié bis insérant un article additionnel.
Engagements financiers de l’État
Compte spécial : Gestion du patrimoine immobilier de l’État
Compte spécial : Participations financières de l’État
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial de la commission des finances ; M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mmes Nathalie Goulet, Marie-France Beaufils.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Amendement no II-138 du Gouvernement. – M. le ministre, Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés de la mission « Engagements financiers de l’État ».
Amendement no II-20 de la commission. – Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial ; M. le ministre. – Adoption.
Amendement no II-12 de la commission. – Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial ; M. le ministre. – Retrait.
Adoption des crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Adoption des crédits du compte spécial « Participations financières de l’État ».
Article additionnel après l'article 85
Amendement no II-29 de la commission et sous-amendement no II-152 du Gouvernement. – Mme Marie-France Beaufils. – Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.
Remboursements et dégrèvements
Mmes Marie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances ; Isabelle Pasquet.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; Mme le rapporteur spécial.
Amendement no II-139 du Gouvernement. – M. le ministre, Mme le rapporteur spécial, Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
compte rendu intégral
Présidence de Mme Monique Papon
vice-présidente
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Décès d'un ancien sénateur
Mme la présidente. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jacques Genton, qui fut sénateur du Cher de 1971 à 1998. Chacun se souvient qu’il présida la délégation pour l’Union européenne de 1979, date de sa création, jusqu’en 1998.
3
Fin de mission d’un sénateur
Mme la présidente. Par lettre en date du 27 novembre 2008, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 30 novembre 2008, de la mission temporaire sur la place du vétérinaire libéral et son rôle dans le système français de surveillance et de gestion des risques tout au long de la filière animale, confiée à M. Charles Guéné, sénateur de la Haute-Marne, auprès de M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture et de la pêche, dans le cadre des dispositions de l’article L. O. 297 du code électoral.
Acte est donné de cette communication.
4
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, pour un rappel au règlement.
M. Serge Lagauche. À l’heure où nous allons débattre des crédits destinés à la recherche, je voudrais revenir sur la curieuse journée d’hier pour ce secteur.
Hier matin, était réuni le conseil d’administration du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, avec, à l’ordre du jour, deux points d’importance capitale pour l’avenir de l’organisme : le vote du budget pour 2009 entérinant les suppressions de postes, sur lesquelles nous reviendrons lors du débat, et une étape majeure de la réorganisation du CNRS en instituts.
N’assumant vraisemblablement pas cet ordre du jour, la tutelle et la direction ont réussi à échafauder un scénario ubuesque pour éviter des débats difficiles avec les élus représentant le personnel.
Ainsi, jusqu’au dernier moment, le secret a été gardé sur le lieu effectif de la réunion du conseil d’administration, la direction laissant entendre qu’il aurait lieu au ministère et non siège du CNRS.
Peu dupes de la mascarade qui se préparait, les élus, accompagnés des personnels désireux de manifester leur mécontentement face aux décisions à entériner, compromettant l’avenir de leur organisme, finissent par gagner le siège du CNRS quelques minutes avant l’heure du début de la réunion du conseil d’administration. La salle du conseil d’administration est préparée avec soin, même les croissants sont au rendez-vous… Belle mise en scène !
Cinq minutes avant l’ouverture de la séance du conseil, les cinq élus sont prévenus par SMS que celle-ci se tiendra dans des bureaux situés à quelques centaines de mètres de là. Des cars de CRS les attendent, empêchant tout le monde de pénétrer dans les lieux de la réunion, même les cinq élus au conseil d’administration.
À l’issue de cette mascarade, point de gêneurs donc pour perturber les votes hypothéquant l’avenir du fleuron de la recherche française, et tout cela dans la plus grande légalité – convocations envoyées, ordre du jour transmis – et avec la plus belle hypocrisie.
Madame la présidente, je demande que le Sénat prenne acte tout à la fois du mépris avec lequel la direction du CNRS et sa tutelle traitent les chercheurs qui, pour protester, ont passé la nuit devant le siège de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, et de la manière dont elles bradent leur avenir et celui de la recherche française.
Mme la présidente. Monsieur Lagauche, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
5
Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).
Recherche et enseignement supérieur
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (et articles 66, 66 bis et 66 ter).
La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.
M. Philippe Adnot, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à bien des égards, la mission « Recherche et enseignement supérieur », la MIRES, paraît privilégiée dans un contexte budgétaire très contraint
Ses crédits, qui s’élèvent à 24,1 milliards d’euros en crédits de paiement, affichent une progression 3,2 % par rapport à 2008.
Ses emplois échappent à la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, les taux réels étant d’un pour huit dans l’enseignement supérieur et d’un pour douze pour la recherche.
La programmation des finances publiques montre une continuité de cet effort budgétaire jusqu’en 2011.
On peut y voir la valeur d’investissement dans l’avenir des dépenses engagées dans cette mission, vision que Christian Gaudin et moi-même partageons. Cela étant, il restera à vérifier que ces moyens seront bien utilisés.
Le programme « Formations supérieures et recherche universitaire » sera doté de 11,7 milliards d’euros de crédits de paiement, soit presque la moitié de ceux de la mission. Plusieurs innovations de ce projet de budget le concernent.
Ainsi, le 1er janvier 2009, vingt établissements universitaires accéderont à l’autonomie, en application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, la loi LRU : 34 491 emplois équivalent temps plein travaillé, ETPT, représentant une masse financière de près de 1,9 milliard d’euros, doivent leur être transférés.
Par ailleurs, on met en place le nouveau système d’allocation des moyens aux universités, destiné à remplacer l’ancien outil San Remo, dans une logique donnant la priorité aux besoins réels et à la performance sur les calculs théoriques. Il prend en compte les observations qui ont été présentées par l’Assemblée nationale et par le groupe de travail sénatorial commun à notre commission et à la commission des affaires culturelles.
Madame la ministre, je reviendrai sur ce point à la fin de mon propos. Je souhaite savoir si cette nouvelle méthode est définitive. La valorisation de la recherche aurait mérité d’être davantage prise en compte. Cette nouvelle méthode le permettra-t-elle ? Le tableau qui m’a été transmis n’est pas satisfaisant sur ce point.
Les moyens financiers nécessaires à la réussite de cette délicate transition sont aussi au rendez-vous : 91 millions d’euros sont prévus en 2009, l’effort total devant s’élever à 511 millions d’euros sur la période 2009 à 2011.
Sur ce programme, il convient aussi d’évoquer deux axes.
Le premier est la revalorisation des carrières de certaines catégories de personnel, parmi lesquelles les jeunes maîtres de conférences, dont la rémunération sera majorée de 240 à 510 euros bruts par mois, soit de 12 à 25 % d’augmentation. Madame la ministre, nous vous remercions de cette initiative qui nous satisfait pleinement, car elle répond à notre attente.
Le second axe est la poursuite du plan « Réussite en licence » qui sera doté de 68 millions d’euros en 2009.
Enfin, d’un point de vue extra-budgétaire, il faut évoquer l’opération campus, qui doit doter la France d’une dizaine de campus accueillants et performants, compétitifs sur la scène internationale. Dix campus ont ainsi été sélectionnés par le ministère pour « leur ambition scientifique et leur rayonnement international, l’urgence immobilière et les projets présentés en termes de vie de campus ».
Le financement de l’opération provient des produits financiers dégagés par le placement, sur un compte spécifique, du produit de la vente par l’État d’une partie des actions qu’il détient dans EDF. Cinq milliards d’euros devaient y être consacrés. Le produit de la vente déjà effectuée s’élève à 3,7 milliards d’euros. Ce n’est sans doute pas le moment de réaliser les autres actions, au risque de ne pas dégager l’intégralité des moyens nécessaires. L’essentiel est de pouvoir engager cette action.
En 2009, 157 millions d’euros doivent être ainsi mobilisés. Madame la ministre, nous serions heureux que vous puissiez détailler ces engagements et préciser le calendrier de lancement des premiers chantiers.
Pour ce qui concerne le programme « Vie étudiante », les moyens sont également au rendez-vous, avec un peu plus de 2 milliards d’euros de crédits, en augmentation de 3,2 % par rapport à 2008 à périmètre constant.
Cette augmentation reflète l’effort supplémentaire consacré aux systèmes d’aides sociales.
Pour 2009, il convient de souligner quatre aspects.
Premièrement, les aides au mérite montent en puissance – 1 800 euros par étudiant – et elles peuvent éventuellement se cumuler avec les bourses attribuées sur des critères sociaux. Le nombre d’étudiants aidés doit doubler entre septembre 2008 et septembre 2010, pour atteindre alors 18 000 étudiants.
Deuxièmement, le contingent des bourses de mobilité, dont les crédits demeurent inscrits sur le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », augmente. Il doit passer de 12 000 à 30 000 bourses.
Troisièmement, on peut relever l’augmentation des moyens du Fonds national d’aide d’urgence, dont le financement est complété à hauteur de 4,5 millions d’euros pour atteindre 45 millions d’euros.
Quatrièmement, une garantie publique, portée par OSEO, contribuera à encourager l’octroi de prêts aux étudiants. En 2009, elle doit permettre à 60 000 étudiants de bénéficier de prêts bancaires d’un montant moyen de 7 500 euros.
S’agissant des autres programmes, je note que le programme « Recherche dans le domaine des risques et des pollutions » bénéficie des effets du Grenelle de l’environnement puisque ses crédits, qui s’élèvent à 298 millions d’euros, augmenteront de 6,6 % en 2009.
Mais le principal outil dont il profitera est extra-budgétaire. Il s’agit d’un fonds « démonstrateurs technologiques » logé au sein de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.
En soi, ce choix paraît pertinent. Toutefois, madame la ministre, j’aurai aussi l’occasion de vous interroger sur ce sujet. Si l’étape de la démonstration de la validité du fonds nous semble essentielle, nous avons encore besoin de précisions sur sa mise en place, son financement, sa gouvernance et les structures industrielles qui en bénéficieront.
Au sujet du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », je me dois d’évoquer la fusion programmée, au premier semestre 2009, des deux opérateurs du programme : la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte. Ce rapprochement a été décidé par le comité de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007. À son terme, les deux entités n’en formeront plus qu’une.
Vous vous souvenez peut-être de mon rapport d’information qui dénonçait, au sujet du Palais de la découverte, un condensé de « dysfonctionnements administratifs et politiques ». À l’époque, il n’était pas question du rapprochement annoncé, le Gouvernement n’étant pas favorable à cette opération. Aujourd’hui, j’espère simplement que les différents investissements prévus seront mis en œuvre et que ces lieux pourront recouvrer l’ambition qui n’aurait jamais dû les quitter.
Enfin, le programme « Enseignement supérieur et recherche agricoles » voit ses crédits augmenter de façon substantielle en 2009. Une progression de 4,5 % à périmètre constant est constatée, permettant d’atteindre près de 280 millions d’euros de crédits de paiement.
Ces crédits permettront de combler en grande partie le retard dans les subventions auxquelles les établissements d’enseignement supérieur agricole peuvent prétendre. À ce sujet, madame la ministre, la faible présence de la recherche agricole dans le Grenelle de l’environnement m’étonne quelque peu, quand de nombreux organismes prennent une part active dans cette démarche.
Il s’agira également de stabiliser le report de charge constaté, à la fin de 2009, au titre des aides sociales aux étudiants, alors même que les effectifs progressent et que les effets des mesures de revalorisation des bourses prennent leur pleine mesure.
Avant de vous remettre l’avis de la commission sur ces crédits, madame la ministre, je voudrais résumer les différentes questions que nous vous soumettons.
Pouvons-nous disposer d’informations sur la mise en place du nouveau système de financement des universités ? Tous les critères de performance ont-ils été déterminés dans ce cadre ?
Est-il possible d’améliorer la place de la valorisation de la recherche dans la grille qui sera mise en place ? Comment pourrait-on mieux prendre celle-ci en compte ?
Qu’en est-il de la controverse dont j’ai eu connaissance s’agissant d’un décret que vous devriez prendre sur les dépôts de brevet ? Qui effectue ces dépôts ? Comment s’organiseraient la responsabilité et le partage ? Personnellement, je suis très favorable à votre réflexion : nous ne pouvons continuer à fonctionner avec plusieurs intervenants, même au sein d’une unité mixte. Cela empêche toute bonne négociation. Je souhaite donc que vous nous éclairiez sur cette petite controverse.
Pouvez-vous nous apporter des précisions sur la faible représentation de la recherche agricole dans le Grenelle de l’environnement. Comment le fonds de soutien aux démonstrateurs en nouvelles technologies de l’ADEME sera-t-il financé ? Quelle sera sa gouvernance ?
À l’avance, madame la ministre, je vous remercie des réponses que vous voudrez bien m’apporter.
Sous le bénéfice de ces remarques et questions, la commission des finances vous recommande d’adopter les crédits de ces programmes, qui lui ont paru de très grande qualité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur spécial.
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme vient de l’indiquer Philippe Adnot, la mission « Recherche et enseignement supérieur » a été généreusement dotée en 2009, ce qui confirme l’engagement tenu par le Gouvernement.
J’ajouterai que ce qui est vrai pour les crédits budgétaires l’est aussi pour les dépenses fiscales. Ainsi, le crédit d’impôt recherche, le CIR, doit augmenter de 620 millions d’euros, d’après les prévisions. Il dépassera légèrement 2 milliards d’euros, sous l’effet de l’importante réforme de la loi de finances pour 2008.
Il ne s’agit bien sûr que de prévisions et j’espère qu’elles ne seront pas démenties dans le contexte actuel de crise économique. Pour ma part, j’estime que le transfert de la connaissance dans l’appareil économique reste l’arme la plus sûre pour gagner la bataille de la compétitivité et assurer le retour de la croissance.
Cette évolution illustre néanmoins une véritable ambition. Le crédit d’impôt recherche semble être une dépense fiscale structurante. Il résulte d’un vrai choix politique et très visible, notamment à l’étranger. Bien entendu, au vu du niveau de la dépense, l’efficacité du crédit d’impôt recherche doit être examinée avec soin, tant pour les PME que pour les grandes entreprises.
Aussi, même si porter un regard global sur les apports du crédit d’impôt recherche et ses éventuels effets pervers est difficile, je compte orienter en ce sens mes prochains travaux de contrôle budgétaire. Tel a également été le souci de l’Assemblée nationale quand elle a introduit dans ce projet de loi un article 46 bis. Selon les termes de cet article, un rapport d’évaluation du Gouvernement sur le crédit d’impôt pour dépenses de recherche doit être transmis au Parlement avant le 30 novembre 2009.
J’en reviens à présent aux crédits.
Concernant le « grand programme généraliste » de la recherche, c’est-à-dire le programme 172 «Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », l’augmentation de crédits s’élève à 3,9 % en 2009. Les crédits de paiement atteignent ainsi un peu plus de 5 milliards d’euros. Le programme finance les principaux organismes publics de recherche : CNRS, INSERM, CEA, INRIA, etc.
Dans un tel contexte et face à une matière aussi complexe, la question de l’évaluation est évidemment une question-clé. Pour y répondre, l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’AERES, a été créée et installée le 21 mars 2007. Les commissions des finances et des affaires culturelles du Sénat ont auditionné conjointement son président, M. Jean-François Dhainaut, en juillet dernier. Elles ont pu apprécier son volontarisme et son dynamisme.
Mais, pour que M. Dhainaut puisse exercer pleinement ses missions, il convient de clarifier la situation résultant de la coexistence de l’AERES et de certaines structures d’évaluation propres aux organismes publics de recherche. À mes yeux, ces dernières ne doivent pas brouiller l’action de 1’AERES et je souhaite, madame la ministre, que vous puissiez nous exposer votre vision sur ce sujet.
Toujours sur ce programme, l’évolution de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, est très intéressante. L’année dernière, j’avais souhaité dénoncer sa dispersion sur des missions éloignées de son « cœur de métier», le financement de la recherche sur projets, ainsi que son manque d’ambition sur les sujets innovants ou liés au développement durable. À cette époque, le Grenelle de l’environnement venait de se conclure.
Aussi je me félicite de constater que, cette année, les crédits de l’ANR diminuent, certes, mais uniquement en raison de la sortie de son périmètre, pour un montant de 79,5 millions d’euros, de tâches périphériques susceptibles de l’éloigner de sa raison d’être, la recherche sur projets.
Par ailleurs, la programmation de l’agence a été réorientée afin de privilégier les programmes blancs, par définition innovants, et les programmes liés aux thématiques du Grenelle de l’environnement.
Cette même remarque s’applique au programme « Recherche dans le domaine de l’énergie », où l’on observe une très nette réorientation des crédits vers l’action n°2 « Nouvelles technologies de l’énergie », qui est portée par le CEA, l’IFP et l’ADEME, conformément aux souhaits que j’avais exprimés dans le cadre du précédent budget. Comme l’a déjà annoncé Philippe Adnot, ce projet de budget porte donc la trace du volet « recherche » du Grenelle de l’environnement qui doit se traduire par un effort financier de l’État de un milliard d’euros en quatre ans.
Madame la ministre, vous revenez de La Haye où s’est tenue cette semaine la conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne, l’ESA.
Je souhaite que vous nous rendiez compte des conclusions de cette conférence, qui devait adopter la programmation de l’ESA jusqu’en 2012.
Plus précisément, pourriez-vous nous indiquer le niveau de la programmation et ses principaux programmes lancés par la conférence de La Haye ? Pourriez-vous également expliciter l’évolution de la quote-part financière de la France au sein de l’ESA et sa compatibilité avec la position de tête de l’industrie spatiale française en Europe ?
Enfin, dans ce contexte, pourriez-vous préciser l’évolution prévisible de la dette du Centre national d’études spatiales, le CNES, à l’égard de l’ESA ? Cette question, vous le savez, fera l’objet d’une audition spécifique de notre commission en début d’année 2009, sur la base d’une enquête que nous avons commandée à la Cour des comptes.
L’ancien programme « Recherche industrielle » est devenu le programme « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle ». Son périmètre s’est élargi en intégrant les établissements d’enseignement supérieur dépendant du ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. Il s’agit, entre autres, du groupe des écoles nationales d’économie et de statistiques, des écoles des Mines et des Télécoms ou SUPELEC. Ce nouveau format lui donne davantage de poids et de cohérence. Dans le projet de loi de finances pour 2009, il regroupe ainsi plus d’un milliard d’euros d’autorisations d’engagement et 874,6 millions d’euros de crédits de paiement.
Cependant, à périmètre constant, ses crédits régressent.
Je suis bien conscient que l’encouragement à la recherche privée n’a pas été maltraité par ce projet de loi de finances. J’ai déjà parlé du crédit impôt recherche, CIR. Je sais également que l’article 66, rattaché à la mission, prévoit de proroger de trois nouvelles années, soit jusqu’au 31 décembre 2011, la période pendant laquelle les projets de pôles de compétitivité peuvent être présentés.
Mais je tiens à souligner que le raisonnement selon lequel «plus de crédits impôt recherche » doit entraîner « moins de crédits budgétaires » est un peu réducteur. D’une part, le crédit impôt recherche est une dépense fiscale dont le niveau est, par définition, incertain. D’autre part, les entreprises bénéficiant du crédit impôt recherche ne sont pas forcément celles qui sont soutenues par les opérateurs du programme, en particulier OSEO. Enfin, le crédit impôt recherche et les subventions n’appuient pas forcément le même type d’opérations.
Je serai donc particulièrement attentif aux conséquences de la baisse des interventions d’OSEO, et veillerai à ce qu’aucune PME ne soit lésée par cette opération. Dans l’immédiat, j’écouterai avec intérêt les précisions que pourra apporter le Gouvernement sur cette question.
Sur le programme « Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat », je limiterai mes remarques à la baisse notable, de plus de 22 %, des crédits destinés aux avances remboursables dans le domaine de l’aviation.
Ce mouvement, qui s’explique avant tout par l’évolution des programmes en cours, a été accentué par un amendement adopté par l’Assemblée nationale tendant à gager sur ces crédits une augmentation de 2 millions d’euros de la dotation à l’Institut Pasteur de Paris. J’approuve d’ailleurs complètement cette mesure.
Sans revenir sur ce transfert de crédits, il importe de veiller à ce qu’il n’affecte pas les sous-traitants de la filière aéronautique française qui ont déjà été durement touchés par les restructurations dues au plan Power 8 d’EADS et à l’égard desquels des engagements financiers ont été pris par l’État. Là encore, je serai heureux d’avoir la vision du Gouvernement sur cette question, qui est cruciale pour la pérennité d’un secteur clef de notre industrie.
Enfin, il convient d’évoquer le programme « Recherche duale » qui doit financer les technologies duales, c’est-à-dire susceptibles d’avoir des applications civiles et militaires. Ce programme nous semble « manquer de souffle » et d’ambition, mais nous approfondirons cette question plus tard, la commission des finances ayant choisi de déposer un amendement sur ce thème afin de provoquer le débat.
Sous réserve de l’ensemble de ces remarques, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » modifiés par l’amendement que je vous proposerai. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme la commission des finances, la commission des affaires culturelles rapportera à deux voix : mon collègue Jean-Léonce Dupont se concentrera sur l’enseignement supérieur tandis que j’interviendrai plus spécialement sur les crédits de la recherche. J’essaierai néanmoins de ne pas répéter ce qu’ont déjà indiqué mes prédécesseurs puisque, globalement, nous avons les mêmes questionnements et approuvons les mêmes points.
En 2009, les crédits de la mission interministérielle pour la recherche et l’enseignement supérieur, augmenteront de 4,5 % en autorisations d’engagement, à structure constante, et de 3,2 % en crédits de paiement.
Nous sommes bien sûr conscients du retard pris par notre système d’enseignement supérieur et de recherche en termes d’efficacité et d’attractivité, mais nous pensons également que notre pays s’emploie à combler ce retard. Nous mesurons les progrès accomplis grâce, notamment, à la mise en œuvre du pacte pour la recherche et de la loi de programme pour la recherche de 2006. Nous les mesurons également à travers l’engagement de la réforme des universités, en application de la loi de 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, et le lancement par le ministère de divers « chantiers ».
Une réforme en profondeur était nécessaire pour que les moyens financiers que la nation consacre aux établissements soient renforcés de façon significative et équitable.
Si le bilan d’un certain nombre des réformes poursuivies semble concluant, il montre aussi la nécessité d’une évolution des mentalités de l’ensemble des acteurs ; en particulier, la culture du changement, la culture de l’évaluation, doivent se développer.
Je relève également que les deux tiers de la hausse des crédits destinés aux organismes de recherche viennent financer des coûts liés aux dépenses de personnels et aux pensions.
En outre, nous sommes préoccupés par le non-remplacement de 225 emplois statutaires dans les organismes de recherche. Pouvez-vous, madame la ministre, nous rassurer sur l’effet qu’aura cette décision sur le développement de notre recherche publique ?
En revanche, si les moyens de l’Agence nationale de la recherche restent stables, nous saluons à la fois l’augmentation de 25 % des programmes dits « blancs », qui concernent surtout la recherche fondamentale, et l’inflexion en faveur des laboratoires publics, dont les projets bénéficieront de 45 millions d’euros supplémentaires.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous donner des précisions sur l’évolution des partenariats entre le CNRS et les universités, compte tenu notamment de la réforme de ce grand organisme de recherche ?
S’agissant du Grenelle de l’environnement, notre commission s’est interrogée sur la traduction budgétaire des engagements pris à ce titre par le Gouvernement. Pouvez-vous, madame la ministre, nous apporter des précisions à ce sujet et nous indiquer le niveau et l’emploi des moyens nouveaux qui seront consacrés à ce qui doit constituer l’une des priorités de la recherche française ?
Nous soutenons bien sûr le triplement du crédit d’impôt recherche, destiné à combler la faiblesse structurelle de la recherche privée dans notre pays, mais nous insistons particulièrement sur la nécessité d’en évaluer les effets. En outre, il nous semble important que cette réforme encourage les partenariats public-privé ainsi que le recrutement de docteurs : ces derniers pourront ainsi participer au développement d’une culture plus tournée vers la recherche dans nombre d’entreprises privées où elle nous paraît vraiment insuffisante.
Je salue par ailleurs la mise en œuvre du chantier « jeunes chercheurs », dont l’objet principal est de renforcer l’attractivité des filières scientifiques : c’est primordial pour notre pays. Il apparaît cependant nécessaire de veiller à ce qu’une concertation constructive entre organismes de recherche et établissements d’enseignement supérieur permette une mise en place efficace des chaires « jeunes chercheurs ».
Le renforcement des coopérations et partenariats doit se poursuivre, et j’attache un intérêt tout particulier au développement des pôles de recherche et d’enseignement supérieur ainsi que, bien sûr, aux pôles de compétitivité.
Nous soutenons le projet du Gouvernement de doter le pays d’une stratégie nationale de la recherche et de l’innovation. Il nous faut, en effet, disposer d’une vision d’ensemble des défis à relever et des priorités à définir, pouvoir mettre en cohérence les projets des acteurs et optimiser les financements publics. Il est prévu de solliciter sur cette stratégie l’avis du Haut Conseil de la science et de la technologie, qui a été créé en 2006. Pourquoi ne pas consulter aussi le Parlement, notamment via l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ?
S’agissant de l’évaluation, nous saluons le travail déjà très important qu’a réalisé l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’AERES. La mutation liée à son intervention ne semble pas toujours aisée à mettre en œuvre dans les organismes de recherche, si bien que certains doublons continuent d’exister. Cette importante réforme se poursuit néanmoins, et les mentalités semblent commencer d’évoluer.
Étant donné l’importance que notre commission attache au développement de la culture scientifique et technique, sur lequel elle a beaucoup travaillé, nous souhaitons que l’évaluation des chercheurs tienne compte de cette mission de partage de la culture scientifique avec la société. Pouvez-vous, madame la ministre, vous engager sur ce point ?
En conclusion, j’indiquerai que la commission des affaires culturelles a estimé que ce projet de budget s’inscrivait dans une stratégie globale et cohérente, stratégie que nous avions précédemment appelée de nos vœux. Elle a donc émis un avis favorable sur l’adoption des crédits destinés à la recherche dans la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2009, ainsi que de l’article rattaché. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, après l’analyse par Jean-Pierre Plancade des crédits de la recherche, je vous présenterai les programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Le budget de l’enseignement supérieur augmentera de 1 milliard d’euros en 2009, hors produits financiers du plan campus. Au total, les moyens budgétaires alloués à ces deux programmes augmentent, à structure constante, de 6,76 % en autorisations d’engagement et de 4,64 % en crédits de paiement. Ils seront mis au service de priorités qui nous tiennent à cœur.
Tout d’abord, nous nous réjouissons des mesures tendant à renforcer l’attractivité des carrières. Il a ainsi été tenu compte des propositions du rapport de la mission Schwartz, à laquelle j’ai eu le plaisir de participer.
Les moyens consacrés au renforcement de la réussite des étudiants permettront de faire progresser la dépense annuelle de l’État par étudiant de 37 % entre 2007 et 2011, et de nous rapprocher ainsi de la situation de nos partenaires de l’OCDE.
S’agissant de l’objectif essentiel consistant à faire émerger des établissements d’enseignement supérieur autonomes et puissants, je crois que la politique de repyramidage des emplois va dans le bon sens, tant sont importants les besoins d’encadrement.
Avec le plan licence et les moyens dédiés au passage à l’autonomie, les crédits supplémentaires alloués aux universités seront, dans les trois années à venir, quatre fois supérieurs à ceux qui leur ont été versés entre 2006 et 2008. Nous saluons l’ampleur inégalée de cet effort.
Madame le ministre, lors de votre audition devant notre commission, vous nous avez rassurés : au-delà des dix grands projets initialement retenus dans le plan campus, qui bénéficieront de 800 millions d’euros entre 2009 et 2011, onze autres projets méritent une attention particulière et recevront 400 millions d’euros en trois ans. Il est essentiel, en effet, que l’excellence soit partout encouragée et récompensée ; pour autant, il nous faudra aussi réfléchir à l’avenir des universités qui n’auront pas bénéficié de ce plan.
S’agissant du premier bilan du plan licence, j’aimerais connaître, madame le ministre, les suites que vous envisagez de donner aux propositions constructives du groupe de travail chargé de formaliser un cahier des charges en vue de la création d’un bureau d’aide à l’insertion professionnelle au sein des universités. En effet, les pratiques sont aujourd’hui très hétérogènes, et l’implication des établissements est très inégale. Je m’interroge également sur la relative modestie des crédits inscrits à ce titre pour 2009 et sur le risque d’émiettement des moyens consacrés à cette mission pourtant essentielle des universités.
La réforme du système des aides financières aux étudiants, mise en œuvre à la rentrée 2008, semble positive : le système est plus simple, plus lisible et, souvent, plus juste. Cependant, la révision des critères d’attribution peut poser certains problèmes. Comment gérer ces difficultés, madame le ministre ?
S’agissant de la vie étudiante, j’évoquerai rapidement quelques autres préoccupations et souhaits.
Il conviendra d’informer largement les étudiants sur l’accroissement des aides à la mobilité internationale, car le recul de cette dernière est inquiétant ; je pense que, dans les années à venir, il faudra prendre en compte l’étalement de l’année universitaire sur neuf mois et demi et les charges qui en résultent pour les étudiants.
Je souhaite que la nouvelle aide au mérite prenne rapidement le relais des aides auxquelles elle se substitue.
Les efforts en matière de logement étudiant doivent être salués, mais le retard accumulé ces dernières années ne sera pas résorbé. La reconversion des casernes militaires en résidences universitaires devra s’effectuer rapidement, là où cela s’avère pertinent.
Les bibliothèques universitaires françaises devraient bénéficier de moyens renforcés, et les établissements devraient prévoir, notamment, une plus grande amplitude horaire pour l’ouverture de leurs salles.
Les dispositions de la loi de 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités autorisaient celles-ci à créer des emplois étudiants. Il semble que l’on y recoure encore peu.
Les moyens consacrés à la médecine préventive universitaire restent trop limités, alors que les obligations en la matière sont confortées.
La culture est malheureusement trop absente des universités, et nous partageons votre souhait, madame le ministre, de créer une commission de réflexion sur la présence de la culture dans les établissements d’enseignement supérieur. La commission des affaires culturelles se propose d’ailleurs de se joindre aux travaux de cette commission.
Par ailleurs, comme l’a souligné mon collègue Jean-Pierre Plancade, la réforme de l’évaluation se poursuit et l’AERES a déjà réalisé un travail important. Il est désormais essentiel que les universités mettent en œuvre une procédure d’auto-évaluation.
Nous pouvons nous réjouir de ce que le futur modèle de répartition des moyens aux universités reprenne la quasi-totalité des propositions qu’avait formulées, au printemps dernier, notre groupe de travail commun avec la commission des finances, tant pour le volet formation que pour le volet recherche universitaire.
J’évoquerai brièvement quelques autres sujets de réflexion sur la poursuite de la réforme de l’enseignement supérieur.
S’agissant des moyens de financement des instituts universitaires de technologie, les IUT, un véritable dialogue de gestion s’avère nécessaire entre ces instituts et leur université. Ne pensez-vous pas, madame le ministre, qu’un contrat d’objectifs et de moyens interne devrait être intégré dans le contrat pluriannuel conclu entre l’État et chaque université ?
Par ailleurs, un débat va s’ouvrir sur la modernisation du master et la nécessaire question de la sélection à l’entrée de ce cycle. À cet égard, il me paraît nécessaire de faire prévaloir le bon sens et de conjuguer à la fois l’intérêt de l’étudiant et la bonne organisation de ce cycle au sein des universités.
Enfin, madame le ministre, quelles suites envisagez-vous de donner aux intéressantes propositions de la commission sur les nouveaux partenariats entre les universités et les grandes écoles, présidée par Christian Philip, dont le président de notre commission, Jacques Legendre, était membre ?
Je conclurai mon intervention en indiquant que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l’adoption des crédits consacrés à l’enseignement supérieur, à la recherche universitaire et à la vie étudiante pour 2009, ainsi qu’aux articles rattachés, sous réserve de l’adoption d’un amendement à l’article 66 bis. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, en remplacement de M. Michel Houel, rapporteur pour avis.
M. Philippe Dominati, en remplacement de M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de vous présenter les excuses de Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, qui ne peut être présent aujourd’hui du fait de la visite du Président de la République dans son département.
Michel Houel salue l’évolution du budget de la recherche pour 2009 : la recherche et l’enseignement supérieur sont en effet la première priorité budgétaire du Gouvernement. Le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche augmente de 6,5 % en 2009, et devrait progresser de plus de 17 % sur la période 2009-2011. La recherche voit ses crédits augmenter de près de 7,4 % en 2009, soit une hausse de 863 millions d’euros.
Plusieurs aspects de ce projet de budget sont particulièrement positifs.
L’effort budgétaire, en 2009, est équilibré entre la recherche publique et la recherche privée : 57 % des moyens nouveaux sont dédiés à la recherche privée et 43 % à la recherche publique.
Les moyens de l’Agence nationale de la recherche, dont le bilan est très satisfaisant, augmentent de 45 millions d’euros, avec un soutien accru aux « programmes blancs », qui devraient désormais représenter 35 % des financements de l’Agence.
Le projet de budget pour 2009 constitue la première traduction concrète des engagements du Grenelle de l’environnement, avec 79 millions d’euros de crédits supplémentaires destinés à la recherche dans le domaine du développement durable. Sur la période 2009-2011, 1 milliard d’euros supplémentaires devrait être affecté à la recherche dans ce domaine.
L’augmentation du crédit d’impôt recherche est également très positive : les études montrent qu’un euro de crédit d’impôt recherche contribue à des dépenses supplémentaires de recherche en entreprise comprises entre 1 euro et 3,3 euros.
Par ailleurs, la réforme du crédit d’impôt recherche menée en 2007 fait aujourd’hui de la France le pays avec la fiscalité la plus avantageuse pour les centres de recherche en Europe. Le crédit d’impôt recherche, véritable arme anti-délocalisation, a ainsi conduit des grandes entreprises à maintenir leurs centres de recherche dans notre pays.
Michel Houel salue enfin la reconduction par le projet de loi de finances de la politique des pôles de compétitivité pour une nouvelle période de trois ans de 2009 à 2011. La politique des pôles de compétitivité est un grand succès, reconnu par tous, comme l’a montré son évaluation effectuée sous l’égide de la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires. Il serait cependant utile, madame la ministre, de connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre afin de procéder aux ajustements recommandés par cette évaluation.
Par ailleurs, Michel Houel s’est intéressé plus spécifiquement à l’Agence nationale de la recherche, l’ANR. L’étude du bilan d’activité de l’Agence lui a permis de répondre à certaines de ses inquiétudes, notamment quant à la durée et au niveau des financements accordés aux projets.
Cependant, il souhaiterait vous poser, madame la ministre, plusieurs questions.
Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre afin d’alléger les procédures, jugées lourdes par les usagers de l’ANR ?
Comment le Gouvernement compte-t-il agir afin de clarifier le pilotage du système de recherche, qui reste flou, notamment entre l’ANR et les établissements publics à caractère scientifique et technologique ?
S’agissant des moyens dont dispose l’ANR, serait-il envisageable d’augmenter les moyens, notamment humains, de l’Agence ou, à défaut, d’augmenter les moyens destinés au suivi des projets, qui semblent aujourd’hui insuffisants ?
En conclusion, madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission, suivant la proposition de Michel Houel, a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que sur les trois articles qui lui sont rattachés, les articles 66, 66 bis et 66 ter. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur la présentation générale des crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », je me bornerai au champ traditionnel de la compétence de la commission des affaires économiques, autrement dit la politique de la recherche.
Le Gouvernement a annoncé une augmentation du budget de la recherche de 863 millions d’euros en 2009. Nous pourrions applaudir si cette présentation n’était pas faussée par les éléments suivants.
Tout d’abord, près de 20 % de cette somme – 165 millions d’euros – sont destinés au financement des retraites des personnels des organismes de recherche et ne devraient donc pas permettre un soutien effectif aux programmes de recherche proprement dits.
L’augmentation annoncée des moyens des organismes de recherche – 3,8 % – est ainsi consacrée à hauteur des deux tiers, avez-vous dit, madame la ministre, à leurs frais de personnel. Donc, au mieux, les programmes verront leurs crédits stagner en euros constants.
Par ailleurs, la réforme du crédit d’impôt recherche dans le projet de loi de finances pour 2008 devrait conduire en 2009 à une dépense fiscale supplémentaire affichée de 620 millions d’euros, dépense, à mon avis, surévaluée dans le contexte économique actuel. Les grandes entreprises qui sont en train de faire des plans sociaux ne vont pas contribuer à alimenter cette dépense fiscale. De plus, comme l’a montré un rapport récent du Conseil d’analyse économique, cette réforme profite essentiellement aux grandes entreprises pour lesquelles le crédit d’impôt recherche constituait plus un effet d’aubaine réel qu’une incitation à la recherche et au développement.
Madame la ministre, il faudrait réfléchir à un ciblage plus précis du crédit d’impôt recherche sur les PME innovantes après avoir évalué les effets de la réforme en 2007. Cela rejoint les préoccupations de notre collègue Christian Gaudin.
Enfin, je note que les 863 millions d’euros annoncés ne sont plus d’actualité. L’Assemblée nationale a adopté en seconde délibération, le 18 novembre dernier, un amendement présenté par le Gouvernement visant à réduire les crédits de la recherche de près de 31,5 millions d’euros, afin de financer les mesures pour l’emploi. Même si ce montant reste faible par rapport au montant global du budget de la recherche, je regrette que ce secteur, considéré par tous comme prioritaire, subisse cet ajustement.
Je tiens également à évoquer les 900 suppressions de postes ainsi que la diminution des bourses doctorales et tout spécialement des bourses post-doctorales. Ces chercheurs sont, en fait, les vrais tâcherons de la science et c’est là que le savoir s’élabore, à la paillasse. Et que dire de la ponction, quelque peu sauvage de votre collègue Jean-Louis Borloo, de 200 millions d’euros sur les crédits de l’ANR et comptés dans le milliard d’euros supplémentaires prétendument affecté au financement du Grenelle de l’environnement ?
Madame la ministre, je souhaite vous poser deux questions.
La première porte sur la pérennité de l’expertise de l’INRA en matière de génomique végétale.
D’après Mme Marion Guillou, la situation de la recherche en matière de plantes génétiquement modifiées est très difficile. Le nombre d’étudiants en biologie végétale diminue, il n’y a d’ailleurs pratiquement plus aucune équipe de recherche travaillant réellement sur les plantes génétiquement modifiées. Cette situation nous inquiète d’autant plus que, dans le cadre du débat sur la loi relative aux organismes génétiquement modifiés, nous avions souligné, avec nos collègues Jean Bizet et Jean-Marc Pastor, la nécessité et l’importance de l’expertise indépendante de l’INRA.
Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre afin que la France ne prenne pas un retard trop important sur cette expertise indépendante, lorsqu’on voit les contestations qui ont lieu à Bruxelles ?
Ma seconde question porte sur les sciences du vivant.
Dans le cadre de la réforme du CNRS, qui ne fait pas l’unanimité, – c’est un euphémisme, ce sujet a été évoqué par notre collègue Serge Lagauche en début de séance –, devait être créé un institut des sciences de la vie et de la santé.
L’évaluation de l’INSERM, menée par l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, recommande la création d’un tel institut, ce qui ne va pas sans créer des remous, nous le comprenons bien, entre le CNRS et l’INSERM. Dans le même temps, un projet de consortium de coopération scientifique en matière de sciences du vivant est à l’étude, en particulier avec l’INRA.
Madame la ministre, je suis bien conscient de l’intérêt de la création d’un institut du vivant comparable à ce qui existe dans les milieux anglo-saxons dans un objectif de coordination et d’optimisation, car j’ai découvert en élaborant des rapports pour l’office parlementaire qu’il y avait un certain nombre de redondances et il y a sans doute des synergies à trouver dans ce domaine.
Mais quelles seront alors les relations entre cet institut du vivant et le consortium bâti autour de l’INRA ?
Telles sont mes remarques et mes interrogations.
Pour le reste, madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, vous pouvez deviner que j’ai un avis plus que « réservé » sur les crédits de la recherche pour 2009, non pas sur le montant affiché, mais sur l’affectation de ces lignes budgétaires.
Certes, les plans de carrière et l’amélioration des rémunérations peuvent contribuer à limiter le « brain drain », autrement dit la fuite des cerveaux, et je ne peux que souligner cet effort vis-à-vis de nos chercheurs, mais cela ne doit pas se faire au détriment des programmes de recherche.
Je propose donc à la commission des affaires économiques d’émettre un avis défavorable sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
J’avais considéré qu’un tel avis aurait d’ailleurs pu vous servir pour obtenir des crédits supplémentaires dans le cadre du plan de relance, madame la ministre, alors qu’un consensus existe pour faire de la recherche et du développement une priorité, et ce dans le cadre de la stratégie de Lisbonne et compte tenu de la situation économique.
Vous ne serez pas étonnée que la commission des affaires économiques ne m’ait cependant pas suivi et ait émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Mme la présidente. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante-cinq minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Madame la présidente, madame le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans son discours d’Orsay, le 28 janvier dernier, le Président de la République affirmait que « la France en deuxième division de la science mondiale ne serait plus la France ». La réalité nous démontre pourtant qu’en très peu de temps notre pays a cédé énormément de terrain et a ainsi quitté le cercle des dix nations les plus dynamiques en matière de recherche et de développement.
Troisième pays scientifique en 1970, cinquième en 1985, encore septième en 1995, la France se place désormais au quatorzième rang mondial pour la dépense intérieure de recherche et de développement par rapport au produit intérieur brut.
En 2006 l’effort total de recherche ne représentait déjà plus que 2,12 % du PIB. Pour 2008, ce taux est estimé à 2,08 % : il faut revenir plus de vingt-cinq ans en arrière pour trouver un taux aussi bas. En outre, celui-ci comprend la recherche militaire, qui est très proche de 10 % de notre effort total. Pour la seule recherche civile, la France stagne en dessous de 1,90 % du PIB, alors que, dans le même temps, bien d’autres pays ont considérablement progressé. Proportionnellement, selon les chiffres de l’OCDE, l’Allemagne a consacré en 2006 un tiers de plus que la France à sa recherche civile, le Japon 75 % et la Finlande 82 %.
À l’échelle nationale, les secteurs public et privé financent chacun pour moitié l’effort de recherche. Mais, du fait des aides de l’État et de la sous-traitance de contrats militaires ou spatiaux, le secteur privé exécute près des deux tiers de notre recherche. Il n’en reste pas moins que la part de la recherche effectuée par les entreprises demeure largement en deçà du niveau espéré pour atteindre l’objectif de Lisbonne.
Avec 1,10 % du PIB, l’investissement du secteur privé français dans sa propre recherche reste remarquablement bas, et ce malgré les dispositifs fiscaux censés inciter les entreprises à s’engager massivement dans la recherche. Mais, plus encore que le classement de la France – sixième en Europe, treizième dans le monde –, c’est l’importance des écarts, qui se creusent fortement avec les grands pays technologiques et industriels, qui est terriblement préoccupante : la recherche privée atteint 1,70 % du PIB en Allemagne et aux États-Unis, 2,55 % au Japon et en Suède.
Alors que la France est l’un des pays où les aides directes de l’État aux entreprises sont déjà les plus fortes, que penser des sommes colossales engagées au travers du crédit d’impôt recherche ? Ce type de dégrèvement d’impôt finance désormais 30 % des dépenses de recherche et développement des entreprises. Plus de 2 milliards d’euros seront consacrés au crédit d’impôt recherche en 2008 et ce dispositif fiscal, profitant avant tout, aux grands groupes pourrait s’élever à 3 milliards ou 4 milliards d’euros en 2012.
Pour reprendre les propos du chef de l’État, « le crédit d’impôt recherche a été porté en France à un niveau inégalé dans le monde », alors même que son efficacité reste à démontrer puisqu’il n’y a encore à ce jour aucune évaluation.
On rappellera qu’entre 2002 et 2006 les dépenses des entreprises en recherche et développement ont progressé beaucoup plus modestement que le crédit d’impôt recherche qu’elles ont reçu. C’est pourquoi nous avions proposé, dans la première partie du projet de loi de finances – la commission des affaires culturelles également –, un amendement visant à limiter la progression du crédit d’impôt recherche et à renforcer les crédits budgétaires des universités et organismes dans le prochain budget. La majorité n’a pas souhaité l’adopter, nous le regrettons vivement.
Ainsi le crédit d’impôt recherche sera une nouvelle fois renforcé en dépit de l’absence de toute évaluation officielle quand, dans le même temps, toutes les activités d’enseignement et recherche publics sont soumises aux évaluations de l’AERES, qui dispose d’un droit de vie et de mort sur les formations, les projets et les laboratoires. Le Gouvernement fait ainsi preuve d’une extrême souplesse, voire de largesse à l’égard du secteur privé, tout en renforçant son contrôle et son pilotage du secteur public. Les personnels des universités et des organismes apprécieront...
Depuis cinq ans, les gouvernements successifs ont répété que la France financerait massivement sa recherche publique, à hauteur de 1 % du PIB. Le budget de la recherche serait ainsi « l’un des plus élevés du monde », selon l’expression du Président de la République. Or cette affirmation est fausse. Le financement public de la recherche s’élève à 0,85 % du PIB, y compris le financement de la recherche publique menée par les universités et les organismes, la recherche militaire, pour partie les « grands programmes » – nucléaire, spatial, aérospatial – et diverses recherches industrielles.
En fait, la France ne consacre que 0,6 % de son PIB à la recherche publique au sens strict, telle qu’on la définit dans les autres pays. S’agissant de la part du PIB consacrée à la recherche académique, notre pays n’occupe que le dix-huitième rang mondial, se retrouvant ainsi plus mal classé que la Turquie ! La situation est similaire en matière de dépenses par étudiant, d’ailleurs.
Malgré cette situation, réjouissons-nous de constater que la recherche française continue à recevoir des distinctions internationales.
Faut-il le rappeler, le CNRS occupe le cinquième rang mondial et le premier rang européen en termes de publications. La France demeure encore, de ce point de vue, au sixième rang mondial.
L’entreprise de déconstruction en cours ne peut donc être légitimée par de prétendus résultats désastreux, contrairement à ce que certains suggèrent parfois. Notre système d’enseignement supérieur et de recherche est moins handicapé par ses structures que par le manque de moyens.
Cela dit, le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2009 ne devrait pas permettre d’inverser la tendance. Les crédits de paiement ne progressant que de 3,2 %, les moyens budgétaires de la mission n’augmenteront guère, d’autant que l’inflation – nous le savons bien – a été largement sous-évaluée. Ainsi ce budget ne connaîtra-t-il aucune progression significative en euros constants, d’autant que, sur les 758 millions d’euros supplémentaires annoncés, 370 sont d’ailleurs directement liés aux cotisations retraite et ne constituent donc qu’une mesure de rattrapage.
Hors retraites, les moyens en euros constants de tous les organismes devraient donc diminuer.
La faiblesse de l’investissement de l’État dans l’appareil de recherche s’accompagne d’une démolition de tout ce qui, offrant aux scientifiques un minimum de liberté, leur donnait la possibilité de prendre des risques.
Laboratoires, organismes et statuts sont ainsi remis en cause. Au travers d’agences telles l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’AERES, et l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, entièrement composées de personnalités nommées, le Gouvernement renforce effectivement encore un peu plus, à tous les niveaux, son contrôle sur l’orientation, le financement et l’évaluation de la recherche.
À chaque niveau sont systématiquement instaurées des logiques de concurrence qui nuisent aux synergies et aux coopérations. Ces logiques se manifestent notamment sous la forme d’une modulation du financement des universités en fonction de leur performance, d’un système de primes pour les personnels ou encore d’un recours de plus en plus fréquent aux financements à très court terme des projets des laboratoires via l’ANR.
Plus grave, la suppression de 900 emplois frappe les universités comme les organismes. À la disparition programmée de ces postes statutaires et des allocations de doctorants et post-doctorants s’ajoutent les effets pervers de la création de 130 chaires, chacune d’entre elles étant financée par la suppression de deux postes, l’un en université, l’autre en organisme.
Dans un contexte où les filières menant au doctorat sont toujours plus boudées par les étudiants, ces mesures envoient un signal extrêmement négatif aux jeunes encore attirés par les carrières scientifiques. C’est pourtant aujourd’hui que se joue, pour les trois prochaines décennies, la qualité de l’enseignement supérieur et de la recherche. Or le nombre de thèses stagne depuis dix ans. Il est donc urgent de se préoccuper de l’avenir !
Dans cette perspective, il aurait été judicieux de satisfaire les importants besoins d’encadrement des étudiants en premier cycle. Lutter contre l’échec à l’université nécessite la création d’un millier de postes d’enseignants-chercheurs, et non le recours à des heures supplémentaires qui alourdiront le service des maîtres de conférences et nuiront à la qualité de leurs enseignements et de leurs travaux de recherche.
Le dogme intégriste du non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux ne saurait s’imposer dans les domaines où se joue l’avenir de la France. De même que l’enseignement scolaire, l’enseignement supérieur et la recherche font partie de ces secteurs clés essentiels à la construction de la France de demain. Les économies de court terme réalisées en ces domaines fragilisent durablement le pays.
Alors que l’investissement en matière grise devrait être la priorité des priorités, des comptables arrogants et glacés, s’estimant supérieurs, nous affirment que la formation, la culture et la recherche coûtent cher. C’est au contraire leur absence qui coûte cher, madame la ministre.
Certes, le temps politique a ses propres contraintes et sa propre dynamique, et la tentation est grande d’afficher des résultats immédiats, mais souvent illusoires. Précisément, la politique ne consiste-t-elle pas également à savoir prévoir, anticiper et offrir une vision de la France de l’Europe pour les prochaines décennies ?
Dans cet esprit, le recul de la France sur le plan international ne devrait-il pas vous conduire à revoir la politique menée depuis cinq ans ? N’est-il pas urgent de créer un appel d’air en ouvrant des perspectives d’emploi dans le secteur public de l’enseignement supérieur et de la recherche à nos jeunes, aux chercheurs et enseignants-chercheurs, ainsi qu’aux scientifiques partis à l’étranger ? Ou encore ne pourrions-nous conditionner l’octroi du crédit d’impôt recherche à l’embauche de jeunes docteurs maîtrisant les logiques et les contraintes de la recherche ?
Pour conclure, je citerai une dernière fois – point trop n’en faut – le Président de la République. En octobre 2006, il rappelait, je le cite, qu’« il faut des années pour créer un bon système de recherche, quelques mois pour le dilapider ».
Force est de constater que la refonte de l’appareil d’enseignement supérieur et de recherche engagée ces dernières années a d’ores et déjà contribué à l’affaiblir.
D’année en année, la France s’éloigne de l’objectif de Lisbonne. La communauté scientifique s’en émeut publiquement – c’était encore le cas hier. Pourtant, le Gouvernement demeure sourd aux acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il est de notre responsabilité de les entendre.
Au moment même où le pays a le plus grand besoin d’une politique de formation, de recherche et d’innovation ambitieuse, le Gouvernement présente un budget lourd de menaces pour l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche et, donc, du pays.
Nous ne pourrons donc pas voter ces crédits.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Étienne.
M. Jean-Claude Étienne. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les rapporteurs pour avis de notre commission des affaires culturelles, Jean-Pierre Plancade et Jean-Léonce Dupont, l’ont fort opportunément rappelé tout à l’heure : au cours des quarante dernières années, la France a pris un retard considérable dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, perdant de son efficacité et de son attractivité.
Avec ce texte, le Gouvernement s’emploie aujourd’hui à combler ce retard. Notre collègue Ivan Renar a raison de rappeler que nous sommes loin d’être parmi les premiers. C’est une raison supplémentaire de nous atteler au problème.
Je souhaiterais le rappeler, la recherche reste la marque distinctive d’un enseignement supérieur de qualité. Toute université, même la plus modeste, a besoin d’une activité de recherche susceptible de la distinguer, sur une thématique ou sur une autre.
Aujourd’hui, alors que nous débattons du budget de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche et M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation siègent côte à côte au banc du Gouvernement. J’y vois un signe des temps tout à fait révélateur, la preuve que le vieux débat hérité d’Aristote est dépassé, qui opposait une science fondamentale noble réservée aux universitaires à l’humble recherche appliquée, frappée d’indignité et chassée hors les murs, un débat trop souvent entendu dans les conseils d’université que j’ai fréquentés - c'est-à-dire d’ancienne formule, les nouveaux, je ne les connais pas !
Oui, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, dans nos sociétés contemporaines, recherche fondamentale et recherche appliquée ont partie liée ; le débat est donc clos.
Nous le savons aujourd’hui parfaitement, notre pays ne sortira de la crise qui le frappe comme de nombreux autres que si notre économie se régénère par l’innovation, dont l’enseignement supérieur et la recherche forment le sanctuaire.
Le Président de la République a tenu à traduire ce constat dans la réalité budgétaire. Nonobstant un contexte soumis à de fortes contraintes, vous accordez, quoi qu’on en dise, la priorité à cette mission. (Très bien ! au banc des commissions.) Madame la ministre, merci, nous en avons grand besoin.
Malgré des ajustements à la marge intervenus lors de l’examen du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, les moyens budgétaires et fiscaux de ce budget, qui présente l’intérêt de s’inscrire dans la durée, augmenteront de 17 %, au cours de la période 2009-2011, même si certains peuvent ergoter sur ce chiffre. De toute manière, mes chers collègues, c’est du jamais vu !
Plusieurs priorités ont été définies.
Tout d’abord, et pour la première fois, les plans de carrière nouveaux ouvrent une perspective, alors que l’on déplore depuis si longtemps que chercheurs et enseignants de nos universités soient sous-payés.
Ensuite, vous vous attaquez à la réalité catastrophique de l’échec des étudiants en première année. Vous prenez à bras-le-corps ce sujet qui a tant fait couler d’encre au cours des dernières années. Certaines de vos propositions dans ce domaine sont même déjà « doublonnées » entre l’Assemblée nationale et le Sénat, c’est dire à quel point vous avez réussi à susciter l’engouement sur une aussi délicate question, qui demeurait en suspens depuis plusieurs décennies.
Rendre à l’enseignement supérieur français l’éminence et la notoriété internationales qui lui reviennent est la troisième priorité.
Vous avez veillé à ce que le passage à l’autonomie s’accompagne du transfert des moyens correspondants. S’agissant du fameux « plan campus », permettez-moi, madame la ministre, de vous donner un satisfecit : ce plan souligne, s’il en était besoin, la notoriété des sites universitaires les plus importants. Cependant, permettez-moi aussi de penser aux autres sites universitaires, les humbles, les sans-grades, ceux qui ne sont pas répertoriés dans ce plan.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !
M. Jean-Claude Étienne. Vous les logez à l’enseigne des contrats de projets État-région.
Certes, c’est mieux que rien, mais ne pourrait-on faire davantage ? N’oublions tout de même pas que ces sites universitaires, les plus modestes, ont joué un rôle déterminant dans la démocratisation de l’enseignement supérieur en France. Surtout, n’allez pas croire qu’ils sont secs et stériles et que leurs recherches n’aboutissent jamais, c’est même tout le contraire : ces universités sont frustrées, ô combien frustrées, de leurs découvertes, dont d’autres profitent avant qu’elles ne nous reviennent vingt ans plus tard en boomerang.
Vous ne me croyez pas, madame la ministre ? (Mme la ministre sourit.) Je vous en donnerai quelques exemples.
L’université de Reims – celle de ces modestes universités que je connais le mieux – a accueilli des chercheurs russes venus nous apporter leur aide dans le domaine des microscopes en champ proche, gros problème industriel, monsieur le secrétaire d’État. Eh bien ! dès que des résultats se sont profilés à l’horizon, deux des trois chercheurs sont partis aux États-Unis, signe qu’un chercheur peut ne pas trouver dans son environnement immédiat la reconnaissance à laquelle ses découvertes lui permettent de prétendre.
Deuxième exemple, la pervincamine, radical aminé découvert par un pharmacien de notre faculté, n’a fait son chemin qu’en sortant du giron de l’université française.
Dernier exemple en date, c’est la fameuse affaire des cellules souches adultes, dont l’Agence de la biomédecine, qui se prévaut de cette découverte, nous rebat les oreilles. Mais si vous saviez, mes chers collègues… C’est le laboratoire de microbiologie animale de cette même petite université qui, voilà trente ans, avait détecté chez les Némertes le pouvoir de régénération cellulaire ! Seulement, la chercheuse n’avait pas trouvé d’écho auprès des grandes universités françaises, dont on abonde pourtant les crédits pour les aider à accéder au firmament de la notoriété internationale. Elle a dû aller à l’université McGill, au Canada, où on lui a confié une chaire de biologie moléculaire du développement. Puis des Coréens et des Japonais, plus présents là-bas que chez nous, se sont intéressés à cette étude et l’ont poursuivie, en Corée et au Japon, et elle nous est revenue il y a deux ans !
Franchement, mes chers collègues, trente ans perdus pour la France, tout simplement parce que la petite université avait vingt ans d’avance sur les grandes !
Madame la ministre, il ne faut pas négliger ces petites universités, les humbles, les sans-grades. (Mme la ministre sourit et approuve.) Les crédits de coopération internationale ne sont pas tellement nécessaires aux grandes universités françaises, qui ont pignon sur rue et jouissent d’un certain rayonnement. Je vous propose donc que nous trouvions, que nous nous acharnions même à trouver les thématiques porteuses les plus pointues pour les confier à ces petites universités, les sans-grades, les modestes et les humbles dont on n’entend pas parler. Il faut que vous fléchiez les crédits de coopération internationale pour que ces petites universités soient associées aux plus grandes.
Mme la présidente. Malgré la qualité de votre intervention, je vous demande de vous acheminer vers votre conclusion, mon cher collègue.
M. Jean-Claude Etienne. J’en viens à ma conclusion, madame la présidente, mais autorisez-moi un dernier point, sinon le vice-président qui m’a précédé à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques m’en voudra. (Sourires.)
Madame la ministre, dans le budget consacré à la recherche, n’oubliez pas l’espace ! Il en a besoin, nous en avons besoin. N’oubliez pas non plus l’agriculture. Comme Philippe Adnot et Marie-Christine Blandin l’ont souligné tout à l'heure, si vous n’accordez pas des moyens supplémentaires à ce secteur, nous serons face à des impossibilités socioéconomiques très graves. C’est bien que l’Europe s’oppose à tel pesticide, mais c’est encore mieux si la recherche nous permet de trouver l’alternative nécessaire !
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial et M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean-Claude Etienne. Madame la ministre, nous comptons sur vous, nous avons besoin de vous ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2009 présente une vision en clair-obscur du budget de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Les annonces médiatiques du Gouvernement et du Président de la République - la recherche constitue la première priorité budgétaire -, semblaient confirmées par des lignes budgétaires en progression. Pourtant, après une analyse détaillée, je tiens, madame la ministre, à vous faire part de ma réserve sur les moyens mobilisés, qui me paraissent très insuffisants, notamment parce que les deux tiers de la hausse des crédits seront absorbés par les frais de personnel et les pensions de retraite.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. C’est vrai !
Mme Françoise Laborde. Vous comprendrez que cette question me tienne d’autant plus à cœur que mon département compte l’une des plus fortes concentrations d’acteurs dans ce secteur. Il est reconnu comme un pôle d’excellence dans le domaine de la recherche française, avec notamment 14 000 chercheurs et quelque 12 000 étudiants dans le domaine des sciences de la vie et les centres hospitaliers, parmi plus de 100 000 étudiants, soit 10 % de la population.
Ce faisant, la Haute-Garonne est le deuxième département universitaire national et l’un des fleurons de la recherche européenne. Ces éléments expliquent en partie la forte attractivité de notre département, dont la population augmente de 1,7 % en moyenne par an.
Cette excellence constitue un puissant moteur de l’emploi pour les entreprises. Faut-il rappeler que notre région est au premier rang européen dans le domaine spatial, avec 90 000 emplois environ, et en bonne position dans ceux de la santé, de la biotechnologie et des technologies de l’information et de la communication ?
Permettez-moi d’illustrer ce dynamisme en évoquant le travail exemplaire du réseau universitaire Toulouse Midi-Pyrénées et de ses pôles de compétitivité consacrés par exemple à « l’aéronautique, espace et systèmes embarqués » ou encore à la recherche « cancer-bio-santé ».
Ce groupement d’intérêt économique réunit 22 membres, dont 3 universités, 16 écoles d’ingénieurs et un institut national polytechnique, dont la mission est l’animation, la coordination scientifique et la promotion internationale de la recherche régionale.
Je tiens à vous rappeler ces éléments, madame la ministre, pour donner corps à nos discussions et rendre hommage à la qualité du travail fourni par l’ensemble de ces acteurs. Vous comprendrez que je sois particulièrement attentive à ce que des mesures budgétaires restrictives ne viennent pas ralentir cet élan.
Vous avez choisi une présentation optimiste des crédits consacrés à ce budget. Je m’appliquerai, pour ma part, à en avoir une lecture positive.
Le plan campus a retenu toute mon attention. La mise en place de ses différents pôles constitue un réel facteur d’émulation. Pourtant, il coupe littéralement la France en deux et risque de renforcer les inégalités territoriales entre nos régions. Pourquoi aucun site n’a-t-il été choisi au nord d’une ligne Bordeaux-Strasbourg, exception faite de Paris ? Ce plan sera-t-il accompagné d’efforts substantiels en matière de logements étudiants pour s’adapter à la mobilité de ces derniers rendue obligatoire par la réorganisation des pôles universitaires ?
Vous avez tenté, madame la ministre, de nous rassurer sur ce sujet en commission. Peut-être pourrez-vous nous répondre plus précisément aujourd’hui ?
Par ailleurs, vous avez souhaité consacrer davantage de crédits à ce budget afin de favoriser l’attractivité du secteur pour les jeunes chercheurs, principalement pour endiguer la « fuite des cerveaux », tant stigmatisée : valorisation des allocations aux chaires du CNRS, primes d’excellence, souplesse du recrutement ou augmentation des crédits d’impôt recherche.
Cette mesure phare de votre budget pourrait bien connaître un succès mitigé. J’en veux pour preuve la non-communication d’un rapport qui aurait été rendu, fin 2007, au Gouvernement et qui devait être adressé aux parlementaires afin d’éclairer leur jugement sur ce dispositif. Pouvons-nous en connaître les conclusions ? Qu’en est-il exactement du contrôle de son application ou encore de la pérennité de son financement ?
Vos services ont-ils anticipé la crise et ses conséquences sur l’effort financier que les entreprises pourront consacrer à la recherche ? Il serait peut-être plus utile que ce dispositif soit destiné aux PME qui, elles, n’ont pas les moyens d’embaucher un chercheur.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. Très bien !
Mme Françoise Laborde. Les membres du groupe du RDSE seront vigilants et s’assureront que le cadeau fiscal consenti aux entreprises ne soit pas financé par des économies réalisées dans le secteur public, telles que des suppressions de postes et le non-remplacement des départs en retraite.
Déjà, 296 suppressions de postes sont prévues au CNRS, le Centre national de la recherche scientifique, réparties entre des postes d’ingénieurs et de doctorants, 86 à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, et 59 à l’INSERM, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale. En tout, ce sont 900 postes qui seront supprimés en 2009 dans la recherche et l’enseignement supérieur. Ces exemples illustrent à eux seuls les failles de ce budget.
En ce qui concerne l’INRA, par exemple, l’augmentation des moyens est de 4,8 %, alors qu’elle n’atteint en fait que 0,4 % hors frais de personnel. À la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », sur 863 millions d’euros supplémentaires, 163 millions d’euros sont consacrés au financement des retraites.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. Eh oui !
Mme Françoise Laborde. Je ne me lancerai pas dans une bataille de chiffres, leur manipulation est tellement aisée selon qu’ils sont présentés en euros courants ou en euros constants. Toutefois, la stagnation du financement d’organismes publics de recherche nous alerte, tout comme la redéfinition de leurs compétences. Vous voudriez préparer les esprits à une privatisation du secteur de la recherche, vous ne vous y prendriez pas autrement !
Dans ces conditions, comment donner le nouveau souffle tant attendu pour que la France remonte dans le classement établi par l’OCDE, que mon collègue Ivan Renar vous a communiqué tout à l'heure ?
La dépense intérieure française en matière de recherche et développement - 2,2 % du PIB - reste très en deçà de l’objectif ambitieux que s’est fixé l’Europe de consacrer 3 % du PIB communautaire à la recherche d’ici à 2010.
En conclusion, je vous demande, madame la ministre, d’apaiser mon inquiétude, celle des chercheurs, des universitaires et des autres personnels, qui regrettent l’absence de concertation et ont d’ailleurs manifesté leur mécontentement hier devant l’Agence nationale de la recherche.
Dans un budget général contraint, je ne peux pas nier que le Gouvernement semble faire la part belle à ce budget mais, afin que chacun se détermine sur son vote, pouvez-nous nous dire s’il sera capable d’assumer ce choix dans le temps ? Ne s’agit-il pas là d’une proposition éphémère ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la stratégie de communication ministérielle concernant le budget de la recherche et de l’enseignement supérieur est bien rodée.
Dans un contexte de crise, vous pourriez, madame la ministre, vous prévaloir à l’envi d’un budget en progression, courageux et ambitieux. Mais cet affichage publicitaire ne tient pas à l’épreuve des faits et à l’examen des chiffres.
Ce projet de budget tourne le dos aux engagements pris, tout particulièrement en matière de recherche. Ainsi l’objectif de porter à 3 % du PIB l’effort de recherche, initialement fixé pour 2010, est reporté à 2012, alors même que le double contexte de la crise financière et économique internationale et de la lutte contre le réchauffement climatique devrait inciter le Gouvernement à mettre les bouchées doubles.
En réalité, le montant alléchant de 1,8 milliard d’euros, dont on nous rebat les oreilles, résulte de l’addition des crédits budgétaires stricts limités à 964 millions d’euros, des remboursements d’impôts pour les entreprises, des produits financiers des privatisations – l’opération campus – et de financements privés.
La principale mesure de soutien réside en fait dans le crédit d’impôt recherche, qui augmente de 620 millions d’euros. La priorité systématique donnée à la recherche privée, avec 57 % des moyens nouveaux, est plus que contestable. Même si c’est l’effort de recherche privée qui est insuffisant au regard des objectifs de la stratégie de Lisbonne, il ne sera pas possible, sans une politique ambitieuse de la recherche publique, de développer la recherche privée de manière satisfaisante. Or la hausse des crédits affectés aux organismes ne couvrira pas l’inflation.
D’ailleurs, l’avis du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie ne peut être plus explicite sur le financement des organismes : « L’augmentation prévue du budget des organismes de recherche est de 365 millions d’euros en 2009, dont 178 millions d’euros seront dévolus aux carrières et pensions. L’augmentation du budget global destinée aux programmes représente donc en fait 1,95 %, alors que le taux prévisible d’inflation est de l’ordre de 3 %.
« L’analyse de la ventilation des crédits supplémentaires montre que la part consacrée aux programmes des organismes – hors grandes infrastructures – est de plus 70 millions d’euros. Cette somme devant couvrir également les augmentations de dépenses dues à la restructuration des organismes en instituts et à la valorisation, le Conseil redoute qu’un grand nombre de programmes de recherche fondamentale, qui ne s’inscrivent pas dans les priorités thématiques, se voient contraints de diminuer drastiquement de volume, voire de s’arrêter. »
Il n’y aura pas non plus de création de postes de chercheurs ou d’enseignants-chercheurs. Mais, bien au contraire, vous envoyez deux signaux négatifs très forts à l’endroit de la communauté scientifique avec, d’abord, 900 suppressions de postes à part égale entre les organismes de recherche et les universités et, ensuite, une diminution du nombre de bourses de thèses du ministère. Ces non-renouvellements font suite à une création de postes nulle en 2008, et aboutissent donc à une diminution des effectifs.
Vous vous enlisez dans une politique de l’emploi scientifique par à-coups, qui fragilise les structures et les équipes, et est préjudiciable à la conservation des savoirs et à la capitalisation des compétences. Nous manquons cruellement d’une politique des ressources humaines globale, structurante, qui permette à la France de maintenir son rang sur la scène internationale.
Dans un contexte de désaffection des filières scientifiques et de crise des vocations faute de débouchés, nous avons plus que jamais besoin d’une véritable programmation pluriannuelle de l’emploi scientifique et d’une revalorisation de l’ensemble des carrières.
Le nombre d’inscriptions en première année de licence en sciences a diminué de près de 28 % depuis 1990, et même de près de 40 % depuis 1996. Cette baisse n’est pas compensée par la croissance du nombre de diplômés des écoles d’ingénieur, qui est de l’ordre de 8 % depuis 2000.
De plus, un nombre croissant de ces diplômés s’orientent vers des activités qui n’ont plus aucun rapport avec la technologie ou la science. Cette baisse des inscriptions des étudiants en sciences se cumule, depuis 2000, avec la chute du nombre d’étudiants qui s’inscrivent en master recherche et, plus encore, en doctorat.
Outre le développement des débouchés qui est une absolue nécessité, je vois une seconde incitation forte à l’orientation vers les filières déficitaires dans l’amélioration de la condition financière des études. Pendant la campagne présidentielle, M. Nicolas Sarkozy s’était engagé, pour les secteurs de la recherche et des métiers technologiques, à « instaurer un système comparable aux indemnités de préparation à l’enseignement secondaire, qui jadis permettait aux bons élèves qui se destinaient à l’enseignement de financer leurs études ». Une telle mesure est-elle à l’étude ou restera-t-elle lettre morte, madame la ministre ?
Que plus de la moitié des moyens nouveaux pour la recherche portent sur un crédit d’impôt recherche transformé en véritable guichet ouvert ne manque pas de susciter de nombreuses réserves ! Depuis le 1er janvier 2008, le taux de 10 % a été multiplié par trois : les entreprises peuvent déduire 30 % du montant total de leurs frais de recherche jusqu’à 100 millions d’euros de dépenses, et 5 % au-delà. Les entreprises qui font leur première demande ou n’en ont pas fait depuis cinq ans bénéficient d’un taux exceptionnel de 50 %. Le plafonnement est supprimé, et l’accroissement des dépenses n’est plus exigé !
Cette toute dernière réforme pénalise les PME récentes innovantes, tout en favorisant les effets d’aubaine pour les grandes entreprises.
Vous n’avez tenu aucun compte des analyses publiées par votre propre ministère et par la Cour des comptes en 2007, qui appelaient à une période de stabilité du dispositif du crédit d’impôt recherche. Vous n’avez également tenu aucun compte des nombreux rapports qui préconisaient que l’aide directe ou fiscale au secteur privé devait être redéployée et ciblée pour soutenir les secteurs de haute technologie et les PME innovantes et conditionnée au soutien de l’emploi scientifique.
Sur ce sujet précis, je citerai de nouveau l’avis du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie, qui s’inquiète « de l’efficacité de cette mesure pour dynamiser la recherche privée, en particulier les PME, et le système français de recherche et d’innovation en général. Il attire l’attention sur le manque d’entreprises de taille moyenne investissant dans la recherche et recommande de trouver des mesures d’accompagnement.
« Il juge indispensable une évaluation externe de ce crédit fiscal. Cette évaluation coût-bénéfice devrait porter autant sur les bénéficiaires que sur ses effets en termes de volume des dépenses, de partenariats vers la recherche publique, de compétitivité, de taxation de la recherche et développement, d’attractivité du territoire et d’évolution de la recherche dans son ensemble. Cette évaluation devra être conduite en comparaison avec les pays partenaires et concurrents et avec la politique européenne. »
Nous ne pouvons que vous enjoindre, madame la ministre, au vu des sommes en jeu, de faire procéder, dès 2009, à cette évaluation du crédit d’impôt recherche nouvelle version.
À ce stade du débat, il n’est pas inutile de rappeler que, entre 2002 et 2006, les aides de l’État au secteur privé se sont accrues de 1 636 millions d’euros, en euros constants, tandis que les dépenses des entreprises qui ont perçu ces aides n’ont progressé que de 458 millions d’euros.
Vous allez me répondre, madame la ministre, que le crédit d’impôt recherche, qui permet d’éviter les délocalisations des centres de recherche, constitue un formidable outil au service de l’attractivité de notre territoire. Or une enquête de l’OCDE effectuée en 2006 a classé par ordre d’importance les facteurs déterminant l’implantation d’activités de recherche et de développement d’une entreprise. La présence locale de personnels de recherche et de développement arrive en tête, puis l’on trouve, dans l’ordre, l’existence d’universités, les facilités de coopération avec les universités et la protection de la propriété industrielle. Quant aux incitations fiscales, elles n’arrivent qu’en neuvième position !
Pour ce qui concerne les effets du crédit d’impôt recherche sur les délocalisations de centres de recherche, ils sont tout relatifs, puisqu’une entreprise française délocalisant sa recherche et développement en Irlande ou en Allemagne continue à en bénéficier, conformément à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes.
Au final, votre politique de recherche est dominée par une vision « courtermiste ». Il faut que cela bouge, et vite, même au risque de dégrader les fondamentaux du système. On assiste ainsi à la consécration du primat absolu des applications potentielles, dangereux à long terme, à l’empilement des dispositifs et à la multiplication des annonces en faveur de dispositifs dont le financement ne suit pas.
En réalité, ce discours pseudo-volontariste du Gouvernement ne parvient pas à masquer une politique utilitariste de notre système de recherche qui mise tout sur le financement sur projet, et dont le corollaire est l’affaiblissement des organismes de recherche, la fragilisation de la recherche académique et l’accentuation des disparités entre les structures et les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Madame la ministre, il y a plus d’un an, nous vous faisions part de nos critiques et de nos craintes concernant la loi relative aux libertés et responsabilités des universités. Toutes se sont malheureusement d’ores et déjà vérifiées. L’université à deux vitesses est bel est bien en marche, même si cela ne va pas aussi vite qu’annoncé.
Pour l’instant, beaucoup trop d’universités sont aussi mal loties les unes que les autres. Et ce ne sont pas ces fameuses fondations qui doivent toujours voir le jour qui viendra renforcer leur budget !
Avec la crise, les financeurs ne se bousculeront pas. Que va-t-il donc se passer, dans le cadre de prévisions de dépenses publiques aussi réduites ?
Dans ce contexte, le budget pour les universités ne répond en aucune manière aux enjeux du développement de l’enseignement supérieur dans notre pays et à l’amélioration des conditions de vie et d’étude des étudiants.
Pourtant, le diagnostic sur les besoins est largement partagé par toute la communauté universitaire, et semblait l’être par vous-même, madame la ministre, voilà un peu plus d’un an. Mais il est vrai que, déjà, votre budget pour 2008 ne prenait pas en compte les annonces faites. En 2009, son évolution étriquée ne permettra pas d’envisager de réelles transformations, pourtant nécessaires et attendues.
Ce n’est pas ainsi que les conditions d’études des étudiants, qui conditionnent leur réussite, vont s’améliorer. Les « amphis » seront toujours aussi bondés et les échecs toujours aussi importants au cours des premières années universitaires. Ainsi, malgré vos nombreuses déclarations, promesses et même engagements, force est de constater une nouvelle fois que le budget que vous nous présentez ne traduit toujours pas la mobilisation annoncée.
C’est particulièrement vrai pour les dépenses en faveur de la vie étudiante. Où sont passés les 100 millions d’euros promis dans ce domaine ? Permettez que nous dépassions ici les effets d’annonce, qui font référence à des masses budgétaires, et que nous examinions de plus près ce qu’elles recouvrent.
Si les crédits d’ensemble du programme « Vie étudiante » progressent de 3,2 %, je me permettrai de rappeler que l’évolution a été de plus de 4 % l’an passé. Le ralentissement est donc particulièrement marqué, et vous annoncez pour 2010 et 2011 des hausses de seulement 2 %, dans un contexte d’inflation élevée.
L’heure de la rigueur a donc sonné.
En ce qui concerne les bourses attribuées sur critères sociaux, leur budget stagne et de nombreux boursiers ont vu le montant de leurs bourses réduit. Certes, il y a eu la création du sixième échelon, mais la différence avec l’échelon précédent n’est que de quinze euros par mois. En fait, l’essentiel de l’augmentation des aides directes va à d’autres formes d’intervention.
Il s’agit tout d’abord des bourses à la mobilité, qui ne bénéficient cependant pas d’un centime d’euro supplémentaire, puisque les montants budgétés sont des transferts.
Il s’agit ensuite des bourses au mérite, qui existaient déjà. Certes, vous annoncez leur développement, mais en réduisant considérablement leur montant.
Enfin, la grande nouveauté est le cautionnement de prêts bancaires aux étudiants. Quel progrès social ! Endettez-vous, tel est votre mot d’ordre. Cette mesure, vous le savez, n’est pourtant ni juste ni socialement efficace. Comment feront les étudiants pour rembourser ces prêts, eu égard à leurs difficultés d’accès à l’emploi, ainsi qu’à leur niveau de salaire en début de carrière ? En outre, la crise actuelle les touchera tout particulièrement.
Pour ce qui est du logement étudiant, les budgets dégagés ne permettront toujours pas, et ce malgré une légère accélération, d’atteindre le rythme annuel prévu dans les deux rapports de Jean-Paul Anciaux, et encore moins de rattraper le retard des années précédentes. Ainsi, la crise du logement étudiant va s’aggraver.
Que dire enfin de la faiblesse des crédits en faveur de la santé des étudiants et de leurs activités culturelles et sportives ?
Dans ces conditions, c’est une aggravation des conditions de vie et d’études des étudiants que vous programmez, madame la ministre, dans ce budget. Vous ne serez donc pas étonnée que, par notre vote, nous condamnions cette perspective.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord vous faire part de ma satisfaction.
Il faut en effet savoir insister sur les éléments positifs qui démontrent que notre pays va dans le bon sens. C’est le cas de votre budget, madame la ministre, budget ô combien majeur, car il est celui des défis du futur.
Notre capacité à sortir de la crise économique dépendra surtout de notre capacité à innover et à offrir aux jeunes générations des formations universitaires qui leur donnent les meilleurs outils pour s’imposer sur le marché de l’emploi. Ce budget va y contribuer.
Il est clair que, dans votre esprit, tout comme dans celui de notre majorité et du Gouvernement, les crédits affectés à cette mission ne sont pas de simples dépenses de fonctionnement. Il s’agit de dépenses d’investissement, et d’investissement pour notre avenir.
En dépit de circonstances budgétaires particulières et de marges de manœuvre étroites, le projet de loi de finances pour 2009 témoigne nettement de la priorité donnée à l’investissement en faveur de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Les crédits affectés à cette mission sont en augmentation de 6,5 %, soit 1,8 milliard d’euros en 2009. Et si l’on se projette sur les trois années prochaines, ce sont 17 % de crédits supplémentaires qui seront alloués à la recherche et à l’enseignement supérieur. Comme l’a dit notre collègue Jean-Claude Etienne, c’est du jamais vu !
Les choses sont claires, nettes et précises : ce budget est celui qui connaît la plus forte augmentation cette année, preuve, si besoin en était, de votre souci de répondre, aujourd’hui, aux enjeux de demain, madame la ministre.
Cet effort financier est visible, si l’on considère, par exemple, les moyens accordés au nouveau plan campus. Depuis longtemps, nous faisons le constat que nos pôles universitaires sont trop modestes pour être visibles et pour attirer les meilleurs enseignants, chercheurs et étudiants.
Avec le plan campus, la France va pouvoir disposer de pôles d’excellence universitaire. Permettez-moi au passage de relever avec satisfaction l’attention qui a été portée à mon département, la Seine-Saint-Denis, et à ses jeunes, si souvent stigmatisés, qui vont pouvoir prochainement profiter d’un pôle universitaire de sciences humaines à Aubervilliers.
Par ailleurs, ce budget s’inscrit dans votre démarche, entamée il y a plusieurs mois, de réorganisation du CNRS.
Vous souhaitez en effet renforcer la culture de l’évaluation dans la recherche française. Appliquée dans de nombreux pays, elle permet de récompenser les chercheurs les plus performants. C’est tout le sens de l’extension de la prime d’excellence scientifique, qui reconnaîtra les meilleurs. Ainsi, vous favoriserez également l’émulation entre les centres, afin de créer des synergies entre les différents organismes.
De plus, madame la ministre, vous souhaitez une recherche publique plus autonome et capable de trouver d’autres sources de financement. Face à l’importance des moyens américains, notamment, face aussi à la détermination manifestée par les nouveaux pays concurrents, la France doit mieux identifier ses domaines d’excellence, afin d’orienter dans les meilleures conditions possibles les moyens qu’elle met à leur disposition. Je sais votre souci en la matière et l’attention que vous portez à cette question au travers de ce budget pour 2009.
Enfin, dans un contexte de mondialisation des connaissances, notre pays est confronté à la fuite de ses cerveaux. Nos universités forment des chercheurs de grande qualité, mais ceux-ci se voient contraints de partir, faute de trouver des conditions de travail et de rémunération satisfaisantes.
Force est de constater que, sur le marché de la connaissance, la France n’est pas la plus compétitive. Quelques chiffres peuvent l’attester : le taux de chômage des docteurs aux États-Unis est de 1,9 %, alors qu’il est de 7,4 % en France ! Cette situation, nous la ressentons comme un gâchis. Elle engendre nécessairement des pertes pour notre économie comme pour notre recherche et désespère nos jeunes diplômés.
Vous répondez à ce problème en améliorant l’attractivité des postes de chercheurs, grâce à une augmentation des rémunérations et à une amélioration des carrières des personnels. Cet effort inédit représentera un milliard d’euros sur la période 2009-2011.
Je voudrais vous interroger, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, sur les moyens développés par le Gouvernement pour stimuler la recherche privée dans notre pays et, en particulier, sur l’efficacité du crédit d’impôt recherche.
La création de ce dispositif partait du constat que les dépenses provenant du secteur privé étaient insuffisantes, notamment pour ce qui concerne les PME.
Nous savons aujourd’hui, grâce à une enquête récente du cabinet de conseil en stratégie américain Booz & Co, que les entreprises dépensent désormais plus en recherche et développement à l’étranger qu’en France.
Cette enquête m’amène à m’interroger sur les cibles du crédit d’impôt recherche, dont l’objectif initial est de soutenir les efforts de recherche et développement, notamment des PME, et à faire en sorte que nos chercheurs restent en France.
Je souhaiterais donc savoir si ce crédit d’impôt n’a pas plutôt tendance à favoriser les investissements des entreprises françaises dans des recherches menées à l’étranger et s’il participe réellement à l’innovation des PME, si essentielle à notre dynamisme économique.
Cet été, les pôles de compétitivité ont été évalués par deux organismes indépendants, lesquels ont reconnu, et c’est une bonne nouvelle, que ces dispositifs lancés en 2005 étaient prometteurs mais, aussi, qu’ils n’avaient pas tous atteint leurs objectifs. Néanmoins, aucune « délabellisation » de pôles n’a été constatée depuis lors.
Pouvez-vous nous en dire plus, madame la ministre, sur les conclusions de cette évaluation, ainsi que sur celles que vous tirez de l’étude menée par le cabinet Booz & Co ?
Pour conclure, je considère que ce budget s’inscrit dans l’objectif de Lisbonne, qui vise à faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».
Pour atteindre cet objectif, nous savons qu’il faut créer 550 000 emplois scientifiques dans l’Europe des Quinze d’ici à 2010. La France, sous l’impulsion du Président de la République, ainsi que sous la vôtre, madame la ministre, veut participer à cet effort de construction d’une recherche européenne.
Votre budget pour 2009 porte la marque de cette volonté de miser sur notre jeunesse, sur nos chercheurs, sur nos entreprises, tout en offrant une vision d’envergure à la France afin de la voir occuper demain une place prépondérante, non seulement en Europe, mais surtout sur l’échiquier mondial face au leader que sont les États-Unis et aux challengers que sont la Chine ou l’Inde.
Je ne peux que souscrire à cet objectif et je voterai bien entendu vos crédits, madame la ministre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes des témoins gênants !
Nous étions sur ces travées lors de la discussion de ce qui allait devenir la loi de programme pour la recherche en 2006, quand l’aiguillon du mouvement des chercheurs avait conduit le Gouvernement à créer des postes et à promettre un milliard d’euros de plus par an pour la recherche.
Or nous mesurons aujourd’hui la baisse des moyens induite par le choix, à l’époque, de libeller ces engagements en euros courants, et non en euros constants.
Aujourd’hui, qu’en est-il du budget global ? On nous annonce une augmentation de 6,5 % qui omet l’inflation et englobe des mesures fiscales.
On nous disait, à l’époque, que les organismes seraient protégés, que l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, serait un magnifique outil - en quelque sorte le bras armé des orientations que le Haut Conseil de la science et de la technologie soufflerait au Président de la République - et que le crédit d’impôt était un louable stimulant.
Aujourd’hui, il n’y a plus d’orientation lisible. Les organismes se voient fragilisés et l’ANR devient une machine à fabriquer de l’emploi précaire.
Le CNRS perd 296 postes. À l’heure des critères de visibilité internationale auxquels vous êtes attachée, madame la ministre, est-ce pour le punir de nous avoir donné un prix Nobel ? Pourtant, même un prix Nobel a besoin, à ses côtés, d’ingénieurs, de techniciens et de personnels administratifs !
L’INRA perd 86 postes au moment où ses recherches s’infléchissent, enfin, vers une agriculture plus respectueuse de la santé et de l’environnement : est-ce pour le punir de retrouver les chemins de l’intérêt général ?
L’INSERM perd 59 postes : est-ce pour décourager ses travaux admirables sur la reproduction et ses perturbations, au profit de crédits d’impôt aventureux octroyés à des industries qui ont voulu développer le créneau juteux de prétendus médicaments contre l’obésité ?
Quant à l’ANR, hier présentée comme l’agence de financement idéale, elle ne suffit même plus à la dérive néolibérale que vous appliquez aux modes de soutien à la recherche. Vous en réduisez ainsi les crédits de 8,35 %, ce qui aura un impact mécanique sur les programmes blancs, auxquels nous sommes attachés.
Oui, nous sommes des témoins gênants : nous lisons les journaux et nous mesurons la fragilité des apports dont vous vous servez pour asseoir votre budget.
Ainsi, le produit de la vente d’actions EDF, maladroitement annoncée, est passé de 5 milliards d’euros à 3,7 milliards d’euros, pour le même nombre de parts cédées. Et ce n’est là qu’une illustration parmi d’autres du décalage entre ce que vous promettez et ce que l’on voit arriver sur le terrain ; le fait que les universités sélectionnées dans le cadre du plan campus puissent « phaser » leurs travaux sur plusieurs décennies en constitue un autre.
Nous sommes étonnés de la fragilité des hypothèses qui sous-tendent les affichages. Le crédit d’impôt, outil ponctuel intéressant, est devenu l’alpha et l’oméga de l’impulsion à la recherche. Vous affichez des millions de recettes hypothétiques. De plus, ce sont non pas les PME mais les grandes entreprises qui vont en profiter. Or, multiplier les milliards dépensés dans le cadre de ce crédit d’impôt, sans critères ni évaluation, est pour le moins aventureux. Si je parle de milliards, sans plus de précision, c’est parce qu’il est question de 3,1 milliards d’euros dans l’un des rapports, de 2 milliards d’euros dans un autre et, enfin, de 3,92 milliards d’euros dans un troisième. C’est vous dire à quel point le parlementaire de base a de la peine à se retrouver dans ce budget !
Même si la culture de nos entreprises - parmi les plus pingres du monde lorsqu’il s’agit de financer en leur sein des recherches – évoluait, même si la crise ne les empêchait pas d’investir dans l’innovation, même si la rigueur du contrôle de l’argent public était sans faille, il n’en demeurerait pas moins que vous renoncez à la fois à donner la dimension qu’elle mérite à la recherche fondamentale libre et à soutenir des domaines attendus par la société et délaissés par les entreprises, leurs actionnaires les considérant comme non rentables.
À la veille de grandes mutations, nous avons pourtant plus que jamais besoin de lieux où se produit la connaissance. On les prive pourtant de 900 emplois. Vous nous dites, madame la ministre, qu’il s’agit de départs en retraite. Cela évite, certes, les drames individuels, mais, la population française ne diminuant pas, c’est quand même du savoir en moins et des chômeurs en plus pour demain !
Les chercheurs aussi sont des témoins gênants : ils sont dans la rue, et même dans l’ANR et, à votre discours enthousiaste - « un budget courageux et ambitieux », avez-vous déclaré devant la commission -, ils opposent, eux, le démantèlement des équipes et l’érosion pathétique de leurs moyens.
Les étudiants sont également des témoins gênants : ils racontent leurs « galères », les économies qu’ils doivent faire sur la santé, sur la culture, leur recherche d’inaccessibles hébergements ; je précise d’ailleurs qu’aucune construction ne figure dans le « bleu » pour 2009. Les 100 millions d’euros annoncés en 2008 n’ont été pourvus qu’à moitié, malgré les besoins criants et l’augmentation des coûts pour les étudiants de 26 % en cinq ans.
Au lieu de mettre en avant des bourses au mérite dont le dispositif est variable et dont le budget s’inscrit en baisse, pourquoi ne pas rétablir les concours de prérecrutement avec bourse qu’hébergeaient autrefois les écoles normales ou les IPES, les instituts de préparation aux enseignements de second degré ? Ces dispositifs étaient producteurs de justice sociale et de diversité culturelle dans nos élites.
Ce n’est pas dans ce budget que les universités trouveront les moyens de se grandir, au sens figuré comme au sens propre.
Enfin, ceux qui ont entendu Jean-Louis Borloo et vous-même, madame la ministre, annoncer un milliard d’euros supplémentaire pour la recherche dans le cadre du Grenelle – un engagement qui figure dans l’article 19 du projet de loi de programme adopté en première lecture à l'Assemblée nationale -, sont aussi des témoins gênants. Après des questions répétées et des réponses embarrassées, on découvre que c’est, en réalité, un milliard d’euros sur trois ans !
Il est vrai que cela pourrait faire 333 millions d’euros de plus cette année, dans lesquels on retrouverait le photovoltaïque, les moteurs du futur, la biodiversité, les formations de toxicologues, les registres des cancers, les recherches sur les molécules de substitution aux pesticides, ces pesticides dont on mesure aujourd’hui les effets sur la santé et dont on craint aussi qu’ils ne fassent disparaître les insectes pollinisateurs…
Mais, là aussi, des réponses embarrassées lèvent le voile : le budget n’augmentera pas de 1,333 milliard d’euros, et c’est en fait dans le milliard annuel que se logent les nouvelles promesses. Pourtant, croyez-vous vraiment que les entreprises de la chimie seront candidates au crédit d’impôt pour démontrer les effets nocifs des phytosanitaires ou des nanoparticules dans les cosmétiques ?
Madame la ministre, entre l’habillage flatteur et la dure vérité des comparaisons pluriannuelles et des réalités du terrain, il y a un gouffre.
Personne n’ignore le contexte tendu des finances publiques ni la difficulté que chacun, à votre place, aurait à boucler un budget ambitieux.
Ce que nous n’acceptons pas, en revanche, c’est l’orientation croissante de l’argent de la recherche vers les choix des entreprises riches, aux dépens de la pérennité de nos laboratoires publics, aux dépens de l’innovation anticipatrice des mutations climatiques et énergétiques à venir et, enfin, aux dépens de l’accès au savoir de tous les étudiants sans distinction de classe sociale.
Pour l’ensemble de ces raisons, les sénateurs Verts ne voteront pas ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’égalité des chances dans l’accès aux études supérieures est un objectif républicain qui n’est pas près de devenir une réalité démocratique dans notre pays.
Ainsi, la diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles a nettement régressé ces dernières décennies, passant sous la barre de 10 % pour les élèves issus des catégories sociales défavorisées. Le chiffre est en revanche de 30 % pour les enfants d’enseignants et de milieux sociaux aisés.
En septembre 2007, dans un rapport présenté au nom de la commission des affaires culturelles, laquelle était unanime sur ce point, je m’inquiétais de l’absence de diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles. Un certain nombre de propositions vous ont été faites, madame la ministre. Elles visaient essentiellement à améliorer l’information et l’orientation des élèves sur l’accès aux classes préparatoires, à développer les aides matérielles proposées aux étudiants, comme les bourses et les partenariats avec les CROUS pour les logements étudiants, et à renforcer l’accompagnement dans le travail des étudiants, à travers le tutorat.
Des expérimentations ont été mises en place dans certaines grandes écoles, avec l’aide d’entreprises.
Madame la ministre, l’heure d’un premier bilan est arrivée. Le temps est sans doute venu pour le Gouvernement d’évaluer ces expériences et de rechercher les méthodes les plus efficaces pour en faire profiter les lycéens et les étudiants sur l’ensemble du territoire national.
Ce qui est vrai pour les classes préparatoires l’est également pour le premier cycle universitaire. En effet, plus de 80 % des enfants d’enseignants ou de cadres supérieurs poursuivent leurs études au-delà du baccalauréat, alors qu’ils ne sont que 40 % lorsque les parents sont ouvriers.
Malgré vos réformes, madame la ministre, mes inquiétudes sont vives sur le quotidien des étudiants, que ce soit en classes préparatoires aux grandes écoles ou en premier cycle universitaire. Un quotidien trop difficile, on le sait, constitue l’une des principales causes d’échec scolaire. Ces inquiétudes portent principalement sur le logement, les bourses, le tutorat et l’orientation des élèves. Je m’attarderai sur les bourses et le logement.
En cinq ans, les dépenses des étudiants ont augmenté de 23 % quand, dans le même temps, les aides n’ont augmenté que de 6 %.
En ce qui concerne les bourses, le budget pour 2009 prévoit d’allouer 1,547 milliard d’euros, augmentant ainsi l’aide directe aux étudiants de 2,9 %. Mais, dans le même temps, l’inflation s’établit à 3,6 % !
De plus, les frais obligatoires continuent d’augmenter, en particulier les droits d’inscription en licence, qui sont en hausse de 2,5 %.
S’agissant du logement étudiant, les constats sont particulièrement alarmants. Les logements étudiants sont totalement insuffisants : environ 150 000 chambres ont été recensées pour plus de deux millions d’étudiants, 550 000 étant boursiers.
Pour remédier à cette situation, en mars 2004, votre prédécesseur avait lancé un plan sur dix ans qui prévoyait la réhabilitation de 70 000 chambres du parc des CROUS et la construction de 50 000 autres logements. Quatre ans après sa mise en œuvre, il manque 8 400 réhabilitations et 10 200 constructions.
Le retard n’a pas été rattrapé en 2008. Au mois de février dernier, vous avez cru bon de lancer un nouveau plan prévoyant la construction de 40 000 logements étudiants à l’horizon 2014. Accompagné d’une enveloppe de 620 millions d’euros, celui-ci avait pour ambition de faire bénéficier 200 000 étudiants d’un logement CROUS d’ici à la fin 2014.
Mais les retards continuent de s’accumuler. En effet, si le projet de budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2009 prévoit la réhabilitation de 6 522 logements, il n’y a aucune construction nouvelle, alors que l’on nous en avait annoncé 6 500 par an !
La situation sociale des étudiants est dramatique. La moitié d’entre eux sont obligés de se salarier pour financer leurs études, ce qui augmente les risques d’échec.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, j’ai même entendu un de vos collègues du Gouvernement prôner l’ouverture des magasins le dimanche en arguant que cela aiderait les étudiants à payer leurs études.
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Il a raison !
M. Yannick Bodin. Quel cynisme ! Je ne connais pas beaucoup d’étudiants qui sont satisfaits de devoir travailler, notamment le dimanche.
M. Yannick Bodin. C’est tout simplement qu’ils n’ont pas le choix.
M. Yannick Bodin. D’ailleurs, leur courage est bien peu récompensé. Chaque année, en effet, ce sont 20 % des étudiants qui arrêtent définitivement leurs études pour des raisons strictement financières.
Madame la ministre, l’échec à l’université, en particulier lors du premier cycle, est l’objet de l’une de vos grandes réformes. À la fin de l’année 2007, vous nous avez annoncé la mise en place du plan pluriannuel pour la réussite en licence, dit « plan licence », qui serait doté de 730 millions d’euros en cumulé sur 2008-2012. L’objectif serait d’atteindre un taux de 50 % d’une classe d’âge au niveau licence à l’horizon 2012.
Le plan licence prévoit plusieurs mesures phare, notamment cinq heures hebdomadaires d’encadrement pédagogique supplémentaires par étudiant et pour chaque année, un enseignant référent, du tutorat et un contenu rénové, avec l’instauration d’une première année fondamentale, où la dimension pluridisciplinaire serait plus forte.
Mais comment comptez-vous atteindre les 730 millions annoncés pour 2012 avec seulement 100 millions d’euros consacrés à ce plan pour les deux premières années ?
Par ailleurs, tout le monde s’accorde aujourd'hui pour considérer la faiblesse de l’encadrement à l’université comme l’une des causes de l’échec des étudiants. Le chiffre a déjà été évoqué. En France, le taux d’encadrement dans les universités est de 18,1 étudiants par enseignant, contre 15,4 en moyenne dans le reste de l’OCDE. Voilà comment notre pays se place à la dix-huitième place sur vingt-trois, ce qui n’est pas très glorieux. Et si l’on compare ce taux d’encadrement avec celui des lycées, des classes préparatoires ou des grandes écoles, les résultats sont édifiants.
Aujourd’hui, alors que le nombre d’étudiants s’inscrivant en premier cycle universitaire continue d’augmenter, pour la première fois depuis quinze ans, 900 postes sont supprimés dans l’enseignement supérieur et la recherche. La réussite des étudiants ne sera donc pas assurée et les objectifs du « plan licence » ne pourront pas être atteints. Comment pouvez-vous augmenter le nombre d’heures d’encadrement des étudiants en supprimant des postes, madame la ministre ? Comptez-vous demander aux enseignants-chercheurs d’augmenter leurs heures d’enseignement ? Ou alors peut-être envisagez-vous de relancer la recherche française en demandant aux enseignants de diminuer le nombre d’heures de recherche…
Madame la ministre, la situation de la vie étudiante est dramatique en France. Les réformes que vous avez proposées ces derniers mois étaient sans doute généreuses et nécessaires. Hélas ! l’examen de votre projet de budget pour 2009 montre que ces mesures ne sont pas accompagnées des moyens budgétaires correspondants.
Vous le comprendrez donc, nous estimons que le projet de budget pour 2009 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est insuffisant et nous ne le voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2009 vient un peu plus d’un an après la promulgation de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, réforme dont le Premier ministre, M. François Fillon, a un jour déclaré qu’elle était « peut-être la plus importante de la législature ».
Le moment est donc venu de vérifier si les promesses du Président de la République, annoncées tambour battant pendant la discussion de ce texte législatif pour, disait-on, donner à nos universités les moyens de leur autonomie – il s’agissait surtout à l’époque de désamorcer la grogne des personnels et des étudiants contre le texte –, seront tenues.
Or, madame la ministre, votre projet de budget nous inquiète. En effet, et vous vous y étiez engagée, votre ministère ne devait pas être affecté par le véritable plan social qui frappera la fonction publique de l’État en 2009, avec plus de 30 000 suppressions de postes. Or, pour la première fois depuis quinze ans, 900 postes seront supprimés dans l’enseignement supérieur et la recherche !
Après la progression « zéro » de l’année 2008, l’année 2009 sera donc marquée par une régression du volume des emplois affectés à un secteur qui devrait pourtant être plus prioritaire que jamais, notamment à l’heure où les jeunes diplômés connaissent de plus en plus de difficultés à décrocher un premier emploi.
À ce sujet, madame la ministre, alors que le chômage des jeunes diplômés connaît une recrudescence préoccupante, je voudrais savoir où en est la mise en place, sur les campus, des bureaux d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants, institués par l’article 21 de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, après adoption par le Sénat d’un amendement que j’avais défendu au nom du groupe socialiste.
Le rôle de ces bureaux est fondamental dans la rénovation de l’orientation des étudiants, qui est aujourd'hui très déficiente. Ils ont pour missions de diffuser auprès des étudiants une offre de stages et d’emplois variée, de les assister dans leur recherche et de présenter un rapport annuel sur le nombre et la qualité des stages effectués, ainsi que sur l’insertion professionnelle dans le premier emploi. Belle mission !
Or les syndicats étudiants craignent que ces bureaux, qui doivent être créés par délibération des conseils d’administration des universités, ne deviennent dès leur création des « coquilles vides » si des moyens propres et adaptés ne sont pas alloués à leur fonctionnement.
En d’autres termes, madame la ministre, où en est la création de ces bureaux ? Quels sont les moyens affectés aux universités pour que les bureaux remplissent réellement leurs missions ? Si le nouveau dispositif avait été mis en place, cela se saurait. Je souhaite donc savoir ce qui est prévu, car nous patientons depuis plus d’un an…
À qui profiteront donc les milliards annoncés, notamment l’enveloppe prélevée sur le produit de la vente de 3 % du capital d’EDF, destinée à financer, selon le Président de la République, des « pôles d’excellence capables d’attirer en France les meilleurs chercheurs et étudiants » ? D’abord, aux groupes de travaux publics et aux banques, auxquels reviendra la responsabilité de concevoir, de conduire et de financer les programmes de réhabilitation des locaux de dix sites sélectionnés pour bénéficier du plan campus dans le cadre de contrats de partenariat public-privé. Au terme du montage juridique et économique retenu, la propriété du patrimoine universitaire rénové sera transférée à des intérêts privés. Ceux-ci bénéficieront de la garantie d’un retour sur investissement grâce aux loyers que les universités devront désormais verser pour pouvoir occuper leurs propres locaux !
C’est le principe même du transfert de la propriété des campus à des opérateurs privés qui doit dès maintenant être remis en cause !
Mais c’est aussi la philosophie générale du plan campus qui pose question. Fondé sur la mise en concurrence des universités, ce plan aboutit en fait à privilégier une dizaine de sites au détriment de tous les autres, soit plus des deux tiers des universités, en créant clairement un système universitaire à deux vitesses, là où il existait déjà une inégalité de traitement profonde entre les grandes écoles et les universités.
Il faut de nouveau le rappeler ici, la dépense publique annuelle par étudiant est inférieure à 7 000 euros pour les étudiants suivant une formation universitaire, alors qu’elle est de 7 400 euros par collégien et de près de 14 000 euros pour les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles.
Malheureusement, les milliards d’euros annoncés pour revaloriser l’effort budgétaire en faveur de l’enseignement supérieur ne profiteront qu’à la minorité d’étudiants ayant la chance de fréquenter les universités sélectionnées pour faire partie du « top 10 » des établissements bénéficiant du plan campus.
D’ailleurs, et cela commence à susciter un certain agacement au sein ses universités, seuls deux projets sont aujourd’hui jugés conformes aux exigences du ministère pour pouvoir bénéficier de la manne du plan campus. Seulement deux universités sur quatre-vingt-cinq ! Autant dire, madame Pécresse, que vos ambitions semblent se réduire comme peau de chagrin. (Mme la ministre s’esclaffe.) Je le répète, parmi les quatre-vingt-cinq qui vous ont envoyé leur projet, et qui, pour la plupart, n’ont pas obtenu de réponse, seulement deux…
M. David Assouline. … sont aujourd'hui jugées conformes aux exigences du ministère pour faire partie des dix qui seront sélectionnées. Aussi, les acteurs concernés, qui y ont pourtant passé du temps, se découragent.
De tels choix confirment que la politique actuellement menée est fondamentalement libérale (Mme la ministre fait un signe de dénégation.), qu’elle est fondée sur la concurrence entre les établissements, entre les étudiants, entre les enseignants, afin de répondre, en priorité, aux besoins des acteurs économiques. Une telle logique guide la politique menée par le ministère à l’égard tant des élèves que des personnels.
Ainsi, avec aucune création de postes d’enseignants-chercheurs sur les années 2008-2009, et sans doute au-delà, le remplacement de ces derniers n’est pas assuré à terme, d’autant que les projections à l’horizon 2016 font état d’environ 9 000 départs à la retraite de professeurs des universités, sur les quelque 18 000 en exercice, et autant chez les maîtres de conférence, soit un quart du corps !
Alors que l’une des principales causes de l’échec dans les premiers cycles universitaires tient au manque d’encadrement des étudiants, la politique malthusienne du Gouvernement en la matière annonce a contrario une dégradation dans ce domaine, même si le ministère espère la pallier par l’octroi d’heures supplémentaires, afin de mettre en place un régime de tutorat et de soutien destiné aux étudiants en difficulté.
Là encore, on met en place un système de gestion des ressources humaines à deux vitesses, dans lequel certaines catégories d’enseignants-chercheurs verront leur temps de travail en face à face considérablement alourdi au détriment du temps disponible pour la recherche. Or, contrairement au modèle des grands établissements, à l’origine créés pour constituer des écoles d’application formant les futurs cadres de l’administration, l’université est fondée sur la complémentarité de l’enseignement et de la recherche. Mais on sait par ailleurs avec quel dédain le Gouvernement traite la recherche publique !
Plus pernicieusement encore, la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités formalise la division des enseignants-chercheurs en deux catégories : d’un côté, les fonctionnaires de l’État, qui bénéficient des garanties statutaires en termes d’évolution de carrière et d’indépendance ; de l’autre, les agents contractuels, qui sont directement recrutés et rémunérés par les établissements et ne bénéficient pas, à ce titre, des garanties de leurs collègues sous statut.
Madame la ministre, pour mettre fin à cette profonde inégalité de traitement, qui installe un sentiment de dévalorisation chez nombre d’enseignants-chercheurs contractuels, il est urgent de remettre à plat, dans le cadre d’une négociation approfondie avec les syndicats, l’ensemble des modalités d’emploi des enseignants-chercheurs, afin de parvenir à un régime unique pouvant s’apparenter à ceux qui sont en vigueur dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.
Quant aux étudiants, leur situation ne connaîtra guère d’amélioration.
Ainsi, la revalorisation des bourses de 2,5 % pour l’année universitaire 2008-2009 sera inférieure au taux d’inflation. Autrement dit, comme la majorité des salariés et des retraités, les étudiants les plus modestes verront leur pouvoir d’achat se dégrader.
Dans la conjoncture économique actuelle, afin de relancer la consommation, le Gouvernement pourrait, par exemple, augmenter de manière substantielle, c'est-à-dire d’au moins 3 %, les bourses des étudiants dès le 1er janvier 2009, et ce au moins jusqu’en 2011.
Mais la revalorisation des bourses ne suffirait pas à combattre les inégalités qui se développent dans la population étudiante. Je vous le rappelle, en licence, 27,4 % des étudiants sont issus de familles d’ouvriers ou d’employés et 28,7 %, de familles de cadres supérieurs et de professions libérales. En master, les premiers ne sont plus que 17,7 %, alors que les seconds sont de 36,6 %. Et, en doctorat, les premiers sont moins de 12 %, contre plus de 38 % pour les seconds.
Or la mise en concurrence des universités, la confirmation des privilèges des grandes écoles et le démantèlement en cours de l’école républicaine avec la politique mise en œuvre par M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, ne font que creuser les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur.
Mme la présidente. Veuillez conclure, cher collègue.
M. David Assouline. Je conclus, madame la présidente.
L’« orientation active », qui est prônée par le ministère, risque de diriger d’office les bacheliers aux origines sociales les plus modestes vers les filières professionnalisantes, ce qui augmentera encore un peu plus les inégalités.
Madame la ministre, votre projet de budget s’éloigne méthodiquement de la politique d’égalité des chances que nous souhaitons pour l’enseignement supérieur. C’est pourquoi nous nous y opposerons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la présidente, permettez-moi de répondre au préalable aux propos tenus par M. Lagauche sur la réorganisation du CNRS.
Cette réorganisation s’inscrit, vous le savez, dans une volonté gouvernementale de réforme de l’ensemble de notre système de recherche et d’enseignement supérieur.
La réorganisation proposée hier au conseil d’administration par la direction générale est conforme au plan stratégique adopté par le conseil d’administration le 1er juillet. Elle a été approuvée par le conseil scientifique le 18 novembre.
On peut comprendre que certains ne soient pas d’accord, mais, je l’affirme avec force, on n’exprime pas son désaccord en bloquant un conseil d’administration, lieu naturel de dialogue, en occupant par la force les locaux de l’Agence nationale de la recherche, en se livrant à des actes condamnables, notamment des tentatives pour enfoncer des portes et des dégradations dans le magasin mitoyen. La force publique a été requise pour l’évacuation en douceur des trente-cinq « squatters », à vingt-trois heures, hier soir.
M. Serge Lagauche. En effet !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est courageux et ambitieux. C’est le budget des engagements tenus !
En dédiant 1,8 milliard d’euros à notre système d’enseignement supérieur et à notre recherche dès 2008, puis aujourd'hui pour 2009, le Président de la République respecte l’engagement qu’il avait pris devant les Français pendant la campagne électorale, de faire de la connaissance le pilier de la croissance et du développement de notre pays.
Ce budget est plus que jamais d’actualité, et il faut une volonté politique énorme pour maintenir le cap dans la conjoncture actuelle.
Les moyens budgétaires et fiscaux progresseront de 6,5 % en 2009 et de presque 18 % sur la période 2009-2011.
S’agissant des moyens budgétaires, l’augmentation des crédits de paiement atteint 758 millions d’euros en 2009 par rapport à 2008.
Mais il faut y ajouter, ce que l’on ne fait jamais, les économies qui seront réalisées, d’une part, sur les aides aux grandes entreprises, à hauteur de 122 millions d’euros, recyclées au profit de la recherche publique et, d’autre part, sur les dépenses dans le secteur de l’immobilier, soit 84 millions d’euros, permettent de majorer les crédits de l’enseignement supérieur. Cela signifie que l’augmentation des moyens budgétaires s’élève, en réalité, à 964 millions d’euros.
Doivent être ajoutés à ces moyens ceux qui sont dédiés à des financements innovants : les partenariats public-privé en faveur de l’immobilier universitaire, soit 170 millions d’euros en 2009, et les intérêts de l’opération campus, qui rapporteront à l’État plus de 160 millions d’euros par an.
Ce budget triennal constitue un effort inédit et durable pour une stratégie de moyen terme.
En ce qui concerne l’enseignement supérieur, le milliard d’euros supplémentaire permettra d’entreprendre quatre actions prioritaires.
En premier lieu, il s’agit de lancer un grand chantier d’attractivité des carrières. Sur la période 2009-2011, un effort exceptionnel de 252 millions d’euros y sera consacré, qui s’ajoutera aux 550 millions d’euros négociés d’augmentation du point d’indice de la fonction publique et au milliard d’euros négocié d’augmentation des cotisations retraite.
C’est un plan qui instaure enfin une gestion des ressources humaines personnalisée, qui reconnaît ceux qui s’engagent le plus et récompense les meilleurs. Il tient en deux objectifs : attirer les talents vers les métiers de la recherche, valoriser l’engagement et l’excellence.
En deuxième lieu, il s’agit de donner aux universités les moyens de passer à l’autonomie et de rénover leurs formations. Les universités françaises n’auront jamais bénéficié d’autant de moyens supplémentaires qu’elles n’en recevront dans les trois années à venir, puisque, sur la période, elles en auront quatre fois plus que durant les trois années précédentes ! C’est un milliard d’euros de moyens nouveaux cumulés qui alimenteront directement leur budget, hors dépenses de personnel.
En troisième lieu, il s’agit de bâtir les campus universitaires de demain. L’opération campus, qui affecte d’ores et déjà 5 milliards d’euros à dix campus sélectionnés, plus le milliard d’euros consacré chaque année sur les crédits budgétaires à l’immobilier universitaire, plus les moyens dédiés à des partenariats public-privé, à hauteur de 800 millions d’euros sur trois ans, constituent autant de moyens qui devraient permettre de redessiner complètement le visage de nos universités, et je le souligne, de toutes nos universités.
Enfin, en quatrième lieu, il s’agit d’améliorer les conditions de vie et d’étude des étudiants : le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche donnera la priorité au logement étudiant, afin d’atteindre les objectifs fixés par le rapport Anciaux. En 2009, nous serons à même de réhabiliter plus de 6 500 chambres.
Au total, la dépense par étudiant, qui a augmenté de 1 000 euros depuis 2007, devrait augmenter de 450 euros en 2009, pour s’établir à 8 530 euros par étudiant en 2009. Sur la période 2007-2011, elle augmentera de 37 %.
En ce qui concerne la recherche, la recherche privée est très fortement soutenue, les intervenants l’ont dit, avec le triplement du crédit d’impôt recherche.
Cet outil s’affirme, dans une période de crise, comme un outil anti-délocalisation de nos centres de recherche, un facteur clé d’attractivité de la France pour les investissements étrangers et, enfin, comme un accélérateur de croissance pour les PME innovantes.
La créance du crédit d’impôt recherche devrait passer de 1,6 milliard d’euros au titre de 2006 à 3,5 milliards d’euros en 2008. En conséquence, la dépense fiscale supplémentaire représentera 620 millions d’euros en 2009.
La montée en puissance du crédit d’impôt recherche s’accompagne de la révision d’un certain nombre de dispositifs budgétaires d’aide à la recherche privée, notamment les contrats de l’ANR avec des entreprises, les dispositifs d’intervention pour la recherche industrielle ou les aides à l’aéronautique.
L’instrument fiscal constitue désormais notre outil privilégié dans le domaine de la recherche privée. Ces révisions budgétaires permettent de dégager des marges de manœuvre supplémentaires de 122 millions d’euros qui seront consacrés exclusivement au soutien de la recherche publique.
Grâce à ces dernières et aux moyens supplémentaires, la recherche publique bénéficiera d’une augmentation de moyens de 365 millions d’euros.
Ces moyens devraient permettre, d’abord, d’accompagner les organismes de recherche dans leur réforme, de valoriser leur performance, de mettre l’accent sur les priorités nationales, d’honorer les contrats que l’État a signés avec eux et de financer l’augmentation des moyens dédiés à leur personnel. Au total, les moyens des organismes augmenteront en moyenne de 3,8 % en 2009.
Ensuite, ces moyens contribueront au financement de très grandes infrastructures de recherche, qui sont au cœur du rayonnement scientifique de la France, comme GENCI, XFEL, SPIRAL 2, ITER. Et je n’oublie pas de mentionner également, mesdames, messieurs les sénateurs, les synchrotrons, tant celui d’Orsay que celui de Grenoble.
Enfin, ces moyens permettront d’accroître le financement sur projets, qui augmentera de 45 millions d’euros en 2009 et permettra de consacrer 35 % des financements sur projets aux programmes blancs. Ces derniers, totalement libres, créatifs, et sélectionnés uniquement sur l’excellence, progresseront de 25 %.
Au total, dans le secteur de la recherche, en 2009, nous présentons – contrairement à ce qui a été dit – un effort équilibré entre la recherche publique et la recherche privée, puisque 55 % des moyens nouveaux sont dévolus à la recherche privée et 45 %, à la recherche publique.
Budget ambitieux, disais-je, celui d’un État engagé comme jamais aux côtés de ses universités, qui sont mobilisées pour favoriser la réussite des étudiants, avec une recherche publique et privée renforcée pour satisfaire des objectifs d’excellence.
J’en viens aux questions qui ont été posées par les différents intervenants.
À M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, je dirai que l’autonomie des universités s’accompagnera d’une réforme profonde du système d’allocation des moyens et tiendra évidemment compte des préconisations formulées par les sénateurs et les députés.
Le nouveau dispositif permettra de financer équitablement chacune des missions de service public dévolues aux universités. Les moyens seront affectés à hauteur de 80 % à l’activité et de 20 % à la performance, la part de cette dernière se répartissant pour 5 % en licence, 20 % en master et 40 % dans le secteur de la recherche.
L’équité commande que, pour une activité équivalente, le financement soit identique.
Ainsi, pour la formation, l’essentiel des crédits sera alloué aux universités sur la base d’une dotation fondée sur le nombre d’étudiants présents aux examens, et non plus sur le nombre d’étudiants inscrits.
Pour la recherche, la répartition sera fondée sur le nombre d’enseignants-chercheurs publiants.
Nous ferons ainsi entrer les universités dans une culture de résultats, à travers l’évaluation de l’AERS, des indicateurs de performance relatifs à l’insertion professionnelle et à la valeur ajoutée donnée à chaque étudiant, afin de tenir compte des publics les plus fragiles.
Ce système d’allocation des moyens simple, global et transparent permettra à chaque université de connaître clairement les règles du jeu, mettant fin aux négociations contractuelles qui s’opéraient jusqu’à présent dans la plus grande opacité.
Les sénateurs nous demandent de tenir compte, dans l’évaluation de la performance des universités, des résultats en termes de valorisation de la recherche. Suivant ces recommandations, nous demanderons à l’AERS de modifier sa définition du chercheur publiant pour tenir compte de ses résultats en matière de valorisation de la recherche.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, et M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Très bien !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Parfait !
Mme Valérie Pécresse, ministre. En outre, dans la partie de la performance négociée entre l’établissement et l’État, nous fixerons des objectifs également en termes de valorisation.
Vous m’avez interrogée, cher Philippe Adnot, sur les fonds démonstrateurs. Pourquoi les créer ? Comment sont-ils financés ? Comment les projets sont-ils sélectionnés ?
Les démonstrateurs sont des équipements qui permettent de réaliser un développement expérimental. La démonstration est une étape essentielle du processus d’innovation. Cependant, elle est aujourd’hui mal financée, car elle est très en amont de la commercialisation.
Dans ces conditions, un fonds de financement de démonstrateurs de nouvelles technologies de l’énergie a été créé à Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME, dotée d’une enveloppe de 400 millions d’euros sur quatre ans. C’est là un des résultats du Grenelle de l’environnement, et je vous le précise, madame Blandin, nous le finançons.
Trois thématiques feront très bientôt l’objet de démonstrateurs : les véhicules propres, les biocarburants de seconde génération ainsi que le captage et le stockage du carbone.
Ce fonds constituera un nouvel outil majeur de politique industrielle, qui nous permettra de développer de nouvelles filières au travers du développement durable.
S’agissant du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie, les deux grands établissements poursuivent au fond la même mission, qui est de faire comprendre l’accomplissement extraordinaire de la science, de la recherche, de la connaissance et de la réalisation du désir éternel de savoir et de comprendre.
Il est donc logique de vouloir les rapprocher en valorisant leurs points forts respectifs.
En ce qui concerne le Palais de la découverte, il importe de développer une politique muséographique fondée sur les grandes manipulations et la médiation humaine.
Pour ce qui est de la Cité des sciences et de l’industrie, il convient de mettre à la portée du plus grand nombre les dernières évolutions des sciences et des techniques en éclairant les débats qu’elles peuvent susciter.
Les rassembler signifie néanmoins davantage qu’une simple addition. Il s’agit de s’appuyer sur les deux sites, les deux cultures, les deux traditions, les deux identités, pour forger une ambition nouvelle commune.
Comme le relève le Comité de modernisation des politiques publiques, ce regroupement a pour objectif de créer un grand établissement de référence en matière de culture scientifique et technique, avec une forte visibilité internationale et un rôle de tête de réseau au niveau national.
Nous avons ajouté plus de 3 millions d’euros au budget du Palais de la découverte, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, afin de financer les investissements liés à une légère translation du Palais de la découverte vers la Cité des sciences et de l’industrie. Les opérations de mise aux normes de sécurité seront finalisées au début de 2009.
Pour ce qui est de la valorisation de la recherche, chaque organisme de recherche et d’enseignement supérieur avait traditionnellement son propre service de valorisation.
Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a lancé, en 2005, un appel à projets pour la mutualisation des services de valorisation. Ainsi, 4 millions d’euros sont alloués chaque année depuis cette date à quatorze structures collectives territorialisées.
Ces financements ont eu un effet de levier de un à trois, compte tenu des financements complémentaires apportés par les organismes impliqués et les collectivités locales intéressées.
Aujourd’hui, nous sommes en train d’évaluer ce dispositif. Comme vous l’avez dit, Philippe Adnot, le principal problème est lié au principe de copropriété des droits de propriété intellectuelle dans les unités mixtes.
Aujourd’hui, sur l’ensemble des brevets déposés par la recherche académique, plus d’un sur cinq est détenu par au moins trois propriétaires publics et près de la moitié des brevets en ont deux.
Ce régime de copropriété crée de nombreux obstacles pour la valorisation. Nous voulons faire évoluer ce cadre juridique et faire en sorte qu’un seul acteur soit chargé de l’ensemble des droits et obligations liés à l’exercice de la propriété intellectuelle. La valorisation devant se faire dans un cadre de proximité, il serait légitime que cet acteur soit l’hébergeur de l’unité mixte.
Vous m’avez également interrogée, monsieur le rapporteur spécial, de même que Mme Blandin, sur le Grenelle de l’environnement et la recherche agricole. Cette dernière n’est pas sous-estimée, puisque les thématiques de l’agriculture et de la biodiversité représenteront 115 millions d’euros, soit 11 % du milliard d’euros consacré à la partie « recherche » du Grenelle de l’environnement.
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial, m’interroge sur les résultats de la réunion des ministres européens chargés de l’espace pour le conseil de l’Agence spatiale européenne qui s’est tenue ces deux derniers jours à La Haye. Cette réunion se traduit par un nouvel élan en faveur de la politique spatiale européenne, puisque les budgets européens correspondants augmenteront de 25 % par rapport à la réunion ministérielle de Berlin, soit plus de 10 milliards d’euros.
C’est la traduction concrète des travaux préparatoires menés par la présidence française de l’Union européenne, en particulier de la réunion informelle des ministres européens chargés de l’espace, à Kourou, en juillet dernier. Cette dernière a permis à l’ensemble des États de l’Union européenne de mesurer l’apport des technologies et des applications spatiales et l’importance d’avoir un accès autonome à l’espace avec notre lanceur Ariane 5.
Avec 2,335 milliards d’euros de nouveaux engagements pour les programmes spatiaux, la France consolide ses trois priorités stratégiques.
La première est centrée sur l’espace au service des citoyens. Elle recouvre, notamment, la filière télécom, l’observation de la terre, le climat, la géolocalisation, la météorologie.
La deuxième priorité est l’accès autonome à l’espace via les lanceurs et les progrès de la science. Nous voulons absolument sécuriser la filière Ariane sur le court, le moyen et le long terme. C’est l’objet des études que nous lançons, représentant un budget de 340 millions d’euros, destinées à imaginer le lanceur qui succédera à Ariane 5, afin d’être prêts en 2011, si nécessaire, à lancer ce nouveau programme, l’idée étant d’augmenter la capacité d’emport d’Ariane 5 pour la faire passer de 9 tonnes à 12 tonnes.
Enfin, la science est la troisième priorité. Nous emporterons sur la station spatiale internationale l’une de ses plus belles expériences, le projet Pharao, porté par Claude Cohen-Tannoudji, d’horloges à atomes froids, qui devrait permettre d’améliorer la deuxième génération de Galileo.
Au total, la France a joué un rôle clé dans cette réunion ministérielle de l’ESA, …
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. On n’est jamais mieux servi que par soi-même !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … notamment pour obtenir un vrai consensus sur l’ensemble des programmes décidés et pour permettre le financement complet du programme lié à la station spatiale internationale, qui tenait terriblement à cœur nos partenaires allemands.
S’agissant du calendrier de l’opération campus, je vous indique, monsieur Adnot, monsieur Assouline, que le Comité d’évaluation s’est réuni mi-novembre. Deux projets, l’un à Strasbourg, l’autre à Lyon, sont opérationnels. Celui de Bordeaux, qui nécessite d’être légèrement retravaillé, devrait débuter d’ici à la fin de l’année.
Il y a un problème de gouvernance majeur à Grenoble et à Montpellier, puisque les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, les PRES, n’y ont toujours pas été créés. Néanmoins, les rassemblements d’universités et d’organismes sont spectaculaires. J’espère que, au 1er janvier ou, au plus tard, au 15 janvier, les deux pôles de recherche et d’enseignement supérieur verront le jour. À ce moment-là, nous donnerons le feu vert.
Un dossier doit être réexaminé par le comité d’évaluation, celui de l’université de Toulouse. Dans le projet qu’elle a présenté, l’université conserve un grand nombre de bâtiments vétustes et construit des bâtiments neufs à côté. Or il n’est pas dans l’ambition des promoteurs de l’opération campus de conserver des bâtiments vétustes. Il faut d’abord procéder à la rénovation avant de construire du neuf, surtout dans le contexte d’un léger déclin de la démographie étudiante.
Cela étant, si l’université de Toulouse veut construire du neuf, elle a aussi une autre option : vendre les bâtiments vétustes et récupérer les fonds ainsi libérés.
M. David Assouline. Et Nantes ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Dix universités sont donc prêtes à démarrer ; une douzaine d’autres doivent attendre la constitution du PRES. Pour Toulouse, les trois universités doivent revenir en février.
En février, nous examinerons également les projets de campus parisien « Paris centre » et « Paris Montagne-sainte-Geneviève ». Nous examinerons de même le projet de Saclay, celui d’Aubervilliers et celui d’Aix-Marseille.
M. David Assouline. Et Nantes ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Christian Gaudin, vous m’avez interrogée sur les crédits destinés à l’aéronautique.
L’industrie aéronautique, vous le savez, fête son centième anniversaire, et nous sommes tous fiers du dynamisme d’une filière qui contribue pour plus de 10 milliards d’euros à la balance commerciale et emploie 400 000 personnes.
Cette filière est pleinement associée aux objectifs du Grenelle de l’environnement. Elle est parmi les premières bénéficiaires de l’augmentation du crédit d’impôt recherche. En 2009, 124 millions d’euros sont budgétés pour elle.
Monsieur Christian Gaudin, vous vous étiez inquiété, lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2008, du risque de dispersion de l’action de l’ANR. J’ai écrit au Premier ministre pour lui demander que certains dispositifs soient repris en gestion directe par le ministère, notamment les contrats de projets État-régions, les CPER.
Vos remarques ont donc été suivies d’effets.
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Sur la recherche duale, il s’agit d’un programme primordial pour le lien entre la recherche civile et la recherche militaire.
Cette stratégie a été réaffirmée par les ministres de la défense et de la recherche lors du comité de l’énergie atomique d’avril 2007. Les enjeux de sécurité sont grands, comme l’atteste la lecture du Livre banc sur la défense.
En ce qui concerne l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, la loi est claire : l’AERES évalue les établissements et les laboratoires ; les organismes doivent, eux, évaluer leurs personnels individuellement.
J’en tiendrai compte lors de la réécriture à venir des décrets portant respectivement sur l’organisation du fonctionnement du CNRS et sur le fonctionnement de l’INSERM, pour la mise en œuvre de cette loi.
Monsieur Lagauche, madame Laborde, madame Blandin et monsieur Plancade, vous m’avez questionnée sur les moyens réels en faveur des organismes de recherche une fois enlevé le coût des pensions et du point de la fonction publique.
Les moyens dédiés aux organismes de recherche augmentent de 3,8 %, ce qui représente une hausse de 248 millions d’euros.
Les évolutions tendancielles des dépenses de personnel et sont effectivement importantes : avec les pensions, elles représentent 66% de l’augmentation des moyens des organismes.
Pour autant, elles ont un coût et sont intégralement financées, ce qui n’est pas toujours le cas.
L’État consacrera 83 millions d’euros à l’augmentation des moyens des organismes hors dépenses tendancielles. Ces crédits doivent permettre d’accompagner la structuration des organismes en instituts, de valoriser la performance dans le soutien de base des laboratoires, qui ne diminuera pas, de mettre l’accent sur des priorités nationales – les technologies de l’information, les sciences du vivant et l’environnement –, d’honorer les contrats signés avec l’État et de mettre en œuvre le chantier « carrières » qui permettra d’instaurer des primes incitatives.
Enfin, les organismes bénéficieront des moyens consacrés aux grandes infrastructures de recherche et aux fonds démonstrateurs, soit 64 millions d’euros.
Monsieur Plancade, en ce qui concerne les suppressions d’emplois, le secteur de la recherche et de l’enseignement supérieur, parce qu’il est prioritaire, ne sera pas soumis à la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.
Seuls 900 postes ne seront pas renouvelés, ce qui représente moins de 0,6 % des effectifs du ministère : 450 emplois statutaires ne seront pas remplacés, c'est-à-dire un départ à la retraite sur douze, soit 225 emplois dans les organismes de recherche et 225 emplois dans les universités.
Je tiens à souligner qu’aucun emploi d’enseignant-chercheur ne sera concerné pour le non-renouvellement de ces 225 emplois dans les universités, pour ne pas diminuer leur potentiel d’enseignement à un moment où nous engageons un plan très important de réussite en licence.
Sur les 450 emplois non-statutaires qui ne seront pas remplacés, 225 sont des postes d’allocataire de recherche qui, en fait, n’étaient pas pourvus, et 225 sont des contrats postdoctoraux, car l’ANR devient le principal pourvoyeur de contrats postdoctoraux en finançant 1 000 nouveaux contrats postdoctoraux chaque année, ce qui nous paraît suffisant.
Au total, l’effort résultant du non-renouvellement de ces emplois sera intégralement restitué aux personnels au travers des dispositions en faveur des carrières de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cette mesure touchera tous les personnels : 20 % de primes supplémentaires en trois ans pour les personnels ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers de service dits IATOS, entre 12 % et 25 % d’augmentation pour le recrutement des maîtres de conférences.
Monsieur Plancade, la stratégie nationale de recherche et d’innovation que je suis en train de préparer avec mon collègue Luc Chatel associera, bien entendu, les parlementaires et les anciens parlementaires. C’est pourquoi j’ai demandé à MM. Birraux et Saunier de participer au comité de pilotage de cet exercice de stratégie nationale.
Monsieur Assouline, monsieur Jean-Léonce Dupont, madame Blandin, monsieur Bodin, vous m’avez interrogée sur la réforme des bourses.
Non seulement en l’espace de deux ans nous aurons revalorisé de 5 % les taux des bourses et nous aurons augmenté de 10 % le taux des bourses des 10 000 étudiants les plus défavorisés, mais de plus, j’ai le plaisir de vous apprendre, puisque cela a été annoncé ce matin au conseil d’administration du Centre national des œuvres universitaires et scolaires, le CNOUS, que nous augmentons de 25% le plafond de ressources pour être attributaire d’une bourse. Ce plafond passera à 2,7 SMIC pour un couple, ce qui nous permettra d’atteindre note objectif de 50 000 étudiants boursiers supplémentaires en 2008 et en 2009. Il s’agit vraiment d’une avancée importante pour les étudiants.
J’ajoute que nous avons mis en place un fonds d’aide d’urgence grâce auquel aucun étudiant ne sera perdant au terme de la réforme et que nous simplifions les critères d’attribution des bourses. Nous n’avons eu, d’ailleurs, que très peu de contestations à ce titre.
Quid du dixième mois de bourse ?
Je suis vraiment convaincue que les cours doivent durer neuf mois. Les étudiants doivent pouvoir effectuer des stages l’été, partir à l’étranger, faire des mobilités et suivre des cours dans des universités d’été. Nos semestres doivent continuer à être organisés en regard d’une durée totale de neuf mois et l’année universitaire ne doit pas être prolongée au-delà.
J’ajoute qu’il est également important pour nos universités de pouvoir, comme toutes les grandes universités du monde, s’organiser en universités d’été de façon à accueillir davantage d’étudiants étrangers.
Monsieur Dominati, en ce qui concerne l’ANR, vous avez demandé une amélioration du pilotage de la recherche. C’est tout l’objet de la stratégie nationale de recherche et d’innovation que nous lancerons.
Nous nous livrerons à un grand exercice de réflexion et de mise en commun d’expériences, qui associera la communauté scientifique, le monde économique et les porteurs d’enjeu, à l’instar de ce qui a prévalu pour le Grenelle de l’environnement ou le Livre blanc sur la défense.
Je souligne que le budget de fonctionnement de l’ANR a plus que triplé entre 2005 et 2009.
Monsieur Jean-Léonce Dupont et monsieur David Assouline, un schéma directeur des bureaux d’aide à l’insertion professionnelle, ou BAIP, a été demandé aux universités pour le 13 février de l’année de prochaine.
Un groupe de travail a déterminé l’ensemble des principes directeurs pour le fonctionnement de ces bureaux d’aide à l’insertion professionnelle. Ces principes directeurs ont été communiqués aux universités, qui nous présenteront le 13 février 2009 leur projet de mise en place pour chacun des BAIP. Je signale que 55 millions d’euros seront consacrés à l’orientation active sur la période 2008-2012, dont une bonne part, évidemment, ira à ces BAIP.
En ce qui concerne les suites du rapport Philippe, monsieur Jean-Léonce Dupont, je souhaite avancer sur les trois recommandations formulées : la codiplomation entre les grandes écoles et les universités, la cotutelle de thèse entre les grandes écoles et les universités, ainsi que la création à titre expérimental de classes préparatoires dans les universités.
Nous sommes en train d’expertiser chacune de ces propositions pour étudier comment elles pourraient éventuellement être mises en œuvre.
Monsieur Raoul, en ce qui concerne la réforme de l’INSERM et le consortium agronomique, j’ai confié, avec Roselyne Bachelot-Narquin, au directeur général de l’INSERM la mission de clarifier le paysage de la recherche médicale française, afin d’atteindre une meilleure efficacité du dispositif et une meilleure lisibilité pour nos concitoyens.
Dans cet esprit, le conseil d’administration de l’INSERM a approuvé, le 27 mars 2008, la création de huit instituts thématiques. Nous devons aller encore plus loin.
Une évaluation récente de l’INSERM effectuée par l’AERES montre qu’il faut coordonner l’ensemble de notre recherche en sciences du vivant. Nous avançons dans cette direction.
En ce qui concerne le consortium agronomique, là encore, il s’agit de décloisonner et de regrouper nos forces, qu’il s’agisse de l’INRA, du CIRAD ou de nos écoles d’agronomie à Montpellier et à Rennes. Ce consortium sera un outil puissant de rapprochement de nos étudiants en agronomie et de cohésion de notre recherche agronomique.
Monsieur Renar et madame Blandin, vous vous interrogez sur les moyens de l’enseignement supérieur et de la recherche : sont-ils suffisants, compte tenu de l’inflation ?
À l’heure actuelle, les prévisions d’inflation pour l’année prochaine sont de 1,5 %, voire moins puisque la tendance générale est à la baisse des prix.
Pour ne tenir compte que d’une inflation à 1,5 %, notre budget devrait augmenter de 352 millions d’euros en crédits budgétaires. Or, comme je vous l’ai dit, notre budget augmente de 964 millions d’euros, soit près de trois fois cette somme.
Monsieur Jean-Claude Etienne, les universités qui sont plus petites en taille et en nombre d’étudiants ne sont pas oubliées. Je prendrai un exemple qui vous tient particulièrement à cœur, celui de Reims.
Le contrat de projets État-région conclu pour l’université de Reims est de 120 millions d’euros, soit 30 millions d’euros de plus que pour la période 2000-2006. Nous allons reconstruire l’UFR de droit et de sciences économiques, moderniser la bibliothèque universitaire, restructurer le campus et rénover le CROUS de la cité Teilhard-de-Chardin.
Vous avez raison, toutes ces universités recèlent des « pépites » pour la recherche. Sachez qu’elles ont un outil privilégié qui est l’Agence nationale pour la recherche, notamment ses programmes blancs, qui sont fondés sur l’excellence pure.
Ces programmes augmentent de 25 %, ce qui donne leur chance à toutes les équipes d’excellence de nos universités et qui ne les fait pas dépendre soit des décisions de leur conseil d’administration, soit du budget d’organismes de recherche.
Madame Laborde, les campus prometteurs et innovants sont l’objet d’un effort massif. Aujourd'hui, l’opération campus concerne cinquante-sept universités.
Les campus prometteurs et innovants représentent en tout onze projets, dont sept projets prometteurs et quatre projets innovants, pour un budget de 400 millions d’euros au total sur la période 2009-2011. Dix-huit universités sont concernées, Paris Est, Nancy-Metz, Lille, Clermont-Ferrand, Nantes, Nice et Rennes.
En l’état actuel, 30 millions à 60 millions d’euros seront octroyés par campus prometteur et 20 millions d’euros par campus innovant, ce qui permettra à toutes les universités de voir des crédits supplémentaires venir s’ajouter aux contrats de projets État-régions dans ce domaine.
Vous m’avez également demandé, madame Laborde, si le budget et l’effort seront éphémères. Non, ils ne peuvent pas l’être, puisque nos prévisions budgétaires sont établies sur trois ans !
La progression des moyens budgétaires et fiscaux sera de 18 % sur trois ans. C’est bien un effort dans la durée qui est ici réalisé.
Monsieur Voguet, monsieur Bodin, en ce qui concerne le logement étudiant, vous avez adopté en 2008 la sanctuarisation des crédits des contrats de projets État-régions dédiés à la vie étudiante.
Les moyens dédiés au logement étudiant ont notablement augmenté et n’ont jamais été, à ma connaissance, aussi élevés. Ils se montent aujourd'hui à 160 millions d’euros, ce qui correspond exactement à la dotation nécessaire pour réaliser le plan Anciaux. En 2009, nous devrions pouvoir réhabiliter 6 500 chambres et en construire 4 300. Nous nous rapprochons des objectifs fixés dans ce plan.
Le vrai problème que nous rencontrons aujourd'hui, vous le savez, est celui du foncier. J’espère que l’opération campus permettra d’y apporter des solutions.
J’espère également que l’accord que nous avons conclu avec Hervé Morin pour acquérir de l’immobilier du ministère de la défense, notamment dans les villes les plus touchées, à savoir les villes moyennes, sera couronné de succès. Nous avons déjà pu récolter le fruit de nos efforts à Arras, et j’en suis très satisfaite.
Monsieur Demuynck, vous m’avez interrogée sur le rôle du crédit d’impôt recherche et sur l’évaluation qui peut en être faite.
Je vous l’ai dit, le crédit d’impôt recherche répond à plusieurs objectifs : dispositif anti-délocalisation, il doit renforcer l’attractivité des activités de recherche et stimuler les PME.
Nous évaluerons, bien sûr, ce crédit d’impôt recherche, mais la tâche d’évaluation est très difficile s’agissant d’un dispositif qui fait l’objet de modifications. Or, en triplant le crédit d’impôt recherche et en le simplifiant radicalement, nous l’avons fait changer de nature.
Aujourd'hui, 50 % de la dépense de crédit d’impôt recherche est une dépense de personnel. C’est donc un dispositif extrêmement puissant pour nos chercheurs.
Monsieur Assouline, je vous rappelle que la dépense par étudiant était de 7 210 euros en 2006 ; elle sera de 8 530 euros en 2009.
Pour le plan campus, je vous l’ai déjà dit, dix universités ont déjà obtenu le feu vert.
Quant au taux d’encadrement, il était de 25 étudiants par professeur en 2000 ; il sera de 20 étudiants par professeur en 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que nous vous présentons aujourd’hui envoie un message politique fort, comme l’a déjà largement souligné Valérie Pécresse. C’est précisément dans ces temps de difficultés économiques que nous devons miser sur les investissements d’avenir.
Le budget que nous vous présentons concilie la nécessité d’efforts budgétaires massifs pour développer les activités qui auront l’effet de levier le plus fort sur l’activité et l’emploi, tout en ayant le souci de rationaliser au mieux nos dépenses.
En termes d’investissement en recherche et développement, vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, la France est encore en retard, à la fois sur les objectifs européens fixés à Lisbonne en 2000, mais aussi par rapport à ses concurrents les plus en pointe, comme les États-Unis ou le Japon, qui consacrent respectivement 2,8 % et 3,4 % de leur produit intérieur brut à la recherche et développement.
Il n’y a pas de secret : si nous voulons développer la recherche et développement, il faut d’abord encourager les secteurs qui en sont les plus gros « consommateurs » et qui sont aussi des investisseurs importants représentant le plus gros potentiel d’avenir.
L’industrie réalise 85 % de la recherche et développement privés en France. Ce secteur doit donc être la cible naturelle et prioritaire de nos efforts. À cet égard, je tiens à être précis, et à vous rassurer, messieurs les rapporteurs, sur un certain nombre de points.
Monsieur Gaudin, vous avez exprimé le souci que le crédit d’impôt recherche ne pénalise pas l’investissement dans l’innovation et dans les petites et moyennes entreprises. En effet, l’augmentation du crédit impôt recherche ne s’est pas faite au détriment des aides budgétaires aux PME. En 2005, OSEO, qui s’appelait alors l’ANVAR, ne bénéficiait que d’une dotation de 80 millions d’euros. En 2007, cette dotation s’élevait à 170 millions d’euros et elle sera, en 2009, de 310 millions d’euros.
J’y insiste, évitons les fausses interprétations : la dotation d’OSEO en 2009 est, certes, inférieure à l’addition des moyens antérieurs d’OSEO et de l’ex-Agence de l’innovation industrielle, l’AII, mais celle-ci ne finançait que marginalement les PME.
Qu’avons-nous fait, en réalité ? Nous avons supprimé les programmes de l’ex-AII orientés vers les grandes entreprises, qui n’étaient pas compatibles avec les règles communautaires d’encadrement des aides d’État. Nous leur avons substitué le programme « Innovation stratégique industrielle », géré par OSEO et destiné exclusivement aux PME innovantes de croissance. Depuis 2008, les moyens budgétaires au profit des PME ont été fortement réorientés, outre l’augmentation du crédit d’impôt recherche.
Ce budget pour 2009 cible de manière stratégique les meilleurs leviers pour soutenir notre recherche industrielle. En triplant le taux du crédit d’impôt recherche et en y consacrant désormais 3 milliards d’euros par an, le Gouvernement en a fait le dispositif fiscal le plus incitatif en Europe pour la recherche-développement privée : le crédit d’impôt recherche progressera de 620 millions d’euros en 2009.
Dès maintenant, je tiens à tordre le cou à certaines idées fausses : les PME bénéficient comme les grandes entreprises de la croissance du crédit d’impôt recherche. Nous avons d’ailleurs vu une progression homothétique par catégorie d’entreprises.
Nos estimations montrent que la progression sera en moyenne de plus de 80 % pour les entreprises employant jusqu’à 2 000 salariés, ce qui est en parfaite cohérence avec notre volonté de favoriser l’émergence d’entreprises de taille intermédiaire.
Ces entreprises bénéficient par ailleurs de bonus supplémentaires ou encore du remboursement immédiat pendant cinq ans du crédit d’impôt si elles sont sous le statut de jeunes entreprises innovantes ou s’il s’agit d’entreprises de croissance, les fameuses gazelles.
Pour les entreprises qui n’ont jamais bénéficié du crédit d’impôt recherche – majoritairement des PME –, la réduction d’impôt s’élève à 50 % la première année et à 40 % la deuxième.
Pour les entreprises de moins de 250 salariés, le crédit d’impôt recherche moyen par entreprise a plus que doublé grâce à la réforme, passant de 100 000 euros à 250 000 euros entre 2005 et 2008. Vous le voyez, cette réforme bénéficie pleinement aux PME-PMI.
Cette réforme exerce ses effets principalement sur les entreprises de taille intermédiaire, de 250 à 2 000 salariés : elles constituent notre cible privilégiée en matière de politique de l’innovation. Ainsi, une entreprise de taille intermédiaire a vu, en moyenne, son crédit d’impôt recherche être multiplié par plus de quatre entre 2005 et 2008.
Ainsi que vous l’avez souhaité, messieurs les rapporteurs, une évaluation du crédit d’impôt recherche sera réalisée et transmise au Parlement avant le 30 novembre 2009, comme le prévoit l’article 46 bis de ce projet de loi de finances, tel qu’il a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale.
L’étude à laquelle vous avez fait référence, monsieur Demuynck, montre que les dépenses de recherche et développement des entreprises françaises à l’étranger s’élevaient en 2007 à 19,7 milliards d’euros, à comparer à un montant de dépenses de recherche et développement réalisées en France de 19,8 milliards d’euros. Cette position est plutôt bonne, comparée à celle des États-Unis ou de l’Allemagne, qui enregistrent un déficit dans ce domaine.
Le principal élément que je retiens de cette étude est la mobilité internationale des investissements en recherche et développement. Dans ce contexte, le crédit d’impôt recherche est clairement une de nos cartes maîtresses. C’est d’ailleurs un des arguments phare développés par l’Agence française pour les investissements internationaux dans les prospections qu’elle réalise. Depuis quelques mois, nous savons que des entreprises ont choisi d’investir en recherche et développement en France plutôt que dans d’autres pays, en raison de l’effet incitatif remarquable du crédit d’impôt recherche.
Avec une enveloppe de 183 millions d’euros consacrée aux projets de recherche stratégiques, ce budget traduit aussi la volonté du Gouvernement de cibler plus particulièrement certains secteurs.
Comment définir un secteur stratégique ? C’est un secteur où nous bénéficions d’une avance technologique décisive, comme le nucléaire ou l’aéronautique. C’est aussi un secteur qui contribue à irriguer l’ensemble du tissu économique en innovation et en productivité ; je pense aux technologies de l’information et de la communication ou aux nanotechnologies.
Nous consacrerons ainsi près de 115 millions d’euros en 2009 au développement des nanotechnologies sur le site de Crolles. C’est l’exemple même d’une politique publique efficace et partenariale : en dix ans, ce site est devenu le principal centre de recherche-développement industrielle en Europe dans les technologies des semi-conducteurs et a permis la création de près de 27 000 emplois.
Enfin, un secteur stratégique ouvre des perspectives de marché immenses, à l’image des éco-industries ou des télécommunications, qui peuvent constituer demain le relais de croissance décisif pour notre industrie. Nous avons adopté hier, au niveau européen, le fameux « paquet télécoms ». Il permettra, grâce à une harmonisation de la législation en Europe, de favoriser l’investissement de recherche et développement dans ces technologies qui représentent un quart de la croissance en Europe et 40 % des gains de productivité de nos entreprises.
Monsieur Etienne, le secteur automobile qui vous est cher me fournit un autre exemple de secteur stratégique : vous m’avez souvent interrogé sur la situation de la sous-traitance dans votre région rémoise. L’automobile représente 1 % du produit intérieur brut français, mais 15 % de la recherche et développement dans notre pays, ce qui fait du secteur une cible naturelle de notre politique d’innovation.
Vous savez que l’industrie automobile bénéficiera d’un plan de 400 millions d’euros, annoncé par le Président de la République au Mondial de l’automobile en faveur de la recherche sur les véhicules « décarbonés ». Cette industrie est également au cœur du partenariat des pôles de compétitivité comme Mov’eo, Automobile haut de gamme, Véhicule du Futur ou System@tic, qui travaillent tous sur la problématique des véhicules du futur.
Enfin, le secteur de l’automobile est aujourd’hui le premier bénéficiaire de la réforme du crédit d’impôt recherche, avec 485 millions d’euros perçus en 2008, contre seulement 215 millions d’euros en 2007.
Ce budget stimule également un autre levier essentiel pour l’innovation industrielle : les pôles de compétitivité que j’évoquais à l’instant.
Vous le savez, dans un esprit de transparence et d’amélioration de l’existant, les 71 pôles de compétitivité français ont été évalués cette année de manière indépendante. Quelle suite réserverons-nous à cette évaluation ?
Nous nous concentrerons sur les pôles qui existent déjà. Les pôles que l’audit a classés dans les catégories 2 et 3, c’est-à-dire ceux qui n’ont que partiellement atteint leurs objectifs, devront être reconfigurés ; nous leur donnons douze à dix-huit mois pour démontrer qu’ils peuvent franchir un cap.
Quant aux autres, qui peuvent être considérés comme « les bon élèves », il leur faudra encore s’améliorer pour hausser leur niveau d’excellence. Ils devront présenter des contrats de performance, établissant leur stratégie, leur plan d’action et les financements associés. Ces contrats ont vocation à être signés avec l’État et l’ensemble des acteurs des pôles avant l’été prochain.
La principale conséquence de cette évaluation consiste en l’engagement pris par le Président de la République de prolonger le financement des pôles de compétitivité pour les trois prochaines années. Ils seront dotés globalement de 1,5 milliard d’euros sur cette période, dont 600 millions d’euros sur le fonds unique interministériel et l’équivalent sur l’Agence nationale de la recherche.
Les 200 millions d’euros inscrits dans le projet de loi de finances pour 2009 auront une double vocation : d’abord, permettre l’engagement de nouveaux projets de recherche collaboratifs et, ensuite, financer des services mutualisés pour les acteurs des pôles, à hauteur maximale de 35 millions d’euros. À ces sommes s’ajouteront les contributions des collectivités territoriales, qui jouent également un rôle essentiel dans le soutien de la dynamique des pôles de compétitivité. Par ailleurs, le Gouvernement veillera à l’application des principales recommandations adressées aux pôles, notamment la nécessaire montée en régime des projets européens en leur sein et une meilleure intégration des PME innovantes, qui sont pour nous une priorité.
Le soutien aux entreprises innovantes est en effet un enjeu majeur pour développer la recherche industrielle. Nous maintenons ainsi les exonérations de charges patronales pour les entreprises qui bénéficient du statut de « jeunes entreprises innovantes », et nous faisons monter en puissance le crédit d’impôt recherche.
Nous confirmons également le rôle et l’importance d’OSEO qui, aujourd’hui, s’impose plus que jamais comme un interlocuteur incontournable des PME et comme un opérateur efficace pour promouvoir l’innovation : 310 millions d’euros seront ainsi consacrés aux interventions en faveur de l’innovation des PME, dont 140 millions d’euros par dotation budgétaire. Ainsi, dès 2008, OSEO a concentré ses actions sur deux types de projets : d’une part, son activité traditionnelle de soutien aux projets innovants des PME de 50 à 2 000 salariés et, d’autre part, le soutien à des projets collaboratifs de taille plus importante, allant de 3 millions d’euros à 10 millions d’euros, pilotés, eux, par des entreprises de taille intermédiaire.
Enfin, nous assumons une inflexion importante de notre politique en matière d’aide aux entreprises. Les aides que nous accorderons seront davantage ciblées sur la catégorie des PME intermédiaires, susceptibles d’innover et de prendre des parts de marché à l’international. C’est la traduction d’une décision prise à l’issue de la revue générale des politiques publiques.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la crise financière qui secoue le monde et la crise économique qui se profile vont rebattre les cartes au niveau mondial. Nous assistons clairement à un « retour à l’économie réelle ». Dans ce contexte, je suis convaincu que les gagnants de demain seront les pays qui s’appuieront sur un socle industriel solide et sauront, dès aujourd’hui, affûter leurs armes pour innover et se positionner au plus vite sur les marchés d’avenir.
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Tout à fait !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. C’est ce que je vous propose avec ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Recherche et enseignement supérieur |
24 518 741 334 |
24 112 615 910 |
Formations supérieures et recherche universitaire |
11 854 602 165 |
11 698 686 740 |
Dont titre 2 |
6 839 751 564 |
6 839 751 564 |
Vie étudiante |
2 063 874 514 |
2 052 874 514 |
Dont titre 2 |
65 797 342 |
65 797 342 |
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
5 082 181 762 |
5 050 181 762 |
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
1 218 719 584 |
1 218 719 584 |
Recherche spatiale |
1 280 247 629 |
1 280 247 629 |
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
295 970 987 |
295 970 987 |
Recherche dans le domaine de l’énergie |
663 456 147 |
663 456 147 |
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
1 000 011 684 |
869 411 684 |
Dont titre 2 |
95 427 524 |
95 427 524 |
Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat |
405 805 707 |
328 305 707 |
Recherche duale (civile et militaire) |
200 000 000 |
200 000 000 |
Recherche culturelle et culture scientifique |
160 335 709 |
157 785 709 |
Dont titre 2 |
35 694 889 |
35 694 889 |
Enseignement supérieur et recherche agricoles |
293 535 446 |
296 975 447 |
Dont titre 2 |
166 697 502 |
166 697 502 |
Mme la présidente. L’amendement n° II-43, présenté par MM. C. Gaudin et Adnot, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Supprimer le programme :
Recherche duale
II.- En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2 |
||||
Vie étudianteDont Titre 2 |
||||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
||||
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
||||
Recherche spatiale |
165.000.000 |
165.000.000 |
||
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
||||
Recherche dans le domaine de l’énergie |
35.000.000 |
35.000.000 |
||
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle Dont Titre 2 |
||||
Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat |
||||
Recherche duale (civile et militaire) |
200.000.000 |
200.000.000 |
||
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
||||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
200.000.000 |
200.000.000 |
200.000.000 |
200.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur spécial.
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Cet amendement, déposé au nom de la commission des finances, tend à la suppression du programme « Recherche duale ». En le déposant, vous l’aurez compris, j’ai avant tout souhaité provoquer un débat.
La création d’un tel programme lors de l’entrée en vigueur de la « maquette LOLF » en 2006, était une très bonne idée. En effet, de nombreuses technologies se situent à la frontière entre le civil et le militaire et les exemples anglo-saxons ont montré à quel point de tels champs de recherche pouvaient avoir des retombées fructueuses pour notre pays.
Cependant, alors que ses crédits sont présentés pour la quatrième fois devant le Parlement, ce programme me semble manquer d’ambition et d’esprit de performance.
Pour la quatrième année consécutive, en effet, on nous propose de reconduire, à l’euro près, les mêmes crédits aux deux mêmes opérateurs, à savoir le CNES et le CEA. Et tout se passe comme si ces sommes n’étaient qu’un habillage destiné à permettre à la Délégation générale pour l’armement d’avoir son mot à dire sur certains thèmes de recherche de ces deux organismes, sans que l’on soit d’ailleurs certain de la correspondance réelle entre les services rendus et le niveau de la participation financière du programme.
Une vision de la recherche duale plus ambitieuse devrait être défendue. On pourrait tout d’abord mobiliser d’autres acteurs du monde de la recherche, susceptibles donc de relever de ce même programme. Je pense en particulier à l’ANR et au CNRS, voire à la recherche universitaire. D’autre part, il faudrait également une démarche de performance plus affirmée quant à l’évolution des crédits dévolus aux opérateurs.
Cet amendement n’a pas forcément vocation à être adopté, mais j’écouterai avec un grand intérêt l’avis du Gouvernement.
M. Yannick Bodin. Jolie pirouette !
M. Ivan Renar. Nous verrons bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est effectivement un amendement assez provocateur de M. Gaudin. (Sourires.)
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Ah ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Le programme 191 s’inscrit dans la politique menée par l’État en ce qui concerne la recherche duale, c'est-à-dire civile et militaire. Cette stratégie a été réaffirmée par les ministres de la défense et de la recherche lors du comité de l’énergie atomique d’avril 2007. Il s’agit de répondre aux besoins de concertation entre les deux ministères pour identifier les programmes de recherche duale avec des retours concrets pour la défense et l’industrie de défense.
L’activité de recherche duale du CEA et du CNES est d’un intérêt tout à fait particulier, vous le savez. Le spatial fait l’objet aujourd’hui d’un effort massif de notre système de recherche, et nous y tenons beaucoup.
Nous avons entendu vos demandes, monsieur Gaudin, et nous allons veiller à ce que la recherche duale implique davantage d’acteurs, ce qui n’est pas évident, puisque, comme vous le savez, on touche rapidement à des informations classées secret défense.
Ces précisions étant apportées, je vous demande évidemment de retirer cet amendement, monsieur le rapporteur spécial.
Mme la présidente. Monsieur Gaudin, l'amendement n° II-43 est-il maintenu ?
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Je le retire, non sans avoir souligné, madame la ministre, que c’est véritablement une question de fond qu’il nous faudra forcément reprendre et réétudier.
Mme la présidente. L'amendement n° II-43 est retiré.
L'amendement n° II-129 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2 |
79 334 000 |
79 334 00079 334 000 |
79 334 000 |
79 334 00079 334 000 |
Vie étudianteDont Titre 2 |
666 000 |
666 000666 000 |
666 000 |
666 000666 000 |
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
80 000 000 |
80 000 000 |
80 000 000 |
80 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Le projet de loi de finances prend acte très concrètement de l’entrée en vigueur de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, qui dote les universités d’un budget global et leur donne la pleine maîtrise de leur masse salariale.
Dans le projet de loi de finances qui vous a été présenté, 1 906 millions d’euros étaient transférés du titre II du budget de l’État au titre III, donc au budget des universités, c'est-à-dire 1,9 milliard d’euros au titre de la gestion de la masse salariale. L’évaluation de ces crédits a été affinée depuis la construction du PLF, c’est pourquoi cet amendement de 80 millions d’euros vient augmenter les crédits qui sont transférés aux universités au titre de leur masse salariale.
Je souhaiterais affirmer, à l’occasion de cet amendement, l’importance que j’accorde au fait que le transfert de masse salariale se fasse dans d’excellentes conditions, et nous accompagnons les universités à cet effet.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Madame la ministre, cet amendement n’était pas techniquement nécessaire. Dans le cadre de la fongibilité asymétrique, il était possible de régler le problème.
Néanmoins, nous sommes extrêmement favorables à cet amendement, et nous vous en remercions, car il donnera confiance aux universités qui accèdent à l’autonomie et elles croiront d’autant plus en votre parole.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-129 rectifié.
(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-140, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
+ |
- |
+ |
- |
|
Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2 |
|
|
|
|
Vie étudianteDont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
479 941479 941 |
479 941479 941 |
||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
479 941 |
479 941 |
||
SOLDE |
- 479 941 |
- 479 941 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Il s’agit d’une conséquence de la loi de décentralisation de 2004, qui a transféré aux collectivités locales l’inventaire des monuments historiques.
L’État avait prévu un droit d’option pour les personnels entre un détachement de longue durée et une intégration dans la fonction publique territoriale.
L’amendement tire les conséquences du choix des agents par un abattement de crédits et d’emplois dans le budget de l’État et par une compensation financière aux collectivités locales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. C’est une mesure de cohérence et nous constatons que le Gouvernement ne cherche pas à se créer des marges de manœuvre en l’occurrence. Nous y sommes donc, bien sûr, favorables, sous réserve, madame la ministre, puisqu’il s'agit de compenser par une part de TIPP, que l’on respecte bien le texte fondateur et que donc la masse transférée corresponde toujours, au minimum, à la dépense actuelle.
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est la règle !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Que l’État, après avoir transféré aux collectivités territoriales des missions, donc des charges, prenne soin de transférer les ressources correspondant aux salaires est très juste.
Que ces ressources soient issues de la TIPP est plus contestable, malgré les précautions de M. Adnot. Le monde va changer, que ce soit par le climat, la crise ou le manque d’énergies fossiles. Il me semble donc que construire des montages pour 2009, et pour la suite, sans prendre en compte toutes les mutations à venir et cette nouvelle donne, révèle tout de même une certaine cécité.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-140.
Mme la présidente. Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J'appelle en discussion les articles 66, 66 bis et 66 ter, ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 66 ter, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Recherche et enseignement supérieur
Article 66
Au 3 du I de l’article 24 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, l’année : « 2008 » est remplacée par l’année : « 2011 ». – (Adopté.)
Article 66 bis
Un rapport sera établi afin de déterminer l’impact financier de la mise en œuvre de mesures permettant la délivrance de conventions de stage par les établissements d’enseignement supérieur ou les établissements scolaires dans les cas suivants :
– lorsqu’un élève titulaire du baccalauréat réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, entre la date d’obtention de son diplôme et celle de son inscription définitive dans un établissement d’enseignement supérieur, à condition que cette inscription ait lieu la même année ;
– lorsqu’un étudiant qui vient de terminer ses études en classe préparatoire réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, entre la fin de sa scolarité et celle de son inscription définitive dans un établissement d’enseignement supérieur, à condition que cette inscription ait lieu la même année ;
– lorsqu’un ancien étudiant réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, dans les quatre mois suivant la fin de sa scolarité dans un établissement d’enseignement supérieur.
Ce rapport devra être présenté au ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur au plus tard le 15 mars 2009.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-44 est présenté par MM. Adnot et C. Gaudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-57 est présenté par MM. J.L. Dupont et Plancade, au nom de la commission des affaires culturelles.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur
par le mot :
Parlement
La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-44.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. L’Assemblée nationale a demandé à ce qu’un rapport vous soit présenté madame la ministre. Le Sénat souhaite que ce rapport soit également diffusé au Parlement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-57.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. L’amendement est strictement identique, je n’ai donc rien à ajouter.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-44 et II-57.
(Les amendements sont adoptés.)
Je mets aux voix l'article 66 bis, modifié.
(L'article 66 bis est adopté.)
Article 66 ter
Un rapport sur l’évolution du financement par le budget de l’enseignement supérieur et sur la place des docteurs dans l’économie française sera remis au Parlement avant le 30 juin 2009. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 66 ter
Mme la présidente. L'amendement n° II-113 rectifié, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l'article L. 132-2 du code de l'éducation, les mots : « ainsi que pour les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles et à l'enseignement supérieur des établissements d'enseignement public du second degré » sont supprimés.
II. - Un décret précise les conditions dans lesquelles les élèves des sections de techniciens supérieurs et de classes préparatoires s'acquittent de droits d'inscription au profit des établissements d'enseignement supérieur.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Je vais retirer cet amendement, madame la présidente. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Il avait pour but d’harmoniser les conditions dans lesquelles des étudiants peuvent suivre des études en classe préparatoire, en BTS, en DUT, ou encore en licence.
L’idée est que les crédits d’enseignement qui sont acquis soient équivalents dans tous ces cas, et que donc les droits rattachés soient également équivalents. Cela étant, mon dispositif demande encore beaucoup de précisions. Je retire donc cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-113 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-95, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 831-3 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Le montant du droit annuel représentant la participation des étudiants aux dépenses de la médecine préventive de l'enseignement supérieur est fixé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé du budget. »
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Cet amendement tend à rétablir le fondement législatif de la participation des étudiants aux dépenses de médecine préventive, qui avait été supprimé par une loi du 5 mars 2007.
Il permet également de renvoyer la fixation du montant de ce droit à un arrêté, et non à un décret, comme c’était le cas auparavant.
Enfin, il consacre la suppression des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 831-3 du code de l'éducation relatives au contrôle médical obligatoire des étudiants, qui fixaient le principe de sanctions et qui sont devenues obsolètes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Cet amendement vise en effet à rétablir une disposition qui a été supprimée par erreur par le législateur.
Il s’agit de sécuriser juridiquement les dépenses de santé de médecine préventive dans l’enseignement supérieur. La commission y est donc bien évidemment favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. L’avis est favorable, car, avec cet amendement, le Sénat s’inscrit dans la logique de la lutte contre les frais illégaux.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Il semble que l’adoption de cet amendement reviendrait à supprimer le caractère obligatoire des examens médicaux et du suivi sanitaire des étudiants. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.)
Or c’est un point essentiel à l’heure où d’ores et déjà un certain nombre d’étudiants, faute de moyens, ne se soignent pas.
Dans les entreprises, un suivi et un contrôle obligatoires de la santé des employés sont organisés. Je pense qu’il est indispensable qu’il en aille de même au sein de l’université.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 66 ter.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Conseil et contrôle de l’État
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l’État » s’appuie sur 548,5 millions d’euros de crédits de paiement, dont 81,2 % sont consacrés aux dépenses de personnel.
Les crédits affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives » représentent 55,5 % des crédits de la mission, ceux de la Cour des comptes et des autres juridictions financières 37,8 %, tandis que les crédits attribués au Conseil économique, social et environnemental ne pèsent que 6,7 %.
Les crédits du programme 165 « Conseil d’État et autres juridictions administratives » augmentent de 14,8 % par rapport à 2008, avec 305,4 millions d’euros en crédits de paiement. Cette progression très importante trouve son explication dans le rattachement à ce programme, à compter du 1er janvier 2009, de la Cour nationale du droit d’asile. Sinon, à périmètre constant, l’enveloppe budgétaire n’augmenterait que de 6,7 %.
Au regard de l’activité des juridictions administratives, il convient de se féliciter de la stabilisation des frais de justice, qui se confirme en 2009, avec une dotation de 8,8 millions d’euros.
Toutefois, le programme doit faire face au goulet d’étranglement qui pourrait se former dans les juridictions administratives d’Île-de-France. L’activité soutenue de ces dernières, rapportée à leurs moyens financiers et humains, les place en effet dans une situation de plus en plus critique.
La création d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, prévue en 2009, pour un coût de 700 000 euros en crédits de fonctionnement et 1,5 million d'euros en crédits d’investissement devrait permettre d’apporter une solution à l’engorgement en région parisienne.
D’une manière générale, et en dépit d’efforts notables de productivité, les résultats obtenus en termes de délais de traitement demandent à être renforcés.
En 2002, la loi d’orientation et de programmation pour la justice, la LOPJ, fixait aux juridictions l’objectif de ramener leur délai de jugement à un an. Je dois constater, cette année encore, que cet objectif n’est malheureusement pas atteint. Le délai est aujourd’hui de un an et deux mois devant les tribunaux administratifs et de un an, un mois et quinze jours devant les cours d’appel. Seul le Conseil d’État présente un délai moyen inférieur à un an : dix mois en prévision actualisée pour 2008.
Les finalités du programme 126 « Conseil économique, social et environnemental » ne changent pas, même si la récente loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République a enrichi les attributions de l’ancien Conseil économique et social, le CES, devenu le Conseil économique, social et environnemental, le CESE.
Dans ce contexte, le Conseil connaît une très faible progression de ses crédits pour 2009 – 1,38 % –, avec un budget total de 36,9 millions d’euros.
Au regard de cette évolution budgétaire maîtrisée, il faut souligner, avec satisfaction, que la réforme du Conseil et l’enrichissement de ses missions s’effectuent à moyens humains et budgétaires presque constants. Pourtant, le changement de dénomination pose, pour le Conseil, certains problèmes pratiques, qui devront être résolus en 2009.
Par nature, comme je l’ai déjà dit les années précédentes, le Conseil économique, social et environnemental, assemblée consultative, se prête mal à la mesure de la performance, qui est pourtant l’une des exigences de la LOLF. Mais les chiffres ne remplacent jamais les idées. Dans ces conditions, les indicateurs mesurent toujours plus une activité qu’une performance.
Le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » enregistre une diminution de 6 % de ses dépenses de fonctionnement, mais une hausse considérable de ses dépenses d’investissement : 20 % en crédits de paiement et 228,5 % en autorisations d’engagement.
Ces dépenses sont fortement liées aux opérations immobilières de la Cour des comptes et des autres juridictions financières : travaux de rénovation de la tour des archives du Palais Cambon, aménagement d’espaces de réunion supplémentaires au sein de la Cour des comptes, poursuite d’opérations immobilières concernant les chambres régionales et territoriales des comptes.
Le plafond d’emploi demeure stable à 1 841 équivalents temps plein travaillé, mais les dépenses de personnel augmentent de 11,7 millions, soit une progression de 7,38 %.
Au sein de ce programme, l’une des principales réflexions concerne le maillage du territoire par les juridictions financières. Cette réflexion est engagée, mais il convient de rappeler qu’elle devra être menée en étroite concertation avec les élus locaux, et dans le respect des territoires.
En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances, à l’unanimité, propose au Sénat l’adoption des crédits de cette mission et de chacun de ses programmes.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nombreux sont les programmes du projet de loi de finances pour 2009 qui souhaiteraient voir leurs crédits de paiement augmenter de 14,45 % !
Alors que les restrictions budgétaires sont la norme, il faut reconnaître le sort enviable du programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives ».
Certes, il s’agit là d’une donnée brute puisque, à périmètre constant par rapport à 2008, donc exception faite du rattachement effectif au programme à compter du 1er janvier 2009 de la Cour nationale du droit d’asile et de l’augmentation des crédits pour la création du tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, le budget atteint 278,7 millions d'euros, soit une progression de 4,5 %, nettement supérieure à la hausse du budget général de l’État.
Cependant, il faut parler ici non pas d’un arbitrage favorable mais plutôt d’un arbitrage budgétaire réaliste, tant il répond, bien que de manière imparfaite – je m’en expliquerai –, à la montée en puissance de la justice administrative et donc aux nécessaires besoins en moyens humains et matériels permettant d’y faire face.
Concernant le programme d’investissement et faisant suite aux demandes des professionnels et des élus, notamment de la commission des finances et de la commission des lois du Sénat, de nombreuses avancées positives sont à noter.
Pour ne citer que quelques avancées parmi les plus importantes, je parlerai notamment de l’ouverture du tribunal administratif de Toulon, qui s’est installé dans ses locaux provisoires en septembre 2008 et qui vient juste de commencer à enregistrer et à tenir des audiences, avec trois chambres, treize magistrats, dix-sept agents des greffes et trois assistants de justice.
Ensuite, permettez-moi, en tant que sénateur gardois, de me féliciter de la montée en puissance du nouveau tribunal administratif de Nîmes, créé l’année dernière, et qui, au cours de l’année 2007, a jugé 4 082 affaires, ce qui, comme cela était attendu et souhaité, a eu un effet positif sur les indicateurs de performance des tribunaux administratifs de Marseille et de Montpellier.
Je suis aussi heureux de noter que nos demandes réitérées ont été entendues : 800 000 euros sont inscrits au budget de cette année, ce qui va permettre de réaliser le ravalement des façades du tribunal administratif de Nîmes.
Enfin, pour terminer sur les satisfecit en matière d’investissement, je voudrais saluer aussi la création d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis en 2009. Nous l’avions demandé l’an dernier ; c’est donc une réponse extrêmement rapide qui nous a été fournie.
La situation particulièrement difficile de la région parisienne justifie que les efforts y soient concentrés dans les prochaines années ; mon collègue Jean-Claude Frécon a d’ailleurs insisté sur ce point. En effet, le contentieux y augmente de 12 % par an depuis 2002 et les délais de jugement sont supérieurs à la moyenne nationale dans les tribunaux administratifs de Versailles et de Cergy. Six chambres seront créées en 2009 et quatre chambres supplémentaires le seront en 2010.
Les demandes budgétaires relatives aux juridictions de première instance sont donc globalement satisfaites.
Quant aux cours administratives d’appel, elles connaissent une activité en très forte augmentation puisque, avec 26 554 nouvelles requêtes enregistrées en 2007, le volume dépasse de 25,95 % celui de 2006. Plusieurs milliers de nouvelles requêtes sont imputables, entre autres, aux contentieux de la nationalité et des étrangers.
Je tiens, monsieur le secrétaire d'État, à vous alerter sur la situation particulièrement délicate de la cour administrative d’appel de Marseille. En effet, cette cour, dont le ressort est très étendu, avec les tribunaux administratifs de Montpellier, de Nice, de Bastia, de Nîmes et de Toulon, est au bord de la saturation.
C'est pourquoi, au moins à moyen terme – nous formulons la demande cette année, peut-être sera-t-elle satisfaite l’an prochain –, nous demandons, monsieur le secrétaire d'État, que l’État crée une nouvelle cour administrative d’appel dans le Grand sud pour combler l’absence de cour entre Marseille et Bordeaux. Je serais heureux que vous puissiez m’apporter quelques précisions sur ce point.
Concernant le programme de fonctionnement, il faut saluer l’amélioration des délais de jugement, malgré une hausse substantielle du nombre d’affaires traitées, et ce alors même que les emplois créés depuis 2002 sont inférieurs – il faut malgré tout le signaler – aux prévisions de la loi d’orientation et de programmation pour la justice. En effet, ce texte prévoyait la création de 210 emplois de magistrats administratifs entre 2002 et 2007. Or, au total, sur cette période, seuls 148 emplois ont été créés.
Il ne faut pas relâcher les efforts sur le fonctionnement, sinon les bons indicateurs actuels ne tiendront pas face à l’augmentation constante du contentieux.
L’amélioration des délais de jugement et la diminution du stock des affaires pourraient ne pas durer. En effet, si les résultats obtenus par le Conseil d’État et les juridictions administratives sont remarquables en matière de maîtrise des délais de jugement, il convient d’être attentif à l’effet que pourraient entraîner les réformes récemment adoptées par le Parlement sur le développement du contentieux.
Ainsi, si l’impact de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable reste difficilement mesurable, une forte hausse du contentieux est attendue à partir du 1er décembre prochain, date à laquelle les tribunaux administratifs auront à connaître, outre les recours contre les rejets des commissions de médiation, du contentieux spécifique à la procédure du droit au logement opposable.
De plus, avec l’adoption, cette semaine même, de la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, le contentieux des commissions départementales d’aide sociale relèvera des tribunaux administratifs : 12 000 nouvelles affaires sont d’ores et déjà attendues, soit une croissance de près de 7 %.du nombre des entrées devant la justice administrative
Face à l’inflation législative, je souhaite, comme l’année dernière, que soient mises en place, comme l’a prévu la réforme constitutionnelle récemment votée, des mesures permettant d’évaluer l’impact et les conséquences, en particulier sur les risques de contentieux, de l’adoption de toute nouvelle loi. En effet, gouverner, c’est aussi prévoir.
À l’avenir, l’augmentation des moyens ne suffira pas à endiguer le flot des nouvelles affaires. C’est pourquoi je voudrais insister sur la nécessité de réformer en profondeur, mais de manière progressive, la justice administrative, pour en améliorer encore l’efficacité. Plusieurs réformes sont d’ailleurs en cours : elles sont relatives à l’amélioration des fonctions consultatives et juridictionnelles du Conseil d’État, à l’inscription dans les textes de la séparation de fait entre activités consultatives et activités contentieuses, à l’amélioration de la procédure contradictoire devant le juge administratif et à la transformation du commissaire du Gouvernement en rapporteur public.
Mais c’est surtout la perspective du développement des recours administratifs préalables obligatoires qui constitue, à mon avis, la mesure la plus importante de ces prochaines années. Ce type de recours désigne l’ensemble des procédures par lesquelles une personne, souhaitant contester une décision administrative qui lui est défavorable, est tenue de former un recours devant l’autorité administrative préalablement à toute saisine du juge. Quatre grands domaines, qui représentent près du tiers du contentieux, pourraient rapidement bénéficier de cette mesure : les invalidations de permis de conduire, la fonction publique, le droit des étrangers et les contestations en matière pénitentiaire, sans exclure pour autant les autres domaines.
Sous réserve de ces différentes observations, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, d’adopter ce budget.
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens à nouveau cette année, car les problèmes que j’avais alors soulevés n’ont pas été résolus.
En 2007, j’avais évoqué l’engorgement de certains tribunaux administratifs en raison de la multiplication des contentieux et l’insuffisance des effectifs. Or la lecture des crédits affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives », auquel je limiterai mon intervention, ne permet pas d’apaiser les craintes soulevées voilà un an.
Certes, ce programme bénéficiera d’un effort budgétaire qui se traduit par l’affectation de soixante équivalents temps plein travaillé supplémentaires pour 2009 et par l’ouverture, qui avait été demandée, d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, prévue pour l’automne 2009.
Comme MM. les rapporteurs l’ont indiqué, les crédits, qui sont en hausse pour 2009, s’élèvent à 311,16 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 305,36 millions d’euros en crédits de paiement.
Néanmoins, comme l’ont également rappelé MM. les rapporteurs, cette hausse s’explique surtout par l’intégration à ce programme de la Cour nationale du droit d’asile, dont les crédits s’élèvent à 20,83 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 18,12 millions d’euros en crédits de paiement.
Sans cette nouvelle action, les crédits n’augmentent que de 6,7 %. Ils continueront d’être insuffisants tant que les juridictions administratives continueront de subir les conséquences des politiques du Gouvernement, qui ne sont pas neutres sur le plan du contentieux administratif.
Le poids du contentieux des étrangers reste très important : sa part a atteint 47 % du total des affaires enregistrées en 2007 devant les cours administratives d’appel. Entre 2003 et 2007, la hausse est de 576 % ! Devant les tribunaux administratifs, les requêtes relatives à ce contentieux représentent 27,3 % des affaires, en augmentation constante. Je ne vois pas comment cette progression pourrait se ralentir après la mise en place de la procédure de refus de titre de séjour assortie d’une obligation de quitter le territoire, à moins de changer de politique !
Nous dénoncions déjà ces évolutions l’année dernière non seulement parce que nous condamnons la politique du Gouvernement en matière d’immigration mais aussi parce que, en termes de fonctionnement, les juridictions administratives se retrouvent totalement engorgées.
Cette tendance ne pourra aller qu’en s’aggravant : les nouvelles lois adoptées sur l’initiative du Gouvernement et de la majorité auront pour conséquence d’augmenter les possibilités de recours devant le juge administratif, ce qui aboutira à accroître le volume du contentieux administratif.
En effet, qu’il s’agisse de la loi instituant le droit au logement opposable – on nous dit ne pas pouvoir en mesurer l’impact, mais, de source syndicale, cela pourrait représenter quelques dizaines de milliers de recours par an –, de la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, ou encore de la loi généralisant le revenu de solidarité active, en cours de promulgation, dont l’impact sur les juridictions administratives n’a pas du tout été pris en compte dans le projet de budget, le Gouvernement fait peser sur les juridictions administratives des responsabilités qui ne sont pas les leurs.
Dans ces conditions, comment continuer à demander aux juridictions de réduire leurs délais de jugement sans augmenter considérablement leurs effectifs ? Les moyens restent insuffisants, alors que les exigences gouvernementales sont toujours plus importantes, et ce au détriment de la qualité de la justice rendue.
Cette exigence de rendement, qui se traduit par une prime à la statistique, a d’autres conséquences. Dans le but de réduire les délais de jugement, elle légitime l’élargissement des hypothèses dans lesquelles les requêtes présentées devant les tribunaux administratifs peuvent être traitées par ordonnance, ainsi que le recours de plus en plus fréquent au juge unique, que nous déplorons mais qui est, hélas ! de plus en plus souvent la règle.
Enfin, le décrochage entre le régime indemnitaire des magistrats administratifs et celui des magistrats des juridictions financières est aujourd’hui entériné. Pourquoi une telle mesure, si ce n’est en raison de la révision générale des politiques publiques ?
La revalorisation sur trois ans du régime indemnitaire des magistrats administratifs ne résoudra pas le problème de l’origine de l’alignement du régime indemnitaire des magistrats administratifs sur celui des grands corps de l’État.
Malgré les avis favorables des rapporteurs, nous voterons donc contre les crédits affectés à la mission « Conseil et contrôle de l’État », plus particulièrement contre ceux qui sont affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives ». Les tribunaux administratifs restent engorgés, et l’augmentation des effectifs ne suit pas celle du contentieux.
L’ouverture d’un tribunal en Seine-Saint-Denis ne va certainement pas régler le problème : en effet, il est créé pour désengorger le tribunal de Cergy-Pontoise, qui, lui-même, devait permettre de soulager celui de Versailles ! D’année en année, se pose la question des nouveaux tribunaux qui pourraient être créés. On ne rattrape pas le temps. Va-t-on continuer à faire peser indéfiniment sur les juges administratifs les conséquences des politiques qui multiplient de façon exponentielle les possibilités de recours ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier M. le rapporteur spécial, Jean-Claude Frécon, d’avoir parfaitement décrit ce programme. Il a relevé, à juste titre, les problèmes que rencontrent les juridictions administratives – Mme Borvo Cohen-Seat est également revenue sur ce point –, que ce soit en Île-de-France ou dans d’autres régions. Comme il l’a souligné, la création d’un tribunal administratif en Seine-Saint-Denis au 1er septembre prochain devrait nous permettre de faire face aux difficultés en Île-de-France.
Il est vrai que d’autres tribunaux avaient précédemment été créés pour désengorger certaines juridictions administratives ; mais, madame Borvo Cohen-Seat, c’est précisément l’objectif que l’on cherche à atteindre !
MM. les rapporteurs et Mme Borvo Cohen-Seat ont tous les trois rappelé que la principale difficulté concerne l’évolution des délais de jugement par rapport aux objectifs fixés par la loi d’orientation et de programmation de la justice.
La réduction des délais s’est poursuivie en 2008 au Conseil d’État et dans les tribunaux administratifs. Au Conseil d’État, le délai prévisible moyen de jugement devrait se situer autour de dix mois, ce qui est inférieur à l’objectif d’un an. Dans les tribunaux administratifs, le délai prévisible moyen de jugement devrait se situer autour de un an et un mois.
Ainsi, au regard de la tendance constante depuis 2002, qui est une diminution du délai d’environ un mois par an, l’objectif d’un délai inférieur à un an apparaît à portée de main.
Comme l’ont souligné les orateurs, la progression du volume du contentieux est alimentée par les législations existantes, mais aussi par l’extension des droits dans plusieurs domaines, comme le droit des étrangers, le revenu de solidarité active, le droit au logement opposable, que Mme Borvo Cohen-Seat a énumérés.
En effet, que ce soit en France ou dans les autres pays européens – je suis assez bien placé pour le savoir ! –, les droits sont davantage garantis : l’augmentation du contentieux qui en résultera, y compris en ce qui concerne les étrangers, nous incite donc à rester prudents.
Les résultats en termes de réduction des délais de jugement témoignent d’une amélioration très substantielle de l’ensemble des niveaux de juridiction. De 2002 à 2008, ces délais auront été réduits de onze mois à dix mois devant le Conseil d’État ; de deux ans et dix mois à un an, un mois et quinze jours devant les cours administratives d’appel ; et de un an et huit mois à un an et un mois devant les tribunaux administratifs.
Dans son rapport, M. Frécon est également revenu sur les juridictions financières, qui pourraient faire l’objet d’une réforme. Lors des cérémonies du bicentenaire de la Cour des comptes, le Président de la République en a présenté les grandes orientations.
Les exigences nouvelles de la gestion publique impliquent en effet de revoir les attributions de ces juridictions en matière de certification des comptes des collectivités locales et d’évaluation des politiques publiques. Vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, il faut adapter leur organisation à ces nouveaux impératifs.
Actuellement, le travail interministériel se poursuit pour que la réforme puisse être finalisée au cours du premier semestre de l’année 2009, après consultation des élus, qui sont impliqués au premier chef dans ces réformes pour ce qui concerne les collectivités locales.
M. Sutour a rappelé la forte progression des crédits pour les juridictions administratives. Mme Borvo a souligné que la hausse nette était de 6,7 %, ce qui, dans les circonstances actuelles, reste significatif pour faire face aux besoins croissants de ces juridictions. À cet égard, l’effort consenti pour le tribunal administratif de Nîmes, notamment pour la réfection de ses façades, est particulièrement éloquent.
Monsieur le rapporteur pour avis, j’ai bien pris note de votre souhait de voir créer, entre Bordeaux et Marseille, une Cour administrative d’appel pour le Grand sud. Nous étudierons cette demande avec attention.
MM. les rapporteurs ont parfaitement décrit les moyens d’améliorer l’efficacité de la justice administrative ; je n’y reviendrai donc pas.
Le problème des recours administratifs préalables obligatoires a également été évoqué.
Le recours à ce type de procédure permet de limiter le contentieux et donc d’améliorer le délai de traitement des affaires devant les tribunaux. Pour nos concitoyens, c’est un moyen simple, peu coûteux et rapide d’obtenir la réformation d’une décision avec des chances raisonnables de succès ou à tout le moins d’une meilleure explication de celle-ci.
L’étude a identifié plusieurs domaines dans lesquels ce type de recours pouvait être développé : les invalidations de permis de conduire à la suite de la perte de points, le contentieux de la fonction publique, certaines situations en matière de droit des étrangers, madame Borvo Cohen-Seat, et, en matière pénitentiaire, l’ouverture du prétoire issue de l’arrêt Boussouar et d’autres décisions de l’assemblée du contentieux du Conseil d’État, en date du 14 décembre 2007, qui renforcent les garanties des droits des personnes incarcérées.
La mise en place de recours administratifs préalables obligatoires, si elle ne saurait être universelle, apparaît ainsi souhaitable dans ces différents domaines, car elle répond, comme cela a été souligné, à une double exigence d’efficacité et de respect des droits de recours.
Au bénéfice de ces explications, le Gouvernement demande à la Haute Assemblée de bien vouloir adopter les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », figurant à l’état B.
éTAT B
(En euros) |
||
Conseil et contrôle de l’État |
553 114 290 |
549 109 535 |
Conseil d’État et autres juridictions administratives |
310 380 428 |
304 575 673 |
Dont titre 2 |
244 749 708 |
244 749 708 |
Conseil économique, social et environnemental |
36 955 035 |
36 955 035 |
Dont titre 2 |
29 995 551 |
29 995 551 |
Cour des comptes et autres juridictions financières |
205 778 827 |
207 578 827 |
Dont titre 2 |
170 636 095 |
170 636 095 |
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
(Ces crédits sont adoptés)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
Direction de l’action du Gouvernement
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission : « Direction de l’action du Gouvernement ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Direction de l’action du Gouvernement » est originale par rapport à la lettre de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances. En effet, elle regroupe les crédits consacrés non pas à une politique publique, mais à un ensemble de services du Premier ministre exerçant des fonctions d’état-major de l’action gouvernementale.
Pour 2009, les crédits de cette mission sont globalement stables. Ainsi, les autorisations d’engagement s’élèvent à 492,4 millions d’euros. Quant aux crédits de paiement, ils s’établissent à 541,7 millions d’euros, répartis entre trois programmes : « Coordination du travail gouvernemental » pour 393 millions d’euros, « Présidence française de l’Union européenne » pour 70 millions d’euros et « Protection des droits et libertés » pour 78,5 millions d’euros. Ce dernier programme est constitué des crédits des autorités administratives indépendantes, les AAI, concourant à la défense des droits et des libertés publiques.
Toutefois, la hausse des crédits de paiement de cette mission sera nettement supérieure à l’inflation en 2010 et en 2011, avec une augmentation respectivement de 8,5 % et de 0,5 % en 2011.
Je ne remets pas en cause le bien-fondé de ce choix, à condition que cette augmentation bénéficie effectivement au financement des priorités strictement définies dans le projet de loi de finances initiale pour 2009, à savoir la création du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale et le renforcement des effectifs de plusieurs autorités administratives indépendantes.
Je tiens à me féliciter de la création du programme « Protection des droits et libertés » et du rattachement à ce dernier des crédits de la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, lesquels répondent à une demande constamment formulée par le Sénat depuis 2006. Ce programme permet d’identifier les crédits et de conforter l’indépendance de douze AAI, qui concourent toutes à la défense des droits et des libertés fondamentales.
Je tiens également à saluer la création d’une nouvelle autorité, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Il serait toutefois souhaitable que les crédits de rémunération des secrétaires généraux aux affaires régionales soient transférés vers la mission « Administration générale et territoriale de l’État » et que les crédits du Défenseur des enfants, appelés à être intégrés dans le budget du futur Défenseur des droits, figurent au programme « Coordination du travail gouvernemental ».
S’agissant des crédits des AAI, la hausse a été répartie de manière inégale afin de faire face à l’accroissement global de leur champ d’intervention.
Dans ce contexte, il y a lieu de s’interroger sur la légère baisse de 0,15 % des crédits du Médiateur de la République par rapport à la loi de finances initiale pour 2008, malgré des sollicitations croissantes, dans la perspective notamment de la création du Défenseur des droits appelé à reprendre une partie de ses attributions. Cela nous inquiète un peu. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)
Il conviendrait donc de prévoir l’actualisation de la maquette budgétaire en insérant une nouvelle action « Défenseur des droits », dont la création est attendue en 2009. En outre, il paraît nécessaire de compléter les indicateurs de performance associés aux actions du programme afin de refléter le plus fidèlement possible l’étendue du champ d’action des différentes AAI.
Le programme « Présidence française de l’Union européenne » ne retrace, en 2009, que les paiements d’opérations engagées pendant la présidence française de l’Union européenne, du 1er juillet au 31 décembre 2008.
L’an dernier, mes collègues François Marc et Michel Moreigne, alors rapporteurs spéciaux, avaient formulé un certain nombre d’observations sur les crédits de la présidence française de l’Union européenne. En 2009, l’heure sera au bilan. C’est pourquoi la commission des finances a demandé à la Cour des comptes une enquête sur les crédits du programme « Présidence française de l’Union européenne », en application de l’article 58-2 de la LOLF.
D’ores et déjà, il apparaît que tous les crédits inscrits, soit 190 millions d’euros, ne devraient pas être consommés. L’économie budgétaire attendue en 2009 devrait ainsi atteindre au moins 10 millions d’euros. Cette observation valide le constat formulé par la commission des finances en 2007 : les dépenses de la présidence française de l’Union européenne ont été prévues à un niveau élevé par rapport au coût des précédentes présidences françaises de l’Union européenne, notamment celles de 1995 et de 2000.
Enfin, je m’interroge sur l’augmentation de plus de 140 % des crédits du service d’information du Gouvernement proposée en 2009, crédits qui atteindraient 28 millions d’euros. Quelles sont les économies budgétaires correspondantes réalisées dans les budgets de communication des autres ministères ? Quelles sont les « campagnes d’information d’envergure » envisagées ? Dispose-t-on d’une liste des actions qui auraient pu être engagées en 2008 avec le budget proposé pour 2009 ? Je me réserve la possibilité d’effectuer des travaux complémentaires de contrôle budgétaire sur ces dépenses.
Mes chers collègues, telles sont les principales observations que je souhaitais porter à votre connaissance sur les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », que je vous propose, au nom de la commission des finances, d’adopter sans modification.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis des crédits de l’action « Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie », la MILDT, qui était rattachée jusqu’à l’année dernière à la mission « Santé ».
La nouvelle présentation budgétaire reflète le recentrage que la MILDT a opéré depuis 2007 sur sa fonction de coordination. Le nouveau rattachement budgétaire met également fin à toute tentation de gestion de ses crédits par le ministère de la santé. Cette clarification est conforme aux souhaits de notre commission.
La commission des affaires sociales veillera à un juste équilibre, dans l’action de la MILDT, entre approche sanitaire et approche répressive, à l’occasion de la mise en œuvre du nouveau plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies 2008-2011. Dans cette perspective, l’augmentation du budget de la MILDT est de plus de 21 % cette année. En outre, une ressource complémentaire est constituée par le fonds de concours de la MILDT, abondé par la valeur des biens et du numéraire saisis lors de l’interpellation de trafiquants par la police et la gendarmerie.
La MILDT et les deux autres opérateurs qui reçoivent des subventions au titre de cette action, à savoir l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, l’OFDT, et le Centre interministériel de formation antidrogue, le CIFAD, n’ont donc pas de problèmes budgétaires réels. On ne peut que s’en féliciter.
Le risque demeure néanmoins que les fonds d’État liés à la lutte contre la drogue se trouvent dispersés entre le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies et les plans mis en œuvre par le ministère de la santé. Or il faut mobiliser tous les moyens, car les drogues touchent des enfants de plus en plus jeunes, et la consommation ne régresse pas.
En 2009, la MILDT orientera son action sur deux nouveaux publics : les parents et le monde du travail. En effet, 30 % des parents pensent que l’usage privé d’héroïne est légal. Dans ces conditions, comment peut-on espérer qu’ils jouent leur rôle en interdisant et en sanctionnant ? Le monde du travail est aussi très désarmé face aux dépendances à la drogue. On estime pourtant que 15 % à 20 % des accidents du travail et des violences survenus sur le lieu de travail sont liés aux drogues ou à l’alcool.
Afin que l’OFDT, observatoire internationalement reconnu, réponde dans les meilleures conditions aux appels d’offres scientifiques nationaux et européens, la commission des affaires sociales souhaite qu’il puisse continuer à recruter des agents dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée. Cela pose quelquefois problème, monsieur le secrétaire d’État.
Le CIFAD, basé à Fort-de-France, joue un rôle important dans la formation des agents chargés de surveiller les grandes routes, essentiellement maritimes, de la drogue qui nous vient d’Amérique. Le marché de la drogue étant mondial, la France se doit d’être présente partout où elle le peut afin de se préserver elle-même. L’action du CIFAD ayant fait ses preuves, un autre centre pourrait, me semble-t-il, être créé sur le même modèle pour l’Afrique de l’Ouest, nouvelle plaque tournante de la drogue venue d’Amérique et destinée à l’Europe.
Plus ponctuellement, je note que le ministère de la santé n’a plus pourvu le poste qui permet une formation des élèves du CIFAD en matière d’approche sanitaire. Je trouve regrettable que seule une formation de type pénal soit dispensée. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous intervenir auprès de votre collègue chargée de la santé pour remédier à cette situation ?
Le plan gouvernemental pour 2008-2011 doit également se traduire par l’élaboration de plans départementaux. Du point de vue du terrain, deux enjeux doivent être traités.
Le premier concerne la participation de l’éducation nationale. Cette institution reste trop souvent un champ clos et impénétrable à la prévention de la toxicomanie, qui compte parmi ses effets la désocialisation et la déscolarisation.
Le second enjeu tient au dépassement de l’approche purement statistique de la sécurité routière sur la question de l’alcoolisme. Une clarification du message public est ici nécessaire. En effet, ce n’est pas parce que le « capitaine de soirée » ne boit pas et ne causera pas d’accident de la circulation que tous ses passagers sont libres de se livrer à tous les excès. Or le chiffre des morts sur la route préoccupe parfois de manière trop exclusive les préfets. Pour faire un pendant médiatique à ce chiffre, je souhaite que l’OFDT puisse élaborer un indicateur des décès attribuables chaque année aux drogues.
Sous réserves de ces quelques remarques et interrogations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de l’action « Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie ». (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le nouveau programme « Protection des droits et libertés », sur lequel la commission présentera un amendement de simple coordination, comprend onze autorités administratives indépendantes, dont la cohérence est constituée par l’objet commun des libertés publiques.
Les AAI sont regroupées en sept actions.
Certaines actions sont constituées d’une seule autorité : le Médiateur de la République, la CNIL, le Conseil supérieur de l’audiovisuel ou CSA, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité ou HALDE, et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Les plus petites structures sont regroupées dans une seule action. Ainsi, l’action 6 comprend la Commission d’accès aux documents administratifs, ou CADA, le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, ou CCNE, et la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, ou CNCDH. L’action 7 comprend la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, ou CNCIS, la Commission consultative du secret de la défense nationale, ou CCSDN, et la Commission nationale de déontologie de la sécurité, ou CNDS.
J’ai tenu à faire cette énumération, car tout le monde ne peut pas connaître les actions de ce programme.
J’ai choisi d’orienter ce rapport dans deux directions, en dehors des aspects strictement budgétaires qui ont été traités par ailleurs.
Première direction, quelle est la faisabilité de la mise en place du Défenseur des droits prévu par l’article 71-1 de la Constitution ? Cette investigation ne peut que servir le Gouvernement, qui n’a fourni de réponse très affirmée sur ce sujet ni lors des débats sur la révision constitutionnelle ni plus tard.
En ce qui concerne les AAI, qui sont les premières concernées, seul le Médiateur de la République a une position très favorable, mais en imaginant une intégration de son institution accompagnée d’un élargissement de ses attributions, en évoquant notamment « pouvoir d’inspection », « pouvoir d’injonction » et « renforcement de la recommandation en équité ».
Cinq autres autorités administratives indépendantes ont justement répondu qu’elles n’avaient pas vocation à cette intégration : la Commission du secret de la défense nationale, le Comité consultatif national d’éthique, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la Commission nationale consultative des droits de l’homme et le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Quant aux dernières, elles ont marqué une opposition, le plus souvent catégorique, évoquant des arguments qui se rejoignent souvent : la perte d’indépendance et de visibilité, l’alourdissement de la procédure, la dilution de savoir-faire et le doute exprimé sur les économies budgétaires espérées d’un tel regroupement.
Même si la commission des lois comprend bien l’intérêt de réduire la profusion des instances, elle a cependant souligné la difficulté de ce regroupement, compte tenu de la diversité des missions concernées.
Le Gouvernement, quant à lui, s’est borné à une pétition de principe : on doit attendre de ce regroupement des économies en termes de moyens et une amélioration de l’efficacité de l’intervention du Défenseur des droits.
La commission des lois souligne que l’opération ne pourra se réaliser dans des conditions satisfaisantes qu’en sauvegardant la spécificité du fonctionnement de chaque instance. La possibilité ouverte par la Constitution d’assister le Défenseur des droits par un collège est une opportunité heureuse. Toutefois, votre commission pense qu’il serait opportun de prévoir plusieurs collèges, ou un collège à géométrie variable, seule solution pour garantir la compétence, l’originalité des procédures, la transparence et l’information objective des citoyens.
Seconde direction, lancée par Jacqueline Gourault, quel est le rapport efficacité-coût des correspondants locaux des autorités administratives indépendantes ? Seuls le Médiateur, la HALDE, le Défenseur des droits et le CSA disposent d’un réseau de délégués. La CNIL et la CADA bénéficient de collaborateurs externes issus de l’administration.
L’étude a porté, à partir d’un questionnaire et d’une visite dans les Yvelines, sur les délégués du Médiateur. Sur ce seul exemple limité, qui appellera un approfondissement et un élargissement dans les mois et les années à venir, mes conclusions, approuvées par la commission des lois, sont très positives.
J’ai constaté des conditions de travail satisfaisantes, une formation régulière et très approfondie, une évaluation continue des délégués au travers d’études de cas transmises par Intranet à l’ensemble du réseau, une mutualisation des savoir-faire, le tout appuyé sur une très grande qualité des délégués.
La conclusion provisoire que j’en tire est que la proximité favorise le contact avec les usagers et le traitement des dossiers ; j’ai ainsi particulièrement apprécié le rôle du Défenseur des droits en milieu carcéral. Le recrutement de haut niveau donne des délégués disponibles, motivés et compétents. Enfin, le coût est peu élevé, de l’ordre de 9 500 euros par délégué et par an.
Il demeure une question qui rejoint notre interrogation de départ : que deviendra tout cela si le Défenseur des droits dispose de délégués uniques et omniscients ? Il me semble en effet difficile, comme le pensent aussi bien le Médiateur, que la HALDE ou encore le Défenseur des enfants, d’imaginer qu’une même personne puisse, seule, exercer les compétences dévolues à plusieurs délégués.
Avant d’aborder rapidement la question budgétaire, j’évoquerai deux aspects particuliers.
D’une part, les loyers acquittés par les AAI m’ont, dans la plupart des cas, paru exorbitants, et je ne suis pas le seul à faire une telle constatation. Ils s’élèvent ainsi à 2,4 millions d’euros pour le Médiateur ou à 3,9 millions d’euros pour la HALDE. La commission rappelle aux AAI qu’il peut exister une vie ailleurs que dans les beaux quartiers du centre de Paris, et dans des locaux mieux adaptés.
Par ailleurs, la commission s’est félicitée de l’accord du ministre du budget de revaloriser à la hauteur demandée les indemnités des membres de la CNDS qui réalisent des rapports ; les parlementaires, bien sûr, ne sont pas concernés.
S’agissant de la question budgétaire, les crédits de ce programme, présentés en nette hausse par le Gouvernement, ont été réduits par l’Assemblée nationale sur l’initiative du président de la commission des lois, M. Warsmann. L’augmentation initialement prévue a été diminuée de l’ordre de 1%, soit une progression de 24 % en autorisations d’engagement et de 4,7 % en crédits de paiement.
Cependant, cette réduction n’est pas uniforme, et la HALDE est plus touchée que les autres AAI, ce qui pourrait freiner le déploiement de son réseau et gêner la mise en place de la sanction transactionnelle qui lui a été confiée depuis 2006.
Malgré ces remarques, la commission des lois a émis un avis conforme à celui de la commission des finances ; elle a jugé ce budget tout à fait convenable. Elle demande toutefois au Gouvernement d’agir avec discernement dans le cadre de la fongibilité pour que les petites structures – notamment celles de l’action 5 – puissent assurer leurs missions dans les meilleures conditions.
Sous ces réserves, mes chers collègues, la commission des lois, saisie pour avis, vous demande d’approuver le budget du programme « Protection des droits et libertés ».
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Roger Romani.
M. Roger Romani. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera uniquement sur les crédits du Secrétariat général de la défense nationale, le SGDN, et plus particulièrement sur notre politique nationale de sécurité des systèmes d’information.
Le nouveau Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale a très clairement érigé la protection des systèmes d’information en composante à part entière de notre politique de défense et de sécurité.
Au vu des attaques informatiques survenues contre l’Estonie l’an dernier et des tentatives d’intrusion dans nos propres systèmes gouvernementaux, comme dans ceux de près d’une dizaine d’autres États occidentaux, la France a enfin pris conscience d’une menace qui dépasse désormais le simple domaine de la malveillance ou de la délinquance, et qui touche véritablement aux intérêts collectifs de notre pays.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées m’a chargé d’un rapport qui constate le retard de notre pays dans la prise en compte de cette menace. Nous avons souligné que nos moyens actuels tournent autour d’une centaine d’agents, soit cinq fois moins que dans les services analogues britanniques ou allemands, que nous ne disposons pas d’un véritable système de détection d’éventuelles attaques – et je pèse mes mots – et que les réseaux publics sont encore insuffisamment sécurisés, en dehors du réseau ISIS, l’Intranet sécurisé interministériel pour la synergie gouvernementale.
Des orientations claires ont été fixées par le Livre blanc, avec la création, à partir du SGDN, d’une agence de la sécurité des systèmes d’information.
Ma question est simple, monsieur le secrétaire d’État : comment le Gouvernement va-t-il traduire dans les budgets successifs ce renforcement des moyens préconisé par le Livre blanc, renforcement que la commission des affaires étrangères juge bien évidemment impératif ?
Je dois dire que les documents budgétaires n’apportent pas, sur ce plan, les éclaircissements que l’on pouvait espérer, faute de détails sur la programmation des moyens qui seront dévolus, en 2009 et au-delà, à cette future agence de la sécurité des systèmes d’information.
Je crois savoir que les programmes d’investissement destinés notamment à développer des produits de sécurité se poursuivent de manière satisfaisante. Je m’en réjouis, car, jusqu’à présent, nos achats étaient principalement réalisés aux États-Unis ; demain, ce sera peut-être en Chine…
Nous souffrons aussi, je l’ai déjà dit, d’un déficit en moyens humains. Nous avions préconisé, dans notre rapport, un plan pluriannuel de renforcement des effectifs qui pourrait permettre à l’Agence, d’ici trois à quatre ans, de compter environ 300 personnes, l’objectif étant, à moyen terme, de disposer d’effectifs équivalents à ceux des Britanniques et des Allemands, lesquels mobilisent déjà, pour leur part, plus de 500 personnes au service de cette fonction de protection.
C’est à nos yeux une condition nécessaire pour franchir un palier significatif dans un certain nombre de domaines : la surveillance et l’audit des réseaux publics, la formation, la communication et la labellisation des produits sécurisés.
Nous ne constatons pas, dans les documents budgétaires, d’effort particulier à cet égard. Je sais qu’il faudra, dans un premier temps, mettre en place l’Agence et définir ses missions, avant de la doter progressivement en moyens. Je souhaite qu’elle ait un véritable rôle directif et qu’elle puisse imposer aux autres ministères, qui multiplient les réseaux, ses préconisations et ses directives.
Il est probable que, dans cette première phase de démarrage, les besoins en personnels puissent être couverts par des redéploiements internes. Il paraît cependant important que le Gouvernement puisse d’ores et déjà afficher ses objectifs pour les deux à trois prochaines années quant à la montée en puissance de l’Agence de la sécurité des systèmes d’information.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées souhaiterait pouvoir être pleinement rassurée sur la mise en œuvre rapide des décisions annoncées.
Sachez, mes chers collègues, que, en dehors du réseau interministériel ISIS, le seul réseau qui soit véritablement sécurisé dans notre pays est le Réseau national de télécommunication pour la technologie, l’enseignement et la recherche, dit RENATER. S’il m’arrive parfois de critiquer les universitaires et les chercheurs, je souhaiterais, en l’occurrence, que les autres ministères s’en inspirent. (Sourires.)
Cette nouvelle agence doit donner à la politique de sécurité des systèmes d’information une plus grande visibilité, mais sa réussite, monsieur le secrétaire d’État, tiendra à la fois aux moyens et à l’autorité dont elle sera pourvue.
Mes collègues de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et moi-même serons très attentifs aux décisions politiques et financières qui seront prises à cet égard dans les prochains mois, sur ce volet nouveau dont le Livre blanc a fait une priorité de notre politique de défense et de sécurité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens à nouveau dans ce débat, au nom de mon groupe politique, pour insister sur l’un des volets qui me paraît essentiel dans la politique de lutte contre les drogues et les toxicomanies : je veux parler de la prévention.
Il semble que, ces dernières années, l’action des pouvoirs publics se soit concentrée sur une politique de restriction, d’interdiction et de répression plus que sur une politique de prévention.
Certes, la hausse des taxes sur les tabacs, l’interdiction totale de fumer dans les lieux publics ou la lutte contre la violence routière ont des vertus pédagogiques. L’usage du tabac et la consommation moyenne d’alcool ont d’ailleurs diminué.
Il reste que l’usage des drogues et les abus d’alcool se sont maintenus à un niveau élevé, quand ils n’ont pas connu une hausse significative.
Ainsi, on dénombre à ce jour 1,2 million d’usagers réguliers de cannabis, dont 550 000 quotidiens. Un adolescent de dix-sept ans sur deux fume ou a fumé ! Le nombre d’usagers de cocaïne a doublé en quelques années, à l’instar des consommateurs d’ecstasy.
Enfin, l’alcool fait l’objet de consommations « problématiques », au moins ponctuellement, chez plus d’un tiers des adultes. Fait encore plus préoccupant, les ivresses répétées chez les jeunes se multiplient ces dernières années, avec notamment de nouveaux modes de consommation, comme l’usage d’alcool pour la « défonce », ou le binge drinking.
La plupart de ces usagers s’exposent à des problèmes sanitaires et sociaux graves : dépendances, comas, violences, accidents de la route, difficultés scolaires ou professionnelles. Par ailleurs, ces phénomènes favorisent l’enracinement, notamment dans les quartiers cibles de la politique de la ville, d’une économie souterraine liée au trafic de substances illicites.
Le coût pour la collectivité est évidemment très important, qu’il s’agisse des dépenses de soins ou de celles qui sont rendues nécessaires pour lutter contre les troubles de l’ordre public.
Finalement, il faut bien admettre l’échec de nos politiques de prévention. Elles ont certes contribué à une meilleure prise en charge sanitaire des personnes dépendantes et à une diminution des usages problématiques, mais, manifestement, elles n’ont pas dissuadé les usages simples ni l’expérimentation par le plus grand nombre, notamment chez les jeunes.
Ce qui me frappe par-dessus tout en effet, c’est le rajeunissement des entrées en consommation.
Les parents ont quelques raisons d’être désorientés et désemparés lorsqu’ils apprennent que treize ans est l’âge moyen du premier contact de leurs enfants avec le cannabis. Et ils sont proprement effrayés si l’on ajoute que ce contact se produit parfois dès neuf ans ! De plus, ce qui est vrai pour le cannabis l’est aussi pour l’alcool.
Tel est l’état des lieux ; il est brutal et doit sonner l’alerte sur la santé et l’avenir de nos enfants.
C’est pourquoi nous devons faire de la prévention une priorité et agir principalement sur les jeunes.
L’objectif est d’éviter ou de réduire les expérimentations, notamment précoces, de drogues illicites, d’alcool ou de tabac.
Cela passe sans doute par la réaffirmation de l’interdit et l’application de la loi ; mais évitons l’écueil d’une stigmatisation des comportements ! Attachons-nous plutôt à renforcer les connaissances des jeunes sur les risques associés à la consommation de drogues ou d’alcool et à développer leurs capacités à faire des choix éclairés.
Information et responsabilisation, voilà les maîtres mots de la prévention.
L’information sur les drogues et l’alcool a certes progressé ces dernières années. Nous avons connu quelques grandes campagnes de communication. Tout le monde se souvient du slogan « Tu t’es vu quand t’as bu ? » Et pourtant, il semble que la perception de la dangerosité des produits ou de leurs effets soit loin d’être suffisante.
Il me paraît indispensable de fonder l’information sur des bases scientifiques validées. De nouvelles études sont nécessaires sur les risques, mais aussi sur les liens entre consommation de drogues, parcours scolaire et délinquance.
Pour se sentir concernés et responsables de leur destin, les jeunes doivent pouvoir dialoguer sur cette question. C’est pourquoi la diffusion des messages de prévention doit passer par les enseignants, les médecins et, bien sûr, les parents, dont il faut renforcer les capacités éducatives par un discours public clair et crédible. Il faut les aider à être en mesure de repérer les usages le plus précocement possible chez leurs enfants.
Quoi qu’il en soit, il faut mettre de la sanction dans l’éducation et de l’éducation dans la sanction. (M. le secrétaire d’État acquiesce.)
Le Gouvernement a adopté, en juillet dernier, un plan de lutte contre les drogues et les toxicomanies qui comporte des mesures concrètes et intéressantes. Toutefois, pour espérer obtenir des résultats, il faudra faire travailler ensemble tous les acteurs et mettre en place des formations animées par des formateurs compétents. Nous comptons sur vous, monsieur le secrétaire d’État. (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, compte tenu du peu de temps de parole dont nous disposons, je concentrerai mon propos sur le programme « Protection des droits et libertés ».
Ce programme recouvre désormais les crédits de onze autorités administratives et instances indépendantes. Tout le monde les connaît, et je ne les citerai donc pas.
La majorité sénatoriale exprime depuis 2006 la volonté de regrouper au sein d’un programme spécifique les différentes autorités et instances afin de « protéger les crédits des autorités administratives indépendantes », de les « sanctuariser ». Il s’agissait de tenir compte de la spécificité budgétaire que leur confère leur statut et d’affirmer leur autonomie financière. Jusqu’à cette année, le Gouvernement a toujours refusé.
Ce programme m’inspire deux séries d’observations, qui porteront, d’une part, sur la baisse des crédits et, d’autre part, sur l’avenir de certaines autorités administratives.
Première observation, le projet de loi de finances initiale prévoyait une augmentation des crédits de toutes les autorités administratives indépendantes, à l’exception de ceux du Médiateur de la République.
Que l’on considère ces augmentations comme suffisantes ou pas, l’Assemblée nationale, par la voix du président de sa commission des lois, a décidé d’envoyer un signal extrêmement négatif à certaines de ces autorités, et, d’une manière générale, à tous les acteurs de la défense des droits et des libertés fondamentales. M. Jean-Luc Warsmann a fait adopter un amendement tendant à réduire les crédits des autorités dépendant de l’action 2 « Commission nationale de l’informatique et des libertés », de l’action 3 « Conseil supérieur de l’audiovisuel », et de l’action 4 « Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité ».
Cet amendement vise également des autorités dépendant de l’action 6 « Autres autorités indépendantes », notamment la Commission d’accès aux documents administratifs, le Comité consultatif national d’éthique et la Commission nationale consultative des droits de l’homme, et de l’action 7 « Sécurité et protection des libertés », en particulier la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la Commission consultative du secret de la défense nationale et la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
Les seules autorités à ne pas être touchées par cet amendement sont le Médiateur de la République – les crédits qui lui étaient attribués étaient en baisse de 0,15 % avant même le dépôt de l’amendement de M. Warsmann – et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui vient à peine d’être nommé.
Il est étonnant de vouloir défendre l’autonomie financière des autorités administratives indépendantes, de reconnaître la spécificité de leur statut et, dans le même temps, de réduire leurs crédits pour 2009. En effet, une baisse de crédits est toujours perçue comme une défiance et une sanction à l’égard de leur action.
La réduction des crédits pour 2009 s’élève à 896 079 euros. M. Warsmann déclare ceci : « Notre pays traverse une crise très difficile. Nous voyons dans nos permanences des concitoyens qui ne parviennent plus à payer les charges de la vie courante. Dans de tels moments, il nous semble que tous les services de l’État doivent adopter un fonctionnement modeste et économe. »
Bien qu’il s’agisse d’un sujet grave, de tels propos prêtent à rire. Un quart du millième du produit de l’ISF suffirait à maintenir les crédits alloués aux autorités administratives indépendantes pour 2009 ! On devrait, me semble-t-il, être plus économe de paroles lorsque l’on représente le peuple !
La Commission nationale consultative des droits de l’homme se plaint presque systématiquement, et c’est ennuyeux, de ne pas être saisie des projets de loi.
Les avis de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, en constante augmentation, dérangent. La commission l’a d’ailleurs appris à ses dépens en 2005, lorsque son budget a été diminué de 100 000 euros.
Enfin, alors que les créations de fichiers augmentent de façon exponentielle, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui a connu une augmentation de son activité de 600 % en quatre ans et qui doit faire face à de nouvelles attributions et compétences, voit ses crédits diminuer. Craint-on aussi la CNIL ?
Mme Nathalie Goulet. Oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais c’est surtout la HALDE qui est touchée, puisqu’elle perd 527 388 euros. Pourtant, le nombre de réclamations est en constante augmentation.
Quel lamentable affichage à l’égard des autorités indépendantes !
Ma seconde observation concerne l’articulation entre certaines de ces autorités administratives et la création du Défenseur des droits, à laquelle nous étions défavorables pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, nous ne connaissions pas le périmètre d’action du Défenseur des droits, et ce périmètre n’est d’ailleurs toujours pas défini aujourd’hui. Je crains que ce projet de budget ne recèle une incohérence totale entre l’existence et le fonctionnement d’autorités administratives indépendantes et le Défenseur des droits.
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, poste confié à M. Jean-Marie Delarue, a été institué en 2007. On se demande déjà, comme l’a d’ailleurs plus ou moins laissé entendre Mme le garde des sceaux, s’il ne sera pas lui aussi rattaché au Défenseur des droits.
Le président de la Commission nationale de déontologie de la sécurité est également hostile à une fusion de son institution avec celle du Défenseur des droits. Il a plaidé pour le maintien des différentes instances.
On peut une fois encore se demander si ces sanctions budgétaires ne sont pas annonciatrices de regroupements que nous pourrions déplorer, quelques-unes de ces autorités ayant en effet manifesté une certaine indépendance à laquelle je suis pour ma part très attachée. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Krattinger, au nom de la commission des finances, a parfaitement décrit les contours de la mission. Je vais donc m’attacher à apporter des éléments de réponses aux différentes interrogations qu’il a soulevées.
Tout d’abord, monsieur le rapporteur spécial, il apparaît assez logique que, compte tenu de ses fonctions, le Défenseur des enfants soit, d’un point de vue budgétaire, rattaché à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
À partir du moment où les crédits de plusieurs autorités administratives indépendantes sont inscrits dans un programme spécifique rattaché au Premier ministre, je comprends que la question du rattachement des crédits du Défenseur des enfants puisse être à nouveau posée. Rien n’est figé. Cette question mérite d’être approfondie avec M. Xavier Bertrand et Mme Nadine Morano qui tous deux exercent des responsabilités à cet égard.
Les crédits du Service d’information du Gouvernement connaissent une progression notable, passant de 5,6 millions d’euros à 22,4 millions d’euros. Cette augmentation est la conséquence du regroupement qui est opéré. Le projet de loi de finances prévoit une taxation des budgets de communication des différents ministères. Cette progression, qui résulte pour l’essentiel d’un simple redéploiement interministériel, vise non pas à augmenter globalement les crédits de communication du Gouvernement, mais à renforcer la cohérence des actions qui sont conduites en ce domaine.
Les campagnes à venir seront de plusieurs ordres. Compte tenu de la conjoncture, certaines concerneront bien évidemment le domaine économique et financier.
Monsieur Krattinger, 190 millions d’euros sont inscrits au programme « Présidence française de l’Union européenne ». Ces crédits ont été fixés après un dialogue entre le secrétariat général et les différents ministères concernés : trois auditions ont ainsi eu lieu afin d’évaluer les besoins des ministères concernés au titre de l’exercice de la présidence de l’Union par la France. Ces besoins ont été affinés au fur et à mesure des rencontres.
Ces crédits, et c’est un point important, n’ont pas été fixés par rapport à ceux de 1995 ou de 2000 pour deux raisons majeures.
En premier lieu, l’Union européenne a été élargie et comprend désormais vingt-sept États.
En second lieu, nous avons observé ce qu’avaient fait des pays de dimensions similaires et animés d’ambitions comparables aux nôtres, l’Allemagne notamment. Nous constatons que les budgets sont du même ordre de grandeur, aux environs de 180 millions d’euros, auxquels il faut ajouter, pour la présidence allemande, les efforts des Länder.
Grâce à une gestion rigoureuse – et je salue ici le travail qui a été accompli par le secrétaire général de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne, l’ambassadeur Claude Blanchemaison –, nous serons effectivement en mesure, monsieur le rapporteur spécial, d’économiser de l’ordre d’une dizaine de millions d’euros sur cette programmation initiale.
Dans les circonstances actuelles, nous pouvons nous en réjouir, d’autant plus que notre présidence – je ne reviens pas sur ce point – aura été à la fois une présidence de gestion de crise, donc d’imprévus, et une présidence assumant un certain nombre de priorités normales dans l’exercice de ses responsabilités.
Vous avez également évoqué les éléments relatifs au Service d’information du Gouvernement. Je vous remercie de l’appréciation positive que vous avez portée sur les regroupements effectués dans le cadre de cette mission.
J’en viens à l’intervention qu’a faite M. Barbier au nom de la commission des affaires sociales.
En ce qui concerne la MILDT, M. Gilbert Barbier a parfaitement mis en évidence l’augmentation des moyens attribués à la lutte contre la drogue et la toxicomanie. J’ai bien pris note de la nécessité d’assurer une meilleure coordination avec les services du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, notamment la direction générale du travail, sur les problématiques liées à la drogue en tant que cause d’accidents du travail. Je crois que vous avez parfaitement raison sur ce point.
De la même manière, une meilleure coordination est nécessaire avec les services de l’éducation nationale. L’étude intitulée ReLION traite notamment des moyens d’améliorer, au travers de l’éducation, les actions de prévention contre la toxicomanie qui sont menées par les services de l’État dans les départements.
J’ai bien saisi votre argumentation s’agissant de la question du renforcement des éléments permettant à la France de conserver toute sa place dans la lutte internationale contre la drogue. Vous nous encouragez à juste titre à focaliser notre attention sur le trafic qui existe en Afrique et à créer à cette fin un centre sur le modèle du CIFAD. Nous devrons examiner ce sujet avec les ministères en charge de la santé et du développement.
Vous avez également évoqué la nécessité de maintenir les postes de formateurs antidrogues au sein des services départementaux de la direction de la santé de la Martinique. Mon collègue Roger Karoutchi n’a pas manqué d’attirer l’attention de Mme Roselyne Bachelot-Narquin sur ce point, de sorte que celle-ci puisse relayer la préoccupation qui est la vôtre. Vous pouvez ainsi constater toute l’efficacité et tout le sens de l’anticipation de Roger Karoutchi ! Je n’ai rien à ajouter à cela.
Vous souhaitez à juste raison que l’OFDT puisse élaborer un indicateur des décès attribuables chaque année aux drogues. Cet observatoire dispose d’ores et déjà de trois sources de données lui permettant de construire un indicateur annuel fiable sur nombre de décès liés à la drogue : le registre des décès détenu par l’INSERM, le fichier de l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants, ou l’OCTRIS, et l’enquête dénommée DRAMES, ou Décès en relation avec l’abus de médicaments et de substances, qui s’appuie sur des données recueillies par les experts toxicologues mandatés par la justice. Néanmoins, nous devons progresser dans ce domaine.
Par ailleurs, intervenant au nom de votre groupe, monsieur Barbier, vous avez évoqué, employant des mots très justes et extrêmement forts, la nécessité de renforcer l’action préventive dans la lutte contre les drogues, ce à quoi je souscris entièrement. Le Gouvernement s’en préoccupe également.
Premièrement, nous constatons un rajeunissement des entrées en consommation de la drogue, et vous avez eu parfaitement raison d’insister sur ce point. Deuxièmement, des économies souterraines se développent bien sur ces bases. Troisièmement, il y a destruction du lien social et des œuvres éducatives. Comme vous l’avez parfaitement résumé au sein d’une formule que je reprends à mon compte, « il faut mettre de la sanction dans l’éducation et de l’éducation dans la sanction ». Cela signifie non pas que l’action préventive a échoué, mais qu’il nous faut maintenir et renforcer la vigilance dans ce domaine.
Un renforcement de la coordination avec l’éducation nationale est également nécessaire. Les enjeux en la matière sont importants, compte tenu du constat, très juste, que vous avez établi. Enfin, il faut renforcer les coordinations avec le secteur hospitalier et les actions menées en termes de santé. Le coût est effectivement important non seulement pour l’économie, mais aussi pour l’ensemble de la société et pour l’avenir de notre pays. Vous avez parfaitement raison ! J’ajouterai qu’il faut sans doute aussi renforcer la coordination au niveau européen.
J’en viens à l’intervention de M. Peyronnet, rapporteur pour avis de la commission des lois. Vous avez parfaitement recensé les regroupements faits, pour les différentes autorités administratives indépendantes, dans le cadre du programme « Protection des droits et libertés ». Je vous remercie également de l’attention très forte que vous avez portée au Défenseur des droits et à la manière dont il doit exercer ses responsabilités.
Je ne reviendrai pas sur la description que vous avez faite. Je confirme que nous devons identifier les entités qui seront regroupées sur le périmètre de cette nouvelle institution, prévue par la réforme des institutions : certainement le Médiateur de la République, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, le Défenseur des enfants, dont le budget, comme nous l’avons vu, relevait de la mission « Justice ».
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté doit lui aussi voir ses attributions relever du Défenseur des droits ? (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) Madame Borvo Cohen-Seat, cette question n’est pas d’actualité ! Nous avons créé un Contrôleur général des lieux de privation de liberté : ce contrôleur devra continuer à exercer ses fonctions. Il en va de même pour la Commission d’accès aux documents administratifs.
Ce qui avait été évoqué au Parlement, particulièrement au Sénat, concerne l’éventuel rattachement de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. En la matière, il faut très clairement adopter une démarche pragmatique. Dans un premier temps, on donnera au Défenseur des droits un périmètre de compétences assez circonscrit qu’on étendra ultérieurement au regard de son mode de fonctionnement.
La question posée sur la composition et les modes de fonctionnement du collège est également pertinente. Elle doit être examinée sans a priori. Différents modes de fonctionnement sont effectivement possibles : un collège unique, un collège assorti de collègues spécialisés ou deux types de collèges. Nous verrons comment la réflexion sur ce sujet évoluera dans le cadre des travaux qui seront menés au cours de ce trimestre. Les positions ne sont pas figées.
En ce qui concerne le Médiateur de la République, auquel Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a également fait allusion, une question se pose quant à l’avenir de ses locaux. Vous avez souligné que ces derniers n’avaient pas forcément à être situés dans le centre de Paris, dans l’un des quartiers les plus huppés de la capitale. Cette question doit effectivement s’envisager dans un contexte nouveau, puisque, comme je l’ai souligné, la révision constitutionnelle de juillet dernier conduira le Médiateur de la République à se fondre dans l’institution du Défenseur des droits dont le champ d’action sera élargi. Une réflexion nouvelle devra donc être menée sur les locaux du Médiateur.
Toutefois, compte tenu des baux signés, nous ne pouvons pas, à court terme – « malheureusement », allais-je dire, mais c’est ainsi –, revenir sur certains engagements.
Monsieur Peyronnet, j’ai bien pris note du jugement extrêmement positif que vous portez sur les travaux des réseaux territoriaux et des délégués des autorités administratives indépendantes. Il convient en la matière de conjuguer proximité et modernité, notamment grâce à l’utilisation des technologies de l’information.
Je voudrais également préciser, à l’intention de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, que les crédits du Médiateur de la République ne sont pas réduits. Un amendement du Gouvernement, adopté en seconde délibération à l’Assemblée nationale, abonde de 60 000 euros ces crédits de telle sorte que leur progression, entre 2008 et 2009, sera désormais positive.
J’en viens maintenant à l’intervention de M. Romani. Vous avez mentionné un enjeu extrêmement important, monsieur le sénateur. Effectivement, nous devons prendre conscience du risque grandissant que représente la cybercriminalité et, de toute évidence, il nous faut adapter nos moyens à cet égard et combler un retard au niveau tant national qu’européen.
C’est pourquoi nous souhaitons que la cybercriminalité soit prise en compte parmi les risques nouveaux à envisager dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense. (MM Roger Romani et Jean-Pierre Fourcade acquiescent.)
Pour intégrer cette préoccupation, nous avons demandé une révision de la stratégie européenne de sécurité. Ce dossier sera examiné lors du Conseil européen des 11 et 12 décembre prochain.
La création de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information s’inscrit clairement dans ce cadre, comme vous l’avez fort justement rappelé. Sa montée en puissance débutera à compter du 1er janvier 2009, et l’agence sera, d’ici à 2012, dotée des moyens humains et matériels qui lui permettront d’accomplir sa mission dans de meilleures conditions.
À cette date, son effectif dépassera 250 personnes, monsieur Romani, ce qui représente pratiquement un doublement par rapport aux moyens en personnel qui sont, aujourd’hui, dédiés aux mêmes tâches. Les crédits d’investissement, de masse salariale et de fonctionnement courant connaîtront également une progression significative, en cohérence avec cette montée en puissance, pour atteindre une somme d’environ 90 millions d’euros en 2012.
Vous avez souligné à juste titre que cette agence, dès lors qu’elle est mise en place, doit avoir un rôle directif par rapport aux autres ministères, ceci pour tenir compte de ce nouveau défi en termes de criminalité et de terrorisme, et de l’absolue nécessité d’y répondre. Vous avez à mon avis parfaitement raison.
L’agence doit avoir un rôle de coordination et de centralisation et être en mesure de travailler avec ses correspondants européens. Il faut également que les différents ministères ne poursuivent pas des politiques par trop autonomes et éparpillées en termes de sécurisation. Votre préoccupation est parfaitement légitime.
J’ai bien retenu ce que vous avez dit de votre évaluation du système de sécurisation des différents ministères, et bien compris que RENATER pouvait constituer un modèle dans ce domaine. Je ne reviens pas sur ce point que vous avez souligné.
Madame Borvo Cohen-Seat, il ne faut pas confondre diminution des crédits et ralentissement de l’augmentation des crédits ! Ces deux données sont différentes, s’agissant notamment d’autorités indépendantes ! Vous comprendrez que je sois tout de même assez intéressé au maintien des crédits alloués aux différentes autorités administratives indépendantes et que je sois vigilant sur ce point.
Vous avez souligné que les crédits qu’il était prévu d’allouer à la CNIL pour 2009 avaient été réduits de 96 000 euros : cela correspond néanmoins à une augmentation des crédits limitée à 13,2 %, au lieu des 15,5 % initialement prévus. Il s’agit donc, là encore, d’un ralentissement de l’augmentation, et non pas d’une réduction des crédits.
Enfin, j’ai dit toute l’attention avec laquelle nous veillons à ce que le contrôleur général des lieux de privation de liberté puisse exercer sa mission, qui est parfaitement nécessaire, dans les meilleures conditions possibles. Son rôle est extrêmement important et représente une innovation tout à fait fondamentale.
Sous le bénéfice de ces explications, je saurais gré à la Haute Assemblée de bien vouloir approuver les crédits relatifs à cette mission excellemment présentée par les différents rapporteurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste et du RDSE.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Direction de l’action du Gouvernement |
490 081 084 |
538 912 854 |
Coordination du travail gouvernemental |
398 564 100 |
391 964 100 |
Dont titre 2 |
127 378 000 |
127 378 000 |
Présidence française de l’Union européenne |
|
69 531 770 |
Protection des droits et libertés |
91 516 984 |
77 416 984 |
Dont titre 2 |
43 642 000 |
43 642 000 |
L'amendement no II-130, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Coordination du travail gouvernemental Dont Titre 2 |
6 217 000 5 495 000 |
6 217 000 5 495 000 |
||
Présidence française de l'Union européenne |
||||
Protection des droits et libertés Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
6 217 000 |
6 217 000 |
||
SOLDE |
- 6 217 000 |
- 6 217 000 |
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. Le présent amendement a pour objet de tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » de la décision de transférer les crédits de la direction du développement des médias des services du Premier ministre au ministère de la culture et de la communication. Il ne représente donc que la traduction budgétaire littérale de ce changement de rattachement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. La commission des finances prend acte du choix du Gouvernement de transférer les crédits de la direction du développement des médias des services du Premier ministre au ministère de la culture et de la communication, même si elle pense qu’il aurait peut-être été plus logique d’opérer un transfert de ces crédits vers la mission « Médias » plutôt que vers la mission « Culture ». Il s’agit en fait de l’organisation interne du Gouvernement, sur laquelle le Parlement n’a pas à se prononcer au fond.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion un amendement tendant à insérer un article additionnel, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».
Article additionnel après l'article 59 duodecies
Mme la présidente. L'amendement no II-46, présenté par M. Peyronnet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l'article 59 duodecies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Dans le premier alinéa de l'article L. 1412-4 du code de la santé publique, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
II. – Dans le premier alinéa de l'article L. 2312-3 du code de la défense, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
III. – Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 13 de la loi no 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
IV. – Dans le premier alinéa de l'article 15 de la loi no 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
V. – Dans le premier alinéa de l'article 18 de la loi no 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
VI. – Dans la première phrase de l'article 14 de la loi no 2000-494 du 6 juin 2000 portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité, les mots : « programme intitulé : “Coordination du travail gouvernemental” » sont remplacés par les mots : « programme de la mission “Direction de l'action du Gouvernement” relatif à la protection des droits et des libertés fondamentales. ».
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis. Cet amendement de simple coordination a pour objet de tirer les conséquences de la création du nouveau programme « Protection des droits et libertés », notamment en modifiant les dispositions mentionnant le programme « Coordination du travail gouvernemental » dans les lois qui portent création des différentes autorités administratives indépendantes ainsi que dans un article du code de la santé publique et dans un article du code de la défense.
On notera surtout que l’amendement fait référence à la nature du programme et non à son intitulé, afin d’ouvrir la possibilité de modifier ultérieurement la maquette budgétaire.
Cet amendement me paraît donc simple, utile et indispensable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. Notre excellent collègue vient de nous présenter un excellent amendement, sur lequel la commission des finances émet un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. Je n’ai rien à ajouter aux explications qui viennent d’être apportées à l’appui de cet amendement de clarification, auquel le Gouvernement est également favorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 59 duodecies.
Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission : « Direction de l’action du Gouvernement ».
Pouvoirs publics
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
La parole est à M. le président de la commission des finances, en remplacement de M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’exercice de cet après-midi est un peu particulier : non seulement vous vous apprêtiez à entendre un nouveau rapporteur spécial, mais, en outre, nous sommes dans une situation budgétaire assez inédite.
Sur le premier point, j’ai le plaisir de vous présenter l’analyse conduite par le rapporteur spécial, M. Henri de Raincourt, qui m’a demandé de le suppléer. Il est en effet retenu par un engagement impérieux pris alors que le calendrier de la discussion budgétaire n’était pas encore consolidé.
Sur le second point, la situation budgétaire, il faut relever que le projet de loi de finances dont nous débattons est empreint d’une forte incertitude. En effet, l’inflation retenue pour la préparation du budget pour 2009 était de 2 % ; le Gouvernement a depuis révisé cette estimation et l’a ramenée à 1,5 %. Il n’est pas exclu que d’autres variations interviennent encore.
De plus, le contexte économique ambiant n’est pas sans conséquence pour la mission « Pouvoirs publics », notamment en ce qui concerne les dotations des assemblées parlementaires.
La présentation en séance, au Palais-Bourbon, des crédits des « Pouvoirs publics » a été marquée, le 13 novembre dernier, par l’adoption de deux amendements identiques, sur l’initiative du président de l’Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, et de notre collègue député M. Jean Launay, rapporteur spécial, amendements visant à ramener la dotation de l’Assemblée nationale pour 2009 très exactement au niveau voté en loi de finances initiale pour 2008, soit 533,910 millions d’euros, ce qui s’est traduit par une réduction de 20,290 millions d’euros.
S’agissant du Sénat, l’augmentation initiale des crédits était plus mesurée puisqu’elle était fixée à 1,39 %, soit moins que l’inflation prévisionnelle. Notre assemblée avait donc d’emblée fait le choix de réduire en volume ses crédits de fonctionnement et d’investissement. Cet effort mérite d’être souligné, car nos effectifs se sont accrus du fait de la création de douze sièges et donc de l’arrivée de douze collègues supplémentaires. Nous le voyons bien cet après-midi. (Sourires.)
Comme l’indiquait le président du Sénat, M. Gérard Larcher, dans son discours du 14 octobre 2008, en ces temps qui exigent des efforts importants de nos compatriotes et de l’État, notre institution sait faire preuve d’exemplarité en matière de dépenses. C’est ainsi que nous aurons à nous exprimer, dans quelques minutes, sur un amendement visant à maintenir la dotation « Sénat », en euros courants, très exactement au niveau de celle de 2008. L’effort ainsi réalisé portera sur 4,550 millions d’euros, pour un budget global de 327,694 millions d’euros.
Mes chers collègues, la mission « Pouvoirs publics » connaît donc un destin budgétaire moins « paisible » que les années précédentes !
Pour le reste, je me contenterai d’évoquer deux des programmes figurant dans la mission « Pouvoirs publics ».
La Présidence de la République, tout d’abord, verra sa dotation augmenter, en 2009, de 2,11 % par rapport aux crédits demandés pour 2008. Celle-ci s’élèvera donc à 112,336 millions d’euros. Afin que soit parachevé le processus de transparence et de sincérité, le document budgétaire que nous avons reçu mentionne la nécessité de réévaluer deux postes de dépenses qui avaient été sous-estimés en 2008 : les pensions des militaires affectés à la surveillance de l’Élysée, pour 4,223 millions d’euros, et les frais d’entretien des avions présidentiels, pour 5 millions d’euros. Je crois qu’il faut souligner un effort qui, pour la première fois depuis 1958, permet d’afficher un coût complet et devrait rendre possible une analyse sereine et objective de ces crédits.
Le Conseil constitutionnel, quant à lui, connaîtra en 2009 une situation exceptionnelle liée à l’engagement de travaux importants, pour près de 5 millions d’euros. De ce fait, ses crédits augmenteront de 60,7 % par rapport à 2008 et s’élèveront à 12,460 millions d’euros. Mes chers collègues, j’ai eu l’occasion de visiter les locaux du Conseil constitutionnel : que les choses soient bien claires, l’investissement programmé répond à une absolue nécessité !
Eu égard à ces évolutions, le suivi de l’exécution des crédits en cours d’année prendra donc un intérêt encore accru par rapport aux exercices précédents, et le rapporteur spécial ne manquera pas de vous en rendre compte à l’occasion de l’examen du prochain projet de loi de règlement des comptes de l’année 2008.
Sous le bénéfice de ces observations, et en attendant les débats qui vont s’engager, je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Pouvoirs publics », accompagnés de l’amendement qui vous sera présenté. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. –Mme Anne-Marie Escoffier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, en remplacement de M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois.
Mme Jacqueline Gourault, en remplacement de M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je parlerai donc au nom de mon collègue Yves Détraigne.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il n’y a que des intérimaires, cet après-midi ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. La commission des lois a examiné les dotations allouées par le projet de loi de finances pour 2009 au Conseil constitutionnel, à la Haute Cour et à la Cour de justice de la République.
Il apparaît que la dotation allouée en 2009 au Conseil constitutionnel s’élèverait à 12,4 millions d’euros, contre 7,7 millions d’euros en 2008, soit une progression de 60,7 %.
Cette augmentation de 4,7 millions d’euros correspond essentiellement à des crédits alloués aux opérations exceptionnelles, qui passent de 930 000 euros en 2008 à 5,43 millions d’euros en 2009. Ces crédits portent, d’une part, sur des travaux de restructuration et sur la rénovation des locaux du 8, rue de Montpensier, restitués au Conseil constitutionnel par le ministère de la culture, et, d’autre part, sur les commémorations du cinquantenaire du Conseil. Je tiens à souligner que ce dernier a communiqué à M. Yves Détraigne des éléments très détaillés sur ces dépenses.
Le Conseil constitutionnel accomplit en outre un effort de rationalisation de ses effectifs : le nombre des fonctionnaires de catégorie A a augmenté, passant de seize à vingt entre 2004 et 2008, pour faire face au développement de l’activité juridictionnelle ; parallèlement à ce renforcement, le Conseil constitutionnel a choisi de réaliser des économies par ailleurs en ne remplaçant pas des chauffeurs, secrétaires et agents après leur départ à la retraite.
Après cinquante années d’existence, le Conseil constitutionnel a acquis au sein de nos institutions une place essentielle. Son apport à l’État de droit n’est plus à démontrer, et son rôle se développera encore avec la mise en œuvre de l’exception d’inconstitutionnalité, qui fera l’objet dans les prochains mois d’une loi organique.
La dotation allouée à la Cour de justice de la République pour l’année 2009 s’élèverait à 845 000 euros contre 874 000 euros en 2008, soit une quasi-stabilité.
Cette dotation permet à la Cour de faire face à une activité très fluctuante. La Cour de justice de la République a ainsi reçu vingt-six requêtes en 2007 contre soixante-six en 2006 et quatre-vingt-dix-sept en 2005. Elle a examiné trente-cinq requêtes en 2007, réduisant le stock de requêtes en instance à huit.
Sur ces trente-cinq requêtes, la commission des requêtes en a classé trente-et-une et en a jugé quatre irrecevables. Entre janvier et août 2008, aucune requête n’a été transmise au procureur général près la Cour.
Enfin, la mission « Pouvoirs publics » ne comporte aucun crédit pour la Haute Cour, qui a succédé à la Haute Cour de justice depuis la loi constitutionnelle du 23 février 2007 relative au statut pénal du chef de l’État.
La Haute Cour, instituée pour examiner les propositions de destitution du Président de la République, ne s’est jamais réunie, comme vous le savez.
À cet égard, il convient de souligner que la loi organique prévue par l’article 68 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 février 2007, n’a toujours pas été soumise au Parlement. La commission des lois l’a relevé lors de la discussion de la dernière révision constitutionnelle.
Je vous poserai donc une seule question, monsieur le secrétaire d'État : le Gouvernement envisage-t-il d’intégrer les dispositions relatives à la Haute Cour dans l’un des textes organiques qui seront soumis au Parlement pour mettre en œuvre la révision du 23 juillet 2008 ou de soumettre dans les prochains mois au Parlement un projet de loi organique spécifique ? (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l’UMP.– Mme Anne-Marie Escoffier applaudit également.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, si le budget de la mission « Pouvoirs publics » n’est pas, et de loin, le plus important des budgets de la loi de finances, avec seulement 1 050 millions d’euros, il n’en reste pas moins un budget à la symbolique forte puisqu’il a pour but de permettre le financement d’institutions aussi fondamentales que la Présidence de la République, l’Assemblée nationale, le Sénat, le Conseil constitutionnel et la Cour de justice de la République, autant dire la clé de voûte de nos institutions.
S’ajoute à cette mission, mais pour la dernière fois, la dotation spécifique concernant le service des indemnités des représentants français au Parlement européen.
C’est dire l’honneur qui est aujourd’hui le mien d’exprimer ici mon opinion sur cette annexe au projet de loi de finances prévue par l’article 51, alinéa 5°, de la loi organique du 1er août 2001, avec la rigueur qu’il convient d’avoir toujours à l’esprit lorsque l’on aborde le plus haut domaine de la République, avec aussi – je tiens particulièrement à souligner ce second point – cet absolu devoir d’exemplarité qui, selon moi, doit caractériser la représentation nationale dans l’exercice de ses fonctions.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Excellent !
Mme Anne-Marie Escoffier. La démocratie, disent les humoristes, est comme la santé : elle n’a pas de prix mais elle a un coût ! Un coût qui, au cas particulier, se doit d’être raisonné et raisonnable afin que l’indispensable organisation des pouvoirs publics n’obère pas trop lourdement le budget de l’État.
Je ne peux, dans ce cadre, que me féliciter de la limitation de la progression des crédits du Sénat, soit une augmentation de 1,39 %, inférieure à celle de l’inflation, malgré les charges nouvelles liées à l’accroissement du nombre de sièges de sénateurs.
Je note d’ailleurs avec intérêt que le président de la Haute Assemblée a manifesté sa volonté d’œuvrer à une bonne gestion des crédits, sur la base des prochaines conclusions des audits de rationalisation des dépenses.
Il m’a été donné, depuis que je me trouve parmi vous, mes chers collègues, de mesurer que c’est non pas la masse de sa dotation budgétaire qui permet au Sénat de s’imposer dans le paysage politique de la nation, mais bien la qualité de ses travaux et la force des convictions de ceux qui animent ses débats. Ensemble, ces deux traits viennent amenuiser les critiques portées régulièrement par certains détracteurs.
Dans cet esprit, je n’aurais pu que déplorer l’augmentation prévisionnelle initiale de 3,8 % des crédits de l’Assemblée nationale si un amendement de réduction de ces crédits proposé par son président n’avait été voté.
Dans le contexte économique actuel, nos concitoyens ne pourraient en effet comprendre que les parlementaires ne s’appliquent pas à eux-mêmes les obligations de restriction budgétaire imposées aux autres secteurs d’activité. Il importe, en effet, qu’un effort réel soit fait en direction des volumes de dépenses, permettant ainsi que le budget des pouvoirs publics, s’il n’est pas en baisse, contienne au moins sa progression en demeurant égal à ce qu’il était en 2008.
Ce sera donc le cas du Sénat et de l’Assemblée nationale, marqués par « une dotation stabilisée en volume », pour reprendre l’expression du député Jean Launay, rapporteur spécial de cette mission à l’Assemblée nationale.
Mais – en effet, il y a à mon sens un « mais » dans ce tableau par trop idyllique – tel n’est pas tout à fait le cas de la Présidence de la République, qui voit son budget augmenter de 2,11 %.
Certes, on m’objectera que ce budget prend en compte un certain nombre de dépenses transférées, qui auraient été sous-évaluées en 2008, notamment des pensions de militaires et de gendarmes affectés à la protection du Palais ou le coût de fonctionnement des avions présidentiels.
Si l’on est en droit de s’interroger sur la mauvaise appréciation du niveau des pensions, en revanche, personne ne peut ignorer qu’il y a des dépenses imprévues et imprévisibles qui ne peuvent être affectées sur une ligne budgétaire spécifique. Mais il existe, me semble-t-il, une mission « Provisions » permettant un tel rééquilibrage sans qu’il soit besoin d’abonder le budget de l’exercice suivant.
Dès lors, n’est-on pas en droit de se demander si la somme de 112,3 millions d’euros composant l’ensemble du budget de l’Élysée n’est pas quelque peu excessive, à l’heure où la rigueur devrait s’imposer ici comme ailleurs ? N’est-ce pas du plus haut niveau de l’État que devrait être donné l’exemple ?
M. Bernard Vera. Oui !
Mme Anne-Marie Escoffier. Le Conseil constitutionnel, quant à lui, voit sa dotation augmenter de plus de 60 %, pour les raisons qui ont été évoquées et sur lesquelles je ne reviendrai pas.
Quant à la Cour de justice de la République, on ne peut qu’apprécier la reconduction à l’identique de sa dotation budgétaire.
Je ne voudrais pas conclure mon propos sans souligner tout l’intérêt, à mon sens, de la présentation des modalités d’évaluation de la dépense publique sur la base de critères objectifs, tels que prévus à l’article 51 de la LOLF. Elle est le garant du processus de transparence et de sincérité dans lequel M. le rapporteur spécial a fort justement dit que s’inscrit désormais le Gouvernement.
Dès lors, si le Sénat peut se féliciter de l’effort de transparence et de sincérité accompli dernièrement, principalement par la Présidence de la République dont le fonctionnement avait pu naguère être jugé opaque, il n’en reste pas moins que des économies plus significatives encore doivent être réalisées au plus haut niveau de l’État, surtout en cette période de récession économique qui va perturber la vie de nos concitoyens.
Je crois ne pas me tromper en disant que beaucoup d’entre nous ont apprécié que, pour de multiples raisons, notamment budgétaires, le conseil des ministres ait opportunément choisi de ne plus se délocaliser en province, comme il l’avait fait à Strasbourg ou à Ajaccio.
Certes, je n’irai pas jusqu’à préconiser un retour à la rigueur légendaire d’un président Poincaré qui distinguait la cassette d’affranchissement postal de l’État de la sienne propre, ou à celle d’un général de Gaulle qui veillait scrupuleusement à la performance de son « panier de la ménagère » quand l’un des siens venait déjeuner à l’Élysée ! Et pourtant !
C’est donc sur un sourire final et sur les recommandations qu’il sous-entend que les membres de notre groupe, dans la diversité qui fait la richesse de ce dernier, choisiront librement et en conscience d’approuver ou non ces crédits de la mission « Pouvoirs publics ». (Applaudissements sur certaines travées du RDSE. – Mme Gisèle Printz et M. le président de la commission des finances applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le budget de la mission « Pouvoirs publics » ne se prête pas véritablement à une controverse sur le montant des crédits en jeu, mais bien plus à une analyse sur le sens que l’on entend donner à l’activité de nos institutions.
Au-delà du montant des crédits de la mission – un peu plus d’un milliard d’euros –, je souhaite formuler quelques observations.
On notera d’emblée que le Sénat se trouve convié à voter un amendement de maintien en euros courants de sa dotation de 2008, refusant donc toute majoration de ses moyens pour 2009.
Sans vouloir donner plus d’importance qu’il n’en faut à cette initiative présentée comme manifestant de la part de notre assemblée une forme de « participation » à l’effort de maîtrise des finances publiques, permettez-moi simplement de souligner que la progression récente des crédits des deux assemblées a des origines qui sont à chercher du côté de l’allongement significatif des sessions parlementaires, provoqué par une inflation législative pour le moins préoccupante.
On rappellera en effet que les sessions extraordinaires, à la suite de chaque session unique, deviennent tellement monnaie courante que l’extraordinaire d’une fin de session unique serait bientôt qu’il n’y ait pas de session extraordinaire !
Et l’allongement des travaux législatifs, avec toutes ses conséquences en termes de fonctionnement, ne participe pas dans le même temps de l’amélioration de la qualité de la loi.
En effet, nous avons tout de même passé quelques heures de séance à discuter de textes encore aujourd’hui inapplicables, inappliqués ou inopérants. J’en veux pour preuve la multiplication des textes autour des thématiques de la sécurité, de l’immigration ou encore du pouvoir d’achat qui se sont multipliés au gré des faits divers et de l’inspiration, fertile, des conseillers de la Présidence de la République.
Pour conclure sur cette source d’accroissement des charges de personnel et de fonctionnement de nos assemblées, nous aurons examiné, pour cette seule session 2008-2009, une loi de programmation des finances publiques, deux collectifs budgétaires en deux mois, une loi de finances initiale et peut-être un texte faisant état des mesures d’un plan d’urgence et de relance de l’économie !
Si l’on faisait l’économie de quelques textes pour un travail législatif accompli dans de meilleures conditions, peut-être pourrait-on trouver le moyen de « maîtriser » les coûts de fonctionnement de nos assemblées…
Notons cependant, dans le cadre de cette mission, le dynamisme particulier des crédits ouverts pour le fonctionnement de la Présidence de la République.
Après l’opération « transparence » qui avait consisté à requalifier en crédits de la mission « Pouvoirs publics » des sommes qui étaient jusqu’ici réparties dans d’autres départements ministériels, le mouvement de progression des dépenses de l’Élysée semble se maintenir à un niveau supérieur au niveau prévisionnel de l’indice des prix à la consommation.
L’activité du Président de la République, comme de ses services, est loin d’être négligeable, et les frais de fonctionnement du Palais de l’Élysée sont appelés à connaître une progression sensible en 2009, alors même que la France n’exercera plus la présidence de l’Union européenne.
Même si nous ne souhaitons pas discuter de l’absolue pertinence des crédits ouverts, se pose toutefois la question de l’implication des collaborateurs de l’Élysée dans la vie publique. Cette implication est en effet de plus en plus forte, de plus en plus sensible et visible, et cela ne peut manquer de poser question. C’est là une évolution du mode de fonctionnement de nos institutions qui ne nous semble pas positive.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, tels sont les quelques points que nous souhaitions souligner s’agissant des crédits de la mission « Pouvoirs publics », que nous ne voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’existence même de la mission « Pouvoirs publics », instaurée par la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, est une preuve du bon fonctionnement de notre démocratie. L’examen public par le Parlement des crédits de la présidence de la République, de nos assemblées et des juridictions constitutionnelle et politiques est un gage de transparence dans le fonctionnement de nos institutions.
Nos concitoyens sont effectivement en droit de savoir comment les deniers publics sont utilisés, et ce à tous les niveaux. À défaut, nous laisserions le champ libre à la méfiance, aux rumeurs et aux supputations les plus diverses et – vous le savez bien – les plus infondées. La présente mission rend possible un travail de pédagogie et d’explication à propos des crédits nécessaires au fonctionnement, parfois méconnu, de nos institutions.
Au nom du groupe UMP, je souhaite dire quelques mots des crédits de l’Élysée et du Parlement. Force est de le reconnaître, une certaine opacité a longtemps prévalu s’agissant du budget de la présidence de la République.
Depuis l’entrée en fonctions de M. Nicolas Sarkozy, la transparence est désormais le mot d’ordre.
La loi de finances pour 2008 nous en a offert une première illustration. Ainsi toutes les dépenses assumées par d’autres ministères pour le compte de la présidence de la République ont-elles été réintégrées dans le budget de cette dernière. Voilà une avancée notable en matière de transparence et de lisibilité budgétaires ! Pendant très longtemps, trop longtemps, quelle que soit la majorité en place, la présidence de la République a effectivement bénéficié de moyens mis gratuitement à sa disposition par l’ensemble des ministères.
L’exercice est renouvelé cette année et va même au-delà : comme l’ont souligné tous les orateurs, le projet de loi de finances pour 2009 intègre désormais la totalité des dépenses de fonctionnement de la présidence de la République à son budget. En outre, pour la première fois, un rapport détaillé sur l’utilisation des crédits alloués à la présidence a été adressé au Parlement. Notre groupe se félicite de cette évolution qui permet enfin réelle transparence et sincérité budgétaires.
Au-delà de la forme, nous nous félicitons également du fond : en 2009, l’évolution de la dotation budgétaire de la présidence ne dépassera pas le rythme de l’inflation. Les crédits alloués ne progressent effectivement que de 2,11 %, soit un taux identique à celui des premières prévisions d’inflation pour 2009. L’Élysée, contrairement à ce que j’ai pu entendre, s’applique donc à lui-même les efforts prônés en matière de maîtrise de la dépense publique, alors que tout le monde peut constater la forte recrudescence de l’activité de la présidence.
Pour sa part, le Parlement accomplira également, en 2009, des efforts de réduction des dépenses. Ces derniers sont d’autant plus remarquables qu’ils sont engagés directement par les présidents des deux assemblées.
Comme l’a rappelé tout à l’heure le président de la commission des finances, M. Jean Arthuis, l’amendement déposé conjointement par le président de l’Assemblée nationale et le rapporteur spécial de la présente mission à l’Assemblée nationale a plafonné les crédits alloués à la chambre des députés au niveau qu’ils avaient atteints en 2008. En accord avec les questeurs, M. le président du Sénat nous propose de faire de même. Un amendement a été déposé en ce sens dans le cadre de la présente mission.
Notre groupe soutiendra sans réserve l’adoption de cet amendement. En cette période de crise financière et économique, c’est effectivement un message positif qui sera ainsi envoyé à nos concitoyens.
Au nom du groupe UMP, je tiens à saluer l’initiative du président du Sénat. C’est sans la moindre réserve que notre groupe votera les crédits de la mission « Pouvoirs publics », ainsi modifiés.
(Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, une certaine convergence dans les propos me permettra d’être fort bref.
Tout d’abord, vous me permettrez de ne commenter ni les crédits du Parlement ni l’amendement déposé par le président Larcher et MM. les questeurs. Telle est la tradition : le Gouvernement ne s’exprime pas à propos du budget des assemblées. Il s’en remettra donc, s’agissant de l’amendement n° II-117, à la sagesse de la Haute Assemblée.
Cela dit, pour répondre aux différents orateurs s’étant exprimés à ce propos, je rappellerai que le budget de la présidence de la République a été l’objet d’un effort particulier de transparence, même si M. Vera prétend que ce n’est pas suffisant et déplore que le rythme d’augmentation des crédits soit toujours supérieur à l’inflation. Ces derniers ne progressent pourtant que de 2 % en 2009, par rapport à 2008.
L’ensemble du dispositif a été modifié à partir de l’année 2007. Un effort de synthèse et de clarification s’imposait donc. Je crois qu’il a été réalisé, et il sera poursuivi.
Le budget de l’Élysée ne croît donc que de 2 %, tandis que la hausse du budget du Conseil constitutionnel n’est due, pour l’essentiel, qu’à des travaux très spécifiques nécessitant des investissements.
La mission « Pouvoirs publics » reste donc globalement dans une épure d’économies et n’appelle cette année aucune remarque particulière.
L’Élysée s’est engagé à poursuivre cette œuvre de clarification et de transparence au cours des prochaines années, avec le contrôle de la Cour des comptes. Je pense que cela permettra à l’ensemble des sénateurs d’avoir une vision aussi nette que possible de cette mission.
J’ajoute que le projet de loi organique fixant les conditions d’application de l’article 68 de la Constitution n’a pas encore été déposé. Le Gouvernement va tout d’abord présenter une série de projets de lois organiques découlant de la révision constitutionnelle et visant à accroître les pouvoirs du Parlement à compter du 1er mars. Dès cette phase terminée, il préparera le projet de loi organique fixant les conditions d’application de l’article 68 et le présentera à la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics », figurant à l’état B ».
État B
(En euros) |
||
Pouvoirs publics |
1 027 279 720 |
1 027 279 720 |
Présidence de la République |
112 335 666 |
112 335 666 |
Assemblée nationale |
533 910 000 |
533 910 000 |
Sénat |
332 248 000 |
332 248 000 |
La chaîne parlementaire |
30 735 000 |
30 735 000 |
Indemnités des représentants françaisau Parlement européen |
4 745 974 |
4 745 974 |
Conseil constitutionnel |
12 460 000 |
12 460 000 |
Haute Cour |
0 |
0 |
Cour de justice de la République |
845 080 |
845 080 |
L'amendement n° II-117, présenté par M. Gérard Larcher, président du Sénat, MM. Richert, Pastor et Garrec, questeurs du Sénat, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Présidence de la République |
||||
Assemblée nationale |
||||
Sénat |
4.554.000 |
4.554.000 |
||
La chaîne parlementaire |
||||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
||||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
||||
TOTAL |
0 |
4.554.000 |
0 |
4.554.000 |
SOLDE |
- 4.554.000 |
- 4.554.000 |
La parole est à M. Philippe Richert, Premier questeur.
M. Philippe Richert, Premier questeur. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ce sujet à plusieurs reprises.
À l’issue de sa réunion en date du 2 juillet 2008, la Commission commune chargée d'arrêter les crédits nécessaires au fonctionnement des assemblées parlementaires avait fixé le montant de la dotation du Sénat pour 2009 à 332 248 000 euros, en hausse de 1,39 % par rapport à 2008, son budget progressant pour sa part de 1,28 %. Comme chacun l’aura remarqué, ces taux étaient l'un et l'autre nettement inférieurs à l'inflation
Toutefois, le président du Sénat, « dans ces temps qui exigent des efforts de nos compatriotes et de l'État », selon ses propres termes, a, le 14 octobre 2008, demandé que le « budget demeure en 2009 au niveau qui était le sien en 2008 ». Le présent amendement prend acte de cette demande, en réduisant la dotation du Sénat de 4 554 000 euros pour ramener son taux de progression à 0 %.
Je précise que cet amendement a été déposé dans le respect des compétences de la Commission commune chargée d'arrêter les crédits nécessaires au fonctionnement des assemblées parlementaires, que nous avions sollicitée.
Le Conseil de questure procédera aux ajustements des crédits de nature à permettre de diminuer d'autant les dépenses prévues en 2009 et à ramener à 0 % la progression du budget de notre assemblée.
J’observe que le Sénat aura ainsi réduit de 1,5 % le volume de la contribution qu’il demande à l’État, alors que l’État éprouvera peut-être lui-même des difficultés à réduire ses propres dépenses.
Le Sénat se conforme donc d’ores et déjà à l’engagement de stabilité des dépenses pris pour les trois ans à venir dans le projet de loi de programmation des finances publiques, alors qu’il n’y était pas tenu. Nous parvenons à une telle stabilité de notre budget alors même que notre assemblée compte douze sénateurs de plus, que la composition du bureau a été modifiée – il compte maintenant deux vice-présidents et deux secrétaires de plus – et que de nouvelles commissions pourraient être créées.
Ces efforts auront permis de contenir à 6 % la progression du budget du Sénat sur trois ans, dans la limite de l’évolution du coût de la vie.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et au banc des commissions. – Mme Anne-Marie Escoffier applaudit également.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable.
Je pense que l’exemple donné par le Sénat contribue à asseoir son autorité. Lorsque nous demanderons demain au Gouvernement de faire un effort de maîtrise de la dépense publique, cet amendement donnera une certaine crédibilité à nos propos. Le Sénat s’affirme ainsi comme un laboratoire de maîtrise de la dépense publique et de performance.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. N’en rajoutons pas trop ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Vera, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Publications officielles et information administrative » est au cœur des réformes de modernisation depuis déjà quelques années.
Secteurs directement affectés par les nouvelles technologies et la concurrence d’Internet, l’impression, l’édition et la diffusion ont dû subir de profondes réformes. Je tiens à le souligner, les Journaux officiels et la Documentation française ont montré à quel point ils étaient capables de se moderniser, tant socialement que techniquement. Le rapprochement de ces deux entités s’est fait dans les meilleures conditions possibles, dans des délais extrêmement courts, et sans conflit social majeur.
Des incertitudes pèsent aujourd’hui sur la mission.
Elles concernent tout d’abord les ressources du budget annexe. Les recettes d’annonces légales, qui constituent les ressources principales, s’annoncent en baisse pour la deuxième année. Elles subissent l’effet de la réglementation qui supprime l’obligation de publier les comptes des sociétés au Bulletin des annonces légales obligatoires, le BALO, et allège certaines procédures de parution au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, le BODACC. Cela représenterait 17 millions d’euros dès 2009, soit près de 10 % du total du produit des annonces.
L’avenir de la mission est également incertain en raison de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Le Comité de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 préconise en effet de rassembler les deux directions en une entité unique qui pourrait prendre la forme d’une agence des services de l’État. Cette nouvelle entité serait de nature à valoriser le potentiel éditorial qui existe au sein de l’État. Sa création permettrait la mise en place d’un pôle de référence en matière de publications publiques, tout en restaurant les marges de développement des deux directions actuelles.
Cependant, rassembler des agents de cultures, de rémunérations et de statuts différents sera compliqué sur le plan social. Il faudra s’attacher à trouver une issue « par le haut ». Le principal défi sera d’unifier ces différences, en préservant le capital d’expériences et de compétences acquises de part et d’autre.
Enfin, le CMPP préconise, pour la direction de la Documentation française, le rassemblement des neuf centres interministériels du renseignement administratif en un seul centre sur un site unique. Les économies attendues seront de l’ordre de 2 millions d’euros en 2009 et de 20 équivalents temps plein. La réaffectation des 113 agents concernés devra, là encore, se faire en concertation avec les organisations syndicales.
Ces évolutions sont certes porteuses d’efficacité accrue, mais la nouvelle entité devra faire face au défi de maintenir ses missions de service public dans le contexte général de baisse de ressources.
Si la volonté politique est de doter l’État d’un éditeur et d’un imprimeur de référence, il est nécessaire de moderniser le parc de machines d’impression afin de répondre aux exigences du nouveau plan de charges et de permettre à la nouvelle entité de mener à bien ses missions.
C’est à cette condition qu’il sera possible de diversifier l’activité vers d’autres services et administrations, ce qui constituera la garantie pour l’État de disposer d’un outil performant pour l’exécution de ses travaux d’impression, sans être contraint de recourir systématiquement à des imprimeurs privés.
En ce qui concerne les crédits, l’impact budgétaire de ces mesures restera difficile à évaluer tant que le périmètre des activités, la forme d’organisation, les modes de statut et de rémunération des personnels de l’entité unique ne seront pas arrêtés. Ainsi, 196 millions d’euros sont demandés pour 2009, un niveau comparable à celui de 2008.
La réduction des effectifs se poursuit avec 973 équivalents temps plein, soit 35 de moins qu’en 2008. Les économies réalisées par la réduction des effectifs sont cependant absorbées par le poids des charges de personnel, en particulier les indemnités versées aux personnels de la DJO et de la SACI-JO dans le cadre des plans de cessation anticipée du travail et le déficit croissant de la caisse des pensions.
Ainsi, 8,2 millions d’euros ont été versés, en 2007, au titre des préretraites, 7,7 millions d’euros en 2008, et les versements sont estimés à 10,4 millions d’euros pour 2009. Ces dispositifs s’étalent sur cinq ans et ces dépenses cesseront en 2011.
Le déficit de la caisse des pensions a atteint 5,5 millions d’euros en 2007, 6,4 millions d’euros en 2008, et il est estimé à près de 11 millions d’euros en 2009. La mise en œuvre des plans de cessation anticipée d’activité a conduit à suspendre, en 2006, la poursuite du processus d’intégration envisagé en 2005 auprès des commissions paritaires de l’AGIRC, l’Association générale des institutions de retraites des cadres, et de l’ARRCO, l’Association des régimes de retraites complémentaires. Ce versement estimé initialement à 100 millions d’euros serait en effet appelé à être très largement majoré du fait de l’absence de nouveaux entrants cotisants dans le régime d’accueil.
Sous le bénéfice de ces observations, la majorité de la commission propose au Sénat d’adopter sans modification les crédits inscrits pour la présente mission.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Je tiens à remercier M. le rapporteur spécial et à lui indiquer que le Gouvernement est naturellement extrêmement attentif au rapprochement de la Documentation française et de la direction des Journaux officiels, et à tous les problèmes sociaux qui en découleront. Ce rapprochement se fait certes dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, mais aussi dans celui d’un dialogue social constructif.
Comme je l’ai déjà souligné à l'Assemblée nationale, nous n’avons pas l’intention de diminuer l’activité du nouvel ensemble, au contraire ! Un nouvel appel d’offres sera lancé au début de l’année 2009 pour l’acquisition d’une nouvelle rotative beaucoup plus performante, qui doit permettre à la nouvelle entité d’avoir une capacité d’impression nettement supérieure à sa capacité actuelle. Il s’agit donc de moderniser et, le cas échéant, d’amplifier le travail de cette entité, afin qu’il soit le plus rationnel possible.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative », figurant à l’état C.
État C
(En euros) |
||
Publications officielles et information administrative |
194 714 243 |
196 021 759 |
Accès au droit, publications officielles et annonces légales |
149 235 953 |
151 743 469 |
Dont charges de personnel |
52 929 119 |
52 929 119 |
Édition publique et information administrative |
45 478 290 |
44 278 290 |
Dont charges de personnel |
21 498 290 |
21 498 290 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » (et article 59 septies).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » sera fortement modifiée à moyen terme par deux décisions prises par le Conseil de modernisation des politiques publiques, le CMPP.
La première concerne la suppression, à l’horizon de 2012, de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, la DSPRS, principale administration du programme 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».
Ses activités seront transférées vers d’autres structures existantes, notamment, à l’échelon départemental, vers un guichet unique assuré par l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l’ONAC. Cette réforme, qui a pour ambition la rationalisation des services, devra également simplifier les relations des anciens combattants et de leurs ayants droit dans leurs démarches administratives.
Si j’apprécie le maintien d’un service de proximité et le transfert de nouvelles missions à l’ONAC, je souhaite que cet opérateur, tout en s’adaptant à cette réforme, garantisse à ses ressortissants les prestations de la meilleure qualité possible. Je pense surtout aux « nouvelles générations » d’anciens combattants, notamment aux anciens militaires en OPEX, les opérations extérieures.
Cependant, il conviendra de rester attentif tant au maintien du niveau juste de la réparation et de l’accompagnement de qualité que nous devons au monde combattant qu’au reclassement des personnels concernés par cette mutation.
La seconde décision vise à rationaliser la direction du service national, la DSN. Les marges de manœuvre financières dégagées par la révision des structures déconcentrées de la DSN permettront notamment d’intégrer des notions de sécurité intérieure et de solidarité entre générations dans la Journée d’appel de préparation à la défense, conformément aux orientations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.
Le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » verra également son périmètre recentré par le transfert des crédits de communication et de valorisation du patrimoine culturel vers la mission « Défense », ceux-ci ne relevant pas spécifiquement des anciens combattants.
Si ce transfert est justifié, il pose le problème de la fongibilité des crédits d’un programme ne comportant plus que deux actions, dont l’une d’elles ne bénéficie que d’un peu plus de 4 % des crédits du programme.
Après ce transfert, qui représente 670 emplois, la mission ne comprendra donc plus que les effectifs de la DSN sur le programme 167, et ceux de la DSPRS sur le programme 169. Après une diminution de 900 emplois, leur nombre s’établira à 3 822 pour 2009.
La réorganisation de la DSN se traduira par une diminution du plafond de ses effectifs autorisés, qui évoluera de 2 750, en 2008, à 1 600 en 2013. Il reste que, si l’on inclut ses opérateurs, 5 716 emplois au total dépendront, en 2009, de la mission.
Les crédits de la mission s’établiront, en 2009, à 3,5 milliards d’euros, soit une diminution de 4 %, qui résulte, pour plus de la moitié, du transfert déjà présenté.
Parallèlement au contrôle et au rapport d’information sur les lieux de mémoire, les crédits d’investissement de l’action 2 « Politique de mémoire » avaient été doublés en 2008 par rapport aux années antérieures. Ils sont de nouveau augmentés de 55 % en 2009, pour atteindre 3,5 millions d’euros. Il semble que le travail de mes prédécesseurs sur ce sujet ait porté ses fruits.
La quasi-totalité des crédits de la mission, soit 92 % du total, relève du programme 169, qui disposera, en 2009, de 3,2 milliards d’euros. La baisse de 104 millions d’euros de la dotation, soit 3,1 %, ne traduit que partiellement la diminution du nombre des bénéficiaires de la dette viagère, dans la mesure où la moyenne d’attribution à chaque ressortissant continuera à progresser de 2,5 % en 2009.
Au-delà de la satisfaction de voir aboutir des demandes légitimes, il reste opportun d’étudier ce budget en « prospective », en tenant compte de l’évolution de sa démographie.
Toutefois, j’appellerai votre attention, mes chers collègues, sur le cas des militaires en OPEX qui souhaiteraient, par alignement sur ce qui a été accordé, il y a quelques années, aux anciens combattants d’Afrique du nord, se voir attribuer la carte du combattant dès qu’ils ont été en intervention durant quatre mois.
Dans le contexte de la suppression de la DSPRS, le premier semestre 2008 a été consacré au transfert de ses missions. Les décisions ont été largement exposées dans le rapport d’information sur les directions interdépartementales des anciens combattants, les DIAC, présenté par notre collègue Charles Guené.
Ces travaux ont retardé l’élaboration du deuxième contrat d’objectifs et de moyens de l’ONAC, qui devrait être présenté avant la fin de l’année, destiné à couvrir la période 2009-2011. À cette occasion, le fonctionnement de cet office sera réexaminé, notamment pour ce qui concerne la modernisation de la gestion de ses établissements médico-sociaux.
Il conviendra d’obtenir des réponses précises concernant notamment le sort réservé aux écoles de reconversion professionnelle et aux maisons de retraite.
Les crédits pour 2009 du programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale » s’établissent à 106,8 millions d’euros. Le programme dispose de 37 emplois, avec 9 titulaires et 28 contractuels. Peu de demandes nouvelles sont attendues et les dotations ne devraient concerner, à l’avenir et pour l’essentiel, que les crédits nécessaires au règlement des rentes déjà accordées.
Une demande récurrente des associations concerne l’extension du dispositif d’indemnisation aux orphelins. D’ailleurs, le rapporteur spécial de cette mission qui m’a précédé trouvait injustifié le sort qui leur était réservé.
Plus généralement, l’extension pourrait concerner la situation de tous les orphelins de guerre et des pupilles de la nation. Le Président de la République a demandé que soit étudiée cette possibilité ; une mission d’expertise a été confiée au préfet Jean-Yves Audoin, qui doit remettre au ministre des propositions très attendues.
Une autre demande tout aussi préoccupante concernait l’extension du dispositif d’indemnisation au cas des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, les membres du RAD, le Reichsarbeitsdienst, et ceux du KHD, le Kriegshilfsdienst, dont le règlement interviendra enfin en 2008.
C’est un dossier que je connais bien et qui me tient à cœur, pour avoir eu à le traiter voilà quelques années en ma qualité d’élu d’Alsace-Moselle.
En effet, une convention a été signée le 17 juillet dernier entre le secrétaire d’état à la défense et aux anciens combattants, M. Jean-Marie Bockel, et le président de la fondation Entente franco-allemande, M. André Bord. Cette convention prévoit la participation de l’État, pour moitié, au versement d’une allocation de 800 euros à 5 800 bénéficiaires potentiels. Le coût total pour la mission est évalué à 2,61 millions d’euros.
Si je me félicite de l’aboutissement de ce dossier, je formule le souhait que les indemnisations interviennent bien dès l’exercice 2008 ainsi qu’il a été annoncé. M. le secrétaire d’État ne devrait pas manquer de nous apporter toutes les assurances, en nous indiquant le calendrier précis.
Je terminerai en abordant l’examen de l’article rattaché 59 septies, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale sur amendement gouvernemental.
Cet article vise à revaloriser, à compter du 1er juillet 2009, la retraite du combattant en relevant son indice de référence de deux points, pour le porter à 41 points. La mesure concernera un effectif moyen de 1 414 095 titulaires de la retraite du combattant et coûterait, en année pleine, 38 millions d’euros.
Votre rapporteur spécial ne peut qu’approuver cette initiative qui vient consolider les efforts entrepris pour revaloriser la retraite du combattant. Elle témoigne de l’intérêt de la nation envers ses combattants d’hier.
En conclusion, la majorité de la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter sans modification ces crédits et l’article 59 septies.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le secrétaire d’État, si le budget que vous nous proposez est moins élevé que celui de l’an dernier, c’est bien sûr à cause de la disparition inéluctable de nos anciens combattants, …
M. Guy Fischer. Ce n’est pas une raison !
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. … puisque nous déplorerons, en 2009, 20 000 sorties pour les pensions militaires d’invalidité et 56 000 pour la retraite du combattant. Dans ce contexte démographique, il ressort que la dotation moyenne par pensionné progressera cette année encore de 2,46 %. Ceux qui disent qu’elle diminue se trompent.
M. Guy Fischer. Ce n’est pas la peine de me regarder, madame le rapporteur pour avis ! (Sourires.)
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. Si l’on inclut les dépenses fiscales en faveur des anciens combattants, ce sont près de 4 milliards d’euros que la nation consacrera au monde combattant, ce qui permettra de reconduire, voire d’augmenter toutes les prestations existantes.
Au rang des revendications satisfaites figure d’abord la poursuite de la revalorisation de la retraite du combattant, que mon collègue a évoquée tout à l’heure. À cet égard, nous avions déjà apprécié le fait que l’indice, qui stagnait depuis 1978, soit passé depuis 2006 de 33 à 39 points. Sur votre initiative, monsieur le secrétaire d’État, une nouvelle étape a été franchie à l’Assemblée nationale : l’indice sera porté à 41 points à compter du 1er juillet 2009. Ces deux points supplémentaires, dont le coût est estimé à environ 38 millions d’euros en année pleine, permettront de verser à chacun des 1,4 million de bénéficiaires une retraite annuelle de 558,42 euros, en progression de près de 30 % depuis 2006. L’engagement du Président de la République de porter l’indice à 48 points d’ici à 2012 est donc en passe d’être tenu.
Autre motif de satisfaction : la « décristallisation » des prestations servies aux anciens combattants d’outre-mer est non seulement reconduite, mais confortée, puisque 24 millions d’euros permettront de financer l’entrée progressive dans le dispositif des veuves mariées après les dates d’indépendance. Cet « acte de justice et de reconnaissance envers tous ceux qui sont venus de l’ex-empire français combattre sous notre drapeau », pour reprendre les propos du Président Chirac, sera donc pleinement mis en œuvre.
L’indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, les RAD-KHD, est également acquise depuis la signature, le 17 juillet dernier, d’une convention entre l’État et la fondation Entente franco-allemande. Une allocation d’un montant de 800 euros, qui sera financée à parité par chaque partie à hauteur de 2,3 millions d’euros, est en passe d’être versée aux 5 800 personnes recensées, soldant un dossier qui n’avait que trop duré.
Parmi les mesures de solidarité remarquables figure encore l’allocation différentielle versée aux conjoints survivants, pour laquelle une enveloppe de 5 millions d’euros est prévue. Je me réjouis au passage que les demandes formulées par notre commission en 2007 aient été rapidement entendues, le revenu mensuel minimum garanti ayant été porté dès novembre 2007 au niveau du seuil de pauvreté, soit 681 euros, puis à 750 euros en 2008. De même, l’aide personnalisée au logement, l’APL, ne sera plus intégrée dans les ressources appréciées pour bénéficier de l’allocation. J’attends désormais qu’il en soit de même, monsieur le secrétaire d’État, pour l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA.
La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » prend aussi toute sa part à l’effort d’optimisation de la dépense publique en rationalisant les structures administratives concernées. Consacré dans son rôle pivot de guichet unique de proximité du monde combattant, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l’ONAC, exercera, à terme, bon nombre des missions de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, la DSPRS, qui a vocation à disparaître. L’ONAC est, par excellence, l’organisme social de proximité à l’écoute du monde combattant, et nous avons grande confiance en son action. Notre commission suivra cependant avec attention la mise en place de cette réforme essentielle et veillera en particulier à ce que les moyens humains et matériels de l’office préservent la qualité du service rendu à l’usager.
J’en viens aux rentes mutualistes, dont je rappellerai qu’elles ouvrent droit à une majoration spécifique de l’État, qui varie de 12,5 % à 60 %, dans la limite d’un plafond majorable fixé depuis 2007 à 125 points d’indice, soit près de 1 700 euros au 1er octobre 2008. Elles bénéficient également d’exonérations d’impôt sur le revenu pour la part inférieure au plafond légal.
Je m’interroge sur la légitimité de ces mesures dérogatoires, qui constituent par ailleurs une dépense dynamique, et je regrette que les associations ne cessent de revendiquer la hausse du plafond majorable à 130 points. Un porte-parole ô combien connu et respecté du monde combattant a publié dans l’éditorial de son journal de novembre 2008 la phrase suivante : « Il ne faut pas dépenser plus que ce que l’on a dans son porte-monnaie ». C’est sans doute ce que le Gouvernement essaie aussi de faire !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien ! Excellent ! (Sourires.)
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. Au-delà des mesures de reconnaissance et de réparation, ce budget consacre près de 19 millions d’euros à la politique de mémoire, qu’il s’agisse d’organiser les commémorations ou d’entretenir les sépultures et les lieux de mémoire. Au moment où les témoins directs des conflits contemporains nous quittent, nous mesurons tous l’importance des actions de mémoire et la nécessité d’en rénover la forme, afin, en particulier, de sensibiliser les jeunes générations. Je crains seulement que la nouvelle architecture budgétaire, en dispersant les crédits de mémoire entre trois programmes et deux actions, ne nuise à la cohérence comme à la lisibilité de cette politique pourtant essentielle.
M. Guy Fischer. On est d’accord !
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. Je terminerai, monsieur le secrétaire d’État, en évoquant un sujet qui, vous le savez, me tient à cœur, à savoir la création d’une médaille d’honneur du monde combattant. Cette distinction, purement honorifique et sans incidence budgétaire, serait ressentie, par l’ensemble des associations d’anciens combattants, comme un signe fort de reconnaissance à l’égard des bénévoles qui œuvrent quotidiennement dans l’ombre. Je pense notamment au Souvenir français, qui rénove les tombes et les monuments aux morts, dans le but de maintenir les lieux de mémoire. Je réclame l’institution de cette récompense depuis plus de deux ans et je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir pris en compte ma demande, car la remise d’une telle médaille constituerait un moment émouvant et convivial de mémoire, lors des cérémonies patriotiques. Pourriez-vous nous préciser vos intentions sur ce point ?
Pour conclure, mes chers collègues, je vous indique que les éléments favorables de ce budget ont conduit la commission des affaires sociales à se prononcer en faveur de l’adoption des crédits pour 2009 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aurais aimé, comme tous mes collègues, que le budget des anciens combattants pour 2009 témoigne davantage de la reconnaissance de la France à l’endroit de celles et ceux qui, avec abnégation et sens du devoir, ont toujours répondu à l’appel de la nation.
L’application de la révision générale des politiques publiques, d’une part, et le manque de moyens de l’État, lié à sa mauvaise politique fiscale, d’autre part, ne le permettent pas. C’est regrettable, mais c’est surtout injuste.
Il est donc assez facile, sans prétendre à l’exhaustivité, d’établir la liste des manquements, avant de reconnaître les quelques avancées proposées et de suggérer de nécessaires corrections, réalisables et justes.
Les manquements sont nombreux. Ils contredisent les engagements pris et affaiblissent la parole donnée, ainsi que la véracité des promesses faites, tant par vos prédécesseurs, monsieur le secrétaire d’État, que par le Président de la République.
Rien sur la campagne double, rien pour rattraper la valeur du point de pension, rien pour les veuves des plus grands invalides, rien pour éliminer l’injustice faite à de nombreux orphelins de guerre, rien pour relever le plafond de la rente mutualiste, et peu pour les crédits sociaux de l’ONAC !
En fait, le budget 2009 permet tout juste l’exécution des mesures adoptées l’an dernier, notamment en matière de décristallisation.
Parmi les nouvelles propositions, je note, à la suite de l’adoption d’un amendement présenté à l’Assemblée nationale, le relèvement de deux points de la pension versée aux anciens combattants, applicable à partir du 1er juillet 2009. Le versement afférent ne sera donc effectué qu’au cours de l’année 2010 !
Je note aussi que le plafond permettant de verser l’allocation différentielle au conjoint survivant est porté à 750 euros et qu’il exclut l’allocation logement des ressources prises en compte.
Quant à l’indemnité de 800 euros qui doit être versée aux anciens du RAD-KHD, que nous attendions depuis de nombreuses années, et pour laquelle nous nous sommes battus avec une grande détermination, elle sera financée pour moitié sur le budget 2009, bien qu’aucune ligne spécifique n’apparaisse à la lecture de celui-ci. À cet égard, monsieur le ministre, prenez-vous l’engagement que les indemnités dues seront bien toutes versées en 2009 ? Devant les insuffisances et les manquements relevés, je souhaiterais que nous nous accordions, au Sénat, sur ce qui pourrait constituer un consensus. Ce dernier s’avère d’autant plus nécessaire qu’il s’agit, pour la représentation nationale, d’être juste à l’égard du monde combattant.
Deux dossiers pourraient faire l’unanimité : celui de l’allocation différentielle et celui de la revalorisation de la retraite du combattant. L’allocation différentielle versée au conjoint survivant est une obligation morale et politique pour la nation. Elle doit permettre à celles et à ceux susceptibles d’en bénéficier de vivre ou de survivre décemment. Aujourd’hui, tel n’est pas le cas. Notre devoir est de tenir compte de la réalité, laquelle nous conduit à proposer un plafond de ressources non pas de 750 euros, mais de 887 euros. C’est le moins que l’on puisse faire, puisque ce montant correspond au seuil de pauvreté déterminé par l’INSEE.
La retraite du combattant est sans doute la mesure la plus emblématique de la reconnaissance de la nation en direction du monde combattant. Le plafond de cette retraite doit être relevé sans tarder. Des engagements ont été pris, ils doivent être tenus. Son montant devrait, annuellement, constituer un treizième mois pour celles et ceux qui perçoivent la retraite de base de la sécurité sociale.
Cette retraite, comme l’ensemble des prestations accordées au monde combattant, à quelque titre que ce soit, devrait évoluer chaque année proportionnellement à l’inflation réelle. Je ne voudrais pas non plus oublier une demande récurrente des anciens combattants concernant le relèvement du plafond de la rente mutualiste, qui vise à la faire passer de l’indice 125 à l’indice 130, afin d’achever son rattrapage. Que comptez-vous faire en ce sens, monsieur le secrétaire d’État ?
Le budget 2009, qui est conforme à la révision générale des politiques publiques, touche aussi l’organisation dédiée aux anciens combattants. C’est ainsi que la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale disparaît. Ses compétences sont confiées à l’ONAC, qui aura la mission de les exercer dans la plus grande proximité avec le monde combattant.
Mais, pour que cette évolution se traduise utilement dans les faits dans chaque département, encore faut-il que les moyens humains et matériels soient donnés aux offices ! Vous engagez-vous, monsieur le secrétaire d’État, à ouvrir dans chaque département des discussions tripartites entre l’État, le monde combattant et les élus, pour que nous soyons assurés de la bonne attribution et de l’affectation réelle de ces moyens nécessaires ?
En ce qui concerne l’ONAC, j’observe que les crédits sociaux qui lui sont attribués sont insuffisants eu égard aux besoins recensés, et ce malgré une majoration de 500 000 euros.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, quel sort réservez-vous aux écoles professionnelles dépendantes de l’ONAC et aux maisons de retraite, qui ont besoin de se mettre aux normes de confort et de sécurité ?
Avant de conclure, je souhaite évoquer un certain nombre de dossiers qui appellent rapidement des réponses concrètes. Il s’agit de la campagne double, des orphelins de guerre et d’un dossier particulier à l’Alsace-Moselle, la « ligne Curzon ».
Sur le dossier de la campagne double, que l’un de vos prédécesseurs, M. Mékachéra, n’a pas clarifié, il faut cesser d’invoquer les travaux de telle ou telle commission. Depuis de nombreux mois, vous avez assez d’éléments pour faire des propositions concrètes ou motiver un refus définitif.
Le dossier des orphelins est douloureux. Vous connaissez la disparité des situations des orphelins de guerre qu’a engendrée le décret du 13 juillet 2000. Malgré des ajustements et des compléments – ils étaient nécessaires -, il existe encore des injustices que le monde combattant ne comprend pas. Là encore, vous disposez de toutes les informations nécessaires à une prise de décision, monsieur le secrétaire d’État. À quel moment comptez-vous agir ?
Certains prisonniers des camps soviétiques – je veux parler des alsaciens-mosellans incorporés de force dans l’armée allemande, faits prisonniers ou qui ont déserté – n’ont pas le même statut selon qu’ils ont été internés à l’est ou à l’ouest de la frontière germano-soviétique de 1941, matérialisée par le fleuve Bug et appelée « ligne Curzon ».
Les décrets pris en 1973, 1977 et 1981 établissent un régime spécial pour ces anciens prisonniers, mais seulement pour ceux dont les camps étaient situés à l’est de la frontière. Ce n’est pas juste ! Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous corriger cette anomalie ?
Le devoir de mémoire est une belle chose. Il faut le préserver et le développer, en partenariat avec les collectivités territoriales et l’éducation nationale.
Comme la plupart de mes collègues, je crois à la nécessité de préserver les dates de commémoration, lesquelles rythment le devoir de mémoire. Quant à la date du 19 mars, marquant la fin de la guerre d’Algérie, vous savez qu’elle a notre préférence.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste ne votera pas ce budget, qu’il juge insuffisant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d’État, vous ne serez pas surpris que je vous redise avec quelle amertume j’ai accueilli ce projet de budget des anciens combattants et victimes de guerre pour 2009.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres précédemment évoqués dans ce débat. Je voudrais néanmoins rappeler que, s’agissant du droit imprescriptible à réparation, dont nous fêterons, le 31 mars 2009, le 90ème anniversaire, l’on ne peut pas se contenter de répéter, année après année, ce genre de discours convenu : « On baisse le budget, les ayants droit décèdent mais les survivants ont plus »… Ce n’est pas acceptable ! Que représenterait la satisfaction des principales revendications du monde combattant rapportée à la somme faramineuse de 360 milliards d’euros qui a été injectée dans les banques d’affaires victimes de leurs appétits de spéculation et responsables de la crise dans laquelle notre pays s’enlise ?
On ne peut plus se contenter d’un budget de simple fonctionnement ou presque, présenté comme une avancée, puis sortir de son chapeau, via un amendement, la bonne nouvelle de dernière minute, à savoir la hausse de la retraite du combattant de deux points au 1er juillet, laquelle est censée combler les aspirations du monde combattant. Croyez-vous que celui-ci soit dupe de votre volonté de gagner du temps sur ce qui lui est dû ?
Tout le reste, malheureusement, est à l’avenant, car vous prenez prétexte de la priorité que représente la retraite du combattant pour jeter par-dessus bord – ou, à tout le moins, les mettre trop en retrait à mon goût – tous les autres engagements du Président de la République. Ainsi, il n’y a toujours rien pour le plafond majorable des retraites mutualistes des anciens combattants, rien pour la campagne double, rien pour les veuves des plus grands invalides, rien pour les orphelins qui n’entrent pas dans les critères des deux décrets – je pense notamment aux morts au combat –, rien pour les réfractaires au service du travail obligatoire, le STO, rien pour les anciens militaires en OPEX… Enfin, aucun rattrapage n’est envisagé pour combler le retard du point de pension militaire d’invalidité ou point PMI...
Je vous concède un geste en faveur de l’allocation différentielle pour les conjoints survivants, le plafond de ressources passant de 681 à 750 euros au 1er janvier 2008 et l’aide personnalisée au logement en étant, par ailleurs, extraite. Vous nous avez entendus, monsieur le secrétaire d’État, et nous vous en remercions.
Mais, comme nous fûmes nombreux à le dire à votre prédécesseur l’an dernier, vous y étiez contraints. Vous n’aviez qu’une poignée de dossiers recevables à cette hauteur, et cela ne suffira pas ! Dans mon département, une trentaine de dossiers seulement ont été déclarés recevables depuis le relèvement du plafond à 750 euros. Pour rendre significative cette allocation, il faudrait la relever au moins à 817 euros, c’est-à-dire au niveau du seuil de pauvreté – je vous renvoie, sur ce point, aux précisions apportées par Mme Rozier - et, surtout, exclure du calcul le loyer ainsi que l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA.
Je veux souligner le dénuement dans lequel vivent certains de nos anciens combattants qui, seuls ou en couple, subsistent avec moins de 750 euros par mois. Ne faudrait-il pas envisager d’étendre le bénéfice de cette allocation à ceux-ci, ainsi que l’avait promis le Président Sarkozy ? Par ailleurs, je vous réitère ici la demande du monde combattant de ne pas englober ces crédits dans les crédits sociaux de l’ONAC, mais de les pérenniser sur une ligne budgétaire spécifique.
Au maigre chapitre des revendications qui avancent, je vous demanderai de bien vouloir préciser la date de versement de l’allocation de 800 euros attribuée aux incorporés de force dans le RAD-KHD ; la plupart des dossiers ayant été déposés, pouvez-vous vous engager sur un versement avant la fin de l’année 2008 ?
S’agissant des victimes des essais nucléaires, monsieur le secrétaire d’État, laissez-moi vous dire que nous serons très vigilants lors de l’examen du projet de loi que présentera prochainement M. le ministre de la défense, qui, du peu que nous en savons aujourd’hui, semble déjà vouloir faire un sort a minima à quarante-huit années d’attente et d’espoir de reconnaissance pour ces hommes sacrifiés sur l’autel de la raison d’État, que ce soit sur les sites d’Algérie ou sur ceux de la Polynésie française. (Murmures sur les travées de l’UMP.)
Monsieur le secrétaire d’État, votre budget tire un trait sur l’essentiel des promesses solennelles du Président de la République – à tout le moins, nous avons compris qu’elles ne seraient mises en œuvre que très progressivement. Je vous demande donc de vous engager sur un véritable plan pluriannuel et, surtout, de le respecter pour les rentes mutualistes et d’autres revendications, ainsi que vous l’avez fait pour la retraite du combattant. Peut-être, monsieur le secrétaire d’État, nous tracerez-vous, tout à l’heure, de telles perspectives ?
J’en viens au point qui est sans doute le plus inquiétant dans ce budget pour 2009, placé sous le signe de la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques. Vous vous attaquez aujourd’hui aux fondements mêmes des institutions du monde combattant avec la mise en pièces de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, et le transfert de ses missions à un ONAC qui subit des cures d’amaigrissement répétées, notamment avec le nouveau contrat d’objectifs et de moyens qui sera signé en janvier prochain.
Dans le transfert des attributions de la DSPRS à l’ONAC, un point d’importance reste en suspens : la gestion des maisons de retraite et des écoles de réinsertion professionnelle. II serait question de la confier au privé… Ce n’est peut-être pas le cas, mais je souhaiterais que vous me rassuriez sur ce point, monsieur le secrétaire d’État.
Les services déconcentrés de l’ONAC seront réorganisés en « services départementaux de proximité ». Ils comprendront trois agents au minimum pour assurer l’accueil, les renseignements, l’instruction des dossiers d’action sociale et la relation avec les partenaires. Comment peut-on prétendre que cette réorganisation permettra de réduire les délais de traitement des dossiers alors que l’ONAC aura des missions nouvelles et du personnel en moins, puisque 150 postes seront supprimés sur les 1 400 que compte l’ONAC actuellement ? À titre d’exemple, l’ONAC du Rhône ne compte plus, outre le directeur, qu’une assistante sociale, une secrétaire administrative et deux agents de catégorie C. En effet, il n’y a plus de délégués-mémoire, ces postes étant supprimés, et il ne reste plus que vingt-sept assistantes sociales pour la France entière !
C’est une atteinte sans précédent au droit à réparation, annoncée autoritairement, sans la moindre concertation et qui, selon les propres termes de l’ARAC, l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre, met le monde combattant « en alerte rouge » – une telle expression dans ma bouche ne vous surprendra sans doute pas, mes chers collègues… (Sourires.)
Je vous le redis solennellement, de concert avec les associations, l’ensemble des droits à réparation des anciens combattants et victimes de guerre doit demeurer entièrement géré par une administration centralisée spécifique, placée sous la seule tutelle du secrétariat d’État aux anciens combattants, conformément à la loi du 31 mars 1919. Y toucher serait un casus belli !
Je dois également vous réaffirmer, monsieur le secrétaire d’État, ma détermination à obtenir la reconnaissance officielle de la date du 19 mars 1962, au lieu de celle du 5 décembre, dénuée de sens, pour honorer la mémoire des militaires tombés en Algérie, au Maroc et en Tunisie, et celle de toutes les victimes civiles d’avant et d’après le 19 mars 1962.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Guy Fischer. Je vous rappelle également la volonté du monde résistant de voir commémorer la date du 27 mai 1943, date de création du Conseil national de la Résistance.
Je voudrais conclure sur un point qui me tient particulièrement à cœur : l’inquiétude du monde combattant quant aux conclusions de la commission chargée de réfléchir « à l’avenir et à la modernisation des commémorations et célébrations publiques ». Même si j’ai eu l’occasion de vous entendre affirmer, à Bordeaux, lors du congrès national de la fédération nationale des anciens combattants en Algérie, la FNACA, que nous n’allions pas vers l’instauration d’une journée unique, mes craintes n’en demeurent pas moins vives. Il me semblerait trop grave de se risquer à abolir tout ou partie de ces repères mémoriels indispensables.
Le temps qui m’est imparti est trop bref pour me permettre de traiter toutes les questions et de faire état des incompréhensions, des inquiétudes et des questions du monde combattant.
Au demeurant, en l’absence d’un geste de bonne volonté de votre part, monsieur le secrétaire d’État, le groupe CRC-SPG marquera par son vote son opposition au budget que vous nous présentez. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Mme Goulet applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré les contraintes imposées par la révision générale des politiques publiques, engagée en juillet 2007 par le Président de la République, et le poids d’un environnement économique national et international défavorable, il est important de souligner que les crédits réservés à la mission « Anciens Combattants, mémoire et liens avec la nation » au titre de l’année 2009 garantissent la pérennité des dispositifs liés à la reconnaissance et à la réparation que la nation doit à ses anciens combattants.
La dotation par pensionné augmente cette année de 2,46 %. Rappelons que, l’an dernier, la dotation moyenne par pensionné avait également augmenté de 3,27 %.
Il est donc important de souligner, comme viennent de le faire nos deux rapporteurs, que la diminution de l’enveloppe globale des crédits de 3,1 % par rapport à 2008 ne reflète en aucun cas un désengagement de l’État, mais traduit bel et bien la baisse tendancielle du nombre des bénéficiaires, s’agissant en particulier des pensions militaires d’invalidité, de la retraite du combattant et des soins gratuits. En effet, la diminution du nombre de pensionnés est estimée à 5,5 % en un an.
Ce budget pour 2009 marque donc bien, et nous ne pouvons que nous en réjouir, la poursuite des efforts engagés par le Gouvernement depuis 2006 dans le domaine de la réparation, de la solidarité et de la mémoire, témoignant de l’attention qu’il porte au monde combattant et au devoir de réparation.
La première priorité de ce budget est la retraite du combattant, témoignage de cette reconnaissance pour les services rendus. Cette retraite concerne 1,4 million de personnes susceptibles de faire valoir leurs droits en 2009, pour un montant de 764 millions d’euros. Le Président de la République s’est engagé à poursuivre l’effort de revalorisation.
L’indice de la retraite du combattant, qui avait été fixé à 33 points en 1978, et qui n’avait pas évolué depuis cette date – il est bon de le rappeler –, a été revalorisé régulièrement depuis 2006, passant à 39 points depuis le 1er juillet 2008. Pour l’année prochaine, le Gouvernement a souhaité, une nouvelle fois, marquer son attachement à poursuivre l’évolution engagée, en portant l’indice à 41 points à compter du 1er juillet 2009. S’il s’agit là d’une revalorisation importante, nous espérons néanmoins atteindre les 48 points d’indice d’ici à 2012, comme le Président de la République s’y est engagé. Mais cela dépendra, bien sûr, de la situation de nos finances publiques.
La solidarité à l’égard des veuves les plus démunies et des conjoints survivants constitue une autre priorité de ce budget. L’allocation différentielle, qui assure au conjoint survivant un montant mensuel minimum, est également revalorisée. Son montant a été porté à 750 euros, avec une date d’effet au 1er janvier 2008. Les associations demandent que ce montant soit porté à 817 euros, l’allocation personnalisée au logement n’étant plus prise en compte dans l’évaluation des ressources. Je vous remercie des précisions que vous pourrez apporter sur ce point, monsieur le secrétaire d’État.
Mes collègues et moi avons noté avec satisfaction le soutien accordé par le Gouvernement au fonctionnement des établissements publics que sont l’Institution nationale des invalides et l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, dont les subventions de fonctionnement augmentent sensiblement. La place de l’ONAC est donc à nouveau renforcée. Ses crédits sociaux poursuivent leur hausse, afin de répondre aux besoins des anciens combattants en difficulté et des veuves âgées.
Cet Office, auquel les anciens combattants sont particulièrement attachés, pourra disposer, grâce au contrat d’objectifs et de moyens qui sera signé avec Bercy à la fin de l’année 2008 ou au début de l’année 2009, des ressources lui permettant de faire face à l’ensemble de ses missions et verra ainsi son rôle conforté pour la période 2008-2012.
Monsieur le secrétaire d’État, nous apprécions l’ensemble de ces mesures et nous nous réjouissons de ces avancées, dont l’objectif est de garantir les conditions de vie de celles et ceux qui sont les plus en difficulté.
La reconnaissance et la réparation que la nation doit à ses anciens combattants, c’est aussi l’achèvement du processus de la décristallisation des pensions.
Le budget de la dette viagère intègre désormais la totalité des crédits nécessaires au financement de la décristallisation des « prestations du feu ». Vous permettrez au sénateur des Français établis hors de France que je suis de vous faire part d’un souhait des élus de l’Assemblée des Français de l’étranger. La décristallisation ne doit pas se limiter aux prestations du feu. Elle doit être étendue à la parité en matière de pensions militaires de retraite et de pensions de réversion afférentes.
Je souhaiterais également qu’un effort soit réalisé pour localiser les survivants de notre armée d’Indochine et les aider à percevoir ce qui leur est dû, beaucoup d’entre eux n’étant plus en mesure de présenter des dossiers recevables pour régulariser leur situation, leurs papiers militaires ayant été détruits après les événements de 1975.
Par ailleurs, la dotation pour 2009 intègre les crédits nécessaires à l’attribution de pensions aux veuves au titre des entrées de 2008 et de 2009.
Il s’agit ensuite de la consolidation de la rente mutualiste. Un abondement de 15 millions d’euros, soit une augmentation de 7 %, est inscrit dans ce budget pour financer en partie le versement de la rente aux nouveaux bénéficiaires issus de la quatrième génération du feu.
Par ailleurs, l’année 2008 a vu, et nous nous en réjouissons, la création de la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc, pour laquelle était inscrite une dotation en capital de 3 millions d’euros. Il est important que cette fondation fonctionne au mieux pour notre devoir de mémoire, en veillant à ce que toutes les fédérations d’anciens combattants soient associées à cette démarche.
Il nous paraît en effet légitime que les militaires français morts dans l’accomplissement de leur devoir en Algérie, au Maroc et en Tunisie entre 1952 et 1962 bénéficient de la mention « Mort pour la France ».
Par ailleurs, la carte du combattant d’Afrique du nord, dite carte du combattant AFN, a connu une importante avancée. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez précisé que vous étiez favorable à l’idée d’étendre le calendrier au-delà du 6 juillet 1962 pour l’attribution de cette carte, à la condition que les combattants concernés aient été présents en Algérie avant cette date. Certaines associations demandent le report au 2 juillet 1964, et notre excellent collègue Marcel-Pierre Cléach a déposé une proposition de loi à ce sujet. Pourriez-vous nous en dire davantage sur vos intentions ?
Les crédits inscrits pour la majoration des rentes mutualistes sont en hausse de plus de 6,86 %, afin de tenir compte de l’entrée dans le dispositif de nouveaux bénéficiaires issus de la quatrième génération du feu. Ils prennent également en compte l’insuffisance des crédits de la loi de finances pour 2008.
Cependant, si l’indice du plafond majorable de la rente mutualiste a été porté à 125 points par la loi de finances pour 2007, le relèvement de cet indice, qui bénéficie à plus de 400 000 ressortissants, à 130 points PMI constitue toujours une revendication pressante des associations.
Autre revendication récurrente, l’abaissement de soixante-quinze à soixante-dix ans de l’âge d’accès à la demi-part fiscale.
Sans méconnaître le contexte budgétaire contraint, nous vous remercions, monsieur le secrétaire d’État, des précisions que vous pourrez nous apporter sur ce point.
Je voudrais aborder maintenant la situation des orphelins de guerre. S’il faut se féliciter de la bonne application des dispositifs prévus pour l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, il est regrettable que ces droits ne soient pas étendus à d’autres orphelins victimes de la barbarie nazie. En 2004, nous avons obtenu, avec nos collègues, que l’indemnisation soit ouverte aux orphelins dont les parents sont morts en déportation, fusillés ou massacrés pour des actes de résistance ou des faits politiques.
Cela étant, au motif que leurs parents sont morts les armes à la main pour rétablir la liberté et la République sans avoir été pour autant arrêtés ou fusillés, certaines personnes restent encore exclues de ce dispositif d’indemnisation.
Il est temps aujourd’hui de réparer cette injustice. C’est pourquoi nous vous demandons, monsieur le secrétaire d’État, comme nous l’avions demandé l’an dernier, d’accepter d’étendre l’indemnisation à tous ceux dont les parents ont été victimes de la barbarie nazie, quelles que soient les conditions de leur mort et, mieux encore, de réfléchir à l’extension du dispositif d’indemnisation à tous les orphelins de guerre et pupilles de la nation, mais également aux prisonniers des Vietminhs.
Les conclusions de la mission confiée au préfet Jean-Yves Audouin sur l’évaluation des décrets de 2000 et 2004 devaient être rendues cette année. Mais le rapport de la mission n’est toujours pas finalisé. Il a pris un certain retard, ce qu’il faut déplorer. Permettez-nous, monsieur le secrétaire d’État, d’espérer que les propositions de ce rapport seront examinées dans des délais les plus brefs possibles, afin qu’une traduction budgétaire puisse être envisagée dans le prochain budget.
Mais en attendant, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous attachez, comme nous tous, la plus haute importance au devoir de mémoire, nous vous demandons instamment d’accepter de retenir la mention « Mort pour la France » sur les actes de décès de ces résistants et victimes de la barbarie nazie.
Les enfants de résistants massacrés entre 1940 et 1945 ont pris conscience qu’on avait oublié le sacrifice de leurs parents, morts sous la torture dans les prisons ou dans les camps de concentration, morts lors des combats ou lors des opérations de déminage pour libérer les routes empruntées par les armées alliées. Il ne doit pas y avoir d’iniquité dans le devoir de mémoire, surtout s’agissant des Résistants, auxquels nous devons une reconnaissance éternelle.
Cette requête, monsieur le secrétaire d’État, nous l’avions faite l’an passé à votre prédécesseur, M. Alain Marleix, et nous aimerions connaître l’état d’avancement de ce dossier.
Enfin, nous voudrions nous réjouir d’une mesure attendue depuis tant d’années : je veux parler du règlement définitif du dossier d’indemnisation des incorporés de force dans les RAD-KHD, les formations paramilitaires allemandes.
Ce dossier a connu cette année un heureux dénouement. Les négociations en cours entre l’État français et la fondation Entente franco-allemande ont enfin abouti, le 17 juillet 2008, à la signature d’une convention prévoyant le versement d’une allocation. Dans la mesure où je suis intervenue sur ce sujet au mois de décembre 2004, lors de ma toute première intervention budgétaire dans l’hémicycle, vous comprendrez aisément combien je m’en réjouis.
Je voudrais également formuler quelques demandes émanant des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger concernant les anciens combattants des Français de l’étranger.
Ayant constaté que de nombreux anciens combattants d’AFN n’ont pu être récompensés par l’attribution de la valeur militaire malgré leur courage et leurs actions d’éclat, lacune souvent due à l’absence du journal de marche de l’unité combattante, ils souhaiteraient que la forclusion en vigueur depuis le 1er janvier 1963 soit levée pour six mois, afin que les anciens combattants lésés puissent présenter des attestations sur l’honneur émanant de personnes présentes dans ladite unité.
Ils demandent également le rétablissement du traitement lié à la médaille militaire, attribuée exclusivement à des militaires, ce qui serait un élément important de prestige pour celle-ci.
Enfin, ils voudraient que les harkis décorés de la Valeur militaire pour actes de bravoure puissent être proposés pour l’attribution de cette médaille militaire, même s’ils ne satisfont pas totalement aux critères d’attribution en vigueur.
Monsieur le secrétaire d’État, dans le contexte économique actuel, ce budget, sérieux, sincère et respectueux des attentes du monde combattant comme des engagements du Président de la République, nous paraît plus que satisfaisant.
Avec mes collègues du groupe UMP, je tiens à rendre hommage à l’action que vous menez, au sein du Gouvernement, au service des anciens combattants et victimes de guerre.
Des progrès notables ont encore été obtenus cette année, et nous savons que vous vous faites un point d’honneur à utiliser au mieux les crédits qui vous sont dévolus.
Nous voulons vous remercier très vivement d’avoir accueilli favorablement la proposition de création d’une médaille d’honneur du monde combattant.
Nous avons ce devoir de mémoire, ce devoir de reconnaissance, envers nos anciens combattants, et nous devons leur manifester, par tous les moyens possibles, notre gratitude. Dans cet esprit, ne serait-il pas utile d’envisager l’accroissement du contingent de décorations réservées aux anciens combattants, qui nous semble bien insuffisant au regard des légitimes attentes, notamment chez nos compatriotes de l’étranger ?
Pour toutes ces raisons, nous vous apportons notre entier soutien et nous voterons les crédits affectés à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette année encore, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », que nous sommes chargés d’examiner, sont en baisse.
Ce budget est malheureusement dans la lignée des précédents. Une réduction de 3 % hors inflation équivaut à une baisse de 5 % à 6 %. Avec une telle diminution, ce budget ne corrigera pas les injustices accumulées depuis des années. Au contraire, il les accentuera. La projection contenue dans la programmation pluriannuelle confirme cette tendance à la baisse pour les années 2010 et 2011.
Justifier cette réduction en avançant l’idée que la dotation par ressortissant augmente en raison de l’évolution démographique revient à faire abstraction du nombre de ressortissants de l’Office national des anciens combattants et du fait que la veuve d’un ancien combattant décédé devient à son tour ressortissante de l’ONAC.
Maintenir le budget précédent aurait permis de répondre favorablement aux attentes des anciens combattants. Monsieur le secrétaire d’État, il s’agit là d’une occasion manquée.
Les engagements qui ont été pris en vue d’améliorer la situation des anciens combattants ne doivent pas se limiter au devoir de mémoire. Ils doivent se concrétiser dans les faits.
Monsieur le secrétaire d’État, lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle, l’actuel Président de la République avait promis, et votre prédécesseur a relayé cet engagement, de poursuivre l’augmentation de l’indice de deux points par an pour les trois prochains budgets, c'est-à-dire les projets de loi de finances pour 2009, 2010 et 2011, et de trois points en 2012, pour arriver à l’indice 48 en fin de législature. Ces engagements ne seront pas tenus.
L’année dernière, une revalorisation de deux points au 1er janvier nous avait été annoncée. Dans la réalité, elle n’est entrée en vigueur qu’au 1er juillet. Comme les pensions sont payées à terme échu, une revalorisation au 1er juillet n’est versée qu’au 1er janvier de l’année suivante, ce qui sera le cas pour 2009. Ce glissement est fort préjudiciable aux anciens combattants. Aussi serait-il souhaitable que le dispositif puisse entrer en application dès le 1er janvier 2009.
Aujourd'hui, la retraite du combattant s’élève à 526,89 euros par an. Un point représente 13,51 euros par an. Une augmentation au 1er janvier de deux points correspondrait à 27,02 euros par an. Convenez-en, au regard des milliards que l’État apporte pour sauver le système bancaire de ses dérives ultralibérales, les sommes qu’une telle décision engagerait sont extrêmement faibles.
Les anciens combattants nous interpellent très souvent sur la revalorisation des pensions militaires, qui est uniquement indexée sur le traitement des fonctionnaires hors primes.
Or, vous le savez, les fonctionnaires, comme d’ailleurs une très large majorité de nos concitoyens, souffrent de la baisse continuelle de leur pouvoir d’achat. Alors que dire du pouvoir d’achat des anciens combattants, en baisse de 6 % au cours de ces cinq dernières années !
Depuis longtemps, les anciens combattants demandent une juste revalorisation de leur retraite, cette retraite qui constitue l’une des traductions les plus symboliques du droit à la réparation et de la reconnaissance de la nation. Il s’agit de la transcription financière de cette reconnaissance envers ceux qui ont combattu pour notre pays.
Monsieur le secrétaire d’État, il est un autre sujet qui devrait, je pense, vous interpeller. Je fais référence à l’allocation différentielle, qui est destinée aux conjoints survivants les plus démunis. Son montant a été augmenté, passant de 681 euros en cours d’année à 750 euros. Si un effort a été réalisé – il a été décidé de ne plus prendre en compte l’aide personnalisée au logement dans le calcul de l’allocation, ce dont nous prenons acte –, il faut aller plus loin. Je suggère de ne pas prendre en compte non plus l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA.
Enfin, reconnaissons-le, il serait normal de porter ce montant à 817 euros, ce qui correspond au seuil de pauvreté reconnu au niveau européen. Je vous le rappelle, pour l’INSEE, le seuil de pauvreté s’élève à 887 euros. À budget constant, il aurait été tout à fait possible d’augmenter le montant de cette allocation différentielle de solidarité.
Afin de garantir la pérennité des crédits destinés à l’allocation différentielle et de donner des gages au monde des anciens combattants, il serait judicieux que l’inscription de ces crédits fasse l’objet d’une ligne budgétaire bien distincte. Monsieur le secrétaire d’État, un tel geste aurait toute sa signification.
L’année dernière, j’avais interrogé votre prédécesseur sur la question du plafonnement de la retraite mutualiste. Cette rente doit être revalorisée. Il faut le reconnaître, pour un certain nombre d’anciens combattants, il est parfois difficile d’atteindre le plafond de cotisation, par manque de pouvoir d’achat.
Par conséquent, il apparaît urgent d’augmenter le montant des retraites et de baisser de 75 à 70 ans l’âge d’accès à la demi-part fiscale accordée aux anciens combattants.
Quand réglerez-vous définitivement la question de la reconnaissance de la campagne double ? Le Conseil d’État, qui a pris connaissance du rapport Gal, après de longs mois, a émis un avis favorable. Voilà un an, votre prédécesseur avait annoncé que des études juridiques complémentaires étaient nécessaires. Ont-elles débuté ? Quand seront-elles rendues ? Il est temps d’aboutir enfin. Vous en conviendrez, le débat ne date pas d’hier ! Il a pour objet de rétablir l’égalité de traitement entre les générations du feu.
Qu’en est-il du dossier de la décristallisation des pensions civiles et militaires des retraités qui ont servi la France et sont devenus étrangers après la décolonisation ? Il est souhaitable de décristalliser l’ensemble des pensions pour que la France ait l’honneur de donner à ces personnes une juste reconnaissance de leur engagement et leur dévouement.
Je voudrais évoquer un point qui inquiète fortement les anciens combattants : la réorganisation des structures qui doivent accueillir, aider et accompagner les anciens combattants dans nos départements. Si l’on maintient le maillage tout en élargissant ses attributions, il est indispensable que ces structures aient les moyens humains, matériels et financiers de fonctionner. Quelles garanties législatives – car les engagements verbaux sont loin d’être suffisants – pouvez-vous nous apporter à cet égard ?
La révision générale des politiques publiques inquiète également le monde combattant, car elle conduit à la disparition de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, pour transférer ses attributions à l’ONAC.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une question budgétaire, je souhaite réitérer la demande que j’avais déjà formulée l’an dernier. La date du 19 mars doit être retenue pour célébrer la journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes de la guerre d’Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie, en lieu et place du 5 décembre.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Robert Tropeano. Les anciens combattants y sont profondément attachés. Ayant moi-même effectué mon service militaire pendant vingt-huit mois en Algérie, je tiens également à la défense de cette date du 19 mars, qui marque véritablement la fin de la guerre d’Algérie.
Enfin, au cours de ces dernières semaines, il a été fait allusion à une journée unique ou nationale du souvenir. Comme certains de mes collègues, je m’y opposerai fortement. La politique de mémoire est indispensable à la transmission de notre histoire, notamment pour les jeunes générations.
Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d’État, vous comprendrez qu’il ne me sera pas possible de voter votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Je remercie les rapporteurs, Janine Rozier, qui a ouvert ces discussions, dans un esprit à la fois raisonnable, combatif et efficace, ainsi que Jean-Marc Todeschini, bon connaisseur du dossier s’il en est. Je salue également, je leur répondrai chemin faisant, les autres orateurs de leurs interventions intéressantes et bien étayées.
Puisque nous sommes entre bons connaisseurs de ce dossier, je vous présenterai les grands axes de la politique mise en œuvre pour le monde combattant et je vous préciserai le cap qui a été fixé pour les trois prochaines années, ce qui me semble une innovation intéressante.
Comme vous l’avez rappelé, le budget s’élève à 3,365 milliards d’euros, hors programme 158. Il est effectivement en diminution d’un peu plus de 2,5 % par rapport à 2008, en raison, hélas ! de l’évolution de notre population d’ayants droit. Mais il augmente là où il doit augmenter, j’y reviendrai.
La modernisation et la rationalisation du service rendu se traduisent par la réorganisation des établissements et des directions. Nous travaillons avec leurs équipes dirigeantes dans un bon esprit. D’ailleurs, la directrice de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion, la DSPRS, et le directeur général de l’office national des anciens combattants, l’ONAC sont aujourd’hui à mes côtés dans cet hémicycle.
Ainsi, l’ONAC, auquel le monde combattant – je salue ses représentants présents dans les tribunes – est extrêmement attaché, se trouve pérennisé et renforcé par le maillage départemental. Il reprendra progressivement d’ici à 2011 les fonctions que la DSPRS, appelée à disparaître, n’exercera plus. L’ONAC deviendra ainsi un opérateur unique, dans l’esprit que je viens de rappeler.
Mon prédécesseur, Alain Marleix, dont je salue l’excellent travail à cette fonction, de même que celui de ses propres prédécesseurs, s’était engagé dans cette réforme. Comme je l’ai dit souvent au conseil d’administration de l’ONAC et devant les représentants des associations du monde combattant, cette démarche mérite un suivi quotidien.
Nous avons effectué des études dans cinq départements types de nature différente pour observer comment les nouvelles mesures pourraient fonctionner. Vous le savez, le diable est dans les détails et l’enfer est pavé de bonnes intentions ! Nous devons donc être attentifs à toutes les conséquences, sachant que la RGPP s’impose à nous comme à tous. Cette réforme est aussi l’occasion d’une modernisation et d’une rationalisation.
Tout au long de cette réforme, nous devrons être attentifs au monde combattant – nous en aurons l’occasion lors des prochains rendez-vous, tel celui que nous aurons à la fin du mois de janvier avec l’ONAC – la réforme ne se fera pas contre, mais avec lui. Il nous faut être réactifs, savoir nous remettre en question et corriger le tir en cas d’éventuelles erreurs dans la mise en œuvre. Tel est mon état d’esprit pour cette réforme.
Le budget de l’ONAC progresse de près de 3,5 %, vous l’avez rappelé. L’enveloppe consacrée à l’action sociale également. Mais tout ne peut pas relever de l’action sociale. Le deuxième contrat d’objectifs et de moyens sera présenté à l’approbation du conseil d’administration du 27 janvier, après discussion, dès lundi, avec le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Je vais maintenant apporter quelques éléments complémentaires en réponse aux questions plus précises que vous avez posées, mesdames, messieurs les sénateurs.
Les maisons de retraite et les écoles de reconversion font l’objet d’une réflexion approfondie. Plusieurs associations s’interrogent sur leur propre évolution : doivent-elles se regrouper dans une ou plusieurs fondations ? Nous menons ces réflexions ensemble et dans un bon esprit.
Plusieurs d’entre vous, notamment M. Fischer, ont fait allusion au devoir de mémoire.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. Moi aussi !
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. En effet, et je ne veux surtout pas vous oublier, madame le rapporteur, dans mes réponses sur cette question importante que nous avons évoquée également en commission et qui nous tient à cœur.
Il s’agit d’une question cruciale, nous l’avons vu récemment. Le Président de la République y attache d’ailleurs beaucoup d’importance – il l’a montré à plusieurs reprises – et les parlementaires s’en préoccupent à juste titre.
Nous proposons trois niveaux de réponse à cette exigence de mémoire.
D’abord, les directeurs départementaux de l’ONAC seront confortés dans leur rôle de promotion de la mémoire combattante, dans le cadre des commémorations et de l’animation du réseau des acteurs de la mémoire, c’est-à-dire des associations et des collectivités qui sont de plus en plus engagées. Nous tiendrons d’ailleurs compte, dans les critères de recrutement des futurs directeurs, de leur capacité à appréhender ces questions.
Ensuite, nous proposons la mise en place de « pôles mémoire ». De manière générale, nous aurons, dans le cadre de la réorganisation de l’ONAC, des pôles de traitement mutualisés. Le niveau départemental, que j’évoquais tout à l’heure, sera au contact et au service du monde combattant. Mais il n’est pas interdit naturellement de mutualiser la démarche sur un espace plus large.
Ces « pôles mémoire » supra-départementaux, d’envergure spécifique ou encore à vocation thématique constitueront un soutien pour les directeurs, dont j’ai évoqué le rôle tout à l’heure.
Enfin, dans un certain nombre de départements, beaucoup plus engagés sur ces questions ou qui possèdent des lieux de mémoire importants, les délégués pourront être maintenus. Ce dispositif est en effet à géométrie variable. Nous avons étudié ces mesures de près afin de nous assurer que cela fonctionne.
L’Institut national des invalides, l’INI, continuera à se moderniser tout en préservant sa singularité. Je profite de l’occasion pour saluer son directeur, qui est parmi nous, dans les tribunes. Je suis ce dossier de très près, peut-être y reviendrons-nous au cours des débats. L’accueil personnalisé me semble important, y compris sur les questions chirurgicales.
Cela vaut aussi pour la mission d’appareillage. Je connais bien ce sujet, y compris d’un point de vue familial. Je tiens à ce que cette mission reste proche du monde combattant. Elle sera confiée au service de santé des armées en liaison avec la caisse nationale militaire de sécurité sociale.
La réforme sera mise en œuvre en lien avec le monde combattant mais aussi, monsieur Tropeano, avec les agents concernés, auxquels j’ai d’ailleurs rendu visite à Caen. Certaines situations pourront se résoudre facilement. D’autres nécessiteront un peu plus d’attention et nous y veillerons.
Les dispositifs relatifs à la reconnaissance et à la réparation que la nation doit à ses militaires seront préservés. Plusieurs d’entre vous m’ont interpellé à ce sujet, qui vous préoccupe tous et sur lequel nous avançons ensemble. J’ai proposé au Premier ministre un amendement prévoyant une augmentation de 2 points de l’indice de la retraite du monde combattant, le portant ainsi à 41 points, à compter du 1er juillet. Après débat, cet amendement a été adopté par l’Assemblée nationale.
Certes, cette mesure pourrait être mise en place plus tôt, dès le 1er janvier. Nous en avons discuté. Mais il faut rappeler le contexte du débat de l’an dernier. Si j’ai salué l’action de mon prédécesseur et des parlementaires, c’était également à cet égard. Sur ce sujet, nous devons tous balayer devant nos portes ! Durant vingt-huit ans, tous gouvernements confondus, la situation n’a pas beaucoup évolué ! Puis, depuis 2006, les retraites des anciens combattants ont augmenté de près de 29 %.
On est encore loin du compte, mais les engagements réitérés du Présidents de la République sont respectés. Cela nous importe à tous. Bien sûr, la date du 1er janvier aurait été idéale. Mais soyons pragmatiques ! Nous sommes engagés dans une démarche de 1er juillet en 1er juillet, et au fond, à l’arrivée, le résultat sera le même, c’est ce qui compte ! Dans les congrès des anciens combattants, cette décision est d’ailleurs perçue comme une avancée qui témoigne du respect des engagements. Nous pouvons donc tous en être fiers.
Cet effort sera poursuivi pour respecter totalement les engagements jusqu’en 2012, voire au-delà, et ne pourra être déconnecté de la situation économique et budgétaire globale. Chaque année, nous aurons ce débat.
Je lancerai d’ailleurs, dès le début de l’année 2009, en concertation avec les associations, une discussion approfondie avec mon collègue Eric Woerth portant sur l’évolution à moyen terme de la politique d’intervention de l'État en faveur du monde combattant, pour pérenniser cette démarche.
Plusieurs d’entre vous m’ont interrogé sur les moyens que nous avons mis en œuvre pour le financement du dispositif d’allocation différentielle en faveur des conjoints survivants et des veuves de guerre, auquel je faisais allusion tout à l'heure en évoquant le budget social. La commission des affaires sociales m’avait également demandé des précisions à ce sujet lors de mon audition voilà quelques jours.
Certes, madame Printz, même revalorisé à 750 euros, le plafond de cette allocation reste inférieur à la moyenne européenne, mais nous souhaitons poursuivre notre progression. L’évaluation du montant des ressources permettra de renouveler la démarche et d’envisager une nouvelle hausse de ce plafond. Ainsi, vous le voyez, nous ne souhaitons pas en rester là et nous essayons d’avancer de manière pragmatique et raisonnable.
Un effort important a été fait en faveur du financement de la majoration des crédits destinés aux rentes mutualistes, puisque ces crédits bénéficient d’un abondement de 15 millions d’euros. Cela signifie que le dispositif fonctionne bien.
Je l’ai dit devant l’Assemblée nationale, je ne souhaite pas, dans la conjoncture actuelle, que l’on ouvre des boîtes de Pandore avec des débats sur le plafonnement, les niches, etc. Nous avons réussi à tenir notre position, à préserver le dispositif. Continuons ainsi ! Chacun est naturellement libre de demander des améliorations et de présenter des propositions en ce sens, mais j’ai le sentiment, en tant que membre du Gouvernement engagé sur ce dossier, que toute surenchère n’aboutirait qu’à desservir la cause des bénéficiaires du dispositif à l’heure actuelle.
J’ai signé, le 16 octobre dernier, l’arrêté précisant les modalités d’application du décret de 1953 concernant les anciens appelés au service du travail obligatoire, le STO. Ils recevront une carte avec la mention « personne contrainte au travail en pays ennemi, victime du travail forcé en Allemagne nazie ». Ce texte fait l’objet d’un consensus auprès de toutes les associations d’internés et de déportés et il met fin à une tension ancienne. Il a été publié au Journal officiel du 5 novembre.
En revanche, la question de la reconnaissance des réfractaires au STO est toujours pendante, monsieur Fischer. J’ai donc relancé l’étude relative à l’extension de l’attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires, mais aussi aux patriotes résistants sous l’occupation, les PRO, dont certains d’entre vous connaissent les légitimes revendications, pour régler définitivement le dossier qui concerne les ayants droit très âgés.
Je suis en train de m’assurer que les choses sont techniquement possibles, pour mener ensuite la négociation interministérielle qui s’impose, dans l’espoir de trouver une solution à cette question, comme aux autres problèmes qui se posent et que je tente de régler chaque fois que c’est possible.
C’est le cas des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes RASD et KHD et des « Malgré Elles », qui, ayant fini par obtenir gain de cause après un combat légitime de tant d’années, recevront une indemnité unique d’un montant de 800 euros. Je remercie ceux d’entre vous qui l’ont souligné.
Je pourrais être intarissable sur le combat qui a été mené – un jour, j’écrirai sur le sujet ! Nombre de parlementaires de toutes sensibilités, notamment dans les régions concernées, s’y sont engagés depuis des années. Plusieurs étapes ont été nécessaires. Certains de mes prédécesseurs ont permis d’avancer sur ce dossier ; un engagement a été pris par le Président de la République lors d’un Conseil des ministres décentralisé à Strasbourg en septembre dernier ; M. Marleix a confié un travail au préfet Mahdi Hacène, qui a effectué un travail remarquable de vérification juridique, de préparation des esprits, de dialogue, notamment avec le président de la fondation Entente franco-allemande, André Bord, que j’ai moi-même rencontré à plusieurs reprises. Je vous ferai grâce du détail des différentes étapes ayant conduit à la signature d’une convention entre l'État et la fondation.
Je vous indique néanmoins que, depuis le 17 juillet 2008, date de la signature de cette convention, 4 889 demandes ont été reçues à ce jour – 28 novembre –, dont 4 600 sont saisies et 3 316 seront mises en paiement à partir du 1er décembre, c'est-à-dire lundi prochain.
Vous le voyez, nous avançons vite dès lors que nous disposons des moyens. Comme le prévoit la convention, nous avons versé à la fondation la moitié de l’allocation aux incorporés de forces par prélèvement sur notre propre budget.
D’autres questions restent pendantes, concernant notamment les anciens « malgré-nous », ceux qui n’étaient pas internés dans le camp de Tambow et ses annexes, ceux qui ont beaucoup souffert au cours de détentions en « régime sévère », ceux qui étaient détenus dans des camps à l’ouest de la ligne Curzon.
Je dois avouer que je n’ai pas de réponse à apporter dans l’immédiat à ces questions. Le dispositif ayant été défini par les anciens combattants eux-mêmes à l’issue du second conflit mondial, nous avons quelques réticences à rouvrir ces discussions. Quoi qu’il en soit, nous allons étudier de nouveau ce dossier, toutes les questions que vous posez, mesdames, messieurs les sénateurs, méritant écoute, attention et vérification.
Le rapport commandé au préfet Jean-Yves Audouin, que j’ai rencontré à plusieurs reprises et qui a effectué un travail remarquable, est en voie de finalisation.
Une commission composée de représentants de l’État, d’associations du monde combattant et d’associations des orphelins de guerre va être très rapidement mise en place pour étudier les modalités de mise en œuvre de ce rapport.
Cette commission pourrait rendre ses travaux, après concertation avec les parlementaires, vous en particulier, chère Joëlle Garriaud-Maylam, mais aussi Claude Biwer, qui m’a communiqué des éléments sur le sujet, et vous tous qui êtes intervenus sur ce point, dans le courant du premier semestre de 2009.
Il ne s’agit pas de reculer l’échéance aux calendes grecques, car il va falloir traiter le sujet un jour, chiffres à l’appui. Toutefois, dès lors qu’il s’agit d’un dossier difficile, extrêmement lourd de conséquences, il importe d’avancer prudemment, mais avec franchise et dans la transparence. Il faut que les choses soient dites, que les mesures soient prises si elles sont possibles, mais que ce qui est impossible soit clairement évoqué.
Le sujet n’est donc pas clos, et nous avançons.
Au titre de la décristallisation, une enveloppe de 100 millions d'euros est dégagée en 2009. Ce montant comprend une dotation de 24 millions d'euros pour permettre l’entrée dans le dispositif des veuves mariées après les dates d’indépendance, dont les droits à pension ont été ouverts dès 2007, mais pour lesquelles il a été estimé que les demandes arriveraient progressivement. Nous avançons donc sur ce dossier, vaillamment mais raisonnablement, compte tenu de ses implications financières lourdes.
Vous avez été plusieurs à évoquer l’actualisation des critères d’attribution de la carte du combattant au titre des opérations extérieures, rendue nécessaire pour permettre de prendre en compte les représentants de ce que l’on appelle « la quatrième génération du feu ». Ces critères remontent en effet à la guerre d’Algérie et ne sont plus adaptés aux conditions actuelles d’emploi des forces dans les opérations extérieures, les OPEX. Je compte aboutir assez rapidement sur ce dossier.
Ensuite, comme je l’ai dit récemment à une association d’anciens combattants, s’agissant de l’attribution de la carte du combattant pour ceux qui étaient présents en Algérie après le 2 juillet 1962, la réflexion se poursuit. Je ne suis pas opposé à des avancées sur ce sujet. Toutefois, ma méthode consiste d’abord à avancer dans le domaine des OPEX, puis, sur le fondement des éléments recueillis, à étudier cette situation spécifique.
On sait que les situations à examiner de près concernent la période allant du deuxième semestre de 1962 jusqu’au début de 1963, même si certaines demandes vont jusqu’en 1964.
Madame le rapporteur pour avis, suivant votre idée qui m’a convaincu, j’ai demandé à mes services que soit étudiée la création d’une médaille d’honneur du monde combattant pour récompenser les bénévoles.
Certes, il existe déjà une médaille des porte-drapeaux, comme M. le rapporteur spécial, l’a rappelé – nous la connaissons tous, nous qui sommes des élus locaux – mais une telle reconnaissance est insuffisante.
Vous avez évoqué les associations, madame Rozier, en particulier le Souvenir français. Pour ma part, j’ai fait vivre la manifestation du 11 novembre grâce aux trois cents jeunes qui avaient été mobilisés, préparés avec les établissements scolaires, et ce sous l’égide précisément du Souvenir français. Ses membres sont admirables, comme ceux de nombreuses autres associations similaires, qui méritent toutes d’être saluées.
Cette médaille est donc attendue. J’ai écrit au Grand Chancelier des ordres nationaux, au Grand Maître, le Président de la République. L’idée semble faire son chemin, et nous allons continuer dans cette voie.
Tout a été dit sur le rapport Kaspi, très intéressant, que je vais diffuser auprès de l’ensemble des parlementaires. Il est riche en propositions de rénovation, visant à rendre plus vivantes les commémorations dans un monde où la transmission de la mémoire est importante.
Parfois, on passe de la mémoire à l’histoire, comme lors de la commémoration récente de la Grande Guerre.
Cette mémoire, souvent partagée avec les ennemis d’hier – c’est l’Europe d’aujourd’hui –, avec les soldats venus de tout l’Empire d’autrefois morts pour la France – les tirailleurs sénégalais, marocains, d’Asie – constitue un élément du ciment national et donc de l’esprit de défense.
C’est pourquoi il importe de faire vivre ces commémorations.
Pour ce faire, nous devons nous appuyer également sur les moyens modernes de communication, les archives qui sont sources de documentaires magnifiques, ainsi que sur les nouveaux médias qui offrent des possibilités extraordinaires, comme nous avons pu le voir à propos de la guerre de 1914, mais aussi sur les écoles que j’évoquais tout à l’heure en citant l’exemple de ma ville.
Le rapport Kaspi nous aide dans ce domaine. Pour le reste, nous avons été très clairs dès sa publication, le 12 novembre, en déclarant que nous ne retenions pas ses propositions en matière de dates. Le Premier ministre a confirmé que toutes les commémorations nationales étaient maintenues.
À l’évidence, il serait stérile d’ouvrir une polémique sur les commémorations. N’oublions pas le travail très intéressant effectué par le président de l’Assemblée nationale, M. Accoyer, sur les questions de mémoire et d’histoire.
Vous avez évoqué la date de commémoration de la guerre d’Algérie. Nous ne toucherons à aucune date nationale, nous ne toucherons donc pas au 5 décembre. À cette date, je serai d’ailleurs présent aux côtés du ministre de la défense, Hervé Morin. Je me suis exprimé à plusieurs reprises au sujet du 19 mars et je souscris à ce qu’André Marleix a pu dire ou écrire aux préfets avant les commémorations.
La commémoration de la guerre d’Algérie a toute sa place, comme beaucoup d’autres commémorations qui ne sont pas nationales, mais qui représentent des moments importants pour une grande partie de la population.
C’est ainsi que nous avancerons et non pas en entretenant des querelles mémorielles. C’est un point de vue que nous partageons tous.
Il convient également de noter l’augmentation des crédits pour les sépultures de guerre.
Je ne m’étendrai pas sur la Journée d'appel de préparation à la défense, la JAPD, et le budget des réserves qui pourtant me tiennent à cœur. Si nous entendons rationaliser l’organisation de ces journées et réaliser des économies d’emplois budgétaires, nous ne pouvons pas amputer la moitié du budget des JAPD et donc priver de ces journées des centaines de milliers de jeunes pour servir d’autres chapitres, si légitimes soient-ils.
Nous menons une réflexion sur la réserve militaire, tant opérationnelle que citoyenne. C’est un dossier auquel j’attache une grande importance. J’ai demandé à l’état-major des armées de voir comment on peut encore améliorer la gouvernance, le lien avec les entreprises, le financement des réservistes dont la sociologie a profondément changé avec la modernisation des armées.
Notre budget se veut à la fois audacieux dans la prise en compte des réformes touchant au monde des anciens combattants, solidaire envers celles et ceux qui en ont le plus besoin et sensible aux enjeux de mémoire qui forgent notre identité collective et notre capacité à vivre ensemble. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Anciens combattants, mémoireet liens avec la nation |
3 491 423 717 |
3 470 524 512 |
Liens entre la Nation et son armée |
183 676 067 |
163 376 862 |
Dont titre 2 |
126 540 070 |
126 540 070 |
|
|
|
Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant |
3 201 749 326 |
3 201 749 326 |
Dont titre 2 |
55 958 886 |
55 958 886 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale |
105 998 324 |
105 398 324 |
Dont titre 2 |
1 900 000 |
1 900 000 |
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II–87, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
30 000 000 |
30 000 000 |
||
Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
30 000 000 |
30 000 000 |
||
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. L’adoption de cette mesure permettrait au Gouvernement de tenir une de ses promesses et d’atteindre une revalorisation aboutissant à l’indice 48 en fin de législature.
Nous avançons à petits pas, puisque cette année l’indice est passé à 39 points, mais seulement à partir du 1er juillet et qu’il est prévu de le faire augmenter de 2 points l’année prochaine, également au 1erjuillet.
Pour notre part, nous avons une autre conception de la façon dont cet indice doit évoluer pour atteindre l’indice 48 comme l’a annoncé le Président de la République.
Nous sommes dans un contexte de crise économique et sociale. La plupart des anciens combattants sont des retraités et, comme on le sait, leur pouvoir d’achat a perdu 1,6 % en un an. Le pire est peut-être devant nous !
Par conséquent, au lieu d’augmenter l’indice de 2 points l’année prochaine, de 2 points l’année suivante et de 3 points en fin de législature, il nous semble plus réaliste d’inverser le calendrier, et de prévoir pour l’année à venir une augmentation de 3 points.
Mme la présidente. L'amendement n° II-120, présenté par M. Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
19 000 000 |
19 000 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
19 000 000 |
19 000 000 |
||
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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TOTAL |
19 000 000 |
19 000 000 |
19 000 000 |
19 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à revaloriser la retraite du combattant de 1 point supplémentaire d’indice par rapport à l’amendement gouvernemental adopté à l’Assemblée nationale.
Je répète que l’engagement de porter à 48 points d’indice cette retraite sous la précédente législature n’avait pas été tenu.
Certes, monsieur le secrétaire d'État, par amendement à l’Assemblée nationale, vous avez porté cet indice de 39 points à 41 points, mais au 1er juillet 2009, selon la pratique des « tout petits pas » lancée par M. Hamlaoui Mékachéra et devenue coutumière avec M. Alain Marleix.
Cette retraite – le terme est d’ailleurs impropre, car il s’agit d’un droit à réparation – représente une somme qui n’est pas extraordinaire. Chacun est surpris du montant lorsqu’il en prend connaissance puisqu’il s’agit de 526,89 euros par an !
Depuis sa création, les anciens combattants ont perdu du pouvoir d’achat. Là aussi, il y a une querelle sur les chiffres : la perte est-elle de 10 %, de 15 %, de 20 %, de 25 % ou de plus de 25 % faute d’avoir remis à plat le rapport constant et compensé le retard accumulé ?
Non seulement vous présentez aux anciens combattants un budget que je qualifierai d’étique, mais de plus vous pratiquez … irai-je jusqu’à dire de la « cavalerie budgétaire » ? Non, car vous êtes tributaire de contraintes budgétaires que vous avez fort bien reconnues, monsieur le secrétaire d'État, mais la question reste posée.
Vous faites des économies avec les crédits qui ne seront jamais consommés. Là aussi, c’est la règle du jeu. Mais les pensions n’étant payées qu’à terme échu, la revalorisation au 1er juillet n’est versée qu’au 1er janvier de l’année suivante ! C’est un des problèmes.
Je voudrais également souligner une disposition scandaleuse qui montre que vous ne craignez pas de reprendre d’une main ce que vous donnez de l’autre : pour le calcul du droit à la CMU complémentaire ou de l’acquisition d’une complémentaire santé, la retraite du combattant est prise en compte dans le calcul des ressources. C’est abusif, vous en conviendrez. J’ai un exemple concret : le pensionné auquel je pense a gagné en déposant un recours !
Et ne me resservez pas le discours selon lequel rien n’a été fait depuis 1978 ! Il faut tout de même rappeler que la loi de finances pour 1959 avait baissé le nombre de points pour tous et que le gouvernement d’alors, qui n’était pas de gauche, ne l’a rétabli que pour les anciens combattants de la guerre de 1914-1918 qui étaient alors descendus manifester dans la rue, mais c’est de la vieille histoire !
Le Président de la République ayant pris, par écrit, l’engagement de revaloriser de 11 points en cinq ans la retraite du combattant, j’estime être très raisonnable en proposant d’augmenter de 1 point supplémentaire la revalorisation de cette retraite, ce qui la porterait à 3 points.
En fait, monsieur le secrétaire d'État, nous souhaitons que les engagements pris par vos prédécesseurs soient tenus.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° II-93, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
26 000 000 |
26 000 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
26 000 000 |
26 000 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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TOTAL |
26 000 000 |
26 000 000 |
26 000 000 |
26 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Nous nous retrouvons dans une situation identique à celle de l’an passé.
Je vous rappelle que le Président de la République s’est engagé à porter la retraite du combattant de l’indice 37 à l’indice 48 sur cinq ans.
Une première étape a vu le jour cette année, mais elle n’a été financée qu’à partir du 1er juillet. Il ne s’agit donc que d’une demi-mesure. Comme elle n’était pas contenue dans vos prévisions initiales, vous en diminuez la portée en ne la rendant effective qu’au 1er juillet.
L’augmentation, en fait, ne sera que de 1 point sur l’année 2008. Si le Président veut respecter ses engagements, il faut accélérer le processus.
Cette année, vous avez repris le même scénario que l’année dernière ; nous avançons les mêmes arguments.
Respectueux du monde combattant, nous demandons que l’augmentation soit effective au 1er janvier.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. En ce qui concerne la retraite du combattant, l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, a adopté une revalorisation de 2 points de son indice de référence à compter du 1er juillet 2009.
Qu’il s’agisse d’augmenter dès 2009 de 3 points, de 1 point supplémentaire ou d’avancer au 1er janvier prochain la date d’application de la revalorisation, je ne peux, au nom de la commission des finances, mes chers collègues, qu’émettre un avis défavorable.
M. Guy Fischer. Nous le regrettons vivement !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. J’ai développé dans ma présentation du budget les arguments que j’oppose à ces propositions.
Je peux comprendre vos motivations, madame, monsieur le sénateur, mais nous nous situons dans une démarche annuelle raisonnable. Nous nous battons pour nous y tenir. Toute surenchère nous affaiblirait.
Je suis donc défavorable à ces amendements.
M. Guy Fischer. Vous n’avez pas qualifié cette « surenchère » de « démagogique », c’est déjà ça !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-87.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-119, présenté par M. Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
12 000 000 |
12 000 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
12 000 000 |
12 000 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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TOTAL |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L’objet de cet amendement est de revaloriser le plafond majorable des retraites mutualistes des anciens combattants en le portant de l’indice 125 à l’indice 127 dans la perspective de solder d’ici à 2012 cette très ancienne revendication du monde combattant.
J’ai évoqué dans la discussion générale l’idée d’un engagement pluriannuel.
Un précédent gouvernement s’était engagé, en 2002, à ce que la revalorisation atteigne ce seuil en 2007. Encore un engagement formel du Président de la République qui n’aura pas été tenu. Et je n’accepterai pas l’argument déjà utilisé pour justifier ce manque de parole, à savoir que cette disposition s’appliquerait prétendument à des nantis !
Ainsi que nous le savons tous, le législateur de 1923 avait souhaité aller plus loin que la constitution d’un simple complément de retraite aidée par l’État. Il l’avait inclus dans le droit à réparation, considérant les risques de mortalité et les conséquences sur l’avenir de la famille du combattant.
Il est d’ailleurs significatif qu’un grand nombre de jeunes militaires ayant participé aux opérations extérieures souscrivent de tels contrats.
S’agissant du coût de la revalorisation du plafond majorable, je pense qu’il faut tout prendre en compte. Je sais qu’il s’agit là d’un excellent placement pour l’État et d’une bonne opération pour l’économie du pays, qui bénéficie par un effet levier d’un retour non négligeable. M. le secrétaire d'État n’a pas parlé de niche fiscale, mais je ferai tout de même remarquer que les anciens combattants consentent là un effort financier sensible.
Vous me rétorquerez qu’il convient d’ajouter le coût fiscal des rentes mutualistes. En effet, ce dispositif permet une déduction des versements effectués au titre des impôts. Vous me direz également que la retraite mutualiste servie aux anciens combattants est exonérée de l’impôt sur le revenu.
Il n’en demeure pas moins qu’il est inacceptable de marchander ainsi.
L’amendement que je vous propose, pour un coût estimé à 12 millions d’euros, représente une goutte d’eau au regard des milliards d’euros dilapidés pour l’immoral renflouement des banques dont nous n’avons pas la véritable maîtrise, comme nous le souhaiterions.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que les anciens combattants qui nous écoutent ce soir sont aussi des retraités dont le pouvoir d’achat a chuté de 1,6 % en un an et qui, pour plus d’un million d’entre eux, vivent sous le seuil de pauvreté.
Pour toutes ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-86, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
5 500 000 |
5 500 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
5 500 000 |
5 500 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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TOTAL |
5 500 000 |
5 500 000 |
5 500 000 |
5 500 000 |
SOLDE |
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à porter la rente mutualiste à 128 points d’indice au 1er janvier 2009 de manière à tendre vers l’objectif affiché par le Président de la République.
En 1996, le protocole d’accord entre les associations d’anciens combattants et le gouvernement de l’époque a prévu de porter à 130 points d’indice des pensions militaires d’invalidité le plafond majorable de cette rente.
La promesse de donner suite à cette revendication faite par le Président de la République lors de la campagne électorale ne s’est malheureusement concrétisée ni dans le budget de 2008 ni dans celui de 2009, que nous examinons aujourd’hui.
Si les décisions de majoration supplémentaire doivent s’effectuer à un rythme compatible avec les exigences budgétaires, il est incompréhensible qu’aucun effort ne soit fait pour tendre progressivement vers cette revalorisation tant attendue par le monde combattant.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. Le plafond de la rente mutualiste du combattant est fixé à 125 points depuis le 1er janvier 2007. La commission des finances émet un avis défavorable sur ces deux amendements qui visent à augmenter cet indice en 2009.
Par ailleurs, je signale que l’amendement visant à augmenter la valeur du point ne serait pas sans conséquence sur les autres prestations servies.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Je rappelle simplement que cette dotation est en augmentation de près de 7 %. Il s’agit donc d’un mécanisme qui progresse.
Il me paraît raisonnable, pour les motifs que j’ai invoqués tout à l’heure que nous en restions là.
Mme la présidente. L’amendement n° II-88, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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- |
Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Comme l’amendement précédent, cet amendement tend à préserver la retraite des anciens combattants et leur pouvoir d’achat. Ainsi, nous souhaiterions que la valeur du point atteigne quinze euros.
La valeur du point revêt une importance essentielle, puisqu’elle détermine le montant des prestations servies aux anciens combattants, à leurs ayants droit et ayants cause. Or il est connu que la valeur de référence retenue n’a que peu de rapport avec la rémunération réelle des fonctionnaires de l’État.
En effet, traditionnellement, une part significative de la rémunération des agents de l’État est constituée de primes. La valeur de ces primes n’est, par définition, pas prise en compte dans le montant du point de la fonction publique ni, par conséquent, dans le montant du point PMI, qui sert de référence au calcul de la retraite du combattant.
Le présent amendement vise à permettre au Gouvernement de revaloriser le montant du point PMI en intégrant, autant que faire se peut, une part moyenne de la valeur des primes versées aux fonctionnaires de l’État.
Nous sommes actuellement, comme je l’ai déjà dit, dans une situation économique et sociale difficile : un effort de la nation en faveur de ceux qui ont combattu pour elle serait le bienvenu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État. La valeur du point d’indice des pensions militaires d’invalidité est révisée proportionnellement à l’évolution de l’indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique. Cette valeur a été fixée au 1er octobre 2008 à 13,55 euros. D’autres revalorisations interviendront également en 2009 : 0,5 % au 1er juillet, 0,3 % au 1er octobre. La valeur du point sera donc portée successivement à 13,62 euros, puis à 13,66 euros. Ces dispositions permettent donc une revalorisation régulière raisonnable des pensions militaires d’invalidité, de la retraite du combattant et de la retraite mutualiste et il n’est donc pas envisagé de revenir sur ce dispositif.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-91, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
10 000 000 |
10 000 000 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. La différence de traitement entre les anciens combattants d’Algérie et les autres générations du feu n’est désormais plus défendable.
Ces militaires, engagés dans la guerre d’Algérie et dans les combats du Maroc et de Tunisie, ont subi, comme tous les fonctionnaires combattants des conflits antérieurs, des préjudices de carrière résultant de la durée de leur mobilisation et de ses conséquences. Ils ont donc droit aux mesures de réparation prévues pour les fonctionnaires et assimilés combattants.
Il paraît donc nécessaire que des dispositions établissent clairement le droit des fonctionnaires ou assimilés anciens combattants en Afrique du nord à bénéficier pleinement pour leur retraite des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité, au même titre que les fonctionnaires et assimilés combattants des conflits antérieurs.
Je sais que ce sujet est délicat, mais nous avons aujourd’hui perdu beaucoup de temps. Je ne reviendrai pas sur les événements fâcheux survenus autour du rapport de M. Christian Gal.
Nous souhaitons que la commission qui a été installée pour statuer sur les conditions d’attribution de la campagne double remette ses conclusions au cours du premier semestre 2009 : nous pourrions ainsi dire aux anciens combattants d’Afrique du nord qu’ils ont les mêmes droits que les autres générations du feu.
Il ne s’agit pas pour nous d’un quelconque privilège, mais d’une reconnaissance et d’un droit à réparation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État. La campagne double est un sujet sensible, comme vous l’avez rappelé. Je n’ignore ni le rapport Gal ni l’avis du Conseil d’État qui a suivi, mais il ne faut pas ignorer non plus les difficultés d’application d’une telle mesure. J’ai relancé la concertation interministérielle sur ce sujet, comme me l’avaient demandé les associations d’anciens combattants. Je me donne donc jusqu’à la fin du printemps 2009 pour vous faire part de propositions concrètes sur ce dossier, même si elles ne répondent pas tout à fait aux souhaits exprimés par le monde combattant. Là aussi, il faudra trouver une solution équilibrée.
Je rappelle, par ailleurs, que l’incidence budgétaire de la campagne double n’entre pas dans le cadre du programme 169, mais dans le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraites et allocations d’invalidité » de la mission « Pensions », et que le programme 167 est contraint.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-90, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Les attentes concernant la pérennisation et l’augmentation de l’allocation différentielle de solidarité en faveur des conjoints survivants les plus démunis ne sont pas non plus satisfaites par le projet de loi de finances pour 2009.
Il est indispensable de relever aujourd’hui le montant de l’allocation différentielle au niveau du seuil de pauvreté européen, évalué à 817 euros mensuels, soit 67 euros de plus que le montant actuel. La mesure que nous proposons est une étape pour arriver l’année prochaine au seuil de 887 euros, seuil de pauvreté défini par l’INSEE : son application cette année coûterait un million d’euros.
Cette mesure significative constituerait un début de réponse au monde des anciens combattants. En fait, la création d’une véritable allocation différentielle servie aux conjoints survivants les plus démunis nécessite l’inscription de ces crédits sur une ligne budgétaire clairement identifiée et non une simple augmentation des crédits sociaux de l’ONAC.
Notre objectif est que plus un seul conjoint survivant dans notre pays, essentiellement des veuves, n’ait de revenus inférieurs au seuil de pauvreté. Il est fondamental que la représentation nationale donne un signal : c’est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de prendre en compte notre proposition pour une création et une pérennisation effective de l’allocation différentielle aux conjoints survivants les plus démunis.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. En ce qui concerne l’allocation au conjoint survivant, il a semblé à la commission que M. le secrétaire d’État était plutôt ouvert au dialogue. La commission s’en remet donc à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État. J’ai dit tout à l’heure que j’avais revalorisé, comme je m’y étais engagé, le plafond de l’allocation en faveur des conjoints survivants à hauteur de 750 euros. Ce geste, me semble-t-il, a été apprécié par le monde combattant – en tout cas, c’est ce que l’on m’a fait savoir –, d’autant que j’ai également décidé, comme certains d’entre vous l’ont signalé tout à l’heure, de ne plus prendre en compte le montant de l’allocation personnalisée au logement dans l’évaluation du montant des ressources. Les efforts que nous faisons sont donc moins théoriques, au vu des évaluations du nombre de personnes concernées.
Il faudra renouveler à la fin du premier semestre de l’année prochaine – je précise ce que j’avais rapidement laissé entendre tout à l’heure – l’évaluation effectuée cette année et, naturellement, en tirer toutes les conclusions sur une éventuelle hausse du plafond et sur le mode de calcul des ressources des allocataires. Avant cette évaluation, la budgétisation d’une augmentation du plafond me paraît prématurée : ne décidons que ce que nous savons pouvoir faire !
Vous l’avez compris, je suis dans le meilleur état d’esprit : l’idée d’atteindre progressivement le niveau du seuil de pauvreté européen, comme vous l’avez rappelé tout à l’heure, me paraît bonne. Aujourd’hui, je ne peux pas être favorable à cet amendement, pour les raisons que je viens d’expliquer.
Mme la présidente. L’amendement n° II-89, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2 |
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Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2 |
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La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Le gouvernement de la France a, très justement, reconnu le droit à indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et racistes pendant la guerre de 1939-1945.
Dans un second temps, en 2004, il a accordé le même statut aux orphelins de parents victimes de la barbarie nazie, morts en déportation, fusillés ou massacrés pour actes de résistance ou pour des faits politiques.
Une troisième catégorie de pupilles de la nation, qui a souvent été déboutée dans le cadre des décrets de juillet 2000 ou de juillet 2004, sollicite une reconnaissance de la part de l’État. C’est celle dont les parents sont morts pour faits de guerre et reconnus par la mention marginale portée sur les registres d’état-civil « Mort pour la France ».
Le présent amendement vise à répondre à cette demande en prévoyant les crédits nécessaires à une extension du dispositif réglementaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. L’amendement concernant l’indemnisation des victimes d’actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale vise l’extension des droits à réparation pour les orphelins.
Lorsque le préfet Jean-Yves Audoin, chargé d’une expertise sur le sujet, aura remis son rapport, le Gouvernement mettra en place une commission de concertation chargée d’examiner ces recommandations, comme nous l’a expliqué M. le secrétaire d’État. Il paraît sage à la commission d’attendre les conclusions que le Gouvernement tirera de ces travaux.
La commission des finances émet donc, pour l’instant, un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État. Comme je l’ai dit tout à l’heure, cette commission va être rapidement constituée. La mission confiée au préfet Audoin s’inscrit dans la perspective de l’instauration d’un cadre juridique unique. Ensuite, des mesures raisonnables d’indemnisation pourront être mises en œuvre. En tout cas, nous progressons.
Le Gouvernement a également émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion l’article 59 septies, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Article 59 septies
I. – À compter du 1er juillet 2009, au deuxième et à la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 256 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, le nombre : « 39 » est remplacé par le nombre : « 41 ».
II. – Par dérogation au deuxième alinéa du III de l’article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1576 du 30 décembre 2002), la modification mentionnée au I du présent article est applicable aux retraites du combattant visées au I de l’article 100 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007. – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 59 septies
Mme la présidente. J’appelle en discussion un amendement tendant à insérer un article additionnel qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».
L'amendement n° II-92, présenté par Mme Printz, MM. Patriat, Jeannerot, Anziani, Teulade et Le Menn, Mmes San Vicente-Baudrin, Le Texier, Demontès, Schillinger, Chevé et Herviaux, MM. Cazeau, Domeizel, Reiner, Godefroy, Masseret, Michel, Madec et Todeschini, Mmes Jarraud-Vergnolle, Alquier, Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 59 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le f du 1 de l'article 195 du code général des impôts, les mots : « 75 ans » sont remplacés (deux fois) par les mots : « 70 ans ».
II. - Le I entre en vigueur au 1er janvier 2010.
III. - Les pertes de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune prévu à l'article 885U du code général des impôts.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Le régime fiscal des anciens combattants accorde une demi-part supplémentaire au titre de l’impôt sur le revenu à partir de soixante-quinze ans.
De nombreux anciens combattants n’y ont pas encore droit.
En cette période de difficultés économiques et sociales, nous vous demandons, mes chers collègues, d’augmenter le bénéfice de cette disposition.
Ce sont les raisons qui nous conduisent à abaisser l’âge d’accès à cette demi-part de soixante-quinze à soixante-dix ans.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. Cet amendement vise à ramener de soixante-quinze ans à soixante-dix ans le seuil à partir duquel les anciens combattants bénéficient d’une demi-part supplémentaire au titre de l’impôt sur le revenu.
Lors de l’examen d’un amendement similaire en première partie du projet de loi de finances, le rapporteur général avait exprimé l’avis défavorable de la commission à cette extension d’une niche fiscale. Aussi, pour le même motif, la commission des finances donne un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Gisèle Printz. C’est une toute petite niche !
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Certes, mais l’abaissement de la condition d’âge permettant de bénéficier de cet avantage ne peut être envisagé dans la mesure où celui-ci constitue déjà – et je vous remercie de l’avoir rappelé, monsieur le rapporteur spécial -, une dérogation importante au calcul de droit commun du quotient familial. Il sera d’autant plus facilement préservé qu’il gardera son caractère exceptionnel. C’est un argument qui a toute sa portée dans le contexte actuel.
Je précise en outre que la demi-part fiscale est accordée à l’invalide pensionné sans condition d’âge dès lors que sa pension est d’au moins 40 %.
Par ailleurs, toute modification du code général des impôts relève de la compétence du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Aucune modification n’est pour l’instant envisagée.
Le Gouvernement est donc également défavorable à cet amendement.
M. Guy Fischer. Le bouclier fiscal, c’est 15 milliards d'euros !
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.)
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Santé
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé » (et article 73).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » rassemble environ 1,1 milliard d’euros, répartis en trois programmes. Elle recouvre désormais l’ensemble des crédits « sanitaires » relevant du ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. En revanche, elle ne comprend toujours pas de crédits de personnel, ceux-ci restant inscrits sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Vous savez ce que j’en pense !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Nous en pensons la même chose, madame la ministre ! Nous devrions peut-être un jour dire ensemble ce que nous en pensons !
La mission « Santé » est également modeste lorsqu’on la rapporte aux dépenses d’assurance maladie ou même aux dépenses fiscales concourant directement aux actions relevant des différents programmes. Pour 1,1 milliard d’euros de recettes, les dépenses fiscales atteignent près de 4,9 milliards d’euros. Nous nous occupons actuellement de quelques niches ; j’espère que nous pourrons aider le Gouvernement à réduire le déficit.
Les amendements que je présente nous permettront d’aborder plus finement différents sujets : la formation médicale continue, l’Agence pour les systèmes d’information de santé partagés et l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS. Je voudrais maintenant aborder d’autres thèmes, sur lesquels je souhaite obtenir des précisions.
En ce qui concerne le nouveau programme 204 « Prévention et sécurité sanitaire », je note tout d’abord une diminution de 14,7 millions d’euros des crédits qui seront consacrés à la lutte contre le cancer en 2009, ce qui peut s’expliquer au regard de la sous-consommation des crédits constatée lors de l’exécution budgétaire de 2007, à hauteur de 28,5 millions d’euros. La Cour des comptes avait souligné la mise en œuvre parcellaire du Plan cancer et les faiblesses de son suivi.
Vos services, madame la ministre, m’ont indiqué que « le nouvel élan qui sera donné à la lutte contre le cancer dès l’année 2009 suivra les recommandations de la Cour en matière de suivi avec la mise en place d’un dispositif durable d’évaluation des mesures ».
Je souhaiterais donc que vous m’indiquiez précisément les mesures que vous entendez prendre en la matière. De façon plus générale, je m’interroge, une nouvelle fois, sur la sous-consommation des crédits destinés à ce poste de dépenses, alors que, chacun en est bien conscient, la lutte contre le cancer devrait demeurer une priorité nationale.
J’insisterais ensuite sur le saupoudrage des crédits versés, dans le cadre de ce programme, à divers comités, commissions et observatoires ad hoc. Ces structures viennent se greffer au dispositif pourtant déjà complexe des agences de sécurité sanitaire, et leur multiplication est source de chevauchements de compétences et de dispersion des moyens financiers et humains.
Comme l’avait souligné, à de nombreuses reprises, notre collègue Nicole Bricq, alors rapporteur spécial de la mission « Sécurité sanitaire », il me paraît essentiel d’opérer un réexamen de l’ensemble de ces structures. Les travaux menés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques avaient abordé cette question et proposé des regroupements d’agences. Quelles seront, madame la ministre, les traductions concrètes de ces travaux ? À quelle échéance ? Et quelles sont les économies attendues de ces rapprochements ?
Concernant le programme « Offre de soins et qualité du système de soins », j’observe une progression des crédits consacrés à la formation médicale initiale des internes, conformément à ce que vous aviez annoncé devant la commission des finances en juillet dernier.
Ces dépenses avaient fait l’objet, les années passées, de sous-budgétisations. Je souhaite donc connaître quel est, à ce jour, le montant exact de la dette du ministère et quelles dispositions vous entendez prendre pour remédier aux lacunes des programmations budgétaires antérieures.
Le ministère détient également des dettes à l’égard des établissements de santé au titre de certains contentieux. Ces dettes sont évaluées à 37,2 millions d’euros. Vos services m’ont indiqué avoir adopté « une politique de règlement transactionnel pour alléger le poids de la dette de l’État ». Madame la ministre, je souhaite que vous nous précisiez l’état exact de cette situation.
La principale dépense du programme « Protection maladie » est l’aide médicale de l’État, les crédits prévus progressant fortement pour atteindre 490 millions d’euros en 2009. J’enfonce peut-être une porte ouverte, mais ces crédits ont longtemps été sous-évalués et, malgré un assainissement de la situation intervenu en octobre 2007, on comptabilise 264 millions d’euros de dettes au titre de l’exercice 2007, tandis que les insuffisances liées à l’exercice 2008 sont évaluées à 90 millions d’euros. Les crédits inscrits en loi de finances pour 2008 intégraient une hypothèse d’économie de 102 millions d’euros au total, qui ne s’est pas réalisée. Quand comptez-vous rembourser ces dettes, madame la ministre ? Envisagez-vous d’inscrire certains crédits lors de l’examen du collectif budgétaire ?
Dans ce contexte, la réévaluation de la dotation prévue pour 2009 représente un effort bienvenu. Je note que sont prévus 30 millions d’euros d’économies, qui devraient provenir de mesures déjà envisagées l’an dernier. J’espère très sincèrement qu’elles auront plus de succès.
En revanche, la mise en œuvre d’une participation forfaitaire des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État, l’AME, n’est plus évoquée. Je souhaite donc, madame la ministre, que nous précisiez si vous entendez réellement mettre en œuvre cette mesure ?
Sous réserve de l’adoption des amendements qu’elle présente, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Santé ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » se présente cette année sous une forme rénovée. Elle regroupe désormais l’ensemble des crédits d’État mis à la disposition du ministre pour conduire la politique de santé publique.
C’est là une clarification bienvenue et conforme aux souhaits que nous avions exprimés lors des derniers budgets. Je pense néanmoins qu’un effort supplémentaire peut encore être fait pour que les 600 millions d’euros de crédits de personnel et de communication du ministère de la santé soient également rattachés à la mission « Santé » plutôt qu’à la mission « Solidarité ». Nous aurions alors véritablement une vision globale de la situation.
Je note également qu’au 1,5 milliard de crédits budgétaires il faut ajouter 4,8 milliards d’euros de dépenses fiscales. Une remise à plat des mesures d’exonération me paraît nécessaire car, sur les dix-sept mesures actuellement prévues par la loi, sept sont sans effet ou ne sont pas chiffrées.
Pour avoir une vision exacte des moyens mis en œuvre, il faut également prendre en compte les plans en matière de santé publique et de prévention. On en dénombre actuellement vingt-deux, dont trois ont été lancés cette année. De plus, les plans prévus par la loi relative à la politique de santé publique de 2004 sont arrivés à échéance, et de nouveaux plans sont en cours d’élaboration pour prendre leur suite dans des domaines aussi importants que le cancer, les maladies nosocomiales ou les maladies rares.
Or l’examen des crédits de la mission « Santé » ne permet pas de savoir si ces plans sont cohérents ou trop nombreux, s’ils sont réalistes ou sous-financés. La nouvelle présentation budgétaire nous a même fait perdre la vision d’ensemble que nous avions pour les crédits consacrés à la lutte contre le sida, qui se trouvent désormais répartis entre plusieurs missions.
Madame la ministre, vous avez fait œuvre de clarification en publiant un « livre des plans ». Pour la prolonger, je vous propose de nous transmettre, outre la présentation synthétique des plans, un état annuel des actions mises en œuvre et des sommes allouées. De plus, je souhaite que nous puissions disposer de documents de synthèse concernant les crédits alloués à trois domaines qui nous soucient tout spécialement : la lutte contre le sida, contre l’alcoolisme et contre le tabagisme.
J’en viens maintenant à un autre sujet qui intéresse la commission des affaires sociales, celui des agences. Elles concentrent 50 % des crédits du programme « Prévention et sécurité sanitaire », soit plus de 240 millions d’euros. Leur rôle est utile et irremplaçable, ce qui ne doit pas nous empêcher de nous interroger sur le bien-fondé de certaines d’entre elles. Selon nous, la multiplication des agences est porteuse d’un double risque : soit leurs compétences se recoupent, et alors il y a gaspillage des fonds publics ; soit elles ne couvrent pas tout le champ de la sécurité sanitaire, et alors certains risques ne sont pas suivis.
Ainsi, après examen des différentes structures, nous partageons l’idée, madame la ministre, que la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, serait une bonne chose. Je souhaite également que soit étudié le bien-fondé d’une fusion entre l’Institut national de la transfusion sanguine et l’Établissement français du sang, dont la séparation tient à des raisons plus historiques que pratiques.
Plus largement, si une fusion n’est pas parfaitement possible, on doit évidemment limiter les coûts de fonctionnement des agences, en facilitant leur mutualisation. Une mission d’audit et de performance avait été diligentée en février 2007 pour créer des plates-formes communes aux agences. Si cette mission a conclu qu’il était trop tard pour agir, la commission des affaires sociales souhaite, pour sa part, que vous relanciez ce projet de mutualisation.
J’ai indiqué l’importance du lien entre recherche et administration. Du fait de leur nature même, les agences permettent de créer ce lien, et même de le favoriser. Pour le conforter, j’avais souhaité présenter un amendement concernant l’Institut national du cancer, l’INCA, mais il a été rejeté par la commission des finances sous prétexte qu’il tombait sous le coup de l’article 40 de la Constitution.
Cet institut consacre 65 % de ses crédits à la recherche. Or il est jusqu’à présent contraint de limiter à une durée de trois ans le financement des projets qu’il sélectionne. Dans certains cas, cette période est trop courte pour l’obtention de résultats. On sait combien la recherche est longue. Comme les paiements prévus s’effectuent chaque année sur justification de l’avancée des travaux, cette limite de trois ans interdit de fait la consommation des crédits, et prive les chercheurs de financement au cours de leurs travaux.
Je vous proposerai donc, madame la ministre, d’autoriser l’INCA à lancer des projets de recherche d’une durée de cinq ans, durée retenue par la plupart des grandes institutions de financement de la recherche dans le monde, dont le National cancer institute aux États-Unis.
Madame la ministre, j’attends de votre part une action en faveur de la recherche et j’approuve pleinement l’amendement que vous avez déposé et qui répond à une préoccupation unanime de la commission des affaires sociales.
Concernant la formation médicale, nous nous félicitons de l’augmentation des crédits liés à la formation des internes. Par ailleurs, j’aimerais connaître l’incidence éventuelle de la nouvelle première année de médecine sur le budget.
J’en viens enfin aux crédits du programme « Protection maladie ».
Je ne reviendrai pas sur la question de la couverture maladie universelle complémentaire, qui a été traitée par l’article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
L’autre grand poste budgétaire de ce programme est constitué par l’aide médicale de l’État. Du fait de l’augmentation des coûts et de l’absence d’économies, cette dette se reconstitue et dépassera les 350 millions d’euros en 2008. Madame la ministre, quand et comment comptez-vous honorer cette dette ?
Dans l’ensemble, la commission des affaires sociales considère que le budget de la mission « Santé » est un budget d’attente qui se situe entre la fin des plans prévus par la loi relative à la politique de santé publique de 2004 et l’adoption prochaine du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », qui va profondément modifier le cadre territorial des politiques de santé. Il marque néanmoins la volonté de l’État d’être plus transparent en matière de dépenses et d’honorer ses dettes.
Sous réserve de ces remarques et interrogations, la commission des affaires sociales vous propose d’adopter les crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite concentrer mon propos sur la formation médicale initiale et continue, qui représente une part très significative des crédits du programme lié à l’offre des soins et à la qualité du système de soins.
La formation médicale initiale des internes est en hausse de 26,7 % par rapport à 2008. Il convient de saluer la progression particulièrement importante des crédits dévolus.
Ces crédits prennent en charge la rémunération des internes de spécialité, qui effectuent des stages au sein d’organismes extra-hospitaliers, celle des internes de médecine générale en stage dans les cabinets de médecins libéraux et, corollairement, les indemnités des praticiens maîtres de stage. Ils financent également les stages de sensibilisation à la médecine générale pour les externes au cours du deuxième cycle des études médicales.
Cette hausse budgétaire suit donc la montée en charge de ces différents éléments.
On sait que l’augmentation du numerus clausus depuis le début des années 2000 entraîne un relèvement progressif et constant du nombre des internes. Selon le travail prospectif sur le nombre d’internes et leur répartition sur le territoire du professeur Yvon Berland, président de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé, ce mouvement devrait s’accentuer dans les toutes prochaines années.
Actuellement, selon les sources, il est fait état de 15 576 à 17 667 internes en formation. Le professeur Berland table sur une hausse de 11 000 internes en formation à l’horizon de 2015. Cet afflux d’étudiants entraîne bien évidemment une augmentation équivalente de postes budgétaires afin de permettre leur accueil et leur rémunération dans les services où ils seront formés.
Le professeur Berland insiste également sur l’urgence à trouver de nouveaux terrains de stage. De nombreux acteurs proposent que l’ouverture de stages d’internats en établissements privés soit reconnue dans le cadre du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires ».
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer, en avant-première, votre position sur ce point ?
Un deuxième mouvement de hausse ayant une incidence directe sur les crédits de cette mission est celui du nombre d’internes en médecine générale.
Lors de cette rentrée universitaire, sur les 338 postes d’internat supplémentaires offerts aux candidats des épreuves classantes nationales, 334 le furent en médecine générale. Bien que certains de ces postes soient demeurés vacants, il est indéniable, madame la ministre, que votre travail de valorisation de cette discipline porte ses fruits.
On sait que ces internes en médecine générale, en effectifs croissants, doivent effectuer un stage en médecine ambulatoire au sein de cabinets libéraux ou de maisons de santé pluridisciplinaires.
En septembre dernier, deux syndicats d’étudiants ont donné le coup d’envoi d’une campagne nationale de recrutement de maîtres de stage en médecine générale, campagne que, madame la ministre, vous avez soutenue.
Les maîtres de stage ne sont aujourd’hui que 3 500 pour accueillir les internes en formation. Les responsables syndicaux étudiants souhaitent, par le biais de cette campagne, recruter 5 000 maîtres de stage dans les deux ans à venir. Les omnipraticiens ont donc reçu un courrier les invitant à se porter candidat.
Toutefois, la rémunération des maîtres de stage reste faible. En effet, 600 euros mensuels accordés peuvent être un obstacle à ce recrutement. Ne faudrait-il pas prévoir une revalorisation de cette indemnité ?
J’en viens maintenant à la formation médicale continue.
Son objectif est d’améliorer, tout au long de la carrière du médecin, ses connaissances et, de ce fait, la qualité des soins qu’il dispense à ses patients. Pour cela, tout médecin en activité doit suivre, sur cinq ans, des actions de formation donnant lieu à l’attribution de 250 crédits, dont 100 s’intégrant dans une démarche d’évaluation des pratiques professionnelles.
Les trois conseils nationaux de la formation médicale continue, des médecins salariés, des médecins hospitaliers et des médecins libéraux, pilotent le dispositif. Le fonctionnement de ces structures est financé par la dotation publique versée au Conseil national de l’ordre des médecins, dont le montant est fixé à 3,6 millions d’euros pour 2009.
L’article 19 du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires » prévoit la refonte totale du montage organisationnel et financier de la formation médicale continue.
Vous y affirmez, madame la ministre, votre intention de simplifier le système ainsi décrit, aussi bien dans son écriture juridique que dans son organisation concrète. Votre objectif est notamment de rationaliser les circuits de gestion administrative du dispositif avec la formation médicale continue, l’évaluation des pratiques professionnelles et la formation professionnelle conventionnelle, en cohérence au sein d’un dispositif unique.
Madame la ministre, mes questions seront précises et vos réponses me permettront d’apprécier la proposition de notre rapporteur spécial de réduire de 1 million d’euros la subvention au Conseil national de l’ordre des médecins.
Les trois conseils nationaux de la formation médicale continue vont-ils disparaître au profit d’une unique instance nationale ou bien ce rôle de leader reviendra-t-il à la Haute autorité de santé ? L’augmentation significative de sa dotation budgétaire pour 2009 s’avère-t-elle une première réponse ?
Les financements de l’État et de l’assurance maladie dans leur ensemble fusionneront-ils en un fonds unique avec la mise en place d’un nouvel organisme gestionnaire ? Si oui, qu’adviendra-t-il du fonds d’assurance formation de la profession médicale et de la formation conventionnelle ?
Selon un sondage de l’IFOP effectué en juin dernier auprès d’un échantillon représentatif de 401 médecins libéraux, ces derniers se déclarent favorables à ce financement socialisé par l’assurance maladie et l’État. Toutefois, ils sont également 27 % à affirmer être prêts à mettre la main à la poche pour financer leur formation continue. Qu’en pensez-vous ?
Je vous remercie par avance, madame la ministre, de vos réponses et je vous confirme que mon groupe votera les crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Excellente intervention !
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » apparaît plus que jamais comme un budget de transition dans l’attente du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », ainsi que l’atteste le gel des crédits accordés aux autorités régionales de santé. Mais ce budget de transition n’est pas sans nous interroger, voire nous mécontenter.
Avant d’entamer le cœur de ce qui constitue notre opposition aux crédits alloués à cette mission, je voudrais dire combien je regrette que les décrets d’application de la loi du 8 février 2008 relative aux personnels enseignants de médecine générale n’aient pas encore été publiés. Il s’agissait pourtant d’un texte qui avait fait l’unanimité dans notre hémicycle. J’avais donc bon espoir que cela avance vite. Tel n’est pas le cas.
En outre, je voudrais appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de procéder rapidement au déblocage des crédits alloués à l’enseignement de la médecine générale. En effet, le nombre de médecins enseignants est très largement insuffisant, à peine 130 pour 6 000 internes.
Toujours dans mes propos liminaires, je souhaiterais vous faire part, madame la ministre, de notre interrogation concernant la réflexion de notre collègue Alain Milon sur les agences sanitaires. Si nous ne sommes pas opposés à une clarification en matière d’agences sanitaires, nous redoutons que celle-ci ne se fasse qu’au bénéfice des seuls motifs économiques. Aussi la fusion envisagée de l’AFSSA, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, et de l’AFSSET, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, nous semble inopportune dans la mesure où risquerait d’être minoré l’important sujet de la sécurité sanitaire au travail. C’est l’une de nos préoccupations, monsieur le rapporteur pour avis. J’espère que vous y serez sensible.
Par ailleurs, je voudrais regretter ici la pratique des transferts entre les différents budgets, qui, bien que parfois heureux, rendent impossibles toute comparaison d’une année sur l’autre. Au-delà de cette question technique, je voudrais dire l’interrogation qui est la nôtre sur le transfert auprès des services du Premier ministre de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Si l’on comprend bien la logique, qui est de favoriser une compétence unique pour une mission transversale, au nom de mes collègues du groupe CRC-SPG, (Exclamations amusées sur plusieurs travées) …
M. Gilbert Barbier. C’est plus long à prononcer !
M. Guy Fischer. Oui, et il va falloir nous y faire. (Sourires.)
… je voudrais rappeler que le traitement efficace de la lutte contre la toxicomanie et les addictions en général ne peut se limiter à une conception sécuritaire. Il ne peut être question que de chercher à sanctionner. Certes, il faut le faire, mais il faut aussi tout mettre en œuvre pour prévenir la toxicomanie et pour permettre à ceux qui en sont victimes de trouver les moyens, en termes d’accueil et d’accompagnement humain, de combattre leur addiction.
Cette question me conduit directement à regretter le recul qu’entame le Gouvernement en matière de lutte et de prévention contre les risques infectieux, particulièrement ceux qui sont liés à la sexualité : le VIH/SIDA, l’hépatite et les autres infections sexuellement transmissibles, les IST. En effet, on ne peut que regretter que le plan de lutte contre le VIH/SIDA et les IST, entamé en 2005 et qui trouve sa fin en 2008, ne soit pas reconduit en 2009. C’est du moins mon impression.
Ainsi, vous entendez diminuer les moyens afférents à la lutte contre les IST de plus de 15 % en 2009, sans compter l’abandon du programme national. Pourtant, jamais les besoins de prévention n’auront été aussi grands.
D’après le bulletin épidémiologique hebdomadaire, en date du 5 février 2008, publié par l’Institut de veille sanitaire, le nombre d’infections sexuellement transmissibles ne cesse de se multiplier. C’est ainsi que les infections à gonocoque ne cessent de croître depuis 2006. Pour éviter de recourir à des termes médicaux inutiles ici, il s’agit d’une recrudescence encore jamais vue de la blennorragie : une augmentation de plus de 70 % sur dix ans ! Aurais-je mal lu ?
Se développe également la lymphogranulomatose vénérienne, particulièrement dans sa forme rectale.
Tout cela est d’autant plus vrai avec la recrudescence du VIH et la multiplication de pratiques sexuelles dangereuses, promues par certains sites internet comme les relations sexuelles sans préservatif, alors que l’on se sait contaminé.
Mais surtout, on constate une recrudescence du nombre de victimes du VIH, particulièrement chez les plus jeunes. C’est dire que je fais mienne la conclusion de l’INVS, qui constate un relâchement dans les pratiques sexuelles et dans les mesures de prévention.
Je ne peux que regretter que, face à ce relâchement individuel, le Gouvernement, qui a une responsabilité en matière de prévention, décide de diminuer ses efforts…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais non, monsieur Fischer ; je vous donnerai des explications !
M. Guy Fischer. J’espère que vous me convaincrez, madame la ministre, en me donnant des éléments d’informations.
Il me semblait que vous aviez décidé de baisser considérablement, de plus de 20 %, les budgets mis à disposition par l’État dans la lutte contre le VIH.
M. Guy Fischer. De surcroît, 57 départements ont renoncé à la gestion de la lutte contre les IST et ce mouvement tend à s’amplifier. Si ni les régions ni l’État ne peuvent assumer pleinement cette mission essentielle de prévention, on est en droit de se demander qui le fera.
Par ailleurs, je déplore, comme l’ont fait les associations, l’absence du gouvernement français à la dernière conférence mondiale de lutte contre le sida, qui s’est tenue en août dernier à Mexico.
M. Guy Fischer. Vous n’y étiez pas, madame la ministre, et seule votre présence me rassure. (Sourires.)
Votre absence, madame la ministre, a été considérée par les associations comme un désengagement de l’État français, qui est confirmé par la diminution des crédits de 20 % que j’évoquais,…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais non, les crédits augmentent ! Il faut savoir lire les documents budgétaires !
M. Guy Fischer. … et, au plan international, avec la coupe sévère de 60 % annoncée dans les budgets des programmes d’aide aux pays pauvres sous le prétexte de la crise financière.
Ce faisant, vous faites supporter aux plus faibles parmi les faibles le prix d’une logique économique qui interdit l’accès des plus pauvres aux médicaments, particulièrement à la trithérapie.
Dans ce contexte, je réitère notre demande : il faudrait supprimer en France les franchises médicales, qui constituent un obstacle financier important. Il convient par ailleurs de garantir les fonds destinés à la prévention et à la lutte contre le sida. La question mérite d’être débattue, et je crois que nous devrions nous doter des moyens financiers pour accompagner cette politique de prévention.
Pour ce qui est du vieillissement de la population, on sait que près de 800 000 personnes sont concernées aujourd’hui par la maladie d’Alzheimer et les estimations prévoient, d’ici à 2020, 1,3 million de personnes affectées. C’est dire l’ampleur des besoins !
On constate donc une diminution des budgets, mais peut-être s’agit-il d’une lecture partisane de ce projet de budget !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous êtes mal informé ! Il s’agit d’une mauvaise lecture ; je vous expliquerai.
M. Guy Fischer. Je souhaite que vous puissiez me rassurer, madame la ministre. Quoi qu’il en soit, nous ne pourrons pas voter les crédits alloués à la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Etienne.
M. Jean-Claude Etienne. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » pour 2009, qui s’élèvent à 1,1 milliard d’euros, sont en hausse de 6,3 % en crédits de paiement.
Je tiens à saluer la progression constante des crédits jusqu’en 2011, que leur présentation pluriannuelle permet d’anticiper.
Pour 2009, la mission s’articule autour de trois grands programmes. Le premier, « Prévention et sécurité sanitaire », concerne notamment la lutte contre le cancer, à laquelle plus de 81 millions d’euros sont alloués. À la clé, il y a l’élaboration d’un nouveau plan d’importance, comme l’a rappelé Jean-Jacques Jégou. À ce sujet, madame la ministre, j’aimerais que vous puissiez nous donner quelques précisions sur la manière dont vous projetez de mettre en œuvre ce plan.
En outre, conformément aux engagements du Président de la République, un effort d’une extrême importance sera consacré au renforcement des moyens de lutte contre les maladies neurodégénératives, et plus particulièrement à la mise en œuvre du plan Alzheimer 2008-2012. Le Président de la République a souligné récemment le caractère européen de ce plan. Au moment où la recherche réalise des avancées considérables sur cette maladie, en particulier en termes d’imagerie lésionnelle, nous avons besoin d’envisager l’instrumentation médicale à une échelle plus vaste que l’Hexagone. L’Europe doit prendre la pleine mesure de cet engagement.
Je souligne également la création de nouvelles structures pour les aidants familiaux, qui est également au cœur du problème.
Je souhaite par ailleurs évoquer la lutte contre l’obésité.
Notre Haute Assemblée a eu l’occasion d’en débattre cette année à l’occasion de la question orale posée par notre collègue Gérard Dériot, qui s’est particulièrement impliqué dans cette affaire. Il a proposé plusieurs outils pour combattre ce problème qui met en péril la santé en particulier de notre jeunesse. Mme Brigitte Bout, avec l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, élabore un rapport impliquant les mécanismes épigénétiques dans ce domaine.
Les crédits de paiement du deuxième programme national nutrition santé devraient augmenter de 30 %. Quelles mesures concrètes comptez-vous mettre en œuvre, madame la ministre ? Nous souhaiterions obtenir des précisions sur ce point.
Le programme « Prévention et sécurité sanitaire » traite des mesures engagées pour faire face aux menaces sanitaires. Pour ma part, je ne fais pas du tout la même lecture de ce programme que notre collègue Guy Fischer ! La lutte contre une éventuelle pandémie de grippe aviaire est prise en compte et vous avez raison de vous en préoccuper, car c’est une question d’une extrême importance.
Quant aux maladies infectieuses émergentes, qu’il s’agisse de la lymphogranulomatose, des infections à gonocoque et à chlamydia, elles sont également prises en compte. Je m’apprêtais à m’en féliciter, mais je suis inquiet après ce que vient de dire notre collègue Guy Fischer. Même les menaces bioterroristes sont envisagées pour la première fois. Bref, la montée en charge de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, le fameux EPRUS, créé en 2008, permet une meilleure gestion des stocks de médicaments et de matériel nécessaires à la gestion des situations de crise.
J’en viens au deuxième programme, intitulé « Offre de soins et qualité du système de soins ».
En ce qui concerne notamment la formation médicale, au-delà de l’augmentation du numerus clausus, je tiens à souligner l’extension des stages dans les cabinets libéraux de médecine générale. En matière de démographie médicale, il est démontré que les jeunes s’installent souvent là où ils réalisent leur stage de fin d’études. C’est d’ailleurs toute la problématique du nombre de chefs de clinique et d’internes de cette filière de médecine générale qu’il convient de répartir de façon urgente sur le territoire.
Pour ce qui est de la qualité des soins, chat échaudé craint l’eau froide ! Les accidents de radiothérapie qui se sont produits à Épinal et à Toulouse ont marqué les esprits. Je tiens à vous remercier, madame la ministre, d’avoir prévu un système de veille dans ce domaine.
À ce sujet, l’appel à des physiciens auprès de machines de radiothérapie de plus en plus sophistiquées va peut-être nécessiter une période de transition durant laquelle on préférera apprécier la dosimétrie chez le patient in vivo plutôt qu’à la sortie de l’appareil.
M. Jean-Claude Etienne. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, que je me suis permis de consulter voilà quelques jours à ce sujet, pourrait contribuer à accroître plus rapidement notre efficacité en la matière.
Enfin, je me réjouis de la création des agences régionales de santé, prévue dans le projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires ». Je rejoins Alain Milon dans son analyse sur la fusion des agences.
Madame la ministre, si le montant des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2009 est sans commune mesure avec celui des crédits de l’assurance maladie, nous soulignons le rôle qualitatif essentiel de ce projet de budget en matière de prévention, de santé publique et de solidarité.
Aussi, madame la ministre, ne serez-vous pas étonnée que le groupe UMP vote les crédits de cette mission avec conviction ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » a été très largement remaniée cette année, avec un élargissement de son périmètre. Elle a en effet absorbé le programme « Protection maladie », ainsi que les crédits alloués à la veille et à la sécurité sanitaires, dont j’étais rapporteur encore l’an dernier.
Nous avons donc un budget supérieur à 1,1 milliard d’euros, qui peut paraître bien limité face à celui de l’assurance maladie, comme vient de le souligner Jean-Claude Etienne. De plus, il sera marqué l’an prochain par les profonds changements résultant du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires ».
Ces changements sont très attendus, car nécessaires, pour consolider les fondements de notre système de santé, assurer l’accès de tous à des soins de qualité et renforcer la prévention dans un cadre de dépenses publiques non extensibles à l’infini.
Certes, 2009 est une année de transition, ce qui ne nous dispense pas de formuler quelques observations sur ce projet de budget.
Ma première observation porte sur le pilotage de la politique de santé.
Comme l’a souligné M. le rapporteur, au cours des années quatre-vingt dix, la succession de crises sanitaires particulièrement graves a très clairement mis en lumière les faiblesses du dispositif français de veille et de sécurité sanitaires. L’État a donc progressivement transféré certaines de ses compétences à des agences. C’est ainsi qu’ont notamment été créées l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, puis l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET.
La mise en place de ces agences a constitué une avancée majeure, permettant d’appuyer la décision publique sur une expertise de haut niveau. Toutefois, leur nombre excessif a fini par brouiller le dispositif, qui présente des insuffisances liées notamment à l’enchevêtrement de certaines compétences, et surtout dont le coût de fonctionnement est exorbitant.
Comme j’ai souvent eu l’occasion de le dire, une réflexion s’impose en la matière. Sans remettre en cause la logique et les principales caractéristiques du dispositif actuel, nous estimons nécessaire d’y apporter plusieurs aménagements afin d’en accroître la qualité, l’efficacité et la lisibilité.
La création d’un comité d’animation du système d’agences est intéressante pour renforcer le pilotage stratégique de ces opérateurs et organiser des synergies. Mais il faut peut-être aller plus loin.
Le rapporteur propose une fusion de l’AFSSA et de l’AFSSET. Il en résulterait, me semble-t-il, un ensemble parfaitement cohérent.
Pourquoi ne pas planifier aussi, à moyen ou court terme, un rapprochement des agences sur un site unique dans le cadre d’une stratégie immobilière ?
Ma deuxième observation porte sur les crédits consacrés à la lutte contre le sida. Ces derniers diminuent fortement, de plus de 20 % par rapport à 2008. Le colloque qui se tient depuis deux jours sur la veille sanitaire a d’ailleurs évoqué ce problème.
Je tiens à exprimer mon inquiétude face à cette baisse. Le programme national arrive à échéance et ne sera pas reconduit, alors même que le nombre de primo-infections au VIH reste supérieur à 1 200 cas recensés par an et que les engagements pris en 2007 en matière d’appartements de coordination thérapeutique n’ont pas encore été tenus en 2008.
Le risque de contamination perdure, en particulier pour certains groupes de population, comme la communauté homosexuelle, les personnes migrantes, les habitants d’outre-mer, particulièrement la Guyane où la prévalence est très forte.
En France, 5 millions de tests VIH sont pratiqués chaque année, mais 36 000 personnes demeurent dans l’ignorance de leur séropositivité. De plus, le diagnostic tardif de l’infection – un tiers des cas – reste encore trop fréquent.
Le Conseil national du sida, dans lequel j’ai l’honneur de représenter notre assemblée, plaide pour un élargissement des propositions de dépistage. L’expérimentation de tests de dépistage rapide du sida, soutenue par le ministère de la santé, l’Agence nationale de recherche sur le sida, l’ANRS et l’association AIDES, devra être analysée avec beaucoup d’attention. Cette initiative, appelée Com’Test, permettra d’aller au-devant des populations les plus vulnérables – jeunes homosexuels, migrants – avec un dépistage hors murs et démédicalisé.
La journée mondiale sur le sida sera organisée lundi prochain. Je voudrais à cette occasion rappeler la situation dramatique de l’Afrique subsaharienne. En 2007, pas moins de 1,5 million de personnes sont mortes du sida dans cette région.
Le Président de la République s’était engagé solennellement, le 7 juin 2007 au sommet du G8, en faveur d’un accès universel au traitement du VIH d’ici à 2010.
Du fait de l’absence des ministres français à la conférence de Mexico et les coupes imposées par la France, et d’autres pays, dans le budget du Fonds mondial de lutte contre le sida, certains doutes subsistent quant à la détermination de notre pays de rester un moteur dans la lutte contre le VIH dans les pays pauvres.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, où en sont les négociations avec les industries du médicament pour garantir l’approvisionnement et l’accès des traitements antirétroviraux aux malades du Sud ?
Ma dernière observation porte sur l’offre de soins.
L’année 2009 sera une année de transition pour les agences régionales de l’hospitalisation, qui laisseront la place dès 2010 aux agences régionales de la santé, les ARS.
J’ai souvent appelé de mes vœux un pilotage unifié au niveau régional des soins de ville et de l’hôpital. Une frontière étanche entre ces deux secteurs ne se justifie pas. Seule une structure regroupant l’ensemble des acteurs de la santé peut organiser, de manière globale et surtout cohérente, l’offre de soins sur un territoire.
Chacun doit pouvoir accéder à tout moment et dans de bonnes conditions aux soins dont il a besoin. Cela suppose en premier lieu une permanence des soins organisée, sinon par les professionnels de santé, du moins par les pouvoirs publics.
Aujourd’hui, elle est assurée de façon inégale et aléatoire sur l’ensemble du territoire. Le taux de participation varie ainsi de 20 % à 94 %.
L’évolution de la démographie médicale est sans doute pour beaucoup dans ces déséquilibres. Le vieillissement des praticiens et le manque de médecins se font non seulement sentir dans certaines zones rurales faiblement peuplées, mais aussi dans les départements périurbains ou dans les banlieues en difficulté.
Un autre élément, à savoir le nouveau rapport des professionnels de santé au temps de travail, semble également peser sur la permanence des soins. Les jeunes médecins sont parfois moins disponibles que leurs aînés pour intervenir la nuit ou le week-end. Peut-on les en blâmer ? Ils ont eux aussi droit à une vie de famille et la médecine de premier recours est peu attractive ?
Les agences régionales de santé devront par ailleurs relancer les restructurations hospitalières qui constituent un autre sujet de préoccupation.
Définie en 1996, cette politique de restructuration a, dans un premier temps, mobilisé les ARH, mais la dynamique initiale a été progressivement ralentie, voire interrompue.
Le défaut de pédagogie et de communication, le manque de ligne directrice stable, les signaux contradictoires de l’administration centrale ou encore l’absence d’outils d’évaluation ont freiné les restructurations.
Certaines ARH ont présenté des schémas régionaux d’organisation sanitaires, des SROS, réalistes, mais elles n’ont pas réussi à convaincre les établissements d’abandonner certaines de leurs activités devenues obsolètes. Elles n’ont pas toujours pu résister aux pressions locales des associations ou des élus.
Pourtant, il faut le rappeler avec force, les réorganisations sont souvent justifiées. L’insuffisance de taille critique, que ce soit pour la chirurgie ou la maternité, est dangereuse d’abord pour les patients et de plus coûteuse pour la nation.
Les évolutions technologiques ont véritablement transformé l’exercice de la médecine, nécessitant une optimisation des équipes et des équipements.
Chacun de nous est en droit d’espérer la prise en charge la mieux adaptée et la plus performante. N’instaurons pas une chirurgie à deux vitesses sous le prétexte d’impératifs liés à l’aménagement du territoire ou aux activités économiques de la cité!
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Gilbert Barbier. L’effort de restructuration doit donc être repris. Cette restructuration ne devra pas se limiter à une fusion ou à des regroupements de nature administrative. Il devra se traduire par une réorganisation des activités fondées sur un projet médical de territoire.
Telles sont, madame la ministre, les quelques observations que je souhaitais formuler à l’occasion de la discussion de la mission « Santé », que je voterai. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. René Teulade.
M. René Teulade. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je vais vous faire part des remarques de mon groupe concernant les crédits pour 2009 affectés à ce que l’on appelle désormais la mission « Santé ».
En dépit des progrès réels qui ont été réalisés en matière de présentation des engagements et des moyens de paiement, je ne suis pas sûr – je suis même persuadé du contraire – que la lisibilité de la politique de santé du Gouvernement ait vraiment progressé.
Madame la ministre, vous avez une vision purement comptable de la santé, ce qui conduit à une dégradation de la politique de la santé de notre pays. C’est un constat que nous sommes de plus en plus nombreux à faire.
Vous changez les libellés et l’étendue des programmes, ce qui rend les comparaisons difficiles, voire impossibles, avec les exercices précédents.
Globalement, peut-on se satisfaire d’un montant d’ensemble de 1,13 milliard d’euros, soit guère plus de 0,5 % des dépenses totales de santé du pays, alors que la plupart de nos voisins européens consacrent à l’action gouvernementale dans ce secteur bien plus de moyens que la France.
M. René Teulade. Je sais que l’essentiel des moyens figurent dans les comptes des régimes d’assurance-maladie. Mais, en raison des limites d’action de ces dernières, je ne suis pas sûr que nous puissions sérieusement parler de santé publique, de prévention, de sécurité sanitaire avec un État aussi faible en moyens et en prérogatives.
C’est un budget d’attente. Cela transparaît dans le travail de tamis réalisé par les services des ministères pour rogner ici, élaguer là, quelques crédits. Le bilan de la loi de 2004 relative à la santé publique ne permet pas d’éclairer les choix du législateur ni de marquer davantage nos priorités nationales. C’est un handicap supplémentaire.
Le projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires » que Mme la ministre nous présentera en janvier prochain ne clarifiera pas, je le crains, la réelle dispersion des logiques, des moyens et des équipes entre l’État et les autres acteurs, l’assurance maladie en particulier.
En outre, madame la ministre, votre projet recèle d’importantes carences, parfois étonnantes si on les rapproche des annonces récentes du chef de l’État. Ainsi, les crédits alloués à la prévention baisseront globalement de 3 % en 2009. Je n’ignore pas le contexte économique difficile dans lequel nous sommes. Je n’ignore pas non plus le fait que l’État n’est pas le seul pourvoyeur de moyens sur ce plan. Mais vous reconnaîtrez qu’il y a un écart surprenant entre un repli budgétaire et le souhait récent du Président de la République de faire passer le pourcentage des dépenses de prévention de 7 à 10 % dans le total des dépenses de santé !
M. René Teulade. Que se passe-t-il sur le terrain ? Les associations souffrent d’une quasi-asphyxie économique. C’est le cas de celles qui s’occupent du cancer du sein. Est-ce le moment de relâcher notre effort dans ce domaine ?
Autre exemple, la trop faible progression des crédits alloués aux maladies chroniques : une hausse de 1,9 % pour une dotation totale de 122 millions d’euros. Mais cette légère augmentation masque en réalité des reculs d’engagements dans la lutte contre le cancer et la maladie Alzheimer.
Vous avez multiplié ces dernières années les plans en faveur du grand âge : plan « Solidarité grand âge », plan contre la maltraitance, plan « Bien vieillir ». Comme d’habitude, outre les effets d’annonce du Président de la République, la multiplicité de ces plans a conduit à les rendre inefficaces et illisibles. Mieux vaudrait les regrouper afin qu’ils puissent donner de vrais résultats, même si l’on peut admettre un plan spécifique lié à la maladie d’Alzheimer.
Concernant la lutte contre le cancer, votre budget est placé sous le signe de l’attente de la mise en place d’un nouveau plan cancer.
Je voudrais rappeler ici les conclusions que la Cour des comptes a publiées dans un rapport consacré à la mise en place du plan cancer 2003-2007 que nous connaissons tous. Un tiers des 70 mesures de ce plan ont été complètement réalisées, un tiers modérément ou inégalement et un tiers peu ou pas du tout.
La commission a également pointé plusieurs limites qui devront être prises en compte pour l’avenir.
M. René Teulade. Citons un suivi insuffisant du plan, l’opacité des dépenses réelles, une absence d’évaluation des indicateurs de suivi mis en place… C’est pourquoi nous attendons avec intérêt le bilan du Haut conseil de la santé publique.
Madame la ministre, les soins chroniques sont une priorité absolue dans notre pays. Nous sommes à peu près tous d’accord sur ce point. Mais, si nous prenons l’exemple du suivi du diabète de type 2, qui relève du champ des soins chroniques, il n’existe aucune cohérence entre les actions de l’État, de l’assurance-maladie des salariés, des autres régimes sociaux ou encore des équipes médicales, qu’elles soient hospitalières ou libérales.
Sur cette question majeure qui donne sens, paraît-il, à la réforme hospitalière projetée pour 2009, l’État se défausse de ses responsabilités économiques.
Modernisation du système des soins, disons-nous ? Les crédits prévus sont en baisse de 19,5% ! Alors que le Président de la République vante, à juste titre, les mérites des maisons de santé pluridisciplinaires, le ministère de la santé, faute de moyens, alloue 50 000 euros seulement à chaque projet.
Est-ce encore une promesse du chef de l’État qui ne pourra être tenue ?
Je voudrais aussi évoquer la situation de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES. II reçoit 98 millions d’euros pour 113 millions d’euros de dépenses, ce qui le contraint à puiser fortement dans son fonds de roulement,…
M. René Teulade. …voire, hélas, à annuler ou à redéployer des actions telles que l’accompagnement des soins palliatifs. Nous pensions pourtant tous qu’il s’agissait d’une priorité nationale. Dans le contexte actuel, cette situation est malsaine.
Je pourrais encore évoquer les baisses de moyens dégagés dans le cadre de la prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins.
Ainsi, pour le VIH-sida, ces moyens diminuent de 20 % : ils s’élèvent à 37,75 millions d’euros contre 47,32 millions d’euros en 2008.
M. René Teulade. Pour les hépatites B et C, la baisse atteint 30 % alors qu’un nouveau plan national est annoncé.
M. René Teulade. Que comprendre ?
M. René Teulade. Pour la tuberculose, cette baisse est de 7,5 % et pour la politique vaccinale de 4 %. Des constats identiques peuvent encore être tirés au sujet des maladies sexuellement transmissibles.
Je connais les contraintes du budget de l’État. Je sais aussi les difficultés à réorganiser rapidement l’action publique dans un domaine aussi compliqué que la santé. Nous essayons depuis toujours de concilier deux démarches : un système qui repose sur des prescriptions libérales et relève, d’une certaine façon, de notre culture au travers d’une liberté de choix ainsi que d’une liberté de prescription, et des prestations socialisées. Ces démarches, nous le savons bien, sont économiquement incompatibles. Il faut donc trouver un équilibre.
Aussi je voudrais affirmer ici que notre État – je dirais même notre pays – ne peut plus concevoir une politique de santé par l’amoncellement des dispositions et le saupoudrage généralisé, sans colonne vertébrale, des priorités.
La révision générale des politiques publiques dont vous avez la charge n’est pas condamnable en soi, à condition que la cohérence et la juste dépense soient au rendez-vous. Est-ce le cas quand, en dépit des annonces, un statu quo est maintenu sur les agences sanitaires ?
Enfin, permettez-moi d’évoquer la question de la CMU. Lors de la discussion du projet de loi sur le financement de la sécurité sociale, nous avions fait part de nos inquiétudes concernant l’accès aux soins.
Le plafond de la CMU complémentaire aurait dû être réévalué, et l’acquisition d’une complémentaire santé accompagnée de façon plus importante que par la seule aide de cent euros destinée au chèque santé des plus de soixante-cinq ans.
M. René Teulade. Je me dois aussi d’insister sur le fait qu’encore 3 millions à 4 millions de nos compatriotes ne bénéficient pas de couverture complémentaire de santé. L’État se voit donc obligé de saupoudrer des actions de rattrapage qui n’auraient plus lieu d’être si un travail d’organisation globale était mené.
Les difficultés d’accès aux soins n’ont pas disparu, bien au contraire. C’est moins une question d’argent qu’une question d’organisation et de discipline des comportements des acteurs concernés. Il serait temps de la régler, car elle est indigne d’un pays riche comme le nôtre.
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, le groupe socialiste ne votera pas votre budget qui manque d’ambition pour donner aux Français les moyens de lutter ensemble contre l’inégalité la plus intolérable de toutes, l’inégalité devant la souffrance et la maladie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Vantomme.
M. André Vantomme. Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, en préambule à cette intervention centrée sur le secteur de la santé mentale, je voudrais rappeler que la prévalence globale des troubles dépressifs auxquels sont confrontés nos concitoyens est estimée à 12 % sur la vie entière. Autrement dit, sept millions de Français ont été ou sont concernés par cette pathologie.
L’analyse des données épidémiologiques confirme l’existence d’âges plus sensibles : les plus jeunes, âgés de 18 à 25 ans, et les plus âgés, les octogénaires. Précisons encore que, selon différentes études, 5 à 15 % de la population française serait touchée par un épisode dépressif au cours de l’année.
Signalons enfin, pour confirmer l’attention qu’il convient de réserver à la santé mentale, l’importance de la consommation des antidépresseurs par nos concitoyens. Cela mérite d’être rappelé.
Dans le cadre de la discussion du budget de la mission « Santé », je dispose de quelques minutes pour appeler votre attention, madame la ministre, et celle de nos collègues sur un sujet particulièrement attristant.
Un grand journal du soir l’a évoqué voilà quelques jours. Dans un article intitulé : « Les soins psychiatriques se dégradent en France », est exposée une situation particulièrement ressentie par celles et ceux qui ont pour mission de s’occuper de la maladie mentale. Mais le drame de cette situation quitte rapidement le champ hospitalier pour gagner la rue peuplée, aujourd’hui, de celles et ceux que l’hôpital a chassés et que la prison risque d’accueillir bientôt.
Madame la ministre, pour comprendre cette situation, il importe de se souvenir comment on en est arrivé là. En vingt ans, 50 000 lits d’hospitalisation ont été fermés, sans qu’aucune structure alternative de prise en charge n’ait été ouverte, comme Cécile Prieur l’écrit dans Le Monde.
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. Ce n’est pas vrai !
M. André Vantomme. Avec pertinence, cette journaliste évoque dans son article la situation créée au début des années 1980 par l’administration Reagan, qui, en réduisant de manière drastique les moyens consacrés à la psychiatrie, avait jeté à la rue un grand nombre de malades. Privés de soins et rapidement marginalisés, ils avaient vite fait d’enfreindre les codes sociaux et de rejoindre l’univers carcéral.
Aujourd’hui, dans notre pays, la politique menée depuis trop longtemps…
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. Vingt ans !
M. André Vantomme. … nous conduit à un processus identique.
Que constatons-nous ? Les fermetures de lits sont nombreuses ; la démographie hospitalière publique décline ; les budgets hospitaliers sont de plus en plus contraints ; le diplôme d’infirmier psychiatrique est supprimé au bénéfice du diplôme d’état d’infirmier,…
M. André Vantomme. … sans oublier, plus récemment, des mesures financières non compensées comme le protocole Bertrand Jacob.
Cette situation n’est pas bonne. Elle est critiquée par celles et ceux qui œuvrent dans nos hôpitaux psychiatriques. Les médecins l’ont dénoncée. Les infirmiers comme les aides-soignants se sont exprimés. Les directeurs et l’encadrement ont établi des rapports alarmants. Les associations représentant les parents et les usagers n’ont pas non plus été silencieuses.
De plus, des événements très graves ont attiré l’attention de nos concitoyens : un double meurtre à Pau, plus récemment l’assassinat d’un jeune homme par un patient schizophrène à Grenoble, sans oublier nombre d’agressions supportées par le personnel hospitalier. Tout cela conduit à un malaise profond, un sentiment que la psychiatrie française va de plus en plus mal.
Madame la ministre, médecins et soignants ne cessent de vous le crier comme à l’hôpital de la Conception à Marseille, à l’hôpital Saint-Jean-de-Dieu à Lyon, dans les hôpitaux Sainte-Anne, Esquirol, Maison-Blanche à Paris et à l’hôpital Clermont-de-l’Oise, que je connais bien.
Vous appartenez, madame la ministre, à un gouvernement qui accorde une grande importance à la sécurité et en fait un des thèmes favoris de la communication politique en direction de nos concitoyens. Sur ces questions, votre gouvernement ne tarit pas.
Vous me permettrez ainsi, avec mes collègues du groupe socialiste, de déplorer que trop souvent vous privilégiiez la politique de communication au fond des problèmes.
Dans le domaine du logement, votre gouvernement préfère disserter et s’agiter sur la communication autour du droit au logement opposable. Or, ce droit n’aura de sens que quand l’État, dans un domaine régalien, qui est donc le sien, décidera de tout mettre en œuvre pour favoriser la construction des logements cruellement manquants.
Pardonnez-moi cette digression sur un sujet que nous ne traitons pas ce soir. Il en va de même dans un autre domaine, qui n’est pas le vôtre, encore que la situation sanitaire dans le monde carcéral vous concerne au premier chef.
Madame la ministre, la France est montrée du doigt par l’Europe pour l’état de ses prisons, la surpopulation qui y sévit et la manière dont nous y prodiguons les soins.
Vous connaissez, madame la ministre, cette situation. Vous savez qu’un quart des 61 000 détenus des prisons françaises sont des psychotiques. Cette situation doit vous interpeller !
Une des causes de l’insécurité dans notre pays résulte de l’insuffisance des moyens accordés à la psychiatrie pour soigner celles et ceux qui en ont besoin. L’évolution de nos sociétés occidentales génère de plus en plus de victimes qui, faute d’avoir trouvé soit un travail, soit un logement, soit les deux, glissent dans une exclusion sociale certaine et une marginalité progressive.
La rue devient le théâtre de toutes ces évolutions, de toutes ces souffrances qui conduisent à la déraison et à la violence. Les dégâts humains, madame la ministre, sont considérables. Écoutez celles et ceux qui connaissent, qui s’occupent de ces hommes et de ces femmes qualifiés de marginaux ! Ils vous disent tous qu’au bout de plusieurs années de vie dans la rue le point de non-retour est franchi et la situation irrémédiable.
Peut-on, madame la ministre, accepter cela et continuer de disserter dans nos collèges et nos lycées sur les écrits de Montaigne, pour qui « chaque homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition » ?
On ne peut pas continuer comme cela ! En ne donnant pas à la psychiatrie suffisamment de moyens pour agir, en poursuivant une politique de réduction des moyens par le sous-financement de cette spécialité, on crée des déficits dont on exige ensuite la réduction par des suppressions de postes et de structures. On met à mal la politique de sectorisation ; on ferme des entités ; on supprime des postes. Vous connaissez les conséquences de telles pratiques !
La crise économique et sociale, qu’on annonce et dont on apprécie déjà l’ampleur des dégâts, ne va pas manquer d’exacerber certains cas de détresse et de rupture d’équilibre. C’est donc avec inquiétude, madame la ministre, que les médecins, soignants et cadres hospitaliers des hôpitaux psychiatriques pressentent l’aggravation d’une situation qu’ils ont déjà beaucoup de difficultés à gérer.
Le plan de santé mentale mis en œuvre pour la période 2005-2008, avec 1,5 milliard d’euros, est certes nécessaire et utile à la rénovation des établissements, mais il ne peut masquer les efforts qu’il nous reste à accomplir.
Dans un établissement psychiatrique, 80 % des dépenses sont des dépenses de personnel. Placés devant des situations de plus en plus complexes et difficiles, appelés à être de moins en moins nombreux et, en même temps, de plus en plus confrontés aux exigences sécuritaires, les médecins et les soignants auront-ils, madame la ministre, les moyens nécessaires, qui, quand ils sont là, galvanisent les énergies, mais dont l’absence provoque désarroi et résignation ?
Enfin, et peut-être surtout, le traitement de la maladie mentale exige des moyens spécifiques, identifiés et reconnus, qui ne sauraient en aucun cas constituer la variable d’ajustement d’autres politiques.
Madame la ministre, dans le domaine de la psychiatrie comme dans les autres secteurs de la santé, les moyens dont vous disposez vous obligent, nous obligent à faire des choix. Nos choix, vous l’avez compris, n’oublieront pas la santé mentale, à laquelle, je le pense très sincèrement, vous ne réservez pas toute l’attention qu’elle mérite dans vos priorités budgétaires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à saluer la qualité du travail des rapporteurs.
Notre pays consacre 8,8 % de sa richesse nationale aux dépenses publiques de santé : assurance maladie et maternité, assurance accidents du travail et maladies professionnelles, interventions sanitaires de l’État et des collectivités territoriales. Je rappelle que nous sommes le troisième pays au monde pour les dépenses de santé : cela permet de relativiser certaines des critiques entendues ici ou là !
Bien sûr, les crédits en faveur de la mission « Santé » inscrits au budget de l’État sont sans commune mesure avec les dépenses de l’assurance maladie ; pour autant, ils jouent un rôle essentiel, et je tiens à souligner qu’ils progressent de 6,3 % cette année. Voilà encore de quoi relativiser certaines critiques venues des travées qui se trouvent sur ma gauche !
Ces crédits traduisent l’implication de l’État en matière de prévention et de santé publique. Ils participent d’un légitime et nécessaire effort de la solidarité nationale. Ils représentent par ailleurs un fort levier pour inciter à une meilleure structuration de l’offre de soins et contribuent à l’amélioration du pilotage stratégique des dépenses hospitalières.
La mission « Santé » regroupe désormais l’ensemble des crédits d’État en matière de santé publique, de prévention sanitaire et d’accès aux soins, à l’exclusion des crédits de personnel, dont M. Jégou a rappelé l’affectation. Sans doute est-il effectivement possible de parvenir à une meilleure lisibilité !
Le nouveau périmètre de la mission « Santé » marque néanmoins une évolution majeure, qui améliore déjà sensiblement la lisibilité des politiques publiques et répond à la demande du Parlement de regrouper des crédits autrefois éclatés entre les missions « Santé », « Solidarité et intégration » et « Sécurité sanitaire ».
L’élaboration d’une politique de prévention innovante et ambitieuse – je dis bien d’une politique, au sens le plus riche du terme – constitue l’un des axes majeurs de mon action à la tête du ministère de la santé.
Le programme « Prévention et sécurité sanitaire », d’un montant de 489 millions d’euros, concentre désormais les moyens de pilotage de la politique de santé publique, y compris en matière de sécurité sanitaire. Ses crédits contribuent au déploiement d’actions publiques qui engagent et soutiennent une politique de prévention active, volontaire, innovante et ambitieuse.
Avec environ 120 millions d’euros de crédits, l’action « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » concentre près du quart des crédits du programme.
À la suite de Gilbert Barbier, que je remercie de ses préconisations et de ses observations, j’indique en outre que l’année 2009 sera l’occasion d’engager une réforme aussi nécessaire qu’attendue de l’organisation trop complexe de notre système de santé : tel sera l’objet du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », qui sera débattu au Parlement dès le mois de janvier prochain. Le rapprochement des services déconcentrés des ministères sociaux et des structures locales de l’assurance maladie dans les nouvelles agences régionales de santé permettra d’amplifier les effets des politiques de prévention.
Par ailleurs, la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique arrive à échéance au 1er janvier 2009. Sa mise en œuvre fera l’objet d’une évaluation par le Haut Conseil de la santé publique en vue de son renouvellement.
La lutte contre le cancer reste l’action la plus importante du programme en termes de volume de crédits alloués : 81,7 millions d’euros, soit 16,7 % des crédits. Elle est complétée par l’action du ministère concernant l’effort de réduction des pratiques addictives et à risque, qui vise notamment l’alcool et le tabac : 22,3 millions d’euros, soit 4,6 % des crédits de paiement.
Monsieur Milon, un nouveau plan cancer est en cours d’élaboration. S’appuyant sur les premiers résultats de l’évaluation du précédent plan – c’est tout à fait normal, monsieur Teulade ! –, il devrait permettre de poursuivre de manière structurelle la lutte contre ce qui représente l’une des premières causes de décès en France. Son action visera en particulier à renforcer nos pratiques de prévention et à poursuivre la généralisation du dépistage pour les cancers les plus fréquents.
Jean-Claude Etienne a insisté à juste titre, en ce qui concerne l’aspect curatif, sur la sécurisation de la filière de radiothérapie. Vous savez à quel point nous nous sommes impliqués pour cette sécurisation pendant les années 2007 et 2008. L’installation du comité de suivi des mesures nationales pour la radiothérapie aura lieu le 15 décembre prochain. Sous le pilotage de l’Institut national du cancer, il devra suivre la mise en œuvre de l’ensemble des mesures et, le cas échéant, en proposer de nouvelles. Parmi les mesures déjà arrêtées, deux me paraissent particulièrement emblématiques : le doublement du nombre des radiophysiciens d’ici à 2012 et la généralisation de la dosimétrie in vivo que, monsieur le sénateur, vous appelez de vos vœux.
Contrairement à ce qu’a affirmé M. Fischer, la prévention des risques infectieux reste un axe fort de la prévention.
Plus que toute autre discipline de la médecine, la prévention se doit de s’adapter aux contours toujours mouvants de notre société. Certaines campagnes de prévention visent notre population tout entière : je pense ici à la sensibilisation à la question de la nutrition et à celle de la nécessité d’une activité physique quotidienne pour préserver son capital santé et lutter contre le développement de l’obésité. D’autres campagnes de prévention ont pour objet d’alerter et de protéger des segments très précis de notre société ; discours et moyens d’intervention doivent alors être adaptés à leurs besoins et mieux ciblés. Il en va par exemple ainsi, pour répondre complètement à André Vantomme, des dispositifs en psychiatrie.
Je comprends l’émotion soulevée par le terrible assassinat, commis par une personne malade mentale, dont a été victime Luc Meunier à Grenoble, et mes pensées vont vers sa famille. Je tiens à préciser que j’ai aussitôt diligenté une enquête de l’inspection générale des affaires sociales afin de faire toute la lumière sur les circonstances qui ont rendu ce drame possible et pour établir les responsabilités.
Je me félicite que le Président de la République se soit saisi de cette grave affaire. À sa demande, nous avons ouvert le chantier de la réforme de la loi du 27 juin 1990 sur les hospitalisations sans consentement des malades mentaux, réforme qui était très attendue.
M. Vantomme a évidemment dressé un tableau très noir de la psychiatrie française. Puis-je cependant me permettre de lui rappeler que la suppression du diplôme d’infirmier psychiatrique a été le fait d’un ministre socialiste, qui l’a présentée comme une grande avancée ? Il ferait peut-être bien de vérifier ses chiffres et ses dates…
La psychiatrie, en France, ce sont des professionnels de santé qui font un travail remarquable sur le terrain, au quotidien. Avec 14 000 psychiatres, nous avons 22 praticiens – probablement mal répartis, j’en conviens – pour 100 000 habitants, soit le plus fort taux au monde. Nous avons aussi 63 000 infirmiers, exerçant en grande partie en établissements de santé. Un maillage territorial de proximité est assuré par 609 établissements de santé, publics et privés, avec près de 59 000 lits. Et s’il est vrai que le nombre de lits a baissé, c’est aussi lié à une approche nouvelle de la psychiatrie. En effet, les prises en charge et l’accueil ont évolué, ces dernières décennies : la durée moyenne des séjours est plus courte et les patients sont le plus souvent pris en charge à titre ambulatoire. Je considère pour ma part que c’est un progrès.
En psychiatrie publique, ce sont maintenant plus de 8 milliards d’euros qui sont consacrés aux équipes et aux structures hospitalières ; ces crédits connaissent une croissance de 2 % par an.
Le plan psychiatrie et santé mentale 2005-2008 a permis de réaliser 342 opérations de rénovation et construction, financées à hauteur de 750 millions d’euros. Nous avons également pu créer 1 500 postes non médicaux et 173 postes médicaux, ainsi que 1 200 places dans des maisons et des foyers d’accueil spécialisés.
Face aux demandes sanitaires et médico-sociales croissantes, les dispositifs en psychiatrie évoluent et s’adaptent pour répondre aux besoins spécifiques de populations diverses : femmes enceintes, personnes suicidantes, détenus, populations vulnérables, auteurs d’infractions sexuelles… Ils doivent également faire face aux attentes toujours plus importantes des services sanitaires confrontés aux situations d’urgences ou de crise, ou encore aux conséquences du vieillissement de la population ; n’oublions pas que les phénomènes de dépression augmentent avec l’espérance de vie : c’est un effet de la transition démographique.
Dans ce contexte, j’ai décidé de mettre en place une commission, présidée par Édouard Couty, associant familles, usagers et professionnels. Elle est chargée de me faire avant la fin de l’année des propositions concrètes sur les missions et sur l’organisation de la psychiatrie et de la santé mentale, afin, notamment, d’améliorer le parcours de soins des patients, de la prévention à la réinsertion, et de promouvoir les coopérations entre professionnels et entre structures.
Nos politiques ciblées ont, bien sûr, un champ plus large.
Ainsi – plusieurs orateurs ont abordé ce sujet –, en matière de prévention de l’infection par VIH et des autres infections sexuellement transmissibles, le ministère mène des campagnes de prévention locales et nationales auprès des migrants, des homosexuels, des habitants des départements français d’Amérique et des jeunes. Ce sont au total 91,2 millions d’euros, soit 19 % des crédits du programme, qui sont ainsi ouverts afin de prévenir les risques infectieux majeurs qui menacent la santé des Français.
J’ai bien noté vos interrogations sur le montant des crédits alloués pour 2009 à la lutte contre le VIH, et je regrette vivement que M. Fischer et M. Teulade n’aient pas assisté à la réunion de la commission durant laquelle je me suis longuement expliquée sur ces sujets : cela leur aurait épargné d’énoncer un certain nombre de contrevérités.
Mme Annie David. Ils ne pouvaient pas être présents à la fois en séance et en commission, madame la ministre !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je ne doute pas qu’ils avaient de bonnes raisons !
Donc, concernant les crédits de lutte contre le sida, j’ai relevé que la présentation du programme fusionné, d’ailleurs réclamée par les sénateurs, améliorait significativement la lisibilité des dépenses, et que vous l’aviez appréciée. Je m’en félicite, car c’était là un des objectifs de la fusion : que chacun puisse mieux comprendre la synergie entre les différentes dépenses. Cela nous a toutefois conduits à en modifier la présentation.
Ainsi, en 2009, les projets de santé publique relatifs au VIH seront financés avec trois lignes budgétaires. Pour autant, je considère que ces crédits sont essentiels : le renforcement de la lutte contre le sida est l’une des priorités de mon action.
Au total, outre les 23 millions d’euros consacrés au sida par l’Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l’INPES, les crédits disponibles pour conduire les projets de prévention en matière de VIH s’élèveront à 37,5 millions d’euros, en hausse d’environ 200 000 euros par rapport à ceux de 2008, qui, je le rappelle, avaient déjà augmenté, à ma demande, de près de 1 million d’euros par rapport à 2007.
Plus précisément, les crédits de la sous-action « Lutte contre le VIH/SIDA », avec 30,1 millions d’euros – dont 23,3 millions d’euros mis en œuvre principalement dans le cadre des groupements régionaux de santé publique –, seront en baisse. Mais les crédits de la sous-action « Soutien à la territorialisation des politiques régionales de santé publique » passeront de 4,3 millions d’euros à 11 millions d’euros en 2009, notamment pour le financement des ateliers « santé ville ». Enfin, au sein de l’action « Accès à la santé et éducation à la santé », la sous-action « Santé des populations en difficulté » sera dotée de 11,2 millions d’euros, contre 7,3 millions d’euros en 2008.
Cette répartition des financements traduit la mutualisation d’une partie des crédits VIH/IST, dans le cadre des groupements régionaux de santé publique, pour les publics précaires et vulnérables à plusieurs titres en matière de santé. Seront ainsi réalisées, par exemple, des actions en faveur des migrants, des toxicomanes, des jeunes, des personnes prostituées, des détenus…
Il est évident, et je répète les propos que j’ai tenus devant la commission des affaires sociales, que si la présentation adoptée dans le projet annuel de performance devait semer le doute sur le montant des crédits effectivement consacrés à la lutte contre le sida, je demanderais le rétablissement de la précédente présentation. Il apparaîtrait ainsi que les crédits VIH s’élèvent à 37,5 millions d’euros dans la programmation budgétaire initiale pour 2009.
Je rappelle à ce sujet à M. Fischer, qui m’a interrogée sur l’action internationale de la France, que la contribution de notre pays à la lutte contre le VIH avait été de 364,56 millions d’euros en 2007, versés pour l’essentiel dans un cadre multilatéral. Nous poursuivons cet effort en 2008 : la France est le premier contributeur européen et le deuxième contributeur mondial en ce qui concerne les crédits affectés au sida. Bien entendu, je tiens leur répartition à votre disposition.
Par ailleurs, monsieur Fischer, si je ne me suis pas rendue à Mexico, c’est parce que j’étais à ce moment précis en train d’élaborer le plan sécurité sociale, décidé à la suite des conclusions de la commission des comptes de la sécurité sociale. J’ai donc été totalement mobilisée pendant deux jours par une situation d’urgence. Le ministère était néanmoins représenté à la conférence de Mexico par un de mes proches conseillers, par deux personnes de la direction générale de la santé et par l’« ambassadeur sida » ; il s’agissait donc d’une délégation extrêmement importante.
Par ailleurs, je me rendrai dans quelques jours à la conférence ICASA qui se tiendra à Dakar. En matière de sida comme en matière d’amour, il n’y a que les preuves qui comptent ! (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Guy Fischer. Merci !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Concernant les crédits du plan Cancer 2007, monsieur le rapporteur spécial, vous avez raison de porter votre regard sur les dépenses réalisées, qui restent en deçà de la prévision, laquelle autorisait un niveau réel de dépenses de 54 millions d’euros.
Toutefois, en privilégiant une approche globale de la lutte contre le cancer, vous constaterez que les crédits non consommés au titre du maintien à domicile des malades du cancer, soit 8,9 millions d’euros, ont été de fait consommés au titre de la lutte contre les déterminants des cancers : lutte contre le tabagisme, en hausse de 60 % par rapport au budget initial ; lutte contre l’alcoolisme ; en hausse de 53 % par rapport au budget initial ; enfin, actions en matière de nutrition, en hausse de 38 % par rapport au budget initial.
Cela dit, croyez bien en ma détermination à renforcer encore le dépistage, en particulier celui du cancer du sein, pour lequel nous avons introduit la mammographie numérique, et celui du cancer colorectal, qui sera désormais généralisé à tous les départements.
Pour ce qui concerne la maladie d’Alzheimer, monsieur Étienne, le 1er février 2008, le Président de la République a présenté le plan Alzheimer 2008-2012 comme l’un de ses chantiers prioritaires, avec pour fil conducteur une exigence éthique accrue. Au total, 1,6 milliard d’euros seront dépensés pour la lutte contre la maladie d’Alzheimer, dont plus de 200 millions d’euros pour le volet sanitaire.
Le Président de la République a confié à Florence Lustman, inspecteur général des finances, la coordination de la mise en œuvre progressive des mesures issues des propositions de la commission présidée par le professeur Ménard. Le premier objectif est de mieux connaître la maladie. Le deuxième objectif consiste à améliorer la prise en charge des malades et de leur famille. Le troisième objectif a trait à l’amélioration de la qualité de vie des malades.
Ce plan extrêmement important doit nous permettre de relever un véritable défi pour prendre en charge plus de 850 000 personnes dans notre pays.
Ces trois questions, cancer, VIH, Alzheimer, soulignent la nécessité, affirmée tant par Jean-Jacques Jégou que par Alain Milon, d’élaborer, sur le modèle du livre des plans, un document transversal avec une approche thématique de nos politiques de santé publique. Nous allons travailler à élaborer une telle présentation des crédits consacrés aux grands enjeux de santé publique tant en matière de programmation que de suivi d’exécution.
L’accès et l’éducation à la santé deviennent des actions structurantes du programme.
Le nouveau programme fusionné met l’accent sur l’accès à la santé pour tous. La subvention pour charges de service public de l’INPES, opérateur chargé de promouvoir les pratiques de prévention et l’éducation à la santé, progresse de près de 30 %, passant de 24 millions d'euros en 2008 à 31 millions d'euros en 2009. Il s’agit d’une priorité forte donnée à la santé publique, qui sera réaffirmée et prolongée par le projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires ». une attention toute particulière sera portée à deux populations : d’une part, les patients souffrant de maladie chronique, pour lesquels nous prévoyons, dans le cadre des suites données au rapport rédigé par Christian Saout et les professeurs Bertrand et Charbonnel, de promouvoir l’éducation thérapeutique et d’en faire un élément à part entière du parcours de soins ; d’autre part, les plus jeunes, que nous souhaitons protéger de l’alcoolisme, des pièges de l’addiction précoce et de ses conséquences souvent dramatiques.
M. Fischer a regretté que la MILDT soit placée dorénavant auprès du Premier ministre, mais c’est à la demande expresse du Parlement, en particulier des sénateurs, que cela a été fait, dans un souci de lisibilité et de proximité de l’action.
M. Guy Fischer. M. Barbier n’a pas toujours raison !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement a rendu public cet été son plan de lutte contre les drogues et les toxicomanies pour 2008-2011. La MILDT, la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, est chargée d’en suivre la mise en œuvre et, bien entendu, je suis cette affaire avec une particulière attention.
Les jeunes constituent, en effet, un public prioritaire des politiques de santé publique. La plupart des actions et des plans mis en œuvre comportent, s’il y a lieu, des objectifs et des orientations ciblant spécifiquement les jeunes.
Mme la présidente. Madame la ministre, pardonnez-moi, mais il faudrait que vous vous acheminiez vers votre conclusion.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je vais faire de mon mieux, madame la présidente, mais on m’a posé de nombreuses questions.
Des actions spécifiques seront menées pour lutter contre le suicide des jeunes, en particulier des jeunes homosexuels, contre l’obésité, avec le programme national Nutrition Santé ; Jean-Claude Etienne m’excusera de ne pas lui répondre plus précisément sur ce point.
Le développement des menaces pesant sur la santé de la population a conduit à renforcer notre politique de sécurité sanitaire.
Je veux souligner, s’agissant de l’EPRUS, que celui-ci a envoyé à Bombay, à la suite des dramatiques événements qui s’y déroulent, une mission composée de cinq médecins, de deux psychologues et de deux convoyeurs. On pense souvent à l’EPRUS dans le cadre des pandémies, mais il faut également saluer l’action de l’EPRUS sur des urgences sanitaires comme celle-là. Ces actions de sécurité sanitaire représentent ainsi plus du quart des crédits du programme.
En ce qui concerne la question des agences, qui m’a été posée par MM. Jégou, Milon, Fischer et Barbier, vous savez à quel point je préconise le rapprochement de l’AFSSA et de l’AFSSET. C’est pourquoi je ne partage pas du tout les craintes de M. Fischer, bien au contraire : cette fusion entre l’AFSSA et l’AFSSET rendra plus cohérente la prise en compte des risques liés au travail, notamment en intégrant la question de la santé au travail dans le monde agricole, qui est extrêmement importante.
Par ailleurs, monsieur Milon, j’étudie l’éventualité de la fusion entre l’INTS, l’Institut national de la transfusion sanguine, et l’EFS, l’Établissement français du sang.
Mme Dini a fait une analyse très exhaustive des crédits consacrés à la formation des médecins. Je n’irai pas plus loin : elle a parfaitement présenté cette question et je la remercie des propos élogieux qu’elle a tenus.
M. Guy Fischer. Elle n’a pas sa carrière devant elle !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est particulièrement inélégant vis-à-vis de Mme Dini, qui est une sénatrice de très grande qualité, monsieur Fischer ! Vous m’avez habituée à des propos plus courtois.
Enfin, l’impératif de solidarité implique la mise en œuvre de mesures spécifiques adressées aux personnes les plus fragiles et les plus démunies.
À ce titre, le programme « Protection maladie » regroupe les interventions de l’État sur trois dispositifs : la CMU complémentaire, l’aide médicale de l’État, ou AME, et la contribution de l’État au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA.
Le Fonds de financement de la couverture maladie universelle assure le suivi de la CMU complémentaire. Il reçoit à ce titre une dotation d’équilibre de l’État. Nous en avons déjà largement parlé quand nous avons examiné le PLFSS ; je n’y reviens donc pas.
L’indemnisation des victimes de l’amiante est assurée par le FIVA, auquel l’État versera une contribution de 50 millions d'euros en 2009.
L’effort pour redonner des bases saines au financement de l’AME se poursuit. Un dernier rattrapage sera opéré en 2009 avec une augmentation de 77 millions d'euros. Cette hausse ne se traduit pas une augmentation des dépenses du dispositif. Bien au contraire, nous avons pris un certain nombre de mesures destinées à encadrer l’évolution des dépenses de l’AME.
Monsieur le rapporteur spécial, s’agissant des bénéficiaires de l’AME disposant de moins de 620 euros par mois, il nous est apparu, après expertise, qu’un ticket modérateur ou un droit d’entrée auraient avant tout conduit à des impayés auprès des hôpitaux et non à des recettes supplémentaires, et ce pour un coût et une complexité de gestion non négligeables. Si le dispositif pouvait se justifier sur un plan théorique, mais il était impossible à mettre en œuvre sur le plan pratique.
Mme la présidente. Je vous demande de conclure, madame la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Notre politique de santé est donc une politique de justice et d’efficience et je vous remercie de m’avoir écoutée aussi longuement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Santé » figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Santé |
1 130 411 774 |
1 152 513 774 |
Prévention et sécurité sanitaire |
463 761 421 |
485 863 421 |
Offre de soins et qualité du système de soins |
126 650 353 |
126 650 353 |
Protection maladie |
540 000 000 |
540 000 000 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-51, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention et sécurité sanitaire |
|
|
|
|
Offre de soins et qualité du système de soins |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
66.000.000 |
|
66.000.000 |
TOTAL |
|
66.000.000 |
|
66.000.000 |
SOLDE |
-66.000.000 |
-66.000.000 |
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement vise à reconduire les crédits de l’AME sur la base de l’année précédente, augmentés de l’inflation. En effet, le taux de progression de ces crédits tels qu’ils sont proposés pour 2009 est de l’ordre de 19 %. Pourtant, grâce à la politique migratoire menée par le Gouvernement, et en coordination avec les autres pays européens, le nombre de cas concernés par l’AME tend à diminuer.
Force est de constater un certain nombre de fraudes. Vous avez dit, madame la ministre, que l’augmentation du budget était liée à un processus d’assainissement. Pour ma part, je propose cette stabilisation des crédits, mais vous nous donnerez peut-être, sur ce processus, des explications détaillées qui me convaincront de renoncer à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Cet amendement semble inopportun dans la mesure où les crédits prévus pour 2009 tiennent compte des sous-budgétisations passées. D'ailleurs, s’il était adopté, l’État se retrouverait avec de nouvelles dettes à l’égard des organismes de sécurité sociale au titre de l’AME.
En revanche, il a le mérite de vous interpeller, madame la ministre – c’était, me semble-t-il, le but de notre excellent collègue Philippe Dominati –, sur les moyens de maîtriser les dépenses de l’aide médicale de l’État, ce qui apparaît tout de même comme une gageure étant donné que l’on ne peut pas les prévoir à l’avance, et, indirectement, sur l’instauration de cette participation forfaitaire des bénéficiaires, sur laquelle vous avez eu la gentillesse de me répondre bien que vous ayez été contrainte de conclure votre intervention de manière un peu précipitée. (Sourires.)
Dans ces conditions, ne faudrait-il pas abroger le dispositif contenu dans la loi de 2002 ? La question peut être posée. Cela éviterait peut-être qu’on y revienne chaque année.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’AME est désormais un dispositif bien maîtrisé, bien géré, et c’est d'ailleurs ce à quoi a conclu la mission menée conjointement par l’IGAS et l’IGF en 2007.
Nous avons renforcé un certain nombre de dispositifs. Il y a maintenant un titre d’admission sécurisé, testé en 2008, qui sera généralisé en 2009, pour éviter la fraude. Cette mesure était demandée depuis longtemps.
Nous avons fait inscrire dans la loi de finances de 2008 l’extension des contrôles médicaux aux bénéficiaires de l’AME et l’obligation d’accepter des médicaments génériques, pour revenir dans le droit commun. D'ailleurs, cela a tout de suite porté ses fruits puisque le taux de consommation des génériques est passé de 64 % à 74 % en un an chez les bénéficiaires de l’AME. Ce n’est pas un mince succès.
Contrairement à ce que j’entends ici ou là, le nombre de bénéficiaires de l’AME tend à diminuer. Il est retombé à 180 000 à la fin de l’année 2007. La dépense correspondante a elle aussi baissé, mais M. le rapporteur spécial vous a excellemment expliqué pourquoi il convenait de faire un effort de sincérité budgétaire. On estime souvent que le coût moyen des dépenses chez les bénéficiaires de l’AME est plus important que les autres assurés sociaux. Or, là encore, il n’en est rien là : les inspections ont totalement mis en pièce cette idée reçue. Le coût moyen par bénéficiaire de l’AME est du même ordre que celui des assurés sociaux : environ 700 euros pour 90 % des bénéficiaires. Encore convient de tenir compte d’un biais statistique puisque tous les résidents de notre pays, qu’ils soient français ou étrangers, sont assurés sociaux, alors que, pour les étrangers en situation irrégulière, le coût moyen n’est calculé qu’à partir de la population des seuls bénéficiaires de l’aide médicale d’État.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l’amendement n° II-51, qui va à l’encontre de nos efforts de sincérité budgétaire.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l'amendement n° II-51 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-51 est retiré.
L'amendement n° II-33, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention et sécurité sanitaire |
|
|
|
20.000.000 |
Offre de soins et qualité du système de soins |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
|
|
|
TOTAL |
|
|
|
20.000.000 |
SOLDE |
0 |
- 20.000.000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Cet amendement vise à réduire de 20 millions d’euros les crédits de paiement prévus pour le financement de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, le fameux EPRUS. Je m’interroge, en effet, sur la bonne gestion financière de cet établissement.
Bien sûr, madame la ministre, je suis très heureux que la France se soit montrée soucieuse de venir en aide à l’Inde à l’heure où elle est frappée par un drame, mais je ne suis pas sûr qu’une mission de ce type figure parmi les activités prévues pour l’EPRUS.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si, si ! C’est tout à fait prévu par les textes fondateurs de l’EPRUS !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Ce n’est de toute façon pas l’objet de mon amendement.
Je m’interroge donc sur cette bonne gestion financière, ainsi que sur l’utilité de verser à l’EPRUS, au titre de l’exercice 2009, 43,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 72,8 millions d’euros en crédits de paiement, sachant que l’EPRUS bénéficiera, par ailleurs, d’une subvention de l’assurance maladie d’un montant de 44 millions d’euros.
Le fonds de roulement de l’établissement devrait s’élever, au 31 décembre 2008, et pour la deuxième année consécutive, à 189,9 millions d’euros.
L’annexe 8 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 précise que les dépenses prévisionnelles de l’établissement s’élèveraient à 85,25 millions d’euros en autorisations d’engagement en 2009, et ne contient aucune information relative aux dépenses prévisionnelles de crédits de paiement.
Je souhaiterais, madame la ministre, que vous m’indiquiez précisément sur quelles hypothèses de dépenses le montant de la subvention prévue pour l’EPRUS au titre de 2009 a été arrêté.
Mon amendement vise également à susciter le débat sur cet autre sujet, plus grave, qu’est la gestion par l’EPRUS du stock de précaution de vaccins et de masques constitué dans le cadre du plan « pandémie grippale ». Sa valeur au 31 décembre 2007 s’élevait, selon les données de vos services, à 765,5 millions d’euros. Or, comme le soulignent les réponses au questionnaire budgétaire que vous m’avez adressées, la problématique de la péremption de ces produits commencera à se poser avec une acuité croissante à partir de 2009.
Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous m’indiquiez le bilan des pertes financières pouvant résulter de la péremption de ces produits et du coût induit par leur renouvellement. Je souhaiterais aussi que vous nous précisiez l’état d’avancement des études menées sur la possibilité de prolonger les durées de validité de certains de ces produits et, de façon plus générale, les principes guidant la stratégie d’acquisition et de stockage de l’ensemble de ces produits.
Je rappelle que la mise en place de l’EPRUS devait permettre une meilleure politique d’acquisition et de gestion des stocks de produits de santé, domaines dans lesquels, de l’avis même de vos services, l’administration centrale n’était pas en mesure de mener une action efficace.
Par ailleurs, la démission, cet été, du directeur de l’établissement, laisse penser que la création de cette nouvelle agence n’a pas encore pu répondre pleinement à ces attentes.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Voilà de nombreuses questions sur l’EPRUS !
Vous connaissez, monsieur le rapporteur spécial, mon aversion pour les fonds de roulement inutilement élevés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Absolument !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cependant, l’année 2008 a été une année de transition, marquée, d’une part, par le transfert des marchés gérés par la direction générale de la santé vers l’EPRUS et, d’autre part, par l’attente d’expertises scientifiques sur les conditions de renouvellement des stocks et l’acquisition de vaccins prépandémiques.
Aujourd’hui, ces acquisitions sont lancées. Elles induisent un besoin de crédits de paiement dès les premiers mois de 2009. Dans le cadre de la préparation à la pandémie grippale, le cycle de renouvellement de certains produits en stock sera également engagé.
De plus, les progrès auxquels les laboratoires sont parvenus, notamment en matière de vaccins, devraient se traduire, à l’instar de ce qui se passe dans les pays voisins, par des décisions d’acquisition qui mobiliseront les ressources de l’EPRUS. Au total, le montant du programme prévisionnel d’acquisition des produits inscrit au budget de l’EPRUS s’élève à 269 millions d’euros. Cette somme est ainsi ventilée : 162 millions d’euros sont consacrés à l’acquisition d’antiviraux et de vaccins, 72 millions d’euros à l’acquisition de masques chirurgicaux ou FFP2 et 35 millions d’euros à celle de respirateurs pour 600 places de réanimation. Resteront ainsi, à la fin de l’année 2009, 14 millions d’euros de fonds de roulement.
Ces acquisitions sont bien sûr liées aux décisions des comités scientifiques qui se prononceront sur les évolutions des stratégies de protection en matière de renouvellement de stock, de choix des produits et de rythme d’acquisition. Je tiens à vous préciser qu’un plan « Qualité et renouvellement du stock santé national » a été lancé afin de mettre en place un programme d’extension de validité des produits dudit stock. Le préalable a été la réalisation d’un recensement, d’une cartographie et d’un allotissement précis du stock constitué progressivement. Les travaux ont permis de rationaliser la fonction de gestion de la validité des produits du stock santé.
Je suis d’ailleurs accompagnée dans cet hémicycle par M. le délégué interministériel à la lutte contre la grippe aviaire. Il se tient évidemment à votre disposition, monsieur le rapporteur spécial, pour vous donner toutes précisions complémentaires.
Il importe, compte tenu des informations dont nous disposons, de ne pas priver l’EPRUS des moyens de répondre aux besoins en 2009. Il y va de notre propre capacité à faire face à une éventuelle urgence sanitaire.
Je rappelle que l’article L. 3135-1 du code de la santé publique inclut bien, parmi les missions de l’EPRUS, celle « d'exporter des produits et services nécessaires à la protection de la population face aux menaces sanitaires graves ». Cet envoi à Bombay est donc parfaitement conforme au rôle de l’EPRUS.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Je vous remercie, madame la ministre, de ces informations.
Comme nous sommes entre gens de bonne compagnie, je peux dire ce que je pense : il aurait été plus simple que tous ces renseignements soient donnés à la commission des finances. Les explications que vous venez de nous fournir ne figuraient malheureusement pas dans les documents budgétaires qui m’ont été communiqués, et que j’ai lus soigneusement. J’ai précisément rédigé cet amendement pour obtenir ces informations. Si j’en avais disposé plus tôt, peut-être aurions-nous gagné un peu de temps.
Vous avez rappelé mon aversion – c’est celle de tout parlementaire attaché la LOLF – pour les fonds de roulement inutiles. Cela dit, lorsque nous les dénonçons, l’administration invoque toujours d’excellentes raisons pour nous convaincre de leur utilité ! On pourra ainsi nous dire que, sur les 189 millions, il ne restera finalement que 14 millions... On m’avait fait le même coup lorsque j’étais rapporteur pour la formation professionnelle, mais cela ne m’avait pas empêché de récupérer quelques milliards.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Je suis donc très vigilant sur ces fonds de roulement, mais vos explications me satisfont.
Une question, souvent évoquée par les médias, d’ailleurs, n’en demeure pas moins en suspens : celle de la validité ou de la péremption du stock. Les sommes en jeu sont très importantes. Ce sujet justifiera donc certainement un débat bien plus ample que celui que j’ai cherché à susciter par mon amendement.
Cela dit, après vos explications, dont je vous remercie, madame la ministre, je retire l’amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-33 est retiré.
L'amendement n° II-142, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et es programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention et sécurité sanitaire |
|
|
|
|
Offre de soins et qualité du système de soins |
|
1 860 000 |
|
1 860 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 860 000 |
|
1 860 000 |
SOLDE |
- 1 860 000 |
- 1 860 000 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cet amendement a pour objet de minorer les crédits de la mission « Santé » à hauteur de 1 860 000 euros sur le programme « Offre de soins et qualité du système de soins ».
La minoration proposée résulte de l'évaluation par une mission conjointe des inspections générales de l’administration, des affaires sociales et des finances de la compensation due au titre du transfert aux régions du fonctionnement et de l'équipement des écoles et instituts de formation paramédicale et de sages-femmes, des aides aux étudiants inscrits dans ces établissements et des bourses du secteur social.
S’agissant d’actions de formation, cela s’imputera sur l’action 1 du programme « Offre de soins », sur les crédits de titre VI.
M. Jacques Mahéas. Et allons-y !
Mme Marie-France Beaufils. C’est incroyable !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Comme vous l’avez rappelé, cet amendement fait suite à une évaluation, menée par trois inspections générales, de la compensation due au titre du transfert aux régions d’un certain nombre de dépenses du secteur social. Il s’agit donc d’un amendement de coordination avec l’amendement n° I-261 adopté à l’article d’équilibre.
Il conviendrait, madame la ministre, que vous apportiez quelques précisions sur cette opération, même si vous l’avez déjà fait partiellement. Car il s’agit tout de même là d’un coup de rabot, et je m’exprime en cet instant sous le contrôle vigilant du président Arthuis.
Cela me conduit, si vous le permettez, madame la présidente, à présenter d’ores et déjà mes deux amendements suivants.
Mme la présidente. Je suis en effet saisie, sur les crédits de la mission « Santé » figurant à l’état B, de deux autres amendements, présentés par M. Jégou, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-35, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention et sécurité sanitaire |
|
|
|
|
Offre de soins et qualité du système de soins |
|
1.000.000 |
|
1.000.000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1.000.000 |
|
1.000.000 |
SOLDE |
- 1.000.000 |
- 1.000.000 |
L'amendement n° II-34 est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention et sécurité sanitaire |
|
|
|
|
Offre de soins et qualité du système de soins |
|
370.000 |
|
370.000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
TOTAL |
|
370.000 |
|
370.000 |
SOLDE |
- 370.000 |
- 370.000 |
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. L’amendement n° II-34 vise à ramener de 770 000 euros à 400 000 euros la subvention versée au groupement d’intérêt public, le GIP « Carte de professionnel de santé », inscrite sur l’action 3, « Modernisation du système de soins », du programme « Offre de soins et qualité du système de soins ».
En effet, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 prévoit la suppression de cette structure, qui serait fusionnée, de même que le GIP «Dossier médical personnel » et une partie du Groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier, le GMSIH, au sein de la nouvelle Agence pour les systèmes d’information de santé partagés, l’ASIP.
Ce regroupement devrait permettre de réaliser des économies d’échelle, dans l’esprit de la LOLF, qui nous est chère.
Faute de disposer d’éléments de justification du budget de la future agence, qui devrait également bénéficier d’une dotation de l’assurance maladie, j’ai donc proposé de réduire de 370 000 euros le montant de la subvention prévue. Autrement dit, je m’efforce de vous aider, madame la ministre, à réduire le déficit de notre malheureux pays.
M. François Patriat. Et à creuser celui des régions !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. L’amendement n° II-35 vise, pour sa part, à réduire de 1 million d’euros la subvention accordée au Conseil national de l’ordre des médecins au titre du financement de la formation médicale continue, inscrite sur l’action 1 « Niveau et qualité de l’offre de soins » du programme « Offre de soins et qualité du système de soins ».
Le projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires », déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, prévoit en effet une évolution du dispositif de formation médicale continue. L’exposé des motifs de l’article 19 de ce projet de loi précise qu’il « vise d’une part, dans le souci de mieux garantir la qualité des prises en charge, à recentrer l’obligation de la formation médicale continue sur l’évaluation des pratiques et, d’autre part, à simplifier et rationaliser les circuits de gestion administrative et le financement de la formation médicale continue, afin de garantir notamment la bonne mise en œuvre de son volet évaluatif ». Il indique, par ailleurs, que « les financements de l’Etat et de l’assurance maladie seront regroupés dans un fonds unique afin de garantir une allocation des ressources publiques conforme aux priorités établies par les conseils nationaux ».
C’est pourquoi, madame la ministre, approuvant ce regroupement, je propose, dans l’attente du vote du projet de loi « HPST », de réduire de 1 million d’euros les crédits prévus à ce titre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je souscris à la réduction de 770 000 euros à 400 000 euros du montant de la subvention versée au GIP « Carte professionnel de santé ».
Je remercie par la même occasion M. Jégou d’approuver notre volonté de mettre en place un opérateur unique pour renforcer la cohérence des systèmes d’information de santé partagés. Lui-même appelait d’ailleurs de ses vœux, et depuis fort longtemps, la constitution d’une telle structure, qui regroupera trois opérateurs, le GIP « Carte professionnel de santé », le GIP « Dossier médical personnel » et une partie du GMSIH.
Cette fusion va effectivement permettre de dégager des économies d’échelle et de mutualisation ; j’y veillerai tout particulièrement. Je m’engage du reste à ce que le rapport d’activité de l’ASIP précise et mette en évidence les économies réalisées grâce aux mutualisations.
Pour autant, dans votre rapport, vous avez insisté sur le fait que l’ampleur des gains à attendre, pour les patients, du développement des systèmes d’information justifie des investissements substantiels, ajoutant que notre pays doit accentuer son effort dans ce domaine.
De leur côté, les auteurs des différents rapports sur le sujet ont nettement souligné qu’il fallait maintenir le budget alloué aux systèmes d’information de santé partagés. L’enjeu est non pas de réduire les crédits, mais bel et bien de les utiliser pour investir dans ces systèmes !
Quant à l’amendement n° II-35 visant à réduire de 1 million d’euros les crédits prévus au titre de la formation médicale continue, chère à Muguette Dini, le projet de loi « HPST » prévoit de faire évoluer le dispositif.
Toutefois, il nous faut attendre d’avoir mené à bien la concertation nécessaire avec les professionnels de santé sur le regroupement des financements. Je viens de décider la prorogation, par arrêté ministériel, des attributions des moyens de fonctionnement et des mandats attribués aux membres des Conseils nationaux de la formation médicale continue et du Conseil national de la formation continue odontologique pour l’année 2009. Avec la mise en place de la loi « HPST », l’année 2009 sera une année de transition.
En conséquence, il est essentiel de maintenir intégralement, dans le projet de loi de finances pour 2009, la subvention attribuée au Conseil national de l’ordre des médecins et au Conseil national de l’ordre des chirurgiens dentistes pour la formation continue des professions de santé.
M. Gilbert Barbier. Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Au vu de ces observations, je vous demande, monsieur le rapporteur spécial, de bien vouloir retirer vos amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Madame la ministre, j’ai bien entendu vos explications. Toutefois, permettez-moi de vous dire que je suis toujours émerveillé par le talent déployé par vos collaborateurs pour justifier les dépenses. Mais je suis aussi frappé par le fait qu’il m’est de plus en plus difficile de vous demander de démontrer l’efficacité de la dépense. Pourtant, en le faisant, je suis parfaitement dans mon rôle de rapporteur spécial de la commission des finances.
Madame la ministre, puisque vous avez évoqué un rabotage de l’action 1 « Niveau et qualité de l’offre de soins » du programme « Offre de soins et qualité du système de soins », permettez-moi de vous poser une question simple : prenez-vous sur la formation médicale des internes, sur l’année-recherche ou sur la Haute Autorité de santé ?
Je crains de ne pouvoir m’endormir cette nuit si vous ne me répondez pas…
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. On demandera le dégel des crédits s’il s’avère que nous en avons besoin !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. J’ai l’impression que, pour une fois, vos services n’ont pas de réponse…
Quoi qu’il en soit, je vais retirer les amendements nos II -35 et II-34, mais j’attacherai du prix à ce que vous m’apportiez, madame la ministre, une réponse le plus rapidement possible, car, en vertu de la LOLF, nous devons connaître l’efficacité de la dépense dès le premier euro. Après tout, nous sommes là pour ça ! Je vous fais crédit parce que je vous connais, madame la ministre, mais, je vous en supplie, apportez dès que vous le pourrez une réponse à ma question !
Mme la présidente. Les amendements nos II-35 et II-34 sont retirés.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II-142 ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Favorable.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Santé » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion l’article 73 et l’amendement portant article additionnel après l’article 73, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Santé ».
Santé
Article 73
I. – Les quatrième à dernier alinéas de l’article L. 1123-8 du code de la santé publique sont supprimés.
II. – Les articles L. 5124-12, L. 5124-17-1 et L. 5124-17-2 du même code sont abrogés.
III. – Au premier alinéa de l’article L. 5121-16 du même code, après les mots : « cette autorisation », sont insérés les mots : « ou toute demande d’autorisation ou de renouvellement d’autorisation d’importation parallèle délivrée dans les conditions fixées par le décret prévu par le 12° de l’article L. 5124-18 ».
IV. – L’article L. 5121-17 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les médicaments et les produits bénéficiaires d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou par la Communauté européenne, ou bénéficiaires d’une autorisation d’importation parallèle délivrée dans les conditions fixées par le décret prévu au 12° de l’article L. 5124-18, sont frappés d’une taxe annuelle perçue par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à son profit et à celui des comités mentionnés à l’article L. 1123-1. Une fraction de cette taxe, égale à 11,4 % du produit perçu chaque année, est reversée, après recouvrement, à ces comités selon des modalités déterminées par arrêté du ministre chargé de la santé. » ;
2° La première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée :
« La taxe annuelle prévue à l’alinéa précédent est fixée par décret dans la limite de 26 000 € par spécialité pharmaceutique et produit bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché ou de l’autorisation d’importation parallèle mentionnée au premier alinéa. »
V. – L’article L. 5211-5-2 du même code est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les dispositifs médicaux tels qu’ils sont définis à l’article L. 5211-1, mis sur le marché français, sont frappés d’une taxe annuelle perçue par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à son profit et à celui des comités mentionnés à l’article L. 1123-1. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le taux de cette taxe est fixé à 0,25 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé. La taxe n’est pas exigible lorsque les ventes n’ont pas atteint, au cours de l’année civile précédente, un montant hors taxes de 763 000 €. Une fraction de cette taxe, égale à 2,1 % du produit perçu chaque année, est reversée, après recouvrement, aux comités mentionnés à l’article L. 1123-1 selon des modalités déterminées par arrêté du ministre chargé de la santé. »
VI. – Après l’article L. 5211-3 du même code, il est inséré un article L. 5211-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5211-3-1. – Les fabricants de dispositifs médicaux ou leurs mandataires, ainsi que toute personne physique ou morale qui se livre à la fabrication, la distribution, l’importation ou l’exportation, même à titre accessoire, de dispositifs médicaux, se déclarent auprès de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé en indiquant les dispositifs objets de leur activité. »
VII. – Le 2° de l’article L. 5211-6 du même code est ainsi rédigé :
« 2° Les modalités de la déclaration prévue à l’article L. 5211-3-1 ; ».
VIII. – L’article L. 5221-7 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5221-7. – Les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro définis à l’article L. 5221-1 sont frappés d’une taxe annuelle perçue par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à son profit et à celui des comités mentionnés à l’article L. 1123-1, suivant les modalités prévues à l’article L. 5211-5-2. »
IX. – À l’article L. 5122-3 et au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du même code, la référence : « L. 5124-17-1 » est remplacée par la référence : « L. 5121-17 ».
X. – À l’article L. 5422-2 du même code, les références : « aux articles L. 5121-8, L. 5121-9-1, L. 5124-17-1 » sont remplacées par les mots : « aux articles L. 5121-8 et L. 5121-9-1 ou l’autorisation d’importation parallèle mentionnée à l’article L. 5121-17 ».
XI. – Au premier alinéa de l’article L. 162-16-5 du code de la sécurité sociale, les mots : « autorisation mentionnée à l’article L. 5124-17-1 » sont remplacés par les mots : « autorisation d’importation parallèle mentionnée à l’article L. 5121-17 ».
XII. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 162-17 du même code, la référence : « L. 5124-17-1 » est remplacée par la référence : « L. 5121-17 ».
XIII. – Au troisième alinéa de l’article 23 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, les mots : « la moitié » sont remplacés par le taux : « 39 % ».
XIV. – Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2009. En ce qui concerne les taxes annuelles, il s’applique aux taxes dues au titre de l’année 2008 et exigibles en 2009 ainsi qu’aux taxes des années suivantes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l’article.
Mme Annie David. L’article 73 du projet de loi de finances pour 2009, qui tend à simplifier le régime des taxes affectées à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, doit permettre d’améliorer la situation que nous connaissons aujourd’hui. La MECSS – mission d’évaluation et de contrôle des lois de financements de la sécurité sociale – de l’Assemblée nationale et la Cour des comptes, qui se sont penchées sur la question de la prescription, de la consommation et de la fiscalité des médicaments, décrivent une fiscalité très complexe, soumise à des règles qui varient d’une taxe à l’autre et font l’objet de fréquents contentieux avec les débiteurs.
Le rapport d’information élaboré par Catherine Lemorton en conclusion des travaux de la MECSS et rendu public en mai 2008 préconise, en conséquence, un certain nombre de mesures destinées non seulement à « favoriser la mise en place d’une fiscalité plus simple », mais aussi à la rendre « plus structurante ». Le rapport d’information de notre collègue Jean-Jacques Jégou déposé en juin dernier confirme ce diagnostic.
Si mon groupe, et plus particulièrement notre collègue François Autain, approuve la volonté de simplification du Gouvernement, qui souhaite voir passer de onze à sept le nombre des taxes versées à l’AFSSAPS, je regrette qu’on se limite à de simples suppressions. La complexité et les dysfonctionnements du régime de ces taxes nécessiteraient que l’on procède à une refonte globale.
Ainsi, la taxe sur les dépenses de promotion des médicaments due par les entreprises assurant l’exploitation en France d’une ou de plusieurs spécialités pharmaceutiques est maintenue en l’état. Elle n’a pourtant pas atteint son objectif, puisqu’elle n’a pas permis de contenir le volume des dépenses publicitaires engagées par les industriels. Celles-ci ont en effet été estimées par un récent rapport de l’IGAS à 19 % du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique, soit 22 000 euros par an et par médecin.
Comme l’indique la Cour des comptes, « il est vraisemblable que son effet régulateur est faible ».
En outre, son assiette, dont la définition imprécise reste inchangée, continuera très certainement d’être contestée, comme elle peut déjà l’être actuellement, par les laboratoires pharmaceutiques. Cette taxe est d’ailleurs source de nombreux contentieux.
Par ailleurs, elle s’inscrit dans un dispositif plus large visant à diminuer les volumes de prescription dans notre pays, qui enregistre toujours « le record en termes de quantité et de dépense de médicaments par habitant », selon le même rapport d’information.
Ce dispositif, dont la charte de la visite médicale inscrite dans la loi de 2004 relative à l’assurance maladie constitue la pierre de touche, s’est révélé incapable d’inciter les laboratoires à modifier leur comportement à l’égard des prescripteurs. Récemment, le Conseil d’État statuant au contentieux a reconnu que le Comité économique des produits de santé, chargé par les signataires de la charte de sanctionner les laboratoires pharmaceutiques ayant abusé de la visite médicale, n’en avait pas la compétence juridique.
Ainsi, la politique d’incitation à la réduction de la publicité en matière de médicaments est un échec. En conséquence, j’estime que la modification, voire la suppression, de la taxe sur les dépenses de promotion des médicaments, qui intègre un dispositif inefficace et donc inutile, devrait être rapidement mise à l’étude.
Enfin, le lien qui rend dépendantes l’AFSSAPS et la Haute Autorité de santé de leurs principaux financeurs, à savoir les laboratoires, doit être rompu, comme le préconise, dans sa proposition n° 84, le rapport d’information de la MECSS que j’ai évoqué tout à l’heure.
Mon groupe a déposé un amendement en ce sens au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, qui reprenait une recommandation formulée à plusieurs reprises par la Cour des comptes. Il visait à confier à la direction générale des impôts la collecte de la taxe annuelle sur le chiffre d’affaires actuellement confiée à l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Mais cet amendement n’a pu être examiné, la commission des finances lui ayant opposé l’article 40 de la Constitution.
Sans doute cette piste pourrait-elle être explorée avec profit dans le cadre d’une prochaine réforme, qui se voudrait globale et viserait à procéder à une refonte du système de taxes, pour n’en garder qu’une seule. Dans cette optique, la taxe sur le chiffre d’affaires instaurée par la loi Douste-Blazy de 2004 pourrait constituer l’instrument approprié.
Il n’en demeure pas moins que la solution consistant à supprimer le recours aux taxes pour agir directement sur le prix du médicament, revu à la baisse, ne doit pas être écartée des hypothèses de travail qui seront examinées dans le cadre d’une réforme des taxes sur le médicament, que les membres de notre groupe estiment urgente et nécessaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 73.
(L'article 73 est adopté.)
Article additionnel après l'article 73
Mme la présidente. L'amendement n° II-151, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 73, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 1415-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1415-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 1415-7. - L'Institut national du cancer peut lancer des appels à projet en matière de recherche d'une durée de cinq ans ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cet amendement vise à permettre à l’INCa, l’Institut national du cancer, de pouvoir lancer des appels à projet en matière de recherche d’une durée de cinq ans. Dans son intervention liminaire, M. le rapporteur spécial a d’ores et déjà salué cet amendement du Gouvernement ; je pense qu’il confirmera cet avis positif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Pardonnez-moi, madame la ministre, mais ce que vous venez de dire n’est pas tout à fait exact…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Excusez-moi, monsieur le rapporteur spécial, c’est M. Alain Milon, rapporteur pour avis, qui en a parlé ! (Sourires.)
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Ce n’est pas grave, madame la ministre, car il n’y a pas de vraies divergences entre nous !
Un tel amendement avait été adopté par la commission des affaires sociales, que la commission des finances, dit-on, maltraiterait quelque peu ; mais l’article 40 de la Constitution est absolument implacable ! Cela étant, je n’ai même pas à faire acte de contrition devant notre excellent collègue Alain Milon puisque son vœu va être exaucé.
Quoi qu'il en soit, il a eu raison de soutenir cet amendement, car il semble effectivement plus raisonnable que l’INCa, eu égard à sa mission, puisse lancer des appels à projet d’une durée de cinq ans.
En conséquence, la commission des finances a émis un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si vous le permettez, madame la présidente, je répondrai maintenant à la question que M. Jégou m’a posée tout à l'heure et dont, à cette heure avancée de la nuit, je n’avais pas d’emblée bien saisi le sens.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Je savais que ma question vous taraudait ! (Sourires.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’aime apporter des réponses aux questions qui me sont posées !
Dans le cadre des crédits de l’action 1, vous m’avez demandé où nous allions prendre les 21 millions d’euros correspondant à l’augmentation des crédits de la formation médicale continue.
L’action 1 regroupe la formation des internes, l’année-recherche et la HAS. Or ses crédits ont connu, cette année, une forte progression, de 21 millions d’euros. À l’heure actuelle, nous disposons d’une souplesse suffisante.
Ce n’est pas que nous ne voulions pas vous répondre, monsieur le rapporteur spécial, ou que nous ne sachions pas quoi vous répondre, mais, à ce stade, nous ne pouvons vous apporter une réponse. Cette poche étant suffisamment élastique, nous verrons au cours de l’année où nous prendrons ces crédits. Je ne puis vous donner d’information supplémentaire.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Vous avez quelquefois la main leste ! (Sourires.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai parlé d’« élasticité », monsieur le rapporteur spécial ! (Nouveaux sourires.)
En tout cas, j’espère avoir levé votre interrogation.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 73.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Santé » (et article 73).
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », du compte spécial « Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés » et du compte spécial « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » est tout d’abord l’occasion pour la commission des finances d’exprimer sa satisfaction devant la création de la direction générale des finances publiques, la DGFiP. Cette création constitue une avancée importante pour la réforme de l’État et, disons-le, s’inscrit dans la continuité des travaux que j’avais menés dès 2000 et qui avaient donné lieu à un rapport appelant à une modernisation du service public de l’impôt.
Nous avons pris note avec intérêt du calendrier de la réforme. Le déploiement des nouvelles structures locales sera progressif, puisqu’il devrait être achevé en 2012. On pourrait considérer que l’évolution se fait lentement, mais mieux vaut avancer prudemment que forcer la marche.
Je serai évidemment attentif aux conditions de mise en œuvre de la réforme. Elle doit susciter l’adhésion des agents, leur offrir des conditions de carrière et de mobilité plus attractives. À défaut d’indicateur de climat social, je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur l’augmentation du nombre de congés de maladie entre 2006 et 2007 au sein de votre ministère : dans la mesure où l’on peut y voir un symptôme de malaise, ce fait mérite d’être examiné de près.
Il faut évidemment tirer les conséquences de la création de la direction générale des finances publiques au regard des objectifs que les services doivent atteindre. Il faudra, à terme, fixer des objectifs plus ambitieux en termes de qualité de service public et de gains de productivité. J’espère donc en trouver rapidement la trace dans les documents relatifs à la performance qui sont transmis au Parlement.
Pour cette raison, il faut attacher plus d’importance encore à l’efficacité des administrations fiscales. Je suis frappé de constater que celles-ci ne disposent pas aujourd’hui de l’ensemble des moyens nécessaires pour lutter contre la fraude fiscale complexe. La DGFiP doit donc être dotée, malgré la résistance de certaines administrations, de compétences de police judiciaire, sous l’autorité du juge. C’est d’ailleurs l’une des préconisations qu’avait faites la mission interparlementaire.
L’informatique est naturellement déterminante. Le programme COPERNIC figure au premier rang des investissements consentis par votre ministère. Son coût s’élève au total à 1,8 milliard d’euros, selon la Cour des comptes, mais il connaît des retards sur certains modules. On s’attend ainsi à des ouvertures de crédits complémentaires. Pour cette raison, j’ai estimé qu’il était nécessaire de demander à la Cour des comptes une enquête, car le Parlement n’a pas d’information s’agissant du retour sur investissement de ce projet.
La Cour des comptes a indiqué dans un référé, en 2007, que « l’administration fiscale ne tire pas suffisamment parti de COPERNIC pour réorganiser ses tâches et ses services et donc pour dégager les gains de productivité importants qui, au même titre que l’amélioration du service rendu, constituent le retour sur investissement du programme ».
A contrario, je me félicite de l’introduction, pour plusieurs autres projets informatiques de la mission, notamment Chorus, d’une évaluation du retour sur investissement, comme je le souhaitais l’an passé.
Enfin, il faut insister sur la nécessité d’améliorer la qualité de service en matière fiscale. Le nombre de télédéclarations de l’impôt sur le revenu stagne : l’objectif fixé pour 2008 ne sera pas atteint, pas plus que ne l’avait été celui fixé pour 2007. Un palier qu’il est difficile de dépasser a apparemment été atteint. Le service offert aux particuliers doit donc être amélioré. Pourquoi ne pas faire évoluer le certificat de sécurité ? La télédéclaration devrait pouvoir être effectuée de n’importe quel poste informatique.
Monsieur le ministre, je souhaite évoquer brièvement la modernisation de l’État, qui est portée par votre ministère, avant que nous revenions sur ce sujet lors de l’examen de l’amendement qui a été déposé par la commission des finances.
Premièrement, la création d’un véritable tableau de bord de la mise en œuvre des décisions prises dans le cadre de la révision générale des politiques publiques est indispensable : il doit être transparent et précis, pour ce qui concerne aussi bien le calendrier de mise en œuvre que les gains de productivité.
Le Figaro a été destinataire d’un rapport d’étape sur la RGPP, qui est évoqué dans son édition du 27 novembre 2008. Pourquoi le Parlement, et en particulier le rapporteur spécial de la commission des finances, n’a-t-il pas eu connaissance de ce document ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Heureusement, il lit Le Figaro !
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Je ne l’ai pas lu : on me l’a transmis. En tout cas, monsieur le ministre, je trouve pour le moins troublant, voire déplorable que le Parlement soit moins bien informé qu’un quotidien !
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Il est vrai que ce n’est pas normal.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Deuxièmement, le fonds de modernisation annoncé par le Président de la République dans son intervention sur la modernisation des politiques publiques et la réforme de l’État du 4 avril 2008, qui aurait vocation à accompagner les réformes en cours, en prévoyant notamment des contreparties au niveau social, n’a pas encore été créé.
Sous le bénéfice de ces remarques, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits proposés pour la mission et les deux comptes spéciaux qui y sont rattachés, sous réserve de l’adoption de l’amendement qu’elle a déposé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de ces crédits intervient dans une période importante pour la fonction publique.
Dans la mesure où nous avons déjà eu, voilà quelques jours, un débat concernant les effectifs, je n’y reviendrai pas.
Le Parlement a été saisi au printemps dernier d’un projet de loi destiné principalement à favoriser la mobilité des fonctionnaires et à accompagner les restructurations en cours dans l’administration.
Parallèlement, le Gouvernement s’est engagé dans la voie d’une refondation de la fonction publique.
Dans le même temps, il a engagé une réflexion sur les missions et le format des administrations, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la fameuse RGPP.
Le budget 2009 vous permettra, monsieur le ministre, d’accompagner ce vaste chantier. Il m’inspire deux observations principales.
Permettez-moi, tout d’abord, de me réjouir du prochain rattachement de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, la DGAFP, à votre ministère, à la disposition duquel elle était placée depuis le 1er juin 2007 : en 2009, ses personnels seront, très logiquement, rattachés à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui regroupe les politiques publiques relevant du périmètre du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Ce processus devrait être parachevé, le 1er janvier 2009, par le rattachement administratif et juridique de la DGAFP à l’administration centrale du ministère et par le transfert des personnels. Le souhait formulé l’année dernière par la commission des lois est donc exaucé.
Pourtant, j’exprimerai encore un regret, me faisant l’écho des personnels : la DGAFP demeurant, pour l’instant, dans ses locaux situés rue de Babylone, elle est encore éloignée géographiquement de ses principaux interlocuteurs. Le bon sens, monsieur le ministre, commande le regroupement géographique des structures.
Ma seconde remarque concernera l’action 2 « Action sociale interministérielle», qui constitue 81,75 % des crédits inscrits au programme « Fonction publique » et permet de financer diverses prestations : chèques-vacances, allocation pour la garde d’enfant, aide ménagère à domicile, aide au logement, prêt mobilité, réservation de places en crèche et de logements sociaux ou encore rénovation des restaurants interadministratifs pour les conformer aux règles sanitaires. Tous ces instruments sont très appréciés des fonctionnaires, et permettent naturellement d’accompagner les restructurations des administrations.
Je voudrais m’attarder un instant sur la question de l’aide ménagère à domicile, que j’ai déjà soulevée en commission devant M. Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Je rappelle que cette aide est destinée aux agents retraités de l’État faiblement dépendants, que leur perte d’autonomie soit permanente ou transitoire, et à leurs ayants cause. Elle est alignée sur l’aide que finance la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés pour les attributaires du régime général.
En 2007, le nombre de bénéficiaires s’est élevé à 28 682 agents retraités de l’État et ayants cause, en progression de 2,82 % par rapport à l’année précédente, pour une dépense totale de 24 480 000 euros.
Sa configuration actuelle est remise en cause dans le cadre d’un budget contraint, le Gouvernement privilégiant les prestations « dynamiques ». L’aide ménagère à domicile sera donc suspendue en 2009 et ses conditions d’attribution étudiées, notamment celle qui est relative au niveau de dépendance. L’ensemble des dossiers enregistrés jusqu’au 31 décembre 2008 est, quant à lui, pris en charge.
M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique nous a fait part de son souci de mieux cibler l’aide. Mais les fonctionnaires que j’ai reçus s’inquiètent de l’éventuelle disparition de cette prestation. Nous sommes naturellement nombreux à être attachés à son maintien, qui témoigne de la responsabilité de l’État envers ses agents retraités, qui ont servi l’État avec un grand sens du service public. Il nous semble qu’il serait très injuste que cette prestation ne soit plus attribuée, alors que les salariés du secteur privé qui relèvent du régime général continuent d’en bénéficier. Monsieur le ministre, pouvez-vous me préciser, sur ce point, les intentions du Gouvernement ?
Sous réserve de l’attention que vous porterez à cette dernière remarque, qui est fondamentale, la commission des lois a émis un avis favorable quant à l’adoption des crédits du programme « Fonction publique ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis.
Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un souci de lisibilité et compte tenu de leur différence de nature, les crédits affectés respectivement aux programmes « Fonction publique » et « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État » font l’objet, cette année, de deux rapports distincts.
Pour l’année 2009, les crédits du programme « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État » s’élèveront à 232 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 298 millions d’euros en crédits de paiement.
À titre liminaire, et ainsi que je l’ai fait en commission des lois, je préciserai que ces crédits constituent la traduction budgétaire d’une politique fondée, en particulier, sur la révision générale des politiques publiques, que je désapprouve à titre personnel, notamment en raison de son impact sur les dépenses publiques et sur l’ensemble des fonctionnaires.
Cela étant dit, je m’arrêterai plus particulièrement sur deux chantiers prioritaires de modernisation de l’État, à savoir le portail personnalisé « Mon service public » et l’accueil téléphonique dans l’administration.
S’agissant en premier lieu du portail personnalisé, qui doit être lancé le 15 décembre prochain, la plateforme offre quatre nouvelles fonctionnalités, sources de simplification pour l’utilisateur.
L’espace personnel de stockage en ligne va permettre à l’usager d’utiliser des documents dématérialisés et de faciliter les démarches par le préremplissage de formulaires en ligne.
Le mécanisme d’authentification unique offre la possibilité pour l’utilisateur d’accéder aux différentes démarches en ligne de son choix sans avoir besoin de saisir les identifiants et mots de passe propres à chacune de ces démarches.
L’espace de navigation pourra être personnalisé grâce à des « favoris ».
Enfin, le site permet un suivi de l’ensemble des démarches, qu’il s’agisse de l’avancement de celles-ci ou encore des messages envoyés par l’administration.
Cette plateforme « Mon service public » a été conçue selon une logique fonctionnelle dite d’« événements de vie » – un mariage, un divorce, une naissance, un changement de nom d’usage, un déménagement, un décès, etc. – qui nécessitent pour l’usager d’accomplir certaines démarches administratives.
Très soucieuse de la protection des données personnelles, j’ai voulu savoir si le site offrait toutes les garanties nécessaires en la matière.
Lors de mon déplacement à la direction générale de la modernisation de l’État, la DGME, où j’ai assisté en avant-première à une démonstration de la plateforme, les représentants de cette direction m’ont certifié que la CNIL avait été associée dès le départ à ce projet.
Deux services offerts requièrent en effet un niveau de sécurité élevé : d’une part, la gestion d’une identité partagée entre « Mon service public » et les sites partenaires, d’autre part, l’espace de stockage des informations et des données personnelles des usagers.
D’un côté, l’utilisateur est assuré d’avoir un accès unifié à des services sans que la plateforme « Mon service public » ait connaissance de l’ensemble des différents identifiants sectoriels de l’intéressé.
De l’autre, le site garantit la confidentialité des données enregistrées dans l’espace de stockage en prévoyant qu’aucune autorité administrative ne peut consulter les informations de l’usager. Quant au regroupement des données, il est exclu.
Je voudrais à présent vous soumettre certaines recommandations de la commission des lois.
Il convient, tout d’abord, d’évaluer l’impact du projet sur la nature du travail des fonctionnaires, en veillant à ce que la mise en place du portail « Mon service public » et, au-delà, le développement de l’administration électronique ne s’accompagne pas de suppressions de postes dans la fonction publique. J’ajoute que ce mouvement conduit indubitablement à des évolutions de métiers qu’il appartient à l’État d’évaluer et d’accompagner.
Il faut, ensuite, créer un espace pour les entreprises et développer des partenariats.
Il convient, enfin, d’évaluer régulièrement l’outil du point de vue de sa fonctionnalité et de sa sécurisation.
S’agissant, en second lieu, de l’amélioration de l’accueil téléphonique de l’administration, le service « 39-39 Allô service public » est géré par un groupement de prestataires privés retenu en novembre 2006, pour une durée de trois ans, à l’issue d’un appel d’offres. Si, actuellement, le ratio qualité de réponse sur temps d’attente de ce service est satisfaisant, je me demande néanmoins si, à l’avenir, l’administration ne pourrait pas assurer elle-même cette prestation en régie directe.
L’accueil téléphonique de l’administration a connu certaines améliorations récentes comme l’abaissement du coût d’appel vers les administrations, qui constitue un facteur d’égalité dans l’accès aux services publics, l’élargissement des horaires d’ouverture du « 39-39 » et l’extension de ses prestations.
En ce qui concerne le regroupement des neuf centres interministériels des renseignements administratifs, les CIRA, dans un centre unique qui devrait être installé à Metz à la fin de l’année 2009, je vous indique d’ores et déjà que je vais suivre avec attention le problème du devenir des fonctionnaires affectés aux actuels CIRA. Plusieurs questions se posent en effet : les agents ont-ils été informés de ce changement ? Ont-ils été consultés ? Combien parmi eux iront à Metz ? Seront-ils contraints d’effectuer une mobilité vers le nouveau CIRA ? Que vont devenir les autres agents ?
Pour conclure, je tiens à souligner que des efforts restent à faire afin que le « 39-39 » devienne véritablement le « guichet unique » de l’accueil téléphonique de l’administration de l’État. Pour atteindre cet objectif, il faut, d’une part, que l’administration s’assure que les opérateurs qui répondent aux usagers sont toujours compétents et bien formés et, d’autre part, pour que tous les centres d’appels de l’État abandonnent la pratique des numéros surtaxés au profit d’une tarification locale. Je souhaite tout particulièrement qu’une baisse de la tarification des appels en provenance d’un téléphone mobile, lesquels représentent un tiers des appels au « 39-39 », soit étudiée.
Je vous propose, mes chers collègues, de vous prononcer à la lumière de ce que je viens de dire sur les crédits du programme « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État ».
Mme la présidente. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.
Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour ces trois missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme s’il fallait que l’administration fiscale donne l’exemple, le projet de budget pour 2009 prévoit, une fois encore, une réduction des effectifs de nos directions financières, représentant 2 800 postes en équivalents temps plein.
Ainsi, année après année, par l’utilisation « optimale » des gains de productivité, par la dématérialisation des procédures, par tous les moyens possibles en fait, le ministère des finances réduit chaque fois un peu plus l’importance de ses effectifs.
Le regroupement de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique dans la nouvelle direction générale des finances publiques aura, dans les faits, servi de support à cette nouvelle réduction d’effectifs.
Celle-ci s’accompagne de la fermeture de services déconcentrés et de la mise en vente de locaux désaffectés. La politique de cession immobilière menée par le ministère présente d’ailleurs un aspect particulier puisque, sur la recommandation du conseil de l’immobilier de l’État et de France Domaine, il est envisagé sérieusement de réduire la surface mise à disposition de chaque agent et de limiter le recours aux bureaux individuels. On donnerait donc la primauté aux bureaux en « espace ouvert », qui font cohabiter plusieurs agents, alors que l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail recommande, au contraire, une moindre utilisation de ce mode de dévolution de l’espace de travail.
Le caractère confidentiel du nombre des contacts que les agents des services fiscaux peuvent entretenir avec les contribuables nécessiterait à mon avis plus d’attention, d’autant qu’il a été décidé de mêler instruction des dossiers et liquidation des droits à payer.
La course à la performance de chaque agent, qui semble privilégiée, risque d’avoir des conséquences non négligeables sur l’efficacité de l’intervention des personnels des services fiscaux.
Même si l’on a entendu des discours définitifs sur la lutte contre la fraude, force est de constater que nous sommes encore loin du compte. La généralisation de la dématérialisation des procédures, l’usage et l’abus du rescrit fiscal, la mise en cause du contrôle sur place sont autant de démonstrations qu’il y a, d’un côté, un discours et, de l’autre, une pratique.
La lutte contre la fraude fiscale, sous toutes ses formes, pourrait à elle seule justifier un redéploiement des effectifs budgétaires et un renforcement des procédures et des moyens matériels et humains de contrôle de la qualité des déclarations et du processus de recouvrement.
Mais il est vrai que, à partir du moment où les indicateurs de performance sont essentiellement fondés sur la rapidité de la réponse aux usagers et ne contiennent pas d’éléments permettant de vérifier réellement la qualité des déclarations des assujettis, on n’a plus besoin des mêmes services fiscaux !
Si vous souhaitez faire quelques gains de productivité dans le fonctionnement de nos administrations fiscales sans toutefois nuire à l’alimentation du budget de la nation – et, pour cela, elles doivent conserver une certaine efficacité ! –, c’est dans la simplification, nous semble-t-il, que vous les trouverez. Une véritable remise en cause des niches fiscales, des dispositifs complexes et des instructions délicates dont notre droit est abondamment pourvu y contribuerait sans doute largement !
Pour ne prendre que l’exemple du bouclier fiscal, pourquoi ne pas décider, en lieu et place de la procédure actuelle, de mettre en œuvre une exonération d’office, au titre des impositions locales, des redevables ne bénéficiant que de minima sociaux, au lieu de les renvoyer au traitement d’un dossier complexe ?
Simplifiez donc l’impôt de solidarité sur la fortune, en supprimant les dispositifs qui en réduisent l’assiette ou le rendement, et qui constituent autant d’éléments de contentieux en puissance !
Pour rendre nos administrations fiscales plus proches des gens et plus efficaces, pour offrir des emplois plus intéressants et plus épanouissants aux agents, il est impératif de changer le logiciel que vous continuez d’utiliser pour organiser, au gré des attentes des plus aisés comme du patronat, l’activité de ces services essentiels à la vie de notre nation.
Il est grand temps de rendre au service public fiscal sa qualité ! Nous voterons donc contre ce projet de budget pour 2009 qui conduit à le dénaturer encore un peu plus ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais limiter mon intervention au programme « Fonction publique ».
Cette fonction publique, monsieur le ministre, vous la maltraitez comme jamais, avec, pour outil gestion des effectifs, le rabot – vous supprimez 30 627 postes, dont 13 500 dans l’éducation nationale –,…
Mme Marie-France Beaufils. C’est le « rabot » de la Méduse !
M. Jacques Mahéas. … et, pour politique salariale, une modique revalorisation du point d’indice de 0,8 %, quand l’inflation se situe autour de 3 %.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non, 1,5 % !
M. Jacques Mahéas. Il est proprement stupéfiant que l’État ait aussi peu de considération pour ses agents !
Le programme que nous examinons regroupe les crédits consacrés à la formation interministérielle des fonctionnaires de l’État et à l’action sociale interministérielle.
Les crédits consacrés à la formation des fonctionnaires augmentent de 5,6 % pour 2009 dans leur ensemble. C’est valable pour l’ENA et les IRA, les instituts régionaux d’administration, tandis que, pour les actions de formation au niveau central, les crédits diminuent de 12,9 %. Il s’agit essentiellement des formations dispensées dans le cadre de l’École de la gestion des ressources humaines et de l’Institut de formation de l’environnement, ce qui entre en complète contradiction avec les objectifs affichés par l’État de modernisation de la gestion des ressources humaines et de mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.
Au niveau déconcentré, les crédits de formation relatifs au droit individuel à la formation sont légèrement revalorisés. Ce droit est, toutefois, resté extrêmement limité en 2008. Le rapporteur pour avis de la commission des lois de l’Assemblée nationale pour le programme « Fonction publique » note qu’il semblerait que trop de demandes soient refusées au prétexte, soit du manque de crédits, soit du dysfonctionnement du service. Qu’en est-il, monsieur le ministre ?
En ce qui concerne les mécanismes de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle – RAEP –, seuls 30 % des ministères les ont mis en place. La prévision pour 2009 est fixée à 70 %, la cible étant de 100 % en 2011. La mobilisation n’est-elle pas un peu… lente ?
Abordons maintenant les crédits d’action sociale interministérielle, qui baissent de 4,2 % par rapport à 2008.
Je m’inquiète de voir les crédits correspondant aux réservations de places en crèches diminuer si fortement : ils passent de 16 millions à 9,51 millions d’euros, soit une baisse de 40 %. Alors même que votre majorité défend des prestations d’action sociale individualisées, l’utilisation du chèque emploi service universel – CESU - pour la garde d’enfant ne connaît qu’une progression modeste, de 1,9 %, pour les enfants de zéro à trois ans et subit même une diminution de 2,4 % pour ceux de trois à six ans. Si les crédits ne sont pas consommés, c’est, semble-t-il, du fait d’un défaut d’information puisque la garde d’enfants constitue l’une des principales attentes des agents. Les préfets, même s’ils ne sont pas évalués sur des critères d’action sociale, pourraient sans doute mieux diffuser l’information.
Mais le plus grand mystère de ce budget reste l’aide ménagère à domicile, l’AMD, un jour supprimée, le lendemain « repositionnée ». Après le comité interministériel d’action sociale – CIAS – de la mi-septembre, les organisations syndicales nous avaient alertés sur la suppression brutale et unilatérale de l’AMD. J’avais alors posé une question écrite à M. le secrétaire d’État à la fonction publique, lequel, en commission élargie à l’Assemblée nationale, le 7 novembre, a clairement nié la suppression et parlé de « repositionnement » à vocation sociale. Il a réitéré ces propos lorsqu’il a été auditionné par la commission des lois du Sénat le 13 novembre, ainsi qu’en réponse à la question écrite que j’avais posée, et dont la réponse figure au Journal officiel du 20 novembre. Dont acte.
Pourtant, dans l’intervalle, le 12 novembre, un nouveau CIAS a eu lieu et les syndicats en claquaient la porte pour cause de suppression de l’AMD !
C’est à n’y rien comprendre, sauf si l’on prête attention au jeu sur les mots. Ainsi, le A ne signifierait plus « aide », mais « allocation » et le M ne signifierait plus « ménagère », mais maintien, afin d’élargir la prestation... Cela emporterait bien sûr notre adhésion, mais pas avec un budget qui ne prévoit aucun nouvel arrivant dans l’ancien système et ne finance aucun nouveau dispositif. En lieu et place des 25 millions d’euros de crédits de l’an passé, seulement 15 millions d’euros sont destinés au reliquat. Et aucun appel d’offres pour trouver un futur prestataire délégué n’a été lancé… « Repositionnement » voudrait-il dire extinction ?
L’an passé, on estimait que la dotation était sous-évaluée. Elle a connu une progression régulière du nombre de ses bénéficiaires et permettait à de nombreuses personnes de rester à leur domicile, en leur apportant une aide pour la vie quotidienne. Demain, les fonctionnaires vont donc être privés d’une aide dont bénéficient les retraités du secteur privé. C’est inadmissible, comme l’était déjà la suppression de l’aide à l’amélioration de l’habitat des fonctionnaires retraités dans le budget pour 2005 ! Une fois de plus, vous vous défaussez sur les collectivités locales.
Monsieur le ministre, nous attendons de votre part une réponse enfin claire sur le devenir de cette dotation et sur son financement.
Quoi qu’il en soit, dans un contexte de nouvelle réduction massive des effectifs et de rigueur salariale, le groupe socialiste ne votera pas les crédits de cette mission, qui ne portent aucune action positive significative en faveur de la fonction publique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC–SPG.)
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. Il ne faut tout de même pas exagérer !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » est un budget maîtrisé et ambitieux.
Il faut bien le comprendre, compte tenu de l’antériorité de l’effort qui est réalisé, il devient plus difficile de décider de nouvelles suppressions d’emploi.
Sur la période 2003-2009, près de 15 500 départs en retraite n’ont pas été remplacés. Nous continuons cet effort, notamment grâce aux réformes importantes que nous menons. En 2009, 55 % des départs à la retraite ne seront pas remplacés. Il s’agit d’un chiffre important. Cela se traduit par une réduction de la masse salariale, hors compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Il en va de même pour les crédits de fonctionnement, qui seront maîtrisés. En 2009, pour le ministère dont j’ai la charge, les crédits de fonctionnement et d’investissement représentent près de 3 milliards d’euros, enregistrant ainsi une baisse de 0,9 % par rapport à 2008.
Mais de tels efforts préservent les crédits d’investissement, notamment pour les grands chantiers informatiques, qui ont quelque peu défrayé la chronique de ces derniers jours. Je pense notamment au programme COPERNIC.
D’ailleurs, monsieur le rapporteur spécial, puisque vous souhaitez que la Cour des comptes procède à une enquête sur ce sujet, vous me permettrez de vous apporter quelques éléments d’information.
Depuis l’origine, le programme COPERNIC représente un investissement direct global de 911,5 millions d’euros, chiffre qui a très peu varié.
En 2005, la Cour de comptes avait réalisé un audit et évalué le coût total du projet à 1,8 milliard d’euros.
Contrairement à ce que j’ai entendu, un tel montant ne correspond pas à une dérive. Simplement, outre les investissements directs, il faut également prendre en compte le coût des ressources internes, des dépenses de formation, de maintenance, etc.
Il y a donc un coût total, que j’ai d’ailleurs communiqué – je n’avais aucune raison de le cacher ! – à la commission des finances de l’Assemblée nationale lorsqu’elle m’a interrogé sur le sujet. Mais, contrairement à ce que prétendent certains, il ne s’agit pas d’un doublement du coût du programme.
Au demeurant, le programme COPERNIC est mis en place pour une durée de dix ans, de 2000 et 2010. On ne peut donc pas le juger comme on le ferait pour un dispositif institué pour seulement un an ou deux.
Par ailleurs, dans le cadre de la fusion que j’ai lancée, j’ai demandé à la DGFiP d’examiner les adaptations complémentaires que nous pourrions éventuellement mettre en œuvre pour faciliter la réforme.
De nombreux outils COPERNIC ont été mis en place et ont déjà permis de dégager des gains de productivité importants.
C’est évidemment le cas de la télédéclaration. Monsieur Angels, comme vous l’avez noté dans votre excellent rapport, il y a eu 7,4 millions de télédéclarations à l’impôt sur le revenu en 2007. Nous constatons effectivement une stabilisation par rapport aux années précédentes. Nous souhaiterions évidemment que ce nombre soit plus élevé. Une relance et une simplification de la procédure s’imposent probablement.
Certes, le fait de limiter la réduction de 20 euros de l’impôt sur le revenu aux seuls primo-déclarants a également dû jouer. (M. le président de la commission des finances acquiesce.) Certains contribuables qui avaient opté pour la déclaration l’an dernier ont peut-être jugé cette formule moins intéressante la deuxième année, puisqu’ils n’avaient plus droit au même avantage fiscal.
Pour autant, l’important est, me semble-t-il, que nos concitoyens s’habituent progressivement à effectuer de telles démarches en ligne. Notre objectif est donc de les inciter à entrer dans le dispositif. Ils se rendront alors compte que la télédéclaration est une procédure plus simple.
Pour ma part, je pense qu’il y aura plus de 7,5 millions de télédéclarants l’an prochain.
La création de la DGFiP est l’un des chantiers majeurs de la révision générale des politiques publiques et de la mission dont nous examinons en ce moment les crédits.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez insisté sur la nécessité de fixer des objectifs plus ambitieux en termes de qualité de service public. Personnellement, je suis très sensible à cette question et je souscris à vos recommandations. C'est la raison pour laquelle j’ai souhaité réaliser cette fusion. Nous avons en effet besoin d’un guichet fiscal unifié et il faut que cela figure parmi les nouveaux objectifs mentionnés dans le projet annuel de performance.
À cet égard, je vous rappelle que l’objectif n° 3, intitulé « Faciliter l’impôt », du projet annuel de performance permet de cibler avec précision les dix engagements de l’administration en la matière. Il s’agit par exemple de mesurer le taux d’appels aboutis, de réponses aux courriers dans le mois ou de réponses aux courriels dans les quarante-huit heures. Ainsi, de nombreux engagements ont été pris en matière d’amélioration de la qualité du service public. Nous vérifierons que les objectifs sont bien atteints.
Je l’ai bien noté, vous avez l’intention de suivre la fusion avec beaucoup de soin. Vous avez bien raison. D’ailleurs, c’est ce que je fais moi-même, de manière quasi quotidienne. Il est important que cette démarche aboutisse. Il est possible que nous fassions des erreurs, mais nous agissons avec sincérité et sérieux.
Le statut de trésorier-payeur général sera supprimé. Il en va de même du statut de conservateur des hypothèques.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Éric Woerth, ministre. Il s’agissait d’un débouché de carrière extrêmement bien rémunéré. Certes, je n’ai rien contre les traitements élevés, mais encore faut-il que le niveau de rémunération corresponde à un niveau de responsabilités, ce qui, sans vouloir dévaloriser la fonction, n’est pas nécessairement le cas des conservateurs des hypothèques. Nous allons donc procéder à des modifications, notamment sur les modes de rémunération.
Certains d’entre vous se sont plaints d’avoir été informés sur les indicateurs RGPP par voie de presse. Moi aussi, je trouve cela regrettable. Je n’ai pas choisi de m’exprimer d’abord devant la presse sur ce sujet. En réalité, comme vous le savez, dans notre société, dès qu’un groupe de travail est saisi d’un dossier, il se trouve malheureusement toujours quelqu’un pour divulguer des informations à la presse ! Autrement dit, ce que vous avez appris dans les médias n’était pas la communication officielle du Gouvernement. La communication officielle, je la ferai mercredi prochain en conseil des ministres et j’en transmettrai une copie au Parlement le jour même, comme cela se pratique déjà pour les projets de loi de finances.
Le tableau de bord du suivi des missions de la RGPP est très précis et détaillé. Nous avons réalisé un travail considérable, notamment en rencontrant chaque ministre. Ce document nous permettra de lancer une nouvelle phase de la révision des politiques publiques.
S’agissant de la fraude, je souhaite évidemment que nous utilisions tous les moyens à notre disposition pour lutter contre elle, et nous continuerons de le faire.
Madame Gourault, vous m’avez interrogé sur la réforme des aides ménagères à domicile attribuées aux retraités de la fonction publique. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique, s’est déjà exprimé sur le sujet. Nous souhaitons non pas supprimer ces aides ménagères, mais mieux cibler le dispositif en fonction des besoins, donc selon des critères sociaux. Actuellement, ce n’est pas le cas et nous constatons un certain nombre d’anomalies. De notre point de vue, la solidarité doit jouer en faveur de ceux qui en ont le plus besoin.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. Oui !
M. Éric Woerth, ministre. J’imagine que nous serons tous d'accord sur ce point, au-delà de nos sensibilités politiques.
Madame Assassi, je ne reviendrai pas sur tous les points que vous avez abordés, mais je souhaite m’exprimer sur la question du site Internet <mon.service-public.fr>, sujet qui m’est très cher.
Comme vous le savez, voilà quelques années, alors que j’exerçais les fonctions de secrétaire d’État à la réforme de l’État dans le gouvernement dirigé par Jean-Pierre Raffarin, j’ai lancé le « 39 39 », service téléphonique destiné aux usagers de l’administration, et le site « mon.service-public.fr ». D’ailleurs, j’avais été stupéfié par le temps qu’exigeait la mise en place de tels services.
Ce site Internet sera, je le pense, un espace personnalisé très important pour nos concitoyens, qui n’auront plus à donner plusieurs fois les mêmes informations à l’administration.
Certes, nous attendons l’avis définitif de la CNIL. Nous espérons que les premiers services – je pense notamment à la prestation d’accueil du jeune enfant, au chèque emploi service universel, aux allocations familiales, à la sécurité sociale ou la retraite – seront activés dès la fin de l’année 2008 ou le début de l’année 2009. Tout cela facilitera la vie de nos concitoyens.
Bien évidemment, nous devrons suivre avec attention l’évolution du projet et procéder aux ajustements qui s’imposeront en cours de route. À cet égard, j’ai pris bonne note des propositions que vous avez formulées.
En outre, l’externalisation de la gestion du service téléphonique « 39 39 » me semble positive. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de confier cette mission à l’État. Actuellement, cela fonctionne bien.
D’une manière générale, j’ai mis fin à la pratique des numéros surtaxés. Ainsi, en moins d’un an, les décisions que nous avons prises ont permis de diviser par deux le coût des appels téléphoniques de nos concitoyens auprès de certains services administratifs. C’est le cas du « 39 39 », des centres « impôts service », de l’UNEDIC, d’« Infos douane service » et, depuis le 1er juillet, de l’assurance maladie. Là encore, nous devrons suivre les évolutions de près et, le cas échéant, faire preuve d’adaptabilité.
Enfin, je pense que nous pouvons améliorer la qualité des centres interministériels de renseignements administratifs, les CIRA. Le service a peu vieilli, notamment en raison de l’émergence d’autres modes d’accès aux informations administratives. D’ailleurs, il est aujourd'hui quasi exclusivement réservé à des professionnels.
Les CIRA sont maintenus, mais ils seront concentrés en un point unique. Une partie des agents, qui sont d’ailleurs souvent des fonctionnaires de l’administration fiscale en détachement, resteront dans ces centres, tandis que les autres réintégreront leur administration d’origine.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les points que je souhaitais aborder devant vous dans les dix minutes qui me sont imparties. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission : « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Gestion des finances publiqueset des ressources humaines |
11 600 942 599 |
11 331 438 505 |
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
8 303 303 958 |
8 317 423 958 |
Dont titre 2 |
6 884 120 196 |
6 884 120 196 |
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local : expérimentations Chorus |
16 800 636 |
16 800 636 |
Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
229 154 755 |
295 133 603 |
Dont titre 2 |
87 594 852 |
87 594 852 |
Conduite et pilotage des politiques économique et financière |
984 677 565 |
870 607 565 |
Dont titre 2 |
390 314 544 |
390 314 544 |
Facilitation et sécurisation des échanges |
1 535 943 697 |
1 534 343 697 |
Dont titre 2 |
1 025 707 054 |
1 025 707 054 |
Fonction publique |
454 076 551 |
220 143 609 |
Dont titre 2 |
500 000 |
500 000 |
Entretien des bâtiments de l’État |
76 985 437 |
76 985 437 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-7, présenté par M. Angels, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public localDont Titre 2 |
|
|
|
|
Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local : expérimentations Chorus |
|
|
|
|
Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État Dont Titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Conduite et pilotage des politiques économique et financière Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Facilitation et sécurisation des échangesDont Titre 2 |
|
|
|
|
Fonction publiqueDont Titre 2 |
|
|
|
|
Entretien des bâtiments de l'État |
||||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
SOLDE |
- 5 000 000 |
- 5 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Cet amendement a deux objets.
D’une part, il vise à susciter la fusion entre la direction générale de la modernisation de l'État, la direction du budget et la direction générale de l'administration et de la fonction publique.
En effet, la fusion de la direction générale des impôts, la DGI, et de la direction générale de la comptabilité publique, la DGCP, doit en annoncer d'autres, concernant cette fois les administrations d'état-major.
La persistance de trois structures distinctes, même si elles travaillent en collaboration, laisse perdurer des risques de cloisonnement et de perte d'efficacité, alors que leur fusion pourrait engendrer des économies, par exemple sur les crédits consacrés aux expertises et à la communication.
D’autre part, cet amendement vise à réduire de 5 millions d’euros la part des dépenses consacrées aux expertises extérieures mises en œuvre par des cabinets de conseil, afin d'augmenter le recours aux services internes de Bercy.
Les crédits de titre III consacrés à la modernisation de l'État ne prévoient pas moins de 45,5 millions d'euros en 2009, sans précision sur la part qui est dévolue aux expertises extérieures.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je ne suis pas hostile par principe aux fusions. Pour preuve, j’ai moi-même lancé la fusion entre la DGI et la DGCP.
Certes, il s’agissait d’un engagement du Président de la République et, en tant que membre de l’équipe gouvernementale, je me devais de l’honorer. Mais il s’agissait également pour moi d’une véritable conviction : je pense que cette fusion apporte une réelle valeur ajoutée.
Pour autant, fusionner d’autres services, comme la direction du budget avec la direction générale de la modernisation de l’État et la direction générale de l’administration et de la fonction publique, n’est pas nécessairement une bonne idée. Ces trois services exercent de fonctions très différentes. M. le directeur du budget, qui assiste à nos débats, ne me contredira pas, d’autant qu’il n’est pas habilité à prendre la parole dans l’hémicycle. (Sourires.)
La DGME est une petite direction qui a retrouvé toute sa force grâce à la révision générale des politiques publiques. C’est donc vraiment une direction de missions.
Je ne suis pas opposé par principe à une étude des synergies, mais je pense que ce sont des directions qui ont des missions et des métiers différents.
En ce qui concerne votre proposition de réduction de 5 millions d’euros de crédits, j’y suis favorable. Je vous donne donc mon accord sur votre amendement et je prendrai cette somme sur l’appel aux consultants.
La DGME avait fait, s’agissant des consultants, une demande initiale de 50 millions d’euros, que j’avais réduite à 25 millions d’euros, ce qui représente un minutieux travail de suivi. Ce sont des demandes qui sont regardées de très près, qui exigent des milliers d’heures de travail. Cela étant, lorsqu’on est à 25 millions d’euros, on peut descendre à 20 millions d’euros.
Je rejoins donc le Parlement. Je considère que la proposition de votre commission est intéressante et je m’y plie avec responsabilité.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je tiens à saluer l’abnégation du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. C’est un encouragement pour tous les rapporteurs spéciaux, tous les rapporteurs pour avis, tous les sénateurs, à faire preuve d’exigence à l’égard des ministres qui viennent devant le Sénat défendre les crédits des différentes missions.
En acceptant cette réduction de crédits, monsieur le ministre, l’économie réalisée ne sera pas tout à fait de 5 millions d’euros, car les sociétés qui participent aux différentes missions, peut-être même aux banques conseils, déclareront un peu moins de bénéfices, ce qui entraînera sans doute une légère réfaction de l’impôt sur les sociétés.
En tout cas, je veux rendre hommage à votre attitude et vous remercier, monsieur le ministre.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés » figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
10 800 000 |
10 800 000 |
Prêts et avances à des particuliers ou à des associations |
800 000 |
800 000 |
Prêts pour le développement économique et social |
10 000 000 |
10 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : avances à divers services de l’état ou organismes gérant des services publics
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics » figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
7 891 816 000 |
7 891 816 000 |
Avances à l’Agence unique de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
7 500 000 000 |
7 500 000 000 |
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
275 000 000 |
275 000 000 |
Avances à des services de l’État |
116 816 000 |
116 816 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », ainsi que des comptes spéciaux « Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».
Provisions
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Provisions »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je formulerai quelques observations générales sur la mission « Provisions ».
En premier lieu, la mission « Provisions » est une mission originale. En effet, elle est constituée de deux dotations–programmes regroupant des crédits destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote de la loi de finances. Ils sont répartis en tant que de besoin, en cours d’exercice, entre les autres missions, par voie réglementaire.
En outre, et conformément aux dispositions de la LOLF, la mission « Provisions » est une mission « spécifique » dénuée de stratégie de performance. Ainsi, ses deux programmes ne font l’objet d’aucun objectif ni indicateur et leur présentation n’est pas accompagnée d’un projet annuel de performances.
Par ailleurs, la présente mission devrait être impactée par la pluriannualité, qui sera mise en œuvre par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009–2012.
En effet, ce budget pluriannuel prévoit, dans le respect du plafond global de dépenses, une réserve de « budgétisation », non répartie entre missions, destinée à abonder exceptionnellement les plafonds des exercices 2010 et 2011. Cette réserve est intégrée à la mission « Provisions », pour un montant de 510 millions d’euros en 2010 et de 1 milliard d’euros en 2011, afin de « provisionner les risques inhérents à la programmation, qu’il s’agisse des incertitudes de prévisions macroéconomiques ou microéconomiques ou de facteurs accidentels et imprévisibles, non pris en compte dans la programmation initiale ». La destination de cette réserve de budgétisation devrait être strictement encadrée afin d’éviter toute dérive.
En tenant compte de cette réserve, pour 2010, le plafond des crédits de la mission, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement, sera porté à 660 millions d’euros. Pour 2011, ce montant est fixé à 1,15 milliard d’euros.
J’en viens à présent aux demandes de crédits formulées pour les deux dotations composant la présente mission.
La dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » correspond aux « mesures générales intéressant les agents du secteur public ». Elle a vocation à financer les mesures générales, en matière de rémunérations publiques, dont la répartition, par programme, ne pourrait être déterminée a priori avec précision.
Pour 2009, à l’instar de la demande formulée l’an dernier, une demande de crédits est provisionnée en projet de loi de finances afin de financer les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires effectuées dans la fonction publique de l’État, mesure introduite par la loi n° 2007–1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA » Le montant demandé est fixé à 150 millions d’euros.
Votre rapporteur spécial, lors de l’examen du dernier projet de loi de finances, avait souhaité que cette provision demeure transitoire et qu’il n’y soit pas recouru à nouveau en projet de loi de finances, afin que les exonérations soient inscrites dans les dépenses de personnel de chaque ministère.
Or, selon les informations recueillies auprès de la direction du budget, au 10 octobre 2008, les crédits ouverts en loi de finances pour 2008 n’avaient fait l’objet d’aucun arrêté de transfert. Le dispositif prévu par la loi TEPA n’ayant pas pu être évalué précisément, une nouvelle inscription de ces crédits prévisionnels sur la mission « Provisions » a été décidée. En tout état de cause, cette provision de crédits n’a pas vocation à être pérennisée et votre rapporteur spécial y veillera.
La dotation du second programme, « Dépenses accidentelles et imprévisibles », comme son nom l’indique clairement, assure les crédits nécessaires à des dépenses accidentelles, imprévisibles et urgentes. Il s’agit, notamment, des dépenses qu’occasionneraient des catastrophes naturelles, en France ou à l’étranger, ou des événements extérieurs qui nécessiteraient le rapatriement de citoyens français.
Au titre de cette seconde dotation, pour 2009, 75 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement sont demandés, montant stable par rapport aux projets de loi de finances pour 2008 et pour 2007.
En seconde délibération, et à titre non reconductible, l’Assemblée nationale a majoré ces crédits de 46 millions d’euros, en autorisation d’engagement comme en crédits de paiement.
Sous le bénéfice des observations que je viens de présenter, la commission des finances a décidé de vous recommander, mes chers collègues, l’adoption des crédits de la mission « Provisions ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. J’indique au Sénat qu’aucun orateur n’est inscrit dans ce débat.
La parole est donc à M. le ministre, qui dispose de cinq minutes pour intervenir.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le rapporteur spécial, je vous remercie pour ce rapport très clair, dans lequel vous avez très précisément défini et exposé les spécificités, le montant et le fonctionnement de la mission « Provisions ».
Pour 2009, nous reconduisons à l’identique les montants qui avaient été inscrits en 2008 : 75 millions d’euros sur le programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles », qui permettent de faire face à des imprévus tels que les conséquences liées aux catastrophes climatiques, et 150 millions sur le programme de provisions salariales, pour financer les exonérations de cotisations sociales prévues par la loi TEPA sur les heures supplémentaires effectuées dans les administrations publiques de l’État.
Ces crédits sont inscrits une année de plus sur la mission « Provisions » car, les heures supplémentaires étant effectuées de manière irrégulière tout au long de l’année, nous ne disposons pas encore du recul nécessaire pour en faire une évaluation précise et donc répartir les crédits par mission et par programme.
Mais je tiens à vous assurer, monsieur le rapporteur spécial, que cette provision pour le financement des exonérations au titre de la loi TEPA n’a évidemment pas vocation à être pérennisée. Elle sera répartie à un moment donné.
Nous disposerons l’an prochain d’une évaluation plus fine des besoins des administrations ministère par ministère et des crédits nécessaires pour financer ces exonérations, qui seront imputés à partir de 2010 sur les missions et les programmes correspondants.
Je vous remercie une nouvelle fois de votre rapport. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Provisions » figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Provisions |
271 000 000 |
271 000 000 |
Provision relative aux rémunérations publiques |
150 000 000 |
150 000 000 |
Dont titre 2 |
150 000 000 |
150 000 000 |
Dépenses accidentelles et imprévisibles |
121 000 000 |
121 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Provisions ».
Régimes sociaux et de retraite
Compte spécial : Pensions
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » ainsi que du compte spécial « Pensions ».
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Bertrand Auban, rapporteur spécial. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est en remplacement de M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, aujourd’hui empêché, que je formulerai les principales observations que la commission des finances a portées sur les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte spécial « Pensions ».
La remise au Parlement du premier rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique constitue un effort notable de transparence et de pédagogie sur la charge que représentent les pensions sur les finances publiques. Il s’agit, en effet, du principal facteur de dérive des dépenses de l’État.
Ainsi, le coût des pensions, qui s’élève pour 2009 à 50,3 milliards d’euros, augmentera de 2,5 milliards d’euros par an sur la période 2009-2011, pour atteindre 82 milliards d’euros en 2050.
Les pensions et les charges de la dette, qui représentaient moins de 30 % de l’augmentation des dépenses de l’État entre 2003 et 2007, absorberont 70 % des marges de manœuvre budgétaires.
Les engagements de retraites des fonctionnaires civils de l’État et des militaires s’élèvent à 1 056 milliards d’euros au 31 décembre 2007. Ce montant est l’équivalent de la dette monétaire de l'État. Il ne serait pas extravagant que cette dette apparaisse dans la situation patrimoniale de l’État. Pour l’instant, elle a le caractère d’engagement hors bilan, mais si l’on veut être totalement pédagogique, il n’y aurait pas d’inconvénient – et ce ne serait pas trahir l’effort de vérité – à faire apparaître 1 056 milliards d’euros en provision pour retraites au bilan de l'État.
Au regard de ces montants, les perspectives d’économies paraissent singulièrement limitées.
Ainsi, la vente de l’hôtel Prince de Galles par la caisse des mines pour 141 millions d’euros ne permet que très provisoirement de baisser la contribution de l’État pour 2009, dans un contexte de crise du marché immobilier.
Par ailleurs, les premiers effets de la réforme des retraites de 2003 et son prolongement dans l’allongement à 41 annuités de cotisation en 2012 ne limiteraient la dynamique des dépenses que de 120 millions d’euros en 2010.
En outre, la réforme des régimes spéciaux entrée en vigueur le 1er juillet 2008 entraînerait une économie de 500 millions d’euros d’ici à 2012, principalement pour les retraites de la SNCF, mais cette prévision, monsieur le ministre, prend-t-elle en compte l’effet des avantages salariaux consentis au cours de négociations ?
C’est pourquoi la commission des finances recommande la poursuite des réformes dans le pilotage et la gestion des pensions.
Ainsi, l’étude comparative des coûts de gestion des régimes de retraite – SNCF, RATP, mines, marins, pensions de l’État – demeure impossible sans mode opératoire commun de détermination des charges de gestion. La commission des finances appelle de ses vœux la mise en place d’une mesure commune des coûts de gestion.
En octobre 2007, la commission des finances avait relevé, dans un rapport d’information sur le service des pensions, que la modernisation de la gestion des pensions restait en chantier. La commission avait considéré que la réforme des pensions de l’État représentait un gisement d’économie de 1 200 emplois sur les quelque 3 000 emplois répartis entre le service des pensions, les centres régionaux des pensions et les ministères employeurs. Monsieur le ministre, peut-être pourriez-vous nous apporter quelques précisions sur ce point ?
Le rapporteur spécial, M. Bertrand Auban, s’est rendu à Nantes, le 17 novembre dernier, au service des pensions pour constater sur place et sur pièces la mise en œuvre des réformes en cours.
Il a constaté le commencement d’exécution de la constitution du compte individuel retraite, le CIR, informatisé, dont le caractère pleinement opérationnel est annoncé pour 2012, soit dans quatre ans !
Il a également constaté l’installation d’un centre d’appel téléphonique et internet dans le cadre du droit à l’information retraite, le DIR.
Cependant, il a constaté une absence de gouvernance interministérielle clairement identifiée pour assurer le pilotage de la réforme.
Dans la mesure où les bureaux des pensions des ministères employeurs seraient, pour certains, amenés à disparaître ou, le cas échéant, à être redéployés sur d’autres fonctions, il recommande que soient lancés dans les meilleurs délais une concertation interministérielle de tous les acteurs concernés, la constitution du service à compétence nationale chargé du pilotage de la réforme et un calendrier de mise en œuvre opérationnelle du compte individuel retraite.
Ainsi, après avoir souligné les efforts à poursuivre pour la modernisation de la gestion des pensions, la commission des finances vous recommande, mes chers collègues, l’adoption sans modification des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, cette mission retrace les principales subventions versées par l’État à des régimes spéciaux de retraite ou à des dispositifs de préretraite. Elle met en évidence tout un ensemble de régimes très coûteux, maintenus sous perfusion depuis des décennies grâce à la solidarité nationale.
Près de 5,2 milliards d’euros y seront consacrés l’an prochain, et ce montant augmentera encore dans les prochaines années car la masse des pensions versées par ces régimes spéciaux continuera de croître sous l’effet du « papy-boom ».
Pour 2011, on envisage déjà une dotation de 5,75 milliards d’euros. C’est dire combien les enjeux financiers sont importants.
Ils justifient aussi l’exigence d’une présentation claire et sincère des crédits. À ce sujet, la commission des affaires sociales constate que, cette année, des améliorations ont, fort heureusement, été apportées à la présentation des comptes, en particulier sur les contributions de l’État aux caisses de retraite de la SNCF et de la RATP.
En effet, les subventions d’équilibre versées à ces deux caisses font désormais l’objet de deux actions distinctes et la dotation de l’État accordée à la caisse de retraite de la RATP, jusqu’à présent sous-évaluée, apparaît cette année mieux calibrée.
En revanche, je remarque, cette année encore, que les indicateurs de performance continuent d’être exclusivement consacrés aux dépenses de gestion. Or celles-ci ne représentent que 1 % à 3 % des charges des régimes spéciaux. L’essentiel des informations intéressantes sur ces régimes se situe donc ailleurs.
C’est pourquoi la commission des affaires sociales considère que l’information du Parlement reste partielle.
Elle aimerait d’abord pouvoir connaître, pour chacun de ces régimes, la proportion de départs à la retraite par tranches d’âge, à savoir avant cinquante-cinq ans et entre cinquante-cinq ans et soixante ans.
Elle souhaiterait également disposer de données permettant d’établir des comparaisons entre les régimes spéciaux et les autres régimes pour prendre en compte l’assurance vieillesse dans toute sa diversité.
Je plaide, une fois encore, pour l’introduction de nouveaux indicateurs portant sur l’évaluation du rendement des sept principaux régimes spéciaux, sur le niveau de leurs engagements à long terme ainsi que sur le profil de leurs retraités et cotisants.
Je suis d’autant plus attaché à ces propositions que les informations sur les retraites des grandes entreprises publiques sont rarement publiées ou très difficilement accessibles, y compris pour les commissions parlementaires.
Ce débat m’amène surtout à évoquer la réforme des régimes spéciaux entrée en vigueur cette année.
Les pouvoirs publics ont enfin décidé de s’attaquer à une situation qui a, pendant des années, empoisonné la vie politique et sociale de notre pays. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
En harmonisant progressivement les règles en vigueur dans les régimes spéciaux avec celles qui sont applicables dans les régimes de la fonction publique, cette réforme vise à rétablir plus d’équité entre les assurés sociaux.
Je rappelle également qu’une place majeure a été accordée au dialogue social dans les entreprises. La réforme s’est en effet accompagnée de la négociation de mesures salariales d’accompagnement ou de compensation, en particulier à la SNCF et à la RATP – création d’échelons supplémentaires d’ancienneté, déblocage de la grille des salaires, possibilité de rachat d’années d’études, etc. J’en tire la conclusion que le principe d’une spécificité des droits des assurés des régimes spéciaux a été maintenu.
Bien sûr, ce dialogue social approfondi était nécessaire, mais je crains qu’il n’ait abouti à des contreparties qui pourraient, à terme, vider la réforme d’une partie de sa substance. L’an dernier, la commission des affaires sociales avait déjà averti des risques financiers que présentait l’octroi de mesures de compensation aux salariés.
D’après les premières estimations, il semble que ces contreparties auraient un impact important sur l’équilibre financier des régimes concernés. La SNCF, par exemple, évalue le coût des mesures d’accompagnement entre 120 millions d’euros et 200 millions d’euros par an entre 2009 et 2012. Or ce coût correspond à peu de choses près au montant des économies escomptées de la réforme du régime spécial de l’entreprise !
Je note que la Cour des comptes, dans un rapport de juin dernier, a estimé que les gains financiers résultant de la réforme des régimes spéciaux pourraient s’avérer quasiment nuls pour la collectivité.
En définitive, s’il est bien sûr encore trop tôt pour dresser un bilan définitif de cette réforme, je suis conduit, mes chers collègues, à envisager avec une extrême prudence les économies annoncées par le Gouvernement, à savoir 500 millions d’euros cumulés en 2012.
La commission des affaires sociales s’est néanmoins déclarée favorable à l’adoption des crédits de la mission pour 2009 en raison des efforts engagés pour clarifier les enjeux financiers. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion les sénateurs n’appartenant à aucun groupe.
Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour ces deux missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette mission concerne principalement les subventions versées par l’État pour équilibrer, du moins théoriquement, les comptes de plusieurs régimes spéciaux : ceux de la SNCF, de la RATP, des marins et des mines.
En septembre 2007, vous avez imposé une réforme des régimes spéciaux en dénonçant les privilèges dont bénéficieraient les agents des industries électriques et gazières, ou IEG, de la RATP, des mines ou encore de la SNCF en raison de leur moindre cotisation, ce qui était vrai, et du financement de leurs avantages spéciaux par l’ensemble des contribuables de notre pays, ce qui est faux.
Mme Annie David. Ce qui est effectivement faux !
Mme Isabelle Pasquet. Si la durée de cotisation était inférieure, c’était en raison des contraintes de continuité de service public et de la spécificité des tâches des agents, particulièrement en matière de sécurité.
Quant au financement de leurs avantages, ils ne reposent pas, comme vous voudriez le faire croire, sur l’ensemble des salariés.
Ces avantages, les salariés de ces régimes les financent eux-mêmes grâce à une cotisation salariale supérieure à celle qui existe dans le régime général.
Mme Marie-France Beaufils. C’est très vrai et mal connu !
Mme Isabelle Pasquet. Ce n’est donc pas, comme tentent de le faire croire quelques-uns, le mécanisme de compensation qui finance les régimes spéciaux.
Vous le savez, la participation des régimes spéciaux à la compensation représente près de 47 %, alors que celle du régime général pèse pour 45,92 % et celle des régimes libéraux pour 7,3 %.
Mme Annie David. Eh oui !
Mme Isabelle Pasquet. Plus intéressante encore est l’analyse de la répartition de cette compensation, car les premiers bénéficiaires n’en sont pas les salariés des régimes spéciaux, mais bien les salariés non agricoles.
M. Guy Fischer. Eh oui !
Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit d’une question importante pour comprendre ce budget puisque le mécanisme de compensation, inventé par Jacques Chirac en 1974 pour tenir compte du déséquilibre démographique, justifie une grande partie des dotations que nous avons à examiner ici.
Nous devons cette situation de compensation nécessaire à un ratio cotisants-pensionnés négatif. Ainsi, la SNCF compte 161 000 cotisants pour environ 300 000 pensionnés.
Mais, là encore, la seule réponse du Gouvernement se résume à un allongement de la durée de cotisation des salariés concernés. Ainsi, les économies que vous espérez réaliser reposent principalement sur une cotisation salariale plus longue et sur de moindres dépenses résultant d’un départ retardé à la retraite.
Si la participation financière de l’État augmente sensiblement jusqu’en 2012, ce n’est précisément que pour assurer le déséquilibre démographique.
Je me permets de rappeler à la Haute Assemblée que cette subvention d’équilibre, versée à la caisse de retraite de la SNCF, résulte de la directive européenne n° 1192/69 du 26 juin 1969.
Cette directive oblige les gouvernements de l’Union européenne à subvenir à l’équilibre des systèmes de protection sociale, qui pèsent sur les entreprises publiques de transport, afin que celles-ci puissent être concurrentielles.
Cela étant, c’est bien le Gouvernement, majoritaire à la SNCF, qui donne ses directives et crée ainsi ce déséquilibre.
Mme Annie David. Voilà, et après ils paieront des intérêts !
Mme Isabelle Pasquet. C’est bien lui qui fait payer à l’ensemble des Français, par le biais de ce projet de loi de finances, la politique de rigueur salariale et de pression sur l’emploi.
Ce déficit ne pourra que se creuser, avec la « casse » du monopole dont bénéficie la SNCF ou le non-remplacement des salariés partis à la retraite. Ce mécanisme organise volontairement la raréfaction des cotisations.
Enfin et avant de conclure, nous ne pouvons que dénoncer, une fois encore, le fait que l’État ne prenne pas toutes ses responsabilités à l’égard des organismes concourant de manière indirecte ou complémentaire au financement de notre système de protection sociale.
À titre d’exemple, la dette de l’État à l’égard de la caisse de retraite de la SNCF s’élèvera en décembre 2008 à 292 millions d’euros, auxquels viennent s’ajouter 80 millions d’euros que l’État a omis de régler au titre de 2008, et, pour la RATP, à 86 millions d’euros.
L’État manque à son obligation principale à l’égard de ces régimes spéciaux que vous voulez définitivement enterrer, à savoir à son obligation d’équilibre, comme l’atteste la possibilité qui est ouverte aux caisses gérant ces régimes de recourir à des lignes de trésorerie, c’est-à-dire à l’emprunt.
Pour toutes ces raisons, avec mes collègues du groupe communiste, républicain, citoyens et des sénateurs du parti de gauche, je voterai contre les crédits alloués à cette mission dont les fonds sont insuffisants pour compenser les dettes passées, insuffisants pour garantir l’avenir, et qui fait supporter le poids de votre réforme par les seuls agents concernés. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Guy Fischer. Enfin un souffle de vérité !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis tout d’abord que l’ensemble des commissions saluent la qualité et la transparence du travail du Gouvernement, s’agissant plus particulièrement de cette mission interministérielle « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Vos recommandations de clarification concernent les subventions aux régimes de retraite de la SNCF et de la RATP…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !
M. Éric Woerth, ministre. …et elles ont été mises en œuvre. La subvention au régime de la RATP pour 2009 a été réévaluée et, d’une manière générale, les montants des subventions ont été établis en liaison étroite avec les gestionnaires des différents régimes.
J’ai également souhaité que ce souci de transparence et de clarification porte sur les relations entre l’État et les régimes spéciaux. Ainsi, la dette de l’État à l’égard du régime de retraite de la SNCF, qui s’élève à 238 millions d’euros, sera apurée dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Cette transparence est d’autant plus nécessaire que la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d’affectation spéciale « Pensions » sont particulièrement importants pour le budget de l’État, tant par leur volume – 55 milliards d’euros dans le budget général, dont 5,18 milliards d’euros en 2009 pour les subventions aux régimes spéciaux – que par leur dynamique, du fait du « papy-boom », qui mobilise une part croissante des moyens de l’État – de 2 milliards d’euros à 2,5 milliards d’euros supplémentaires chaque année.
Je souhaite aussi revenir sur la réforme des régimes spéciaux, plusieurs orateurs étant intervenus sur cette question. Cette réforme, d’une ampleur que personne ne conteste, permet désormais de traiter équitablement les Français face à la retraite. C’est une réforme en profondeur et, comme pour toute réforme des retraites, ses effets iront en croissant, puisque des mesures comme l’allongement de la durée de cotisation seront progressives, comme pour les salariés du privé ou les fonctionnaires.
Ce n’est pas une réforme financière, mais une réforme d’équité ; il n’en demeure pas moins qu’elle se traduira, financièrement, par une réduction du besoin de financement des régimes concernés. L’ampleur des effets financiers dépendra du changement de comportement des actifs au regard de leur âge de départ. À ce titre, l’amélioration de la situation des régimes réformés est estimée à environ 500 millions d’euros par an à l’horizon 2015 et à 500 millions d’euros cumulés d’ici à 2012. Elle se traduira par un ralentissement de l’augmentation du besoin de financement et donc par un ralentissement de la croissance des subventions d’équilibre de l’État à ces régimes dont la démographie se dégrade inexorablement. Je rappelle qu’il y a un cotisant pour deux retraités à la SNCF et un cotisant pour un retraité à la RATP.
Je souhaite en effet fixer des principes simples de réciprocité : lorsque l’État est amené à mobiliser les ressources collectives pour aider à payer les pensions de ces régimes, ceux-ci doivent également faire des efforts. Outre la réforme des régimes spéciaux, je pense à la cession de l’important patrimoine immobilier de la caisse des mines – Jean Arthuis a parlé de l’hôtel Prince de Galles, mais ce n’est que l’un des fleurons de ce patrimoine –, cette caisse a une feuille de route pour ce qui est des cessions immobilières.
Concernant le compte d’affectation spéciale « Pensions », celui-ci comporte trois programmes d’un montant global de 50 milliards d’euros, récapitulant respectivement les moyens consacrés aux pensions de retraite des personnels civils et militaires, aux pensions des anciens ouvriers de l’État et aux pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre. La création de ce compte d’affectation spéciale résulte de la volonté du Parlement de centraliser les dépenses de pension de l’État afin de mieux en appréhender le coût ; elle est effective depuis le 1er janvier 2006.
L’évolution du besoin de financement du régime de retraite des fonctionnaires est très dynamique, comme je l’ai déjà dit. Le Gouvernement souhaite, tout en ne remplaçant qu’un départ sur deux à la retraite, reculer les âges de départ à la retraite des fonctionnaires : c’est l’objet des mesures du « rendez-vous retraites » de 2008 que vous venez d’adopter à l’occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Il s’agit, notamment, du renforcement des dispositifs d’incitation à la poursuite d’activité : le relèvement du taux de surcote de 3 % à 5 % par année supplémentaire, ou la faculté, pour les fonctionnaires exerçant des professions difficiles, de poursuivre leur activité sur une base volontaire au-delà de la limite d’âge de leur corps, souvent fixée à cinquante-cinq ou soixante ans – je pense aux policiers, aux infirmières, aux personnels pénitentiaires, etc. Cette mesure répond à une demande forte de ces personnels de pouvoir poursuivre une carrière professionnelle au-delà de ces âges souvent considérés comme précoces pour partir à la retraite.
Enfin, les effets de la réforme de 2003 sur les comportements individuels sont désormais tout à fait sensibles : l’âge moyen de départ à la retraite a reculé de sept mois pour la fonction publique d’État et de dix mois pour les agents hospitaliers et territoriaux.
Vous m’avez interrogé, monsieur le président de la commission, ainsi que le sénateur Dominique Leclerc, sur la réforme du service des pensions. Aujourd’hui, la gestion des pensions des fonctionnaires de l’État ne connaît pas de dysfonctionnements. Elle a même su s’adapter à trois évolutions majeures dans des délais très serrés : la réforme des retraites de 2003, la mise en place du droit à l’information sur la retraite et la mise en œuvre du compte d’affectation spéciale « Pensions ». Mais, vous l’avez relevé, une réforme de structure s’impose pour améliorer encore le service rendu et accroître la productivité.
Le conseil de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 a entériné le principe d’une réforme de l’ensemble de la chaîne des pensions, suivant quatre orientations : premièrement, la constitution du compte individuel retraite de chaque fonctionnaire…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il était temps !
M. Éric Woerth, ministre. …permettant une connaissance de l’évolution des droits à retraite au fur et à mesure du déroulement de la carrière ; deuxièmement, la mise en place des centres d’appel téléphonique et internet pour obtenir des renseignements à caractère général sur les dossiers personnels de pension ; troisièmement, à l’horizon 2011-2012, le passage à un processus industrialisé de liquidation des pensions reposant sur le compte individuel retraite permettra de dégager des gains de productivité qui ont été chiffrés à au moins 1 200 équivalents temps plein ; quatrièmement, la fusion du service des pensions et des centres régionaux des pensions de la direction générale des finances publiques, la DGFiP, dans une entité unique. Un service à compétence nationale, rattaché à la DGFiP, devra réunir le service des pensions et les centres régionaux des pensions recentrés et reconfigurés ; il sera en charge de piloter le projet ; un comité stratégique, animé par la DGFiP et la direction générale de l’administration et de la fonction publique, devra être institué pour associer les ministères employeurs, arbitrer les grandes orientations, veiller à l’effectivité des gains de productivité. Je pense donc, messieurs les rapporteurs, que vous obtenez satisfaction sur les préoccupations que vous avez évoquées. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Régimes sociaux et de retraite |
5 184 330 000 |
5 184 330 000 |
Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres |
3 722 360 000 |
3 722 360 000 |
Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
747 400 000 |
747 400 000 |
Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers |
714 570 000 |
714 570 000 |
Mme la présidente. L’amendement n° II-141, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres |
||||
Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
||||
Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers |
21 800 00021 800 000 |
21 800 00021 800 000 |
||
TOTAL |
21 800 000 |
21 800 000 |
||
SOLDE |
21 800 000 |
21 800 000 |
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. La décentralisation des personnels, principalement du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, entraîne, en raison du choix de ces personnels pour l’intégration dans la fonction publique territoriale, la suppression des dépenses de personnel correspondantes dans les titres 2 des ministères. Il en résultera alors une perte de recettes évaluée à 21,8 millions d’euros pour le compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Afin de respecter la contrainte d’équilibre du compte d’affection spéciale, inscrite à l’article 21 de la LOLF, il est donc proposé d’inscrire en « recettes diverses » de la mission une contribution exceptionnelle à hauteur de 21,8 millions d’euros qui trouve son pendant dans un abattement des dépenses de personnel de chaque ministère concerné par la décentralisation – les salaires n’étant plus versés, ils peuvent être remplacés, non pas à due concurrence, mais en proportion des cotisations qui auraient été versées. Les crédits correspondants seront ouverts sur le programme « Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers » de la mission « Régimes spéciaux et de retraite ». Ce programme, placé sous ma responsabilité, regroupe diverses dépenses liées aux retraites. Il apparaît en conséquence adapté à la création d’une action ponctuelle servant de support à cette opération d’ajustement comptable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement récurrent, qui tire les conséquences des migrations d’agents de l’État vers la fonction publique territoriale. La commission émet un avis favorable, mais souhaite poser deux questions.
En premier lieu, pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, le nombre d’agents qui ont effectué ce choix ?
En second lieu, pouvez-vous nous indiquer si ces opérations affectent le solde budgétaire ou si cet amendement a déjà été pris en compte dans l’article d’équilibre voté mercredi soir ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Le nombre d’agents concernés par ce mouvement est de l’ordre de 2 600. Par ailleurs, cette mesure a nécessairement un effet sur le solde, qui est donc dégradé.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : pensions
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte spécial « Pensions » figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Pensions |
50 300 733 613 |
50 300 733 613 |
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité |
45 843 000 000 |
45 843 000 000 |
Dont titre 2 |
45 842 500 000 |
45 842 500 000 |
Ouvriers des établissements industriels de l’État |
1 797 476 000 |
1 797 476 000 |
Dont titre 2 |
1 788 729 000 |
1 788 729 000 |
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
2 660 257 613 |
2 660 257 613 |
Dont titre 2 |
14 400 000 |
14 400 000 |
Mme la présidente. L’amendement n° II-143, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invaliditéDont Titre 2 |
161 400 000161 400 000 |
161 400 000161 400 000 |
||
Ouvriers des établissements industriels de l’ÉtatDont Titre 2 |
6 000 0006 000 000 |
6 000 0006 000 000 |
||
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
167 400 000 |
167 400 000 |
||
SOLDE |
- 167 400 000 |
- 167 400 000 |
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement permet la prise en compte de la modification de la prévision d’inflation à 1,5 % par rapport au taux de 2 % retenu pour la construction du projet de loi de finances.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement de conséquence : avis favorable.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Pensions » figurant à l’état D.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits du compte spécial.
(Ces crédits sont adoptés.)
Articles additionnels après l’article 66 ter
Mme la présidente. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 66 ter.
L’amendement n° II-114 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et B. Dupont et M. J. Gautier, est ainsi libellé :
I. - Après l’article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L.711-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 711-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 711-1-1. - À compter de l’année 2009, les régimes spéciaux de sécurité sociale mentionnés à l’article L. 711-1 et comptant plus de 20 000 cotisants transmettent au Parlement les données chiffrées sur le nombre de départs en retraite par tranches d’âge, avant cinquante-cinq ans et entre cinquante-cinq et soixante ans, sur le montant moyen des pensions versées, ainsi que sur l’espérance de vie à soixante ans de leurs assurés sociaux. Ils publient ces informations en annexe de leur rapport annuel. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° II-115 rectifié puisqu’il vise également à améliorer l’information du Parlement sur les régimes spéciaux.
Mme la présidente. L’amendement n° II-115 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et B. Dupont et M. J. Gautier, est ainsi libellé :
I. - Après l’article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L.711-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 711-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 711-1-2. - À compter de l’année 2009, les régimes spéciaux de sécurité sociale mentionnés à l’article L. 711-1 et comptant plus de 20 000 cotisants transmettent au Parlement une évaluation prospective de leurs engagements de retraite et de leurs équilibres financiers, sur trente ans minimum. Ils publient ces informations en annexe de leur rapport annuel et procèdent à leur actualisation tous les ans. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
Veuillez poursuivre, monsieur cher collègue.
M. Jacques Gautier. L’amendement n° II-114 rectifié tend à instaurer l’obligation, pour les régimes spéciaux, de communiquer au Parlement des données chiffrées sur la proportion des départs en retraite par tranches d’âge, sur le montant moyen des pensions versées et sur l’espérance de vie à soixante ans de leurs assurés sociaux. Ces informations devront être communiquées annuellement, à compter de l’année 2009.
Quant à l’amendement n° II-115 rectifié, il a pour objet d’exiger des régimes spéciaux la transmission annuelle au Parlement d’une évaluation prospective de leurs engagements de retraite et de leurs équilibres financiers, au minimum sur trente ans. Le choix de la méthode à utiliser est laissé à leur appréciation. Si vous me le permettez, madame la présidente, je souhaiterais rectifier cet amendement pour remplacer les mots « tous les ans » par les mots « à intervalles réguliers ».
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° II-115 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia et B. Dupont et M. J. Gautier, et ainsi libellé :
I. - Après l'article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L.711-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 711-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 711-1-2. - À compter de l'année 2009, les régimes spéciaux de sécurité sociale mentionnés à l'article L. 711-1 et comptant plus de 20 000 cotisants transmettent au Parlement une évaluation prospective de leurs engagements de retraite et de leurs équilibres financiers, sur trente ans minimum. Ils publient ces informations en annexe de leur rapport annuel et procèdent à leur actualisation à intervalles réguliers. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II-114 rectifié et II-115 rectifié bis ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Ces deux amendements enrichissent l’information du Parlement. La commission des finances y est donc favorable, mais elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur Jacques Gautier, l'amendement n° II-114 rectifié me paraît satisfait.
En effet, les régimes de retraite élaborent de nombreux rapports d’activité, qui sont précis et sont rendus publics. Parallèlement à ces rapports, le programme de qualité et d’efficience « retraites » synthétise d’ores et déjà pour le Parlement ces indicateurs et données fournies par les régimes de retraite. Dès lors que ces données sont déjà publiques, il ne me paraît pas nécessaire de prévoir une disposition spécifique supplémentaire.
Je vous serais donc reconnaissant, compte tenu de ces explications, de bien vouloir retirer cet amendement.
En revanche, je suis favorable à l’amendement n° II-115 rectifié bis, qui permettra une meilleure information du Parlement.
Mme la présidente. Monsieur Jacques Gautier, l'amendement n° II-114 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Gautier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-114 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° II-115 rectifié bis.
Mme Isabelle Pasquet. Ayant effectivement constaté qu’un certain nombre de renseignements étaient déjà contenus dans les publications, les rapports d’activité, je ne voyais pas bien la nécessité d’en demander d’autres.
Le bleu budgétaire lui-même présente de nombreux éléments d’appréciation de la situation qui pourraient nous dispenser de la réalisation du document sollicité par nos collègues du groupe UMP dans cet amendement.
Cela étant dit, je me demande quel est le véritable objectif visé par les auteurs de l’amendement. Ne serait-il pas de mettre en question le contenu même des garanties collectives accordées aux cotisants des régimes spéciaux au motif présumé que le temps contraindrait ces salariés à subir une réduction de la qualité de leur couverture ?
Le temps expliquerait que les cheminots, les marins ou toute autre catégorie de salariés sous régime spécial doivent accepter sacrifice sur sacrifice, pour cause de déficit démographique.
Mais si l’on suit cette logique, mes chers collègues, alors il ne faut pas se contenter uniquement de poser la question des régimes spéciaux de salariés, il faut aussi poser celle des régimes particuliers de non-salariés, et ce pour plusieurs raisons
La première, c’est que les prétendus privilèges dont bénéficieraient les cotisants des régimes spéciaux représentent un montant marginal, au regard du total des prestations servies.
Le déficit structurel du régime cheminot tient non pas à l’âge de départ en retraite des roulants, à cinquante ou à cinquante-cinq ans, mais à la fermeture, pendant des années, de lignes prétendument déficitaires, à l’externalisation des coûts et à la réduction des effectifs au nom des gains de productivité.
Apparemment, ce mouvement n’est pas terminé, d’autant que, pour la première fois dans l’histoire de la SNCF, l’État va percevoir cette année 131 millions d’euros de dividendes rémunérant la part qu’il détient dans le capital de la société nationale.
Dans le même élan, posons-nous la question de la qualité des prestations servies aux commerçants et artisans, ou encore par le régime agricole, largement financées par les cotisations du régime général.
Mais, précisément, nous ne poserons pas cette question en termes d’opposition entre les catégories sociales, entre professions, à raison de leurs spécificités.
Ce qui nous semble important, c’est que les retraites et pensions, éléments fondamentaux du revenu disponible des ménages - donc élément de croissance économique par la consommation et par l’épargne -, permettent à leurs bénéficiaires de vivre dignement.
Nous ne voterons bien sûr pas cet amendement dont les intentions ne semblent pas aussi louables que le laisserait supposer son libellé. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Nathalie Goulet. Ne voyez pas le mal partout !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 66 ter.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » ainsi que du compte spécial « Pensions ».
Engagements financiers de l’État
Compte spécial : Gestion du patrimoine immobilier de l’État
Compte spécial : Participations financières de l’État
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » ainsi que des comptes spéciaux « Gestion du patrimoine immobilier de l’État (et article 85) » et « Participations financières de l’État ».
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention au point où j’ai terminé celle d’avant-hier, lors de notre débat sur la dette de l’État, mais en actualisant les chiffres que j’avais alors donnés, puisque le Gouvernement, par amendement, les a en partie modifiés.
Tout d’abord, le total des ressources qu’il va falloir se procurer en 2009, autrement dit le besoin de financement auquel devra faire face l’État, s’établit à 170,2 milliards d’euros, contre une prévision de 165,4 milliards avant l’examen par le Sénat. Ce montant inclut le déficit budgétaire, réévalué à hauteur de 57,6 milliards d’euros.
Pour financer cette importante somme, l’État procédera à des émissions de titres d’emprunt à long et moyen termes à hauteur de 135 milliards d’euros. À cet égard, je me permets d’exprimer une certaine inquiétude sur la faisabilité de cet engagement, qu’il faudra sans doute majorer pour tenir compte du plan de relance dont on nous parle tous les jours. Le plafond de variation des émissions de court terme s’élèvera en 2009 à 30,5 milliards d’euros, afin de financer le déficit supplémentaire.
L’orientation désormais baissière de la politique monétaire de la Banque centrale européenne devrait renforcer le maintien des taux obligataires à des niveaux relativement peu élevés. La crise a profité aux titres à court terme et, avec à la fois les émissions à moyen et long termes et les émissions à court terme, la masse totale des intérêts devrait rester dans le périmètre prévu.
En revanche, j’insiste pour que l’on mette l’agence France Trésor en état d’émettre pour le compte de la CADES, la caisse d’amortissement de la dette sociale, comme l’a prévu, sur l’initiative de notre commission, la loi de finances initiale pour 2006. Je rappelle que la CADES n’émet pas à l’heure actuelle parce que l’écart de taux avec l’agence France Trésor serait très élevé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument ! L’écart est de quarante points de base !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. En effet. Il vaudrait donc mieux charger l’agence France Trésor de faire ces opérations.
Deuxième « chiffre clé » : 44,3 milliards d’euros. C’est le montant de la charge d’intérêts de la dette de l’État prévu par le projet de loi de finances, soit 96 % des crédits de la mission « Engagements financiers ». Ce montant a été révisé à la baisse, le 6 novembre dernier, dans le cadre de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques. À partir d’une nouvelle prévision d’inflation – 1,5 % – et d’une nouvelle prévision concernant les taux d’intérêt à court terme – on se situe aujourd’hui à 3,5 %-3,6 % –, la charge de la dette s’établirait à 43,1 milliards d’euros.
Sur la dette elle-même, je ne reprendrai pas les éléments chiffrés que j’ai indiqués mercredi dernier.
Pour la fin de 2008, la dette de l’État est estimée à 985 milliards d’euros et la dette publique représenterait 66,2 % du produit intérieur brut, soit une augmentation de deux points supplémentaires de PIB par rapport à 2007.
Pour la fin de 2009, la dette publique devrait s’élever à 67,9 % du PIB, mais, encore une fois, le plan de relance va intervenir et, par conséquent, un sommet très important sera atteint.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On fera beaucoup mieux !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. Ces chiffres ne prennent pas non plus en compte les éventuelles requalifications d’Eurostat, puisque nous ne savons pas encore si la Société de financement de l’économie française, créée en octobre dernier, sera qualifiée ou non dans le cadre de la dette maastrichtienne.
Dernier chiffre : 5 milliards d’euros. C’est le montant des recettes de privatisations théoriques inscrit pour 2009 dans le compte « Participations financières de l’État ».
En fait, ce chiffre n’a d’autre valeur qu’indicative : il reproduit les prévisions de la loi de finances initiale pour 2008, mais, finalement, en 2008, les recettes de privatisations ont été très faibles puisqu’elles se sont élevées à 1,3 milliard d’euros et qu’elles ont été essentiellement utilisées pour solder un certain nombre de dettes de l’établissement de défaisance du Crédit Lyonnais.
La valeur des participations de l’État est parfaitement tenue par l’Agence des participations de l’État.
À ce propos, je souligne que nous avons examiné les rémunérations des dirigeants des entreprises publiques pour voir si devaient leur être appliquées les nouvelles exigences en matière d’éthique et de gouvernance. J’ai constaté que ces rémunérations étaient très nettement inférieures à celles qui sont accordées dans les milieux de la banque ou de la finance.
La valeur des participations cotées de l’État varie entre 110 milliards et 200 milliards d’euros selon les fluctuations de la Bourse ; aujourd’hui, elle représente environ 115 milliards d’euros.
Monsieur le ministre, le projet de loi de finances prévoit cependant pour 2009 une recette de dividendes issus des entreprises publiques supérieure à celle qui est encaissée en 2008 : 5,9 milliards d’euros, contre 5 milliards d'euros en 2008. Compte tenu de la situation réelle des entreprises à la fin de cette année, cette prévision est-elle réaliste ? Ce montant est toutefois déjà compris dans les recettes diverses du budget de l’État.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » et du compte spécial « Participations financières de l’État » pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial.
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ferai un rapide bilan du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », en soulignant des marges de progression et deux avancées.
Des « schémas pluriannuels de stratégie immobilière » ont été mis en place pour toutes les administrations centrales et les services déconcentrés de vingt-cinq départements. En 2009, l’ensemble du territoire devrait être couvert.
Des loyers « budgétaires » sont désormais acquittés par les administrations centrales et les services déconcentrés de vingt-neuf départements. Ces loyers s’appliqueront à la totalité des services ministériels en 2010.
Le « Conseil de l’immobilier de l’État » a été créé, et le service en charge des domaines, devenu France Domaine, a été profondément rénové.
Nous devons ces avancées pour une large part au travail parlementaire, et notamment à M. Paul Girod, auquel je rends hommage, qui était alors titulaire de la fonction qui m’est aujourd'hui dévolue.
J’en viens aux marges de progression.
Il faut consolider les outils de gestion, notamment le « Tableau général des propriétés de l’État ».
La gouvernance du système peut être améliorée, notamment le rôle de France Domaine qui reste à imposer. Un progrès devrait être observé en 2009 avec les conventions d’occupation qui fixent les droits et les devoirs des administrations. J’ajoute que la supervision de l’État locataire reste à construire : cela passe certainement par une centralisation des décisions de prises à bail, qui pourrait peut-être poser quelques difficultés d’exécution pour les ministères.
Autre sujet important, le périmètre de cette mission devrait mieux prendre en compte les opérateurs de l’État, qui agissent encore trop souvent à leur guise.
Cela étant dit, je souhaite souligner deux progrès.
D’abord, et c’était une demande de M. Paul Girod, un programme dédié aux travaux d’entretien lourd de l’État a été créé. Toutefois, en raison des règles de la LOLF, il a été rattaché à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », présentée tout à l’heure par mon collègue Bernard Angels. Je n’ai pu obtenir de France Domaine, que j’ai interrogé sur ce point en octobre, le coût réel des travaux d’entretien que l’État devait entreprendre. Ce programme permettra d’assurer la traçabilité budgétaire des opérations qui sont jusqu’à présent noyées dans divers programmes. Espérons qu’il incitera les ministères à ne pas les différer.
Le second progrès tient à un aménagement des règles d’intéressement des ministères aux cessions immobilières dont ils ont l’initiative.
Actuellement, le principe est que les ministères se voient rétrocéder 85 % des produits de cession afin de financer leurs dépenses immobilières, les 15 % restants étant affectés au désendettement de l’État.
À compter de 2009, les produits de cession seront toujours affectés à hauteur de 15 % au désendettement, mais chaque ministère ne se verra plus retourner que 65 % du produit de ses ventes, les 20 % restant serviront à constituer une réserve interministérielle, destinée à financer des projets immobiliers que les ministères, individuellement, ne pourraient soutenir. Cette mutualisation des moyens va dans le sens de la reconnaissance d’un État propriétaire, qui ne saurait procéder des seules cessions. J’aurai l’occasion d’y revenir car je vais travailler sur cette question dans les années qui viennent.
D’après le projet de loi de finances, les recettes de ces ventes immobilières devraient atteindre le niveau, sans précédent, de 1,4 milliard d’euros. Dans les conditions actuelles du marché, l’atteinte de cet objectif paraît aléatoire. D’ailleurs, la loi de finances pour 2008 avait fixé un niveau de cessions de 600 millions d’euros. D’après les chiffres que j’ai pu obtenir à la fin du mois d’octobre, l’exécution budgétaire s’élevait à 236 millions d’euros.
Malgré ma demande, j’ignore, en cette fin du mois de novembre, le niveau de l’exécution budgétaire. (M. le ministre s’entretient avec ses collaborateurs.) Mais vous êtes certainement en train d’en discuter avec vos collaborateurs, monsieur le ministre, et vous allez sans doute m’apporter une réponse… De toute façon, il sera difficile de reproduire en 2008 le niveau de cessions atteint en 2006, soit 798 millions d’euros, ou en 2007, à savoir 820 millions d’euros.
Pour 2009, les cessions d’immeubles militaires représentent, à elles seules, 1 milliard d’euros. Or le ministère de la défense, par dérogation au droit commun, bénéficie d’un « droit de retour » intégral de ces produits. Dans ces conditions, mécaniquement, seuls 4,3 % du produit global des cessions immobilières de l’État devraient être affectés au désendettement, correspondant à 15 % des 400 millions d’euros de cessions non militaires, soit 60 millions d’euros sur un total de 1,4 milliard d’euros. À la plus importante prévision de cessions immobilières de ces dernières années correspondrait donc la plus faible contribution des recettes au désendettement.
Dans le contexte actuel d’endettement de l’État, que M. le rapporteur spécial a rappelé, cette situation n’est évidemment pas satisfaisante. Aussi, je vous proposerai des amendements visant à porter à 15 % la part des cessions immobilières de l’État consacrée au désendettement, en intégrant à cet effort le produit des cessions militaires. J’ai noté que le Gouvernement avait déposé un sous-amendement à l'amendement n° II-29, nous en parlerons dans quelques instants.
Sous cette réserve, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l’adoption des crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » pour 2009.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, j’ai l’honneur de rapporter, au nom de la commission des affaires économiques, les crédits du compte spécial « Participations financières de l’État ».
Tout d’abord, je fais miennes les réserves émises l’année dernière par mon prédécesseur, Michel Bécot, concernant la transparence et l’affectation de ce fonds.
S’agissant de la transparence, le projet annuel de performances prévoit un niveau de recettes de 5 milliards d’euros. Comme M. Fourcade l’a dit tout à l’heure, ce chiffre est virtuel. Depuis plusieurs années, le même montant est inscrit. Or, en 2007, les recettes se sont élevées à 7,8 milliards d’euros et, en 2008, à 1,2 milliard d’euros. On conçoit que ce chiffre de 5 milliards d’euros soit avancé pour ne brusquer personne. Mais, dès lors, pourquoi pas 4 milliards ? Pourquoi pas 6 ?
Nous aimerions en savoir un peu plus sur la stratégie de gestion de l’État en ce qui concerne ce patrimoine, même s’il est logique, pour des raisons financières, que l’État garde une certaine réserve et ne nous fournisse pas d’indications trop précises. D’où ma première question : le Gouvernement entend-il, monsieur le ministre, mieux informer le Parlement de l’utilisation de ce fonds spécial ?
Concernant l’affectation, ces dernières années, 80% des recettes ont été consacrées au désendettement. Je suis conscient de l’impérieuse nécessité de désendetter notre pays. Toutefois, le produit des cessions de l’État actionnaire serait plus utile, comme cela a été fait pour le plan Campus, pour financer certains secteurs d’avenir, je pense notamment à l’économie de la connaissance. Monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il affecter une part du produit de ces cessions à la recherche ?
Lors de l’examen de ce budget en commission, j’ai souhaité me pencher sur deux entreprises qui relèvent de ce compte spécial : La Poste et Areva.
La Poste, qui fait aujourd'hui des bénéfices – 1,3 milliard d’euros – et a versé 140 millions de dividendes à l’État, est en passe de devenir une société anonyme. Or, nous le savons bien, l’ouverture du capital est la première étape vers la privatisation. En l’occurrence, elle pourrait conduire à une fracture postale, à l’instar de la fracture numérique qui a suivi la privatisation de France Télécom et que nous avons aujourd'hui du mal à combler.
Quant à AREVA, qui concerne notamment un territoire que je connais bien – la Bourgogne –, c’est une entreprise très performante aujourd'hui dans un domaine porteur : le nucléaire. Il reste que les projets stratégiques autour d’AREVA ne sont pas sans nous inquiéter. Là aussi, va-t-il y avoir une ouverture du capital ? Ou va-t-il y avoir une fusion avec Alstom ? Cette fusion ferait naître d’autres problématiques avec des partenaires allemands. Monsieur le ministre, quelle est la vision du Gouvernement sur la stratégie que pourrait développer AREVA ?
Je terminerai en évoquant le fonds stratégique d’investissement, dont la création a été annoncée il y a quelques jours par M. le Président de la République. Ce fonds souverain, dont on voit bien l’intérêt puisqu’il pourrait participer au financement des PME, va être financé par la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 10 milliards d’euros, par le fonds d’investissement spécial que nous évoquons ici pour 7 milliards d’euros et par la dette pour les 3 milliards d’euros restants.
Aujourd’hui, c’est l’Agence des participations de l’État, qui gère les actions de l’État. Aussi, monsieur le ministre, ce fonds souverain va-t-il modifier le périmètre et les modes d’action de cette agence ?
Sous le bénéfice de ces observations, et même si, à titre personnel, je suis réservé, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de ce compte d’affectation spéciale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.
Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour ces trois missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, à cette heure avancée, quel que soit l’intérêt qu’aurait pu avoir mon intervention, je renonce à prendre la parole, préférant laisser M. le ministre nous apporter des explications sur cette mission et ces deux comptes spéciaux. (Applaudissements.)
Mme la présidente. Vos collègues vous en sont reconnaissants !
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le service de la dette publique et la conduite des opérations patrimoniales de l’État représentent un ensemble de crédits et de mouvements financiers inégalés, si ce n’est par la mission « Remboursements et dégrèvements ».
En ce qui concerne la dette publique, le programme d’émission de titres va être particulièrement important en 2009, puisqu’il atteindra, en théorie, 165 milliards d’euros, dont deux tiers seront consacrés à l’émission de titres d’amortissement des titres de dette antérieurs.
Les nouveaux titres de dette et de créance pour les détenteurs sont, pour l’essentiel, destinés à remplacer les titres antérieurs. Cela soulève la question de l’efficacité de la gestion publique, puisque l’investissement direct de la nation en nouveaux éléments de patrimoine est de plus en plus faible et représente aujourd’hui seulement moins de 10 % du volume d’émissions de l’année.
Pour autant, il faut noter que le coût du service de la dette, tout en étant très élevé, va être inférieur au déficit budgétaire inscrit dans l’article d’équilibre – ce qui devient d’ailleurs une clause de style – et que l’effet « boule de neige » de la dette n’est donc aucunement interrompu.
Sur le service de la dette, il faut constater que le taux d’intérêt moyen qui la grève est poussé vers le haut par la règle d’indexation des obligations assimilables du Trésor indexée sur l’inflation, les OATi.
Si l’indexation assure aux rentiers un revenu tout à fait conforme à leur attente et caractérise la qualité de la signature de l’État français, elle représente tout de même un réel surcoût, qui ne fait que croître avec la multiplication des produits indexés.
Se pose alors l’une des questions les plus importantes pour le moyen et le long terme, celle de la centralisation de la dette publique, sous toutes ses formes, dans les comptes de l’État.
Je voudrais faire quelques observations sur ce point.
Le fait qu’il existe une dette sociale cantonnée et une dette des grandes entreprises publiques et des autres organismes d’administration centrale retracée dans les comptes propres de la CADES, ou de ces entités, n’est pas satisfaisant.
De fait, il conviendrait, selon nous, de procéder, dans des délais rapprochés, à une vaste opération de reclassement de la dette publique et à son intégration, sous des formes appropriées, par offre publique d’échange notamment, dans la dette publique de l’État.
Comment résoudre le problème de la persistance de la dette sociale, la Caisse d’amortissement de la dette sociale semblant promise à devoir encore intervenir pour faire face aux déficits sociaux que des années de déflation salariale, entre autres éléments, ont accumulés ?
De même, il va falloir très vite procéder à la nationalisation de la dette de Réseau ferré de France qui, comme nous l’avions pressenti dès la réforme de 1997, ne parvient toujours pas à réduire de manière sensible son endettement financier et se voit contraint de continuer de s’endetter aux pires conditions pour faire face à sa mission de développement des infrastructures ferroviaires.
Ce n’est pas en vendant son patrimoine immobilier désaffecté au prix le plus proche possible de celui du marché que l’État pourra répondre aux contraintes de sa propre dette.
Évidemment, se pose également la question des engagements en garantie pris par l’État, dans le cadre du collectif budgétaire adopté en octobre dernier, pour aider au financement de l’économie.
Si la mise en place des structures ad hoc s’est déroulée sans difficultés majeures, nous devons formuler quelques remarques de fond.
Si la garantie de l’État n’est pas appelée à jouer sur les crédits bancaires distribués aux entreprises, ce ne sera pas forcément bon signe.
Le paradoxe d’un retour sur investissements pour l’État de la création des deux entités juridiques nées du collectif budgétaire, par versement de dividendes ou d’intérêts, pourrait en effet signifier que les banques ont continué à accorder des prêts à des entreprises par nature solvables, et donc pas forcément à celles qui ont le plus besoin de fonds.
L’intervention publique a en effet été conçue de façon particulière, puisqu’on avance de l’argent levé sur les marchés financiers, on garantit éventuellement des prêts et on attend – on espère, devrais-je dire – que tout cela produise intérêts ou dividendes.
L’État a le même défaut que ces financiers qui attendent que l’argent tombe grâce à l’activité des autres. Quelles exigences a-t-on sur l’utilisation et donc quel regard porte-t-on sur la gestion des sommes garanties ? Aujourd’hui, en tout cas, rien n’est porté à notre connaissance.
Une telle orientation, qui laisse les mains libres à ceux-là mêmes qui ont créé la crise, n’est pas recevable.
Mme Annie David. C’est même inacceptable !
Mme Marie-France Beaufils. C’est pourquoi nous rejetterons les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la dotation du programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État » s’élève à 44,2 milliards d’euros.
La charge de la dette constitue un poste particulièrement difficile à prévoir dans la période actuelle de forte volatilité. Elle est en effet grandement tributaire de la variation de l’inflation et des taux d’intérêt. Cette progression de l’inflation nous a d’ailleurs conduits à réviser à la hausse de façon très importante les crédits pour 2008.
Par rapport à l’exécution prévue en 2008, le projet de loi de finances déposé fin septembre prévoyait déjà pour 2009 une nette diminution, de l’ordre de 900 millions d’euros, des crédits ouverts au titre de la charge de la dette, compte tenu, principalement, d’une prévision d’inflation sensiblement plus faible.
Depuis, le Gouvernement a procédé à des ajustements dans le cadre de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Nous devons en tirer les conséquences mécaniques sur les crédits de la charge de la dette.
D’un côté, les prévisions d’inflation sont plus basses et les marchés anticipent des taux en baisse, ce qui fait diminuer la charge de la dette de plus de 1,5 milliard d’euros. De l’autre côté, la révision des soldes budgétaires en 2008 et 2009 nous demande d’émettre plus. Le coût est de quelque 300 millions d’euros. C’est pourquoi le Gouvernement vous présentera un amendement pour réduire de 1 milliard d’euros la charge de la dette prévue pour 2009 par rapport à celle qui figure dans le texte voté par l’Assemblée nationale. Je sais que la Haute Assemblée aurait voulu aller plus loin, mais je pense qu’il faut rester prudent. D’ailleurs, l’avenir nous le démontre à chaque fois.
Pour répondre à M. Fourcade, qui souligne les différences de coût entre la dette de la CADES et celle de l’État, je veux indiquer que la crise a accentué cette différence. Cela dit, s’il y a bien une différence de nature, et nous devons la respecter, le taux d’émission de la CADES demeure inférieur à celui d’autres émetteurs importants comme la Banque européenne d’investissement, par exemple. La CADES emprunte donc à des taux tout à fait acceptables. On pourrait imaginer tout fusionner, mais si le choix actuel a été fait, c’est précisément pour bien séparer les deux dettes. Je pense que nous devons conserver ce principe.
En ce qui concerne la prévision de dividendes des entreprises du « périmètre APE », elle a été établie à 5,9 milliards d’euros pour 2009. En 2008, elle devait être de 5,6 milliards d’euros. Il y a donc une légère augmentation. L’APE estime ces prévisions fondées compte tenu des résultats des entreprises en 2008. Nous verrons bien. En tout cas, je note que vous êtes sceptique, monsieur le rapporteur spécial.
Je veux aussi répondre à la question qui portait sur l’équilibre du compte spécial « Participations financières de l’État » pour 2009, qui a également été soulevée par M. Patriat.
Le niveau de recettes de 5 milliards d’euros est certes « notionnel », mais il constitue une référence objective. Qu’en sera-t-il en 2009 ? Je ne le sais pas. Nous verrons donc selon les marchés. Pour autant, il est évident qu’il ne faut pas brader les actifs de l’État. Nous n’en avons d’ailleurs pas l’intention. En tout cas, je note aussi une extrême prudence sur ce sujet, et c’est à juste titre.
J’en viens à l’ouverture du capital de La Poste.
À la suite de la présentation au Gouvernement d’un projet de changement de statut suivi d’une éventuelle ouverture de capital par la direction de La Poste, Christine Lagarde a conduit des consultations en septembre. Il a été décidé de créer une commission et d’en confier la présidence à M. François Ailleret. Cette commission est notamment chargée d’examiner les différentes options envisageables. Elle rendra ses conclusions à la fin du mois de décembre. Son travail n’étant pas terminé, il serait prématuré d’anticiper ses conclusions. Le Président de la République et le Premier ministre se sont d’ailleurs récemment exprimés sur ce sujet.
En ce qui concerne l’ouverture du capital d’AREVA, monsieur Patriat, une réflexion d’ensemble a été engagée sur l’avenir de la filière électronucléaire française. Aucune décision n’a cependant été prise quant à une éventuelle évolution de son capital. II n’y pas d’urgence particulière aujourd’hui au regard de la situation financière du groupe.
Je reviens sur l’APE. Vous vous demandez, monsieur le rapporteur pour avis, à propos de cette agence et du fonds stratégique d’investissement si tout cela est bien cohérent.
Je ne vais pas revenir à cette heure avancée sur le fonds stratégique d’investissement, d’autant que Christine Lagarde s’est exprimée à plusieurs reprises ici sur ce sujet, mais sachez que les missions et les modalités d’intervention de l’APE et du fonds stratégique d’investissement sont clairement distinctes.
Le rôle de l’APE est de gérer des participations historiques dans des entreprises publiques dont l’État détient la majorité du capital. Le fonds stratégique d’investissement, quant à lui, est chargé d’investir dans les PME qui en auraient besoin et de défendre des actifs stratégiques.
Ces deux outils ont des logiques de fonctionnement totalement différentes, et nous ne les confondons pas. De nombreux États disposent, eux aussi, de structures séparées de cette nature.
Le CAS « Immobilier », madame Bricq, est un sujet que vous connaissez bien. C’est vrai que la politique immobilière est très importante, mais actuellement le marché n’est pas bon. Ce n’est donc pas simple. Reste que c’est un domaine dans lequel nous avons beaucoup progressé. Nous aimerions donc bien parvenir à concrétiser, mais malheureusement la conjoncture ne s’y prête pas.
En la matière, nous comptons mettre en œuvre une réforme qui comprendra plusieurs volets : des conventions avec les occupants équivalant à un bail seront signées ; un surloyer budgétaire sera appliqué ; une politique interministérielle d’entretien sera menée avec la création d’un programme spécifique, comme je m’y étais engagé ici l’année dernière auprès de votre prédécesseur M. Paul Girod.
En outre, cette réforme comprendra un dispositif plus mutualisé en matière d’utilisation des produits de cession sur le CAS. Nous éviterons ainsi que seul le ministère vendeur ait un retour. Une partie des fonds sera donc « interministérialisée ». C’est un progrès.
Enfin, le patrimoine des opérateurs sera mobilisé. Sur ce point, je me suis déjà exprimé en indiquant qu’il fallait sanctionner les opérateurs qui ne jouent pas le jeu, c’est-à-dire ceux qui ne font pas l’inventaire de leurs biens immobiliers. La sanction pourrait, par exemple, toucher la rémunération des dirigeants.
Je veux évoquer un point extrêmement important, à savoir la suppression de l’affectation. Cela est en passe d’être réalisé, puisque le décret est devant le Conseil d’État ou à la signature du Premier ministre. Désormais, il n’y a plus de problème d’arbitrage et nous pourrons conduire une politique unifiée, fondée sur l’unicité de la propriété de l’État. Cela faisait des années qu’on le demandait et c’est enfin fait.
Je partage aussi, madame le rapporteur spécial, nombre de vos préoccupations. Je suis en effet opposé aux locations de prestige et je souhaite résilier à l’échéance des baux trop coûteux. Un certain nombre sont visés.
Par ailleurs, je souhaite installer des services dans des bâtiments domaniaux. Nous disposons de beaucoup de mètres carrés, nous n’allons donc pas systématiquement louer à l’extérieur à un prix coûteux. Des normes ont donc été définies, douze mètres carrés par agent, par exemple. Reste que c’est une bagarre, car beaucoup de ministères ne veulent pas jouer le jeu. Mais nous y parvenons petit à petit.
Je terminerai par la contribution au désendettement. C’est aussi un point important.
Comme je vous l’ai écrit récemment, j’ai toujours veillé à ce que cette contribution atteigne au moins 15 % des produits de cession, dans le respect de l’autorisation parlementaire. Nous réalisons même des versements complémentaires au CAS lorsque c’est possible : 24 millions d’euros l’an dernier, 19 millions d’euros cette année.
Vous souhaitez intégrer le principe de cette contribution dans la loi. Je le comprends, mais je souhaite tenir compte du financement de la défense, car c’est en réalité l’équilibre financier de l’ensemble de la loi de programmation militaire qui est en jeu. Si nous ne renvoyons pas aux militaires 100 % de leur immobilier, nous creuserons le déficit. Dès lors, on empruntera. Mais il ne sert à rien d’emprunter, puis de rembourser, puisque les crédits militaires ont été arrêtés d’une façon très précise.
Les cessions des emprises du ministère de la défense expliquent l’objectif de 1,4 milliard d’euros l’année prochaine. Cette somme sera ventilée de la façon suivante : 1 milliard d’euros pour la défense et 400 millions d’euros pour le reste. Je sais que le milliard d’euros « défense » représente un vrai défi, mais nous devrons le relever. Cela étant, c’est plus difficile avec un marché aussi atone, c’est le moins que l’on puisse dire. Au-delà des problématiques conjoncturelles, il y a bien un effort de défense, qui repose sur des cessions immobilières et sur des crédits budgétaires.
Enfin, en ce qui concerne l’état d’avancement des cessions en 2008, à ce stade, les encaissements sont de 261 millions d’euros. Mais les résultats ne sont pas définitifs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
engagements financiers de l’état
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Engagements financiers de l’État |
45 897 600 000 |
45 897 600 000 |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
44 240 000 000 |
44 240 000 000 |
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
278 800 000 |
278 800 000 |
Épargne |
1 162 500 000 |
1 162 500 000 |
Majoration de rentes |
216 300 000 |
216 300 000 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-138, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
1 200 000 000 |
|
1 200 000 000 |
Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Épargne |
|
|
|
|
Majoration de rentes |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 200 000 000 |
|
1 200 000 000 |
SOLDE |
- 1 200 000 000 |
- 1 200 000 000 |
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement a pour objet de minorer de 1,2 milliard d’euros les crédits de la mission afin de prendre en compte les effets sur la charge de la dette de la baisse des taux et de la révision de l’inflation prévisionnelle pour 2009.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement de coordination avec ce qui a été voté par le Sénat dans le cadre de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Cette mesure est également cohérente avec l’amendement du Gouvernement qui a été adopté sur l’article d’équilibre dans le cadre du présent projet de loi de finances.
Je pensais proposer un sous-amendement afin de porter le chiffre de 1,2 milliard d’euros à 1,5 milliard d’euros compte tenu de la nouvelle baisse des taux d’intérêt qui est annoncée. Cependant, la charge de la dette allant sûrement augmenter dans les semaines qui viennent, je m’abstiens donc.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est sage !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. Aussi, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l’état
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
1 400 000 000 |
1 400 000 000 |
Contribution au désendettement de l’État |
60 000 000 |
60 000 000 |
Dépenses immobilières |
1 340 000 000 |
1 340 000 000 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-20, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du programme « Dépenses immobilières » :
Contribution aux dépenses immobilières
La parole est à Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial.
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial. De même que le programme 721, intitulé « Contribution au désendettement de l’État », retrace la partie des recettes de cessions immobilières de l’État affectées au désendettement de celui-ci, le programme 722, malgré son libellé « Dépenses immobilières », ne retrace en réalité que les dépenses immobilières de l’État financées par le produit de ventes immobilières.
Par homothétie avec l’intitulé du programme 721, cet amendement tend donc à préciser l’appellation du programme 722 sous la forme plus exacte de « Contribution aux dépenses immobilières ».
Il s’agit donc d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° II-12, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Contribution au désendettement de l'État |
150.000.000 |
|
150.000.000 |
|
Dépenses immobilières |
|
150.000.000 |
|
150.000.000 |
TOTAL |
150.000.000 |
150.000.000 |
150.000.000 |
150.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial.
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial. Cet amendement vise à minorer les crédits du programme « Dépenses immobilières » au bénéfice du programme « Contribution au désendettement de l’État », à hauteur de 150 millions d'euros. Ce montant correspond à 15 % du produit des ventes d’immeubles militaires prévu par le présent projet de loi de finances, à savoir 1 milliard d'euros.
En conséquence, la part des cessions immobilières consacrées au désendettement de l’État deviendrait beaucoup plus importante, puisqu’elle serait portée à 210 millions d'euros.
Mais je sais que cela pose problème au Gouvernement. Il convient par conséquent d’examiner cet amendement à l’aune du sous-amendement n° II-152 que vous présentez, monsieur le ministre, à l’amendement n° II-29 de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Madame le rapporteur spécial, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° II-29, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° II-152 du Gouvernement, que j’évoquais précédemment à la tribune, visant à poser trois exceptions au principe de base.
Tout d’abord, les immeubles à l’étranger, parce qu’ils ont vocation à s’autofinancer.
Ensuite, des exceptions, qui peuvent être transitoires, concernant le ministère de la défense. Là encore, il s’agit d’autofinancement, concernant des bases, des équipements et la réforme militaire.
Enfin, l’application du nouveau principe législatif est différée d’un an pour le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, parce que le contrat de performance, dont le terme est le 31 décembre 2009, précise que celui-ci bénéficie, sur le produit des cessions des biens qu’il occupe, d’un retour à hauteur de 95 %, hors Île-de-France. Le MEEDDAT passera donc dans le droit commun à partir de 2010.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial.
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial. L’amendement n° II-29 a un double objet.
D’une part, il s’agit de fixer dans la loi le principe d’une contribution des cessions immobilières de l’État au désendettement. En effet, à l’heure actuelle, ces décisions relèvent du domaine infra-réglementaire – des « bleus », des projets de circulaires –, ce qui ne leur confère pas une base juridique solide.
D’autre part, il s’agit de fixer le principe d’un seuil de contribution minimale au désendettement de l’État de 15 % pour l’ensemble des administrations.
Vous acceptez de donner une base juridique solide à ce principe, monsieur le ministre, ce qui constitue une avancée. Mais, aux termes du sous-amendement n° II-152, vous maintenez des exceptions. Celles qui s’appliquent au ministère de la défense, liées à la loi de programmation militaire, prendront fin le 31 décembre 2014 – je ne sais pas s’il restera grand-chose à céder à cette date.
Quoi qu’il en soit, ce sous-amendement étant correct, la commission émet un avis favorable et, en conséquence, elle retire l’amendement n° II-12, madame la présidente.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° II-12 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Je n’ai été saisie d’aucune explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : participations financières de l’état
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Participations financières de l’État » figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Participations financières de l’État |
5 000 000 000 |
5 000 000 000 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
4 000 000 000 |
4 000 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion l’article 85, qui est rattaché pour son examen aux crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
Article 85
Après le mot : « mis », la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article 50 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l’initiative économique est ainsi rédigée : « à la disposition de l’agence, directement ou par le canal d’une entité publique appropriée de portage immobilier, dans des conditions financières fixées par le ministre chargé du domaine ou, s’il y a lieu, par le conseil d’administration de l’entité en cause. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 85
Mme la présidente. L'amendement n° II-29, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 85, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 47 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les produits de cessions de biens immeubles de l'État sont affectés à son désendettement à hauteur d'un minimum de 15 %. »
Cet amendement a déjà été défendu. Le Gouvernement s’est déjà exprimé.
Le sous-amendement n° II-152, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa de l'amendement n° II-29 par une phrase ainsi rédigée :
La contribution au désendettement de l'État ne s'applique pas aux produits de cessions des immeubles domaniaux mis à la disposition du ministère de la défense jusqu'au 31 décembre 2014, aux produits de cessions des immeubles domaniaux situés à l'étranger et, jusqu'au 31 décembre 2009, aux produits de cessions des immeubles domaniaux mis à disposition des services du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Ce sous-amendement a déjà été défendu. Le Gouvernement s’est déjà exprimé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur le sous-amendement n° II-152.
Mme Marie-France Beaufils. Mon explication de vote vaudra également pour l’amendement n° II-29, madame la présidente.
En ce qui concerne la gestion du patrimoine de l’État, il n’est pas souhaitable de recommencer ce que l’on a fait pour l’Imprimerie nationale. C’est la question de fond.
Je ne suis pas sûre que l’affectation obligatoire d’une part importante des cessions immobilières au désendettement de l’État soit la seule solution. À cet égard, j’ai beaucoup apprécié la réflexion de notre collègue M. Patriat sur l’utilisation du patrimoine.
Nous ne devons pas nous limiter à une stricte vision comptable. Avant de céder un bien, nous devons nous demander si celui-ci ne peut pas servir à un autre ministère ou être utilisé pour répondre à d’autres politiques de l’État ou des collectivités territoriales dans lesquelles ledit bien est implanté, je pense particulièrement aux cœurs de villes, notamment en l’Île-de-France
C'est pourquoi nous ne voterons ni l’amendement ni le sous-amendement qui nous sont proposés.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 85.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » ainsi que des comptes spéciaux « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » et « Participations financières de l’État ».
Remboursements et dégrèvements
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma présence à cette tribune signale que les efforts de la commission des finances pour modifier substantiellement la mission « Remboursements et dégrèvements » n’ont encore pu aboutir cette année. En effet, si tel avait été le cas la mission n’existerait plus.
Cette mission retrace, pour 2009, des crédits évaluatifs s’élevant à 89,9 milliards d’euros – nous bénéficierons peut-être de suppléments –, soit une progression de 8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2008 ; 80 % des crédits concernent des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et plus de 65 % des dépenses techniques liées aux modalités de recouvrement de la TVA, de l’impôt sur les sociétés et d’autres impôts.
Les dégrèvements de taxe professionnelle progressent de 7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2008, l’essentiel étant lié au plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée des entreprises.
Pour la commission des finances, cette mission a été la source de deux insatisfactions.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial. D’une part, l’information fournie au sein du projet annuel de performances nous est apparue insuffisante, notamment en ce qui concerne la justification de la hausse des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2008, imputée aux remboursements de crédits de TVA et aux dégrèvements de taxe professionnelle.
D’autre part, le projet de loi de finances ne traduit pas les réflexions menées depuis plusieurs années sur l’évolution de l’architecture de cette mission, alors même que les travaux d’un groupe de travail mis en place à cet effet – auquel j’ai été associée ainsi que notre collègue Jean-Yves Cousin, rapporteur spécial de la mission à l’Assemblée nationale – laissaient envisager des avancées rapides.
J’ai pris connaissance, monsieur le ministre, de votre lettre en réponse à mon propre courrier sur ce sujet. J’ai le regret de dire que vous ne m’avez pas apporté d’éléments nouveaux et que vous avez, au contraire, conforté, sur certains points, mon analyse.
Vos explications sur la hausse des crédits demandés pour 2008, à hauteur de 7 milliards d’euros, reprennent les éléments déjà communiqués dans les réponses au questionnaire budgétaire, que je trouvais insuffisantes.
Je ne méconnais pas les difficultés d’évaluation de ces dépenses. Cependant, je m’interroge sur la qualité de la prévision initiale, comme, d’ailleurs, la Cour des comptes. Je rappelle que les crédits de cette mission ont fait l’objet, en loi de règlement, d’un abondement de près de 4 milliards d’euros en 2006, de 4 milliards d’euros en 2007 et devraient être encore réévalués de 7 milliards d’euros en 2008.
Par ailleurs, en ce qui concerne les travaux du groupe mis en place en vue d’étudier les pistes de réforme de la mission, je m’étais réjouie, en juin dernier, que les réflexions portent sur deux sujets essentiels : la lisibilité des crédits retracés et le renforcement de l’évaluation et de la mesure de la performance des dépenses fiscales.
J’ai bien noté les efforts réalisés s’agissant de la présentation des dépenses fiscales au sein de l’annexe « Évaluation des voies et moyens », ainsi qu’en matière d’évaluation de certaines dépenses dans les projets annuels de performances d’autres missions, conformément à ce que nous préconisions.
Cependant, je regrette que, pour la mission « Remboursements et dégrèvements » elle-même, les réflexions n’aient pu donner lieu à des traductions concrètes dès le projet de loi de finances pour 2009. Une nouvelle fois, des raisons techniques sont invoquées. Je voudrais simplement rappeler que la commission des finances mène ses travaux sur l’évolution de la mission depuis 2006.
Les services ministériels, interrogés au début de l’année 2008 par la Cour des comptes, ont indiqué que des travaux étaient en cours, menés en vue d’une mise en œuvre pour la loi de finances pour 2009.
Une étape transitoire, à tout le moins, aurait pu consister à introduire un programme spécifique retraçant les remboursements de crédits de TVA. C’est ce que nous avions proposé l’année dernière, dans cet hémicycle.
Dans ces circonstances, la commission des finances a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » pour 2009, en attendant, monsieur le ministre, les explications que vous pourriez nous apporter.
Mme la présidente. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements », ainsi que cela a été rappelé dans le rapport, est la première mission budgétaire de l’État.
Les engagements qui la définissent, portant sur des crédits évaluatifs, sont d’un montant important. Il s’agit de 90 milliards d’euros, ce qui correspond par exemple à deux fois le produit de l’impôt sur le revenu, hors produit de l’imposition des revenus non soumis au barème.
Ces sommes très importantes comprennent d’abord le montant des remboursements de TVA destinés aux entreprises, pour près de 49 milliards d’euros, puis des allégements d’impôt sur les sociétés, pour 11,1 milliards d’euros.
De même, 12,7 milliards d’euros sont consacrés à l’allégement de la taxe professionnelle. Encore ne s’agit-il là, pour l’essentiel, que du coût du plafonnement de la taxe professionnelle à la valeur ajoutée !
Cela signifie que 80 % des crédits de la mission corrigent l’imposition des entreprises, sur le plan national comme sur le plan local.
Cela signifie également que, d’une certaine manière, dans la mesure où l’impôt sur les sociétés est censé rapporter environ 60 milliards d’euros de recettes fiscales brutes, on rembourse aux entreprises plus que ce qu’elles paient par ce biais !
Les crédits de la mission sont en croissance continue depuis la mise en œuvre de la loi organique. Cela montre au moins une chose : à défaut de maintenir l’emploi public, de développer l’action publique, on a fait beaucoup d’efforts pour alléger les impôts, en dépit du très faible impact de ces mesures sur la croissance et l’emploi.
Les dégrèvements et remboursements d’impôt concernant très peu les ménages, on se demande ce que signifie cette attention constante à réduire les impôts des entreprises.
Depuis hier, officiellement, notre pays compte de nouveau deux millions de chômeurs et la croissance est en panne.
Pourquoi avoir mené des politiques d’allégement fiscal aussi peu efficaces sur le chômage et sur la croissance ?
Pourquoi avoir multiplié les niches fiscales et les régimes particuliers ? Pourquoi vouloir maintenir coûte que coûte un bouclier fiscal qui n’a pas rencontré le succès escompté et qui ne constitue, de fait, qu’une dépense supplémentaire, inutile pour l’emploi et pour la croissance, inutile pour la présente mission ?
Je suis élue d’une ville populaire dont la majorité des habitants – 52 % pour être précise – ne jouent pas avec les dispositifs de réduction de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Quand ils vont faire leurs courses, ils paient chaque fois un peu de TVA, contribuant ainsi à leur manière au financement de l’action de l’État. En revanche, ils constatent chaque jour que le service public de l’éducation se dégrade, que l’ensemble des services publics, de la police nationale à la poste, en passant par l’équipement ou la santé, n’offre plus les mêmes garanties ni la même qualité de réponse à leur attente.
Des emplois disparaissent, des locaux sont désaffectés, des formations sont supprimées dans le lycée de leurs enfants : tout cela vient aussi du choix dont nous débattons ce soir.
On a gagé les allégements d’impôts des dernières années sur la mise en cause de la présence de l’État et des services publics sur le territoire. Pour toutes les personnes, issues des milieux populaires, qui souffrent de ces choix, je ne peux que voter contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Remboursements et dégrèvements » est très spécifique.
D’abord, les dépenses sont très intimement liées aux recettes. Les crédits sont donc évaluatifs et il devient dès lors impossible de les préciser avec rigueur.
Ensuite, la nature même de ces crédits rend difficile la mise en œuvre des règles normalement applicables aux dépenses.
Dans ces conditions, il n’est pas aisé de définir des objectifs de performance.
Comme vous le savez, madame le rapporteur spécial, trois facteurs expliquent cette situation.
Le premier, c’est l’évolution de la consommation avec les exportations, donc le problème du remboursement des crédits liés à la TVA.
Le deuxième facteur, c’est l’évolution du bénéfice fiscal des entreprises, le remboursement des excédents de versement et d’impôt sur les sociétés. Même une prévision correcte de l’évolution du bénéfice fiscal d’une entreprise ne garantit pas une bonne prévision des remboursements d’impôt sur les sociétés. En 2008, par exemple, on a constaté un écart de 2,7 milliards d’euros alors que la prévision de bénéfice était correcte.
Le troisième facteur, c’est l’évolution des comportements individuels des redevables. Plusieurs options s’offrent à eux : l’autolimitation des versements d’acomptes d’impôt sur les sociétés ou la restitution de l’impôt sur les sociétés au moment du versement du solde ; demande de remboursement de TVA ou imputation sur la TVA collectée.
Enfin, n’oublions pas l’institution importante au titre du contentieux précompte, évaluée à 1,6 milliard d’euros, y compris les intérêts moratoires, dans le présent projet de loi de finances. C’est un impondérable, conséquence d’une décision de justice qui est absolument extérieure à l’administration. Cela rend bien entendu toute prévision encore plus difficile.
Comme vous l’avez rappelé, madame le rapporteur, nous avons mis en place un groupe de travail. Je pensais que cette décision vous aurait satisfaite. Les objectifs sont les suivants : présenter au mois de juillet les évolutions envisagées et donner une vision plus claire de la nature des crédits du programme, mieux identifier les remboursements et les restitutions purement techniques, donc la mécanique et la gestion de l’impôt, mieux distinguer les remboursements et les dégrèvements liés à des politiques publiques, qui constituent la partie restituée des dépenses fiscales.
Des raisons informatiques et des contraintes temporelles trop fortes nous ayant empêchés de mettre en œuvre ces mesures dès 2009, elles entreront en vigueur en 2010. Cela permettra un meilleur encadrement du coût des dépenses fiscales dans la loi de programmation des finances publiques, avec la définition d’un objectif de dépenses fiscales, des règles de gage. On fait donc bien la différence entre les deux. Nous en avons déjà débattu et je n’y reviens donc pas.
Il faut noter l’amélioration, dès cette année, de l’information sur la dépense fiscale dans les documents budgétaires. Vous le souhaitiez ; nous l’avons fait.
Nous avons détaillé le coût des dix-huit dépenses fiscales les plus importantes. Nous avons émis un tableau récapitulant le coût des dépenses fiscales qui ont été adoptées depuis le dépôt du précédent projet de loi de finances ou qui sont proposées dans le projet de loi de finances de l’année afin de détailler la règle de gage des dépenses fiscales.
De nombreuses avancées ont vu le jour en 2008. Elles seront opérationnelles en 2009 et en 2010, avec une révision très large des caractéristiques de la mission. Il me semble donc que vous avez satisfaction.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, j’ai rappelé dans mon intervention et écrit dans mon rapport que vous vous étiez efforcé d’apporter des réponses à nos interrogations et que nous avions apprécié le travail qui avait été mené.
Nous aurions néanmoins souhaité que votre travail, notamment les décisions prises au mois de juin, trouve une traduction plus rapide. Il était alors apparu possible de concrétiser la transformation d’une partie de la mission. Or ce ne fut pas le cas.
C’est pourquoi la commission avait émis une réserve, que j’accepte bien sûr de lever, avec M. le président de la commission des finances.
Je souhaite que l’on parvienne en 2010 à des résultats concrets. Sinon, nous perdrons en efficacité.
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Remboursements et dégrèvements |
90 199 000 000 |
90 199 000 000 |
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs) |
72 874 000 000 |
72 874 000 000 |
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs) |
17 325 000 000 |
17 325 000 000 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-139, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) |
2 623 000 000 |
|
2 623 000 000 |
|
Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
TOTAL |
2 623 000 000 |
|
2 623 000 000 |
|
SOLDE |
2 623 000 000 |
2 623 000 000 |
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Il s’agit d’un nouvel amendement de compatibilité avec les hypothèses macroéconomiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial. Le Gouvernement nous propose, au travers de cet amendement, d’intégrer 1,2 milliard d’euros des remboursements et dégrèvements de taxes sur la valeur ajoutée par cohérence avec le projet de loi de finances rectificative pour 2008. Or ce collectif budgétaire ne nous est pas encore soumis et il sera examiné après le vote du présent projet de loi de finances. Dans ces conditions, comment peut-on intégrer ces remboursements et dégrèvements ?
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, sachez que les membres de la commission des finances, son rapporteur spécial et son président étaient très tentés de repousser les crédits de la mission. C’eût été pour nous une immense satisfaction que le projet de loi de finances voté par le Sénat présente un solde positif. (Sourires.)
La TVA sera revue à la baisse dans le collectif budgétaire. Dans ces conditions, je comprends qu’il faille revoir la base sur laquelle on fonde le projet de budget pour 2009. C’est ce qui explique l’ajustement de 1,2 milliard d’euros sur la TVA ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Les données de 2008 étant révisées, nous devons par cohérence modifier nos prévisions pour 2009. Je ne vois pas où est la difficulté.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
6
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 1er décembre 2008, à dix heures, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (n° 98, 2008 2009).
Rapport (n° 99, 2008 2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Examen des missions :
Justice
M. Roland du Luart, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 16) ;
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (Justice – Administration pénitentiaire – avis n° 104, tome III) ;
M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (Justice – Protection judiciaire de la jeunesse – avis n° 104, tome V) ;
MM. Yves Détraigne et Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (Justice et accès au droit – avis n° 104, tome IV).
Travail et emploi (+ articles 79 à 81)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 31) ;
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome VII).
Défense (+ articles 59 decies, 59 undecies et 59 duodecies)
MM. François Trucy, Jean-Pierre Masseret et Charles Guené, rapporteurs spéciaux (rapport n° 99, annexe n° 8) ;
MM. Xavier Pintat et Daniel Reiner, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense – Équipement des forces – avis n° 102, tome V) ;
M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense – Environnement et soutien de la politique de défense – avis n° 102, tome IV) ;
MM. André Dulait et Jean-Louis Carrère, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense - Préparation et emploi des forces - avis n° 102, tome VI).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 29 novembre 2008, à deux heures vingt-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD