compte rendu intégral
Présidence de M. Bernard Frimat
vice-président
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Mises au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont.
Mme Bernadette Dupont. Monsieur le président, à l’article 45 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, Mme Brigitte Bout a voté pour, alors qu’elle a été considérée comme ayant voté contre.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, madame Dupont.
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. S’agissant du scrutin n° 44 portant sur l’amendement n°351 rectifié à l’article 45 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, j’ai été comptabilisé comme ayant voté pour, monsieur le président, alors que j’avais l’intention de voter contre.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur Marini.
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Organisme extraparlementaire
M. le président. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission des affaires économiques à présenter une candidature.
La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
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Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles de la première partie.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A. – Autorisation de perception des impôts et produits
Article 1er
I. – La perception des impôts, produits et revenus affectés à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir continue d’être effectuée pendant l’année 2009 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi.
II. – Sous réserve de dispositions contraires, la présente loi s’applique :
1° À l’impôt sur le revenu dû au titre de 2008 et des années suivantes ;
2° À l’impôt dû par les sociétés sur leurs résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2008 ;
3° À compter du 1er janvier 2009 pour les autres dispositions fiscales.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° I-172, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 278 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 278. - À compter du 1er janvier 2009, le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 17,60%. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. La question du pouvoir d’achat est au cœur des préoccupations des Français. De notre point de vue, la première des mesures à prendre est donc l’augmentation des salaires. L’aggravation sensible de la situation économique, qui montre que le plus fort de la crise est plutôt devant nous que derrière nous, ajoute d’ailleurs à ces préoccupations celles résultant des pertes d’emplois, qui se font jour de manière de plus en plus évidente.
Dans ce contexte, toute mesure visant à redonner du pouvoir d’achat à nos compatriotes doit être examinée. Le pouvoir d’achat des ménages est largement entamé ; nous sommes tous d’accord sur ce point. Le ralentissement de la hausse des prix, tout à fait relatif ces derniers mois, n’est d’ailleurs que le signe de la récession plus grave qui s’annonce.
Ainsi, vous le savez, mes chers collègues, selon le nouvel indice de référence, les loyers connaissent une progression de 2,8 %. Cette progression est supérieure à celle des prix à la consommation.
Le budget consacré au logement atteint ou dépasse le quart des ressources mensuelles des Français.
De la même manière, malgré la baisse, ces derniers temps, du prix du pétrole, les prix des carburants, du fioul domestique, du gaz et de l’électricité demeurent élevés. Je pourrais évoquer bien d’autres augmentations encore, comme celle des produits frais.
À cet égard, la TVA, qui serait un impôt neutre et invisible, figure bel et bien – vous le savez tous, mes chers collègues – au bas des tickets de caisse, notamment, et pèse sur le pouvoir d’achat.
Pour notre part, nous sommes favorables à une meilleure rémunération du travail et à une réduction de la charge fiscale pesant sur la consommation populaire. Même si le prix des produits dits de « haute technologie » a pu diminuer, ceux des produits de consommation courante a augmenté.
Ainsi, dans les limites qui nous sont bien sûr offertes par la fiscalité, nous souhaitons augmenter le pouvoir d’achat des familles en réduisant de manière sensible le taux de la TVA.
Sur ce sujet, la directive européenne recommande l’application d’un taux minimum de 15 %. Sans aller jusqu’à ce taux souhaitable, nous voulons donner un signe en portant le taux normal à 17,6 %.
La perte de recettes fiscales induites serait compensée par le relèvement du produit d’un autre impôt, à savoir l’impôt sur les sociétés.
Le taux de profitabilité des entreprises assujetties à l’impôt sur les sociétés n’a pas vraiment été mis en cause ces derniers temps – nous l’avons rappelé hier – et le niveau des dividendes que les seuls groupes cotés au CAC 40 s’apprêtent à verser – 99 milliards d’euros – suffit à lui seul à replacer cette mesure à son juste niveau.
Nous voulons adresser un signe fort en direction des foyers populaires, dans le sens d’une plus grande justice sociale et fiscale, et dans celui d’une plus juste contribution des entreprises à partir de la richesse créée.
Comme nous pouvons le penser, cette mesure entraînera obligatoirement une relance de la consommation : si le pouvoir d’achat est plus important, la consommation sera également plus importante. Et comme la consommation est le moteur de la croissance, peut-être pourrons-nous nous garder en partie de la récession qui menace.
Cette disposition va donc dans le sens d’un rééquilibrage des produits fiscaux de l’État, qui permettrait de réduire la part des prélèvements indirects et d’accroître celle des impôts directs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. La commission est évidemment très défavorable à cet amendement, qui est tout simplement économiquement inconcevable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
En outre, le coût de cette mesure serait largement supérieur à 10 milliards d’euros, qui viendraient en réduction de la partie recettes du budget de l’État.
M. Foucaud a indiqué que nous étions tous d’accord pour considérer que les Français perdent du pouvoir d’achat. Je crois que nous sommes tous d’accord pour essayer de permettre à nos concitoyens de gagner du pouvoir d’achat. Mais je vous rappelle, en particulier en ce qui concerne l’année 2008, que nous ne pourrons déterminer la perte ou le gain de pouvoir d’achat qu’en fonction de la mesure de l’augmentation des prix et des revenus.
Si j’en crois l’évolution des prix telle qu’elle se dessine actuellement, je ne pense pas que nous puissions arriver à la conclusion que les Français auront perdu du pouvoir d’achat, bien au contraire !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
B. – Mesures fiscales
Article 2
I. – Le I de l’article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 5 852 € le taux de :
« – 5,50 % pour la fraction supérieure à 5 852 € et inférieure ou égale à 11 673 € ;
« – 14 % pour la fraction supérieure à 11 673 € et inférieure ou égale à 25 926 € ;
« – 30 % pour la fraction supérieure à 25 926 € et inférieure ou égale à 69 505 € ;
« – 40 % pour la fraction supérieure à 69 505 €. » ;
2° Dans le 2, les montants : « 2 227 € », « 3 852 € », « 855 € » et « 630 € » sont remplacés respectivement par les montants : « 2 292 € », « 3 964 € », « 880 € » et « 648 € » ;
3° Dans le 4, le montant : « 419 € » est remplacé par le montant : « 431 € ».
II. – Dans le deuxième alinéa de l’article 196 B du même code, le montant : « 5 568 € » est remplacé par le montant : « 5 729 € ».
M. le président. L'amendement n° I-160, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer le dernier alinéa du 1° du I de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« - 40 % pour la fraction supérieure à 69 505 et inférieure ou égale à 97 500 euros ;
« - 50 % pour la fraction supérieure à 97 500 euros. » ;
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement a pour objet de reposer la question essentielle des tranches supérieures de l’impôt sur le revenu et de revenir sur le rendement même de cet impôt.
L’impôt sur le revenu est, au fond, assez mal défini. L’un de ses défauts essentiels réside dans son assiette, par trop réduite, notamment au regard de ce qu’il en est de la contribution sociale généralisée, qui s’apparente tout de même de plus en plus à une sorte d’impôt sur le revenu minimal. Cette étroitesse de l’assiette de l’impôt relativise le débat que nous avons sur les taux d’imposition des tranches du barème.
À nos yeux, la question du taux marginal est donc importante sans être nécessairement déterminante. Il ne s’agit pas pour nous d’une sorte de dogme immuable de notre système fiscal, d’un signe fort qu’il conviendrait de préserver coûte que coûte. C’est tout simplement une nécessité. Nous nous attachons en effet, depuis de longues années, à défendre et à illustrer le principe constitutionnel en vertu duquel chacun contribue à la charge publique à proportion de ses facultés.
La défense et l’illustration de ce principe passent, à notre sens, par un double mouvement de renforcement de la progressivité de l’impôt par le biais du barème et de rééquilibrage du traitement de la matière fiscale pour chacune des catégories de revenu. Cet amendement vise à favoriser le premier terme de ce mouvement en permettant à la progressivité du barème d’être plus clairement affirmée.
Nous en sommes parfaitement conscients, cette proposition ne recueille pas l’assentiment de la majorité de la commission des finances, qui est attachée depuis de longues années à une baisse sensible du taux marginal, attachement certes compréhensible, mais qui ne concerne pourtant qu’environ 1 % des contribuables de notre pays.
On peut également penser que ce débat sur le taux marginal est quelque peu biaisé par la confusion entretenue entre le taux marginal et le taux marginal moyen, le nombre de contribuables dont l’essentiel du revenu est frappé par le taux marginal étant encore plus marginal que le pourcentage cité précédemment !
Pour notre part, nous estimons nécessaire de porter le taux marginal au niveau où nous le proposons.
Bien évidemment, c’est aussi pour des raisons évidentes de rendement de l’impôt que nous avons déposé cet amendement.
Si l’on s’arrête au seul cas des contribuables dont le revenu excède les 97 501 euros, cette mesure serait susceptible de produire de 7 à 10 milliards d’euros de recettes.
Autant, pour prendre en charge les dépenses utiles, réduire les déficits et donc permettre, dans les années à venir, de réduire les impôts de tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme l’a indiqué lui-même notre collègue Bernard Vera, nous ne nous inscrivons ni dans la même logique économique ni dans la même logique fiscale. Chacun assume ses positions et c’est une bonne chose, car tel est le sens du débat démocratique dans un hémicycle tel que le nôtre : la majorité de la commission assume la continuité des positions qu’elle a adoptées depuis 2002 en matière d’impôt sur le revenu ; elle ne peut donc qu’exprimer un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Notre amendement n° I-172 tendait à diminuer de deux points le taux normal de la TVA en le faisant passer de 19,6 % à 17,6 %, pour redonner du pouvoir d’achat aux Françaises et aux Français. Mme la ministre comme M. le rapporteur général nous ont répondu que cela n’était pas possible.
Or le présent amendement, qui vise à imposer davantage ceux qui paient peu ou pas assez d’impôt compte tenu de leurs revenus, procurerait une recette de 7 à 10 milliards d’euros. Le refus qui nous est opposé s’inscrit donc dans la logique que vient d’invoquer M. le rapporteur général, à laquelle nous sommes politiquement et économiquement opposés.
Avec ces deux amendements, l’un portant sur la baisse du taux de la TVA et l’autre sur l’augmentation des tranches du barème de l’impôt sur le revenu, nous voulions prouver qu’il était possible de mener une autre politique.
M. le président. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2 ou après l’article 2 quater
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-83, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le h du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts est supprimé.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je serai très brève, puisque notre groupe a une position constante sur l’amortissement dit « Robien ».
D’une part, cette mesure est très perverse dans son application, parce qu’elle aboutit à ce que des logements restent inoccupés dans des zones inadaptées à son objectif. D’autre part, elle coûte cher : plusieurs centaines de millions d’euros.
Notre collègue Thierry Repentin, de projet de loi en projet de loi, persiste et signe : nous signons avec lui pour la suppression de l’amortissement « Robien » !
M. le président. L’amendement n° I-161, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le h du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts est supprimé.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Je ne vais pas prolonger inutilement la discussion après ce que vient de dire notre collègue, puisqu’il s’agit d’un amendement récurrent. Là encore, il s’agit d’une niche qui favorise les plus riches : sa suppression permettrait de récupérer 400 millions d’euros, qui pourraient trouver une autre utilisation dans la situation que connaissent actuellement nos compatriotes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces deux amendements n’ont pas d’incidence sur le solde budgétaire. Je suggère donc à leurs auteurs de les retirer pour les redéposer lors de la discussion de la seconde partie de la loi de finances.
Je vais réitérer cette invitation lors de la présentation de nombreux autres amendements pour clarifier nos débats, dans le respect des procédures.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Bricq, l’amendement n° I-83 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-83 est retiré.
Monsieur Foucaud, l’amendement n° I-161 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-115, présenté par M. Jégou, est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l’article 80 quinquies du code général des impôts, les mots : « qui, mentionnées au 8° de l’article 81, sont allouées aux victimes d’accidents du travail et de celles » sont supprimés.
II. - Au début du 8° de l’article 81 du code général des impôts, les mots : « indemnités temporaires, » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement s’inspire d’une mesure adoptée dans la loi de finances pour 1995, la fiscalisation des indemnités journalières des femmes en congé de maternité. Étant à l’époque député, j’avais essayé de faire respecter un certain parallélisme des formes – sur le plan fiscal, tout au moins – en déposant un amendement tendant à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail, suivant les règles applicables aux traitements et salaires, comme toutes les autres indemnités journalières.
Cet amendement a déjà été adopté à plusieurs reprises par le Sénat et il vient encore d’être voté par la commission des finances, à un moment où l’état des finances de notre pays est alarmant.
Il convient de préciser que cet amendement ne vise que les indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail. Il ne concerne pas, contrairement à ce qui est souvent prétendu, les indemnités journalières allouées aux personnes atteintes d’une affection comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse, qui resteront exonérées d’impôt sur le revenu en application de l’article 80 quinquies du code général des impôts. Il ne concerne pas non plus les prestations et rentes viagères versées aux victimes d’accidents du travail, qui resteront également exonérées d’impôt sur le revenu, en application du 8°de l’article 81 du code général des impôts.
Cet amendement est une mesure d’équité, étant donné que seule cette catégorie d’indemnités journalières reste non imposable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’agit d’un amendement intéressant présentant le mérite d’attirer notre attention sur le traitement différencié des indemnités journalières, qui sont normalement soumises à l’impôt sur le revenu, à l’exception des indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail et des indemnités journalières allouées aux personnes atteintes d’une affection comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse.
Les indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail sont soumises à la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS, et à la contribution sociale généralisée, la CSG. Dès lors, il peut paraître cohérent de se poser la question de leur assujettissement à l’impôt sur le revenu. En outre, il convient de relever que la plupart des victimes d’accidents du travail bénéficient d’indemnités journalières d’un montant équivalent à leur salaire normal, en application de conventions collectives.
Comme le précise l’exposé des motifs de l’amendement de notre collègue Jean-Jacques Jégou, le régime applicable aux prestations et rentes viagères versées aux victimes d’accidents du travail ne serait pas modifié : celles-ci continueraient à être exonérées de l’impôt sur le revenu.
Je rappelle que, compte tenu de la progressivité de l’impôt sur le revenu, la mesure préconisée par notre collègue n’est pas contraire à l’équité, en dépit des commentaires divers que nous avions enregistrés les années précédentes.
Par souci de continuité dans les positions que la commission des finances a déjà adoptées – puisque le même amendement avait reçu un avis favorable de sa part lors de la discussion des projets de loi de finances pour 2006 et pour 2008 –, je réitère cet avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Jégou, je vais vous inviter à procéder, si vous le voulez bien, au retrait de cet amendement.
L’exonération des indemnités journalières repose sur le souci d’accorder un traitement de faveur à des personnes qui se trouvent dans une situation douloureuse et contribue, d’une certaine manière, à la réparation du préjudice subi du fait d’un accident qui est intervenu dans le cadre de l’exercice de l’activité professionnelle.
M. Michel Charasse. C’est de la fiscalité compassionnelle !
Mme Christine Lagarde, ministre. Ces indemnités journalières constituent bien un revenu versé en remplacement du salaire et, à ce titre, auraient vocation à être soumises à l’impôt sur le revenu ; elles sont d’ailleurs soumises à la CSG et à la CRDS. Cependant, je crois que le sujet mérite plus ample réflexion.
Pour la raison d’équité que vous évoquiez afin de l’écarter, monsieur le rapporteur général, on peut se demander pourquoi il serait justifié d’imposer les indemnités journalières servies au titre des accidents du travail sans s’interroger sur l’exonération dont bénéficient aussi les indemnités journalières servies au titre des maladies longues et coûteuses. Nous devrions donc mener notre réflexion en considérant ces deux régimes, afin de prendre une décision en toute équité.
Par conséquent, je suggère le retrait de cet amendement.
J’ajoute que, depuis cette année, les indemnités journalières doivent faire l’objet d’une déclaration commune auprès des caisses d’allocations familiales et de l’administration fiscale. Ainsi, nous serons en mesure, dès l’année prochaine, de connaître le montant de ces indemnités pour déterminer ensuite le coût que représenterait leur exonération pour les finances publiques.
M. le président. Monsieur Jégou, l’amendement n° I-115 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Madame la ministre, que de talents votre administration s’évertue-t-elle à déployer pour essayer de prouver l’improuvable !
Ne vous vexez pas, mais je connaissais votre réponse. Vous y avez ajouté une petite innovation alléchante pour faire croire que l’administration allait maintenant pouvoir évaluer les conséquences de la suppression de cette exonération. Mais cela fait quatorze ans que la question est posée !
Cette exonération est une iniquité totale ! Elle témoigne de notre manque de courage à tous ; j’y vois malheureusement la preuve de ce que je disais dans mon intervention lors de la discussion générale, à laquelle vous n’avez pas souhaité répondre. Ce n’est pas ainsi que l’on redressera les finances de notre pays !
Il existe de nombreuses niches fiscales et nous sommes en présence de l’une d’elles. Vous avez reconnu tout à l’heure, madame la ministre, que ces indemnités journalières constituaient un revenu versé en remplacement du salaire et M. le rapporteur général nous a dit qu’une compensation intégrale était prévue au titre des conventions collectives. Il faut noter que 99 % des accidents du travail n’entraînent qu’une interruption temporaire de travail, sans aucune séquelle ni pretium doloris.
Ces indemnités journalières représentent donc un substitut du salaire et sont soumises à la CSG et à la CRDS : je ne vois pas pourquoi elles ne seraient pas soumises à l’impôt sur le revenu. Cette situation n’a aucune justification, sinon un manque de courage politique !
En tant que parlementaire, j’essaie de faire preuve de courage politique ; je sais que ce n’est pas populaire. Est-ce en cherchant éternellement à être populaire que l’on parviendra à redresser les finances de ce pays ?
Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote sur l'amendement n° I-115.
Mme Catherine Procaccia. Il y a effectivement une logique financière dans l’amendement présenté par M. Jégou. Mais y a-t-il une justice sociale ? Les indemnités journalières perçues par le salarié qui a été victime d’un accident du travail peuvent représenter l’intégralité du salaire, mais pas dans toutes les entreprises, ni pendant la totalité du congé.
Je ne vois pas dans la position de Mme la ministre des explications compliquées de l’administration : j’y vois la nécessité de mener une réflexion globale
En tout cas, à titre personnel, je voterai contre l’amendement de M. Jégou.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Madame le ministre, l’amendement de M. Jégou présente une certaine logique et répond, à mon avis, à un souci d’équité puisque, au fond, toutes les indemnités journalières sont imposables, sauf celles-ci. Permettez-moi de vous dire que certaines indemnités journalières sont versées pour des cas de maladie plus graves que certains accidents du travail. Même s’il est toujours pénible d’être victime d’un accident en général et d’un accident du travail en particulier, je trouve cette distinction choquante.
Madame le ministre, je comprends bien que prendre la décision de faire marche arrière sur ce genre de choses est toujours difficile. Mais il faudrait nous expliquer quel est le motif de cette discordance, en dehors de l’aspect compassionnel, aspect qui n’a rien à voir avec la fiscalité dans la mesure où celle-ci vise à apporter à l’État des ressources qui, conformément à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1989, reposent sur l’égale répartition entre les citoyens de la contribution commune aux dépenses publiques.
Je me souviens qu’avant d’être nommé dans un ministère que vous connaissez bien, madame le ministre, je m’étais toujours demandé pourquoi la vignette automobile n’était pas réclamée aux VRP, alors qu’elle était exigée des représentants d’assurance qui font exactement le même métier. J’avais fait poser la question par de nombreux parlementaires, j’avais moi-même posé des questions écrites, et il nous avait été répondu qu’il en était ainsi parce que tel article du code général des impôts l’avait prévu et que tel autre ne l’avait pas prévu. Ce n’était pas une explication !
Lorsque je suis arrivé à Bercy – ou plutôt à Rivoli, à l’époque ; cela prouve une certaine ancienneté – j’ai demandé que l’on sorte le dossier. J’ai alors découvert la raison de la différence de traitement entre ces deux catégories : si les VRP étaient exonérés, c’est parce que le ministre des finances de l’époque, Félix Gaillard, avait clôturé leur banquet copieusement arrosé un soir très tard et avait dit en sortant : « vous serez exonérés ! ». Mais comme les représentants d’assurance ne l’avaient pas invité à dîner et que, par conséquent, le ministre ne s’était pas trouvé dans la même situation physique, ils n’ont pas été exonérés.
Par conséquent, madame le ministre, je voudrais savoir, comme mes collègues, probablement, car nous sommes tous troublés par cette affaire, quel est le motif de cette différence de traitement : ou bien on exonère toutes les indemnités journalières – pourquoi pas ? -, ou bien on n’en exonère aucune. Mais pourquoi exonérer celles-ci et pas les autres ?
L’explication est donc un peu courte. C’est pourquoi je voterai l’amendement de M. Jean-Jacques Jégou.