M. le président. L'amendement n° 55, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 2242-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Préalablement à cette négociation, l'employeur transmet aux sections syndicales des organisations représentatives les informations relatives aux éléments de rémunération et aux avantages de toute nature contenues dans le rapport présenté par le conseil d'administration ou le directoire à l'assemblée générale en application des articles L. 225-102 et L. 225-102-1 du code de commerce. »
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Nous proposons de poursuivre dans la logique de notre rapporteur pour avis lorsqu’il souhaite que l’on améliore l’information des salariés sur la situation de leur entreprise.
Le code de commerce, dans son article L. 225-102, dispose, dans son premier alinéa, que le rapport annuel présenté par le conseil d’administration ou le directoire d’une société à l’assemblée générale des actionnaires rend compte de l’état de la participation des salariés et de la part du capital détenue dans un plan d’épargne entreprise et dans des fonds communs de placement.
L’article L. 225-102-1 précise que ce rapport « rend compte de la rémunération totale et des avantages de toute nature versés, durant l’exercice, à chaque mandataire social, y compris sous forme d’attribution de titres de capital, de titres de créances », en un mot d’actions.
Le rapport « indique également le montant des rémunérations et des avantages de toute nature que chacun de ces mandataires a reçu […] de la part des sociétés contrôlées […] ou de la société qui contrôle […] la société ».
Ce rapport « décrit […] les éléments fixes, variables et exceptionnels composant ces rémunérations et avantages ainsi que les critères en application desquels ils ont été calculés ou les circonstances en vertu desquelles ils ont été établis. Il indique également les engagements de toutes natures, pris par la société au bénéfice de ses mandataires sociaux, correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d’être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de ces fonctions ».
En un mot, le rapport annuel à l’assemblée générale des actionnaires décrit avec précision l’ensemble des avantages que sont susceptibles de percevoir les mandataires sociaux dans toutes les circonstances de leur vie professionnelle. Cela vaut notamment s’ils quittent la société après l’avoir mise en grande difficulté, après avoir fermé des usines et licencié plusieurs milliers de salariés. Un simple changement de fonctions peut aussi être l’occasion de percevoir des sommes avec lesquelles un salarié vivrait durant plusieurs centaines d’années.
Nous proposons simplement que le contenu de ce rapport annuel soit porté à la connaissance des délégués syndicaux avant que s’engage la négociation annuelle obligatoire sur les salaires.
Cette information serait certainement de nature à éclairer de manière fructueuse la négociation salariale, surtout pour les plus basses rémunérations.
Il est important et conforme à l’éthique de la participation que les salariés, en l’occurrence leurs représentants, comprennent bien comment l’entreprise est gérée, selon quelles orientations, selon quels principes et dans quel but.
Nous suggérons donc que, pour créer enfin une sincère association capital-travail, l’information traverse le mur étanche entre l’actionnariat et le salariat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Aux termes de cet amendement, il est proposé que l’employeur informe les délégués syndicaux sur l’état de l’actionnariat salarié, ainsi que sur la rémunération de mandataires sociaux avant que débute la négociation annuelle obligatoire des salaires.
Dans la mesure où ces deux sujets sont sans lien direct avec la négociation sur les salaires, on voit mal quels avantages pourraient résulter de cette formalité qui serait nouvelle et, surtout, qui serait imposée aux entreprises.
Bien évidemment, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est également défavorable.
On comprend les préoccupations d’obtenir une bonne information. Toutefois, le code du travail contient déjà des dispositions relatives à l’information des institutions représentatives, notamment pour les dix salaires les plus importants ; je vous renvoie à l’article L. 2323–8 du code du travail.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 27 :
Nombre de votants | 324 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 163 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 4
I. - Le III de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de la réduction est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. »
II. - Le I de l'article L. 131-4-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de l'exonération est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. »
III. - La loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville est ainsi modifiée :
1° L'article 12 est complété par un VII ainsi rédigé :
« VII. - Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de l'exonération prévue au I est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. » ;
2° Au quatrième alinéa de l'article 12-1, le mot et la référence : « et VI » sont remplacés par les références : «, VI et VII ».
IV. - Après le deuxième alinéa du VII de l'article 130 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de l'exonération est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. »
V. - Après le V de l'article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un V bis ainsi rédigé :
« V bis. - Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de l'exonération est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. »
VI. - Les I à V sont applicables à compter du 1er janvier 2009.
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Rédiger comme suit la seconde phrase du second alinéa du I de cet article :
Il est diminué de 100 % lorsque, pour la troisième année consécutive, aucun accord n'a été conclu.
II. Rédiger de même la seconde phrase du second alinéa du II, du 1° du III, du IV et du V de cet article.
La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. Cet amendement a pour objet de supprimer l’exonération de cotisations sociales patronales dont bénéficie un employeur lorsque, à l’issue de trois années consécutives, un accord salarial n’a pu être conclu.
La rédaction prévue par le texte de l’article 4 est en effet comparable à une passoire.
L’employeur est tenu d’ouvrir une négociation, une fois, deux fois, trois fois. N’importe qui peut comprendre qu’il suffit d’ouvrir une négociation avec un calendrier suffisamment élastique pour ne pas perdre le bénéfice de 10 % de cotisations.
La mesure que vous proposez – plus d’exonération de cotisations la troisième année sans négociation – est, comme beaucoup de mesures phares de ce texte, une fausse sanction.
Rien n’oblige à conclure un accord salarial alors que tout le projet de loi invite à ne surtout pas le faire et à distribuer plutôt, éventuellement, de l’intéressement, si l’employeur le décide, avec exonération de cotisations.
Une seule chose est claire dans cet article : vous êtes fermement décidés à ne pas toucher aux exonérations de cotisations sociales, qui ont pourtant un coût budgétaire de 32 milliards d’euros et qui sont une « trappe » à bas salaires puisqu’elles sont limitées à 1,6 SMIC et aux emplois aidés.
L’incitation réelle à une politique salariale dynamique suppose une volonté politique claire et sans faux-semblant.
Nous estimons qu’il n’est pas incompatible avec l’autonomie des partenaires sociaux de considérer que l’absence d’accord après trois années de négociation démontre un refus d’aboutir dont chacun doit mesurer les conséquences.
Nous proposons donc de pénaliser cette mauvaise volonté manifeste.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je ne vais pas revenir longuement sur des propos que j’ai déjà tenus, d’autant que vous savez, madame Alquier, qu’aussi bien à titre personnel qu’au nom de la commission je suis opposée à ce que l’on impose une obligation de conclure un accord salarial.
M. Guy Fischer. Toujours le même refrain !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Une telle obligation fausserait en effet totalement les rapports, d’un côté comme de l’autre, et porterait atteinte à l’autonomie des partenaires sociaux.
Nous faisons confiance à la responsabilité des chefs d’entreprise (protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)…
M. Guy Fischer. Toujours aux mêmes !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. …et à celle des syndicats, c'est-à-dire aux partenaires sociaux, et nous ne voulons pas créer une énième obligation.
Nous émettons donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Les dispositions relatives à la négociation annuelle obligatoire prévues à l’article L. 2242-8 du code du travail prévoient bien l’obligation de négocier, et non de conclure la négociation.
Si nous imposons une obligation de conclure, nous allons altérer la négociation entre les partenaires sociaux. Or notre but est d’assurer le bon déroulement de toute la négociation annuelle obligatoire, but qui, à mon sens, transcende les clivages politiques.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Bien sûr !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Comme cela a été dit en commission, il est manifeste que cette disposition peut être aisément détournée.
Dès lors que la loi ne prévoit pas l’obligation de parvenir, à un moment donné, à un résultat, il est en effet très facile de mettre, dans le dialogue social, des conditions rendant impossible la conclusion de tout accord.
Il est évident que les représentants syndicaux ont toujours intérêt à obtenir un accord, à obtenir un « plus », alors que les représentants de la direction de l’entreprise, ou le patron lui-même, peuvent en revanche avoir intérêt à créer des blocages, en introduisant dans la négociation des conditions inacceptables, par exemple une réduction des effectifs ou encore une augmentation colossale du nombre d’heures travaillées. Tout est imaginable !
J’estime donc, monsieur le secrétaire d'État, qu’en ne prévoyant pas de butoir vous créez un faux dialogue social.
Bien sûr, dans certaines entreprises, la négociation se passera bien, mais ce ne sera pas le cas dans toutes, et les dispositions que vous proposez n’auront alors pas plus d’effet qu’un coup d’épée dans l’eau, alors que l’obligation de parvenir à un résultat au bout de trois ans ne devrait pas être insurmontable.
Vous connaissez suffisamment bien le monde du travail, monsieur le président de la commission, pour savoir que rien n’est plus facile, lorsque l’on ne veut pas aboutir dans une négociation, que de poser les conditions de son échec.
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I. Compléter le second alinéa du I de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque, durant deux années consécutives, aucun accord salarial n'est conclu, la réduction est supprimée.
II. En conséquence, compléter le second alinéa du II, le dernier alinéa du III, le second alinéa du IV et second alinéa du V de cet article par la même phrase.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement est de la même veine que celui qui vient d’être présenté. Nous considérons en effet que l’obligation de conclure devrait être non pas une contrainte, mais l’une des règles du jeu dans la négociation salariale.
L’obligation pesant sur l’employeur doit avant tout concerner la conclusion d’un accord salarial. C'est la raison pour laquelle le défaut d’accord salarial durant deux années consécutives doit être sanctionné par la suppression de la réduction de cotisations accordée à l’entreprise.
Or l’article 4 vise à lier le bénéfice des exonérations patronales de sécurité sociale au respect de l’obligation de négociation annuelle sur les salaires : le non-respect de cette obligation pour l’année civile donnera lieu à une diminution de 10 % du montant de l’exonération, soit presque rien. C’est en somme tout à fait en phase avec la sensibilité de Mme le rapporteur : quand il s’agit des patrons, on se contente d’effleurer les questions, on leur fait confiance…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Aux syndicats aussi !
M. Guy Fischer. C’est d’autant plus grotesque que le problème concerne non pas tant la tenue effective de la négociation annuelle obligatoire que le résultat de cette négociation, car, comme l’a dit Jean-Pierre Godefroy, ce serait trop simple !
En effet, l’immense majorité des négociations annuelles obligatoires se concluent par un constat de carence. Ainsi, les employeurs remplissent leur obligation, tout en actant leur désaccord avec les salariés. C’est facile !
Il en résulte une situation profondément injuste : les entreprises bénéficient toujours d’exonérations, mais les salariés, eux, sortent des négociations sans avoir obtenu d’augmentation de salaire, alors que, dans la situation actuelle, on est là au cœur des préoccupations des Françaises et des Français.
Cette situation est dramatique pour nos comptes sociaux. En effet, si les salariés obtenaient des augmentations de salaire, les cotisations sociales prélevées sur ces salaires viendraient compenser les exonérations de cotisations sociales consenties aux entreprises. Or, dans les faits, ce n’est pas du tout ainsi que les choses se passent. Actuellement, c’est « gagnant-gagnant » pour l’entreprise, qui ne consent aucun effort en faveur des salariés et qui, de surcroît, bénéficie d’exonérations. En revanche, les salariés et les comptes sociaux sont les grands perdants de ce calcul.
C’est pourquoi nous proposons de réaffirmer l’obligation de négociation, en insistant sur le fait que c’est avant tout le résultat de cette négociation qui doit conditionner la réduction de cotisations accordées, et non la seule tenue de négociations. À défaut d’accord salarial durant deux années consécutives, il conviendrait de supprimer la réduction générale de cotisations patronales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pas totalement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement de nos collègues communistes est sous-tendu par la même logique que celui de nos collègues socialistes et appelle donc le même avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, avis défavorable.
Je comprends fort bien votre argumentation, monsieur Fischer, mais tout l’esprit de notre droit du travail et de notre droit de la négociation réside précisément dans la liberté des partenaires sociaux. Si le Gouvernement remet en cause cette liberté, c’est tout l’édifice qui va s’écrouler.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Bien sûr !
M. Guy Fischer. Mais non !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Monsieur Fischer, tout l’équilibre du droit de la négociation repose sur la liberté de négocier entre, d’une part, les syndicats, et, d’autre part, les employeurs.
M. Guy Fischer. Vous vous placez toujours du même côté !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Un petit retour en arrière me paraît nécessaire ! Il faut en effet se souvenir que ces exonérations sur les emplois à faible rémunération ont été consenties dans le seul but de favoriser l’embauche des moins diplômés et des moins qualifiés. Or on constate aujourd'hui qu’elles permettent aux employeurs de maintenir au même niveau les bas salaires et empêchent toute négociation dans les entreprises sur leur évolution.
Comme l’ont rappelé Guy Fischer et Jean-Pierre Godefroy, si les négociations annuelles sont en général entamées dans les entreprises, elles aboutissent souvent à des constats de carence, faute de parvenir à un accord salarial satisfaisant.
Si notre amendement vous semble trop rigide, il serait souhaitable de préciser au moins que ces négociations annuelles doivent aboutir à des augmentations de salaire, qu’un accord ait été ou non signé avec les partenaires sociaux, pour que l’entrepreneur, qui a la possibilité d’augmenter les salaires dans les deux cas, continue à bénéficier de l’exonération des cotisations.
À défaut, les dispositions du projet de loi ne serviront à rien, puisque, je le répète, la plupart des négociations obligatoires annuelles ont lieu de toute manière, mais ne se concluent pas. Si le texte précisait que les négociations annuelles obligatoires doivent aboutir à des hausses des salaires, peut-être accepterions-nous alors de suivre le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le secrétaire d'État, votre argumentaire serait recevable s’il s’agissait d’emplois « normaux », si vous me permettez ce qualificatif. Or je vous fais observer que, dans le cas qui nous occupe, de l’argent public est en jeu.
M. Jean Desessard. Absolument ! On en a besoin !
M. Jean-Pierre Godefroy. Actuellement, le montant des exonérations des charges sociales s’élève à environ 37 milliards d'euros, parmi lesquels 2 milliards d'euros ne sont pas intégralement compensés pour les caisses de sécurité sociale.
M. Jean Desessard. Qui va payer ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Dans la mesure où, je le répète, de l’argent public est en jeu, l’État est en droit de demander que les négociations annuelles obligatoires aboutissent à un résultat. C’est de bonne logique et les discours que nous entendons aujourd'hui sur toutes les stations de radio et toutes les chaînes de télévision devraient d’ailleurs nous inciter à aller dans ce sens.
Si les négociations annuelles obligatoires se soldent par un échec, eh bien ! les exonérations de charges sociales sont supprimées ! Je ne vois pas en quoi ce serait scandaleux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean Desessard. Cela paraît même de bon sens !
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article additionnel avant l'article 5
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les entreprises de plus de vingt salariés qui emploient plus d'un quart de leurs salariés en contrat à durée déterminée, en contrat de travail temporaire, en contrat de travail à temps partiel sont soumises à un forfait minimal de cotisations sociales patronales.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à créer un forfait minimal de cotisations sociales patronales en cas de recours excessif – plus d’un quart des salariés pour une entreprise de vingt personnes – aux contrats à durée déterminée, aux contrats à temps partiel et à l’intérim.
La part des personnes en situation de sous-emploi, au sens du Bureau international du travail, s’élevait à 1 444 000 personnes à la fin de l’année 2007. La hausse du nombre des personnes qui ont un travail à temps partiel subi ou qui sont au chômage entre deux emplois courts, est continue.
Cette situation pose aujourd’hui un grave problème social ; elle est à l’origine de la faiblesse du pouvoir d’achat que vous déclarez vouloir combattre, monsieur le secrétaire d'État.
Le présent amendement s’inspire du rapport d’information présenté au mois de juin dernier par notre collègue député Yves Bur, Vers une révision générale des exonérations de cotisations sociales, notamment de la proposition n° 8 : « Adapter le dispositif des allégements généraux afin de réduire le travail à temps partiel subi ».
Le rapporteur de l'Assemblée nationale suggère « d’instaurer, en deçà d’une durée donnée, un forfait minimal de cotisations patronales, créant une forte incitation à l’accroissement de la durée d’activité des salariés à temps très réduit, mais pénalisant considérablement les très faibles durées d’activité ». On ne saurait mieux dire !
Nous proposons donc, dans le droit fil de cette préconisation favorable au budget de la sécurité sociale, de créer ce forfait minimal, en l’appliquant aux formes les plus répandues de contrats précaires. (M. Jean Desessard applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à lutter contre toutes les formes de travail précaire, en créant un nouveau prélèvement à la charge des entreprises qui abuseraient du temps partiel et des CDD.
Cette proposition est intéressante, mais je ne suis pas sûre qu’elle trouve véritablement sa place dans ce texte. En outre, elle devrait faire l’objet d’une expertise plus approfondie. Quel serait le montant du forfait minimal ? Le seuil de 25 % est-il adapté ?
Pour ma part, j’estime qu’il s’agit d’un amendement d’appel. C'est la raison pour laquelle, en attendant de connaître l’avis du Gouvernement, la commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il s’agit d’un sujet important, auquel nous devons prêter toute notre attention : comment lutter contre le recours aux CDD, aux contrats de travail temporaire et aux contrats de travail à temps partiel ?
Il faut néanmoins faire attention aux caricatures. Dans un certain nombre de branches, le recours au travail à temps partiel peut correspondre à un souhait d’une partie des salariés, qui ont été consultés.
Dans ces conditions, que fait-on ?
L’idée qui est portée par le Gouvernement est d’ouvrir avant la fin de l’année, en lien avec Xavier Bertrand, une concertation avec les partenaires sociaux et les branches qui sont les principales utilisatrices du temps partiel, afin de remédier à cette situation ; je pense, par exemple, au secteur du service à domicile, où le temps partiel est très fréquent. Cela fera d’ailleurs l’objet d’un plan destiné à renforcer la pérennité des emplois dans le domaine des services à la personne, plan que je présenterai devant le Sénat.
Donc, pour répondre à l’importante question que vous posez, madame Printz, la voie que nous privilégions est celle de la concertation, qui devra être engagée avant la fin de l’année. Imposer maintenant un forfait minimal de cotisations sociales patronales de façon uniforme, sans prendre en compte la diversité des situations, ne me paraît pas la meilleure solution. En revanche, je suis entièrement d’accord avec vous : il faut ouvrir ce chantier.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Compte tenu des explications et des engagements de M. le secrétaire d'État à engager une réflexion approfondie sur cette question, je demanderai à mes collègues, à titre personnel, de voter contre cet amendement.
Je remercie nos collègues d’avoir mis ce sujet sur le devant de la scène.
M. Jean Desessard. Bien sûr !...
M. le président. Madame Printz, l'amendement n° 57 est-il maintenu ?
Mme Gisèle Printz. Oui, je le maintiens, monsieur le président.