M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 507.
(L'amendement n'est pas adopté.)
TITRE IER
MOBILISER LES ENTREPRENEURS
CHAPITRE IER
Instaurer un statut de l'entrepreneur individuel
Article 1er A
Le particulier employeur est un acteur économique et social à part entière qui participe à la croissance sans pour autant poursuivre de fin lucrative au moyen des travaux de son ou ses salariés.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 186 est présenté par M. Béteille, au nom de la commission.
L'amendement n° 323 est présenté par M. Godefroy, Mme Demontès, M. Raoul, Mmes Bricq et Khiari, MM. Repentin, Muller, Massion, Lagauche, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 451 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article
La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 186.
M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er A. Il est associé à un autre, que nous examinerons après l’article 5, qui transfère à la fin du chapitre Ier les dispositions que l’Assemblée nationale a instituées pour définir les particuliers employeurs.
Il s’agit de faire en sorte que le projet de loi débute par les articles traitant du régime fiscal et social des micro-entrepreneurs, conformément à l’intitulé du chapitre Ier.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour défendre l’amendement n°323.
M. Daniel Raoul. L’ajout de cet article n’apporte strictement rien en droit. Il s’agit d’un article purement déclaratif, rédigé de manière étrange et supposé permettre aux employeurs de salariés à domicile d’éviter la visite éventuelle d’inspecteurs du travail.
Que le particulier employeur poursuive ou non des activités lucratives en employant un ou des salariés, il est un employeur lié par une relation de travail à des salariés. Il convient de rappeler que, quelle que soit la forme du contrat entre les parties, qu’il soit écrit ou qu’il s’agisse d’un chèque emploi-service, le contrat existe.
Nous ne sommes pas ici dans le cadre de locaux de travail de type ateliers qui sont également habités. Il n’en demeure pas moins qu’un ou des salariés sont présents dans les locaux où ils effectuent un travail. Ces salariés sont évidemment couverts par le code du travail, ainsi que par la convention collective des employés de maison. Ils relèvent donc aussi de l’inspection du travail, qui a pour tâche de s’assurer de l’application des dispositions légales et conventionnelles.
Pour ce faire, l’inspecteur du travail a le droit de visite dans tout local où sont employés les salariés. S’agissant de locaux habités, la seule restriction est qu’il doit avoir obtenu l’autorisation d’y pénétrer par la ou les personnes qui les occupent. Le refus d’autoriser l’entrée doit être justifié. Á défaut, l’obstacle à contrôle est constitué et peut donner lieu à procès-verbal et à condamnation. La peine encourue est alors de 3 750 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement.
En résumé, sont à prendre en compte non pas les caractéristiques de l’employeur, mais le fait que des salariés travaillent, ce qui les place automatiquement sous le contrôle de l’inspection du travail, quel que soit le lieu où ils exercent leurs fonctions.
Dès lors, il appartient à l’inspection du travail de juger avec discernement de la manière dont elle doit opérer en cas d’information sur un cas particulier.
Je voudrais simplement ajouter, mes chers collègues, que les cas d’esclavage subi par des jeunes femmes dans des conditions abominables relèvent d’abord du droit pénal. Permettez-moi de rappeler que les conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité de la personne sont punies de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende aux termes des articles 225-13 et suivants du code pénal.
Il ne nous semble donc pas qu’il y ait lieu de modifier cet arsenal juridique qui protège les salariés quels que soient leur lieu de travail et le caractère, lucratif ou non, des activités de leur employeur.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° 451.
M. Thierry Foucaud. S’il fallait trouver une bonne raison de relever quelques défauts au texte qui risque de nous occuper pendant quelques heures cette semaine, cet article 1er A en fournit un intéressant exemple.
Ainsi donc, si cette loi est promulguée en l’état, la quintessence de la modernisation de l’économie, ce serait le développement régulier, constant et harmonieux de l’emploi à domicile, par la création d’un véritable statut de l’employeur familial.
Là est sans doute marquée la première des frontières qui oppose la conception étrange de la modernité et celle que, bardés que nous serions de nos certitudes idéologiques, nous avons tendance à défendre.
On nous dira, bien entendu, que cet article fait l’objet d’un consensus. Il procède d’un amendement déposé par Mme Vautrin, députée de la Marne, et accepté par la commission et le Gouvernement. Le consensus pourrait venir de l’exposé des motifs, susceptible d’être partagé par tout ou partie des membres de notre Haute Assemblée.
Le seul léger problème, dans cette affaire-là, c’est qu’au-delà de la déclaration de principe cet article ne contient rien qui ait la moindre valeur législative et normative, ce que n’a pas manqué de souligner un député, lors du débat à l’Assemblée nationale, en indiquant à l’auteur de l’amendement : « J’ai beaucoup de respect pour ce que vous faites généralement dans cet hémicycle, madame Vautrin, mais votre amendement ne sert à rien. Il n’a aucune portée normative et se contente d’évoquer le fait qu’il y a de nouveaux acteurs économiques à part entière, ceux qui emploient des personnels à domicile. Une telle déclaration d’intention sans portée normative va encombrer la loi pour rien. Je m’étonne d’ailleurs que le président Ollier ne l’ait pas souligné, lui qui est si attaché à ce que nous légiférions de façon précise et concise.
« Il y a aujourd’hui 1,6 million de salariés concernés, ce qui n’est tout de même pas rien. Ce sont le plus souvent des gens qui travaillent à plein temps, qui acquièrent des qualifications et ont besoin d’une forme de reconnaissance garantissant une qualité de service à ceux auprès de qui ils remplissent leur mission.
« Notre objectif est de les considérer comme des professionnels à part entière, qui sont donc des employeurs à part entière. Du même coup, cela leur donne les droits qui existent encore un peu dans ce pays tant qu’il subsiste un code du travail, même s’il a été quelque peu amendé et diminué, le droit de discuter, par exemple, ou de passer un contrat ».
Sans revenir sur le propos de notre collègue socialiste au sujet de l’inviolabilité du domicile, il est vrai qu’à un moment donné l’inspecteur du travail ne pourrait pas rentrer. Dès lors, cela signifie-t-il que ni ces employeurs ni leurs salariés ne seraient concernés par le code du travail ? Une telle éventualité paraîtrait inacceptable.
De surcroît, une bonne part de ce qui est aujourd’hui confié au seul réseau de l’emploi à domicile devrait être pleinement assumée par la collectivité au travers d’un véritable service public, notamment en matière d’assistance aux personnes âgées et de prévention de la dépendance.
Au bénéfice de ces observations, je ne peux que vous inviter à adopter cet amendement de suppression d’un article de pur affichage, qui ne règle aucun des problèmes posés par le développement d’emplois, au demeurant largement marqués par la précarité et la faiblesse des rémunérations.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 186 présenté par M. le rapporteur Béteille et un avis défavorable sur les amendements nos 323 et 451 : les auteurs de ces derniers se contentent de supprimer l’article, alors que M. Béteille replace cet article dans le corps du texte, après l’article 5 quater.
Je considère que la définition dans la loi du particulier employeur est très importante. Voilà des années que cette profession évolue, se développe et il est temps que le législateur s’y intéresse.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 186, 323 et 451.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence l’article 1er A est supprimé.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 539, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 235 ter C du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art.... - À compter du 1er septembre 2008, les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation des hydrocarbures ou de distribuer les produits issus de cette transformation, sont assujetties à une contribution égale à 45 % de l'impôt sur les sociétés calculée sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au I et IV de l'article 219. »
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Il y a quelques semaines, lors des questions d’actualité, mon collègue et ami Gérard Le Cam vous a interrogée, madame la ministre, sur ce que comptait faire le Gouvernement afin de faire face à la flambée des prix de l’énergie, en général, et du pétrole, en particulier.
« L’impatience », comme vous aimez à le dire, de nombreux professionnels tels que les routiers, les chauffeurs de taxi, les marins-pêcheurs, les agriculteurs, les ambulanciers, les infirmiers, les services à domicile, et de l’ensemble de nos concitoyens qui ont de plus en plus de mal à vivre de leur travail, prenait des allures de révolte.
Cette révolte est légitime quand on sait que les Français subissent de plein fouet les répercussions des hausses sur les produits alimentaires et doivent payer toujours plus cher leurs dépenses vitales. Car la flambée des prix du pétrole organisée par toutes les formes de spéculation est un prétexte pour augmenter les prix des matières premières, du transport et des autres énergies telles que le gaz, indexé abusivement sur le pétrole.
Cette situation, qui précarise un peu plus ceux qui sont le plus en difficulté, ne peut plus durer. En effet, les populations qui vivent à la périphérie des villes en raison, notamment, des loyers prohibitifs des centres-villes et les populations rurales n’ont le plus souvent pas d’autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler. Elles subissent donc encore davantage les effets des prix exorbitants à la pompe. Le désengagement chronique de l’État dans le transport public et la désertification organisée du territoire en matière de service public aggravent encore cette situation.
Pour répondre à nos inquiétudes sur cette question centrale, c’est M. le secrétaire d’État Laurent Wauquiez qui a expliqué très doctement qu’au titre des mesures concrètes le Gouvernement avait prévu l’application d’un tarif de première nécessité pour l’électricité et d’un tarif social de solidarité pour le gaz. Nous aurions espéré un peu plus de retenue et de décence de la part du Gouvernement quand on sait que ces tarifs interviennent après la mise à mal du service public de l’énergie et la remise en cause de la péréquation tarifaire.
En réalité, ni vos discours ni vos campagnes publicitaires ne parviennent plus à occulter l’incurie du Gouvernement qui, en matière de pouvoir d’achat, est patente.
Ainsi, vous nous avez annoncé l’augmentation de la prime à la cuve, augmentation que nous demandons depuis des mois et qui arrive seulement aujourd’hui. Vous présentez cette mesure comme un effort sans précédent des acteurs concernés. Permettez-nous de relativiser la générosité de Total, qui consent à cette mesure moins de 1 % de ses bénéfices, soit 102 millions d’euros, alors que la même société a gaspillé, en 2007, 1,8 milliard d’euros pour racheter ses propres actions. Depuis 2004, le groupe aura dilapidé près de 40 % de ses résultats nets en dividendes et en rachats d’actions.
De plus, la participation de Total est réellement dérisoire quand on sait qu’elle est totalement déductible. C’est un beau coup de publicité à moindre frais.
Il est donc temps d’agir et de trouver des solutions tant du côté de l’État que des compagnies pétrolières. Ces solutions existent, mais, sauf erreur de ma part, il manque la volonté politique pour les mettre en œuvre.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons, par cet amendement très moderne, en ce sens qu’il tient parfaitement compte des évolutions récentes, la mise en place d’une véritable taxe sur les profits des sociétés pétrolières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement tend à créer un nouvel impôt sur la transformation et la distribution des hydrocarbures. On peut se demander si c’est vraiment le moment…
Quoi qu’il en soit, nous pensons que cette mesure trouvera mieux sa place dans la discussion budgétaire : elle est totalement étrangère aux objectifs qui sous-tendent ce projet de loi.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 539.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cet amendement consiste à mettre à la charge des entreprises pétrolières une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés égale à 45 % de cet impôt.
Certes, le Gouvernement est très attentif aux difficultés que pose à nos concitoyens la montée des prix de l’énergie. Vous vous en souvenez, il a créé, sur l’initiative de Mme Lagarde, en faveur des ménages les plus modestes, une prime à la cuve, dont le financement a été assuré par une taxe exceptionnelle à la charge des entreprises pétrolières correspondant à une fraction de la provision pour hausse des prix inscrite à leur bilan.
Un versement alternatif à cette taxe et libératoire de celle-ci auprès du fonds social pour le chauffage des ménages a par ailleurs été mis en place, permettant ainsi aux entreprises pétrolières de financer directement la prime à la cuve destinée aux foyers les plus modestes.
De plus, dans le cadre du processus de concertation et de réflexion commune engagé entre le Gouvernement et les entreprises pétrolières, mené sous l’égide du ministre de l’économie, l’entreprise Total s’est engagée récemment à renouveler en 2008 sa contribution au financement de la prime à la cuve et à réfléchir, avec les autres pétroliers, afin de la porter de 150 à 200 euros par foyer.
Dans ces conditions, il ne nous paraît pas souhaitable de multiplier des dispositifs sur cette même question de la contribution des entreprises pétrolières aux difficultés rencontrées par nos concitoyens du fait de la hausse des prix du pétrole.
Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 539.
M. le président. L’amendement n° 508, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de contribuer à l’objectif gouvernemental affiché de revalorisation du pouvoir d’achat, le gouvernement organise un Grenelle des salaires, reposant sur une négociation entre les représentants syndicaux, patronaux et l’État. Il se conclura par la négociation d’accords de branche et d’accords d’entreprises avant le 1er novembre 2008.
En vue de la tenue d’une conférence sociale tripartite sur les salaires, d’ici le 31 décembre 2008, dans chaque branche les partenaires sociaux doivent avoir engagé et conclu des accords portant revalorisation des minima salariaux au niveau du salaire minimum interprofessionnel de croissance.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Notre amendement tend à obtenir du Gouvernement l’organisation rapide d’un Grenelle des salaires.
D’année en année, les salaires stagnent, le pouvoir d’achat diminue. La précarité salariale liée au développement du travail en intérim et du travail à temps partiel s’accroît.
La France est désormais un pays de bas salaires et si le Gouvernement et la majorité poursuivent leur politique de casse du code du travail et de la solidarité nationale, elle deviendra aussi un pays à population pauvre.
De plus en plus de personnes ne peuvent déjà plus assurer la satisfaction de leurs besoins élémentaires. Dans ces familles, la moindre difficulté, le moindre accident de parcours mène au surendettement, avec toutes les conséquences extrêmement lourdes que l’on connaît. Ces familles voient, ces jours-ci, partir les vacanciers ; elles n’en seront pas, elles ne peuvent pas en être ! C’est le cas, par exemple, des caissières de la grande distribution – objet de ce projet de loi – qui, travaillant à temps partiel, ne disposent pas toujours d’un SMIC pour vivre. Je pense aussi à certains fonctionnaires – car les fonctionnaires ne sont pas ces privilégiés que vous montrez du doigt – qui, une fois à la retraite, disposent d’un revenu qui n’atteint pas 1000 euros par mois.
Mais, aujourd’hui, les travailleurs modestes ne sont plus les seuls touchés. Nous assistons à la précarisation d’une partie des classes moyennes, qui doivent faire face à l’augmentation galopante des dépenses courantes : loyers, énergie, carburants notamment.
Pourtant, on le sait bien, le plus souvent, les entreprises souffrent non pas d’un manque de moyens pour augmenter les salaires, mais d’un appétit de profits toujours plus grand.
En réponse aux députés, vous avez rappelé que le niveau des salaires dépendait de l’allégement des charges des entreprises. Autrement dit, vous faites payer leurs éventuelles augmentations de salaires par les salariés eux-mêmes, puisque vous les financez en rognant sur la solidarité nationale.
Vous insistez aussi sur la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires pour compléter un revenu insuffisant, aux termes de la loi TEPA, mais ce sont les entreprises qui en décident. De plus, la plupart des salariés à temps partiel – les caissières de la grande distribution, notamment – aimeraient bien travailler plus, c’est-à-dire à plein temps.
Face à cette situation, quelles réponses apportez-vous ? Le pays ne s’est jamais aussi bien porté que lorsque ses salariés ont pu vivre avec la sécurité d’un travail et d’un salaire appelé à progresser. Il ne s’est jamais aussi bien porté que lorsque les salariés pouvaient être convaincus que leurs enfants vivraient mieux qu’eux. Aujourd’hui, c’est l’inverse : le pays régresse.
Une économie moderne se doit de rémunérer les salariés de façon satisfaisante. Car, quoi qu’en disent certains dans cet hémicycle, le salaire et la justice sociale sont des éléments fondamentaux de la modernité.
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à adopter notre amendement n° 508.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement enjoint au Gouvernement d’organiser un Grenelle des salaires. À ce titre, il est à la fois contraire à la Constitution et étranger au périmètre du projet de loi.
Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet le même avis que M. le rapporteur.
Je rappelle que l’objectif du Gouvernement est de ne pas rester inactif en matière de rémunérations. Le 23 octobre 2007, Christine Lagarde a tenu une conférence sur l’emploi et le pouvoir d’achat avec les partenaires sociaux. À l’issue de cette conférence, les partenaires sociaux ont été consultés sur la possibilité de faire dépendre les allégements de cotisations sociales des résultats de la négociation salariale afin de redynamiser les salaires.
Le projet qui est envisagé prévoit, notamment, la perte d’une part des allégements généraux de charges pour les entreprises qui refuseraient de négocier, alors qu’elles sont soumises à l’obligation de le faire une fois par an. De même, dans les branches dont les minima sont inférieurs au SMIC, le montant des allégements de charges accordés aux entreprises sera diminué si aucune amélioration de la grille salariale n’est observée d’ici à 2010.
Comme vous le voyez, le Gouvernement ne reste pas inactif : il concrétise les engagements pris devant les Français en matière de salaires et de pouvoir d’achat, tout en privilégiant la concertation avec les partenaires sociaux, car c’est elle qui prime.
Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, cette explication de vote vaudra pour les amendements nos 539, 508 et 510 déposés par nos collègues du groupe CRC.
L’amendement n° 539 n’a pas sa place dans ce projet de loi, mais, sur le fond, il faudra y revenir lors de la discussion de la loi de finances pour 2009.
Quant à l’amendement n° 508, il est effectivement inconstitutionnel, car il impose une contrainte au Gouvernement. Cependant, même s’il n’est pas recevable pour des raisons de forme, cet amendement pose bien le problème du rôle des syndicats dans la négociation globale que devrait mener le Gouvernement et, en particulier, Xavier Bertrand.
L’amendement n° 510 prévoit la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement avant le 31 octobre 2008 sur les conséquences de la très faible revalorisation du salaire minimum interprofessionnel de croissance. Ce rapport risquerait de couper l’herbe sous le pied des syndicats et empiéterait sur leur rôle dans la négociation qui doit intervenir avec Xavier Bertrand.
Notre groupe s’abstient donc sur ces trois amendements soit pour des raisons de forme, soit parce qu’il considère qu’il s’agit d’amendements d’appel.
M. le président. L’amendement n° 510, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport avant le 31 octobre 2008 sur les conséquences de la très faible revalorisation du salaire minimum interprofessionnel de croissance ces dernières années sur le pouvoir d’achat des salariés à revenu modeste.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Peut-être jugerez-vous cet amendement irrecevable parce qu’il prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 31 octobre 2008, un rapport sur les conséquences pour le pouvoir d’achat des salariés à revenu modeste de la très faible revalorisation du SMIC intervenue ces dernières années.
Ce rapport s’avère d’autant plus nécessaire – la date prévue est, certes, un peu rapprochée – que, lors du dernier conseil des ministres, le Gouvernement a confirmé la perspective d’un projet de loi portant sur la fixation du SMIC, mais aussi, en matière de salaires – alliance emblématique de la politique gouvernementale – sur le développement des primes d’intéressement. Nous pensons que le Gouvernement aura à cœur d’inscrire ce projet de loi très rapidement à l’ordre du jour des assemblées, certainement dès le début de la session ordinaire !
La politique du Gouvernement et de la majorité continue de favoriser ce qui est devenu un engrenage entre un SMIC non revalorisé, des salaires de plus en plus bas et une inflation galopante.
Le candidat Nicolas Sarkozy avait pourtant déclaré : « Les salaires sont trop bas dans notre pays. Je demanderai aux entreprises de faire un effort sur les salaires, car l’État fait lui-même un effort sur les allégements de charges ».
Si la deuxième partie de l’équation est vraie – les entreprises continuent de se voir délestées de l’obligation de contribuer à la solidarité nationale – l’État montre, en procédant une nouvelle fois à une faible revalorisation du SMIC, sans même accorder ce que l’on a coutume d’appeler « un coup de pouce « , qu’il n’entend pas faire participer les entreprises à l’augmentation générale des salaires, en particulier des plus bas.
Le niveau du SMIC ne sera relevé que de 0,9 % le 1er juillet 2008, c’est-à-dire aujourd’hui même, après une revalorisation anticipée de 2,3 % en mai – du jamais vu, certes, depuis 1996 – due non pas à la générosité du Gouvernement, mais à la très forte inflation. Les salariés payés au SMIC n’auront droit qu’à une progression de leurs revenus de 3,2 % par rapport à l’an dernier. Est-ce ainsi que les salariés modestes vont pouvoir vivre décemment ? Ces salariés sont très nombreux : ceux que concerne l’augmentation du SMIC sont 2,5 millions actuellement, dont 900 000 personnes travaillant à temps partiel.
Le secrétaire d’État chargé de l’emploi ne nous rassure pas quand il dit, à propos de son projet de loi : « On a mis en place un système qui permet d’objectiver [le niveau du SMIC] avec des économistes qui feront des évaluations, un groupe de travail qui est technique et administratif [...]. On a un processus de décision, on regarde l’inflation, on regarde les perspectives salariales et il y a des recommandations qui sont faites ».
Il ne nous rassure pas non plus quand il ajoute : « Ne retombons pas dans les vieilles errances où le politique fait semblant de faire des cadeaux qui sont en fait des chèques en blanc ». Le « chèque en blanc » de mai s’est résumé à moins d’un euro par jour !
Aujourd’hui, des travailleurs pauvres, des salariés qui ne parviennent plus à joindre les deux bouts, à se nourrir, à se loger correctement, sont en progression constante dans notre pays.
Dans son Livre blanc de 2006, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, la FNARS, indiquait que 21 % des personnes hébergées dans ses structures en Île-de-France travaillaient ; cette proportion était de 42 % dans les Centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS. Voilà où conduit une politique de bas salaires.
Vous persistez à affirmer que le coût du travail est le principal frein à l’embauche. En même temps, vous continuez de supprimer emplois et services publics, alors que les services de proximité sont non seulement plus accessibles, mais aussi moins coûteux.
Vous déremboursez les médicaments et, si vous avez fait le choix de financer le revenu de solidarité active, le RSA, c’est au détriment de la prime pour l’emploi.
Parallèlement, on apprend que, selon les chiffres communiqués par Bercy, le bouclier fiscal a bénéficié à près de 15 000 foyers fiscaux, qui ont reçu chacun, en moyenne, 16 000 euros. Bravo !
Dans ces conditions, le rapport que nous demandons ne pourrait qu’aider à une meilleure prise en compte des réalités et fournirait sans doute un terreau fertile aux négociations avec les organisations syndicales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Béteille, rapporteur. Le rapporteur pourrait faire siennes une grande partie des observations de M. Raoul sur cet amendement.
Pour le reste, je l’ai dit tout à l’heure, la commission n’est pas favorable à la production de rapports. Elle proposera d’ailleurs d’en supprimer un certain nombre qui ont été introduits dans ce projet de loi par l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, cet amendement sort du périmètre du projet de loi, qui traite de la mobilisation des entrepreneurs.