Sommaire
Présidence de M. Christian Poncelet
2. Fin de mission d'un sénateur
3. Demande de l'avis d'une commission
5. Organismes génétiquement modifiés. – Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire.
Discussion générale : M. Jean Bizet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie ; MM. Yves Détraigne, Daniel Raoul, Michel Billout, Jacques Muller.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Paul Girod.
Adoption définitive, par scrutin public, du projet de loi.
MM. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques ; Mme la secrétaire d'État, M. le président.
6. Candidatures à une commission mixte paritaire
Suspension et reprise de la séance
7. Résolution du Sénat sur le secteur des communications électroniques
8. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
10. Opérations spatiales. – Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture.
Discussion générale : Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ; MM. Henri Revol, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Daniel Raoul.
Mme la ministre.
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 1 de M. Daniel Raoul. – M. Daniel Raoul, Mme la ministre. – Retrait.
Adoption de l'article.
Articles 6, 7, 11, 13, 14, 21, 22, 24, 28 et 30. – Adoption
M. Jacques Gautier.
Adoption définitive du projet de loi.
11. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Christian Poncelet
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Fin de mission d'un sénateur
M. le président. Par lettre en date du 15 mai, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter de ce jour, 22 mai 2008, de la mission temporaire sur le stationnement des gens du voyage confiée à M. Pierre Hérisson, sénateur de la Haute-Savoie, auprès de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 297 du code électoral.
Acte est donné de cette communication.
3
Demande de l'avis d'une commission
M. le président. Par lettre en date du 21 mai 2008, M. le Premier ministre m’a demandé de lui faire connaître, conformément à l’article 2 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, l’avis de la commission compétente du Sénat sur le projet de nomination de M. Jean-Marie Delarue aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Cette demande d’avis a été transmise à la commission des lois.
Acte est donné de cette communication.
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Conférence des présidents
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 22 mai 2008
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30 :
1°) Conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (n° 335, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.)
À 15 heures :
2°) Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif aux opérations spatiales (n° 272, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les délais limite pour le dépôt des amendements et pour les inscriptions de parole sont expirés.)
Mardi 27 mai 2008
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
- Projet de loi relatif à la responsabilité environnementale (Urgence déclarée) (n° 288, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 26 mai 2008, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 26 mai 2008.)
Mercredi 28 mai 2008
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la responsabilité environnementale.
Jeudi 29 mai 2008
Éventuellement, à 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1°) Suite du projet de loi relatif à la responsabilité environnementale ;
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3°) Suite éventuelle du projet de loi relatif à la responsabilité environnementale.
Mardi 3 juin 2008
À 10 heures :
1°) Questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 217 de M. Philippe Richert transmise à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité (Transfert aux collectivités des agents de l’État affectés au service du RMI) ;
- n° 241 de Mme Patricia Schillinger à Mme la garde des Sceaux, ministre de la justice (Situation des maisons d’arrêt de Colmar et de Mulhouse, dans le Haut-Rhin) ;
- n° 245 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à M. le ministre de l’éducation nationale (Devenir des conseillers principaux d’éducation) ;
- n° 246 de M. Robert Laufoaulu à M. le ministre de l’éducation nationale (Orientations et décisions prises par le vice-rectorat de Wallis et Futuna) ;
- n° 247 de Mme Anne-Marie Payet à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche (Présence élevée de pesticides dans le vin) ;
- n° 248 de M. Georges Mouly à M. le ministre de l’éducation nationale (Avenir des réseaux d’aide à la scolarité des élèves en difficulté, RASED) ;
- n° 249 de M. Daniel Reiner à M. le ministre de la défense (Projet de fermeture du 53ème régiment de transmissions de Lunéville) ;
- n° 251 de M. Pierre Bordier à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (Réglementation concernant les véhicules anciens) ;
- n° 253 de M. Yves Krattinger à M. le ministre de la défense (Devenir de la base aérienne 116 de Luxeuil-les-Bains) ;
- n° 257 de M. Alain Fouché à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi (Pérennisation du financement de l’État concernant les maisons de l’emploi) ;
- n° 258 de M. Laurent Béteille à M. le ministre de l’éducation nationale (Taux d’encadrement dans la mise en œuvre du service minimum d’accueil des élèves) ;
- n° 259 de M. Gérard Bailly à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative (Statistiques et contrôle des arrêts de travail) ;
- n° 260 de M. Jean-Pierre Godefroy à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité (Calcul de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante).
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
2°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, portant diverses dispositions d’adaptation du droit des sociétés au droit communautaire (n° 314, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 2 juin 2008, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 2 juin 2008.)
3°) Projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale (n° 308, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 28 mai 2008, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 2 juin 2008.)
Mercredi 4 juin 2008
Ordre du jour réservé
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
1°) Proposition de loi, présentée par MM. Jean-Pierre Bel, Bernard Frimat et les membres du groupe socialiste et apparentés, relative aux conditions de l’élection des sénateurs (n° 322, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 juin 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 3 juin 2008.)
2°) Conclusions de la commission des lois sur la proposition de résolution, présentée par M. Jean-Jacques Hyest, tendant à actualiser le règlement du Sénat afin d’intégrer les sénateurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin dans les effectifs des commissions permanentes (n° 345, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 juin 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à un quart d’heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 3 juin 2008.)
3°) Proposition de loi, présentée par MM. Jean-François Humbert, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Christian Demuynck, Alain Dufaut, Jean-Paul Émin, Bernard Fournier, Jacques Legendre, Mmes Colette Mélot, Monique Papon et MM. Philippe Richert et Jacques Valade, visant à encadrer la profession d’agent sportif et modifiant le code du sport (n° 310, 2007 2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 juin 2008, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 3 juin 2008.)
Jeudi 5 juin 2008
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30 :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes (n° 283, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 juin 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 4 juin 2008.)
À 15 heures :
2°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, portant réforme de la prescription en matière civile (n° 323, 2007 2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 juin 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.)
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 3 juin 2008.)
3°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant modernisation du marché du travail.
Mardi 10 juin 2008
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République (A.N., n° 820) ;
(La conférence des présidents a :
- fixé au lundi 9 juin 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- fixé à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 9 juin 2008.)
Mercredi 11 juin 2008
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République.
Jeudi 12 juin 2008
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1°) Suite du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3°) Suite du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République.
Éventuellement, vendredi 13 juin 2008
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
5
Organismes génétiquement modifiés
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (n° 335).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Bizet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne puis m’empêcher de vous rappeler que c’est ici, au Sénat, que tout a commencé. C’est également ici que tout va s’achever si, comme je l’espère, la Haute Assemblée vote le texte que nous avons élaboré en commission mixte paritaire la semaine dernière.
C’est en effet le Sénat qui a eu l’honneur et le redoutable privilège d’entamer le processus législatif sur ce dossier des OGM, les organismes génétiquement modifiés. Cela remonte en réalité à plus de deux ans, lorsque notre Haute Assemblée a adopté en première lecture un premier projet de loi sur les OGM. Nous avons également été la première assemblée saisie pour cette nouvelle version du texte, qui a fait l’objet de deux lectures dans chaque chambre.
C’est pourquoi je ne vous cacherai pas mon étonnement lorsque j’entends certains, en particulier nos collègues députés de l’opposition, parler de précipitation dans l’adoption de ce texte. Bien plus que d’une course de vitesse, il s’est agi en réalité pour le Parlement d’un véritable marathon.
Les travaux de notre commission des affaires économiques sur cette question ont débuté il y a près de dix ans, avec un premier rapport d’information qui m’avait été confié.
Nous avons ensuite approfondi notre réflexion dans le cadre d’une mission d’information de dix-huit mois, dans laquelle tous les groupes du Sénat étaient représentés comme il se doit, dont le rapporteur était notre collègue M. Jean-Marc Pastor. Je tiens d’ailleurs à souligner une nouvelle fois la qualité de son travail et des échanges que nous avions eus à cette occasion. Je veux également insister sur le fait que les conclusions de cette mission d’information avaient été adoptées à l’unanimité des membres de la commission des affaires économiques. C’était il y a cinq ans presque jour pour jour.
Si je reviens quelques années en arrière, c’est parce qu’il me semble indispensable de réaffirmer que le dialogue serein sur les OGM est possible en France, et que le Sénat l’avait initié. Certes, je dois reconnaître qu’une partie de cette sérénité a disparu depuis cette époque. Mais vous me permettrez d’observer avec un peu de malice que le Sénat a préservé cet esprit républicain et courtois.
Pour en revenir au projet de loi qui nous est soumis, je me permettrai de rappeler brièvement l’importance du travail accompli.
Partant de treize articles, le texte a été enrichi au cours de la navette parlementaire puisqu’il en compte maintenant vingt-et-un. Je voudrais à ce stade saluer le travail de l’Assemblée nationale, en particulier celui du rapporteur, M. Antoine Herth, dont la compétence a été reconnue sur tous les bancs de l’Assemblée nationale, et celui du président de la commission des affaires économiques, M. Patrick Ollier, à qui il est revenu notamment de présider avec beaucoup de justesse et de courtoisie la commission mixte paritaire qui s’est tenue la semaine dernière.
M. Daniel Raoul. N’en faites pas trop !
M. Jean Bizet, rapporteur. Sans vouloir aucunement nourrir des polémiques qui n’ont pas lieu d’être, je me permets de regretter qu’une motion de procédure ait abrégé trop brutalement la seconde lecture de l’Assemblée nationale. J’observe simplement qu’il est quelque peu paradoxal de réclamer qu’un texte ne fasse pas l’objet d’une procédure d’urgence et de voter ensuite des motions de procédure pour réduire une seconde lecture à sa portion congrue. Je me félicite donc, d’autant plus, que le président Patrick Ollier ait laissé au débat une place plus large qu’à l’accoutumée lors de la réunion de la commission mixte paritaire, qui a duré plus de deux heures.
Naturellement, je ne vous détaillerai pas le contenu du projet de loi, et ce d’autant moins que le texte que propose la commission mixte paritaire correspond exactement à celui adopté par le Sénat le 16 avril dernier. Je voudrais simplement réaffirmer ma conviction que le dispositif législatif s’inscrit dans un contexte juridique, défini par la législation européenne, un contexte économique, défini par la concurrence mondiale sur le marché agricole, et – ne l’oublions jamais ! – nos engagements dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, ainsi que, enfin, dans un cadre environnemental, ce qui nous renvoie notamment au projet de loi relatif à la responsabilité environnementale, que nous avons examiné en commission des affaires économiques hier matin.
Je me dois de rappeler à nouveau que, du fait du retard de transposition de la directive européenne, nous sommes menacés par une amende de 38 millions d’euros et une astreinte de 360 000 euros par jour à partir du 5 juin. C’est tout de même une réalité qu’il faut garder à l’esprit !
J’en reviens au fond du texte.
Même si nous n’avons pas élaboré la loi fondatrice sur les biotechnologies, que notre commission appelait de ses vœux dès 2003 et que je sais chère à nos collègues Jean-Marc Pastor et Daniel Raoul, du moins avons-nous défini avec ce projet de loi un texte d’équilibre qui respecte les uns et les autres, qu’ils veuillent produire et consommer avec ou sans OGM.
Sans vouloir être plus long, je voudrais en conclusion vous faire part de ma conviction et de mon espoir que, avec le temps, ce dossier se dépassionnera.
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Jean Bizet, rapporteur. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, il me semble que les générations futures regarderont nos débats avec étonnement et parfois même avec incompréhension quant au niveau de passion qui a été atteint dans ce dossier.
Mes chers collègues, le texte qui vous est soumis n’est pas parfait, mais quel texte complexe peut prétendre à la totale perfection ? Il constitue du moins, me semble-t-il, le meilleur point d’équilibre auquel la représentation nationale pouvait parvenir dans le contexte actuel. C’est pourquoi je vous appelle résolument à adopter ce projet de loi et à doter enfin la France du cadre juridique dont elle a besoin dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne serai guère longue tant les nombreuses heures de discussion parlent d’elles-mêmes.
Nous voilà donc parvenus au terme d’un débat parlementaire particulièrement passionné. Ce n’est pas par hasard puisque, parmi tous les sujets abordés dans le cadre du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement a choisi, conformément à ses engagements, de commencer par l’un des plus difficiles, si ce n’est le plus difficile.
Il a choisi d’aller au bout des interrogations, sans chercher à les dissimuler. Tous les arguments ont donc été entendus et chacun a pu se forger une opinion.
Nous avons pris le temps de débattre. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, le Gouvernement a ainsi renoncé à déclarer l’urgence. Dans ces conditions, les débats parlementaires ont permis l’adoption de quelque 180 amendements, et c’est un bel exercice de notre vie démocratique. Qui pourrait regretter que ce texte de loi soit devenu celui du Parlement tout autant que celui du Gouvernement ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi simplement de rappeler aux législateurs avisés qui composent votre assemblée que seul ce texte permettra de sortir d’une situation de vide juridique.
Est-il normal que les agriculteurs dont la récolte est refusée parce qu’elle contient des traces accidentelles d’OGM ne correspondant pas à leur contrat d’approvisionnement n’aient aucune possibilité d’indemnisation rapide ? Et Michel Barnier, ministre de l’agriculture et de la pêche, ici présent, qui a participé avec Jean-Louis Borloo et moi-même aux débats, ne me contredira sûrement pas !
Est-il normal que les maires eux-mêmes ne connaissent pas la localisation des parcelles d’OGM sur leur propre commune ?
À ces questions, à ces problèmes, le projet de loi apporte une réponse.
Ce texte permettra également de relancer la recherche, capitale, sur les biotechnologies.
M. Charles Revet. C’est important !
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Nous avons des doutes sur le Monsanto 810. C’est pourquoi le Président de la République a décidé, au mois de janvier, de faire jouer la clause de sauvegarde sur ce seul OGM commercial cultivé en France. Cette décision n’était pas facile, mais elle était fidèle à l’esprit et à la lettre du Grenelle de l’environnement, comme il le rappelait encore ce mardi à Orléans dans un discours sur le développement durable.
Nous avons des doutes, mais ils n’entachent pas une technologie tout entière porteuse d’espoir.
La France doit rester présente. C’est pourquoi 45 millions d’euros supplémentaires seront consacrés à la recherche en trois ans.
Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avions l’obligation de transposer une directive adoptée du temps du gouvernement de M. Jospin.
M. Charles Revet. Eh oui !
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. À défaut, la France devra payer 38 millions d’euros à titre de sanction, auxquels s’ajouteront 360 000 euros par jour d’astreinte. Au seuil de la présidence française de l’Union européenne, quel crédit aurions-nous ?
Cependant, le Gouvernement n’entend pas en rester là puisqu’il pèse actuellement de tout son poids pour modifier la procédure européenne, tant il considère que la directive ne représente pas un cadre parfait.
Jean-Louis Borloo a fait part au Conseil « Environnement » du mois de mars des réserves de la France et a été soutenu par quatorze États membres.
La Commission doit nous nous donner son avis sur ces réserves au mois de juin. Nous travaillerons, lors de la présidence française, de façon à proposer des modifications du cadre européen de la culture d’OGM, qui nous permettent d’être en cohérence complète avec les engagements du Grenelle et de répondre à toutes les questions qui ont été soulevées par les députés ainsi que par les sénateurs à l’occasion des débats parlementaires.
Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, nous vous appelons aujourd'hui à voter en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je me réjouis que nous parvenions enfin au terme de l’examen de ce projet de loi.
La navette parlementaire s’est apparentée plus à une course d’obstacles qu’à une véritable discussion de fond et j’avoue avoir plus d’une fois douté que nous puissions finalement adopter ce texte.
Les conditions d’examen, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, n’ont pas été optimales : cela a commencé par le retrait du texte de l’ordre du jour en première lecture et par un calendrier mouvant d’une semaine sur l’autre, pour en finir par cette discussion des conclusions de la commission mixte paritaire, sans parler des crises politiques à répétition !
Si ces péripéties nuisent à l’exercice serein du travail parlementaire, elles ont surtout un effet désastreux dans l’opinion publique.
Décider d’interdire la culture du Monsanto 810 juste avant l’examen de ce projet de loi a largement contribué à brouiller les esprits : un jour, on annonce comme une victoire et un progrès le fait qu’il n’y aura pas de culture OGM au cours de cette campagne, et la semaine suivante on nous demande de plancher sur ce texte !
Ces annonces contradictoires sont tout à fait dévastatrices dans l’opinion publique. Or nous ne pouvons développer les OGM en France sans l’adhésion d’une grande partie de nos concitoyens.
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, il est primordial d’engager très rapidement une campagne de communication de grande ampleur afin d’informer correctement et complètement les consommateurs sur les OGM.
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Yves Détraigne. Le discrédit dont souffrent les plantes génétiquement modifiées, encore renforcé par le récent documentaire intitulé Le monde selon Monsanto, doit être combattu par des données objectives et le rappel des bénéfices des OGM.
Si les avantages attendus pour l’agriculture sont bien entendu déterminants, il est important de répéter que les OGM utilisés dans le secteur de la santé permettent déjà de sauver des vies.
Je comprends les inquiétudes légitimes de nos concitoyens. En l’état actuel de nos connaissances, l’absence de preuve sur le risque sanitaire s’accompagne de l’impossibilité de prouver l’absence de danger.
De même, le risque environnemental éventuellement associé aux OGM est encore plus difficile à appréhender.
La sécurité sanitaire concentre ses moyens sur les effets directs pour l’homme là où la sécurité environnementale doit évaluer un large champ d’espèces et de races animales, ainsi que leurs innombrables interactions.
De plus, les effets environnementaux, en intervenant sur le long terme, sont très difficiles à évaluer a priori.
Enfin, les OGM sont perçus par nos concitoyens comme une évolution irréversible, ce qui explique leur inquiétude légitime à ce sujet.
C’est pourquoi il est primordial de garantir la coexistence des différents types de cultures. C’est ce à quoi les sénateurs du groupe UC-UDF se sont attachés lors de l’examen de ce texte.
De nombreuses dispositions allant en ce sens sont venues enrichir le projet de loi initial, notamment grâce à l’amendement de mon collègue Daniel Soulage, qui prévoyait que des distances de sécurité soient fixées par décret afin de limiter le risque de dissémination entre les cultures, ou encore grâce aux mesures adoptées par les députés qui concernent la protection des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux, ainsi que la défense des terroirs et des productions sous appellation.
Toutefois, il ne faut pas nier l’urgence qu’il y a à développer les OGM sur notre territoire. Nous n’avons déjà que trop tardé. Il en va de l’indépendance et du maintien de la compétitivité de l’agriculture européenne, spécialement de l’agriculture française, face à la concurrence mondiale.
Notre agriculture doit répondre à des enjeux renouvelés, notamment en ce qui concerne le développement des rendements, tout en réduisant parallèlement l’apport des intrants dans les cultures.
Ainsi, le Grenelle de l’environnement vient d’entériner l’objectif de diminution par deux de l’usage des pesticides d’ici à 2012. Or il faut bien comprendre qu’on ne peut pas être à la fois opposés aux pesticides et aux OGM, d’autant que notre dépendance en matière d’approvisionnement en oléoprotéagineux rend difficilement crédible toute position hostile aux OGM.
L’Union européenne consomme chaque année, afin d’alimenter son bétail – cela a déjà été souligné, mais il faut le répéter –, 30 millions de tonnes de tourteaux de soja. Or plus de la moitié des surfaces mondiales cultivées en soja le sont en soja OGM.
Les députés ont bien essayé de remédier à cet état de fait en adoptant un article relatif à un plan de relance des cultures d’oléoprotéagineux. La mise en place d’un tel plan me semble cependant vouée à l’échec, car nous ne disposons ni de la surface agricole utile nécessaire ni du climat adapté pour parvenir aux rendements attendus.
En revanche, sur cette question de notre dépendance en matière de protéines végétales, je signale que nous disposons en France d’une plante qui a des qualités comparables au soja pour l’alimentation animale et dont le développement pourrait nous permettre de réduire nos importations de soja OGM tout en ayant un effet bénéfique sur la dénitrification des sols : la luzerne.
Le « bilan de santé de la PAC » nous donne quelques inquiétudes sur l’avenir de cette culture. Je crois, madame la secrétaire d'État, que vous auriez intérêt, en tant que secrétaire d'État chargée de l’écologie, à conjuguer vos efforts avec ceux du ministre de l’agriculture pour assurer la pérennité de la filière « luzerne » dans notre pays.
Je souhaite donc que nous puissions développer notre propre filière de production d’OGM pour que nous en maîtrisions le processus de fabrication et que nous fixions nos propres critères de validation, des critères pleinement adaptés à notre modèle agricole et répondant aux attentes de nos agriculteurs.
Il n’est pas normal qu’une firme multinationale détienne plus de 70 % des brevets de semences OGM et, pour parler clairement, qu’OGM ne rime aujourd'hui qu’avec Monsanto.
Le bilan que l’on peut faire à l’heure actuelle des OGM n’est possible qu’au travers du prisme Monsanto, et ce prisme a été faussé dès le début.
Les États-Unis ont fait le choix du principe de l’équivalence en substance : les plantes génétiquement modifiées, comparées aux plantes non transgéniques, sont équivalentes sur la seule base de leur composition et ne sont soumises à aucune réglementation spécifique.
En Europe, au contraire, nous avons fait le choix d’une évaluation au cas par cas des OGM, ce qui offre des garanties autrement plus solides.
Aussi, s’il est un domaine à encourager, c’est celui de la recherche sur les biotechnologies.
Actuellement, la plupart des OGM commercialisés sont destinés à résister aux herbicides et aux insectes. Ils ne concernent donc que la production agricole. Mais les chercheurs ne cessent de montrer que, par différentes méthodes, ils peuvent créer des plantes capables de résister à la sécheresse ou à la salinité des sols, réclamant moins d’énergie et de traitements chimiques, dotées de meilleures propriétés nutritionnelles et sanitaires, ou permettant de lutter contre des maladies.
M. Yves Détraigne. Or ce secteur stratégique dans les années à venir accumule les retards, notamment à la suite des actions des commandos « anti-OGM ».
Le fauchage de champs OGM ruine des années entières d’efforts de recherche, met en péril notre capacité d’innovation et fait le jeu des entreprises étrangères.
Notre pays, qui était à la pointe de la recherche sur les biotechnologies végétales il y a vingt ans, est aujourd’hui distancé par d’autres nations.
Les États-Unis, la Chine, l’Inde ou le Brésil investissent massivement dans ces domaines alors que, chez nous, le nombre d’expérimentations n’a cessé de chuter : de plus d’une centaine en 1997, il est passé à treize en 2007 ! À ce rythme, nous ne maîtriserons bientôt plus le savoir-faire technique de cette innovation.
C’est l’avenir de la recherche française dans les sciences du vivant qui est en cause. C’est notre capacité d’innovation dans le domaine médical, mais aussi la compétitivité de notre secteur industriel et agricole qui sont menacées.
Je me félicite donc de la décision du Gouvernement de tripler le budget consacré aux biotechnologies sur trois ans, …
M. Charles Revet. Très bien !
M. Yves Détraigne. … ainsi que de l’initiative des députés d’instaurer un cadre et des objectifs pour la recherche publique en biotechnologies.
Il ne faut pas oublier que, dans un monde où les OGM continuent à proliférer – il est question d’un doublement des surfaces de culture d’ici à l’horizon 2015 –, leur dangerosité ou leur innocuité ne peut être établie que par des recherches impartiales.
Je souhaite également qu’une véritable recherche européenne sur les biotechnologies soit mise en place.
En coordonnant les équipes de chercheurs, en fixant des objectifs sur le plan européen, nous pourrons rattraper notre retard dans ce secteur et contrecarrer l’hégémonie américaine.
À la fin de cette intervention, j’emprunterai quelques phrases au rapporteur du projet de directive européenne, lorsqu’il présentait son rapport devant le Parlement européen le 13 février 2001 : « Avec ce texte, nous obtenons une réaffirmation du principe de précaution. Nous obtenons un renforcement de l’évaluation du risque lié à toutes les disséminations d’OGM. [...]
« Bref, la législation soumise à notre examen est la législation sur les OGM la plus sévère au monde, si sévère en fait que certains aliments naturels couramment utilisés aujourd’hui ne passeraient pas le cap de cette procédure. [...]
« Aussi, je recommande cette importante législation à l’Assemblée. Il est essentiel de garantir l’utilisation sûre et adéquate des OGM au sein de l’Union européenne. Il est essentiel de développer la confiance du public dans ces produits. Il est essentiel de s’assurer que cette nouvelle technologie si prometteuse nous apporte finalement ce que nous voulons qu’elle nous donne. »
Pour conclure, je vous indique que la majorité des sénateurs de l’Union centriste votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UC-UDF et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voilà au terme du parcours parlementaire d’un projet de loi improprement intitulé « projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés ».
En effet, dès l’article 1er A, c'est-à-dire avant l’article 1er, le champ d’application est restreint à la production de protéines végétales par culture d’organismes génétiquement modifiés, autrement dit – je tiens à cette appellation –, de plantes génétiquement modifiées, les PGM.
On continue à entretenir la confusion entre les organismes génétiquement modifiés, dont le champ est bien plus vaste, et le problème qui a occulté tout ce débat, celui des plantes génétiquement modifiées.
Je signale, d’ailleurs, qu’on aurait pu définir dans ce premier article – je l’avais demandé à M. le rapporteur –, ne serait-ce que dans une visée pédagogique, ce qu’est un organisme génétiquement modifié et, tout particulièrement, ce qu’est une plante génétiquement modifiée.
Sans faire de provocation, je dirai que le blé est bien une plante génétiquement modifiée par rapport à l’épeautre, et ce depuis les Sumériens, soit 3 000 ans avant Jésus-Christ !
MM. Charles Revet et Henri de Raincourt. Tout à fait !
M. Daniel Raoul. Je vous remercie de votre approbation, mes chers collègues !
Vous avez manqué une occasion de faire de la pédagogie à l’égard de nos concitoyens en entretenant cette confusion entre les OGM et les PGM.
Madame la secrétaire d’État, vous avez tout à l’heure employé l’expression « culture d’OGM ». Cela veut bien dire que vous restreignez votre raisonnement à l’agriculture et aux plantes génétiquement modifiées. En fait, vous entretenez une confusion qui est le fonds de commerce d’officines démagogiques ou de lobbies concernant les pro-OGM et les anti-OGM.
Comment peut-on adhérer à un slogan anti-OGM d’une façon absolue sinon à se priver de fromage, de bière, de vaccins et de toutes les applications thérapeutiques et pharmacologiques que permettent les biotechnologies ?
Comment occulter aussi le fait que votre texte n’aborde pas le problème de la génomique appliquée au règne animal, dont l’homme fait partie, en lien en particulier avec les problèmes soulevés concernant la bioéthique ?
Ce sujet est d’ailleurs d’actualité. Une publication scientifique britannique fait état ces jours-ci de cellules embryonnaires mi-humaines mi-animales. Vers quoi allons-nous ?
Quels moyens attribuez-vous à la recherche dans les biotechnologies et quelles protections – je tiens à ce terme, car il ne s’agit pas seulement d’afficher des crédits – donnez-vous aux chercheurs dans ce domaine, sachant les pressions psychologiques mais aussi matérielles auxquelles ils sont soumis dans les laboratoires et la désaffection des thésards dans ce domaine de recherche ?
Nous aurions attendu une loi d’orientation qui aurait pu se fonder sur le travail engagé depuis plus de cinq ans par notre assemblée, tout particulièrement par notre commission des affaires économiques, au sein de laquelle, sous l’égide de nos collègues MM. Jean Bizet et Jean-Marc Pastor, un groupe de travail avait établi un rapport très approfondi sur les enjeux et aussi sur les limites acceptables de ces technologies. Quel gâchis de passer par pertes et profits cette mine de renseignements ?
Pour avoir fait partie de ce groupe de travail, je peux vous assurer qu’il a permis d’éclairer nos collègues, toutes sensibilités politiques confondues, dans un climat constructif, ouvert et serein, à l’opposé de celui qui a entouré le parcours parlementaire de votre projet de loi.
Quelle hypocrisie, enfin, de continuer à importer plus de 4 millions de tonnes de soja modifié en prétendant être le pays le plus avancé dans la protection de la biodiversité !
Comment pouvez-vous parler de transparence en refusant des commissions locales d’information et de suivi lors d’essais aux champs forcément nécessaires ?
Je m’arrêterai là sur le fond. J’avais déjà évoqué un certain nombre de sujets lors de la deuxième lecture de ce texte. Mais je vous demande de comprendre mon amertume de scientifique pour cette occasion gâchée.
Quant à la forme, je n’évoquerai ici que la mascarade de débat qui a prévalu lors de la deuxième lecture devant notre assemblée en fauchant volontairement (Sourires.) tous les amendements et en proposant un vote conforme, à l’exception d’ailleurs d’un amendement imposé à notre rapporteur, vidant de tout son sens l’article 1er, en se référant à une norme virtuelle et qui ne définit d’ailleurs pas le « sans OGM ».
Vous avez d’ailleurs persisté, en commission mixte paritaire – et c’est là votre seule cohérence sur ce texte – en imposant, là aussi, un vote conforme. Quelle frustration – je vous le dis sincèrement – pour tous ceux qui ont essayé honnêtement de s’investir sur le fond alors que ce sujet méritait un débat d’orientation sur les enjeux internationaux que représentent les biotechnologies ! Je ne prendrai comme exemple que les investissements américains, indiens, chinois et coréens. Ces pays ne passent pourtant pas pour des philosophes ni des philanthropes, d’ailleurs !
Ainsi que l’a justement souligné notre collègue Yves Détraigne tout à l’heure, seule une coordination de la recherche au niveau européen dans le domaine des biotechnologies nous fera encore exister au niveau international.
Face à cette mascarade, ce semblant de débat, les sénateurs socialistes se refusent à cautionner le déni de démocratie qui a prévalu à partir de la deuxième lecture dans notre assemblée. C’est pourquoi nous ne participerons pas au vote et nous nous adresserons au Conseil constitutionnel sur la forme.
Pour conclure, je paraphraserai un philosophe, en disant : « Mesdames, messieurs les faucheurs, bonsoir ! »
M. Charles Revet. Ce n’est pas une bonne fin. C’est dommage, car l’intervention était globalement bonne !
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Madame la secrétaire d'État, vous avez déclaré que le débat sur les OGM avait été un bel exercice de la vie démocratique ; nous sommes au regret de vous contredire, car, bien au contraire, ce texte est particulièrement symptomatique du déficit démocratique des politiques du Gouvernement à la fois dans l’absence de prise en compte de la volonté de nos concitoyens et vis-à-vis de l’expression du Parlement.
Alors que la grande majorité des Français se déclare opposée à la culture et à la commercialisation à des fins alimentaires des OGM, vous avez choisi de mépriser leur sentiment de défiance envers les organismes génétiquement modifiés et, pour ce faire, vous avez voulu réduire le débat à une simple opposition entre obscurantisme et progrès scientifique.
Le texte relatif aux organismes génétiquement modifiés ne prévoit, d’ailleurs, aucun contre-pouvoir démocratique représentant la population ni même les producteurs.
De plus, à l’heure où certains veulent faire croire, à travers la réforme des institutions, que le Parlement sera doté de plus de pouvoirs, le Gouvernement multiplie les atteintes à cette institution, jusqu’à nier l’expression de sa volonté. Je fais référence, vous l’aurez compris, au passage en force qui a débouché sur la constitution d’une commission mixte paritaire, alors même que la motion tendant à opposer la question préalable avait été adoptée par 1’Assemblée nationale.
Je ne souhaite pas ici entrer dans l’examen détaillé de la Constitution ou des règlements des assemblées. Mais, quelle que soit l’interprétation experte qui pourrait en être donnée, ce qui est certain, c’est qu’aujourd’hui le Gouvernement a fait le choix politique de lire ces textes de façon à nier l’expression de la volonté de la représentation nationale quand celle-ci ne lui convenait pas.
C’est ce même Gouvernement qui annonçait déjà la suppression par le Sénat de l’amendement Chassaigne tout juste voté ! Cet amendement a pourtant reçu un large soutien. Il a recueilli des milliers de signatures et a suscité au sein même de la majorité parlementaire et du Gouvernement des réactions révélatrices d’une absence de consensus autour de ce projet de loi. Cet amendement revendiquait la richesse des produits de qualité, des appellations d’origine contrôlées, des labels. Mais le Sénat a fait le choix de se ranger du côté de la standardisation et de l’uniformisation des cultures.
La commission des affaires économiques, fort opportunément, a proposé de soumettre la définition du « sans OGM » à la définition communautaire. Or, à l’heure actuelle, si une telle définition n’existe pas, nous craignons qu’il n’y ait là la volonté de réduire la portée de l’exigence d’une absence totale d’OGM, exigence qui vous gêne tant.
De plus, les débats que nous avons eus sur le seuil de détectabilité et le seuil d’étiquetage ne laissent pas beaucoup d’espoir en ce qui concerne le renvoi à un décret en Conseil d’État, introduit par le Sénat. Ce renvoi laisse au Gouvernement toute latitude pour vider de son sens l’amendement protecteur de notre collègue et ami le député André Chassaigne.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen considèrent qu’il aurait été préférable que le Gouvernement tire les leçons du contenu et de la tenue très chaotique des débats, en présentant un nouveau texte.
S’il plaît à M. le député Jean-François Copé de justifier l’adoption de la question préalable défendue par les communistes à l’Assemblée nationale par un absentéisme inconscient, en jetant du même coup le discrédit sur le sérieux du travail des députés de la majorité, nous pensons qu’une telle explication est par trop simpliste.
En réalité, cet événement est symptomatique du doute qui s’est installé sur les bancs de la majorité et du Gouvernement tout au long des débats. Les enjeux en termes de santé publique ou de protection de l’environnement, le caractère irréversible de la dissémination, de la généralisation de la culture des OGM en plein champ et de leur commercialisation sont tels qu’il est inconscient de feindre de les ignorer.
Quelle crédibilité accorder au Président de la République qui persiste à dire que la liberté de produire et de consommer avec ou sans OGM est une avancée du texte, alors même que le caractère irréversible des contaminations des cultures « sans OGM » par les cultures OGM a été confirmé par le Gouvernement ? Comment osez-vous faire la promotion d’une agriculture que votre projet de loi met en péril ? Je pense ici, par exemple, à votre volonté d’imposer des produits bio dans les restaurants scolaires.
Sur le dossier OGM, comme sur d’autres, vos paroles et vos actions sont en totale contradiction. Vous vous félicitez d’un texte qui va permettre la généralisation des cultures OGM alors que l’absence de danger pour les hommes, la faune et la flore n’a pas été démontrée. Et vous vous réjouissez d’avoir tiré les conséquences – c’est la moindre des choses – d’une mise en garde sur les effets du maïs Monsanto 810.
Que ce soit le Président de la République, M. le ministre ou vous-même, madame la secrétaire d’État, vous n’avez de cesse de vous féliciter d’avoir actionné la clause de sauvegarde. Et pour renforcer encore vos prétendus mérites, vous affirmez que cela n’a pas été facile. Mais qu’est-ce qui n’a pas été facile ? La tentation de céder aux intérêts mercantiles au détriment de la protection de la santé publique et de l’intérêt général ? Car, au fond, il n’y a rien de compliqué à faire jouer une exception prévue par le droit communautaire et justifiée par l’existence de doutes sérieux pesant sur l’innocuité du maïs Monsanto 810.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont exposé leurs critiques tout au long des débats. Nous avons déposé une motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi ; vous ne serez donc pas étonnée, madame la secrétaire d’État, que nous affirmions à nouveau, pour des raisons d’impératifs de santé publique, de préservation de l’environnement et de la biodiversité, notre ferme opposition à ce projet. Nous voterons donc contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller.
M. Jacques Muller. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, attendue depuis 2002, la loi OGM censée transcrire en droit national la directive européenne CE/2001-18 visait également à traduire dans nos textes les orientations issues du Grenelle de l’environnement et avait même été présentée comme un moyen de permettre l’arrêt des opérations de désobéissance civile dans nos campagnes.
Le dialogue sociétal qui avait été instauré entre les parties prenantes, en mettant l’expression de la société civile au cœur d’une démarche plébiscitée à juste titre par l’opinion publique, avait débouché sur des orientations fortes, notamment la garantie d’une liberté fondamentale : être en mesure de pouvoir « produire et consommer sans OGM ». Hélas, la formidable dynamique enclenchée lors du Grenelle de l’environnement n’est plus qu’un souvenir !
Au risque de vous surprendre, permettez-moi de faire référence à la réflexion du mahatma Gandhi - Machiavel ou Gandhi : à chacun ses références politiques ! - : « La fin est dans les moyens comme l’arbre dans la graine. »
À cet égard, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne peux que constater et dénoncer le passage en force du Gouvernement et sa majorité sur ce dossier complexe et sensible.
D’abord, le Gouvernement convoque une commission mixte paritaire alors que la deuxième lecture à l’Assemblée n’a pas eu lieu puisqu’elle a été interrompue par le rejet du texte à l’issue de la question préalable.
Sur la forme, cette démarche ne respecte pas l’article 45 de notre Constitution.
Sur le fond, le rejet du texte dans sa globalité invitait évidemment le Gouvernement à proposer un nouveau texte, enfin équilibré, qui réponde véritablement aux attentes de nos concitoyens.
Ensuite, le Gouvernement verrouille complètement la commission mixte paritaire. En refusant d’y examiner le moindre amendement, y compris sur l’article 1er, qui restait en discussion, le président Patrick Ollier a littéralement interdit de travail parlementaire les sénateurs présents. Et je me dois de souligner le refus obstiné de ce dernier de discuter de la définition du seuil de contamination des cultures et de l’environnement.
Au final, la commission mixte paritaire aux ordres a validé un texte qui reflète la méthode employée et qui, objectivement, trahit les engagements du Grenelle de l’environnement.
À l’issue du processus parlementaire conclu par ce coup de force, je suis au regret de devoir relever trois violations caractérisées du Grenelle de l’environnement.
Première violation, la question du « sans OGM » a été mal traitée. Dans ses conclusions, le Grenelle de l’environnement consacrait à juste titre la nécessité de garantir la liberté de produire et de consommer « sans OGM » : la loi se doit en effet de protéger le faible. Mais, dans son discours du 25 octobre 2007, interprétant très personnellement ces conclusions, le Président de la République dénaturait cette légitime précaution en introduisant une nouvelle donne : la liberté de produire « avec ou sans OGM », comme si les deux concepts étaient équivalents !
La négation de la dissymétrie pour l’environnement entre des cultures traditionnelles et des cultures d’OGM – par exemple, capables de résister à l’imprégnation totale par un herbicide, ou secrétant en permanence un insecticide – est une hérésie du point de vue scientifique. L’ensemble du texte souffre de cette équivalence erronée entre cultures « avec OGM » ou « sans OGM ».
Plus grave encore, l’affichage de la « protection des cultures qualifiées sans OGM » – permis par l’amendement n° 252, présenté par M. Chassaigne à l’Assemblée nationale et adopté grâce à l’avis de sagesse rendu par Mme la secrétaire d’État, que je remercie – est devenu un leurre. En effet, la définition légale du « sans OGM » a été reportée aux calendes grecques par l’amendement de M. Bizet, puis refusée en commission mixte paritaire !
Pourtant, que l’on soit promoteur zélé ou opposé au déferlement des OGM dans nos campagnes, une définition rigoureuse par la loi du « sans OGM » s’imposait, une définition scientifique, c’est-à-dire avec un seuil de détection technique reproductible.
Nous savons tous que cette définition du « sans OGM » est centrale. Le nombre et l’indemnisation des victimes des contaminations ainsi que la définition, « espèce par espèce », des périmètres d’isolement – effectivement protecteurs par rapport aux cultures OGM incriminées – dépendent très directement de ce fameux seuil. La définition scientifique du seuil de contamination transcende évidemment les clivages politiques : ma collègue Fabienne Keller et moi-même l’avons démontré. Mais les interventions des lobbies productivistes et de l’agro-industrie ont manifestement plus pesé que l’intérêt général !
Deuxième violation, le Haut Conseil est dénaturé. Le dialogue fructueux entre communauté scientifique et représentants de la société civile, expérimenté avec succès lors du Grenelle de l’environnement, est définitivement enterré : après, ou plus précisément, au moyen de « l’exécution », à deux heures trente-huit du matin, de notre collègue Jean-François Le Grand, « mort debout mais qui remue encore » – je cite ici les propos de notre collègue rapporteur Jean Bizet –, la société civile est désormais confinée dans un rôle de faire-valoir, réduite à faire de simples recommandations qui ne pèseront rien, personne n’est dupe, par rapport aux avis dits « scientifiques ».
Troisième violation, le principe de responsabilité est bafoué. Les procédures d’indemnisation des victimes sont soumises à des conditions restrictives inacceptables qui en limitent considérablement la portée : la charge de la preuve à établir par les victimes, la sous-estimation du nombre de victimes de contaminations effectivement prises en compte, faute d’une définition scientifique du seuil de contamination, et la sous-estimation du montant des préjudices subis, économiques, moraux et environnementaux.
Dans la même veine, les coûts de traçabilité des filières de qualité, labels AOC et autres cultures « qualifiées sans OGM », restent à la charge des producteurs concernés, qui n’ont pas demandé l’introduction de ces événements génétiques nouveaux dans les campagnes : ces cultures d’OGM menacent objectivement, sur le plan économique, leurs productions.
En définitive, cette loi consacre implicitement un nouveau grand principe : le principe du « pollué-payeur » !
Non, madame la secrétaire d’État, vous ne pouvez pas vous permettre de dire que cette loi est la plus respectueuse au monde du principe de précaution ! C’est tout simplement faux ! Il suffit, pour s’en convaincre, d’analyser celles de nos voisins les plus proches, allemands, autrichiens ou suisses, par exemple.
Au final, le « Grenelle des OGM » n’aura été qu’un vaste écran de fumée, incapable de dissimuler une situation décidément récurrente : les lobbies semenciers et agricoles productivistes, complaisamment relayés par une majorité globalement aux ordres, continuent de faire la loi dans notre pays. Qu’il s’agisse de son contenu ou du déroulement des procédures d’adoption, cette loi sur les OGM, tant attendue par nos concitoyens et par les instances européennes, apparaît comme une véritable provocation : voudrait-on rallumer les conflits dans les campagnes, que l’on ne s’y prendrait pas autrement !
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous ne pouvons que voter contre cette première grande loi d’application du Grenelle de l’environnement qui trahit les attentes de nos concitoyens. Cette loi « grenellement incompatible » porte même atteinte à plusieurs principes constitutionnels : la liberté d’entreprendre, le droit de propriété des producteurs « sans OGM », ainsi que le respect du principe de précaution proclamé par la Charte de l’environnement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?….
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat étant appelé à se prononcer après l’Assemblée nationale, il statue par un seul vote sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Article 1er A
Six mois après la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif aux possibilités de développement d’un plan de relance de la production de protéines végétales alternatif aux cultures d’organismes génétiquement modifiés afin de garantir l’indépendance alimentaire de la France.
Article 1er
Après l’article L. 531-2 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 531-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 531-2-1. - Les organismes génétiquement modifiés ne peuvent être cultivés, commercialisés ou utilisés que dans le respect de l’environnement et de la santé publique, des structures agricoles, des écosystèmes locaux et des filières de production et commerciales qualifiées « sans organismes génétiquement modifiés », et en toute transparence. La définition du « sans organismes génétiquement modifiés » se comprend nécessairement par référence à la définition communautaire. Dans l’attente d’une définition au niveau européen, le seuil correspondant sera fixé par voie réglementaire, sur avis du Haut conseil des biotechnologies, espèce par espèce.
« Les décisions d’autorisation concernant les organismes génétiquement modifiés ne peuvent intervenir qu’après une évaluation préalable indépendante et transparente des risques pour l’environnement et la santé publique. Cette évaluation est assurée par une expertise collective menée selon des principes de compétence, pluralité, transparence et impartialité.
« Les études et les tests sur lesquels se fonde cette évaluation en vue des autorisations prévues aux articles L. 533-3 et L. 533-5 sont réalisés dans des laboratoires agréés par les pouvoirs publics.
« Les conclusions de toutes les études et tests réalisés dans ces laboratoires sont mises à la disposition du public sans nuire à la protection des intérêts énumérés aux I de l’article L. 124-4 et II de l’article L. 124-5 et à la protection de la propriété intellectuelle lorsque l’organisme génétiquement modifié ne fait pas encore l’objet d’une protection juridique à ce titre.
« La liberté de consommer et de produire avec ou sans organisme génétiquement modifié, sans que cela nuise à l’intégrité de l’environnement et à la spécificité des cultures traditionnelles et de qualité, est garantie dans le respect des principes de précaution, de prévention, d’information, de participation et de responsabilité inscrits dans la Charte de l’environnement de 2004 et dans le respect des dispositions communautaires. »
CHAPITRE IER
Le Haut conseil des biotechnologies
Article 2
Les articles L. 531-3, L. 531-4 et L. 531-5 du code de l’environnement sont ainsi rédigés et, après l’article L. 531-4 du même code, il est inséré un article L. 531-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 531-3. - Le Haut conseil des biotechnologies a pour missions d’éclairer le Gouvernement sur toutes questions intéressant les organismes génétiquement modifiés ou toute autre biotechnologie et de formuler des avis en matière d’évaluation des risques pour l’environnement et la santé publique que peuvent présenter l’utilisation confinée ou la dissémination volontaire des organismes génétiquement modifiés, ainsi qu’en matière de surveillance biologique du territoire prévue à l’article L. 251-1 du code rural, sans préjudice des compétences exercées par les agences visées aux articles L. 1323-1 et L. 5311-1 du code de la santé publique. Ses avis et recommandations sont rendus publics.
« En vue de l’accomplissement de ses missions, le haut conseil :
« 1° Peut se saisir, d’office, à la demande de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ou à la demande d’un député ou d’un sénateur, des associations de défense des consommateurs agréées en application de l’article L. 411-1 du code de la consommation, des associations de protection de l’environnement agréées au titre de l’article L. 141-1 du présent code, des associations ayant une activité dans le domaine de la santé et de la prise en charge des malades agréées en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique, des groupements de salariés et des groupements professionnels concernés, de toute question concernant son domaine de compétence et proposer, en cas de risque, toutes mesures de nature à préserver l’environnement et la santé publique ;
« 2° Rend un avis sur chaque demande d’agrément ou demande d’autorisation en vue de l’utilisation confinée ou de la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés, dans le respect des délais fixés par les dispositions communautaires. Il est informé de chaque déclaration d’utilisation confinée prévue au I de l’article L. 532-3. Lorsqu’une demande en vue de la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés est susceptible de répondre à un besoin urgent de santé publique, cet avis peut, à la demande du ministre chargé de la santé, faire l’objet d’une procédure d’examen prioritaire ;
« 3° Procède ou fait procéder à toutes expertises, analyses ou études qu’il juge nécessaires ;
« 4° Met en œuvre des méthodes d’évaluation des risques pour l’environnement et la santé publique conformes aux dispositions communautaires et aux recommandations internationales en la matière ;
« 4° bis Est consulté sur les protocoles et méthodologies d’observation nécessaires à la mise en œuvre de la surveillance biologique du territoire définie à l’article L. 251-1 du code rural, en ce qu’elle concerne les organismes génétiquement modifiés. Il est rendu destinataire du rapport annuel de surveillance visé au même article. Il peut formuler des recommandations ;
« 4 ter Supprimé………………………………………………………… ;
« 5° Peut mener des actions d’information se rapportant à ses missions ;
« 6° Établit un rapport annuel d’activité adressé au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport est rendu public.
« Art. L. 531-4. - Le Haut conseil des biotechnologies est composé d’un comité scientifique et d’un comité économique, éthique et social.
« Le président du haut conseil et les présidents des comités, ainsi que les membres des comités, sont nommés par décret. La nomination du président du haut conseil intervient après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d’agriculture et d’environnement. Le président est un scientifique choisi en fonction de ses compétences et de la qualité de ses publications. Il est membre de droit des deux comités.
« En cas d’utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés, le président du haut conseil transmet l’avis du comité scientifique à l’autorité administrative.
« En cas de dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés, le président du haut conseil transmet l’avis du comité scientifique au comité économique, éthique et social. Après examen de l’avis du comité scientifique, le comité économique, éthique et social élabore des recommandations et peut, à cet effet, convoquer le président du comité scientifique et un membre de ce comité. L’avis du Haut conseil des biotechnologies, qui est composé de l’avis du comité scientifique et des recommandations du comité économique, éthique et social, est remis à l’autorité administrative par son président. Cet avis comporte, outre une évaluation des risques, une évaluation des bénéfices. Il fait état des positions divergentes exprimées.
« Le Haut conseil des biotechnologies se réunit en séance plénière à la demande de son président ou de la moitié de ses membres afin d’aborder toute question de portée générale intéressant son domaine de compétences dont il est saisi ou dont il se saisit en application du 1° de l’article L. 531-3. À l’issue de cette séance plénière, il rend ses conclusions à l’autorité administrative.
« Art. L. 531-4-1. - Le comité scientifique du Haut conseil des biotechnologies est composé de personnalités désignées, après appel à candidatures, notamment auprès des organismes publics de recherche, en raison de leur compétence scientifique et technique reconnue par leurs pairs, dans les domaines se rapportant notamment au génie génétique, à la protection de la santé publique, aux sciences agronomiques, aux sciences appliquées à l’environnement, au droit, à l’économie et à la sociologie.
« Le comité économique, éthique et social est composé notamment de représentants des associations visées au 1° de l’article L. 531-3, de représentants d’organisations professionnelles, d’un membre du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, d’un député et d’un sénateur membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, et de représentants des associations de collectivités territoriales.
« Art. L. 531-4-2. - Supprimé………………………………………….
« Art. L. 531-5. - Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application des articles L. 531-3 et L. 531-4, notamment la composition, les attributions ainsi que les règles de fonctionnement, de saisine et de déontologie du Haut conseil des biotechnologies. »
CHAPITRE II
Responsabilité et coexistence entre cultures
Article 3 A
Après l’article L. 334-8 du code de l’environnement, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :
« CHAPITRE V
« Dispositions communes aux parcs nationaux et aux parcs naturels régionaux
« Art. L. 335-1. - Les parcs nationaux et les parcs naturels régionaux peuvent, avec l’accord unanime des exploitants agricoles concernés, exclure la culture d’organismes génétiquement modifiés sur tout ou partie de leur territoire, sous réserve que cette possibilité soit prévue par leur charte. »
Article 3 B
La sous-section 1 de la section 2 du chapitre II du titre IV du livre VI du code rural est complétée par un article L. 642-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 642-5-1. - Lorsque cela est nécessaire à la protection d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine mentionné au 1° de l’article L. 640-2, l’organisme de défense et de gestion concerné ou l’Institut national de l’origine et de la qualité propose à l’autorité administrative toute mesure particulière de renforcement de cette protection concernant les organismes génétiquement modifiés. »
Article 3
I. - Le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural devient le chapitre IV du même titre et les articles L. 663-1 à L. 663-7 deviennent, respectivement, les articles L. 664-1 à L. 664-7 du même code.
II. - Après le chapitre II du titre VI du livre VI du même code, il est rétabli un chapitre III intitulé : « Les plantes génétiquement modifiées », comprenant les articles L. 663-2 et L. 663-3 ainsi rétablis :
« Art. L. 663-2. - La mise en culture, la récolte, le stockage et le transport des végétaux autorisés au titre de l’article L. 533-5 du code de l’environnement ou en vertu de la réglementation communautaire sont soumis au respect de conditions techniques notamment relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement, visant à éviter la présence accidentelle d’organismes génétiquement modifiés dans d’autres productions.
« Ces conditions techniques sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, pris après avis du comité scientifique du haut conseil institué à l’article L. 531-3 du code de l’environnement et du ministre chargé de l’environnement. Leur révision régulière se fait sur la base de travaux scientifiques et des données de la surveillance biologique du territoire définie à l’article L. 251-1 du présent code.
« Les conditions techniques relatives aux distances sont fixées par nature de culture. Elles définissent les périmètres au sein desquels ne sont pas pratiquées de cultures d’organismes génétiquement modifiés. Elles doivent permettre que la présence accidentelle d’organismes génétiquement modifiés dans d’autres productions soit inférieure au seuil établi par la réglementation communautaire.
« Art. L. 663-3. - Le respect des conditions techniques prévues à l’article L. 663-2 est contrôlé par les agents mentionnés au I de l’article L. 251-18. Ces agents sont habilités à procéder ou à faire procéder, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, à tous prélèvements et analyses nécessaires à l’exercice de cette mission.
« En cas de non-respect de ces conditions, l’autorité administrative peut ordonner la destruction totale ou partielle des cultures.
« Les frais entraînés par ces sanctions sont à la charge de l’exploitant. »
Article 4
Le titre VII du livre VI du code rural est complété par deux articles L. 671-14 et L. 671-15 ainsi rédigés :
« Art. L. 671-14. - Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende :
« 1° Le fait de ne pas respecter une ou plusieurs conditions techniques relatives aux distances entre cultures prévues à l’article L. 663-2 ;
« 2° Le fait de ne pas avoir déféré à une des mesures de destruction ordonnée par l’autorité administrative en application de l’article L. 663-3 ;
« 3° Le fait de détruire ou de dégrader une parcelle de culture autorisée en application des articles L. 533-5 et L. 533-6 du code de l’environnement.
« Lorsque l’infraction visée au 3° porte sur une parcelle de culture autorisée en application de l’article L. 533-3 du code de l’environnement, la peine est portée à trois ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.
« Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires d’affichage de la décision prononcée ou de diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.
« Les personnes morales encourent, outre l’amende prévue au premier alinéa de l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues au 9° de l’article 131-39 du code pénal.
« Art. L. 671-15. - Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende le fait de faire obstacle à l’exercice des fonctions des agents mentionnés au I de l’article L. 251-18 agissant en application de l’article L. 663-3. »
Article 5
Le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural, tel que résultant de l’article 3, est complété par deux articles L. 663-4 et L. 663-5 ainsi rétablis :
« Art. L. 663-4. - I. - Tout exploitant agricole mettant en culture un organisme génétiquement modifié dont la mise sur le marché est autorisée est responsable, de plein droit, du préjudice économique résultant de la présence accidentelle de cet organisme génétiquement modifié dans la production d’un autre exploitant agricole, lorsque sont réunies les conditions suivantes :
« 1° Le produit de la récolte dans laquelle la présence de l’organisme génétiquement modifié est constatée est issu d’une parcelle ou d’une ruche située à proximité d’une parcelle sur laquelle est cultivé cet organisme génétiquement modifié et a été obtenu au cours de la même campagne de production ;
« 2° Il était initialement destiné soit à être vendu en tant que produit non soumis à l’obligation d’étiquetage mentionnée au 3°, soit à être utilisé pour l’élaboration d’un tel produit ;
« 3° Son étiquetage est rendu obligatoire en application des dispositions communautaires relatives à l’étiquetage des produits contenant des organismes génétiquement modifiés.
« II. - Le préjudice mentionné au I est constitué par la dépréciation du produit résultant de la différence entre le prix de vente du produit de la récolte soumis à l’obligation d’étiquetage visée au 3° du même I et celui d’un même produit, présentant des caractéristiques identiques, non soumis à cette obligation.
« Sa réparation peut donner lieu à un échange de produits ou, le cas échéant, au versement d’une indemnisation financière.
« III. - Tout exploitant agricole mettant en culture un organisme génétiquement modifié dont la mise sur le marché est autorisée doit souscrire une garantie financière couvrant sa responsabilité au titre du I.
« IV. - Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 663-5. - Les dispositions de l’article L. 663-4 ne font pas obstacle à la mise en cause, sur tout autre fondement que le préjudice mentionné au II du même article, de la responsabilité des exploitants mettant en culture un organisme génétiquement modifié, des distributeurs et des détenteurs de l’autorisation de mise sur le marché et du certificat d’obtention végétale. »
CHAPITRE III
Transparence
Article 6
I. - L’article L. 251-1 du code rural est ainsi modifié :
1° Les I et II sont ainsi rédigés :
« I. - La surveillance biologique du territoire a pour objet de s’assurer de l’état sanitaire et phytosanitaire des végétaux et de suivre l’apparition éventuelle d’effets non intentionnels des pratiques agricoles sur l’environnement. Elle relève de la compétence des agents chargés de la protection des végétaux ou s’effectue sous leur contrôle. Les résultats de cette surveillance font l’objet d’un rapport annuel du Gouvernement à l’Assemblée nationale et au Sénat.
« II. - Il est créé un Comité de surveillance biologique du territoire. Ce comité est consulté sur les protocoles et méthodologies d’observation nécessaires à la mise en œuvre de la surveillance biologique du territoire et sur les résultats de cette surveillance.
« Il formule des recommandations sur les orientations à donner à la surveillance biologique du territoire et alerte l’autorité administrative lorsqu’il considère que certains effets non intentionnels nécessitent des mesures de gestion particulières.
« Il est consulté sur le rapport annuel mentionné au premier alinéa.
« Le Comité de surveillance biologique du territoire est composé de personnalités désignées en raison de leurs compétences dans les domaines se rapportant notamment à l’écotoxicologie, aux sciences agronomiques et à la protection de l’environnement et des végétaux.
« Un décret précise la composition, les attributions et les règles de fonctionnement de ce comité. » ;
1° bis Dans la première phrase du III, les mots : « ou à la mise sur le marché des produits mentionnés au présent article » sont remplacés par les mots : « volontaire d’organismes génétiquement modifiés » ;
1° ter Le IV est ainsi rédigé :
« IV. - Le responsable de la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés, le distributeur et l’utilisateur de ces organismes doivent participer au dispositif de surveillance biologique du territoire, notamment en communiquant aux agents chargés de la protection des végétaux toutes les informations nécessaires à cette surveillance. » ;
2° Le premier alinéa du V est ainsi rédigé :
« Dans l’intérêt de l’environnement et de la santé publique, l’autorité administrative peut, par arrêté, prendre toutes mesures destinées à collecter les données et informations relatives à la mise sur le marché, la délivrance et l’utilisation des organismes génétiquement modifiés, afin d’en assurer le traitement et la diffusion. » ;
2° bis Le VI est abrogé.
3° Supprimé………………………………………………………………….
II. - Supprimé………………………………………………………………..
Article 6 bis
I. - Au début du chapitre III du titre VI du livre VI du code rural, tel que résultant de l’article 3, il est rétabli un article L. 663-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 663-1. - Le détenteur de l’autorisation visée à l’article L. 533-3 du code de l’environnement ou l’exploitant mettant en culture des organismes génétiquement modifiés ayant fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché doit déclarer auprès de l’autorité administrative les lieux où sont pratiquées ces cultures.
« Il doit également informer, préalablement aux semis, les exploitants des parcelles entourant les cultures d’organismes génétiquement modifiés.
« Un décret précise les informations qui doivent être communiquées à l’autorité administrative, notamment en ce qui concerne les parcelles cultivées, les dates d’ensemencement et la nature des organismes génétiquement modifiés cultivés, et définit les modalités de mise en œuvre de l’obligation d’information prévue à l’alinéa précédent.
« L’autorité administrative établit un registre national indiquant la nature et la localisation des parcelles culturales d’organismes génétiquement modifiés. Les préfectures assurent la publicité de ce registre par tous moyens appropriés, notamment sa mise en ligne sur l’internet. »
II. - Le titre VII du livre VI du même code est complété par un article L. 671-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 671-13-1. - Est puni de six mois d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende le non-respect par les opérateurs de leurs obligations mentionnées à l’article L. 663-1. »
Article 7
I. - L’article L. 532-4 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 532-4. - I. - Lorsque l’agrément pour l’utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés porte sur la première utilisation de tels organismes dans une installation, l’exploitant met à la disposition du public un dossier d’information.
« Ce dossier comporte au moins les informations qui ne peuvent être considérées comme confidentielles en application de l’article L. 532-4-1.
« II. - Le présent article ne s’applique pas si l’agrément porte sur l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés ne présentant qu’un risque faible pour l’environnement ou la santé publique, conformément au classement mentionné à l’article L. 532-1.
« III. - Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
II. - Après l’article L. 532-4 du même code, il est inséré un article L. 532-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 532-4-1. - L’exploitant peut indiquer à l’autorité administrative celles des informations fournies dans le dossier de demande d’agrément dont il justifie qu’elles devraient rester confidentielles, parce que leur communication ou leur divulgation porterait atteinte aux intérêts énumérés aux I de l’article L. 124-4 et II de l’article L. 124-5 ou parce que l’organisme génétiquement modifié ne fait pas l’objet d’une protection juridique au titre de la propriété intellectuelle.
« L’autorité administrative décide des informations qui sont tenues confidentielles et en informe l’exploitant.
« La liste des informations qui ne peuvent en aucun cas rester confidentielles est fixée par décret en Conseil d’État. »
III. - Les I à III de l’article L. 535-3 du même code sont ainsi rédigés :
« I. - L’autorité administrative ne communique à des tiers aucune information reconnue confidentielle en application du II, ni aucune information confidentielle qui lui a été transmise dans le cadre d’un échange d’informations avec la Commission européenne ou tout autre État membre au titre de la réglementation communautaire ; elle protège les droits de propriété intellectuelle afférents aux données reçues.
« II. - Le demandeur de l’autorisation prévue aux articles L. 533-3 et L. 533-5 peut indiquer à l’autorité administrative les informations contenues dans sa demande dont la divulgation pourrait nuire à sa position concurrentielle et dont il justifie qu’elles soient reconnues confidentielles par celle-ci.
« La liste des informations qui ne peuvent en aucun cas rester confidentielles est fixée par décret en Conseil d’État.
« III. - Si le demandeur de l’autorisation retire sa demande, l’autorité administrative doit respecter le caractère confidentiel des informations fournies. »
CHAPITRE IV
Dispositions d’adaptation du code de l’environnement et du code de la santé publique
Article 8 A
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’article L. 531-1 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « et de l’article L. 125-3 » sont supprimés ;
b) Le 1° est complété par les mots : «, les viroïdes et les cultures de cellules végétales et animales » ;
c) Après les mots : « sont cultivés », la fin du 3° est ainsi rédigée : « stockés, transportés, détruits, éliminés ou mis en œuvre de toute autre manière. » ;
2° L’article L. 531-2 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « et de l’article L. 125-3 » sont remplacés par les mots : « et des articles L. 125-3 et L. 515-13 » ;
b) À la fin du second alinéa, les mots : « de la commission de génie génétique » sont remplacés par les mots : « du Haut conseil des biotechnologies ».
Article 8
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 515-13 est ainsi rédigé :
« II. - La mise en œuvre, dans certaines catégories d’installations classées, d’organismes génétiquement modifiés est soumise aux dispositions des chapitres Ier, II et VI du titre III du présent livre.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de ces dispositions dans le domaine de la production industrielle. » ;
2° et 3° Supprimés………………………………………………………. ;
4° L’article L. 532-1 est ainsi modifié :
a) À la fin de la dernière phrase, les mots : « de la commission de génie génétique » sont remplacés par les mots : « du Haut conseil des biotechnologies » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Conformément aux dispositions communautaires, les utilisations confinées d’organismes génétiquement modifiés font l’objet d’un classement en classes de confinement en fonction du groupe de l’organisme génétiquement modifié et des caractéristiques de l’opération.
« En cas d’hésitation quant à la classe la mieux adaptée à l’utilisation confinée prévue, les mesures de protection les plus strictes sont appliquées, à moins que des preuves suffisantes soient apportées, en accord avec l’autorité administrative, pour justifier l’application de mesures moins strictes.
« Les critères de ce classement sont fixés par décret après avis du Haut conseil des biotechnologies. » ;
5° L’article L. 532-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 532-2. - I. - Toute utilisation, notamment à des fins de recherche, de développement, d’enseignement ou de production industrielle, d’organismes génétiquement modifiés qui peut présenter des dangers ou des inconvénients pour l’environnement ou pour la santé publique est réalisée de manière confinée, sans préjudice de l’application des dispositions contenues au chapitre III du présent titre.
« Les modalités de ce confinement, qui met en œuvre des barrières physiques, chimiques ou biologiques pour limiter le contact des organismes avec les personnes et l’environnement et assurer à ces derniers un niveau élevé de sécurité, sont définies par l’autorité administrative en fonction du classement des organismes génétiquement modifiés utilisés, après avis du Haut conseil des biotechnologies, sans préjudice du respect des dispositions relatives à la protection du secret de la défense nationale.
« II. - Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 532-3 à L. 532-6 :
« 1° Les utilisations confinées mettant en œuvre des organismes génétiquement modifiés dont l’innocuité pour l’environnement et la santé publique a été établie en fonction de critères définis par décret après avis du Haut conseil des biotechnologies conformément aux dispositions communautaires ;
« 2° Le transport d’organismes génétiquement modifiés.
« III. - Les organismes génétiquement modifiés, mis à la disposition de tiers à l’occasion d’une utilisation confinée, sont soumis à étiquetage dans des conditions définies par décret. » ;
6° L’article L. 532-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 532-3. - I. - Toute utilisation confinée notamment à des fins de recherche, de développement, d’enseignement ou de production industrielle d’organismes génétiquement modifiés dans une installation publique ou privée est soumise à agrément après avis du Haut conseil des biotechnologies.
« Toutefois, l’utilisation peut n’être soumise qu’à déclaration si elle présente un risque nul ou négligeable pour l’environnement et la santé publique ou si, présentant un risque faible, elle s’effectue dans une installation déjà agréée pour une utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés de même classe de risque ou d’une classe supérieure.
« II. - L’agrément délivré à l’exploitant de l’installation par l’autorité administrative est subordonné au respect de prescriptions techniques définissant notamment les mesures de confinement nécessaires à la protection de l’environnement et de la santé publique et les moyens d’intervention en cas de sinistre.
« L’évaluation des risques et les mesures de confinement et autres mesures de protection appliquées sont régulièrement revues.
« Un nouvel agrément doit être demandé en cas de modification notable des conditions de l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés ayant fait l’objet de l’agrément.
« III. - Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » ;
7° et 8° Supprimés………………………………………………………. ;
9° L’article L. 532-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 532-5. - Lorsque l’autorité administrative dispose d’éléments d’information qui pourraient remettre en cause l’évaluation des risques pour l’environnement et la santé publique liés à l’utilisation confinée, elle peut :
« 1° Soumettre à agrément l’utilisation déclarée ;
« 2° Modifier les prescriptions initiales ou imposer des prescriptions nouvelles ;
« 3° Suspendre l’agrément ou les effets de la déclaration pendant le délai nécessaire à la mise en œuvre des mesures propres à faire disparaître ces risques ;
« 4° Retirer l’agrément ou mettre fin aux effets de la déclaration si ces risques sont tels qu’aucune mesure ne puisse les faire disparaître.
« Ces décisions sont prises, sauf urgence, après avis du Haut conseil des biotechnologies. » ;
10° Les deux premiers alinéas de l’article L. 532-6 sont ainsi rédigés :
« Toute demande d’agrément pour une utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés est assortie du versement d’une taxe à la charge de l’exploitant de l’installation.
« Le montant de cette taxe est fixé par arrêté des ministres compétents en fonction de la nature de la demande et de la destination, lucrative ou non, de l’utilisation, dans la limite de 2 000 €. » ;
11° L’article L. 536-3 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « ou d’enseignement » sont remplacés par les mots : «, d’enseignement ou de production industrielle » ;
b) Supprimé……………………………………………………………….. ;
c) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Le fait d’exploiter une installation utilisant des organismes génétiquement modifiés à des fins de recherche, de développement, d’enseignement ou de production industrielle en violation des prescriptions imposées en application du 2° de l’article L. 532-5 ou en violation d’une mesure de suspension ou de retrait d’agrément prise en application des 3° ou 4° de l’article L. 532-5 est puni de deux ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende. »
CHAPITRE V
[Division et intitulé supprimés]
Article 9
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’intitulé du chapitre III du titre III du livre V est ainsi rédigé : « Dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés » ;
1° bis Avant l’article L. 533-1, il est inséré une division ainsi intitulée : « Section 1. - Dispositions générales » ;
2° L’article L. 533-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 533-2. - Au sens du présent chapitre, on entend par dissémination volontaire toute introduction intentionnelle dans l’environnement d’un organisme génétiquement modifié ou d’une combinaison d’organismes génétiquement modifiés pour laquelle aucune mesure de confinement particulière n’est prise pour en limiter le contact avec les personnes et l’environnement et pour assurer à ces derniers un niveau élevé de sécurité. » ;
2° bis Après l’article L. 533-2, il est inséré une division ainsi intitulée : « Section 2. — Dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché » ;
3° L’article L. 533-3 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, après le mot : « volontaire », sont insérés les mots : « d’organismes génétiquement modifiés à toute autre fin que la mise sur le marché » ;
a bis) La première phrase du second alinéa est ainsi rédigée :
« Cette autorisation est délivrée par l’autorité administrative après avis du Haut conseil des biotechnologies qui examine les risques que peut présenter la dissémination pour l’environnement et la santé publique. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Ne peut être autorisée la dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché d’organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes codant des facteurs de résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires, pour lesquels l’évaluation des risques conclut qu’ils sont susceptibles d’avoir des effets préjudiciables à l’environnement ou à la santé publique. » ;
4° Après l’article L. 533-3, il est inséré deux articles L. 533-3-1 et L. 533-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 533-3-1. - Après la délivrance d’une autorisation en application de l’article L. 533-3, si l’autorité administrative vient à disposer d’éléments d’information susceptibles d’avoir des conséquences significatives du point de vue des risques pour l’environnement et la santé publique, si de nouveaux éléments d’information sur ces risques deviennent disponibles ou si une modification, intentionnelle ou non, de la dissémination volontaire est susceptible d’avoir des conséquences pour l’environnement et la santé publique, elle soumet ces éléments d’information pour évaluation au Haut conseil des biotechnologies et les rend accessibles au public.
« Elle peut exiger du bénéficiaire de l’autorisation qu’il modifie les conditions de la dissémination volontaire, qu’il la suspende ou qu’il y mette fin, et elle en informe le public.
« Art. L. 533-3-2. - S’agissant de plantes, semences et plants génétiquement modifiés, l’autorité administrative compétente au titre de l’article L. 533-3 organise, à la demande des maires des communes dans lesquelles se déroulent les essais et pendant la durée de ceux-ci, une ou plusieurs réunions d’information en association avec les détenteurs des autorisations de dissémination concernés. » ;
4° bis Avant l’article L. 533-4, il est inséré une division ainsi intitulée : « Section 3. - Mise sur le marché » ;
5° L’article L. 533-5 est ainsi modifié :
a) La première phrase du second alinéa est complétée par les mots : « et après avis du Haut conseil des biotechnologies » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Ne peut être autorisée la mise sur le marché de produits composés en tout ou partie d’organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes codant des facteurs de résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires, pour lesquels l’évaluation des risques conclut qu’ils sont susceptibles d’avoir des effets préjudiciables sur l’environnement ou la santé publique. » ;
6° L’article L. 533-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 533-6. - Les autorisations de mise sur le marché délivrées par les autres États membres de l’Union européenne ou l’autorité communautaire compétente en application de la réglementation communautaire valent autorisation au titre du présent chapitre. » ;
7° Après l’article L. 533-7, sont insérés deux articles L. 533-8 et L. 533-9 ainsi rédigés :
« Art. L. 533-8. - I. - Après la délivrance d’une autorisation en application des articles L. 533-5 ou L. 533-6, lorsque l’autorité administrative a des raisons précises de considérer qu’un organisme génétiquement modifié autorisé présente un risque pour l’environnement ou la santé publique en raison d’informations nouvelles ou complémentaires devenues disponibles après la délivrance de l’autorisation et qui affectent l’évaluation des risques pour l’environnement et la santé publique, ou en raison de la réévaluation des informations existantes sur la base de connaissances scientifiques nouvelles ou complémentaires, elle peut :
« 1° Limiter ou interdire, à titre provisoire, l’utilisation ou la vente de cet organisme génétiquement modifié sur son territoire, après avis du Haut conseil des biotechnologies ;
« 2° En cas de risque grave, prendre des mesures d’urgence consistant notamment à suspendre la mise sur le marché ou à y mettre fin et en informer le public.
« II. - L’autorité administrative informe sans délai la Commission européenne et les autres États membres des mesures prises au titre du I et indique les motifs de sa décision, en fournissant sa réévaluation des risques pour l’environnement et la santé publique et en indiquant si les conditions de l’autorisation doivent être modifiées et comment, ou s’il convient de mettre fin à l’autorisation et, le cas échéant, les informations nouvelles ou complémentaires sur lesquelles elle fonde sa décision.
« Art. L. 533-9. - L’État assure une information et une participation du public précoces et effectives avant de prendre des décisions autorisant ou non la dissémination volontaire dans l’environnement et la mise sur le marché d’organismes génétiquement modifiés. » ;
8° L’article L. 535-2 est abrogé ;
9° L’article L. 535-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 535-4. - Toute demande d’autorisation de dissémination volontaire est assortie du versement d’une taxe à la charge du demandeur. Le montant de cette taxe est fixé par arrêté du ou des ministres compétents en fonction de la nature de la demande et de la destination, lucrative ou non, de la dissémination, dans la limite de 15 000 €.
« Le recouvrement et le contentieux du versement institué au présent article sont suivis par les comptables du Trésor selon les modalités fixées aux articles 81 à 95 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique. » ;
10° Dans le I de l’article L. 535-5, la référence : « à l’article L. 535-2 » est remplacée par les références : « aux articles L. 533-3-1 et L. 533-8 » ;
11° Dans le premier alinéa de l’article L. 536-1, les références : « L. 125-3, » et «, L. 533-2 » sont supprimées ;
12° Dans l’article L. 536-2, la référence : « L. 533-7 » est remplacée par la référence : « L. 533-8 » ;
13° Dans le 1° de l’article L. 536-4, après le mot : « volontaire », sont insérés les mots : « à toute autre fin que la mise sur le marché » ;
14° Dans le premier alinéa de l’article L. 536-5, la référence : « L. 535-2, » est remplacée par les références : « L. 533-3-1, L. 533-8 » ;
15° Dans l’article L. 536-7, le mot : « chapitre » est remplacé par les mots : « titre et des textes pris pour leur application ».
CHAPITRE V BIS
[Division et intitulé supprimés]
Article 10
……………………………Supprimé…………………………..
Article 11
Le livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique est complété par un titre V ainsi rédigé :
« TITRE V
« PRODUITS DE SANTÉ COMPOSÉS EN TOUT OU PARTIE D’ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
« Art. L. 5150-1. - Les articles L. 125-3, L. 531-1 à L. 531-4, L. 533-1 à L. 533-8, L. 535-1 à L. 535-9, L. 536-1 à L. 536-8 et L. 537-1 du code de l’environnement s’appliquent aux produits mentionnés à l’article L. 5311-1 et aux médicaments vétérinaires mentionnés à l’article L. 5141-1. »
CHAPITRE V TER
Soutien à la recherche
Article 11 bis A
Le 4° de l’article L. 114-3-1 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À ce titre, l’agence veille à ce que les procédures d’évaluation mises en œuvre prennent en compte les activités d’expertise conduites par ces personnels dans le cadre de commissions à caractère consultatif placées auprès d’une autorité de l’État, quelles que soient leurs dénominations, ou dans le cadre des activités d’une autorité administrative indépendante. »
Article 11 bis
……………………………………Supprimé…………………………………….
Article 11 ter
La recherche publique développe les recherches consacrées à la génomique végétale, à la toxicologie, à l’épidémiologie et à l’entomologie, soutient le développement des techniques permettant de détecter les organismes génétiquement modifiés et leur traçabilité dans les produits, d’étudier leur toxicité à long terme et d’intensifier les recherches sur la précision de l’insertion du transgène et l’interaction entre l’insertion du gène et l’expression du génome. Elle encourage les coopérations scientifiques avec les pays du Sud, soutient des réseaux épidémiologiques performants et participe au développement d’un réseau européen d’allergologie.
Les pouvoirs publics favorisent la mobilité des chercheurs qui s’engagent dans cette expertise scientifique.
CHAPITRE VI
Dispositions diverses
Article 12
Le II de l’article 90 de la loi de finances rectificative pour 1992 (n° 92-1476 du 31 décembre 1992) est abrogé.
Article 13
Le dernier alinéa de l’article L. 533-3 du code de l’environnement entre en vigueur au 1er janvier 2009.
Les autorisations de dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché délivrées avant le 1er janvier 2009 pour des organismes présentant les caractéristiques énoncées au dernier alinéa du même article L. 533-3 prennent fin à cette date.
Article 14
Les critères de classement des organismes génétiquement modifiés en vigueur à la date de la publication de la présente loi s’appliquent jusqu’à leur modification par le décret prévu au dernier alinéa de l’article L. 532-1 du code de l’environnement dans sa rédaction issue de l’article 8 de la présente loi.
Article 15
I. - Les lots de semences contenant des semences génétiquement modifiées sont clairement étiquetés. Ils portent la mention : « contient des organismes génétiquement modifiés ».
Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux traces accidentelles ou techniquement inévitables présentes en dessous d’un certain seuil. Ce seuil est fixé par décret, espèce végétale par espèce végétale.
II. - Les seuils fixés en application du I sont en vigueur jusqu’à ce que des seuils pour les mêmes espèces végétales soient fixés conformément au paragraphe 2 de l’article 21 de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil.
III. - Ces dispositions ne sont applicables qu’aux semences dont la destination finale est le territoire français.
M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l’article 1er.
Article 1er
Mme Marie-Christine Blandin. J’interviendrai sur ce seul article car c’est le plus important, et par son contenu et par son contexte.
Commençons par la communication. Mardi dernier, à Orléans, le Président de la République disait : « Je pense au principe de précaution, je pense à la transparence […]. Je pense à la participation de la société civile aux décisions […]. »
Il y a aussi le débat du Grenelle et ses arbitrages, à qui l’on doit : une Haute autorité qui reflète la mixité de la prise de décision et la pluridisciplinarité, davantage de recherche durable, la liberté de produire et consommer sans OGM et la possibilité de produire avec OGM de façon encadrée, les critères du développement durable, la règle du « pollueur-payeur ».
Il y a le ministre du développement durable et sa courageuse secrétaire d’État, qui ont permis l’interdiction du Monsanto 810.
Mais il y a aussi le ministre de l’agriculture, qui, par son abstention à Bruxelles en septembre, permet trois nouvelles autorisations de maïs transgénique.
Et puis, il y a le Parlement, et en particulier le Sénat, qui n’a entendu ni les consommateurs, qui ne veulent pas d’OGM dans leurs assiettes, ni les paysans, qui craignent des récoltes contaminées, ni les chercheurs en dehors des spécialistes de biologie moléculaire.
On n’a pas écouté les chercheurs en écologie ni les chercheurs en économie qui, s’ils considèrent que l’agriculture biologique peut nourrir des milliards d’habitants sans dépendance pétrolière, observent par ailleurs que l’extension de la monoculture du soja transgénique au Brésil se traduit déjà par une dégradation des sols et des pertes de biodiversité considérables et que le problème de la faim dans le monde est avant tout une question de répartition des ressources : aujourd’hui, cultures et innovations sont tournées vers l’alimentation du bétail des riches, surconsommateurs de viande !
Et même, certains chercheurs en biologie moléculaire ont osé dire, comme Christian Vélot, le côté aléatoire des transgénèses et de leurs expressions. Ceux-là voient leur équipe et leurs thésards privés de moyens…
Ne soyons pas étonnés : en 2003, une enquête de l’Institut d’études politiques de Paris, réalisée auprès de 200 parlementaires, révélait que seuls 4 % d’entre eux considéraient la sauvegarde de la faune et de la flore comme un sujet important. Et, quand 34 % des Français voyaient un lien entre désordres climatiques et effet de serre, seulement 21 % des parlementaires l’admettaient !
Au-delà de la non-écoute, ce qui est le plus gênant, c’est de découvrir dans les avis du rapporteur la copie conforme des préconisations, qui nous ont été adressées à tous, du Groupement national des industries semencières, le GNIS, et de l’Union des industries de la protection des plantes, l’UIPP. Curieux, ces fabricants de pesticides qui font la promotion des OGM, dont on nous dit qu’ils vont éviter l’utilisation des pesticides !
Ils demandaient : « un régime de responsabilité qui ne soit pas trop contraignant », il en a été ainsi décidé ; « une autorité avec deux comités », c’est fait ; « une évaluation qui doit rester la compétence exclusive des scientifiques », c’est voté ; « une saisine de l’autorité qui ne soit pas trop large », c’est bordé ; « le refus de la subsidiarité et de l’interdiction sur certains territoires », c’est engrangé ; « le refus de l’étiquetage des produits », c’est dans la loi !
Malgré les efforts déployés par les députés à l’article 1er pour protéger les cultures « sans OGM », le seuil scélérat de 0,9 %, promu par les firmes, est retenu grâce au sous-amendement du Sénat ! Carton plein pour les semenciers, qui ont réussi le tour de force d’obtenir de la majorité sénatoriale que la responsabilité en cas de dissémination pèse sur les seules épaules des agriculteurs, dont elle se dit pourtant proche ! Le chimiste Monsanto se frotte les mains.
Enfin, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, contre ces prédateurs de la biodiversité, contre ces destructeurs de la liberté de cultiver et de manger sans OGM, l’atelier intergroupe OGM du Grenelle de l’environnement – y compris la FNSEA – a heureusement inscrit au nombre de ses consensus la « non-brevetabilité du vivant ». Eh bien, cette mesure est passée à la trappe, comme toute référence aux certificats d’obtention végétale, les COV, pourtant promus dans un texte adopté par le Sénat ! Il n’y a pas de hasard !
Pour nous, il y a avant tout le bien commun, celui de nos enfants, celui des peuples d’ailleurs comme d’ici, celui qui est fabriqué entre nature et culture. Dans son intervention, Daniel Raoul, parlant du blé et de l’épeautre, oubliait les quelques centaines de millions d’années facteurs d’ajustements judicieux, bien plus pertinents que le hasard de nos chers inventeurs du biomoléculaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole sur l’un des articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je me permettrai de compléter les propos de mes collègues Jacques Muller et Marie-Christine Blandin en insistant sur ce qui nous paraît un des points de controverse les plus saillants de ce projet de loi : son incompatibilité avec la Constitution.
Cette opposition à la Constitution ne concerne pas seulement le fond du texte : la procédure qui a conduit à l’adoption de ce projet de loi est elle-même entachée d’irrégularités manifestes.
Je commencerai par ce qui me paraît être une violation manifeste de l’article 45 de la Constitution : la convocation de la commission mixte paritaire après le rejet du texte à l’Assemblée nationale par l’adoption d’une motion de procédure.
Le 13 mai, l’Assemblée nationale a rejeté le texte du projet de loi relatif aux OGM. Le règlement de l’Assemblée nationale est clair : l’adoption d’une motion de procédure « entraîne le rejet du texte à l’encontre duquel elle a été soulevée ». Selon ce même règlement, « les propositions repoussées par l’Assemblée ne peuvent être reproduites avant un délai d’un an ». Dont acte.
Le Gouvernement a cru bon de convoquer une commission mixte paritaire pour entériner le texte du projet de loi, sans autre forme de débat, car il n’y a pas eu de débat, mon collègue Jacques Muller, membre de cette commission mixte paritaire, l’a déjà mentionné.
Dans ces circonstances, le recours à l’article 45 de la Constitution est purement et simplement un détournement de procédure. En effet, selon cet article, le Gouvernement ne peut convoquer une commission mixte paritaire qu’après deux lectures d’un texte devant chaque assemblée et à la suite d’un désaccord entre les deux chambres.
Le texte est très clair et donc le détournement de procédure évident : l’adoption de la question préalable a eu pour effet d’écarter la seconde lecture. La réunion de la commission mixte paritaire n’est qu’une manœuvre dilatoire du Gouvernement pour court-circuiter le débat et faire adopter au forceps ce texte, dont les députés de la majorité ont pourtant permis le rejet par leur brillante et peut-être courageuse absence.
Pour reprendre une image appropriée, on pourrait dire que ce « fauchage volontaire » du débat démocratique n’intervient pas dans des conditions sereines. Le rejet du texte aurait dû être retenu à sa juste mesure, mais le Gouvernement n’a pas voulu prendre en compte le désaveu dont il a fait l’objet.
Sur le fond, je tiens à vous faire part de mes interrogations sur la compatibilité de ce texte avec la Charte de l’environnement, qui est aujourd’hui partie intégrante du bloc de constitutionnalité.
En faisant adopter un texte qui ne prend pas en compte les dommages éventuels de la généralisation des OGM dans le secteur agro-alimentaire, le Gouvernement balaye d’un revers de main le principe de précaution au profit d’un principe moins honorable : la liberté de cultiver avec ou sans OGM.
En posant le principe d’une « évaluation préalable indépendante et transparente des risques pour l’environnement et la santé publique », l’article 1er du texte issu de la commission mixte paritaire ne fait que reprendre le principe de prévention visé à l’article 3 de la Charte, le principe de précaution étant, quant à lui, totalement obéré.
Le principe de précaution est un « principe d’action par excellence » – je reprends les propos que vous avez tenus à l’Assemblée nationale le 25 mai 2004, madame la secrétaire d’État. II impose aux législateurs que nous sommes de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir tout dommage à l’environnement, même si la réalisation de ce dommage est incertaine.
Malheureusement, ce texte ne présente aucune de ces garanties. Où est donc passé le principe de précaution ? La mise en place d’un régime d’indemnisation des productions contaminées est, à cet égard, d’une hypocrisie sans égale : au lieu d’éviter le dommage, on indemnise le préjudice subi. Autrement dit, au lieu de prévenir, on guérit par assurance interposée. Est-ce là votre manière d’être écologistes, mes chers collègues ?
Autre exemple d’incompatibilité de ce texte avec le principe de précaution : la loi précise que des conditions techniques permettront de limiter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres productions. Ces conditions techniques qui régiront la culture et la récolte d’OGM se limiteront donc à éviter une contamination des cultures voisines sans prendre en considération l’environnement dans sa globalité. En d’autres termes, elles ne constituent pas des mesures nécessaires et efficaces conformément au principe constitutionnel de précaution.
La pollution transgénique est incontrôlable, irréversible, dangereuse. Elle affecte de manière grave et à long terme l’environnement. Autoriser son introduction dans la nature, c’est permettre son déploiement dans l’environnement et dans la chaîne alimentaire.
Cette contamination en chaîne, dont vous porterez la responsabilité, ouvre une boîte de Pandore dont on connaît déjà les risques, sur le plan scientifique, pour la santé et pour l’environnement : destruction de la biodiversité, développement d’allergies chez l’être humain, disparition d’espèces. Bref, avec ce texte, vous allez créer des mutants : d’abord dans nos champs, puis dans nos assiettes, enfin dans notre nature.
En conséquence, non seulement nous voterons contre ce projet de loi, mais nous nous emploierons, avec nos partenaires, à le soumettre au Conseil constitutionnel afin que celui-ci se prononce sur son inconstitutionnalité et sur les irrégularités de procédure qui ont présidé à sa discussion. Quoi qu’il en soit, lorsque les dangers que nous évoquons se matérialiseront, vous ne pourrez pas dire : « Nous ne savions pas. » (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons au terme d’un débat dense, nourri et animé, qu’il ait eu lieu dans l’enceinte parlementaire ou à l’extérieur.
Aujourd’hui, nous pouvons convenir que tous les points de vue, toutes les analyses, toutes les convictions se sont exprimés, souvent avec force et passion.
Cependant, si, sur un sujet qui soulève chez nos concitoyens de nombreuses interrogations, nous pouvons accepter que les échanges soient parfois vifs, il est de notre devoir en tant que législateurs de faire preuve de maîtrise et de modération.
M. Charles Revet. Très bien !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Nous pensons que le temps de l’apaisement est venu.
Le texte que nous allons voter, parce qu’il se situe à un point d’équilibre, nous permet d’apporter des assurances à tous nos concitoyens sur les OGM.
Je tiens à rappeler que ce texte est, d’abord, la transposition dans notre droit de directives européennes, et, par principe, nous devons respecter nos engagements européens. Mais il n’est pas inintéressant de rappeler que la directive de 1998 que nous transposons a été adoptée à Bruxelles alors que M. Jospin était Premier ministre. (Et oui ! sur les travées de l’UMP.)
Il faut aussi dire clairement que le manquement à nos obligations européennes rendrait l’État français passible du paiement d’une amende et d’une astreinte de 366 744 euros par jour de retard. Notre budget peut-il le supporter ?
Cela étant dit, le texte que nous allons adopter permet de doter notre pays d’un cadre législatif rigoureux sur les OGM, comme les acteurs du Grenelle de l’environnement l’ont souhaité. Il applique les principes de précaution, d’information, de transparence et de responsabilité au travers de dispositions dont je ne retiendrai que les principales.
Le projet de loi instaure le Haut conseil des biotechnologies, instance unique d’évaluation à laquelle participera la société civile.
L’expérimentation et la mise en culture des OGM sont strictement encadrées : demande d’autorisation préalable, évaluation indépendante des risques, déclaration des cultures, transparence de leur situation, mise en œuvre de mesures techniques spécifiques.
La transparence est assurée à plusieurs niveaux, notamment par la déclaration des parcelles cultivées et la tenue d’un registre public de ces parcelles, comme vous l’avez rappelé, madame le secrétaire d’État.
Ce texte doit nous permettre de poursuivre la recherche sur les OGM, seul moyen raisonnable d’acquérir des certitudes sur leurs potentialités.
L’application stricte des principes d’autorisation et de surveillance des OGM doit permettre de déceler en amont tout risque susceptible d’affecter la santé ou l’environnement. Pour le cas où, malgré tout, le risque adviendrait, est instauré un principe de responsabilité sans faute de l’exploitant cultivant des OGM ; il implique une indemnisation de l’agriculteur qui aurait vu sa récolte affectée par des cultures OGM.
En résumé, ce texte garantit le respect de la liberté de choix, seul moyen de préserver les convictions individuelles, et permet la coexistence des cultures, qu’elles soient sous label de qualité, de montagne, traditionnelle ou biologique.
Dans ces conditions, le groupe UMP votera le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, le Sénat ayant largement participé à son élaboration au cours de la navette parlementaire, en particulier du fait des propositions de notre remarquable rapporteur, Jean Bizet. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour explication de vote.
M. Paul Girod. Je voudrais simplement conseiller à Mme Boumediene-Thiery de se reporter aux précédentes décisions du Conseil constitutionnel, qui s’est déjà prononcé sur le sujet des commissions mixtes paritaires. (Très bien ! sur plusieurs travées de l’UMP.)
Mme Alima Boumediene-Thiery. Nous verrons bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?….
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 93 :
Nombre de votants | 238 |
Nombre de suffrages exprimés | 225 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 113 |
Pour l’adoption | 183 |
Contre | 42 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi est adopté définitivement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Je tiens à remercier le groupe UMP, rejoint par le groupe UC-UDF, de sa fidélité et de son sens des responsabilités, et tout particulièrement mes collègues de la commission des affaires économiques ainsi que son président, qui, depuis un certain nombre d’années, me font confiance sur ce sujet délicat.
Je me réjouis du vote de ce texte, même si – je l’ai dit en préambule – il n’est pas parfait. Nous ne sommes pas parvenus, loin s’en faut, à la loi fondatrice sur les biotechnologies que nous avions imaginée dès 2003, mais, dans la conjoncture actuelle, ce texte me paraît être le meilleur compromis possible.
Si le Sénat avait imaginé dès 2003 une loi fondatrice sur les biotechnologies, c’était afin que la France ne reste pas à l’écart de ce qui se passe dans le monde. Vous l’avez constaté, nous assistons depuis quelques mois à une augmentation de la demande alimentaire mondiale et à une modification des modes alimentaires des pays-clés que sont la Chine et l’Inde, ce qui a entraîné un bouleversement du cours des matières premières sur l’échiquier international. Par ailleurs, nous assistons également à une modification du climat. Bien évidemment, les biotechnologies ne peuvent permettre de résoudre tous ces problèmes, mais elles y concourront demain.
Si le Sénat a souhaité cette loi fondatrice, c’est également parce que la France est en Europe le chef de file des pays à grande vocation agricole. La France ne doit pas mettre l’Europe hors de la course économique mondiale dans le domaine des biotechnologies. Il est vrai que, en matière de brevetabilité, s’agissant uniquement de la notion de trait génétique, une course est engagée, que nous avons malheureusement en partie perdue.
Je rappelle que les biotechnologies ne sont que la résultante du saut technologique qu’a constitué l’hybridation voilà un demi-siècle. Chaque époque a sa vérité. Aujourd’hui, c’est à un autre saut technologique que nous sommes conviés. Je suis conscient que nos concitoyens n’y sont pas encore totalement préparés, même si un sondage publié en début de semaine montre que les Français pensent que le Gouvernement fait le maximum, en termes de sécurité sanitaire, pour les protéger.
Je vous ai bien écoutée, madame la secrétaire d’État. Je rappelle que, en 2004, nous avons tous deux été rapporteurs au sein de nos chambres respectives – vous à l’Assemblée nationale, moi au Sénat en tant que rapporteur pour avis –, du texte instituant le principe de précaution. Je ne regrette pas du tout l’instauration de ce principe, même s’il est vrai qu’il m’a tout d’abord inspiré une certaine crainte, avant que la rédaction de l’article 5 du texte ne soit précisée.
Cela étant, je suis malgré tout quelque peu inquiet de constater que nous glissons tout doucement du principe de précaution vers le principe de suspicion.
M. Jean-Patrick Courtois. C’est vrai !
M. Jean Bizet, rapporteur. J’aimerais, madame la secrétaire d’État, que nous fassions très attention à ne pas étendre cette notion à l’échelon communautaire.
C’est une chose d’être précautionneux, c’en est une autre d’être en permanence dans la suspicion. Ce n’est pas ainsi que nous nous tournerons vers l’avenir et que nous resterons dans la course.
Sachez que, sur ce sujet, le Sénat, sera toujours extrêmement vigilant. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, après le vote de ce projet de loi, qui a suscité de vifs débats, je tiens à vous livrer le sentiment du président de la commission des affaires économiques.
Comme Jean Bizet l’a rappelé, la transposition de la directive européenne n’a pas été pour nous l’occasion de découvrir les OGM. Mon prédécesseur à la présidence de la commission des affaires économiques, Gérard Larcher, avait pris l’initiative de créer une mission d’information sur ce sujet, dont étaient membres Jean-Marc Pastor et Jean Bizet. Un travail considérable avait alors été réalisé. Les propositions de la mission d’information avaient même été adoptées à l’unanimité.
Par ailleurs, je tiens à relever la sérénité avec laquelle se sont déroulés les travaux de la commission des affaires économiques. Tous ses débats ont permis à chacun de ses membres de s’exprimer, dans le plus grand respect. Certains ont choisi de s’exprimer dans les médias, ils étaient libres de le faire.
En cet instant, je tiens à remercier publiquement Jean Bizet du travail qu’il a réalisé. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
Je tiens surtout à réaffirmer que, contrairement à ce qu’a dit notre collègue Jacques Muller, le rapporteur et l’ensemble des membres de la commission ont travaillé en toute indépendance. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.) Nous n’avons aucun doute à cet égard. Il est bien naturel que, sur un sujet aussi important, un rapporteur entende toutes les personnes concernées. Jean Bizet, fort de ses convictions, a toujours été soutenu par la majorité de la commission.
Mes chers collègues, il faut voter non pas par passion, mais avec raison. Je pense que c’est ce que nous avons fait.
M. Michel Charasse. Cela devrait être rappelé à beaucoup de monde !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si le « sans OGM » n’est pas aujourd’hui défini, un Haut conseil des biotechnologies, qui s’est substitué à la Haute autorité, a été mis en place. Il est constitué d’un comité scientifique et d’un comité de la société civile. Même s’il est très important que la société civile puisse émettre des recommandations, il était essentiel – et cela doit rassurer nos concitoyens – que nous nous engagions dans la modernisation sur le fondement d’avis scientifiques. Personnellement, je n’ai pas les connaissances scientifiques requises en matière d’OGM et, même si j’ai cru comprendre qu’il y avait ici de nombreux spécialistes (sourires), je pense que nous devons faire confiance aux scientifiques.
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Nous pouvons faire confiance à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, qui compte 8 000 chercheurs, à l’AFSSA, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, et à d’autres organismes.
Ce texte a ému nos concitoyens. Il nous faut maintenant les rassurer.
Pour finir, je tiens à remercier l’ensemble des présidents de groupe qui ont soutenu M. le rapporteur et la commission des affaires économiques. Je pense en particulier à Josselin de Rohan, alors président du groupe UMP, à Henri de Raincourt, qui lui a succédé dans le même esprit, à Michel Mercier, de l’UC-UDF – une majorité du groupe de l’Union centriste a voté ce projet de loi –, ainsi qu’à certains membres du groupe RDSE. Enfin, je remercie également notre collègue Philippe Adnot.
La raison a succédé à la passion. C’est ce que nos concitoyens attendaient. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom du Gouvernement, je vous remercie d’avoir voté ce texte. La France dispose désormais en matière d’OGM d’un encadrement juridique.
Le Gouvernement va maintenant s’attacher à décliner les principes et les dispositions de ce texte dans l’ordre réglementaire. Le Président de la République l’a rappelé encore mardi, nous saisirons très rapidement le Haut conseil des biotechnologies afin de proposer une définition du « sans OGM ». Il est en effet étrange que les textes européens définissent ce qu’est un produit contenant des OGM, mais pas ce qu’est le « sans OGM ». C’est pourtant cette dernière définition que les consommateurs demandent.
La France est désormais en règle avec les dispositions européennes. Elle s’en trouve renforcée au moment où elle s’apprête à prendre la présidence de l’Union européenne, de manière générale, mais aussi, plus particulièrement, sur la question des OGM.
Nous ferons en sorte que la question des OGM soit évoquée lors des différents conseils Environnement afin de faire évoluer les règles, conformément aux engagements que nous avons pris.
Je tiens aussi et surtout à tous vous remercier du travail important que vous avez réalisé au sein de la Haute Assemblée, en particulier vous, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des affaires économiques. Vous avez en effet consacré de très longues heures à ce texte.
Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, pour l’excellente ambiance dans laquelle s’est déroulé ce débat.
Enfin, je félicite le président de la Haute Assemblée pour la qualité et la sérénité des échanges qui ont lieu en ces murs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. Madame la secrétaire d’État, je me fais l’interprète de tous mes collègues pour vous remercier de votre participation. Nous sommes sensibles aux compliments que vous adressez à la Haute Assemblée.
6
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission des affaires sociales m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant modernisation du marché du travail.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Guy Fischer.)
PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
7
Résolution du Sénat sur le secteur des communications électroniques
M. le président. Je vous informe que la conférence des présidents, lors de sa réunion du 21 mai, a décidé de ne pas inscrire à l’ordre du jour du Sénat la proposition de résolution de la commission des affaires économiques sur le secteur des communications électroniques.
En conséquence, la proposition de résolution de la commission devient résolution du Sénat.
8
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant modernisation du marché du travail.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Nicolas About, Pierre Bernard-Reymond, Michel Esneu, Alain Gournac et Mmes Catherine Procaccia, Christiane Demontès et Annie David.
Suppléants : M. Guy Fischer, Mme Françoise Henneron, M. Dominique Leclerc, Mme Raymonde Le Texier, et MM. Georges Mouly, Louis Souvet et Jean-Marie Vanlerenberghe.
9
Commission mixte paritaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.
10
Opérations spatiales
Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif aux opérations spatiales (nos 272, 328).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l’année 2008 a d’ores et déjà, à travers différents événements, apporté sa pierre à l’aventure spatiale française et européenne.
Elle a débuté avec le séjour de notre compatriote Léopold Eyharts sur la station spatiale internationale.
Elle s’est poursuivie avec le lancement, au mois de mars, de l’ATV Jules Verne, puis avec l’impressionnant amarrage automatique de ce véritable « cargo de l’espace ». Une fois encore, par cette première mondiale, l’Europe faisait la preuve de ses capacités techniques et de la rigueur de ses scientifiques et de ses industriels.
Voilà quelques jours, c’était le satellite Giove-B qui était mis en orbite, apportant une nouvelle contribution au projet européen Galileo, qui permettra à notre continent de se doter de son propre système de localisation.
Le 15 juin prochain, c’est le satellite Jason-2 qui sera lancé. Fruit de la collaboration entre le Centre national d’études spatiales et la NASA, il permettra d’améliorer la connaissance du système océanique et d’effectuer des prévisions climatiques à long terme.
Ces événements ne sont pas anodins. Bien au contraire, ils témoignent de l’intérêt de l’espace, non comme outil de puissance entre États rivaux, mais comme lieu de toutes les innovations qui changent en profondeur notre vie quotidienne.
Plus qu’un rêve de grandeur ou le témoignage d’une ambition démesurée, c’est désormais la volonté d’améliorer concrètement et au quotidien la vie de nos concitoyens et, plus largement, des citoyens européens qui fonde notre politique spatiale. Car les avancées dans ce domaine nous sont utiles tous les jours : du téléphone aux soins à distance, d’Internet à la météo, à chaque minute de notre vie, sans toujours en avoir conscience, nous avons besoin d’un outil dont l’origine première n’est autre que l’espace.
Connues ou ignorées, nombreuses sont les innovations nées de la conquête spatiale et l’on mesure mal à quel point nos vies seraient profondément modifiées si les satellites cessaient de fonctionner.
Plus qu’un simple enjeu scientifique, au-delà de ses dimensions stratégiques, la politique spatiale constitue un enjeu économique et social.
Et c’est précisément le développement extraordinaire de ces activités qui nous impose aujourd’hui de définir un cadre juridique neuf. Il s’agit de mettre en place un cadre sécurisé, propre à prémunir chacun contre les dangers qui entourent nécessairement les opérations menées dans ce secteur – le professionnalisme dont les opérateurs européens n’ont cessé de faire preuve nous a parfois fait oublier qu’il existait des risques –, et clair, afin d’offrir à tous les acteurs un environnement favorable au développement de leurs activités.
Les objets dans l’espace extra-atmosphérique, comme les opérateurs qui en ont la charge, se sont multipliés. Les acteurs du secteur, qui étaient autrefois exclusivement sous le contrôle de l’État, se sont diversifiés. D’autres opérateurs, privés ceux-là, sont venus les rejoindre, désireux d’exercer leurs compétences dans un secteur riche de perspectives industrielles et commerciales multiples. Le cadre juridique des opérations spatiales se devait donc de prendre en compte cette nouvelle réalité.
En premier lieu, il faut s’assurer de la capacité des opérateurs à mener à bien les opérations qu’ils entendent conduire. À cette fin, les demandeurs seront à l’avenir dans l’obligation de prouver qu’ils présentent les garanties techniques, financières et morales exigibles d’un secteur de haut niveau technologique qui, comme nous l’ont montré les opérateurs actuels, ne peut admettre en son sein ni amateurisme, ni négligence, ni improvisation.
En second lieu, il faut clarifier le régime de responsabilité des opérations spatiales et des opérateurs qui les conduisent. Le professionnalisme et l’exigence des opérateurs français et européens nous ont parfois fait oublier la dangerosité d’une activité qui se situe sans cesse aux limites de la technologie. Or il n’est pas envisageable que l’État se voie imputer l’ensemble des risques relevant d’opérations conduites par des opérateurs privés. Compte tenu des risques encourus et du montant potentiellement très élevé des éventuels dommages, il n’est pas non plus raisonnable d’en faire porter la charge intégrale aux seuls opérateurs privés, qui ont par ailleurs démontré leur professionnalisme.
L’objectif du projet de loi est précisément de parvenir à un tel point d’équilibre, c'est-à-dire à un cadre législatif clair permettant de sécuriser l’environnement dans lequel évoluent les intervenants du secteur. C’est une condition indispensable à son développement économique, que nous appelons toutes et tous de nos vœux.
Sur ce point, je tiens à saluer la qualité du travail des parlementaires. Tout au long des débats, par leurs amendements, ceux-ci se sont attachés à proposer les réponses les mieux adaptées aux nouvelles questions soulevées par l’évolution du secteur.
Ainsi, les modifications qui ont été apportées au projet de loi par l’Assemblée nationale se sont inscrites dans la droite ligne des travaux accomplis d’abord par le Sénat, tout particulièrement par votre rapporteur, M. Henri Revol.
L’introduction d’une distinction entre phase de lancement et phase de maîtrise de l’objet spatial permet d’attribuer à chaque opérateur une part de responsabilité conforme aux risques réellement encourus par les opérations qu’il mène, ces risques étant très différents en phase de lancement et en phase d’entretien des satellites.
Prenant acte de la pratique, restera ainsi ouverte la possibilité pour les opérateurs de satellites de demeurer leur propre assureur lorsque leurs satellites seront en position stationnaire, c’est-à-dire quand ils ne présenteront pas de risques majeurs pour leur environnement.
Le texte reste mesuré quant aux nouvelles obligations des opérateurs spatiaux. Pour l’État, celles-ci se limitent strictement à s’assurer que les opérations se dérouleront dans les conditions de sécurité les plus strictes.
Sur ce point, l’expertise du CNES sera le gage d’une bonne équation entre les obligations qui incomberont aux opérateurs et l’autonomie nécessaire dont a besoin une activité devant en permanence viser la frontière technologique. Cette équation sera garantie par le dialogue et la concertation qui, soyez-en sûrs, présideront à l’élaboration de la réglementation technique à laquelle devront se conformer les opérateurs.
Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, grâce à votre travail, le texte qui vous a été transmis est, me semble-t-il, parvenu à un point d’équilibre permettant de concilier à la fois les obligations internationales de notre pays, la garantie des intérêts de l’État, ainsi que la sécurité et la clarté juridiques nécessaires à la compétitivité de la France en ce domaine.
En l’état, ce texte est de nature à permettre à la France de continuer à tenir le rang qui est le sien dans le domaine spatial, c'est-à-dire celui de première puissance européenne.
Votre commission des affaires économiques partage ce sentiment puisqu’elle a, sur l’invitation de votre rapporteur, voté l’adoption conforme du texte transmis par l’Assemblée nationale. Ce vote légitime à son tour une adoption conforme et rapide des treize articles restant en discussion, sur les trente que comporte le projet de loi.
En outre, une telle adoption est le gage d’une mise en œuvre concrète et rapide de la loi.
Monsieur Revol, vous le savez pour en avoir pris connaissance, les avant-projets des décrets nécessaires à l’application de la loi ont d’ores et déjà été transmis par mes services. Je m’engage à poursuivre ce travail de concertation avec le Sénat et l’Assemblée nationale une fois que la loi aura été votée.
L’adoption rapide de ce projet de loi est d’autant plus souhaitable que, d’ici à quelques semaines, la France assurera pour six mois la présidence de l’Union européenne, présidence dont l’un des enjeux majeurs sera la consolidation de la politique spatiale européenne.
Les 21 et 22 juillet prochains, je réunirai nos partenaires européens au Centre spatial guyanais de Kourou. Cette rencontre sera une occasion importante d’avancer dans la construction de l’Europe spatiale.
De fait, depuis trente-cinq ans, la France a toujours construit sa politique spatiale dans un cadre élargi aux dimensions de l’Europe. Ainsi, en 1973, la mise en place du programme Ariane nous a prouvé combien une coopération enthousiaste et efficace en matière spatiale était susceptible de permettre à la France d’atteindre la première place dans le monde. Elle a aussi permis à l’Europe de faire entendre sa voix singulière. À la fois pacifique et attachée au progrès de l’humanité, l’Union européenne doit faire de l’espace un symbole de sa détermination à édifier un avenir commun, par la coopération entre les différents États. Elle en a les moyens ; il lui faut en avoir aussi la volonté et l’exigence.
C’est pourquoi, au mois de février dernier, le Président de la République, Nicolas Sarkozy, a insisté sur l’importance qu’il y avait à créer de véritables infrastructures européennes en matière spatiale.
Le présent projet de loi pose les fondations juridiques nécessaires pour permettre la France d’accueillir dans les meilleures conditions ces futures infrastructures européennes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’en suis convaincue, vous mesurez combien ce texte contribue à entretenir l’espoir que l’espace a fait naître et continue de faire naître pour de nombreuses générations, pour tous ceux qui ont assisté, émerveillés, aux incessants progrès de la conquête spatiale, pour tous ceux qui croient en l’avenir et en la science, pour tous ceux qui ont foi dans la France et dans l’Europe. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au moment où nous nous apprêtons à consolider le cadre juridique de notre politique spatiale, permettez-moi d’entamer mon propos en ayant une pensée pour Christian Cabal, qui, alors qu’il était député, présidait le groupe parlementaire sur l’espace et avec lequel j’avais rendu, voilà un peu plus d’un an, dans le cadre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport intitulé « Comment faire de l’Europe le leader mondial de l’espace ? »
Christian Cabal nous a quittés le 25 mars dernier, lui qui depuis tant d’années, d’abord à titre professionnel, puis en tant que parlementaire, s’était passionné pour l’espace et n’avait jamais cessé d’appeler l’attention sur l’importance stratégique des activités spatiales. Il nous manquera beaucoup.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. Henri Revol, rapporteur. Pour en revenir au projet de loi relatif aux opérations spatiales, je rappellerai que ce texte, qui nous est soumis aujourd'hui en deuxième lecture, avait été examiné par le Sénat le 16 janvier dernier et qu’il l’a été par l’Assemblée nationale le 9 avril.
Je vous rappellerai aussi, mes chers collègues, que le projet de loi ne concerne pas les utilisations spatiales, c’est-à-dire les services rendus à partir de l’espace dont nous bénéficions tous, comme les télécommunications ou l’observation, mais qu’il se concentre sur les seules opérations spatiales, c’est-à-dire sur les activités de lancement d’objets spatiaux, de contrôle de ceux-ci une fois dans l’espace extra-atmosphérique et, le cas échéant, de retour sur terre, opérations pour lesquelles il met en place un cadre juridique.
En effet, comme nous en avions déjà débattu, les opérations spatiales conduites par nos entreprises ou par des opérateurs étrangers à partir de notre sol ne sont aujourd’hui soumises à aucun encadrement national, alors même que tout accident pourrait avoir des conséquences financières très lourdes pour le Trésor public français. Notre pays serait alors considéré comme « État de lancement », c’est-à-dire comme État responsable – y compris des activités menées par des opérateurs privés –, comme le précise le traité du 27 janvier 1967, complété par une convention internationale de 1972.
C’est pour cette raison que l’objet essentiel du projet de loi est de mettre en place un système d’autorisation pour toutes les opérations spatiales susceptibles d’engager la responsabilité de l’État.
Il est important de signaler que cet objectif de sécurité juridique s’accompagne d’une préoccupation de maintien et même d’amélioration, de la compétitivité économique du « site France », qui figure aux tout premiers rangs mondiaux de l’ensemble des activités de la filière spatiale, Mme la ministre l’a rappelé, grâce à des opérateurs extrêmement compétents, audacieux et très conscients de leurs responsabilités ainsi que des risques de leurs activités.
Le système d’autorisation ne constitue nullement un désavantage pour nos entreprises, car la plupart des grands pays spatiaux en ont mis en place ces dernières années, à commencer par les États-Unis.
Par ailleurs, la détention d’une autorisation permet à l’opérateur de bénéficier de la garantie de l’État français pour les dommages, au cas où les victimes souhaiteraient se retourner contre l’entreprise et non contre l’État. Cette garantie joue au-delà de 60 millions d’euros, « franchise » qui est tout à fait supportable pour les opérateurs.
L’essentiel des amendements que je vous avais proposés et que nous avons adoptés en janvier dernier procédait directement de ce souci de préservation de la compétitivité de nos opérateurs et de notre site de Kourou.
Notre assemblée avait notamment, par un amendement à l’article 4 du projet de loi, permis aux licences d’opérateurs de valoir autorisation de procéder à des opérations, afin d’introduire plus de souplesse dans le dispositif.
Nous avions aussi, par un amendement à l’article 8, prévu une consultation obligatoire des opérateurs avant que ne leur soient imposées des prescriptions administratives pouvant aller jusqu’à la destruction d’un objet spatial.
C’est le texte ainsi amélioré qui a été transmis à l’Assemblée nationale.
Permettez-moi d’évoquer ici la coopération qui s’est nouée sur ce texte avec notre collègue député Pierre Lasbordes, rapporteur à l’Assemblée nationale.
D’une part, elle a permis de réaliser, d’abord au Sénat puis à l’Assemblée nationale, un tour de table approfondi de l’ensemble des acteurs concernés et des intérêts, parfois contradictoires, qui étaient en présence. L’insuffisance de concertation était en effet, en quelque sorte, le « péché originel » de ce projet de loi, qui partait d’une vision quelque peu « technocratique », inspirée d’un rapport du Conseil d’État, certes très pertinent, mais peut-être trop en amont des applications pratiques. (Mme la ministre sourit.
D’autre part, je sais gré à Pierre Lasbordes de m’avoir consulté sur chacun des projets d’amendements avant leur présentation en commission à l’Assemblée nationale, ce qui nous a permis d’avoir des échanges fructueux, notamment en tenant compte, madame la ministre, de l’avancement des projets de décret d’application en cours de rédaction. Ces futurs décrets conditionnent en effet pour beaucoup la portée de la loi puisqu’ils détermineront notamment les contrôles et les conditions d’obtention des autorisations et des licences. Nous en reparlerons à l’occasion de l’examen de l’amendement de notre collègue Daniel Raoul.
J’en viens maintenant brièvement à la présentation des amendements adoptés à l’Assemblée nationale. Je retiendrai principalement quatre modifications de fond par rapport au texte du Sénat.
La première modification porte sur les définitions des différentes phases d’une opération. Il s’est agi, d’une part, de préciser au 3° de l’article 1er que la phase de lancement prenait fin en principe lors de la séparation du lanceur et de l’objet destiné à être lancé.
D’autre part, il a été ajouté un 4° bis au même article 1er, afin de définir dans le texte la phase de maîtrise d’un objet spatial, c’est-à-dire essentiellement d’un satellite. Cette phase succède à la phase de lancement et se termine soit à la fin de la désorbitation de l’objet, soit en cas de perte de contrôle de l’objet, soit à l’occasion de son retour sur terre ou de sa désintégration complète dans l’atmosphère.
Ces précisions me semblent utiles, car il s’agit d’éléments essentiels dans la détermination de la responsabilité des différents acteurs, y compris de l’État, sachant que, comme le prévoit le 3° de l’article 1er, ces définitions peuvent toujours être adaptées par l’administration à l’occasion de la délivrance de l’autorisation, afin de tenir compte de la spécificité de certaines opérations.
La deuxième modification apportée par l’Assemblée nationale poursuit l’œuvre de simplification entreprise au Sénat. S’agissant de l’obligation d’assurance ou de garantie financière, l’Assemblée a complété le paragraphe I de l’article 6, afin de permettre qu’en dehors des phases de lancement ou de manœuvre de l’objet spatial l’opérateur puisse, comme c’est le cas actuellement, être son propre assureur.
Quant à la troisième modification, elle concerne la durée pendant laquelle l’opérateur est responsable des dommages du fait de l’opération. Il est ainsi rappelé que l’opérateur voit la responsabilité être « canalisée » sur lui, non seulement pendant l’opération, mais aussi en raison des conséquences d’un fait dommageable qui a pu survenir longtemps après l’opération. Un mauvais lancement ou une mauvaise mise en orbite peuvent en effet produire des dommages bien après leur survenance.
La commission des affaires économiques a jugé que cette modification était justifiée dès lors que la modification introduite à l’article 6 n’oblige plus les opérateurs à payer une prime d’assurance en permanence.
La dernière modification sera, je le pense, de nature à satisfaire nos collègues socialistes, qui s’étaient émus du positionnement du CNES par rapport au ministère.
Afin de lever toute ambiguïté quant aux pouvoirs de police du CNES à Kourou, l’Assemblée nationale a modifié le paragraphe 1 bis de l’article 21, afin de remplacer la formule : « le président du Centre national d’études spatiales peut […] recevoir délégation du ministre chargé de l’espace » par les mots : « le président du Centre national d’études spatiales peut, par délégation de l’autorité administrative, » prendre les mesures de sécurité.
Notre commission n’a pas vu d’obstacle à ce que cette précision soit apportée, d’autant qu’elle nous assure que le président du CNES pourra prendre toutes les mesures, y compris en cas d’urgence, y compris si un danger survenait, ou en cas de changement de ministre, pendant la période intermédiaire où l’autorisation précédente ne serait plus valable.
Dans le même esprit, et s’agissant cette fois des pouvoirs de contrôle technique du président du CNES, l’Assemblée a modifié le g) de l’article 28, afin de préciser que ceux-ci ne sont pas exercés à la demande du ministre chargé de l’espace, mais, de façon plus permanente, par délégation de celui-ci. Tout en confortant le CNES, qui est – je tiens à le dire – l’illustration de l’excellence spatiale française, la formule qui a été retenue ménage l’existence du ministre comme autorité d’appel, ce à quoi notre commission était particulièrement attachée.
Au terme de ses travaux, la commission des affaires économiques a estimé que ce qui devait être fait en termes d’enrichissement législatif l’a été et que l’attention doit maintenant se concentrer sur la finalisation des décrets. En effet, l’engagement avait été pris dans cet hémicycle par vous-même, madame la ministre, que la préparation des décrets d’application serait entreprise parallèlement à la navette législative, et je vous remercie d’avoir enclenché cette procédure. Je souhaiterais que vous puissiez nous dire où nous en sommes aujourd’hui, madame la ministre. Les opérateurs spatiaux, mais surtout les parlementaires qui ont travaillé sur ce texte, attendent vos précisions.
Je souhaiterais aussi, madame la ministre, vous faire part de mon regret de constater que la garantie, telle qu’elle est aujourd’hui proposée, bénéficie à tous les opérateurs français ou étrangers qui font envoyer un satellite depuis Kourou, alors qu’à l’inverse, lors de lancements menés depuis l’étranger, les opérateurs français sont soumis à un système d’autorisation français, ce qui n’est, bien sûr, pas le cas des opérateurs étrangers.
M. Daniel Raoul. C’est juste !
M. Henri Revol, rapporteur. Malheureusement, il n’a pas été possible de modifier cette asymétrie, qui affecte plus les opérateurs de satellites que les lanceurs. En effet, les nouvelles règles d’irrecevabilité financière ne permettent pas d’apporter une telle modification législative sans l’accord du Gouvernement.
Quoi qu’il en soit, l’adoption et la promulgation rapides de ce texte sont absolument indispensables, en particulier parce qu’elles nous permettront d’être prêts à la fin de 2008 pour accompagner l’accueil historique de lanceurs autres qu’Ariane à Kourou – en l’espèce, des fusées de conception russe Soyouz et des lanceurs de conception italienne Vega. Il sera en effet indispensable au bon déroulement des opérations que soient clairement définies les responsabilités et les prérogatives de chacun des acteurs.
Estimant que le travail législatif est parvenu à un équilibre tout à fait satisfaisant, vous ne serez pas surpris, mes chers collègues, que la commission des affaires économiques vous propose d’adopter le projet de loi relatif aux opérations spatiales sans modification, c’est-à-dire dans sa version résultant d’une lecture dans chaque assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture vise à combler le vide juridique actuel dans le domaine spatial, mis en évidence par le Conseil d’État en 2006 dans son rapport intitulé « Pour une Politique juridique des activités spatiales ».
En ce sens, ce texte est tout à fait essentiel et nous sommes tous ici conscients de sa nécessité. Sur la majorité des points d’ailleurs, le consensus existe. Sur d’autres points plus sensibles, quelques améliorations ont été apportées par l'Assemblée nationale en première lecture – je ne veux pas croire que ce soit un effet de la proximité de la Pentecôte ! (Sourires) –, même si quelques zones d’ombre subsistent encore.
En effet, les évolutions de ces vingt dernières années ont rendu incontournable la mise en place d’un régime juridique national en phase avec les conventions internationales. Alors que les États ont pendant longtemps assuré un contrôle du domaine spatial, les bouleversements technologiques en matière numérique – qui ont permis le développement des nouvelles technologies de communication –, dans un contexte de libéralisation de nos économies, ont conduit à une exploitation commerciale de l’espace de plus en plus importante. Madame la ministre, vous venez d’ailleurs de rappeler les effets des derniers lancements de satellites.
Cette transformation, qui s’est matérialisée par l’apparition de nombreux opérateurs privés sur fond d’intensification de la concurrence, exigeait la mise en place d’un cadre juridique clair et contraignant, faisant peser des contraintes de sécurité et de sûreté sur les opérateurs – régime d’autorisations, obligations d’assurance ou de garantie financière, sanctions pénales en cas d’infraction, voire destruction de l’objet satellisé – et permettant également d’identifier les responsabilités en cas d’accident.
Parce qu’il répond à ce souci, ce projet de loi pourrait globalement nous satisfaire. Il n’en reste pas moins que plusieurs des interrogations que j’avais formulées en première lecture demeurent, qui font que je continue à émettre certaines réserves. Je suis persuadé, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que vous les lèverez.
En première lecture en effet, le Sénat a assoupli le régime de délivrance des autorisations prévu à l’article 4 du projet de loi. Il a ainsi permis que l’autorité administrative puisse délivrer des licences, après vérification non seulement « des garanties morales, financières et professionnelles du demandeur » mais aussi « de la conformité des systèmes et procédures [...] avec la réglementation technique édictée ». En introduisant cette nouvelle forme de certification technique, il a aussi permis que soient attribuées des licences valant autorisation.
Nous n’étions guère favorables à ce type d’assouplissement : dans sa rédaction initiale, le projet de loi nous satisfaisait mieux. Il reprenait d’ailleurs fidèlement les recommandations contenues dans le rapport du Conseil d’État, qui, il faut le souligner, avait mis en évidence l’urgence à légiférer dans le domaine spatial, mais ne préconisait pas d’inscrire dans la loi que de telles licences peuvent valoir autorisation ! C’est le régime d’autorisations qui, au final, s’en trouve banalisé.
Je tiens à préciser que je ne suis absolument pas défavorable à la mise en place d’un système de licences permettant de simplifier les procédures administratives en amont. Toutefois, je reste perplexe sur le fait que ces licences puissent « valoir autorisation pour certaines opérations », selon la rédaction adoptée en première lecture sur l’initiative du rapporteur.
Les opérations de lancement, de changement d’orbite ou certaines opérations de manipulation d’objet ne doivent-elles pas systématiquement faire l’objet d’une autorisation spécifique, tant sont importants les risques qu’elles peuvent comporter ?
Je ne suis donc pas favorable à une telle banalisation du régime d’autorisations via la mise en place d’un système de licences. En effet, cela revient à faire confiance à des opérateurs « bien connus » auxquels serait ainsi accordée « une forme d’autorisation permanente ».
Pourquoi voulez-vous que ce secteur demeure ad vitam aeternam à l’abri des OPA et des changements de main entre divers ou de nouveaux opérateurs moins bien connus que ceux qui y opèrent actuellement ? Le cadre législatif et juridique que nous posons aujourd’hui doit pleinement tenir compte de ces éventualités.
Rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale, Pierre Lasbordes, avançait l’explication suivante : « l’ensemble des opérateurs concernés s’est inquiété des modifications et des risques de rigidité ou de retard que les dispositions introduites en matière d’autorisation pouvaient introduire dans la pratique actuelle, dans un domaine concurrentiel où l’appréciation des délais est fondamentale ».
Voilà qui n’est pas pour me rassurer ! Les opérateurs, quels qu’ils soient, demanderont toujours plus de simplification et de suppression des réglementations qu’ils considèrent comme autant d’entraves. Est-il pour autant nécessaire d’être si libéral dans un domaine où la sécurité est souvent en jeu du fait de la nature même des opérations spatiales ?
Dois-je rappeler que, dans le contexte actuel de déréglementation, le Conseil d’État estime que, « du point de vue de l’État, il est indispensable de s’assurer la capacité de contrôler les opérations spatiales, alors même qu’elles ont vocation, de plus en plus, à être exercées par des acteurs privés, dans le cadre d’activités commerciales et sur un marché concurrentiel ». Je n’ai rien à ajouter à cette observation !
J’ai d’autant plus de raisons d’être inquiet face à ce qui ressemble à une véritable banalisation du régime d’autorisations que, dans le rapport que vous avez établi lors de l’examen du texte en première lecture, monsieur le rapporteur, vous affirmiez : « Par prudence, [la commission] propose d’indiquer dans la loi que ces licences vaudront autorisation pour "certaines opérations" mais elle compte que les décrets d’application rendent clairs et prévisibles pour les opérateurs ces cas où les licences vaudront effectivement autorisation. Il pourrait aussi être opportun de s’approcher le plus possible d’un dispositif simple dans lequel les licences vaudraient autorisation dans la quasi-totalité des cas. »
C’est bien là que le problème se pose ! Autant dire que ce qui apparaît dans le projet de loi comme une procédure limitée à certains cas pourrait, à en croire vos propos, monsieur le rapporteur, devenir une généralité. Pour cette raison, j’aimerais que nous soient apportées des précisions quant au contenu du décret mentionné initialement à l'article 28 du projet de loi et qui est désormais prévu à l'article 4.
De quoi parle-t-on lorsque l’on se réfère à « certaines opérations » ? Sans doute êtes-vous en mesure de me donner aujourd’hui ces précisions, madame la ministre, monsieur le rapporteur. L’amendement que j’ai déposé à l'article 4 porte précisément sur ce point : je suis prêt à le retirer si j’obtiens les garanties nécessaires.
Accorder ce type de régime préférentiel à des « opérateurs bien connus », selon l’expression du rapporteur, ou qui, selon la vôtre, madame la ministre, auraient « pignon sur rue » et qui seraient alors hors de soupçon, est une idée qui ne va pas de soi.
N’oublions pas que la réputation de la plupart de ces opérateurs est d’abord liée au fait qu’ils étaient en majorité publics et que, pour ces raisons mêmes – de nombreuses interventions en première lecture l’ont souligné –, le contrôle public s’exerçait « naturellement », si je puis dire, par l’État.
Le désengagement de l’État, la privatisation de la plupart des acteurs du secteur spatial, l’arrivée de nouveaux opérateurs privés nécessitent, à mon avis, des normes strictes capables de contraindre les comportements des opérateurs au regard des risques encourus lors des opérations spatiales. Soulignant le mouvement de libéralisation économique, le rapport d’étude intitulé « l’Évolution du droit de l’espace en France », réalisé en 2003 sous l’égide du ministère délégué à la recherche et aux nouvelles technologies, précisait : « [Les systèmes privés et commerciaux] doivent faire l’objet d’une autorisation préalable délivrée par les pouvoirs publics afin notamment de garantir le respect des engagements et responsabilités internationaux de la France [...], des textes relatifs à la défense et à la sécurité nationale (contrôles en amont de l’obturation, de la programmation, de la divulgation des données), des droits fondamentaux du citoyen (vie privée, droit à l’image, secret des affaires...). »
Toute économie civilisée est fondée sur le respect de normes, c'est-à-dire sur le fait qu’un minimum de contraintes pèse sur les comportements d’acteurs privés.
Préservons au moins un domaine aussi stratégique que celui de l’espace d’une libéralisation à tout crin, en ne levant pas toutes ces contraintes jugées comme autant d’obstacles pesant sur les opérateurs. Au regard des risques encourus, ce serait extrêmement dangereux !
Enfin, le risque est, au final, de tendre vers une application très large de cette disposition, à en croire la rédaction proposée par le rapporteur et selon laquelle toute licence accordée vaut autorisation.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, vous l’aurez compris, je souhaite être rassuré sur ce point. Je demande en fait une explication de texte !
Ces observations m’amènent à souligner que les risques auxquels on s’expose sont d’autant plus réels que de nouveaux assouplissements ont été introduits par le rapporteur de l’Assemblée nationale au prétexte de « donner une véritable compétitivité juridique à nos entreprises spatiales ». Que faut-il entendre par « compétitivité juridique » ? Je connais la compétitivité économique, mais ce nouveau concept me laisse un peu pantois !
Contrairement à ce que cela sous-entend, la loi est aussi là pour protéger, y compris contre la concurrence acharnée et déloyale qui pourrait s’exercer au détriment de l’intérêt général. En d’autres termes, la loi n’est pas forcément l’ennemi de la compétitivité de nos entreprises.
Par ailleurs, nos opérateurs spatiaux manqueraient-ils à ce point de compétitivité ? Vous avez rappelé, madame la ministre, les derniers exploits de notre base nationale. Les contraintes administratives sont-elles pénalisantes au point de nuire à la compétitivité de nos industries spatiales ? Soyons sérieux ! Le risque de délocalisation dans ce secteur n’est pas confirmé, et la contrainte administrative n’est pas toujours synonyme de perte de compétitivité.
Le rapporteur de l’Assemblée nationale a donc introduit une modification à l’article 13 se traduisant in fine par le report sur l’État de la responsabilité de certains dommages causés par l’opérateur.
Une telle mesure mérite que l’on s’y arrête quelque peu.
La responsabilité de l’État pourrait-elle être engagée en cas de dommages créés par un opérateur qui ne se serait pas soumis à ses obligations, alors qu’une autorisation lui aurait été délivrée en amont ? N’est-ce pas là inciter les opérateurs à une certaine forme de laxisme, l’État se substituant finalement à l’opérateur ayant causé le dommage ?
Madame la ministre, vous étiez vous-même défavorable à cette disposition : « L’État n’a pas à être responsable d’un dommage causé par un satellite qu’un opérateur négligent aurait laissé en activité alors que l’autorité administrative lui avait réclamé de le désactiver, même si c’est un an après. ».
Il n’est pas dans mon intention de dénoncer une attitude que l’on pourrait juger quelque peu schizophrénique, mais je fais observer que si, dans certains cas, on insiste sur le professionnalisme des opérateurs – leur réputation, le fait qu’ils aient « pignon sur rue » –, dans d’autres, notamment l’arrivée de nouveaux opérateurs, on ne mesure pas les dégâts éventuels. La réalité est beaucoup plus complexe que ne le laisse supposer cette présentation simpliste. Elle est à la mesure des transformations qui s’opèrent sous nos yeux.
Au fond, la question qui sous-tend ce projet de loi n’est-t-elle pas la suivante : quel degré de souplesse accorder aux opérateurs privés, alors qu’il en existe de plus en plus, en raison du désengagement de l’État, qui sort du capital des principaux acteurs historiques et en perd par conséquent le contrôle ?
La perte d’influence et de contrôle de l’État sur les opérateurs historiques ne doit-elle pas se traduire par un renforcement du cadre législatif, plus apte à protéger l’intérêt général ?
Vous le constatez, j’ai encore quelques interrogations de fond. Il n’en demeure pas moins que je me félicite des quelques avancées obtenues à l’Assemblée nationale, d’autant plus que celles-ci ont été portées par notre collègue députée Chantal Berthelot.
En effet, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a adopté l’un de ses amendements dont l’objet était de permettre, comme le prévoyait le projet de loi initial, que le président du CNES détienne ses pouvoirs en matière de sécurité en vertu d’une délégation de plein droit et non d’une délégation optionnelle, afin que soit assurée la continuité de l’action de l’État. Nous avions nous-mêmes déposé un sous-amendement visant le même but en première lecture. Mais nous étions alors au mois de janvier : les esprits étaient sans doute un peu plus gelés et moins ouverts ! (Sourires.)
Une fois n’est pas coutume – je vous l’accorde, monsieur le rapporteur –, les députés ont été plus sages que les sénateurs ! (Nouveaux sourires.)
En conclusion, je rappelle la nécessité non seulement de préserver le rôle du CNES mais également de lui apporter les moyens nécessaires à son développement. Dans son discours à Kourou le 11 février dernier, le Président de la République affirmait : « Il est bien sûr essentiel, je dirais même vital, pour la France et l’Europe de conserver quoi qu’il arrive et en toutes circonstances un accès autonome à l’espace. Il y va de notre indépendance stratégique. ». On voit difficilement comment cela pourrait être possible si le CNES n’est pas renforcé, notamment par des crédits budgétaires suffisants.
En première lecture, dans cet hémicycle, avait été évoqué le problème de la dette du CNES à l’égard de l’Agence spatiale européenne ; il reste préoccupant. Comme l’ont suggéré certains collègues, y compris Christian Gaudin en première lecture, il serait urgent de régler cette situation.
Aujourd’hui, les enjeux sont tels qu’ils exigent une réponse de la part de l’Europe et de la France. J’espère que la présidence française de l’Union européenne permettra d’avancer dans ce domaine et que notre pays pourra garder un rôle de pionnier en matière de politique spatiale.
Dans l’attente des précisions que vous voudrez bien nous apporter, madame la ministre, monsieur le rapporteur, je réserve, pour l’instant, mon vote, qui sera sans doute positif.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le rapporteur, je tiens tout d’abord à vous remercier, une fois de plus, pour le travail que vous avez accompli tout au long de l’examen de ce texte avec vos collègues sénateurs et auprès de tous les acteurs du secteur spatial.
Ce travail, riche et approfondi, mené en totale concertation avec votre homologue de l’Assemblée nationale, M. Pierre Lasbordes, a permis d’aboutir rapidement à l’élaboration d’un texte équilibré, qui conjugue les garanties nécessaires, lorsque la responsabilité de l’État est en jeu, et la sécurité juridique indispensable au plein épanouissement des activités des opérateurs spatiaux.
En cet instant, je souhaite m’associer à l’hommage que vous avez rendu au regretté Christian Cabal, beaucoup trop tôt disparu. Lors du débat à l’Assemblée nationale qui suivait de peu son décès, j’ai déjà eu l’occasion de lui rendre un hommage mérité. Sa grande connaissance du sujet, sa passion pour l’espace auraient utilement contribué à éclairer nos débats.
J’en viens à vos questions, monsieur le rapporteur.
Vous avez souligné l’absence de concertation qui, selon vous, a présidé à l’élaboration de ce projet de loi.
M. Henri Revol, rapporteur. Au départ, madame la ministre !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Je n’aurai pas l’inélégance de me réfugier derrière le fait que ce texte a été élaboré et déposé sur le bureau de votre assemblée sous une précédente législature, avant que je ne prenne mes fonctions. Désormais, je le porte et je l’assume.
Dès que ce projet de loi a été inscrit à l’ordre du jour du Sénat, nous avons entamé ensemble une concertation approfondie avec tous les acteurs concernés, afin d’envisager les voies permettant d’aboutir à l’équilibre le plus satisfaisant. Sur ce point, notre coopération a été harmonieuse et fructueuse.
Par ailleurs, si, comme je le souhaite, la Haute Assemblée décidait, dans sa grande sagesse, d’adopter dès aujourd’hui ce texte sans modification, son application resterait encore suspendue à la publication des décrets. Vous savez toute l’attention que je porte à ce que les lois votées par le Parlement puissent être appliquées dans les meilleurs délais, conformément à la lettre et à l’esprit voulus par le législateur. C’est pourquoi, fidèle à cet objectif et à ma volonté de concertation, j’ai d’ores et déjà demandé à mes services de travailler sur les avant-projets de décret, parallèlement à la discussion du projet de loi et en liaison avec les partenaires concernés. Vous le savez, monsieur le rapporteur, pour avoir été destinataire de ces textes à tous les stades de leur rédaction.
Il va de soi que la loi définitivement adoptée, je demanderai immédiatement à ce que, après consultation de toutes les parties prenantes, la rédaction des textes d’application soit finalisée, et vous serez bien sûr associé à ce travail, monsieur le rapporteur.
Je vous rappelle que les trois avant-projets qui ont été rédigés sont relatifs aux autorisations, au pouvoir de police du CNES et à l’immatriculation des objets spatiaux, ainsi qu’à la surveillance des exploitants des données d’origine spatiale.
Vous m’avez également fait part de votre regret de constater que la garantie de l’État bénéficie à tous les opérateurs, français ou étrangers, qui envoient un satellite depuis Kourou, mais pas aux opérateurs français qui lancent un satellite depuis l’étranger, alors même qu’ils sont soumis à un régime d’autorisation.
Cette asymétrie – c’est ainsi que vous avez fort justement qualifié cette situation – repose sur un fondement et s’inscrit dans une logique très précise. De fait, le régime d’autorisation prévu par le projet de loi découle purement et simplement des obligations internationales de la France résultant de l’article VI du traité du 27 janvier 1967. En revanche, tel n’est pas le cas de la garantie de l’État, qui vise simplement à sécuriser l’indemnisation des victimes et l’activité économique en cas de dommages causés par un objet spatial. En conséquence, – vous en conviendrez avec moi – elle ne saurait s’appliquer à d’autres activités que celles qui sont menées depuis le territoire national ou, par extension, depuis l’espace économique européen. J’estime, en effet, qu’il ne revient pas au contribuable français de prendre à sa charge les risques financiers très lourds de dysfonctionnement d’un système qui contribuerait essentiellement à la prospérité d’États extra-européens.
De surcroît, et c’est un point très important, ces dispositions ne constituent pas pour les opérateurs une régression par rapport à la situation actuelle, pas plus qu’un facteur de perte de compétitivité des opérateurs français vis-à-vis de leurs concurrents.
D’un point de vue purement pratique, je vous précise enfin que plusieurs États offrent aux opérateurs français qui agissent depuis leur territoire une garantie de même nature que celle que notre pays propose, de telle sorte que, au-delà des principes que j’ai rappelés et qui justifient à eux seuls cette asymétrie, l’adoption d’une telle disposition serait en réalité de peu d’effet pour eux.
Monsieur Raoul, vous vous inquiétez du fait que la licence puisse valoir autorisation pour certaines opérations. Comme vous le souhaitez, je vais donc bien volontiers vous apporter un certain nombre de précisions à cet égard, d’autant que vous avez subordonné votre vote à ma réponse. (M. Daniel Raoul sourit.)
Pour les opérations particulièrement dangereuses, comme des lancements, il n’est pas question de donner un total blanc-seing aux opérateurs. Je vous le garantis. En revanche, le maintien d’un satellite en orbite doit pouvoir faire l’objet d’une licence valant autorisation. De toute façon, une telle licence ne sera donnée qu’à des opérateurs bien connus, qui ont déjà fait la preuve de leur compétence et de leur professionnalisme. Il ne s’agit pas d’une simplification excessive, dans la mesure où l’autorité administrative pourra toujours retirer la licence, si l’opérateur ne se conforme pas à ses obligations.
Par ailleurs, sur le décret d’utilisation des images, vous avez souligné la nécessité de s’assurer de la bonne utilisation des données spatiales, en particulier eu égard au respect de la vie privée. Monsieur le sénateur, je partage tout à fait votre point de vue. Je peux vous assurer que je serai très attentive à ce sujet. D’ailleurs, dans le cadre de la concertation sur la rédaction des décrets, vous serez tenu informé de l’avancée des travaux et je serai heureuse d’entendre vos remarques sur ce point.
Quant à la compétitivité juridique, dont a parlé le rapporteur à l’Assemblée nationale, M. Lasbordes, il s’agissait, selon moi, de trouver un cadre juridique équilibré, n’imposant pas des contraintes administratives excessives pour les opérateurs.
Si des procédures de contrôle sont absolument nécessaires, dans la mesure où la responsabilité de l’État est en jeu, elles ne doivent pas conduire à d’inutiles tracasseries administratives. Je suis convaincue que la discussion parlementaire a permis de trouver ce subtil équilibre, même si nous avons eu une petite divergence d’appréciation sur ce point. La volonté des députés est toutefois claire. Il est possible aujourd’hui de considérer que le texte adopté par l’Assemblée nationale est équilibré.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l’article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.
TITRE IER
DÉFINITIONS
Article 1er
Pour l'application de la présente loi, on entend par :
1° « Dommage » : toute atteinte aux personnes, aux biens, et notamment à la santé publique ou à l'environnement directement causée par un objet spatial dans le cadre d'une opération spatiale, à l'exclusion des conséquences de l'utilisation du signal émis par cet objet pour les utilisateurs ;
2° « Opérateur spatial », ci-après dénommé « opérateur » : toute personne physique ou morale qui conduit, sous sa responsabilité et de façon indépendante, une opération spatiale ;
3° « Opération spatiale » : toute activité consistant à lancer ou tenter de lancer un objet dans l'espace extra-atmosphérique ou à assurer la maîtrise d'un objet spatial pendant son séjour dans l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, ainsi que, le cas échéant, lors de son retour sur Terre ;
4° « Phase de lancement » : la période de temps qui, dans le cadre d'une opération spatiale, débute à l'instant où les opérations de lancement deviennent irréversibles et qui, sous réserve des dispositions contenues, le cas échéant, dans l'autorisation délivrée en application de la présente loi, s'achève à la séparation du lanceur et de l'objet destiné à être placé dans l'espace extra-atmosphérique ;
4° bis « Phase de maîtrise » : la période de temps qui, dans le cadre d'une opération spatiale, débute à la séparation du lanceur et de l'objet destiné à être placé dans l'espace extra-atmosphérique et qui s'achève à la survenance du premier des événements suivants :
- lorsque les dernières manœuvres de désorbitation et les activités de passivation ont été effectuées ;
- lorsque l'opérateur a perdu le contrôle de l'objet spatial ;
- le retour sur Terre ou la désintégration complète dans l'atmosphère de l'objet spatial ;
5° « Tiers à une opération spatiale » : toute personne physique ou morale autre que celles participant à l'opération spatiale ou à la production du ou des objets spatiaux dont cette opération consiste à assurer le lancement ou la maîtrise. Notamment, ne sont pas regardés comme des tiers l'opérateur spatial, ses cocontractants, ses sous-traitants et ses clients, ainsi que les cocontractants et sous-traitants de ses clients ;
6° « Exploitant primaire de données d'origine spatiale » : toute personne physique ou morale qui assure la programmation d'un système satellitaire d'observation de la Terre ou la réception, depuis l'espace, de données d'observation de la Terre.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
TITRE II
AUTORISATION DES OPÉRATIONS SPATIALES
CHAPITRE IER
Opérations soumises à autorisation
Article 2
Doit préalablement obtenir une autorisation délivrée par l'autorité administrative :
1° Tout opérateur, quelle que soit sa nationalité, qui entend procéder au lancement d'un objet spatial à partir du territoire national, de moyens ou d'installations placés sous juridiction française ou qui entend procéder au retour d'un tel objet sur le territoire national, sur des moyens ou des installations placés sous juridiction française ;
2° Tout opérateur français qui entend procéder au lancement d'un objet spatial à partir du territoire d'un État étranger, de moyens ou d'installations placés sous la juridiction d'un État étranger ou d'un espace non soumis à la souveraineté d'un État ou qui entend procéder au retour d'un tel objet sur le territoire d'un État étranger, sur des moyens ou des installations placés sous la juridiction d'un État étranger ou sur un espace non soumis à la souveraineté d'un État ;
3° Toute personne physique possédant la nationalité française ou personne morale ayant son siège en France, qu'elle soit ou non opérateur, qui entend faire procéder au lancement d'un objet spatial ou tout opérateur français qui entend assurer la maîtrise d'un tel objet pendant son séjour dans l'espace extra-atmosphérique. – (Adopté.)
CHAPITRE II
Conditions de délivrance des autorisations
Article 4
Les autorisations de lancement, de maîtrise et de transfert de la maîtrise d'un objet spatial lancé et de retour sur Terre sont délivrées après vérification, par l'autorité administrative, des garanties morales, financières et professionnelles du demandeur et, le cas échéant, de ses actionnaires, et de la conformité des systèmes et procédures qu'il entend mettre en œuvre avec la réglementation technique édictée, notamment dans l'intérêt de la sécurité des personnes et des biens et de la protection de la santé publique et de l'environnement.
Les autorisations ne peuvent être accordées lorsque les opérations en vue desquelles elles sont sollicitées sont, eu égard notamment aux systèmes dont la mise en œuvre est envisagée, de nature à compromettre les intérêts de la défense nationale ou le respect par la France de ses engagements internationaux.
Des licences attestant, pour une durée déterminée, qu'un opérateur spatial justifie des garanties morales, financières et professionnelles peuvent être délivrées par l'autorité administrative compétente en matière d'autorisations. Ces licences peuvent également attester la conformité des systèmes et procédures mentionnés au premier alinéa avec la réglementation technique édictée. Elles peuvent enfin valoir autorisation pour certaines opérations.
Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. Il précise notamment :
1° Les renseignements et documents à fournir à l'appui des demandes d'autorisation et la procédure de délivrance de ces autorisations ;
2° L'autorité administrative compétente pour délivrer les autorisations et pour édicter la réglementation technique mentionnée au premier alinéa ;
3° Les conditions dans lesquelles peuvent être délivrées les licences mentionnées au troisième alinéa ainsi que les modalités selon lesquelles le bénéficiaire d'une licence informe l'autorité administrative des opérations spatiales auxquelles il procède ;
4° Les conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut dispenser le demandeur de tout ou partie du contrôle de conformité prévu au premier alinéa, lorsqu'une autorisation est sollicitée en vue d'une opération devant être conduite à partir du territoire d'un État étranger ou de moyens et d'installations placés sous la juridiction d'un État étranger et que les engagements nationaux ou internationaux, la législation et la pratique de cet État comportent des garanties suffisantes en matière de sécurité des personnes et des biens, de protection de la santé publique et de l'environnement, et de responsabilité.
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du troisième alinéa de cet article.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, vous pouvez considérer que j’ai défendu cet amendement lors de mon intervention dans la discussion générale.
Madame la ministre, j’ai entendu votre réponse relative aux garanties. Vous avez précisé que la licence ne valait pas autorisation systématique pour les procédures de lancement. (Mme la ministre fait un signe d’assentiment.) En revanche, le recours à une licence valant autorisation peut se concevoir pour les opérations de maintien en orbite.
Compte tenu des précisions qui m’ont été apportées et afin de vous faire plaisir, madame la ministre, monsieur le rapporteur, je retire l’amendement n° 1.
Enfin, je ferai une remarque sur le 3° de l’article 1er qui s’applique à « l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune ». Cette dernière précision me paraît superfétatoire, car la lune est heureusement située dans l’espace extra-atmosphérique. J’aurais pu comprendre cet ajout s’il s’agissait de lancements d’objets vers la lune ou vers d’autres corps célestes. Cette rédaction me laisse un peu pantois.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner l’étrangeté de cette rédaction, mais elle reprend des textes internationaux qui distinguent la lune et l’espace extra-atmosphérique. Je conçois cependant qu’elle puisse susciter quelques interrogations.
M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.
Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
CHAPITRE III
Obligations des titulaires d'autorisation
Article 6
I. - Tout opérateur soumis à autorisation en application de la présente loi est tenu, tant que sa responsabilité est susceptible d'être engagée dans les conditions prévues à l'article 13 et à concurrence du montant mentionné aux articles 16 et 17, d'être couvert par une assurance ou de disposer d'une autre garantie financière agréée par l'autorité compétente.
Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'assurance, la nature des garanties financières pouvant être agréées par l'autorité compétente et les conditions dans lesquelles il est justifié du respect des obligations mentionnées au premier alinéa auprès de l'autorité qui a délivré l'autorisation. Il précise en outre les conditions dans lesquelles l'opérateur peut être dispensé par l'autorité administrative de l'obligation prévue à l'alinéa précédent.
II. - L'assurance ou la garantie financière doit couvrir le risque d'avoir à indemniser, dans la limite du montant mentionné au I, les dommages susceptibles d'être causés aux tiers à l'opération spatiale.
III. - Non modifié.
IV. - Supprimé. – (Adopté.)
Article 7
I. - Sont habilités à procéder aux contrôles nécessaires en vue de vérifier le respect des obligations du présent chapitre :
1° Les agents commissionnés par l'autorité administrative mentionnée à l'article 2, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État, appartenant aux services de l'État chargés de l'espace, de la défense, de la recherche, de l'environnement ou à ses établissements publics qui exercent leurs missions dans les mêmes domaines ;
2° Les agents habilités à effectuer des contrôles techniques à bord des aéronefs ;
3° Les membres du corps de contrôle des assurances mentionné à l'article L. 310-13 du code des assurances ;
4° Les agents mentionnés à l'article L. 1421-1 du code de la santé publique ;
5° Les administrateurs et les inspecteurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les contrôleurs des affaires maritimes, les commandants des bâtiments de l'État et les commandants de bord des aéronefs de l'État chargés de la surveillance de la mer.
Les agents mentionnés aux 1° à 5° sont astreints au secret professionnel dans les conditions et sous les sanctions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
II et III. - Non modifiés.
IV. - Si l'opérateur ou la personne ayant qualité pour autoriser l'accès à l'établissement, au local ou à l'installation ne peut être atteint ou s'il s'oppose à l'accès, les agents mentionnés au I peuvent demander au président du tribunal de grande instance ou au juge délégué par lui à y être autorisés. – (Adopté.)
CHAPITRE IV
Sanctions administratives et pénales
Article 11
I et II. - Non modifiés.
III. - Est puni d'une amende de 200 000 € le fait pour un opérateur :
1° De poursuivre l'opération spatiale en infraction à une mesure administrative ou à une décision juridictionnelle d'arrêt ou de suspension ;
2° De poursuivre l'opération spatiale sans se conformer à une mise en demeure de l'autorité administrative de respecter une prescription.
IV. - Est puni d'une amende de 200 000 € le fait pour un opérateur ou une personne physique de faire obstacle aux contrôles effectués en application de l'article 7. – (Adopté.)
TITRE IV
RESPONSABILITÉS
CHAPITRE IER
Responsabilité à l'égard des tiers
Article 13
L'opérateur est seul responsable des dommages causés aux tiers du fait des opérations spatiales qu'il conduit dans les conditions suivantes :
1° Il est responsable de plein droit pour les dommages causés au sol et dans l'espace aérien ;
2° En cas de dommages causés ailleurs qu'au sol ou dans l'espace aérien, sa responsabilité ne peut être recherchée que pour faute.
Cette responsabilité ne peut être atténuée ou écartée que par la preuve de la faute de la victime.
Sauf cas de faute intentionnelle, la responsabilité prévue aux 1° et 2° cesse quand toutes les obligations fixées par l'autorisation ou la licence sont remplies ou, au plus tard, un an après la date où ces obligations auraient dû être remplies. L'État se substitue à l'opérateur pour les dommages intervenus passé ce délai. – (Adopté.)
Article 14
Lorsqu'en vertu des stipulations du traité du 27 janvier 1967 sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, ou de la convention du 29 mars 1972 sur la responsabilité internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux, l'État a réparé un dommage, il peut exercer une action récursoire contre l'opérateur à l'origine de ce dommage ayant engagé la responsabilité internationale de la France, dans la mesure où il n'a pas déjà bénéficié des garanties financières ou d'assurance de l'opérateur à hauteur de l'indemnisation.
Si le dommage a été causé par un objet spatial utilisé dans le cadre d'une opération autorisée en application de la présente loi, l'action récursoire s'exerce :
1° Dans la limite du montant fixé dans les conditions mentionnées à l'article 16 en cas de dommage causé pendant la phase de lancement ;
2° Dans la limite du montant fixé dans les conditions mentionnées à l'article 17 en cas de dommage causé après la phase de lancement, y compris à l'occasion du retour sur Terre de l'objet spatial.
En cas de faute intentionnelle de l'opérateur, les limites prévues aux 1° et 2° ne s'appliquent pas.
L'État n'exerce pas d'action récursoire en cas de dommage causé par un objet spatial utilisé dans le cadre d'une opération autorisée en application de la présente loi et résultant d'actes visant les intérêts étatiques. – (Adopté.)
TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES AU CODE DE LA RECHERCHE
Article 21
Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° L'article L. 331-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 331-6. - I. - Le président du Centre national d'études spatiales exerce, au nom de l'État, la police spéciale de l'exploitation des installations du Centre spatial guyanais dans un périmètre délimité par l'autorité administrative compétente. À ce titre, il est chargé d'une mission générale de sauvegarde consistant à maîtriser les risques techniques liés à la préparation et à la réalisation des lancements à partir du Centre spatial guyanais afin d'assurer la protection des personnes, des biens, de la santé publique et de l'environnement, au sol et en vol, et il arrête à cette fin les règlements particuliers applicables dans les limites du périmètre mentionné ci-dessus.
« II. - Le président du Centre national d'études spatiales coordonne, sous l'autorité du représentant de l'État dans le département, la mise en œuvre, par les entreprises et autres organismes installés dans le périmètre défini au I, des mesures visant à assurer la sûreté des installations et des activités qui y sont menées, et s'assure du respect, par ces entreprises et organismes, des obligations qui leur incombent à ce titre.
« III. - Dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement des missions prévues aux I et II, les agents que le président du Centre national d'études spatiales habilite ont accès aux terrains et locaux à usage exclusivement professionnel et occupés par les entreprises et organismes installés au Centre spatial guyanais dans le périmètre défini au I. » ;
1° bis Après l'article L. 331-6, il est inséré un article L. 331-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 331-7. - Le président du Centre national d'études spatiales peut, par délégation de l'autorité administrative mentionnée à l'article 8 de la loi n° du relative aux opérations spatiales et pour toute opération spatiale, prendre les mesures nécessaires prévues au même article pour garantir la sécurité des personnes et des biens ainsi que la protection de la santé publique et de l'environnement. » ;
2° Après l'article L. 331-6, il est inséré un article L. 331-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 331-8. - Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application des dispositions du présent chapitre, notamment les conditions dans lesquelles le président du Centre national d'études spatiales peut déléguer sa compétence mentionnée à l'article L. 331-6. » – (Adopté.)
TITRE VI
PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
Article 22
I. - L'article L. 611-1 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf stipulation contraire d'un engagement international auquel la France est partie, les dispositions du présent article s'appliquent aux inventions réalisées ou utilisées dans l'espace extra-atmosphérique y compris sur les corps célestes ou dans ou sur des objets spatiaux placés sous juridiction nationale en application de l'article VIII du traité du 27 janvier 1967 sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes. »
II. - Non modifié. – (Adopté.)
TITRE VII
DONNÉES D'ORIGINE SPATIALE
Article 24
L'autorité administrative compétente s'assure que l'activité des exploitants primaires de données d'origine spatiale ne porte pas atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, notamment à la défense nationale, à la politique extérieure et aux engagements internationaux de la France.
À ce titre, elle peut, à tout moment, prescrire les mesures de restriction à l'activité des exploitants primaires de données d'origine spatiale nécessaires à la sauvegarde de ces intérêts. – (Adopté.)
TITRE VIII
DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES
Article 28
L'article L. 331-2 du code de la recherche est complété par un f, un g et un h ainsi rédigés :
« f) D'assister l'État dans la définition de la réglementation technique relative aux opérations spatiales ;
« g) D'exercer, par délégation du ministre chargé de l'espace, le contrôle de la conformité des systèmes et des procédures mis en œuvre par les opérateurs spatiaux avec la réglementation technique mentionnée au f ;
« h) De tenir, pour le compte de l'État, le registre d'immatriculation des objets spatiaux. » – (Adopté.)
Article 30
La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises. – (Adopté.)
M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.
M. Jacques Gautier. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les votes qui viennent de se dérouler montrent que nous sommes tous conscients qu’il était temps pour la France de posséder sa propre législation en matière spatiale, digne de son rang de puissance spatiale mondiale et de sa première place au niveau européen. Vous l’avez rappelé, madame le ministre.
L’espace représente à l’évidence un objectif stratégique pour notre pays, étant à la fois un outil de développement économique et une composante essentielle pour son autonomie de décision et d’action.
L’explosion du marché des télécommunications et de la télévision par satellite et le formidable succès des lanceurs Ariane ont fait augmenter considérablement la demande sur le marché des opérations spatiales.
En outre, la politique d’ouverture du Centre spatial guyanais à des lanceurs originaires de nouveaux pays, à partir du premier semestre 2009, rend d’autant plus nécessaire la mise en place d’un cadre national applicable à l’ensemble des situations.
L’espace s’impose aujourd’hui indiscutablement à tous, décideurs ou non-décideurs, et les citoyens en sont largement convaincus.
Cette loi spatiale française est donc aujourd’hui essentielle.
Je tiens à saluer l’important travail accompli par notre collègue Henri Revol, rapporteur de ce projet de loi, au nom de la commission des affaires économiques. (M. Roger Romani applaudit.) La très grande compétence que nous lui connaissons a permis d’aboutir, après les améliorations apportées par chaque assemblée, à un texte équilibré, qui ne peut que recevoir l’assentiment de l’ensemble des membres du groupe UMP.
Je veux aussi vous donner acte, madame le ministre, de votre engagement personnel fort sur ce projet de loi et de votre sens de l’écoute et de la concertation, qui a permis d’enrichir ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l’unanimité des présents.
11
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 27 mai 2008, à seize heures et le soir :
Discussion du projet de loi (n° 288, 2006-2007) relatif à la responsabilité environnementale (urgence déclarée).
Rapport (n° 348, 2007-2008) de M. Jean Bizet, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à seize heures.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD